L'IMPRESSION 101
ties, en un mot colorer l'impression, ce qui est utile chaque fois qu'on imprime du dessin, et ce qu'on n'obtiendra qu'avec une encre un peu ferme, et pas du premier coup. Il n'est pas rare qu'une planche au crayon ne soit réellement au point, même avec un excellent imprimeur, qu'après le tirage d'une quarantaine d'épreuves.
De ce qu'on accentue l'encrage en appuyant sur le rouleau, — ce qu'il ne faut pas confondre avec rouler lourdement, — il en résulte que lorsqu'on dispose une pierre sur le chariot de la presse on doit, autant que possible, placer la partie la plus chargée de travail en avant, bien à portée de l'imprimeur. Il se rendra mieux compte de l'effort qu'il fera, les bras à demi repliés, que s'il est obligé d'appuyer sur le rouleau les bras étendus, surtout si la pierre présente une certaine surface.
Un dernier détail en ce qui concerne l'encrage. Les rouleaux, quelque bien confectionnés qu'ils soient, présentent toujours du côté de la couture un léger défaut. Si cette ligne de couture, à chaque révolution du rouleau sur la pierre, portait à la même place, on aurait à l'épreuve ce qu'on désigne sous le nom de « coup de rouleau », c'est-à-dire une ligne d'un autre ton. On l'évite en tournant le rouleau de façon à faire chaque fois varier le point de contact de cette ligne avec la planche, et on use de la même précaution quand on roule le rouleau sur la table à noir pour le charger d'encre.
Le bon imprimeur ne réussit pas toujours comme il veut, et quelquefois les difficultés semblent s'accumuler à plaisir sur une planche dans le cours du tirage. Le choix de la pierre, la qualité de l'encre, la température du lieu Ou l'on travaille, la préparation trop forte ou trop faible de la planche sont autant de causes dont il faut savoir prévenir les effets, ou tout au moins ne pas les laisser s'accentuer sans y porter remède. C'est affaire au discernement, à l'expérience de l'ouvrier el à l'attention qu'il portera à son travail.
Lorsque la planche tend à se couvrir d'un voile, précurseur de l'empâtement, c'est que la pierre est irrégulière de pâte, trop tendre ou mal préparée. Dans le premier cas, elle ne fournira jamais un bon tirage; dans les deux autres cas, il faut bien la dégager au rouleau et employer une encre plus forte. Si le voile persiste et s'accentue, il ne faut pas attendre l'empâtement : on enlève à l'essence, on encre à l'encre grasse et on prépare légèrement avec le mélange acide et gomme. Si le voile reste faible, quelques gouttes d'un acide végétal dans l'eau de mouillage, en entretenant la préparalion de la pierre, le feront disparaître et empêcheront qu'il ne se renouvelle; mais il faut se méfier de cette acidulation continuelle, quelque faible qu'elle soit, la solidité de la planche pourrait en souffrir. L'ouvrier met, dans le creuset qui contient l'eau de mouillage, du vin blanc, de la bière, du vinaigre, un peu de noix de galle, un débris de cigare, etc. : c'est toujours un acide végétal à faible dose qui agit, acide acétique, acide gallique, acide tannique, etc.
Lorsque la température de l'atelier est trop élevée, ou qu'il y règne quelque courant d'air, la régularité du mouillage en souffre; c'est encore une cause qui prédispose la pierre à prendre le noir en dehors des traits.