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Titre : Le Matin : derniers télégrammes de la nuit

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1912-12-19

Contributeur : Edwards, Alfred (1856-1914). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328123058

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb328123058/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

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Description : 19 décembre 1912

Description : 1912/12/19 (Numéro 10523).

Description : Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail

Description : Collection numérique : La Grande Collecte

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k570375x

Source : Bibliothèque nationale de France

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 20/05/2008

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M. Léon Bourgeois refuse

la présidence de la République

Dans la petite et calme rue Palatine, que Saint-Sulpice semble abriter des bruits de la ville, hier soir, entre sept pt huit heures, deux files d'autos sont arrêtées. Des groupes vont, viennent, discutent, passent et repassent devant une haute porte. On dirait que l'attente d'une fête anime ces parages, d'où, les jours ordinaires, le mouvement s'écarte. Ce n'est pas l'attente d'une fête, c'est f attente d'une parole.

Dans l'après-midi, le groupe radicalsocialiste de la Chambre s'est réuni, a décidé une démarche auprès de M. Léon Bourgeois. Il s'agit de décider le ministre du travail à accepter la présidence de la République.

On a confiance que l'union des républicains se fera sur son nom. Le groupe de la gauche radicale a paru disposé à suivre l'exemple des radicaux-socialistes. Des modérés, des conservateurs mème ont déclaré que M, Léon Bourgeois était l'homme da la situation.

Et relançant le ministre à son domi'cile, MM. Renoult, Charles Dumont, Mé.tin, Péchadre, H". Simon, Albert Dalimier lui portent les volontés de leur Au haut de l'archaïque escalier de pierre, le grand appartement paisible offre ses salles vastes, élevées. L'art et les lettres ont ici leur demeure. Des bustes, des tableaux, des papiers, des livres, un piano l'atmosphère du sage. Cependant des éclats de voix traversent les murailles. On supplie, on démontre, on propose à côté. Les paroles se pressent, s'élèvent Léon Bourgeois subit l'assaut de ses partisans.

Une heure se passe. Des portes s'ouvrent. Sur le seuil, M. Léon Bourgeois prononce « Pour agir, comptez sur moi, mais pas pour. » Et la porte se referme sur un refus.

Nous voici dans un salon tout noir; deux lampes à huile, aux deux bouts, portent si bas leur abat-jour, cachent si bien leur pauvre lumière que nous avons peine à ne pas. heurter les meu.C'est là. dans cette ombre, que M. Léon Bourgeois vient de subir la longue adjuration de sofiLuarti. Maintenant il se repose sur un fwiteuil, laisse tomber, ses bras et dit «Je n'en peux pius

Dans la journée, M. Poincaré, président du conseil, est venu tenter une dernière démarche. Tout à l'heure, les délégués du groupe radical-socialiste sont entrés, lui ont tendu l'ordre du jour voté par le parti, à la Chambre, et qui dit Le groupé radical-socialiste émet le voeu que M. Léon Bourgeois soit le candidat du parti républicain à la présidence de la République.

En lui remettant la feuille où s'inscrivaient ces quelques lignes, les députés ont déclaré

Nous ne vous demandons pas de' réponse. Nous ne vous demandons que d'accepter ce bout de papier et de lire ce qui y est écrit. Quand vous l'aurez lu, nous nous retirerons. Notre mission sera terminée.

Mais M. Bourgeois n'a pas accepté ce rôle muet. Il n'a pas voulu que le doute pût se prolonger. Il a prononcé la parole définitive, celle que depuis des mois on retenait sur ses lèvres, celle qui lui échappait devant ses amis, que pour notre part nous avions déjà entendue au mois de juillet, mais qu'il avait consenti à suspendre jusqu'ici « Je ne puis pas être président de la République. Ma santé ne me le permet pas. »

En vain M. Renoult représente au ministre du travail qu'à l'heure où de graves complications menacent en Europe, il faut à la tête de la République une personnalité indiscutable.

