QUESTIONS
DIPLOMATIQUES ET COLONIALES
LES AFFAIRES MACÉDONIENNES
Les lecteurs des Questions connaissent déjà les données du problème macédonien : elles ont été clairement présentées par M. René Henry dans les numéros du 15 janvier et du 1er février. Nous nous proposons aujourd'hui plus particulièrement d'examiner quelle peut être, en cette affaire, la politique la plus propre à sauvegarder à la fois les intérêts des populations macédoniennes et la paix de l'Europe, et de montrer, à la lumière des Livres jaunes récemment publiés par notre ministère des Affaires étrangères et des événements survenus dans les dernières semaines, ce qui a été fait dans la voie ainsi définie.
Théoriquement, le problème macédonien comporte quatre solutions : séparation d'avec la Turquie et annexion en bloc à l'un des Etats chrétiens des Balkans; — démembrement et rattachement des diverses fractions aux Etats balkaniques correspondants ; — autonomie ; — maintien sous la domination ottomane, mais introduction dans le régime politique de réformes qui rendent cette domination supportable aux populations chrétiennes.
Solutions théoriques, avons-nous dit; car, pour quiconque est au courant de la situation politique dans les Balkans, la première apparaît immédiatement comme inacceptable. Si l'Europe, au lieu d'assumer la charge de faire, un peu malgré eux, le bonheur des peuples balkaniques, leur laissait les coudées franches et assistait, impassible, aux luttes des nationalités adverses, il est probable que tôt ou tard l'une d'elles, la nationalité bulgare, réussirait à imposer sa domination aux autres et à gouverner un jour tout le Nord de la péninsule, en absorbant successivement la Macédoine, la Thrace, la Serbie, et même, dans un avenir plus éloigné, l'Albanie et le Monténégro. Entre tous le peuple bulgare paraît posséder la vitalité nécessaire pour jouer dans les Balkans le rôle rempli jadis en Allemagne par le peuple prussien, et agglomérer, bon gré mal gré, en une
QUEST. DIPL. ET COL. — t. XV. — N° 146. — 15 MARS 1903. 22