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Notice complète:

Titre : Bulletin de la Société des sciences historiques et naturelles de la Corse

Auteur : Société des sciences historiques et naturelles (Corse). Auteur du texte

Éditeur : Ve Ollagnier (Bastia)

Date d'édition : 1924

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32724456z

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32724456z/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 19173

Description : 1924

Description : 1924 (A44,N457)- (A44,N460).

Description : Collection numérique : Fonds régional : Corse

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5731885p

Source : Bibliothèque municipale de Bastia

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 27/12/2010

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BULLETIN

DE LA

SOCIÉTÉ DÈS SCIENCES

HISTORIQUES & NATURELLES

DE LA CORSE

SOIS If l litE

I. Liste des Sociétaires au 1er janvier 1924. . II. Un Corse, d'autrefois, par le général COLONNA DE CIDVELL1NA

CIDVELL1NA gravure. 1 ï. Volpaiola, par l'abbé GABRIELLI,

IV. . Notes bislor'ijues sur Saini-Fiortnt, par M. FUMAROLI. V. L'histoire du (.ap-Cvrse de M. Piecioni, par M. A, AMBROSI. XI Les rapports de Constant sur h Corse pi ridant la Restauration,

'-. . . par M. E. FRANCESCHINI (suite;.

BASTïA

iMrr.lMElUE C. P.AGGl

1924


LISTE

rie çtuelcues: Ouvrages publiés par la Société

AUGMENTATION TEMPORAIRE DE 50 % , (. ' 1—"~ '"■ ' . "■ - "■ '. ...'.-

Chronique orignale de Giovanni délia Grosso, et de Monte ggiani,

'-"■' publiée par M. -l'abbé LETTERON, 548 p . :. ., ... - 6 fr.

M.emorie del Padrc•' Bonfigiio Guelfucci, dal 1729'air 1764, i.vol.,

236 pp... ..- ., T.' :., . 2 fr.

\Dialogo'■':nominato- Corsica del Rma Monïignor Agostino fustiniano, «-

-'■-, ho-vo'di A''ebbio,'-texte zzrsn par M. DE CARAFFA, conseiller à la cour

d'armel. 7 volume 120 pp.. .. •■ ....'. ..' 1 fr.

Là Piève de Rogliano, étude régionale, par MM. MARTINI .. 4 fr.

Corsica, par Greg'orovius, traduction de M. P. LUCCIANA, 2 vol., 262 'et .

. .. 360 pp., . ..' . . .. \.-\ ..' 5 fr.

P.ratica delli Capi Ribelli • Corsi giustiziati nel Palasso Criminelle '7

' Maggio 1746).. Documents extraits des archives de Gênes, Texte revu et anrtoté par M. DE CARAFFA conseiller, et MM. ..LUCCÏANA frères, professeurs. 1 vol. 420 pp... .. .. .... .. .. ..... 4 fr.

Pr attisa Mànualc del dottor Pictro Morati di Muro. Texte revu par

M. V. DE CARAEFA, deux vpl., 354 et 516 pp S fr.

Y La Corse, Co'sme Ier de Mé'dicis et Philippe II, par M. A. DE MORATI, ancien conseiller, 1 vol., 160 pp . .. .. 1, 50

La Guerre de Corse, texte latin d'Antonio Roccatagljata, revu et annoté par M. .DE ÇASTEI.LI, traduit en français par M. l'abbé LETTERON, 1 vol., 250 pp,.. .. .... ... ....' 2,50

Annales de Banchero, ancien Podestat de Bastia, manuscrit inédit, texte italien publié par M. l'abbé LETTERON, I vol., 220 pri... 2 fr.

Deux Documents. inédits• ;sur l'Affaire des ' Corses à Rome, , publiés 'A' "pair, "MM. L. et P. LTJCCIANA, 1 vol., 442 "pages.. .■ ..'.,:.."- : 4/fiC

.Deux; fisitesr pastorales, publiées par 'MM. PHILIPPE et. VINCENT DE '

ORAEFA, conseillers, 1 : vol., 240: pages. . .. '...- .i ..'.".'' ,-.' 2 fr/

Pièces et documents divers pour servir à l'Histoire de la Corsé pen-.' àànt la Révolution'Française, recueillis et publiés par M. l'abbé

, LETTERON, 3 vol., 428-464 et XXIV-338 pp. chacun... - ...."' ... 4 fr.

Procès-verbaux des séances du Parlement Anglo-Corse, du. 7 février nw.iû mai 1795, publiés par M. l'abbé , LETTERON, t vol., 739,.: PP— ••• ■-• ■• -;.'■••.■■■ ■- ■'; ...i,....' 7. fr...

Sampiero et Vannina d'Ornano, (1434-1563), par M. A. DE MORATI, 83 pp,,: ,. : ..'■ «.. .. .. .. ... ,.. 1 fr.

Correspondance de Sir Gilbert Elliot, Vice-Roi de Corse :avec le gouvernement Anglais. Traduction de M. SÉBASTIEN DE CARAFEA,avocat, r voL, 553pp.., ., .. .. •.. .... ., 5 fr.

Mémoires Historiques sur la Corse, par un Officier du régiment

\. de Picardie (1774-1777), publiés par M. V. DE CARAFFA, I.

roi-.!,: 266 pp.-. ..... .. ... ..' .. ... 2 fr.

Mémoires du Colonel Gio. I^orenso de P'etriconi (1730-1781"), publiés

■/par M. l'abbé LETTERON, I vol.,245 pp ... .'. ... 2 fr.

Pièces, et documents divers pour servir à l'Histoire - de la Corse pendant, les années de 1737-1739, recueillis et publiés par M. l'abbé LETTERON, 1 volume xiX-548 pp •.'.'■" ..-.'". . \ 5 fr.

■^a. Conspiration d'Oletta — 13-14 février 1769, parM. A* DE MORA;,

MORA;, 1 vol.,158, pp.. /. '.. .. ., .. .. .. ,. ,..:.. i ft. ;

Théodore.Ie?\ roi de Corse, traduction de. l'allemand dè.Varriaghen

..par M. PIERRE FARINOLE, professeur, 1 vol., iv-75.. ..... 1 fr.

.Doeufiiênts sur les troubles de Bastia ("/", 2 et '3 juin. 1791)f pu';, bliésApar M. A. GACNANI, I vol., 117 pp. .. . ,.,., .. ./ i fr.

Pièces et documents divers pour'servir à l'Histoire de .la Corse,

; :JpeHiavt les années 1790-1791, recueillis aux. archives du minjsV tère '^e-la guerre, et publiés par M. l'abbé LETTERON, 1 Vol.',.' Xil-338 pp... .... .... ... .... .. ., i..-,.. 3 fr.




LISTE DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ ET DES SOCIÉTÉS CORRESPONDANTES

au 1er Janvier 1»3 4

MEMBRES RESIDENTS

BASTIA

Agostini César-Auguste, rue de l'Opéra, 16.

Ajaccio, négociant, place St Nicolas.

Albertini, commissaire de police.

Altieri François-Marie, villa des Capannelle.

Ambrosi-R. Ambroise, professeur agrégé au lycée de Bastia, secrétaire général de la Société, boulevard Paoli, 19.

Andreani, instituteur, rue Campanari, 3.

Angeli, Président de Chambre honoraire, boulevard du Palais.

Battesti, fondé de pouvoirs de la Recette des finances, boulevard Paoli, 2. v /"/""


ï£

Benelli Georges, docteur, sous-inspecteur des services

d'hygiène, boulevard Letteron, 16. Bibliothèque pédagogique de l'arrondissement de Bastia, chez M. l'Inspecteur primaire, boulevard de

Toga. 'Bibliothèque du lycée de Bastra. Borghetti, professeur au Lycée. Bourgeois Joseph, avocat, rue S' François. Bourgeois Toussaint, docteur, bd Letteron, 14. Chiarisoli Pierre, étudiant es-lettres, bd du Palais,5. Canazzi, négociant, boulevard Letteron, 1. Casanova, commandant, boulevard Letteron, 20. Gharli Louis, ingénieur, boulevard Paoli, 39. Cercle de la Méditerranée, (Trésorier du) rue Miot. Chiappe, agenfrvoyer, rue de l'a Banque, 7. Colombani, avocat à 'la Cour d'Appel, conseiller gral. Costa, greffier du Tribunal de commerce. Costa, conseiller à la Cour d'Appel, bd Letteron, 18. Costa-Màrini, juge suppléant à la Cour d'Appel de

Bastia. Dardy, avoué, suppléant du juge de paix, boulevard

Letteron, 3. Donati, abbé, vicaire à Saint-Jean. Donati, professeur d'agriculture, rue du Lycée, 7. Dumoulin, conseiller à la Cour d'Appel, rue de

l'Opéra, 5. Dussol Armand, pharmacien de lr 0 classe, boulevard

Paoli, 17. Falbiani, commandant, rue Saint-François, 3. Falcucci, professeur agrégé au Lycée. Fantauzzi Gaston, banquier, conseiller général, boul.

Paoli. Ferrandi, docteur, rue Saint-Jean. Flach,ancien gouverneur de la principauté de Monaco,

Président de la Société, nie Saêint-Angelo. Franchebti, docteur, boulevard Letteron, 12.


m

Franzinii, professeur honoraire, Bd Paoli, 35.

Fumaroli, directeur d'école, montée Saint-Antoine.

Gauger, avocat général, rue du Lycée, 12.

De Gentile, ancien avoué, montée Sainte-Claire.

Ghilini, substitut du procureur, général,archiviste de la Société, boulevard A. Gaudin, 6.

Gianmarchi, abbé, aumônier de l'Hospice civil.

Giordani Michel, boulevard. Paoli, 27.

Girolami, capitaine d'artillerie, rue de l'Opéra, 18.

Grassi, ingénieur des Travaux publics.

Gregory frères, banquiers.

Grimaldi, juge d'instruction,

Guitton Raoul,négociant, trésorier de la Société boulevard Paoli, 31.

Madame Hollande, Directrice d'école honoraire, boulevard Letteron, 2.

Leca,président du Tribunal civil,villa des C .;; "ajlle.

Lepidi, commandant, place Saint-Nicolas, w.

Leschi, chanoine, curé des Capannelle, vice-p:/sident de la Société. . .

De Limpérani Fernand, ancien sous^préfet, boulevard Paoli.

Martin, Premier président de la Cour, promenade des quais.

De Mari, substitut du procureur de la République.

Maurel, général gouverneur de la Corse.

Martini, conseiller à'la Cour d'Appel.

Mattei François, négociant, place Saint-Nicolas.

Mattei, directeur de l'Ecole de commerce, rue Salvator Viale.

Morazzani-R. Chanoine, ■ archiprètre de Sainte-Mare.

Moretti, photographe, boulevard Paoli, 19.

Mingalon, architecte, boulevard Letteron, 4.

Mingalon Jacques, notaire, boulevard Paoli.

Morelli Antoine, négociant, rue Napoléon.

Moretti, avocat à la Cour d'Appel, conseiller général, boulevard A. Gaudin.


IV

Musso, ancien président du tribunal de commerce, boulevard du Palais, 7.

Napoléon! Martin, boulevard Albert lor, 15.

Orenga Charles, négociant, place Saint-Nicolas.

Orenga Joseph, ancien président du tribunal de commerce, place Sanl-Nicolas.

Olivieri, adjudant au centre d'éducation physique.

Orsatti Jacques,professeur agrégé au lycée de Bastia, boulevard Paoli, 18.

Orsini, commis des postes et télégraphes.

Orsinj, docteur, conseiller général.

Ottavi, maître d'internat au Lycée.

Pasqualini Pierre, boulevard Albert 1".

Pierangeli Henri', député de la Corse, place SaintNicolas.

Pitti-Femindi François, docteur, directeur des services de l'Hygiène, boulevard Paoli.

Poggi, négociant, rue Napoléon.

Ponzevera, abbé, rue Saint-François, 3.

Puccinelii, docteur, rue des Jardins.

Ramolli, ancien conseiller g"', place Saint-Nicolas.

Ramelli Auguste, notaire, boulevard Paoli, 35.

Romagnoli, mécanicien-horloger, boulevard Paoli.

Sari Emile, docteur, sénateur-maire.

Monseigneur Sisco, curé de Saint-Jean.

Thiers Fortuné, ancien président du Tribunal de commerce,, boulevard du Palais, 8.

Thiers Joseph, docteur, boulevard du Palais, 7.

Thiers Sauveur, négociant, boulevard du Palais, 7.

Tomasi, avocat, ancien bâtonnier de l'Ordre.

Valontini, juge de paix, boulevard du. Palais.

Vial, conservateur des Hypothèques, boulevard Albert 1er.

Viale Alexandre, bijoutier, boulevard Paoli, 25.

Zatlera, abbé, bibliothécaire de la ville de Bastia.

Zuccarelli, docteur, boulevard Paoli, 31.


CORSE

Ambrosini, juge de paix honoraire, à Speloncâto.

Arrii Léonce, juge de paix à Sainte Lucie de Tallano.

Battesti, juge de paix à Oletta.

Battesti Pierre, rentier à Barretali.

Battistini Dominique, directeiur honoraire des douanes à Erbalunga.

Battistelli, professeur en retraite à Sarrola-Carcopino.

Battesti-Carlofti, docteur, à Corte.

Buochberg Siméon de, notaire, maire de Corte.

Benigni, propriétaire à Rogliano.

Behr, juge de paix à Santo Pietro di Tenda.

de Bernard,! Xavier, viticulteur à Patrimônio.

Bibliothèque municipale d'Ajaccio.

Bibliothèque de l'Ecole normale d'instituteurs à Ajaccio.

Bibliothèque pédagogique de Calvi.

Bibliothèque pédagogique de Corte.

Bibliothèque pédagogique de Sartène.

Bonifacio André, instituteur à Rapale. °

Carbone L., rue de la Préfecture, 2, à Ajaccio.

Carlotti, président honoraire du Tribunal de Cochinchine, à Poggio de Venaco.

Casanova, Monseigneur, vicaire général à Ajaccio.

Casanova, curé de Ucciani.

Ceccaldi Jean Thomas, conseiller d'arrondissemnt à Ota.

Cesarini, Chanoine, archiprêtre de Corte.

Colombani Victor,avocat et maire de Ville de Paraso.

Colonna d'Anfriani, juge d'instruction à Calvi.

Cûlonna de Leca, rentier à Lumio.

Costa-Ange, payeur particulier aes finances en retraite à Corte.

Costa Louis, notaire à Cognocoli, par Pila-Canale.

Colonna, juge de paix à Bocognano.


VI

Coti César, archimandrite de la colonie de Cargèse.

Cristofini, directeur d'école à Calvi.

Degiovanni Henri, docteur à bartène.

Delfini, ingénieur des travaux publics à Ghisoni.

Durazzo, avocat h Sartène.

Ermoni, abbé, curé d'Omessa.

Fabiani, huissier à Calacuecia.

Flori, professeur au collège d'Ajaccio.

Folacci Alphonse, maire d'Eccica-Suarella. .

Franceschi, conseiller général et maire de Luri.

Franceschi, docteur à Centuri.

Gabrielli Télémaque, abbé, curé de Volpajola.

Gafi'ory Jacques, juge de paix à Bastelica.

Gavini, juge de paix à Loreto de Casinca.

Giovannetti', juge de paix à Tomino.

Giudicelb Léon, procureur de la République à Calvi.

Giuliani, notaire, suppléant de la justice de paix de

Sainte Lucie de Tallano. Godde François, notaire à Ajaccio. Grassi, Premier président honoraire à Gervione. Graziani, archiviste départemental, à Ajacico. Grimaldi, juge de paix à Olmi-Gapella. Grimaldi Vital, instituteur à Albertacce. Grisoni, suppléant du juge de paix à Balogna. Guelfucci, directeur du Pascal Paoli, h Corte. Guelfucci, professeur au collège de Corte. Guglielmi, sous-àngén/eur des L Ponts-et^chaussées, à

Corte. Italiani, professeur au collège d'Ajaccio, conseiller

général. Istria Paul, cours Napoléon, 1, à Ajaccio. Lucchini Pierre, docteur, à Sartène. Luciani, juge de paix à Calenzana. Luciani, industriel à Francardo.

Luceiardi, directeur d'école à Santo Pietro di Tenda. Luiggi, juge de paix à Nonza. Lupi Dominique, instituteur à Corbara.


vn

Luzy, propriétaire à Speloncato.

Malaspina Ambroise, château de la Costa, par Belgodère,

Belgodère, pharmacien à Corte. Maranînchi, suppléant du juge de paix à Moncale

(Calenzana). Marcaggi, bibliothécaire municipal, cours Napoléon,

48, à Ajaccio. Marchi, professeur au collège d'Ajaccio, boulevard

Roi Jérôme, 15. Mariani abbé, curé de Riventosa. Marini, juge de paix à Calvi. Mariotti, juge de paix à Campile. Martini, instituteur à Rogliano. Massoni Etienne, propriétaire à Evisa. Masson, ingénieur en chef de la Corse. Mattei-Torre, propriétaire à Volpajola. Montirossi Etienne de, conseiller à la Cour d'Appel

de la Guyane, à Palasca. Moraiti-Gentile François! .de, (directeur honoraire du

contentieux du gouvernement égyptien, à Murato. Morani, juge de paix à Pigna (Ile-Rousse). Morazzani-P^ietri, curé-doyen à Nonza. Muglioni, ancien conseiller de préfecture, propriétaire à Venzolasca. Mûselli, juge de paix à Salice. Natali, instituteur à Serra di Scopamène, conseiller

général. Nicolaï, juge de paies de Vescovato, à Ca'stellare de

Casinea. Nivaggioni Alphonse, instituteur, officier d'Académie,'

à Ajaccio . Orsini, juge de pa^ix honoraire, à Saint-Florent. Paganelli de Zicavo, propriétaire à Olmeta de Tuda. Pagunelli, commis-greffier à Sartène. Père Paolini, 0. F. M., couvent de Marcasso. Pellegrini, rentier à Rogliano.


vin

Pellizza., pnannacien de lrc classe à Corte.

Peretti délia Rocca, juge de paix à Sartène.

Peretti, instituteur à Oletta.

Pasqualini Ignace, propriétaire à Cognocoli, par Castineta

Castineta Morosaglia. comte Piazza, à Oletta.