M. Bourgeois se montre touché .dés sentiments qui inspirent les députés. II dit que cette démarche le remue profondément, mais que les devoirs du président de la République sont multiples, qu'il faut voyager, se déplacer, présider des banquets que sa vue affaiblie, sa fatigue, sa maladie lui interdisent les déplacements, les cérémonies. Les délégués ne se découragent pas, lui remontrent qu'il s'agit moins aujourd'hui pour la nation d'avoir un président de voyages et de banquets qu'un guide capable d'orienter les délibérations des ministres, de faire figure en Europe. Ils ajoutent qu'au cours de la réunion de leur groupe, proportionnalistes et antiproportionnalistes n'ont rivalisé que d'ardeur pour sa candidature.

Ce que vous me dites me déciderait si quelque chose pouvait me décider, répond M. Léon Bourgeois. Mais je ne suis pas un homme indispensable. L'abbaye ne chôme pas faute d'un moine. Il y a d'autres républicains que moi. M. Léon Bourgeois prononce deux noms.

Il n'y en a pas, reprend un membre de la délégation, qui réunisse au même degré que vous ces deux qualités distinctes d'un côté l'autorité devant l'étranger, assise sur l'expérience du pouvoir, et de l'autre la fermeté de doctrine qui vous assure la confiance ab*»solue de la majorité républicaine. Il s'agit de rendre aujourd'hui service à la fois à votre parti et à votre pays. Ayant parlé, les députés ne voulurent plus entendre les dénégations réitérées de M. Léon Bourgeois, et en se retirant, ils déclarèrent qu'ils ne considéraient oas son refus comme définitif. Certains parlaient de réunir, avant les

vacances, les groupes de gauche du Sénat et de la Chambre, espérant .qu'une manifestation générale de la majorité ré- publicaine déciderait peut-être en fin de compte le ministre à céder aux instances si flatteuses et si pressantes de ses amis politiques.

Si les républicains s'obstinent dans ce rêve, nous sommes bien obligés de leur dire qu'il sera déçu.

Après leur départ, M. Léon Bourgeois nous a résumé ses raisons

lls disent que les voyages n'ont pas d'importance. Ils se trompent. J'ai connu ces heures du boulangisme où un président dut faire lui-même, de ville en ville, la propagande de la République. Il n'était pas indiffèrent qu'il .reçût les fonctionnaires et les généraux, qu'il passât la revue des armées. La représentation est un des devoirs du chef de l'Etat. Elle prend une singulière importance dans les relations internationales. Un président de la République doit pouvoir aller à l'étranger, rendre les visites que lui font les souverains. Dans ce rôle, il est utile;'d son pây.s. Et ce rôle, je ne peux pas le jouer.

» Regardez, on me défend les lumières. Je vis dans la nuit. Me voyez-vous, au milieu d'une fête, avec ma lampe à huile et son petit abat-jour vert 1 Je serais ridicule. Le plus haut magistrat de France n'en a pas le droit.

» Et puis, mon Dieu on le sait. Dans ( l'état de santé précaire où je me trouve, les médecins me l'ont affirmé et répété, je suis à la merci d'un accident. Il peut survenir d'un jour à l'autre. Ce n'est rien, si je suis ministre. C'est grave pour le pays tout entier, si je suis président de la République.

» Non, non, je n'ai pas le droit d'accepter. Ceux-mêmes qui, aujourd'hui, me disent,: « Vous passerez l'hiver dans le Midi, vous vous abstiendrez des fêtes », seraient les premiers à me reprocher de ne pas remplir ma fonction. Et ils auraient raison.

» Je veux bien des responsabilités. Je ne les ai jamais fuies^ ni au moment du Panama, ni après Algésiras, quand j'ai accepté le ministère des affaires étrangères dans des circonstances, il me semble, assez difficiles, ni lorsque, pour contribuer à l'union des républicains, j'ai pris, auprès de M. Poincaré, le ministère du travail. Mais les dangers que courent, à chaque instant, ma santé et ma vie, je ne peux pas les suspendre au-dessus de mon pays.