Pietri Pierre, avocat au tribunal de Sartène. Pietri, greffier de la justice de paix à Giocatojo (la

Porta). Pietri, maire de Sorbollano. Poinsot, juge au tribunal de Sartène. Piras, juge de paix, à Saint-Florent. Pompei Innocent, notaire à Quercitello. Porri, commandant, à Bastelica. Renucci, instituteur à Olmo (Campile). Ricci, archiprêtre à Calvi. Ricci Pierre, instituteur à Corte. de Roccaserra Ventura, notaire à Sartène. Rossi, directeur d'école à Ile-Rousse. Rossi, chanoine à Ocana. "Rossi, chef de bureau honoraire du gouvernement

d'Algérie, à Calvi. Salvini Jean, propriétaire à Santa Reparata de

Balagna. Santiaggi Antoine, professeur agrégé honoraire à

Corte. Sarrocchi, instituteur à Zuani, par Moïta. Savelli, curé-doyen de Brando. Savelli'François de Guido, à Corbara. Savelli, instituteur à Lama, près Pietralba. Monseigneur Simeone, évêque d'Ajaccio. Seta, docteur, conseiller général à Bastelica. Sialelli Hyacinthe, rentier à Corte. Sialelli, juge de .paix à Corte.

Simonetti-Malaspina, propriétaire à Ville de Paraso. Tessarech Xavier, administrateur honoraire, cheva-


IX

lier de la Légion d'honnejur, cours Grandval 28, à

Ajaccio. Tortoni, juge d'instruction, à Corte. Trani Pierre, propriétaire à Sartène. Trojani,abbé, curé d'Asco, ancien conseiller général.' Venturini, juge de paix à.Moïta. Vincensini, juge de pa'x à Vivario.

MEMBRES CORRESPONDANTS

FRANCE

Agostini, conseiller général, avocat général à SaintEtienne.

Ambroggi, président du tribunal à Dieppe, (SeineInférieure).

Ambrosi Mathieu, boulevard Raspail, 97, Paris Ve.

Ambrosi Joseph, direction des douanes au Tonkin.

Amicale corse de Cochinchine, à Saigon.

Battistini, ingénieur des constructions navales, ministère de la Marine à Paris.

Arrighi, officier d'administration principal de la justice militaire, à Loeuilly (Somme).

Arrighi de Casanova, secrétaire de la direction du préfet de police, rue de la Clef 44, Paris Ve.

Bartoli Alexandre, administrateur à Libreville (Congo).

Benielli Robert, avocat à la Cour d'Appel, cours du Parc à Dijon.

Bianconi, censeur des études au lycée de, Marseille.

Bidali, pharmacien à Bizerte (Tunisie).

Prince Bonaparte Roland,avenue d'Iéna 10,Paris XVIe

Bonifacio, professeur au lycée de Nice.

Brun, ingén'ieur des améliorations agricoles, boulevard Gambetta 44, Nice. >

Busquet Jacques, docteur en droit, rue Chevalier de Valdrômè 100, Casablanca (Maroc).


X

de Carbuccia (Madame),avenue d'Eylau 19,Paris XVI 0. de Casabianca Pierre, avocat général près la Cour

d'Appel de Paris, rue de Rennes 106, Paris VI'. Carlotti,service du contentieux à Saigon (Cochinchine). Carlotti Philippe, docteur en médecine, ancien interne des hôpitaux de Paris, boulevard Dubôuchage

27, Nice. Casanova Pierre, rue Pierre Charron 60, Paris V1I1". Cavigiioli Joseph, rue du Monl-Genis, Paris XVIIIe. Casta Emile, villa des Laurjiers, à Monaco. Ceccaldi, préfet de la Loire, à Saint-Etienne. Ceccaldi 1, inspecteur administratif des écoles, rue du

Renard 6, Paris IVe. Chobaut H., archiviste-paléographe, rue Chauffard 4,

à Avignon. Chuquet, professeur au collège de France, à Villemomble

Villemomble Clavel, publiciste, rue Saint-Lazare 43, Paris IXe. . Colombani, capitaine adjudant-major, à Philippeville

(Algérie). Colonna don Fabien, rue de la Chaussée d'Antin 22,

Paris IXe. Colonna d'Istria, receveur de l'enregistrement à Sèes

(Orne). Coty,industriel,sénateur de la Corse, avenue Raphaël

24, Paris XVIe. Courtillier Gaston, professeur agrégé au lycée de

Strasbourg (Alsace). Colonna de Giovellina, général, rue Saint-Louis 31,

Versailles. Campinchi, avocat,rue Clément Marot 16, Paris VIIIe. Casabianca, docteur à Hyères (Var). Champion Edouard, éditeur, quai Malaquais 5,

Paris VIe. Chiappe Jean, urecteur au ministère de l'intérieur,

avenue Bugeaud 51, Paris XVIe. Dary, abbé, rué des Açores 11, à Monaco.


XI

Dompietrini, rue d'Isly 3, Paris VIIIe.

Fontana Jean, secrétaire général de l'Office des pupilles de la nation, avenue de Paris 34, à Versailles.

Frasseto Sylvestre, avocat à Tunis.

Franceschi, sous-directeur du ministère des colonies, boulevard d'Inkerman 30, à Neuilly-sur-Seine.

Franchi docteur, directeur du service de santé du sud-algérien, à Alger .

Flach, procureur de la République, à Valenciennes.

Franceschini Emile, chef du secrétariat du syndic du Conseil municipal de Paris, rue Montrosier 14, Neuilly-sur-Seine.

Franceschini Jules, directeur administratif des travaux de Paris, avenue de Tourville 26, Paris VIP.

Franceschini Henril, . avenue de Tourville 26, à Paris VIP.

Giustmiani Antonio, directeur du mouvement artistique et littéraire,villa du Roule 10, Neuilly-sur-Seine.

Grimaldi Pierre, avenue Gourgaud 3, Paris XVIIe.

Godin Pierre, vice-président du Conseil municipal, rue Cambon 13, Paris.

Galeazzi,sous-intendant à Montpellier,rue du Jeu de Paume. 14.

de Giafferrd .percepteur 'honoraire, rue François Arago 18, Rouen.

Giro'larnil Jérôme, chef de bureau du cabinet du préfet de police, Paris VIIe.

Grisoni Martin, rue des Plantes 22, Paris XIVe.

Guasco, commis principal des douanes, à Haïphong, Tonkin.

Lamotte G.,sous-chef de bureau à la préfecture de la Seine, rue Berthollet 22, Paris Ve.

Landry Adolphe, député de la Corse, ancien ministre, vice-président de la Chambre,avenue du Square 4, Paris-Auteu'il.

Lanfranchi publiciste, rue du Château d'Eau 10, Paris Xe.


XH

Leca Philippe, publiciste, rue Monge 42, Paris Ve.

Leschi, proviseur au lycée d'Angoulème.

de Litardière René, docteur os-sciences, à Mazières

en Gâtine (Deux-Sèvres). Lucca, juge suppléant à Alais (Gard). Malaspina, juge d'instruction à Tonnerre. Mansion Jules, professeur agrégé au lycée Charlemagne,

Charlemagne, Martini, inspecteur primaire à rl anger (Maroc). Marsily Charles, docteur, rue des Tonneliers 53,

Marseille. Martinenghi,directeur d'usine, rue Ravan 29, Bourgla-Reine

Bourgla-Reine Monlaù, juge au tribunal de Roanne. de Moro-Giafi'erri, avocat à la Cour d'Appel, député

de la Corse, bd baint-Germain 209, Paris VIIe. Muracciole abbé, maison Sa;;nt Jean de Dieu, Saint--'

Barthélémy, Marseille. Orsatelli,procureur de la République à Vitré, Ille-etVilaine.

Ille-etVilaine. Jean, licencié es-sciences, préparateur au Muséum, rue des Charolais 2, Paris XII 0. Peraldi, lieutenant-colonel, rue Ménars fl, Paris IIe. Petrignani M., contrôleur-adjoint des domaines à

Mogador (Maroc). Philippe Louis, ingénieur, boulevard Pereire 188 bis,

Paris XVIP. Pietri-Guasco, directeur de la Banque du Rhin, à

Valenciennes. Pieri, juge à Sisteron. Pandori, contrôleur principal des Douanes, à Kotonou

Kotonou Piccioni, directeur des Archives au ministère des Af■ faires Etrangères, rue Bassano 1, Paris XVIe. ' Pietrantoni, boulevard Saint-Germain L0;), Paris VIIe. Pietri, La Radieuse, 24 b'd d'Italie 24, Monte-Carlo.


xm

Pinelli Noël, commissaire principal de la marine,rue Ernest Cresson 20, Paris XIVe.

Robaglia Barthélémy, capitaine de frégate, conseiller municipal de Paris, rue Soufflot 15, Paris VIe.

Roy Ange, receveur particulier des douanes k Arzeu (Oran).

Sella L., ingénieur-industriel,avenue de Suffren 42 bis, Paris XVe.

Seraffini, inspecteur primaire à Bizerte.

Serveille, principal du collège d'Antibes.

Seta Barthélémy, secrétaire-chef des bureaux de la mairie du IIe arrd', Paris IIe.

Stechert, libraire, rue de Condé 16, t aris VIe.

Stefam, docteur, ancien interne des hôpitaux, boulevard Victor Hugo 40, Nice.

Susini, Office centralisateur, avenue de la Victoire 35, Nice.

Terquem, îibraire, rue Scribe 19, Paris IXe.

Thiers Joseph, dr, chef de cliniqlue des hôpitaux de Paris, rue Sédillot 10, Pars VIIe.

V.ïllat Louis, professeur à la Faculté des Lettres de Besançon.

Vincenti, administrateur des services civils en Indochine, boulevard Gia-Long 34, Hanoï (Indochine).

Vinciguerra Louis, Collège universel d'Aley (Liban).

Vittori, géomètre du cadastre,à Hanoï-Hadong (Tonkin).

Venturini, professeur au collège Chasseloup-Laubat, à Saigon.

Zigliara, chef de bureau à la préfecture de la Seine, rue Montgallet 32, Paris XIIe.

ÉTRANGER

Gauro, greffier-conservateur des hypothèques du tribunal mixte à Alexandrie (Egypte).

Pitti-Ferrandi, avocat, conseiller général, domaine de Cenaia, par Crespiina (Italie).


XIV

Pietri, substitut du conseiller khédivial au Caire

(Egypte). Sénat de Rome, Italie (Bibliothèque). Valéry Domingo, négociant à Giudad-Bolivar, par

Trinidad, (Venezuela),

SOCIETES CORRESPONDANTES

j

Istituto storico lombardo à Milan (Italie) .

Società romana di storia patria à Rome (Italie).

Società ligure di storia. patria à Gènes (Italie).

Società Piemontese di archeologia e belle arti, via Napione 2, à Turin (Italie).

Archivio storico lombardo,Castello sforzesco,à Milan.

Academy of natural sciences of Philadelphia (Etats'

(Etats'

Office of the Lioyd Library à Cincinnati (Etats-Unis).

Smlithsonian Institution à Washington (Etats-Unis).

Museo de Istoria natural à Montevideo (Uruguay).

Société neuchâteloise (de géographie, quai du Mont Valran 2, à Neuchâtel (Suisse).

.Société des Bollandistes à Bruxelles, boulevard SaintMichel 22, (Belgique).

Annales du musée Guimet (Paris).

Bibliothèque de l'Université de Lyon.

Bibliothèque de l'Université d'Aix en Provence.

Revue Bourguignone, faculté des Lettres de Dijon (Côte d'Or).

Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne, à Auxerre.

Société d'études scientifiques et archéologiques de Draguignan.

Société archéologique du midi de la France, à Toulouse.

Institut de géographie alpine de la faculté des Lettres, à Grenoble (Isère).


XV

Société des sciences de Seine-et-Oise, à Versailles. Muséum d'histoire naturelle, à Paris. Union des sociétés savantes de Lwow, (Léopold) Pologne.

EXTRAIT DU PROCÈS-VERBAL

Les 3 et 31 octobre, les membres de la société, réunis en assemblée, après avoir accueilli la démission de M. de Caraffa, président, et exprimé des regrets de cette aécision, ont procédé au renouvellement de leur bureau et au remplacement des membres du comité de direction, décédés ou démissionnaires.

Le Bureau et le Comité de direction se trouvent ainsi constitués.

Bureau :

PRÉSIDENT : M. Flach, ancien gouverneur de la principauté de Monaco, procureur général honoraire

VICE-PRÉSIDENT : M. le chanoine Leschi.

SECRÉTAIRE : M. A. Ambrosi-R., agrégé de l'Université, professeur au lycée, membre du Comité des travaux historiques.

SECRÉTAIRE-ADJOINT : M. Chiarisoli, étudiant es-lettres. t

TRÉSORIER : M. R. Gi «ton, négociant.

ARCHIVISTE : 'M. Ghilini, substitut du procureur général.


XVI

Comité de Direction :

MM. le commandant Casanova ; Fùmaroli, directeur d'école ; Gregory Joseph, banquier ; Leca, président du tribunal civil ; de Limpérani Fernand ; Orsatti, agrégé de .l'Université ; abbé Ponzevera ; Ramëlli Auguste, notaire ; Romagnoli, horloger ; Sari, docteur, sénateur-maire ; Thiers Fortuné, ancien président du tribunal

de commerce ; docteur Zuccarelli ; abbé Zaittera, bibliothécaire de la ville de

Bastia.


BULLETIN

DE LA

SOCIÉTÉ DES SCIENCES

HISTORIQUES & NATURELLES

DE LA CORSE

s on M Alita

I. Liste des Sociétaires au icr janvier 1924. II. Un Corse d'autrefois, par le général COLONNA DE GIOVELLINA

III. Volpaiola, par l'abbé GABRIELLI.

IV. Noies historiques sur Saint-Florent, par M. FUMAROLI. V. L'histoire du Cap-Corse dcM. P/c«'o«/',par M. A. AMBROSI.

VI. Les rapports de Constant sur la Corse pendant la Restauration, par M. E. FRANCESCHINI (suite;.

BASTIA IMPRIMERIE C. PIAGGI

1924


m*


Un Corse d'autrefois

Il s'agit de François Colonna de Giovel'lina — Don Francesco, comme on l'appelait avec une déférence justifiée — un patriote qui malgré sa modestie joua un rôle important dans son pays, et dont un descendant, un déraciné comme dirait Mrurice Barrés, a gardé" pieusement le souvenir, et grâce à quelques pièces échappées aux. causes multiples de destruction, va essayer de faire revivre la lointaine figure qui mérite de ne pas être oubliée.

Cela rappellera en mêtae temps une époque curieuse, à cheval sur deux siècles, et qui connut des vicissitudes' _ bien ' diverses : domination, génoise, ancien régime, Révolution, occupation anglaise d'une part, Empire et les deux Restaurations de l'autre.

Mais pour, réaliser ce but et produire un travail réellement complet il aurait fallu pouvoir se baser sur une documentation plus abondante, et malheureusement ce n'est pas le cas.

Aussitôt après l'annexion de la Corse, le gouvernement de Louis XV avait prescrit une réglementation; rigoureuse pour procéder à la reconnaissance de l'origine des différentes . familles qualifiées nobles,


UN CORSE D'AUTREFOIS

mais les autorités génoises avaient saisi ou brûlé bien des archives privées. Dans l'introduction à son « Armoriai Corse » p. xxi, l'érudit et regretté Colonna de Cesari Rocca écrivait : « On conçoit que dans di. semblables conditions il n'était point aisé aux familles corses de prouver leur filiation depuis 1570 au moins ». Aussi le Roi, en présence de ces difficultés, avait-il prévu des dérogations bienveillantesà une règle trop absolue, pour la preuve de deux cents ans notamment.

Outre la disparition des pièces il existait, et il existe peut-être encore, une autre cause de lacunes. Comme l'a encore écrit, avec une sévérité méritée, l'homme de lettres si distingué que nous venons de citer (même ouvrage p. xxi) : « Les titres qui, réunis, auraient permis à leurs possesseurs de fournir un dossier complet se trouvaient répartis entre plusieurs membres de la famille et celui qui briguait quelque honneur travaillait secrètement à l'acquérir, n'osant s'adresser à un parent plus riche, ayant des droits plus directs ou mieux favorisé, " dont il aurait pu éveiller l'attention. Aussi le nombre ce ceux qui virent relever leurs titres fut-il fort restreint ».

On rendra cette justice au signataire qu'il ne mérite pas ce reproche. 'C'est avec plaisir, au contraire, qu'il donne ici communication du peu qu'il possède, heureux s'il peut trouver des imitateurs.

Nous sommes en 1769 ; la conquête de l'île est encore toute récente et il faut y assurer l'ordre et la sécurité publique. Le commandant en chef prend l'initiative de créer des « inspecteurs ». Don François, né vers 1725 à Prato, dont lîl est le principal notable, et qui jouit à un haut, degré dans la p;ève de


■GÉNÉRAL COLONNA DE GlOVELLINA

Giovellina de l'estime universelle, se trouve naturelment désigné comme titulaire d'une de ces inspections nouvelles et voici, en traduction, une lettre qu'il reçut à cette occasion :

Corte, le 2 ndvembre 1769. — J'ai l'honneur, Monsieur, de vous envoyer sous ce pli quatre exemplaires d'une ordonnance du Roi, concernant le port d'armes, qui confirme celle que j'ai fait publier cur le même objet.

Je vous prie d'en faire afficher un dans chaque église paroissiale de votre ressort (1) et de m'accuser réception des dits exemplaires.

J'ai l'honneur d'être parfaitement, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur (2).

Le comte de Vaux.

Comme adresse : Monsieur de Colonna, inspecteur général a Giovellina.

La création de ces emplois d'inspecteur avait dû évidemment, et pour aller au plus pressé, être improvisée par le hamVcommandement. Plus tard, comme Renucci nous l'apprend (3), un décret royal définit ces inspections et en précisa le rôle : « Les « améliorations cependant se succédaient en Corse,et « le cabinet de Versailles mettait en oeuvre tout ce « qui pouvait contribuer à la prospérité du pays. Au « mois de mai 1771 paraissait l'édit sur la juridiction « et le bon gouvernement des municipalités. D'après « cet édit le Roi choisissait aans les rangs de la no« blesse un inspecteur pour chaque province afin de « surveiller l'administration d'ordre économique et les

(i) Sans doute celles de Castiglione, Piedigriggio, Prato et Popolasca.