M. Bourgeois parle d'une voix paisible et lasse, en homme qui en effet a accoutumé de vivre avec le péril et ne s'en effraye pas pour lui-même. Il sourit doucement en disant

x*x

Autrefois, quand je refusais de me présenter à quelque poste, on disait «(Il se réserve. Et l'on me supposait des ambitions à la mode de Machiavel. J'imagine que désormais on me fera grâce de ces soupçons. Je voudrais que mon détachement me donnât assez d'autorité morale pour faire prévaloir dans mon parti les conseils du bon sens. Je voudrais qu'on en crût mon désintéressement quand, dans les jours qui vont venir, je tâcherai de contribuer à faire élire par le Parlement un chef d'Etat digne de la France.

» Je ne cherche pas à échapper à la lutte. Je suis prêt à y prendre part pour assurer le triomphe des républicains. Je ne me désintéresse que de moi-même, mais pas de mon parti ni de mon pays.» xxx

M. Léon Bourgeois a tout dit. Son refus est public.

Nous quittons le salon sombre. Dans l'antichambre, nous croisons le fils de M. Léon Bourgeois. Il est médecin. De quel air joyeux il nous serre la main Il a tout fait pour éloigner de son père le fardeau de la présidence.

Maintenant que c'est fait, il respire, comme s'il l'avait sauvé.

Jean d'Orsay

Les groupes eonfinuenf à délibérer- Le groupe de la gauche radicale et le groupe radical-socialiste se sont réunis hier après-midi pour s'occuper de l'organisation de la réunion pléjiière qui doit précéder le congrès de Versailles.

I,e premier de ces groupes, celui de la gauche radicale, que préside M. Clémentel, a décidé de proposer aux bureaux des groupes de gauche du Sénat et de la Chambre les résolutions suivantes

1° II y a lieu de provoquer une réunion plénière des républicains qui désignera le candidat du parti 2° Cette réunion aura lieu au Sénat le 15 janvier 1913 3° Les progressistes ne seront convoqués' ni en groupe ni individuellement 4° Certaines personnalités qui ne sont inscrites à aucun groupe recevront des convocations individuelles.

D'autre part le groupe radical-socialiste, présidé par M. René Renoult, a voté à l'unanimité l'ordre du jour dont nous parlons plus haut.

Dans l'une et l'autre de ces réunions, la discussion a porté surtout sur le point de savoir dans quelles conditions la réunion plénière pourrait avoir lieu et sur les groupes politiques auxquels on pourrait faire appel.

Le groupe de la gauche radicale, sur cette dernière question, estime que l'on pourrait admettre les socialistes unifiés, mais à la condition que ceux-ci prennent l'engagement* d'observer la discipline républicaine au Congrès. Le groupe radical, lui, est moins intransigeant il est partisan d'admettre les socialistes s'ils demandent à participer à la réunion piénière.

Toutefois il est d'accord avec la gauche radicale en ce qui concerne les progressistes il a même donné mandat à son bureau de s'opposer à la convocation à la réunion plénière des groupes républicains progrès- sàsies et de l'union républicaine.

L'ATTITUDE

DE LA RUSSIE Sympathie pour les Slaves Fidélité aux engagements Solidarité avec V Europe DÉCLARATIONS DE M.KOKOYTZOW A LA DOUMA

Le discours prononcé hier par M, Kokovtzow à la Douma respire l'amour de la paix.,

Le goupérnement russe y témoigne d'un calme souci de sa dignité. Les provocations ne 1'ont pas atteint. Il semble que le bruit n'en soit même pas parvenu jusqu'à lut.

Il y a, dans cette attitude, de la grandeur et une profonde intelligence des intérêts de l'Europe.

Saint-Pétersbourg, 18 décembre. La Douma d'empire a entendu aujourd'hui ',a déclaration du gouvernement. Les tribunes étaient bondées.

Le président du conseil, dans un long cl i«cours, a indiqué la tâche incombant il la quatrième législature.

Celle-ci devra sè consacrer à la recherche de nouveaux moyens¡!d'amélioration de l'organisation politique et sociale de la Russie, sur !a base des principes strictement légaux établis par le manifeste du 30 octobre 1905.; Passant à l'énumération des projets de loi ? et des propositions du gouvernement, qui sont liés d'une façon organique aux réfornres de ces dernières années, M. Kokovtzow. dit que le gouvernement espère et est même certain que la quatrième législature envisagera la question de la défense nationale dans le même esprit patriotique que la législature précédente.