(2) Les mots en italique sont en fiançais dans l'original.

(3) Storia di Cors'wa, 1 p. 123 et pages suivantes.


UN CORSE D'AUTREFOIS

« opérations des podestats majeurs des pièves, et cel« le des podestats municipaux particuliers aux cora« munes.

« Chaque piève avait un podestat majeur qu'on « élisait chaque année dans les assemblées de pièves « composées respectivement du podestat,des pères du « commun,des curés et des nobles. Il était choisi par« mi les personnes instruites et distinguées et exer« çait dans la piève les mêmes fonctions que l'inspec« t-eur dans la province ».

On vient de voir l'importance de ces fonctions d'inspecteur. D'autres plus importantes encore allaient' être données à Don François qui, dans l'intervalle, de concert avec son frère l'abbé Félix,avait, par un acte de notoriété du 16 janvier 1770, f-ùt de nouveau authentiquer et enregistrer, devant Me Gio Decio Nasica, sa généalogie remontant,d'après une tradition, commune à toutes les familles colonnèses, au légendaire Ugo Colonna, plus sérieusement aux Biancolaoci, seigneurs de Bisogeni et de Capolla, dans les temps féodaux, et enfin à la maison d'Omessa (1), une des plus puissantes familles caporaliennes de l'en-deçà-des-monts, célèbre aux xive et xv° siècles par ses trois prélats guerriers Jean-Padovano, Ambroise, et Antoine-Natalino, respectivement évêques de Mariana en 1389, d'Aleria en 1412, et d'Accia en 1451 (2). Cet acte de notoriété ne faisait

(i) La maison d'Omessa s'est subdivisée en 3 branches : les Arrighi, les Colonna-Ceccaldi et les Colonna de Giovellina.

(2) Don Angelo, Francesco (1626-1686 ?) a énuméré sa généalogie dans cet important manuscrit : Colonna sagra chronologie! degl'uomini illustri di santità e dig'nith del regno di Corsica.


GÉNÉRAL COLONNA DE GIOVELLINA

d'ailleurs que reproduire, en le mettant au point pour les dernières générations, celui que son ancêtre Don Ange-François Colonna, historien et poète, avait fait établir le 22 décembre 1662 par devant le notaire Casanova, authentiquer par le gouverneur génois Augustin Merelli et enregistrer à Rome en 1669 à la Chambre des notaires capitolins, comme on peut le voir dans l'Armoriai corse et avec plus de détails dans l'ouvrage si connu de Salvini : Giustitificazione delta rivoluzione di Corsica, p. 589-590).

Cette date de janvier 1770 n'est ni fortuite ni arbitraire ; elle est la conséquence de la situation politique du moment. La Corse incorporée à la France ayant été déclarée pays d'Etats et les premières élections allant avoir lieu, il fallait se hâter de faire ses preuves et de réaliser préalablement les conditions d'éligibilité.

Grâce à M. A. de Morati, le Bulletin de notre So-, ciété des Sciences a eu occasion de publier en 1896 les procès-verbaux de cette première assemblée qui, suivant l'heureuse expression de M. le professeur Ambrosi (1), scella l'accord définitif entre la nation corse et la France.

C'est ainsi que nous connaissons les noms des députés élus dans les dix provinces qu'il y avait alors (2). Ce furent pour celle de Corte : Sylvestre Gabrielli, piévan de Rogna et Félix Battiistini, pdévan de Castello, comme députés ecclésiastiques ; PaulMarfie Rossi, François Colonna et Xavier Grazietti, comme députés nobles ; Antoine-François Colonna, Jean Defendini, et Ange-Louis Cremona comme députés du tiers-état.

(i) %evuede la Corse de 1920, n° 1.

(2) Celles d'Ajaccio, Aleria, Balagné. Eastià, Calvi, CapCorse, Corte, Nejbbjo, ^artène et Vico.


UN CORSE D'AUTREFOIS

Voici, en traduction, la lettre de convocation reçue à cet effet par don François. On en trouvera plus loin la reproduction photographique.

Baslia, le 15 août 1770. -*- Ayant été nommé, Monsieur, pour vous rendre à la Consulte générale et prendre rang en votre qualité de député noble de la province de Corte et, conformément aux ordres du Roi, je vous donne avis que j'ai fixé le jour de l'ouverture pour le 15 du mois de septembre prochain et qu'il convient néanmoins que vous soyez immanquablement rendu pour le douze à Bastia, afin de pouvoir, le jour du treize, vérifier l'arrivée de tous Messieurs les députés, et prendre les dispositions nécessaires pour l'ouverture de l'assemblée.

J'ai l'honneur d'être très parfaitement, Monsieur, votre très dévoué et très obligé serviteur.

Le comte de Marbeuf.

Adresse en français : A M. François Colonna, à Giovellina.

En 1782, nous retrouvons Don François commissaire de junte. Par application d'un édit de son prédécesseur, Louis XVI le nomme membre de la junte de Caccia, et lui fait parvenir le brevet suivant :

Brevet de commissaire de junte

pour le sT don Francesco Colonna

Aujourd'huy vingt deuxième du mois de février, mil sept cent quatre vingt deux, le Roy étant à Versailles, Sa Majesté ayant par son édit du mois d'août 1772 créé et établi dans son isle de Corse quatre juntes nationales, qui doiivent être composées chacune de six coimmissaires, à l'effet d'exercer pour Elle, chacune dans le district et territoire qui lui est


AVIS DE CONVOCATION A LA CONSULTA DE 1770 Adressé à FRANCESCO COLONNA DE GIOVELLINA

(Reproduction photographique)



GÉNÉRAL COLONNA DE GIOVELLINA

assigné, une justice de discipline et de correction contre les bandits et fugitifs de lTsle, et désirant pourvoir à l'unei des places de la junte de Caccia, Elle a fait choix pour cet effet de la personne du sieur don Francesco Colonna d'après les bons témoignages qui lui ont été rendus de sa probité et de sa capacité ainsi que de son zèle, fidélité et affection au service de Sa Majesté. En conséquence, Elle a nommé et commis le dit sr Colonna pour remplir une des six places de la junte de Caccia, et en cette qualité, exercer toutes et chacunes les fonctions c[ui y sont attribuées, jouir et user en outre de la dite place aux . honneurs, pouvoir, autorité, droits, prérogatives, rangs s'y attachés, ainsi que le tout est plus aiu long spécifié par le dit édit, comme aussi des appointements qui lui seront réglés, le tout tant qu'il plaira à Sa Majesté, laquelle mande et ordonne au commandant en chef pour Elle en lTsle de Corse, au Premier Président et à son Procureur général au Conseil Supérieur de ladite Isle, qu'après avoir par l'un d'eux pris et reçu du dit sr Colonna le serment en tel cas requis, ils arient à de faire mettre et instituer de par Sa Majesté en la dite place de commissaire de la junte de Caccia et de le faire reconnaître, obéir et entendre en la dite qualité de tous ceux et ainsi qu'il appartiendra, sans difficulté. Et pour assurance de ce qui est en tout ce que dessus de la volonté de Sa Majesté, elle m'a commandé d'expédier le présent brevet qu'Elle a signé de sa main et fait contresigner par moi son Conseiller Secrétaire d'Etat et de ses Commandements et Finances.

Signé : LOUIS. Contresigné : Ségur (1).

(i) Le lieutenant-général, marquis de Ségur, ministre de la

guerre, qui dévint maréchal de France l'année suivante.


10 UN CORSE D'AUTREFOIS

Renucci (1) s'étend longuement sur la création et l'utilité de ces juntes. Nous n'en donnerons que les deux extraits suivants :

1°) « Un autre édit de mil sept cent soixante « douze créait sous le titre de juntes un nouveau « tribunal, qui donna lieu de voir que si la France « méconnaissait les défauts de sa propre législation « elle savait appliquer les remèdes efficaces conve« nant au caractère et aux moeurs d'une nation sa« gace, sensible et qui, par son passé, lui était « étrangère ».

2°) « Créant donc dans quatre points principaux « de l'intérieur de l'île quatre juntes nationales, «■ pour distribuer, en Notre Nom (c'est le Roi qui « parle) et à Nos frais, sous l'autorité de nos Com« missaires (il y en avait deux : le Commandant en « chef, et l'intendant (2) une jurisprudence de cor« rection et de discipline qui prévoit les peines et « les fautes graves, Nous installons parmi nos « nouveaux et chers sujets un tribunal paternel et « patriote, dévoué entièrement à la patrie et destiné « à retenir les égarés et les fugitifs pour les rame« ner à la société et à leurs foyers. Mais si ces ef« forts devenaient infructueux et si les émigrés obs« tinés renonçaient à la qualité de citoyens et de « sujets, qu'on doive au moins convenir au nom de « la nation, que ceux que cette dernière n'a pu rete« nir ni attirer dans son sein, il sera juste de les « abandonner à la proscription que nous serons con« traints de prononcer contre eux ».

« La suite de l'édit développait le mode de com« position des quatre juntes ; leurs sièges étaient fixés « dans les pièves d.'Orezza, Caccia, Tallano et de

(2) Histoire déjà citée, tome I, p. 126-129.

(3) Le comte de Marbeuf et le chevalier Colla de P.adine .


GÉNÉRAL COLONNA DE GIOVELLINA

11

« la Mezzana. Vingt quatre commissaires étaient K nommés par les Etats-généraux de Corse ; savo;r « six pour chaque junte dont deux devaient résider .< à leur tour pendant quatre mois consécutifs de « l'année. Les commissaires ne pouvaient être que « des nationaux et él|us tous les trois .ans parmi « les trois ordres de la noblesse, du clergé et du « tiers-état. La sagesse plus que l'érudition, l'estime « publique plus que la naissance, entraient en con« sidération pour leur choix. En conséquence ce « n'étaient pas des: juristes, des savants de profes« sion, mais des hommes vénérables pour leur ju« gement droit, pour leur amour de la patpie, et pour « leurs moeurs antiques, qui composaient les juntes « de la Corse. Leurs fonctions étaient plutôt de pré« venir que de punir les délits. Des précautions « sages et nécessaires se prenaient au besoin pour « empêcher la débauche, les rûxes, les discordes, « les excès.

« Les émigrés formaient encore l'objet des soins « et de la sollicitude de ce tribunal que l'on appe« lait « de famille ». Une amnistie générale avait été « promulguée pour les vagabonds, à l'exclusion des « conjurés d'Oletta. Les juntes recevaient leurs dé« clarations et les cautions qu'ils étaient obligés « de fournir. Le commandant en chef, le Premier « président, le procureur général, de l'autorité des« quels elles dépendaient, sanctionnaient toujours « leurs sentences et leur manifestaient et . déférence « et considération.

« Le régiment provincial corse qui alors s'orgaiii« sait était mjs à leur disposition. Cette troupe se « composait du régiment de Buttafoco réformé par « l'édit qui instituait les juntes et dont le comte « de Buttafoco était le colonel propriétaire, grade à « lui conféré au moment de la conquête de sa patrie.


12 UN CORSE D'AUTREFOIS

« Le même de Buttafoco était nommé à l'inspection. « générale du régiment provincial corse.

« Ainsi la Corse recevait une bonne existence ci« vile dont la France certainement ne joussait pas. « Le gouvernement en France était l'oeuvre de la féo« dalité et de la chevalerie. En Corse, il était l'oeuvre « de la méditation sur le caractère, les coutumes, et « la liberté bien entendue de ses habitants ».

L'état civil en Corse comporte de telles lacunes que même pour cette époque presque contemporaine, nous ignorons quand mourut ce bon citoyen. En tout cas ce décès fut antérieur au 26 décembre 1806, don François dans un acte de notaire du même jour, y étant qualifié de « feu », et d'autre part postérieur à octobre 1801, puisque à cette date il recevait la lettre suivante de Pascal Paoli, réfugié comme on sait à Londres/où il vécut jusqu'en février 1807. Ces deux intimes et vieux amis se suivirent donc de près dans la tombe.

La lettre en question est inédite. Toujours conservée dans la famille on ne la trouve pas naturellement dans la collection publiée par le docteur Perelli dans notre Bulletin.et nous pensons être agréable aux abonnés de ce périodique en la publiant ci-après. Comme on le verra elle montre non seulement l'étroite amitié qui unissait si cordialement ces deux hommes appartenant à la même génération, ayant mêmes idées, même idéal, même culte de la patrie, mais encore elle témoigne de l'excellence des services rendus au chef d'Etat par son ancien et dévoué collaborateur. Sans cela comment interpréter les mots : « tanto dfive la patria ? » ils n'auraient plus aucune signification


GÉNÉRAL COLONNA DE GIOVELLINA 13

Enfin, chose plus importante pour la postérité, cette même lettre contient une phrase qui éélaïrè un point d'histoire et démontre par Une allusion suffisamment claire au Premier Consul Bonaparte que, malgré les dissentiments antérieurs que l'on sait, l'âme haute et impartiale de l'ancien Général de la Nation lui avait conservé sa sympathie et son admiration.

Voici la traduction littérale de cette lettre, suivie de son texte italien qui la rendra sinon plus authentique (son authenticité n'a pas besoin d'être prouvée) mais plus intéressante pour dès lecteurs corses :

Au citoyen don François Colonna, à Prato de Giovellina.

Londres, le (?) novembre 1801. — Je vous salue, cher bon ami don François, votre fils Alexandre .a passé quelque temps avec moi et souvent nous avons bu à votre santé. Et moi je ne suis pas oublieux de votre autre brave et honoré fils qui reste auprès de vous. , ■

Le seigneur Alexandre voyant déjà décidé le sort de la patrie pour laquelle il se réservait, et ne voulant pas rester oisif, passe à Naples, avec de bonnes recommandations, pour avoir un poste' dans eette armée. Il aime par dessus tout autre son métier des armes ; il aurait eu des recommandations pour le service d'autres nations mais il préfère celui de Naples afin d'être plus à portée d'avoir ' souvent de vos nouvelles et <ie me les transmettre ensuite, à moi qui le désire beaucoup quand il s'agit d'un homme que je trouvai toujours fidèle et constant dans tous les emplois publics et au ' zèle et à lai valeur de qui la patrie est si) redevable.

Je jo(uis à présent d'une parfaite santé et je ne suis pas sans- espoir de revoir l'Italie peur quel-


14 UN CORSE D'AUTREFOIS

que temps, je dis quelque temps c'est-à-dire un hiver, car je ne suis pas capable de résister davantage aux chaleurs de l'été. Je suis déjà acclimaté à la température de ce pays où je suis toujours bien vu.

Les circonstances de la longue et désastreuse guerre n'ont pas permis que notre pays se gouvernât soUs la constitution que de lui-même il s'était donnée. A bon compte enfin la Corse n'est plus sous le voile de l'ignominie avec lequel pendant plusieurs siècles la tyrannie la tint cachée et avilie. Elle vivra sous la constitution qu'un de ses braves patriotes a formée pour la France dont elle sera partie intégrante et qiui nous ouvre la porte à tous les avantages et honneurs. Et nos patriotes et nos descendants ont des exemples trop lumineux pour ne pas y aspirer avec confiance.

Adieu, mon cher don François, faites ressouvenir de moi les bons patriotes que je regarderai toujours comme des fils. Chacune de leurs peines faisait aussi mon affliction au milieu des délices de ce lieu. A présent l'aspect de leur meilleure fortune m'enlève le chagrin que je ressentais pour eux.

Et que Dieu leur donne l'esprit d'industrie et de paix entre eux et ils auront plus de siècles de félicité qu'ils n'en ont eu de souffrances.

Je vous embrasse de coeur (1).

Pascal de Paoli.

Nous avons tout dit sur don François, du moins le peu que nous en savons, mais nous ne voulons pas terminer cette simp'le esquisse biographique sans

(i) Voir le texte italien de cette lettre en appendice.


GÉNÉRAL COLONNA DE GIOVELLINA 15

consacrer encore quelques lignes à ses deux fils déjà mentionnés dans la lettre de Paoli.

L'aîné, don Alexandre, né à Prato le 2 novembre 1751, entra au service du roi de France dans le Royal-cor se. Par les archives du ministère de. la guerre nous savons qu'il fut successivement souslieutenant en 1769, lieutenant en second en 1772, lie!utenant en premier en 1776, capitaine en second en 1780 ; qu'à la suppression de son régiment en 1788 et à sa transformation en deux bataillons de chasseurs royaux-corses, il passa avec son grade au premier de ces bataillons et qu'il démissionna le 29 germinail an H (9 mars 1793) c'est-à-dire peu après l'exécution du malheureux Louis XVI. C'est alors qu'il rejoignit Paoli et partagea un instant son exil à Londres, jusqu'au moment où il entra dans l'armée napolitaine, sans doute en 1801 d'après la lettre précitée, et y devint lieutenant-colonel. Revenu au pays natal il y mourut sans alliance le 27 novembre 1817. Ne laissant pas de postérité il avait reporté son . affectdon sur ses neveux et son testament du 10 avril 1817, retrouvé récemment, montre qu'il fut généreux à leur égard.

Son frère cadet : le capitaine Jean-François, né également à Prato en 1756, y décéda le 17 novembre 1826 laissant sept fils dont l'aîné, successivement curé d'Asnières et de Nanterre," mourut en 1841, auteur d'un livre édité en 1834 et qui! existe encore à la Bibliothèque nationale : « La religion est le fondement de la société ». Le dernier, ancien lieutenant* colonel de cavalerie, notre père, s'éteignit à Paris en 1895. Les autres, comme les peuples heureux, n'ont pas d'histoire. Rest.s au pays ils y vécurent en gentilshommes campagnards, entourés de la consi*


Î6 UN CORSE D'AUTREFOIS

dération générale. Dans le livre de Tomasini paru en 1875 (Ma candidature au conseil général de Corse pour le canton d'Ornessa) il est question dé deux d'entre eux, Félix et Christophe, et dans les termes lés plus sympathiques.

Zélé paoMste comme tous les siens, Jean-François se crut obligé de servir sous le drapeau anglais, comme on le verra plus loin. Souvenons-nous avant de l'en blâmer que la notion du devoir est quelquefois obscure. Elle était encore plus difficile à discerner à cette époque où Paoli jouissait d'un si grand prestige auprès de ceux qui avaient vécu sous son Généralat, avaient connu et aimé avec enthousiasme le grand homme.

Pendant la période où la Corse fut anglaise, sous 'le règne de Georges III, et sous l'administration de son Vice-roi, sir Gilbert Elliot, les deux lettres suivantes, au nom de ce dernier, furent expédiées à Jean-François, l'une simplement transmissive et l'autre conteriant sa nomination de capitaine, toutes les deux signées du lieutenant-colonel Dunk'water, chargé des affaires militaires.

Ces deux lettres présentant quelque intérêt nous nous croyons tenus de les reproduire ci-dessous :

1) Bastia, 12 Mars f796. — Monsieur, Sa Majesté s'étant déterminée à faire de nouveaux règlements généraux dans les institutions militaires corses, je suis autorisé, suivant les ordres de Son Excellence lé Vice-roi, à adresser à Votre seigneurie ure lettre dans laquelle elle verra la charge militaire à laquelle Son Excellence s'est complue à la nommer dans cette nouvelle organisation.

J'ai l'honneur d'être, de Votre seigneurie, le très dévoué serviteur.

Dunkwater, Secrétaire du département militaire.


GÉNÉRAL COLONNA DE GIOVELLINA 17

2) même date. — Monsieur, Son Excellence le Viceroi m'a ordonné de vous informer qu'Elle s'est complue à vous nommer capitaine d'une compagnie dans le second bataillon R. A. C. (i), commandé par M. le lieutenant-colonel Montrésor du 16e régiment royal d'Irlande (2), et que votre commission portera comme date celle qui sera fixée ultérieurement. ' Vous devez donc vous présenter immédiatement à Monsieur le lieutenant-colonel Montrésor à Corte, aux ordres de qui vous devez ponctuellement obéir, comme aussi à ceux que vous recevrez de Son ExceL lence le Vice-roi ou du Commandant en chef, ou des autres officiers supérieurs conformément aux règles et à la discipline militaires.

J'ai l'honneur d'être votre très dévoyé serviteur.

Dunkwater. Secrétaire du département militaire.

Adresse commune :

à Monsieur Jean-François Colonna, capitaine d'une compagnie dans le second bataillon R. A. Corse.

Quel fut alors le rôle du nouveau capitaine, ainsi que celui de son chef de corps pendant les années qui suivirent '! C'est ce qu'il est Lien diffic;le de préciser. La vice-royauté de sir G. Elliot ne dura que de 1794 à 1797, époque où l'achèvement de la magnifique campagne du général Bonaparte en ita(i)

ita(i) Anglo-Corse.

(2) Dans l'ouvrage de Maurice Jollivet (1896) intitulé : v Les Anglais dans la Méditerranée. Un royaume auglo-corse, on lit p. 140 qu'une lettre du ministre de la guerre anglais du 11 novembre 1795 contenait les promotions suivantes : Ier régiment d'infanterie, 2e bataillon : Le major Dunkwater est nommé lieutenant-colonel ; 18e régiment : Le major Montrésor est nommé lieutenant-colonel, etc..


UN CORSE D'AUTREFOIS

lie hâta la chute de la domination anglaise et la reprise de l'île par la France.

L'histoire nous apprend bien que les Corses furent sous l'autorité successive de Baliceti et de xMiot, envoyés en mission par la République, puis sous celle des généraux Morand et César Berthier représentants de l'empereur. Elle est muette sur les troupes angio-corses qui durent disparaître (1) mais dont certains éléments, officiers et autres, continuèrent peut-être à recevoir la solde afférente à leur grade ou allèrent servir enl Angleterre.

La pièce suivante nous donne la preuve de leur existence et de leur licenciement à la rentrée des Bourbons.

Cette pièce est une lettre circulaire imprimée, que fit parvenir, en 1814, à notre grand^père le même Montrésor devenu major-général et dont on trouvera dans l'ouvrage du baron du Casse (2) la longue correspondance avec le général C. Berthier.

Bastia, le 20 juin 1814. — Monsieur, j'estime opportun de vous prévenir que le 24 courant les officiers, bas-officiers et soldats corses soldés par le gouvernement britannique et préalablement payés jusqu'au dit jour inclus, cesseront d'être à son service, et pourront se mettre à la disposition du commandant militaire français à. qui je les ai chaudement recommandés au cas où ils voudraient continuer la carrière militaire commencée. En cas contraire ils seront pleinement libres de se retirer dans le sein de leurs familles.

(i~) On consultera utilement à ce sujet la Correspondance du général Gentili qui a été publiée par notre Bulletin, l'an dernier (n°s 453-456).

(2) Vie du général Arrighi, duc de Padoue, tome II, livre 8,et pièces justificatives.


GÉNÉRAL COLONNA DE GIOVELLINA . 19

C'est avec peine, Monsieur, que je me trouve dans l'obligation d'adopter une telle disposition, et de ne pouvoir à l'avenir me prévaloir du zèle, de l'activité et du patriotisme, dont j'ai reçu les preuves les plus certaines tant de vous rue 1 de vos subordonnés. Pénétré pour cela de la plus vive reconnaissance, estime et affection, je vous prie d'agréer toutes les sincères assurances de teis sentiments.

J'estime inutile de vous recommander à tous la tranquillité et l'obéissance au gouvernement : 'ce devoir n'a pas besoin d'être inculqué par moi a ces messieurs dont je connais déjà l'amour pour le bon ordre et l'engagement de maintenir la paix publi-' que, objectif principal de tout bon citoyen.

Je me plais, Monsieur, à vous confirmer ira considération distinguée.

Montrésor, major général.

Adresse : Monsieur le capitaine Colonna, Bastia.

On remarquera la parfaite courtoisie du général anglais et son hommage de gratitude à nos compatriotes militaires. Cette lettre est en même temps une preuve du désintéressement dju destinataire, toujours dénué d'ambition, toujours capitaine, comme dix-huit ans auparavant. Il faut croire que JeanFrançois ne se plaignait pas d'être voué à ce grade puisque, comme nous allons le voir, il l'acceptait encore l'année suivante. Dans un pays aussi difficile aussi fractionné que l'île de Corse la véritable unité militaire ne peut-être que la compagnie. Elle constitue le commandement le plus réel, donnant le plus d'ascendant sur de valeureux soldats, aux idées égalitaires, délicats à manier mais dont l'obéissance procure de grandes satisfactions.

Le capitaine est vraiment le « Primus inler pares ». Rien d'étonnant à ce que de tell"s fonctions


U.\ CORSE D'AUTREFOIS

soient toujours en honneur et tentent toujours un homme de coeur, quand elles concordent, bien entendu, avec ses convictions.

Pour terminer, nous produisons un dernier document, émanant du' nouveau commandant militaire en Corse, le chevalier de Bruslart, maréchal de camp, sur lequel l'ouvrage déjà cité du g"' Arrighi donne un assez grand nombre de détails (documents relatifs au tome III).

23e division militaire,

Nous, maréchal des camps et années du Roi, chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Lou/is, commandant la 23e division militaire.

Voulant donner à M. Jean-François de Colonna une preuve de notre confiance en sa fidélité au Roi et en même tems (sic) les moyens de prouver son dévouement pour le service de Sa Majesté, le nommons par la présente commandant de la compagnie franche qui s'organisera par ses soins à Prato, canton de Golo.

M. Jean-François de Colonna, pendant le tems qu'il sera employé, jouira d'un traitement de quatre francs par jour.

Au Quartier général à Bastia, le 20 mars 1815.

Chr de Bruslart.

Certainement à la date où il écrivait cette lettre le général royaliste ne se doutait pas que Napoléon avait débarqué au golfe Jouan, que Louis XVIli s'enfuyait à Gand et que, selon la phrase célèbre « l'Aigle impérial volait de clocher en- clocher jusqu'aux-tours de Notre Dame ! ».

Général COLONNA DE GIOVELLINA.


AIV1BJK Y I>I 1 H:

Lcllrc de P. Paoli

Al cittadino don Francesco Colonna, à Prato di Giovellina,

Londra, novembre 1801. — Vi saluto caro buono amico don Francesco. Il vostro figlio Alessandro ha qui meco passato qualche tempo, e spesso abbiamo beuto alla vostra salute. Ed io non mi sono scordato dell'altro bravo onorato vostro figlio che resta presso di voi. Quesio Sr Alessandro vedendo già deciso il destino délia patria per la quale si rifervava per non restare ozioso passa in Napoli con buone raccomandazioni per aver posto in quella armata. Egli ama sopra ogn'altro il suo mestiere dell'armi. Avrebbe auto raccomandazioni per altri servizi, ma preferisse quello di Napoli per essere piu a portata di avère spesso vostre nuove, e poi trasmetterli a me, che assai le dessidero di un uomo che ebbi sempre fido e costante in tutti gl'impsgni publici, ed al di cui zelo e valore tanto deve la patria.

Io godo ora perfetta salute, e non sono senza speranza di rividere lltalia per qualche tempo — dico per qualche tempo cioè un invernata, non sarei piu capace resistere ai calori di codesti estati ; sono gia acclimatato alla temperatura di questo paese dove sono sempre ben visto.

Le circostanze délia lunga e disastrosa guerra non han permesso che il nostro paese si governasse sotto quella costituzione che da li medesimo si avea formata ; a buon conto perô la Corsica non è più


22 UN CORSE D'AUTREFOIS

sotto il vélo dell'ignominia col quale per piu secoli la tirannia la tenea ascosa ed avvilila ; viverà sotto la costituzione, che un bravo nostro patnotto ha formata per la Franchi deila quale sarà parte intégrante,e che ci âpre la porta ad ogni vantagio ed onore,ed i nostri patriotli ed i nostri posteri. Hanno esempi troppo luininos,i per aspirarci con fiducia.

Addio caro don Francesco ricordatemi alli buoni padriotti (sic) quali riguarderô sempre come Hgli. Ogni loro pena facea la mi a afflizione anche in mezzo aile delizie di questo luogo ; ora mi solieva dall"affanno che per essi sentiva l'affetto ai loro miglior fortuna. Eddio dia ad essi lo spirito dell'i'ndustria e di pace fra loro, ed avranno piu secoli di félicita (sic) che non ne hanno sofferta di miseria.

Vi abbraccio di vero cuore.

PASQUALE DE PAOLI.


Les Miettes de l'Histoire

VOLPAJOLA x

Les moindres faiits, les plus petits détails, quelques mots, quelques bribes de phrases, une date, inscrits, gravés sur la pierre ou le bois, un mur en ruines peuvent, bien souvent, ouvrir de larges horizons et puissamment éclairer le champ de l'histoire. Ces choses,qui n'ont aucune importance pour le vulgaire, servent quelquefois à déterminer les événements de toute une époque.

Les notes qui vont suivre auront, peut-être, le don d'éveiller la curiosité des chercheurs, des founleurs d'archives. Elles sauront attirer l'attention des hommes d'études qui se plaisent à faire revivre le passé, sur une petite localité, qui a dû autrefois jouer un rôle dans l'histoire de notre pays, mais qui est restée jusqu'à présent inconnue.

Située au-dessus de la gare de Barchetta, sur le chemin qui mène à Scolca, et sur la grande route vicinale qui traverse le canton de Campitello, la commune de Volpajola se compose actuellement de cinq petits hameaux : Querceto, Trave, Caselaja, Costa-al-Sorbo, et Volpajola. Ce dernier, qui est le plus important de tous, se trouve au centre et donne


24 ABBÉ GABRIELLI

son nom à la commune. Le nombre de ses maisons est plus élevé et sa population se trouve plus forte que celle des autres. Tous ces hameaux réunis forment une agglomération de cinq à six cents âmes. Barchetta-gare vient grossir quelque peu la population de Volpajola.

Le village n'a pas 'toujours été là où il s'élève maintenant, Des ruines assez imposantes, qui se trouvent à quelque distance de Volpajola, les maisons, de fabrication assez récente, nous' disent bien que la commune actuelle ne date pas de loin. Son origine ne remonte pas à une époque bien reculée. C'est ce que prouveront d'ailleurs les documents que nous allons citer.

Au seizième siècle de notre ère, Volpajola avait, peut-être, une population plus forte que celle qu'elle compte maintenant et ses maisons devaient être plus nombreuses. L'église de han Biaggio, dont les ruines existent toujours, était probablement le temple où venaient prier, le dimanche, les habitants de Chiovini, d'Abbe, de Trovindi, de San Biaggio et de Pila. Ces divers hameaux, auxquels il faut encore ajouter ceux de Piano et de Teddi, formaient alors le village de Volpajola. Ces noms n'ont point disparu de la mémoire des paysans. Ils servent encore à désigner les différentes propriétés où se trouvent les traces des localités dont nous venons de parler.

L'emplacement, les ruines de l'église de SanBiaggio, ainsi que les immeubles qui lui appartenaient furent, lors de la grande Révolution, vendus comme biens nationaux. Un religieux capucin, défroqué, qui remplissait en ce moment les fonctions de percepteur s'en rendit acquéreur. Ses héritiers ont fait presque entièrement disparaître ce qui restait de l'nncienne église. Ils ont livré à la culture


VOLPAIOLA ET SON EGLISE

(Photo Damiani)



VOLPAJOLA ' 25

l'emplacement de l'édifice sacré et consacré la plupart des pierres de ses murs à la construction d'un tombeau de famille. De ce fait, nous avons peutêtre été privés d'une foule de renseignements importants et, en même temps, de précieux trésors artistiques.

A en juger par ce qu'on voit encore, l'église avait une certaine dimension et ne manquait pas de beauté. Elle fut ruinée avec les villages auxquels elle appartenait. Elle a péri victime de la barbarie e: de la cruauté des temps. La rage de l'ennemi ne l'a pas épargnée.

L'histoire est assez sobre de renseignements sur Volpajola. Il semble que tous nos chroniqueurs aient voulu organiser, autour de cette localité, la conspiration du silence. Des hommes assez marquants y ont pourtant vu le jour : Biancone que Filippini appelle le plus fier spadassin de son époque ; Monseigneur Mariotti, évêque de Sagone, mort assassiné dans les prisons de Gênes, à cause de son indéfectible attachement à son pays ; Jules-César Grimaldi, que Gregory, l'éditeur de Filippiini, cite parmi les lettrés qui ont illustré la Corse, étaient tous de Volpajola. Quelques-uns prétendent, il estvrai, que l'évêque de Sagone n'est pas né à Volpajola. Ils donnent pour raison que certaine famille de Campile possède. le portrait 4'i prélat et Certains objets lui ayant appartenu. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il y a à Volpajola la maison de i'Evêque sur les murs de laquelle figurent encore ses armes. Ses héritiers, ' qui étaient ses frères, ont toujours habité Volpajola où ils ont fait souche. Tout cela semble bien établir que Monseigneur Mariotti a vu le jour dans cette dernière localité.

Au seizip-^e s'ècle il se produisit à Volpajola, un incident assez notable. Presque tous nos historiens


26 ABBÉ GABRIELLI

l'ont relaté (1). Le 6 juillet 1564, le général de Negri (2), venant de Borgo, pour se rendre avec les troupes génoises près de Caccia afin d'attaquer bampiero, qui s'y trouvait campé,fit halte à Volpajola. 11 y passa la nuit avec toute son armée. En arrivant, il ordonne à Morazzanu, podestat du lieu, de fournir à ses soldats le logement et les vivres. Le podestat fit tout son possible pour donner satisfaction au commandant des forces de la Sérénissime République. Le village était toutefois petit. Ses maisons se trouvaient éparpillées dans les différents hameaux assez éloignés les uns des autres. L'armée génoise se composait de nombreux soldats. Il fallut donc à Morazzanu un certain temps pour pouvoir trouver un gite à tous ces hommes. De Negri, pensant que la mauvaise volonté était la véritable cause du peu de diligence que le podestat de Volpajola "mettait à exécuter ses ordres, entra dans une violente colère et gif fia le magistrat comjmunal.

Deux . jours après, l'armée génoise est défaite à Caccia ou à Ponte-Leccia. Sampiero la poursuit l'arme dans les reins jusqu'à Volpajola (3). La route est, sur tout son parcours, encombrée de cadavres de chevaux, de soldats morts ou blessés, et de toutes sortes d'armes. De Negri,blessé, revenait en croupe du cheval de Pierre-André de Casta. Parvenu à l'endroit où s'élerait la chapelle de Sainte Catherine, Morazzanu, qui se trouvait posté là, ajuste son arme et abat le général génois (4). On prétend que Morazzanu, après avoir tué le chef de l'armée

(i) Cambiaggi : Tome II. (Edition de 1770V Filippini : Livre XI, pages 53 et 58. (Edit. Gregory, tome V).

(2) Sampiero Corso par le docteur Costa, de Bastelica.

(5") Filippini : Livre XL page 58. (Edit. Greg-pry, tome V).

(4) Filippini : Livre XI, page 58. (Edit. Gregory).


VOLPAJOLA

enenmiie, se précipita sur son c°davre, trempa ses mains dans le sang qui coulait à flots des blessures et s'en frotta la figure. Il voulait ainsi effacer les trace&V du soufflet qu'il avait reçu et se venger de l'afrront\ que De Negri lui avait publiquement' infligé. La tradition locale rapporte encore un détail plus affreux : .après s être lavé le visage avec le sang de celui qui l'avait si gravement offensé,, le podestat de Volpajola fit dévorer par son chien les entrailles du cadavre de sa victime. Ce sont là des faits qui nous prouvent bien la barbarie des temps.

Les ruines de la chapelle de Sainte Catherine n'ont pas encore entièrement disparu. Le nom seul a subi, avec le temps, quelques modifications. Ce n'est plus, en effet, Santa Catarina, mais Santé Ca'tarine qui sert à désigner l'endroit où s'élevait l'édifice sacré et les lieux environnants. Le sanctuaire disparu, on a peut-être voulu conserver son nom à toutes les propriétés qui se trouvaient à l'entour et dont le revenu devait probablement servir à l'entretien de la chapelle.