Sur les ordres de l'empereur, le gouvernement vous soumettra, dit M. Kokovtzow, des projets qui tous méritent votre consùlération et sont justifiés par la nécessité d'organiser nos forces armée.s il est sûr de trouver en vous une collaboration assidue dans l'exécution. de cette tâche impérieuse. Les considérations indiquées précédem- ment intéressant la défense nationale et les moyens qui doivent être mis à la disposition du gouvernement pour l'assurer. m'amènent à toucher que(ques mots d'une autre question qui suscite votre préoccupation alarmée en même temps que celle de toute la Russie.

Les vertus guerrières d'une. rare unanimité que les peuples balkaniques ont montrées ne pouvaient pas manquer de trouver, la plus chaude sympathié dans tout les coeurs ruasses.

En sa qualité de grande puissance slave orthodoxe qui a fait tant de sacrifices pour protéger ses frères de race et ses coreligionnaires, la Russie ne peut pas rester indifférente d ce que ces peuples obtiennent des. conditions d'existence qui, étant en rapport avec les exptoits si nombreux qu'ils ont accomplis, auec les intérêts nécessaires à leur développement pacifique, écarteraient pour l'avenir la probabilité de nouvelles complications toujours dangereuses pour là paix européenne.

Se rappetartt les meilleures traditions de notre Histoire, d'accord avec t'opinion publiqus russe nettement exprimée, le gouvernement impérial ne saurait certainement méconnaître l'importance primordiale des intérêts de la Russie.

La Russie maintiendra dans le calme son prestige historique Le gouvernement constate avec satssfaction qu'il n'a pas à changer l'attitude calme, prise dès le début, au mitieu de l'inquiétude et de l'excitation..

Le gouvernement n'a donné aucune raisons de nous soupçonner de desseins égoïstes ni du désir de grossir les conflits. Il a été toujours guidé par la seule idée de rester gardien de ses devoirs historiques et de sa dignité. Il serait prématuré de parler pour te montent du moyen par lequel sera résolue telle question particulière posée par les événements batkantques.

Les principes fondamentaux qui doivent guider le gouvernement, lorsque l'heure des décisions définitives aura sonné, sont indipués aussi bien par notre passé que par la nécessité de Les combiner avec les conditions de ta politique actuelle.

Fidèles à notre alliance et à nos ententes avec tes autres grandes puissances, surs de l'appui de nos amis.et de nos alliés, nous ne voyons, pour notre part, aucune utilité à opposer les groupements de puissances les uns aux autres.

Les gouvernements qui abandonneraient le terrain de la discussion commune des questions fondamentales de la situation politique actuelle, en faisant ressortir leurs in- téréts immédiats, et à plus forte ruisort leurs intérêts secondaires, assumeraient la grave responsabitité morale de complications internationales ultérieures.

Les grandes puissances ont des raisons profondes de s'efforcer de prévenir des complications pouvant devenir menaçantes pour la paix européenne.

Le gouvernement russe espère que les efforts solidaires dont elles s'inspirent les aideront s'accorder sur des solutions conciliant leurs intérêts avec les justes réclamations des Etats balkaniques. C'est pourquoi il salue de la façon la plus sincère t'initiative du gouvernement britannique qui propose une discussion préalable et en commun des questions concernant la liquidation de la guerre dans lesquelles leurs intérêts sont en jeu.

L'accueil sympathique que cette proposition rencontre dans tes capitales de l'Furope, ainsi que la réunion des ambassadeurs à Londres qui vient de s'ouvrir,, doivent, espérons-le, faciliter une solution pacifique de la crise actuelle.

Pénétré du désir sincère de coopérer par tous les moyens à la conservation de la paix européenne, le gouvernement russe exprime l'espoir. Dieu aidant, que nos efforts seront couronnés de succès et que les événements de l'avenir ne porteront pas atteinte aux intérêts vitaux russes, que nous sommes appe'de l'honneur et de la dignité de notre pays. La partie des déclarations de NI. Kokovt• zow ayant rapport à la défense nationale et aux événements balkaniques a été constamment interrompue par des applaudissements chaleureux à presque tous-les bancs, par des bravos et des « C'est juste 1)

Lés grands-ducs ont assisté à la séance, dans la loge impériale.