Les troupes génoises, en déroute, n'eurent pas, le temps de venger le meurtre de leur général. Elles traversèrent Volpajola en coup de vent, en s'efforçant de gagner du terrain pour échapper à la fureur de Sampiero.

Le sénat de la Sérénissime République ne pouvait toutefois pas digérer la sanglante défaite que les insulaires venaient d'infliger à ses armes, sous Caccia, et le meurtre commis par Morazzanu sur la personne de de Negri. Il envoya,pour commander ses troupes dans l'île, Etienne Doria. Celui-ci, qui appartenait à l'une des plus illustres familles de Gênes, avait débarqué à Saint-Florent avec des munitions et de nombreux renforts. Avant de prendre une décision il voulait s'entourer de ..tous les ren-


38 ABBÉ GABRIELLI

seignements qui pourraient lui être utiles. C'est dans ce but qu'il tint plusieurs conciliabules avec le gouverneur de Bastia et différents chefs corses au service de la République. Ce n'est qu'après s être renseigné, qu'il se met en marche et qu'il va camper à Borgo avec toute son armée. Là, il apprend que les Corses concentraient des troupes à Volpajola, Pensant que Doria devait se rendre à Corte pour secourir le château, les insulaires avaient résolu de lui barrer la route, qui', traversant Volpajola, allait de Borgo à Ponte-Leccia. Achille Campocasso et Napoléon de Sainte-Lucie, deux chefs qui avaient déjà donné des preuves de leur bravoure et de leur habileté sur maints champs de bataille, se trouvaient à Volpajola à la tête des milices corses. Les Génois attaquent, avec une grande impétuosité, les insulaires. Ceux-ci se trouvaient inférieurs en nombre. La concentration de leurs forces n'était, peut-être, pas encore achevée. Les chefs corses, ne s'atlendant pas à une attaque si inopinée, n'avaient peut-être pas agi avec promptitude. Les moyens de communication se trouvant, d'autre part, rares et difficiles, avaient empêché les patriotes d'accourir se masser à Volpajola. Toujours est-il que les Corses furent défaits et mis en déroute.

L'armée génoise entra victorieuse à Volpajola. Les soldats de Doria, furieux de la résistance qu'ils avaient rencontrée, se souvenant probablement aussi du meurtre de ue Negni, mirent à sac le village et le livrèrent aux flammes (1).

Les traces de cet acte de barbarie existent toujours. Il y a dans l'église paroissiale de Volpajola une superbe peinture sur bois où se trouvent représentés tous les saints patrons du village. Ce ta(i)

ta(i) : Tome V, livre II. page 78.(Edition Grrgory. 1.


VOLPAJOLA 2J

bleau, qu'on vient de classer comme monument historique, porte encore sur son bois des signes non équivoques d'incendie. Il a dû se trouver placé dans l'église de San-Biaggio. Les habitants de Volpajola l'ont sauvé de la ruine et ils ont eu soin, en fondant le village actuel, de le placer dans leur église paroissiale, voulant ainsi l'ériger en témoin perpétuel de l'acte de la plus atroce barbarie.

ABBÉ GABRIEL] i.


Notes sur S*" Florent

lrc PERIODE

NEBBIO

Après la guerre de Troie, il y aurait eu de nombreux expatriés, ce qui est fort possible. Un nommé Corso, neveu d'Enée, aurait abordé à Ajaccio pour y fonder une colonie comme les Grecs de Cargèse en 1676 ; Corso avait quatre fils appelés Ai-azzo, Alero, Marino et Nebbino. Il n'est pas question de Bastia qui, à la rigueur, peut se passer d'aïeux.

Ce Nebbino, fils ou neveu de Corso, mit à voile et aborda non loin de l'embouchure du Rhône ; :i fut bien accueilli par le seigneur de Narbonne. Pour lui témoigner sa reconnaissance, il n'attendit pas, comme Euxène, que sa future lui présenta la coupe des fiançailles ; il l'enleva. Le rude seigneur gaulois ne l'entendait pas ainsi ; il poursuivit le ravisseur jusque dans ce golfe (comment s'appelait-;l déjà ?). Il allait l'atteindre, quand une brume épaisse, le déroba à ses yeux.

Nebbino eut le temps de prévenir Corso qui se. trouvait à Ajaccio. A cette intervention, le Narbonnais se calma et Nebbino put commencer la fondation d'une ville qu'il appela Nebbio pour perpé-


NOTES SUR SAINT-FLORENT 31

tuer son nom et peut-être aussi, en souvenir de la Nebbia qui l'avait sauvé. Il bâtit ensuite un temple à Pallas, déesse de la guerre.

Telle est la légende ; mais quoi qu'il en soit, Nebbio sonne terriblement vieux ; il n'a aucune parenté avec le grec et le latin ;'il semble plutôt d'origine ibère comme d'ailleurs une foulé de noms corses : Lama, Asco, Aïtone, Eccica, Zonza, Zoza, Sartè, etc..

Ptolémée appelle cette ville Cersunum ; ce nom devait être peu connu puisque Nebbio seul est parvenu jusqu'à nous ; les anciens l'appelaient la Y aile ou la Conca. En 1565, le général Doria écrit : « ' Val di 'Nebbio ».

II. -— L'histoire parle de Nebbio comme d'une ville bien peuplée ; l'évêque y résidait entouré de nombreux ecclésiastiques, signe certain de population et de richesses. Le premier évêque mentionné est Martino ; il assista au concile de Latran en 649. Semidei nous a conservé une liste de 38 évêques à partir de 649 jusqu'à 1783 ; il y a : Giovanni, Spinola, Princevalle, Doria, Grimaldi, Scribano, Castagnola, Saporito, Carlo, Giust'iniani et Franco di li Perfetti. Celui-ci légua ses biens à la ville de SaintFlorent.

En 1596, l'évêché resta vacant durant 4 ans, afin de réserver les revenus de l'église à la réfection du toit de la cathédrale.

Celle-ci, ou une première église qu'elle aurait remplacée, daterait au moins de l'an 700 puisque du temps de Pilippiini on trouva en cet endroit une cloche portant ce millésime. D'après Mérimée, elle dépendait d'un monastère et aurait été bâtie après l'expulsion maure. L'église est du même type que la Canoniea : « Au nord, dit-il près


32 FUMAROLl

d'une, porte latérale, on me fit remarquer trois trous qui traversent le mur irrégulièrement ; ces trous sont en grande réputation : ils exhalent une odeur de violettes. Le fait, rapporté par Ughelli dans Yltalia chrisliana, me fut attesté par le maire et le curé de Saint-Florent. Ils m'engagèrent à bien flairer les dits trous, m'avertissant que je ne sentirais rien ; ce qui se trouva parfaitement vrai'. Saint-Florent est fort vénéré dans le pays (1) ».

M. Enlart, dans une publication récente : Les villes mortes n'a pas oublié la cathédrale ; elle serait de la seconde moitié du xir= siècle, : « La cathédrale pisane, dit-il, démontre par sa belle construction que la cité était alors prospère ; elle était tombée au vme siècle sous laJ domination des Maures qui furent chassés au ixe siècle ; la fondation de SaintFlorent lui porta le coup de grâce »•

La cathédrale, a été bombardée en 1553 et a servi souvent à 'loger des troupes ; ce fut une caserne jusqu'en 1811 ; c'est aujourd'hui un monument historique.

Cette église de Nebbio mérite qu'on en parle plus longuement comme du principal vestige de ce qui reste de la cilla : sans la cathédrale, comment supposer, en voyant le peu de ruines qui sont autour d'elle, qu'il y avait une ville en ces lieux ? Tout a disparu même le mur d'enceinte qui la défendait. Est-elle du xn° siècle comme l'affirment Mérimée et Enlart ? Comment admettre qu'un évêque résidât à Nebbio sans une église convenable ? Or, Monseigneur Martino y étalit en 649. Et cette cloche enterrée depuis Tan 700 ? (2).

(i) Notes d'un voyage en Corse ; 1824, p. 124.

(2) N'y a-t-il pas quelques probabilités à supposer que la cathédrale actuelle n'est qu'une simple restauration de l'ancienne ?.


NOTES SUR SAINT-FLORENT 33

A mon avife, la cathédrale est plus vieille ; elle indique l'existence d'une ville et on peut grâce à elle, établir une base pour une évaluation approximative de la population nebbine.

Les églises étant construites en raison directe du nombre des fidèles qu'elles doivent contenir les jours de fêtes, on peut faire le calcul suivant : 1° Surface à l'intérieur 22x12 = 264m . 2° Le maître-autel (clergé et desservants) 20 person. 33 La 1/2 de l'église occupée par les hommes à raison d'un homme par m 2, vides compris 132 id. •

4° L'autre 1/2 occupée par les femmes et enfants à raison de 2 femmes ou enfants par m- ..' 264 id.

6J Ajouter un nombre égal pour les habitants restés à la maison .. ..' '.'6

Total général 832 habit.

Il va sans dire que cette évaluation ne peut donner qu'une idée approximative. A mon avis, Nebbio était, en 649, ce que Saint-Florent est en 1923, c'est-à-dire une jolie petite ville, avec un millier d'habitants.

Elle était bâtie à moins d'un demji-mille du bord de la mer ; un mille, cela veut dire mille pas doubles. Bien que cette mesure variât et varie encore suivant les localités, on peut tabler ici sur le mille toscan identique au mille romain de 1.500 mètres.

Nebbio était donc bâtie à 500 mètres de Saint-Florent ; nous avons d'autres renseignements dus Monseigneur Giustiniani, le plus marquant des pré-. '" lats qui se sont succédé sur le siège épiscopal de Nebbio ; Giustiniani était un savant : il connaissait le latin, le grec, l'hébreu, l'arabe ; professeur de langues orientales à l'Université de Paris, auteur de nombreux ouvrages, . voyageur infatigable, mort


FLMAUULI

dans un naufrage en 1536, en vue des côtes de la Corse non loin de Macinaccio. Le bon évêque rejoignait son poste.

« La ville de Nebbio, dit-il, était située sur un coteau agréable « colle amena ». On y voit encore les ruines ; elle était en dehors des courants du ftuminale qui font tant de mal à Saint-Florent ; en été, grâce à sa position, la brise de la mer y entretenait beaucoup de fraîcheur. C'est le contraire à SaintFlorent où la saison estivale est très chaude « si crêpa di caldo ».

« En hiver, dit encore Giustiniani, la ville recevant plus de rayons solaires sur un terrain sec, jouissait d'un climat tempéré tandis que Saint-Florent est humide et froid ».

Les préférences de Giustiniani, on le voit, sont pour Nebbio : il aurait voulu, son palais, là-haut sur la colline et c'est bien ' malgré lui, s'il est resté 22 ans à Saint-Florent.

Très peu d'eau à Nebbio, qui peut-être se trouvait dans le même cas que Saint-Florent, en 1565. Le général Doria écrit que les citernes ont dix palmi d'eau suffisante pour plusieurs mois. Il y a aussi des fontanelle qui ne peuvent être détournées (vietate) et qui donnent cinq tonneaux d'eau en 24 heures. J'ai bu de cette eau, dit-il, elle n'est pas mauvaise « non e maie ». C'est plutôt le bois qui manquait ', il n'y avait guère plus de 7 à 8 quintaux (cantare).

III. — Est-ce la vallée qui a donné le . nom à la ville ? Je pense que c'est le contraire, car pour que les noms prennent corps, il faut d'abord des habitants : Val di NebMo, selon le général Doria. Cela d'ailleurs n'a pas grande importance. Plus importants sont les sarcophages trouvés en 1553 au moment des travaux exécutés à Saint-Florent. Ils étaient


NOTES SUR SAINT-FLORENT 35

très nombreux faits en argile et pouvant contenir des corps d'hommes d'une taille au-dessus de la moyenne.

Or. si ces sarcophages étaient très nombreux, cela prouve que l'on travaillait dans l'ancien cimetière de Nebbio ; aujourd'hui même, on pourrait en découvrir d'autres puisqu'ils n'étaient enterrés qu'à un demi-mètre « dui palmi ».

La découverte de ces vases a mis en lumière un point d'histoire resté obscur : quelques-uns d'entre eux portaient des inscriptions relatant que plusieurs milliers d'hommes avaient succombé dans une bataille et l'annaliste Ceccaldi ajoute « qu'à sa connaissance, il n'y a aucun historien qui parle de cet événement ».

Ces inscriptions se rapporleraie '. • " . l.i bataille des myrtes (campi mirlei) perdue par Caïus Papirius ? Ces campi mirlei sont très favorables aux évolutions des troupes nombreuses et les Corses avaient sans doute eu le temps de se fortifier et de s'emparer des meilleures positions.

IV. — « Quand on a édifié Saint-Florent, dit encore Giustiniani, on n'a tenu compte que des commodités de la marine ».

Ces commodités, j'en conviens, ne sont pas négligeables : mais ne devaient-elles pas être désirées aussi par les anciens habitants de Nebbio ? Une distance de 500 mètres du bord de la mer, c'et.t peu de chose vraiment et on ne peut admettre une ville sur la colline, sans établissements au bord de la mer. Et d'abord est-ce une colline, ou un coteau, ce colle ameno ?

Ce n'est guère qu'une légère éminence, un coteau minuscule. Depuis plus de 2.000 ans, la Méditerranée recule devant . l'alluviorinemeiil des côtes, A->>


36 FUMAROLl

trefois la mer arrivait près de la route nationale, sous Biguglia. Un pieu, enfoncé au bord de l'eau dans la Casinca, se trouve en plein sable quelques années après. Aiguës-Mortes en France, Pise en Italie étaient des ports à l'époque des Croisades. Jadis Nebbio était bâti au bord de la mer et ceTle-ci baignait le pied de la colline.

Nul doute à 'Ce sujet : la mer entrait profondément dans les terres et la ville était assise au fond d'une large baie cachée au nord-ouest par une suite de coteaux. Pour s'en convaincre, on examinera avec profit les terrains qui sont au midi ; ils sont tous d'origine fluviale ou marine.

V. — Une autre question se pose : une ville laisse toujours des ruines. Où sont celles de Nebbio ? Très peu s'offrent à nos regards curieux et sans la cathédrale qui nous l'affirme, ce serait la négation, même de la cité.

Il faut donc supposer que les pierres des maisons de Nebbio ont servi à l'édification de SaintFlorent en 1420 et plus tard à la construction de la forteresse ou de petites maisons de campagne.

Toutes ces relations peignent Nebbio comme une ville agréable à habiter et expriment de douloureux regrets sur sa disparition. On se figure volontiers une aimable population laborieuse, douce et hospitalière, légèrement portée à la mélancolie et qui a laissé les meilleurs souvenirs de sa grandeur passée. Ces souvenirs, ces regrets sont contenus dans ce mot : la Cilla !

VI. — La douce ville devait, être la proie des Maures d'Afrique. C'étaient des Tunisiens, des Algériens et des Marocains. La conquête de l'Espagne et du midi de la Gaule marque l'apogée de l'ex-


NOTES SUR SAINT-FLORENT

pansion de l'islamisme ; sans la victoire de Poitiers, Dieu sait ce que serait devenu le monde chrétien !

Les Maures ont dominé sur la Méditerranée durant plus de 4 siècles ; en Espagne, en Sicile, en Sardaigne, le type maure-arabe-kabyle est encore très commun ; il l'est moins en Corse ; mais il y en a cependant ; les noms qui suivent renferment une origine commune : Moriani, Morosaglia, Mori, Moro, Morini, Moroni, Moretti, Morucci, Moraninchi, Moracchini, Muraccioli, etc. A Eocognano, T y a deux hameaux autrefois ennemis l'un de l'autre : Muracci et Cursacci.

La légende (1) nous raconte qu'un roi maure appelé Nugulone s'était établi à Nebbio. Le comte Boniface l'en chassa après un siège de trois mois. Les Maures faits prisonniers se convertirent, mais Nugulone, revenu d'Afrique avec une flotte, reprit la ville et coupa en morceaux ses compatriotes convertis. Le comte Boniface vaincu, se réfugia à Poggio de Venaco où il lut assiégé. Dans une sortie heureuse, il tua Nugulone ; son armée se retira à Aleria qu'elle brûla ; Mariana et Nebbio eurent le même sort. Les Sarrasins tenaient à laisser des traces de leur passage pour se rappeler au souvenir de la postérité. En Corse, ils ont enlevé du monde pendant plus de 500 ans ; ils sont certainement, et les Turcs après eux, la cause de la ruine de nos établissements côtiers. Dès qu'ils étaient annoncés par des .feux allumés sur les tours, les cloches sonnaient à toute volée :

« AU'armi ! aÏÏ'armi ! « La campana sona « I Turchi so sbarcati «Alla marina ! ».

(t) Cf. Chronique de Giovanni délia Grossa.


FUMAROLI

Les Vicolais leur coupèrent la retraite et en firent un grand massacre ; il y a 15.0 ans, on représentait encore la moresca composée de scènes très originales où l'on simulait des combats entre Maures et chrétiens.

« La ville de Nebbio, dit Semidei, superbement bâtie sur un coteau, jouissait d'un excellent climat. Très peuplée et entourée de solides murailles, elle fait pitié, aujourd'hui, au passant attardé sur cette terre de désolation ».

Les ruines les plus apparentes, ajoute Rossi, proviennent du séminaire et de Tévêché (1).

Semidei et Rossi ont visité Nebbio et Saint-Florent au bon moment : il y a un siècle, la Corse était presque comme au moyen-âge. Celui qui par la pensée, ou mieux en visitant quelques villages de l'intérieur, se reporterait vers 1750, trouverait, la Corse telle qu'elle était aux jours sombres du xve siècle.

2" PÉRIODE (de iVlO à 1553) SAINT-FLORENT

I. — Les premières maisons de saint-Florent ont été édifiées en 1420 ; un siècle plus tard, l'agglomération comptait 300 feux. En multipliant ce nombre par 5, on obtient une moyenne de 1.500 habitants. J5n 1720, il n'y en avait plus que 400. On comprend alors l'expression Le Semidei : « terre de désolation ! »' .

Pourquoi ce recul effroyable ? — C'était les fièvres paludéennes qui en rendaient le séjour mortel ; toute l'île en était infestée. Sampiero avait les fièvres tierces (lerzane) ; en 1564, le général Doria

fj) Osserva%ioni sforiche ; I, Géographie.


NOTES SUR SAINT-FLORENT 39

signale de nombreux malades de lièvres à SaintFlorent et à Porto-Vecchio. Le maître de camp génois mourut de fièvre à Calvi : à Bastia, il y avait 400 malades. Au siège de Calvi en 1794, les soldats anglo-corses perdirent plusieurs centaines d'hommes par le fait des fièvres ; il y a 50 ans, les cas de lièvres paludéennes et pernicieuses étaient très nombreux encore. On en connaissait la cause : la piqûre des zinzali ; on est mieux rixé aujourd'hui : c'est l'anophèle maculipennis, c'esi^à-dire Jl'anopiièle aux ailes tachetées ou Y anophèle femelle qui, après avoir l sucé le sang d'un fiévreux, inocule le virus à l'homme sain.

Pour se multiplier cet insecte a besoin d'eau stagnante. La cause initiale connue, le remède ne paraît pas impossible à trouver. 11 ne suffit pas d'avoir des canaux d'irrigation ; il y aura toujours de l'humidité et des anophèles. Des canaux, il en faut des milliers : des canaux plus minces . qu'un cheveu, mais possédant une puissance absorbante considérable. Ces milliers de canaux, les arbres les donnent à leurs amis sans rien exiger en retour. Une forêt de pins maritimes assainirait St-Florent comme par enchantement et serait une source de revenus pour la commune. Je fais cependant une réserve : on peut endiguer l'Aliso, mais si les nappes d'eau souterraines proviennent de la mer, tous, les arbres du monde ne les boiraient pas. Cependant, même dans ce cas, il y aurait avantage à posséder une forêt de pins aux portes de 1 ville.

II. ■— Quelle est l'origine de la fête de Saint-Florent ?

Semidei raconte que dans la cathédrale, au nord, s'exhalait un parfum de fleurs et l'on disait : « On a enterré là un saint inconnu, d'où Santp Fior très vénéré dans la suite du temps ».


40 FUMAROLI

III. — En 1530, le château menaçait ruines ; la ville était entourée de murs pour résister aux pirates ; elle était divisée en trois parties : Terravecchia, Terranova et le Borgo, c'est-à-dire la vieille cité, la nouvelle et le faubourg, termes qui existent encore à Bastia ; la place publique était grande et belle ; les maisons doivent avoir empiété sur elle depuis cette époque ; des salines se trouvaient à la Roya et l'on passait l'Aliso au moyen d'une petite barque, una scaffa.

Les habitants de Saint-Florent sont originaires du Nebbio et du Cap Corse ; ils étaient pêcheurs, marins, cultivateurs ou commerçants. Comme aujourd'hui, on péchait le poisson fin et le poisson ordinaire. Le gibier était très abondant, le perdreau « in grandissima copia ».

L'office de Saint-Georges entretenait à Saint-Florent un officier supérieur et quatre conseillers ou magistrats ; la ville jouissait d'une paix profonde, quand des jeunes gens l'ensanglantèrent de leurs querelles ; l'abandon des salines est dû à des envieux (sic) ; les inimitiés et les pillages turcs lui firent perdre beaucoup de son importance ; les habitants de Santo-Pietro pénétrèrent dans le Borgo et le mirent à sac sans intervention des autorités génoises. C'est qu'elles avaient à faire à forte partie, aux rudes seigneurs de Casta. Bernardo et Diodato devinrent chefs de factions rivales qui désolèrent l'endeçà des monts et eurent des ramifications jusque dans l'au-delà.

3e PÉRIODE (1553-1567) SIÈGE DE SAINT-FLORENT

I. — C'est en 1440 que le gouverneur de la Corse, Janus Fregoso fortifia Saint-Florent, La direc-


NOTES SUR SAINT-FLORENT 41

tion des travaux fut confiée à Pierre Campocasso. Ce fut le coup de grâce donné à Nebbio.

En 1453, trois galères catalanes débarquèrent le comte Vincentello d'Istria, Vice-roi de la Corse pour le roi d'Espagne. Sur les conseils de Bernardo de Casta, il s'empara du château et y logea une garnison.

En 1464, Francesco Manetto arriva avec une suite de 150 hommes ; comme les seigneurs corses étaient fatigués de se battre, ils lui présentèrent leurs hommages.

C'est à Saint-Florent que mourut Salvago, gouverneur de la Corse ; il avait contracté une maladie en assiégeant le château de Cinarca ; son 1 corps repose dans la cathédrale.

L'événement le plus remarquable de l'histoire de Saint-Florent est sans.doute le siège de cette ville par le célèbre André Doria. C'est à la fois la période la plus brillante et la plus douloureuse ; les galères françaises, turques ou espagnoles lui font de fréquentes visites. Le 24 août 1553, le général de Thermes y entre triomphalement. La position lui parut d'une grande importance stratégique. En toute hâte, il fait appel aux habitants des villages voisins. Trois mois après, les fortifications étaient terminées ; il était temps !

Gênes préparait une puissante expédition ; l'armée génoise débarqua à Olzi et de là, elle marcha en ordre de bataille jusqu'au couvent de SaintFrançois ; la flotte mouilla à la Moriella. Le camp génois fut entouré de fossés et de retranchements : « l'ordonnance était si belle qu'elle fit l'admiration de Ceccaldi : « Celui qui n'a pas visité Te camp génois à Saint-Florent dit-il, n'a jamais vu nulle part des logements aussi merveilleusement disposés avec des artisans et des marchands de toute


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sorte. Si l'on ne savait pas que c'était un camp, on se serait cru dans une ville ».

L'artillerie génoise avait été placée, une partie dans le camp et l'autre au nord du côté de la mer. Le bombardement commença aussitôt ; la place répondit vigoureusement.

Le premier engagement eut lieu entre Corses et Espagnols ; ceux-ci perdirent 4 hommes ; nous eûmes le capitaine délia Rocca tué et Andréa de Speloncato blessé.

Saint-Florent n'avait pas été assez approvisionné ; de Thermes chargea le colonel Torino d'y porter des moulins à bras pour moudre le blé qui s'y trouvait. L'opération réussit, mais au retour un soldat de sa suite le blessa mortellement par imprudence. Le corps du malheureux colonel fut transporté à Murato, puis sur un bateau-hôpital aux fins de rapatriement. En cours de route, le bateau sombra et la bière ballotée par la tempête fut rejetée sur les côtes de Provence.

Pour rendre le blocus plus effectif, l'amiral Doria jugea que le meilleur moyen était de construire un fort près de l'embouchure de la rivière. Saint-Florent ne recevant plus de secours allait succomber ; mais l'armée assiégeante succombait en même temps : la mortalité était effrayante : il pleuvait tous les jours : « les vents, l'humidité, le froid, les privations avaient décimé les Génois. Les compagnies étaient tombées de £00 à 50 hommes présents. De l'avis de Merello, les Corses auraient emporté le camp d'assaut si on leur avait permis de l'attaquer. Le général de Thermes s'y opposa malgré l'avis favorable de Sampiero ; les ennemis reçurent sur ces entrefaites un secours de 4.000 Allemands et de 1.000 Espagnols.


NOTES SUR SAINT-FLORENT . 43

On essaya de secourir la garnison par mer : de grosses barques avaient pour mission de passer à travers la flotte espagnole pendant la nuit ; elle ne purent y réussir et transportèrent leur chargement à Ajaccio. '32 galères françaises, commandées par le baron de la Garde, essayèrent de rompre le blocus ; en présence de forces supérieures aux siennes, il jugea prudent de ne pas livrer bataille et se retira à Ajaccio.

De Saint-Florent, la guerre ,élargit son rayon : les soldats assiégeants quittaient le camp pour aller aux rafraîchissements dans les villages voisins où ils commirent toutes sortes de dégâts. Les paysans s'armèrent alors ; les embuscades, les combats étaient journaliers et presque toujours à notre avantage au point que Ceccaldi . s'écria : « Dix Corses valent 50 Génois ».

Ceux qui se distinguèrent dans ces escarmou-' ches furent Achille Campocasso, Raphaël et Giudicello Casta.

Enfin, les trois colonels défenseurs de SaintFlorent, Giordano Orsino, Vallerone et Bernardin d'Ornano durent capituler : les conditions étaient les suivantes : 1° La place resterait aux Génois ; 2° la garnison sortirait avec ses armes en paquets et ses bannières dans les, iourreaux ; 3° les tambouré ne battraient pas'; 4°..elle serait ensuite transportée à Antibes ; 5° les Corses étaient exclus de la capitulation.

Bernardin d'Ornano et Théramo de Saint-Florent, ainsi que la plus grande partie de leurs compatriotes, se sauvèrent la nuit sur des esquifs ; 32 reconnus et qualifiés de rebelles furent envoyés aux galères. "L'amiral André Doria entra à Saint-Florent, le 17 février 1554. Ce siège de 3 mois avait coûté 10.000 hommes aux vainqueurs.


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Ce fut le grand événement de ce temps. La chute de la place eut un grand retentissement et tint tous les partis dans l'attente ».

II. — Démantellemcnt de Saint-Florent. — Ce n'était pas assez d'avoir pris la place ; il fallait s'y maintenir. La République avait fait un effort au-dessus de ses forces et ne pouvait plus supporter les charges de la guerre. On donna aussi une autre raison : l'insulabrité de la ville.

La démolition des murs qui l'entouraient fut décidée ; heureusement pour les Génois, les travaux n'allèrent pas vite et la place put recueillir les faibles restes de leur .armée détruite par Sampiero dans le défilé de Tenda.

Le comte Alberico commandait à Saint-Florent ,' il détacha trois compagnies pour saccager Patrimonio. François de Talla, plus connu sous le nom de Manomozza, obligea l'ennemi à rejoindre ses quartiers. C'était un sergent de Sampiero instruit a bonne école ; sa témérité le perdit ; en janvier 1555, il fut pris près de Calvi, transporté à Saint-Florent, étranglé dans sa prison, traîné, outragé et pendu par un pied à côté de Scipioni.

Hyppolite, de Saint-Florent, se trouva à la défense héroïque de la tour de Poretto-Brando où une dizaine de Corses tinrent en échec, toute une journée, plus de 300 Génois.

III. — Réédification de la forteresse. — Le projet de démolition fut repris ; une mine pratiquée sous le château ne produisit aucun effet ; on le ruina à coups de canon ; Saint-Florent redevint ville ouverte ; mais durant la trêve signée par Henri II, le nouveau Vice-roi de la Corse, Giordano Or'sino, celui qui avait si bien défendu Saint-Florent en


NOTES SUR SAINT-FLORENT 45

1553-1554, ordonna la reconstruction de ses murs. Comme de Thermes, il fit appel aux populations voisines et surveilla lui-même les travaux en cours d'exécution ; par crainte des fièvres, il allait coucher à Poggio de Casta. Le commandant Masses fut nommé gouverneur de la place avec quatre compagnies. Monseigneur de Guise.y envoya 1.000 charges de blé, mesure de Marseille, et 160, mesure d'Arles. La place ainsi fortifiée devait être démolie de nouveau, puis réédifiée une dernière fois après le retour de Sampiero en Corse en 1564. C'est, avec quelques légères améliorations, la forteresse de nos jours.

Le traité de Câteau-Cambrésis, signé en 1559, remit la Corse aux Génois. Henri il avait abandonné ceux qui s'étaient donnés à lui.

IV. — Complot de Saint-Florent. — Sampiero avait de bons amis à Saint-Florent ; c'est d'abord Antonio, dont le dévouement ne s'est jamais démenti. C'est lui que Sampiero chargea de courir après Vannina ; c'est lui qu'il nomma maître de camp dans l'En-deçà des monts et qui accompagna Alphonse, fils aîné de Sampiero, quand celui-ci fut assassiné.

Antonio Corso (c'est ainsi qu'il signait) est une des plus belles figures t!e ces temps : il avait marié sa fille à Fabio Campocasso, frère d'Achile ; comme Fabio était d'humeur génoise, il la lui enleva. C'est sans doute Antonio qui a inspiré la lettre des chefs de la piève d'Alesani. Sollicité par la faction des Noirs pour combattre celle des Rouges, il répondit : « Non siamo, ne Negri, ne Rossi, siamo di casa nostra e non vogliamo fa coda a nessuno, ma solamente vilver e morir ] jr la patria nostra ».

Rien de plus beau n'a jamais été écrit dans l'histoire des nations. Antonio fut blessé 4 fois. Une


46 FUMAROLI

tentative d'empoisonnement à Vescovato faillit lui coûter la vie. Le 13 janvier 1565, le général Etienne Doria écrit qu'Antoine de Saint-Florent se trouvait à Santo-Pietro « con forse cenlo ladri ». Léonard de Corte lui était à la tête de 25 banditi : plus tard les Génois appelaient les patriotes des chèvres « câpre corse ».

A quelle famille appartenait Antonio ? — On sait que les capitaines du temps ce Sampiero appartenaient tous aux meilleures familles de la Corse ; la maison Guidoni est une des plus anciennes de Saint-Florent. C'est une preuve a ajouter à la tradition locale qui veut qu'Antonio soit issu de cette famille ; il suivH la fortune d'Alphonse d'Ornano, devenu maréchal de France ; très probablement, il n'est plus revenu en Corse.

Antonio est le plus illustre des enfants de SaintFlorent et son neveu Paris est celui qui a souffert le plus de l'oeuvre de rédemption entreprise par Sampiero.

V. — La République savait que celui-ci voulait s'emparer d'une place forte pour recevoir en sûrereté les secours venant de France. En. toute hâte, elle fait fortifier Saint-Florent. Doria craint une surprise ; il n'a pas, assez .d'ouvriers : à peine 47 rompiiori et guastatori dont 12 étaient malades de fièvres ; i bastioni sono fracassati e fianchi concassati ; il faudrait mettre ces ruines à terre et refaire le tout ; cela coûtera beaucoup d'argent » dit-il.

Il y avait en ce moment en Corse 1.000 Italiens, 1.000 Espagnols et 500 Allemands ; ces derniers résidaient à Saint-Florent et buvaient beaucoup de vin : « Vero e che nette presidi, écrit Doria, facino ta-nlu consurno di vino che è un slupore ! Ulio vislo in Sa?i Fiorenzù. Le vin coûtait 6 lires la mezzarola.


NOTES SUR SAINT-FLORENT 47

Le premier janvier 1567, le terrible commissaire général François Fornari arrive à Saint-Florent et trouve « questo presidio pien di discordia ». Le podestat et le magasinier ont tripoté sur les farines et d'autres « industrie ». Aux farines de froment, ils ont mêlé des rucchielle gagnant ainsi 5 lires par stajo. Ne pouvant les remplacer, Fornari se contenta de leur infliger des amendes : 200 lires au podestat ; 100 au magasinier : c'est une peine légère pour de semblables méfaits « misfatli ».

VI. — Nous arrivons au complot de Saint-Florent. Il comprenait presque toute sa population et chose remarquable, personne n'avait dévoilé le secret. Achille Campocasso et Antonio étaient dans Teghime avec 80 hommes pour un coup de main. Malheureusement le complot fut découvert la veille de son exécution : 14 notables de Saint-Florent furent pendus et les habitants chassés de leurs foyers.

Ce fut une grande tragéd'e !

Peut-être parviendra-t-on à découvrir le procès des patriotes de Saint-Florent dans les archives de Gênes ? 'Seul le R. P. Marini (Tj, aurait pu avoir quelques renseignements sur ces événements. Nous l'avons consulté et voici ce qu'il nous a répondu (2).

<- J'a' désiré, comme vous, connaître le procès '.es patriotes de Saint-Florent, mais je ne l'ai pas trouvé. Les renseignements que je possède, je les ai empruntés à la correspondance des officiers de la République.

Je vais vous donner un extrait de la lettre qui me paraît la plus importante écrite par Jean-Baptiste Gentile, commissaire de la « fabrica ».

(i) Nous lui devons bien des documents sur la période de Sampiero.

(2) Lettre du 6 mars 1921.


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Depuis plus d un an, on avait entrepris de grands travaux « per fortificare il luogo, con ridurlo a mino r silo ».

Georges Doria et l'ingénieur Frattino avaient établi les travaux à exécuter et ces travaux se poursuivaient au moment où Sampiero vint en Corse ; ils furent poursuivis sans relâche longtemps après.

Le commissaire Gentile avait sous ses ordres deux surveillants sopraslanti qu'il avait pris parmi les gens du bourg. Ceux-ci étaient conjurés. C'est à l'un d'eux, Raguscello, que fut adressée la lettre qui fit découvrir le complot. Cette lettre avait été confiée à un homme de Piedipartino.

Voici la lettre de J. B. Gentile, en date du 23 juillet 1564, soit 6 jours après la découverte du complot, toute fraîche par conséquent :

«.... Essendo scoperto che alcuni di loro o la maggior parte si erano accordât! di dover intramettere li nemici e ribelli in questo presidio e fra gli altri un certo Giovanni che gia ho scritto a V. S. illma che aveva posto per soprastante e che mostrava di servire un grande amore... E le donne si erano accordate che la notte delli 18 del présente dovevano oltre di esse che erano... dal baluardo del Frattino a procurai' di intramettere de-tti ribelli cosa laquale ancora pare molto difficile, non sarebbe stato molto che le fosse riuscita.

Luneoi che fu alli 17, si présente un certo corso quale si finse di venir a lavorare a questa fabrica, il quale aveva portato una lettera di li detti ribelli a un altro soprastante chiamato Raguscello e essendo stato domandato che uomo fusse e quello che andava facendo, parve che vacillasse e cosi fu preso a sospetto e condotto dinanzi al capitano, il quale avendolo esaminato.lo prese piu in sospetto e fattolo mettere alla tortura. Facilissimamente confessô che aveva portato


NOTES SUR SAINT-FLORENT 49

la detta lettera al detto Raguscello e subito fece prender Raguscello e postolo alla tortura, stette per qualchi spazio constanti e cosi ril'ersi il detto capitano al commissario générale, il quale per levarsi ogni sospetto, ordino che tutti questi abitanti dovessero essere cacciati

cacciati il che cosi essendosi seguito e essendo

partiti tutti parve al detto capitano di mandare e . chiamare il detto Giovanni di San Fiorenzo come che

lo. conoscesse persona di piu giudizio che gli altri

loquale venne e restô a dormire dentro e poi la mattina di nuovo fece tormentare il detto Raguscellu, 'I quale confessé tutto il maneggio e cosi fece prendere il detto Giovanni e postolo al tormento, confessô anche lui, che avevano signato il medesimo trattato.