1 La déclaration terminée, la séance a été lei vée et la discussion remise à vendredi. )> (Bavas.)

UTpREMIER VOYAGE AÉRIEN D'AFRIQUE EN EUROPE

LE NOUVEAU RECORD DE GARROS

Sttr la flèche, indiq1umt le trajet suivi par l'aviateur, la partie en blanc représente le premier record du vol au-dessus de ta mer, établi par Blériot. Dans le médaillon, Garros, par L. de Fleurac,

Nous avons reçu le télégramme suivant

Trapani, 18 décembre,

16 heures 50.

Je viens de traverser la MMiterranée entre Tunis et Marsala, en route pour Rome, mais je suis immobilisé à Trapani par une fuite au réservoir dessoudé. GARROS.

Tunis, 18 déeembre. Dépêche particuliére du « Matin Garros; est parti ce matin, à 8 h. 7, à bord de son monoplan Morane-Saulnier.

Ainsi que nous l'avions télégraphié hier, tout avait été préparé pour le départ les contre-torpilleurs Pique et Bourrasque et trois torpilleurs fournis par l'amirauté étaient venus de Bizerte mouiller face à Carthage. Ils étaient partis successivement dans la nuit pour s'échelonner sur le trajet de l'aéroplane, et suivre de loin quand Garros les aurait dépassés.

Ce matin, le ciel était couvert, le temps frais, lé;;èrement brumeux mais le vent était faible.

A 7 h. 30, Garros arrive en automobile sur le terrain de départ. Il paraît rempli de confiance dans la réussite de son audacieuse tentative. Peu de monde se trouvait là pour assister à l'envolée on remarque le général Bertin, commandant l'infanterie de Tunisie, quelques journalistes ou amis personnels de l'aviateur. Tandis que les mécaniciens remplissent le réservoir d'essence, Garros donne des indications sur ses projets. Il compte franchir tout d'abord le cap Bon, puis se diriger vers la petite ville sicilienne de Mazara pour renouveler la provision d'essence, car le réservoir contient le carburant nécessaire pour un parcours de 300 kilomètres, et la distance à parcourir de Tunis jusqu'à la côte de Sicile atteint 26° 'Kilomètres.

Selon le temps et la direction du vent, l'aviateur teintera alors la traversée du

massif montagneux de nie pour gagner directement Palermë ou bien il suivra la côte par Marsala, Trapani, Palerme et Milazzo où il atterrira pour renouveler une autre fois la provision d'essence. Il partira ensuite pour Tropea, sur la %ôte italienne, suivra cette côte jusqu'à Naples d'où il se dirigera directement sur Rome.

Dans cette première journée, il compte atterrir en Italie, après avoir traversé la Sicile dans toute son étendue, accomplissant ainsi un trajet global de 700 kilomètres.

Tandis que Garros fournit ces renseignements, les préparatifs sont achevés. L'aviateur, craignant de surcharger son, appareil, supprime tous les -accessoires non indispensables au vo1 les bouées, la ceinture de sauvetage sont abandonnées. Il se munit d'une longue perche avec un fanion pour indiquer, en cas d'accident, la direction aux bateaux. Puis, après de brefs adieux, l'aviateur prend place au volant.

Vous prenez le bateau ce soir.? demande-t-il à son manager.

Sur une réponse affirmative

Je serai arrivé avant vous, ajoute-t-il. Je vous attendrai à Naples.

Le moteur ronfle, l'hélice tourne, l'appareil roule lentement, et bientôt il s'élève dans le ciel, à 500 mètres environ, paraît s'orienter et file droit dans la direction de Carthage.

Quelques minutes après, il plane sur le golfe de Tunis, puis, filant à toute vitesse, il est aperçu au large du cap Bon et disparaît définitivement.

ll atterrit à Trapani, en Sicile Tunis, 18 décembre. Dépêche parti- culière du « Matin A une heure, un radiotélégramme, émanant du contre- torpilleur Pique, en vue des côtes de Si- cile, fait savoir que Garros est passé.