Delli sudetti abitanti, molti si andarono alla Bastia e si presentarono al général' 1, il quale avendo lasciato qui, le loro robbe, vennero con l'cfi?- 1 del detto générale a ripigliarle e fratlanto una parte di loro dalli tormenti furono inculpati di essere consenlenti e furono incarcierati e lormentati, li quali hanno confessato essere intervenuti alla congiura ; il Giovanni Agostino di San Fiorenzo avendo avuto due tratti di corda, gli venne un mancamento cpn il quale ô passato

passato questa vila Si sono esaminati tutti e inteso

inteso loro altre cose importent etc, etc..

Comme on le voit, c'est la torture qui fit découvrir la conjuration. La torture se pratiquait à celle époque d'une manière révoltante et on peut en avoir l'idée, en relisant le procès de Paris en 1567, publié par le R. P. Marini.

VII. Paris. — Paris était un vaillant officier qui avait servi en Toscane, en France et en Ecosse. Rentré en France avec une lettre fie recommandation do la reine Marie Stuart, il avait été reçu par Catherine de Medicifc et s'était attaché à la fortune de Sampiero.


DO FUMA ru)L).

Nommé ambassadeur, il fut pris dans le golfe de Sagona avec le piévan Cernucoli de Calvi, conduit à Ajaccio, mis à la torture et fusillé (l).

11 faudrait rapporter ici le procès tout entier ; nous nous contenterons de lésumer les derniers moments de Paris :

Un mot d'abord sur la iorlure, telle qu'on la pratiquait en 1567 :

Le supplice^ ou plutôt le tourment du feu (tormento), consistait à faire passer les pieds du patient dans un anneau ue 1er et à les l'approcher graduellement d'un foyer ardent. Les pieds de Paris furent rôtis.

L'estrapade était en usage sur les bateaux ; le coupable était déshabillé, les bras et les jambes liées, puis attaché à une vergue, élevé dans les airs, précipité ensuite'dans le vide et arrêté brusquement, avant de toucher le pont. Les membres se disloquaient ou se'cassaient,

A Ajaccio, la corde passait dans un anneau rivé au plafond : c'était l'estrapade de sfrappala, rompue.

Ce fut le supplice de Paris.

A cette époque les Corses exaspérés se montrèrent cruels parfois ; mais il est juste d'établir une différence : les représailles sont admises même entre peuples civilisés, quand il n'y a que ce moyen de faire comprendre à l'ennemi l'injustice de ses procédés. Voici un. exemple : Un conseil de guerre présidé par Antonio de St Florent a condamné Ettore Ravaschiero, officier génois, à être dévoré par des chiens. On excita donc contre lui une meute terrible. Ettore, s'adressant à Antonio, lui dit : « Ce que vous faites-là est indigne d'un homme d'honneur ».

(i) Les pièces du procès et les interrogatoires ont été publiés dans le Bulletin de l'année 1914.


NOTES SUR SAINT-FLORENT 51

Antonio éprouve un saisissement à ce reproche > Ettore ava;t touché la corde sensible. Antonio fit éloigner les chiens et répondit : « Vous ne devez pas être étonné de notre conduite, vous qui savez ce que l'on fait contre nous ». il le tua ensuit) d'un coup, de pistolet.

Mais y a-t-il chez nous un homme assez misérable, pour lire sans émotion le récit des tourments de Paris et du piévan Cernucoli ? En toute sincérité, je ne le pense pas.

Paris, si vaillant dans W combats, ne put résister à la torture. C'est que les chairs, même privées de vie depuis longtemps, se redressent sous l'action du fétu ; son courage n'est pas en cause ; il fut ferme et poli dans ses réponses jusqu'au dernier moment.

La. bonne ville où il était né ne l'a pas oublié ; ,1a marine, qui a été témoin de ses ébats joyeux d'enfant, porte son nom : Marina di Pà.

Pourquoi Antonio et Paris n'ont-ils' pas leur statue à St Florent ?

i" PÉRIODE (de î 567-1791)

I. — Nous voici arrivé à la période la) plus glorieuse de notre histoire nationale : la lutte pour l'indépendance de la Corse ; nos aïeux étaient enfin parvenus à s'organiser, à élire pour chefs des hommes de mérite comme Gaffori et Paoli. Dès les premières hostilités, ils se portèrent contre Bastia : ils étaient 20.000 au camp de Saint-Pancrace sous Furiani ; il y avait des adolescents et des vieillards ; ils investirent aussi Saint-Florent, Le siège commença le 29 mars et la place se rendit le 15 avril 1731.

En 1745, une escadre anglaise se présenta devant la ville ; elle avait à bord le colonel Rivarola ; Anglais et Sardes venaient à notre secours ; en 1747,


Fl'MAUOLI

un convoi débarqua 1500 hommes de troupes régulières. En ce moment la France intervint ; elle envoya le marquis de Cursay avec plusieurs bataillons. Celui-ci était un habile- administrateur ; il gagna la confiance des chefs corses et surtout celle de Gaffori ; celui-ci lui remit Saint-Florait en dépôt.

En 1749,un congrès d'ecclésiastiques y déclara juste la' guerre de-l'indépendance ; en février 1760, durant une nuit obscure Paoli fit donner l'escalade à Saint-Florent, du côté de la mer. Plusieurs patriotes avaient déjà franchi les murs quand une femme qui soignait un malade ouvrit une fenêtre pour vider un pot ; elle donna aussitôt l'alarme à la garnison ; le coup était manqué.

A cette attaque avaient pris part : Clément Paoli, Jean Rocca et Tiburce Murati. Celui-ci, venant de Nonza, débarqua près de la maison Guidoni. Le général Paoli n'était pas loin : il avait des intelligences dans la place avec les familles Arena, Piazza, Mattei et Gentile,

Les Génois enregistrèrent cet échec comme une grande victoire. Les nationaux perdirent Jean Rocca, de Rostino, qui avait la charge de grand chancelier.

En 1.765, cinquante-quatre familles de Saint-Florent demandèrent, à faire partie du gouvernement national ; de ce nombre étaient les Bizarelli et les Angel i. Il y a 150 ans, les familles distinguées du canton étaient :

les Arena, Piazza, Angoli, Calvelli, Gentile et Bizzarelli. Il est probable que si l'historien Rossi avait vécu de notre temps, il en aurait nommé d'autres >' il a sans doute oublié la famille Guidoni ; ses ancêtres et leur maison à Saint-Florent témoignent en sa faveur.

Paoli, n'ayant pu s'emparer de Saint-Florent, pensa faire aux Fornali ce qu'il avait fait à l'Ho-llous-


NOTES SUR SAINT-FLORENT

se ; après l'a conquête, les établissements des Pornali donnés à d'Archambal lurent négligés et tomijjrenl en ruines.

En 1764, Paoli bloqua la place par terre et par mer ; les Génois purent néanmoins y faire pénétrer des vins au moyen des grosses barques. Le 26 août, à 3 heures du matin, la population fut réveillée par une salve de coups de canon ; c'était les bateaux génois qui tiraient contre la petite escadre corse composée de deux bateaux dont l'un portait 16 canons et l'autre 18 ; nous perdîmes 43 hommes et les Génois 36.

C'est à Saint-Florent que débarqua le comte de Vaux ; tous les officiers français qui étaient dans l'île avaient reçu Tordre de se trouver au débarcadère : « Messieurs, leur dit-il, le roi m'a chargé de vous dire qu'il n'est pas content de son armée ».

Maillebois s'y était embarqué en 1731 avec les régiments de Flandre et de l'Ile-de-France.

IL — Saint-Florent pendant la Révoîvtion. — Nous sommes en janvier 1794 ; cinquante bateaux de guerre ou de transport se dessinent à l'horizon. C'était la flotte anglaise qui devait aider Paoli à chasser les Français de la Corse. Qui avait produit cet événement ? La calomnie, les intrigants, les inquiets, les ambitieux de tout temps, si nombreux chez nous et ailleurs.

Le conventionnel Christophe Saliceti jouissait d'un grand crédit auprès de ses collègues de la Montagne ; ne voyant que le but à atteindre qui était de renverser Paoli et prendre sa place afin de jouer le 1"' rôle dans l'île, il déchaina une guerre criminelle alors que, d'un seul mot, il aurait aplani toutes les difficultés. L'expédition de Sardaigne avait piteusement échoué ; il fallait une victime : « Suis-


FUMAROLI

je responsable, dit Paoli, de la" lâcheté des troupes que je ne commande pas ? ».

C'était une grave affaire que de s'en prendre à la tête de Paoli : le peuple le savait innocent et incapable de trahison ; il criait : « Vive 'la France ! Vive Paoli ! ».

Au dernier moment le bon général tenta une réconciliation ; « Nommez d'autres commissaires et l'on sera plein d'égards pour eux ».

La querelle ne pouvait plus se vjidor qu'à coups de canon. Bastia et Calvi soutinrent vaillamment un assez long siège ; ia faim seule les obligea à capituler. A Saint-Florent, la. garnison, commandée par Laco.mbe Saint-Michel et Gentile, chassa les Paolistes de Farinolo ; nous possédons sur cet engagement une lettre de Paoli, écrite de Murato :

« L'affaire de Farinole, dit-il, fut pour nous, toute la. journée, une victoire complète ; le soir, les troupes de la Convention s'étaient retirées, quand, par malheur, les nôtres abandonnèrent le couvent, ce qui assura, une victoire facile à nos ennemis ; mais les pertes qu'ils ont éprouvées sonl grandes : deux compagnies de grenadiers ont été réduites à six hommes. Les Corses du parti contraire, et spécialement ceux de Saint-Florent, ont eu 40 morts.

Antoine Gentile a été atteint en deux endroits i la fièvre l'a pris, ce qui l'ait' croire qu'il ne survivra pas à ses blessures ».

Les Franco-Corsés eurent encore un succès à la Mortella que les hommes du Casacconi abandonnèrent, n'ayant, disaient-ils, que des fusils pour répondre aux canons.

Les fortifications de Saint-Florent consistaient surtout dans les redoutes des Fornaii ; on les croyait imprenables ; mais les Anglais hissèrent 4 canons de 18 pouces sur la montagne qui les domine :


NOTES SUR SAINT-FLORENT

500 hommes du Nebbio travaillèrent à ouvrir un chemin praticable pour le transport des pièces de 18.

Une colline des Fornali était défendue par 2 pièces ' de 24, trois pièces de 12, 2 de 6, 4 de 20, vingt . obusiers, 800 hommes et 3 redoutes ; on y porta 3.000 sacs de sable pour les epaulements, mais les deux batteries anglaises du Ravinco et du Capello, presque invisibles, portaient des coups terribles ; la colline fut bombardée 4 jours et 4 nuits sans relâche.

Le 1/ février 1794 à 8 1/2 du soir, on entendit une violente fusillade dans la montagne. C'était les colonels Moore et de Petriconi qui donnaient l'assaut aux Fornali. D'après le capitaine Laugïer, les Anglais, avaient le mot d'ordre ec surprirent les redoutes.

Les Français se retirèrent en désordre à SaintFlorent, puis à Saint-Bernardino, à.Patrimonio et ■ passèrent 5 jours sur le Teghïme ; les Fornali avaient résisté 17 jours.

Le capitaine Laugier, qui se trouvait aux Fornali, est un témoin à entendre : « Entre la to.ur de la Mortella et Saint-Florent, on avait construit une redoute sur une élévation dite Fornali ou Fornelli. Cette- redoute empêchait le mouillage et défendait l'approche de la place. La colline est dominée par une montagne escarpée couverte de bois qui la commande de front et d'enfilade. Le général Géntili fit reconnaître, par une patrouille, les hauteurs de cette montagne. L'ingénievr ■ lui avait, assuré qu'il élan impossible d'y monter -du canon.

C'est donc une reconnaissance mal faite qui a causé la perte des Fornali. L'emplacement des batteries anglaises du Ravinco et du Capello existent encore.


FUMAROLl

III. — Voici à présent quelques extraits des lettres du général Bonaparte, relatives à Saint-Florent :

1" Castiglione, 22 juillet 1796 .

Je ferai passer en Corse une compagnie de canonnière et 5 ou (> pièces de montagne avec lesquelles il sera facile de s'emparer de Saint-Fiorent, qui n'a aucune fortification permanente ; ce purt pris, les Anglais n'ont, plus intérêt à garder les autres ».

2" Modena, 17 8bre 1796 .

Il n'y a que Saint-Florent qui soit essentiel à la République et où il convient de concentrer toutes nos forces en y établissant des fortifications permanentes. Si on avait concentré tous nos moyens à SaintFlorent, les Anglais ne se seraient pas emparés de la Corse.

3° Modena, 13 mars 1797.

On a objecté que l'air de Saint-Florent est très mauvais : mais son insalubrité ne tient, qu'à l'existence d'un marais. Je me propose d'y faire passer un millier de prisonniers de guerre pour le déblayement préliminaire des travaux.

4° Devenu empereur, il n'a pas oublié Saint-Florent ; il recommande au général Morand d'en protéger le mouillage. En 1807, il écrit : « Il faut deux grandes routes : une d'Ajaccio à Bastia,l'autre de Bas' lia à Saint-Florent ».

IV. — CONCLUSION

Saint-Florent a joué un rôle prépondérant en Corse, en matière maritime, depuis les temps les plus reculés jusqu'en 1807. Il vit ('ans son beau golfe les trirèmes romaines si jolies avec leurs trois rangées de rames superposées et leurs grandes voiles gonflées au vent ; il vit les galères françaises, espagnoles, turques et les énormes vaisseaux à trois ponts anglais.


NOTES SUR SAINT-FLORENT

Déchu depuis que Bastia et Ajaccio sont devenus têtes de ligne, l'une à l'Orient, l'autre à l'Occident, il semble qu'on ne puisse plus rêver sa grandeur passée.

L'histoire des nations est un éternel recommencement et quand des hommes, bien intentionnés sans doute, parlent de paix et de fraternité universelles, celui qui s'est pénétré, non u'aimables fictions, mais des leçons des temps passés, reste perplexe et presque sceptique.

Saint-Florent commande le canal de la Giraglia à Gênes. Si la marine militaire devait prendre de plus grands développements, il semble tout désigné pour devenir une succursale de Toulon,comme Ajaccio.

En attendant, le plus sûr me paraît de viser -la présent : voici les voeux que je forme pour la prospérité de cette ville :

1° Canaliser la source qui alimente Saint-Florent à 1 mètre de profondeur :

2" Se servir de bornes-fontaines à jet intermittent ;

3° Construire un réservoir en amont pour l'emmagasinage des eaux afin d'avoir des robinets à domicile comme'à Bastia ;

4° Consacrer toutes les années une petite somme aux embellissements ; il f"ut que partout, on dise : « Saint-Florent, est une jolie petite ville propre, commode et hospitalière » ;

5° Prolonger la jetée afin que les bateaux arrivent à quai ;

6° Planter une forêt de pins maritimes, comme dans les Landes ;

7° Avoir des magasins généraux.

En terminant, mon rôle se bornera à saluer la mémoire des 14 patriotes pendus aux murs de SaintL lurent, puis celle d'Antonio Corso, compagnon de Sampiero ; de Paris qui périt dans les supplices les


58 FUMAROLI

plus atroces ; de Scipioni.mort pour sa patrie ; d'Hyppolite, qui défendit vaillamment la tour de PorettoBrando ; de Théramo, qui se distingua au siège de Saint-Florent ; de Raguscello et de Giovanni, morts pour la patrie ; du père Antonio, grand prédicateur ; de Medoro, officier distingué, qui suivit, comme Antonio, la fortune d'Alphonse fils de Sampiero ; d'Anton Francesco,ambassadeur corse ; d'Angelo Santo qui vengea Sampiero en compagnie de Delphino et qui jura de combattre jusqu'à la mort ; du capitaine Prezioso, tué à l'assaut de Temino en Istrie ; de Georges Cesari administrateur départemental ; du général Gentili qui défendit Bastia ; du docteur Bizzarelli, député et enfin d'Antoine de Morati, historien de haute valeur, tous fils de Saint-Florent et qui méritent de passer à là postérité :

Cu tempu e pace, San Firenzu

Bellu sarà, L'antica città di Nebbiu, in Ellu

Rifiorirà.

D. FUMAROLI.


Histoire du Cap-Corse

M. Camille Piccioni vient, de faire publier une excellente monographie sur la région du C^p Corse (1). Excellente, parce qu'il ne reste plus grand chose' à dire, au point de vue historique, sur cette partie de la. Corse-.. Notre confrère la connaissait admirablement puisqu'elle est sa patrie d'origine ; il en possédait à fond la Bibliographie, dont peu d'ouvrages lui ont échappé. Enfin sa longue carrière diplomatique et ses fonctions de directeur au ministère des Affaires étrangères l'avaient initié à cette bonne méthode historique, qui conduit à la vérité, souvent difficile à trouver .

Il n'y a donc guère qu'à louer dans ces 218 pages, dont le récit est clair, quoique nourri. L'introduction insiste sur le morcellement géographique du Cap ; cette remarque méritait d'être faite dès le début. Partant de là, nous aurions désiré que M. Piccioni donnât .à ce premier chapitre plus de développement et fit une description géographique et détaillée de la région. Il se borne à une esquisse, mais où se trouvent des remarques judicieuses (Cf. p. 5 et 7). •

.Cela dit, l'auteur divise son étude en quatre parties, suivant un plan à la fois logique et clair. ,La première est réservée à l'histoire du Cap corse, depuis ses origines jusqu'à là féodalité ; elle est,à notre avis, la plus définitive. Le développement est exact et complet, dans l'état actuel de nos connaissances. Nous admettons avec M. Piccioni que Clunium defr)

defr) vol. in-12 de 224 p. chez A. Picard,1923, Prix : Tofr.


60 HISTOIRE DU CAP CORSE

vait se trouver aux environs de Sainte Catherine de Sisco, pour bien des raisons, dont la principale est la fondation d'une chapelle chrétienne et plus tara d'un couvent dans un lieu habité, non dans un site isolé. Cet argument peut aussi valoir pour Blesinum, d'où serait venue Lavasina. L'inscription des Vanaeini, découverte au XVHP siècle, suggère à l'auteur une amusante comparaison. Il se garde avec raison de faire résider Sénèque dans la tour qui porte son nom, mais admet avec vraisemblance qu'il a pu séjourner dans la bourgade voisine, le pagus de Lurinum. On ne peut qu'approuver également sa prudence au' sujet de la nationalité de Sainte Julie, car il en est de notre sainte nationale comme de Christophe Colomb. La Vie des Saints ('e Firmin-Didot voudrait nous enlever la martyre de Nonza, mais d'autres écrivains nous la rendent et il nous est agréable de la garder. Il n'y a donc presque rien à changer à ce premier chapitre.

Le second est consacré aux établissements féodaux du Moyen âge dans le Cap. Après avoir connu, comme le reste de l'île, la dominai/on des Vandales, 'des Lombards, puis les incursions sanv.sines, la péninsule fut enfin délivrée de l'islam par une croisade italo-provencale. La féodalité cornu ence, avec le génois Ido, dont les descendants s'affranchirent bientôt de leur suzerain {IX° siècle). Ce fi cent les Pevereiii, les Avogari, les da Mare, tous inféodés à l'évêque de Gênes. D'après une hypothèse très vraisemblable, c'est eux que Grégoire VII appelait des intrus, qu'il voulait expulser de l'île. Ils furent en effet les alliés de Gênes dans sa lutte séculaire contre les Pisans, auxquels le pape avait confié l'administration de la Corse. M. Piccioni montre par quels moyens les da Mare/issus de l'amiral de Barbercusse, Ansaldo,devinrent, vers 1250, tout puissants dans le Cap corse, s'installèrent à Rogliano, et furent les rivaux de la


A. AMBROSI 61

famille Avogari, dite de Gentile, établie dans le sud. La séparation entre les deux, fiefs fut formée par le chaînon montagneiux au sud de Cagnano, prolongé vers l'ouest par les collines méridionales de Barrettali.

L'une et l'autre seigneurie, dont l'histoire mérite d'être étudiée à part, ce qui fera l'objet des chapitres 3 et 4, eurent cependant un sort souvent commun,, lors des événements qui se déroulèrent au XIVe siècle et jusqu'à l'époque de Samipero. M: Pic. cioni passe avec raison rapidement sur ces faits ; mais il tient à noter que l'accord de 1358 entre le Commun de Corse et le peuple génois fut un libre contrat signé par deux démocraties. La République plus tard s'obstina à le défigurer jusqju'à en'faire l'origine de ses droits de souveraineté sur notre pays. C'est, contre cette prétention que nos ancêtres s'élevèrent et la Giustrficazione a très éloquemment montré la mauvaise foi du Sénat génois 1 à cet égard. Il n'est pas exagéré de dire que la longue lutte des Corses contre la Sérénissime République est tune protestation contre la violation d'un traité consenti par deux nations, dont les droits étaient égaux. « Vous êtes, disait Gênes, mes sujets naturels. — Pas du tout, répondaient les Corses, nous ne sommes liés que par la convention de 135S, (convenzionali) et vous l'avez violée ». ;

L'auteur fait ensuite l'historique des deux seigneuries de Rogliano et de Canari, dont les destinées furent diverses. Pour la première (chap. 3) la tâche était facile, car le marquis de Negroni, héritier des Da Mare, a écrit là-dessus un bon livre, qui peut servir de guide (1). Elle fut assez forte pour tenir tête à Vincentello d'Istria, vice-roi d'Aragon en Corse. (1439). Un acte de partage tle 1524 montre que son

(i) Histoire de l'ancienne seigneurie de San Colombano en Cap-Corse ; Laval, 1896.


62 HISTOIRE DU CAP COUSE

territoire comprenait les deux cantons -actuels de Ro gliano et de Luri.

Pour la deuxième au contraire, le récit devenait plus difficile, car aucun historien ne l'avait encore tenté et le morcellement territorial; d'abord limité à trois parties, était allé grandissant. Il faut louer notre confrère d'avoir fait l'historique complexe et fastidieux de la famille féodale des Avogari. Il montre d'une manière succincte, il est vrai, mais suffisante, ce qu'ont été les fiefs de Brando, de Canari, de Nonza, créés en 1330, par le testament de Jean de Gentile, au profit de ses trois fils. C'est de Brando qu'est sorti Altobello de Gentile, l'une des plus curieuses figures' de cette famil.'e. Nous" ne suivrons pas l'auteur dans un récit qu';l a quelquefois de la peine à conduire, tant le morcellement est infini. « Les villages eux-mêmes en arrivèrent à avoir leur vite particulière ». Nous dirons simplement qu'au XVIIe siècle Gênes a supplanté partout les seigneurs et ne leur-a laissé que quelques droits Judiciaires ou financiers.

Nous arrivons ainsi au chapitre V qui est, nous semble-t-il, le plus original et le plus intéressant du livre. C'est l'étude du Cap corse au point de vue religieux, juridique, militaire, économique et social, du XIIP au XVIIe siècle. Tout mériterait ici d'être cité. M. Piccioni' a, raison d'insister sur le rôle national des Franciscains qui avaient dans le Cap quatre -beaux couvents, sans compter ceux des Capucins (4), des Servites (3), des Récoilets (2), qui distribuaient, au peuple renseignement. Au point de vue juridique, chaque seigneur avait -ses statuts, inspirés du droit, romain, qui explique la préférence donnée au garçon sur la fille, et du droit canon, d'où proviennent sans doute les peines sévères infligées à l'homicnic et à la femme adultère : la mort pour le premier, le bûcher pour la seconde. Les peines inférieures étaient


A. AMBROSI 63

prononcées par l'Arringo, tribunal du podestat assisté des gonfaloniers. M. Piccioni compare le rôle de ces magistrats à celui des Pères du Commun. Il se sert ici de l'expression : terre des communes, mais nous pensons que c'est un simple lapsus, car il sait sans aucun doute, comme nous l'avons montré, que .notre vieux chroniqueur Giovanni a écrit la Terra del comune et non la Terra dette commune. Les Cap corsins ont donc joui d'une certaine liberté sous la domination de leurs seigneurs ; ils ont même conntu, comme marins et armateurs, quelque prospérité. C'est ici l'occasion de rappeler, après l'auteur, que plusieurs d'entre eux ont laissé le souvenir soit de leurs richesses, comme Thomas Lencio de Morsigiia, soit de leurs fondations sur la côte d'Afrique, comme Samson Cipriani de Centuri.

M. Piccioni reprend ensuite au chap. VI l'histoire du Cap corse, à partir de 1729, et la continue jusqu'à nos jours dans le chapitre VII. Il a raison d'abréger le récit des faits généraux, auxquels la péninsule participe depuis qu'elle est fondue dans l'ensemble de la Corse. Mais il sait dégager le rôle particulier qu'elle a pu jouer, comme dans la prise de Capraja, au temps de Paoli. Nous souscrivons entièrement à ses appréciations sur la troisième intervention française qui aboutit à Pontenovo, et sur l'épisode de Nonza, qui illustra Casella. Qu'il nous permette cependant de penser que Choiseul pouvait difficilement empêcher Pontenovo, car cet incident « regrettable » en effet avait été rendu inévitable par les événements de 1768 (cf. p. 72). Quant à la note du ministre sur l'importance de la Corse où il dit : « l'annexion de cette île compense largement la perte du Canada, p. 78 », elle ne nous paraît pas « trop hyperbolique ». Qu'était le Canada,au temps de Louis XV ? Un territoire presque inculte, avec 80.000 habitants et fort' loin de la France ; quelques


64 HISTOIRE DU CAP COUSE

arpents de (erre glacée, disait Voltaire, interprète de l'opinion. Tandis que notre Corse, aux portes de Toulon, au milieu de la Méditerranée, en face de l'Italie, région d'influence française, avait une importance, reconnue à l'époque par tous les grands ételts qui se disputaient sa possession. Entre une île peuplée, tout près du royaume, et une terre lointaine, un secrétaire d'état aux. affaires étrangères avait raison de ne pas hésiter. Il était juste que la diplomatie du XVIII" siècle fut plus occupée par une acquisition qui fortifiait la France, que par des colonies encore sans valeur.

Tout ceci montre combien la lecture de ce livre est agréable et instructive, combien le récit en est savant, original, logique. Il est complété par plusieurs planches, destinées à éclairer la généalogie embrouillée, obscure des grandes familles du Cap, et par un index alphabétique des noms propres qui rendra de réels services aux lecteurs. Nous n'exprimerons qu'un seul regret : celui de constater l'absence de toute gravure, car l'illustration est le complément désormais nécessaire de tout livre d'histoire et . de géographie. Les documents ne manquaient certainement pas à l'auteur. Nous comprenons bien hélas ! que les frais d'édition, aujourd'hui si coûteux, puissent faire renoncer à contre creur a i plaisir de reproduire les paysages si curieux de notre Cap corse.

En terminant, il nous reste à exprimer le désir de lire un jour l'histoire de la Castagniccia, du Niolo, du Fiumorbo, de la Cinarca, etc. écrite prr un de nos compatriote, originaire de ces contrées, en prenant pour modèle le lilvre de M. Piccioni. Nos confrères devraient avoir à coeur oe combler tant de lacunes. Le Bulletin attend, et le secrétaire est prêt à aider de ses modestes connaissances les futurs historiens de nos régions corses. ■— A. AMBROSI.


Correspondance du Comité Supérieur siégeant à Bastia {du ? mars au /f septembre . 1790), publiés"- par M. L'abbé LETTERONVill-1-98

LETTERONVill-1-98 ..... .. ... .. .. .. .". ■' .'": '..'' 2 fr.

Documents .relatifs à l episcopat- du B. Alexandre Sailli, évique ; d'Aleria, publiés par M. l'abbé VENTURIM, archiprétre de Corte, ."1 vol., de-ioo pp. .- .. .. .. ..'.:".. .. .. '.... .:. . .-" 1 fr.

..Recherches- et notes diverses sur l'Histoire de l'Eglise en Corse,

par Mgr-DE LA FOATA, évêque d'Ajaccio, 1 vol. de 394 pp.. 3 fr.

■journal de deux Campagnes en - Corse .par les troupes . impériales

- (;73:i-i732),,. -publié par M. le Capitaine E. ESPÉRANDIEU, I vol.

.de S6 pp.'. .. ... .. ... . .'. .. .; .... .••■-: •• ■-, * frLibro

frLibro de la Corse,publié par*M. l'abbé LETTERON-,892 pp. 8 fr. Délibérations et Correspondajice , du Comité Supérieur siégeant à . Bastia (du 2 mats au 7 septembre 1790),- publiées par M. Tabbé

LETTERON, 2 vol.. xvi-243 et vin-196 pp.,. . .< .'• .. ■.-'. ..'■■"■ 3 fr.

Correspondance de Sir Gilbert Elliot, Vice-Roi de Corse, avec le

',; Gouvernement Anglais: ' (Dépîches ~. d'Angleterre): .— Traduction

•■''de Mi SÉBASTIEN DE CARAFFA,' avocat; i" vol. dé vi-255 PP-'-• -2 fr—

fr— lettres de Sir Gilbert Elliot. — Traduction de M. SÉBASTIEN DE CARAFFA/-.avocat, 1 vol. vm-136 pp... ....-' .. 1 fr.

La 'Corse et la Révolution. (Extraits 'au Moniteur) par M. 'l'abbé LETTERON, I volume de 168 pages... ..." .. ...... .. '3 fr.

.La Corse après l'occupation anglaise :i correspondance du général Gçntili en 1796-1797, avec tablés, publiée par M. A. AMBROSI, 248 pages .. ..'..,. .... .. .._'-.' ■■ S frProcès-Verbaiix

frProcès-Verbaiix VAssemblée générale d?s Etats de Corse, tenue

. Jà Bastia ' en 1770, 1773., 1775, 1777 Î779; 1781 et. 1785 publiés

par M.,A. DE. MORATI et M. l'abbé LETTERON, 4 vol... .'.' 15 fr.

Lettrés de Pascal Paoli, publiées par M. le docteur PERELLI, 5 vol. 600, 752, 400, 368 et 176 pp. La collection.. ...:'.. 15 fr.

Correspondance des agents de France à Gênes, avec le Ministère (ann. 1730 et 'suivi), publiée par M. l'abbé LETTERON^ I volume .de" .604 pages.. ... . : ■-..'• .". .... .. .. 6 fr.

Genova et la Corsica, 1358-1378, par M. le général. UGO ASSERETO,

I vol. de 154 pp ....' 1 fr.

" Correspondance .de lord Nelson pendant sa croisière dans la Méditerranée avec le gouvernement anglais et sa famille, publiée par. M.'DE CARAFFA,*' 366 pages...' .. •• ■• •• ... •■ 4.frMission

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tés sans'pàirti pris.. Ce çtésir.de'.vérité n'exclut": du i-esie'ini-'-'la. poésie : ;^Ta;;-;ppr.5on'naliié ;-çn-lit ,avec un répl plaisir :cçè; - deUx,ipiÊtjts,;vo-, :-.;liïmes^!i^--la-.,.'Çi3rï;é apparaît ; comme auréolée. ''d^ïte'''-.cïafBî^''''mdcfrriis--'.' .*;«âfiî&:;i'-,?;:'..:.,-'-i.:S-.''•'■■•■. ■'. I ■'■ " ',■■'' ':..-,■-..'.'"■'■;■ "';,;. "!■■ ..-:: •■'- ' •.-,_i^Pràtipa-ilWSiiiusISj

•.-,_i^Pràtipa-ilWSiiiusISj PIERRE MORATI, . publiée.,-par M;-,Y,.-.pE':;,:CA-i■■;

M;-,Y,.-.pE':;,:CA-i■■; i; 2ivol;. in-85 : 3.52 et 514 pages. . ; . .',..-.■:'.-;':'.-, .■..'. Aï..A- ,.'-15; ïr.-' ; i,"..: C'est? le. manuel indispensable à quiconque veut, s^occuper' ctu.cî.oit;.-..'. eti de l.a.jurispTuSencé dàns'lâ Corse avant le.-XVIIIe Siècle", .L'auteur," - ..ecclésiastique, et homme de loi, a exposé, aviso béaueoup;:dé..: détails.et. . '', die;::priecisions la situation juridique de l'île,sous le gouvernement gé- .... .;:::iîpis;. . Le ,tômè I s'occupe" de l'oganisatiori administrative et judi-'--' ^çiairë;; ;.-le: tome II de ,1a "législation, de" la procédure :eh; matière..;-. .cîvilèr'Set criminelle, .des podestats et de-leur compétence, ,:." des .7 i ;fémctipïis de: notaire, etc.. --.- , ,-: ."..:.'•:■"-'-/'.'.. ".'-•--.

s^lilibrp'iRçsèo^publié par; M; l'abbé - LETTERON" : .892 ,pages^i: -,^ ïô; fr. ;/;Vi!;Jt :-jfaitt:v': entendre^ par . la Je ; recueil dé décrets " r%3ïmsnfsi:ej "f v,:^ôtésiiém;â^és/du. ^puwerneroent. génois et. rangés ..suiv,ani:',un:ior-";;': i'idjrév -ClirQnfeîogiqW' i-igouïe-iix depuis 1571 .- jusqu'en ^730/-, Iii fût,'"; ,-ii^a.roipç>sé:ipiVp .-' l'aulîivisite. diL, gouverneur .'. g-éjiois -eu -i^?^;^tt,;^l^s';v'. iiipièces.id'ârçhives. 11. présenté, donc' toute la garantie i d'une /.ceuyréV, tioffitiietie-él;,^ Toute":'';rhistoiBe."d:e-' l'MmiS-s^ftrtiorii^ër:"^.;

y I0isé:y :.cst, exposée et' c'est l'un, des rares, ouvrages que. nous':;pqs-' ''; -sSdion.si-suriiuné: période mal connue et pourtant capitale'- de 'notre: ..: i::histoire, lé, /VH' 8' Siècle; " Quiconque voudra: 'savoir ce' qtie" fut: le """■ '■"■■ gouvernement i-.-iéi Gènesi'dansi l'île .iet comment il 'prcpàTa..,l;à_''g-ra'nde.;-:;-- iJrëvolte'de/:,: 17:29 q'ur-aboutit ;à l'annexion de; U769, devra;.: ; compile*, : : âii préalable le,' Lïbro Rpsso dont nous pouvons;.-tire : cfu'iKësty "te.:.; :-jrvté x!e ^hèvét de'l'historieni insulaire. -" ■' .:ï. :« " ; ;i

ilïèsoï'Vazioniv Stcriche ècprsi-|a,i Corelsa, ipâf:..'J/abbé . AMBJ*pGXi,;,\

'iiij^dfei,;;:puMiees.,par, l'yabbé:: LETTERON ;.'ii2;- volumes -de ;^":ài^bo^pa-:-; : iii%es:;jçhaiiiiri, i;7lé;vplurrie,;:saui;;ié 5? épuisé..:v.;.....:.,,, V>-.-oi^,fr.^

"ifiAùrun -ouvragèvinei ;peut '■ donner uaè "idéjg plus; < exaxte;;eit:;plus"; ■; i^ornpîetei ;:;de,: l'Histoire, de!.; ;-lâ: Corse au^,XKI:I30>i;;!Siè^i3,';;;qu i douze:;- volumes irémplisi; dé ; '.document;,, ; ^obScrvatipnsii précises s;-et.; : ;:Bfc;f-àltsi;Scfrn'is>-p^ l£i:pi:us,;sév,èfé~,;L^bbë;^

:iHi:;vv£ritàIile historien -; ..qui,, grâce à la-faveur -, impériale; ;: a:;p;u;;;r; ■riïii^éf i-::da'&5:.'";ii--s:'-^^ teHnce:s,;et!;- ôbusl3âî|i^j^;;$S'i ^

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v«luirié.: comprend-/ la géographie -dé', l'île, au: début- drî X;ïX*/i5ièclë. ;*:. 'A)A:A-:-:-r':.'-A' -■ A-,A .-. Le tiçraht : txvoeij,£ÀsTÏÂNjA;A i;ii