A 2 heures, parvient une dépêche si* gnée Garros.

Ça y est. Suis en panne à Trapani. Ré; servoir crevé.

L'aviateur est donc arrivé en Sicile, et, pour la première fois, le passage d'Afrique en Europe vient d'être accompli par un aéroplane.

Garros doit repartir

aujourd'hui

Turin, 18 décembre. Du correspondant particulier du « Matin (par téléphone). On mande de Trapani (Sicile) que Garros a télégraphié à ses mécaniciens qui arriveront demain matin par le paquebot postal. L'aviateur se propose, de repartir demain matin pour Rome.

ROCHETTE

EST-IL EN FUITE ? La journée d'hier s'est écoulée sans que M. Henri Rochette se soit mis « en état ». Il ne s'ensuit pas d'une façon absolue que le financier ne se constituera point prisonnier avant l'audience où la Cour suprême doit examiner son pourvoi. Cette audience s'ouvre aujourd'hui à midi. M. Henri Rocette a donc encore toute la matinée pour se conformer à la loi.

Le fera-t-il ?

Au Palais, où le cas du fondateur du Cré«dit minier fit hier l'objet de toutes les coi> versations, on opinait pour la négative. On estimait, d'une façon générale, que M. Henri Rochette.préfêrerait infiniment passer cinq ans à l'étranger, en attendant la prescription de sa peine devenue définitive, qua trois années dans une prison française. N'ailait-on pas jusqu'à prétendre que le financier était d'ores et déjà en fuite ? A la fin de la journée, on annonçait bien que M. Henri Rochette avait tardivement saisi la cour d'appel de Rouen d'une requête aux fins de mise en liberté provisoire. C'é̃ tait là, à n'en pas douter, une suprême manœuvre de procédure. Mais on ne voyait pas bien quelle pouvait être son efficacité. En effet, M. Rochette ne peut matérielle ment plus être aujourd'hui « en état Il.

M. HENRI LAYEDAN RENONCE A M. CLARETIE

L'auteur du Ntarquis de Priola et du Duel retire ces deux pièces du répertoire de la Comédie-Française, et aussi la dernière, Servir, reçue par le comité de lecture le 22 novembre dernier.

M. Henri Lavedan nous a confirmé la nouvelle.

Oui, je reprends Servir ainsi que ses deux aînées, Priola et le Duel j'informe de cette décision irrévocable M. Jules Claretie. Les raisons de ma conduite ? Les voici

» Etant données les idées d'exaltation patriotique et de devoir militaire qui constituent le fond.de ma pièce Servir, et qui en sont la note dominante, idées que je me suis efforcé de soutenir avec autant d'ardeur que d'impartialité, j'estime n'avoir pas trouvé, en dépit de la réception de la pièce, dans le comité aussi bien que chez l'administrateur général, l'accueil que ces idées me paraissent mériter.

» Dans ma pensée, une pièce traitant un pareil sujet et se proposant d'atteindre un but assez noble demande avant tout de l'élan, de la sympathie chaleureuse, de la conviction, pour être bien défendue et interprétée. Il m'a donc paru inutile de risquer une telle pièce aussi bien sur de la tiédeur que sur des alarmes, vaines à mon sens. n Voilà pourquoi j'ai repris ma liberté. Avez-vous disposé de Servir, et en faveur de qui ?

La pièce est donnée. Je n'en veux pas dire plus, sauf qu'elle comporte deux longs actes, le premier d'une heure, le second de trois quarts d'heure.

Où s'en vont aller, portées par leur auteur, les trois pièces enlevées à Molière et à M. Jules Cîaretie ?

C'est la question que nous avons posée à M. Hertz, qui assistait à la première de Kisrnet. Le directeur de la Porte-Saint-Martin nous a répondu

+Un comédien ou une comédienne ne peut pas résilier un engagement, un auteur retirer un ouvrage sans qu'immédiatement on ne, pense à moi pour accueillir l'artiste et recevoir la pièce. L'opinion est flatteuse, mais le cas présent n6 se justifie pas. M. Henri Lavedan ne nous a donné, à Jean Coquelin et à moi, que Sire, et ce au moment où Huguenet entrait chez nous comme pensionnaire.

M. Le Bargy, consulté sur cet événement théâtral, déclare n'y être pour rien, n'avoir

plus vu M. Henri Lavedan depuis plusieurs mois.

Je n'aurais d'ailleurs pas choisi le moment où 'a Comédie-Française me fait un procès pour accomplir la moindre démarche auprès de l'auteur de Priola, qui est mon ami, et tenté de peser d'une façon quelconque sur son projet de quitter, lui aussi, la Maison de Molière. C'eût été de ma part peu délicat.

Restait, pour compléter notre enquête, à interviewer M. Jules Claretie.

L'administrateur général de la ComédieFrançaise nous dit

Je suis surpris très. douloureusement de ce procédé qui consiste à donner le texte d'une lettre dans un journal alors que le destinataire n'a rien reçu de l'expéditeur. Vous m'apprenez tout. Je voudrais douter. Mécontent, M. Henri Lavedan nous retire Serutr. Pourquoi ? Avec le total de responsabilités possibles, comme j'avais reçu l'ouvrage, je l'aurais joué.

La pièce renfèrme-t-elle donc dans son sujet, un de ses personnages, ses tendances ou ses conclusions, un danger quelconque ?

J'aurais pris, je vous le répète, toutes les responsabilités. Enfin, c'est le droit de M. Henri Lavedan de retirer lé Marquis de Priola et le Duel, puisque la Comédie n'a donné aucune des deux pièces depuis un an. Quant à Servir. Le comité se prononcera sur le cas.

Ajoutons quelques détails inédits sur Servir, qui comporte, on le sait, deux actes et n'a que cinq personnages. C'est une étude, mieux un conflit entre un père et son fils sur le devoir patriotique. M. Pau' Mounet devait personnifier le père. La réception par le comité ,le lecture ne se fit point d'enthousiasme. M. Henri Lavedan fait allusion à cette tiédeur, dans son interview lue plus haut. L'admission définitive aurait eu lieu, avec certaines réserves.

Enfin M. Guist'hau, ministre de l'instruction publique, aurait eu connaissance du manuscrit, qui lui aurait été communiqué officieusement. Nous croyons savoir que M. Henri Lavedan a été reçu, il y a deux jours, par M. Guist'hau, et lui a fait part de sa détermination

On donne en dernière heure, comme théâtre ayant reçu Servir, et devant le monter prochainement, le Gymnase ou la Renais-

L'EPILOGUE D'UN* DRAME M. WETZEL

S'ÉTAIT SUICIDÉ On repêche son cadavre de la Seine

Le cadavre de M. Jean Wetzel, adminis* trateur de plusieurs grands hôtels parisiens, a été repêché hier à Courbevoie. Nous avions signalé sa disparition et les diverses hypothèses auxquelles elle avait donné lieu.

M. Wetzel s'est suicidé parce qu'il avait subi de'grosses pertes d'argent.

C'est le 9 rovembre dernier que M. Jean Wetzel quitta, vers huit heures du matin, son domicile, 229, rue Saint-Honoré, pour visiter, ainsi qu'il le faisait très régulièrement chaque jour, ses divers établissements. <

Avant son départ, M. Wetzel avait an. noncé à sa femme que devant surveiller les apprêts d'un banquet qui avait lieu le soir même au Majestic, il ne rentrerait-pas dé.jeuner. M. Wetzel ne parut point ce jour-là au Majestic. Il ne reparut pas non plus à son domicile, et les jours s'écoulèrent sans que les recherches entreprises par la famille pour retrouver la trace de M. Wetzel. eussent donné un résultat.

Peu de temps avant son départ, M. Wet.zel, nous l'avons dit alors, avait fait à la Bourse des pertes sensibles 150.000 francs, disait-on.

Un ami de M- Wetzel, M. Tauber, président du conseil d'administration du Majestic Hôtel, nous déclara

Surmené de travail, M. Wetzel était de- puis quelque temps en proie à des crises graves de neurasthénie. Sous l'empire $(Voir la suite en 2» page, 2e colonneu