58 LIVRE I. — LA FONCTION.
qu'ils se recherchent avec passion. Toutefois, comme dans le cas précédent, ce n'est pas un contraste pur et simple qui fait éclore ces sentiments réciproques : seules, des différences qui se supposent et se complètent peuvent avoir cette vertu. En effet, l'homme ot la femme isolés l'un do l'autre ne sont que des parties différentes d'un mémo tout concret qu'ils reforment en s'unissant. En d'autres termes, c'est la division du travail sexuel qui est la source de la solidarité conjugale, et voilà pourquoi les psychologues ont 1res justement remarqué que la séparation des sexes avait été un ôvénoment capital dans l'évolution des sentiments; c'est qu'elle a rendu possible lo plus fort peut-être de tous les penchants désintéressés.
Il y a plus. La division du travail sexuel est susceptible do plus ou do moins; elle peut ou ne porter quo,sur les organes sexuels et quelques caractères secondaires qui en dépendent, ou bien au contraire s'étendre à toutes les fondions organiques et sociales. Or, on peut voir dans l'histoire qu'ello s'est exactement développée dans lo môme sens et do la môme manière quo la solidarité conjugale
Plus nous remontons dans le passé, plus elle se réduit à peu do chose. La femme do ces temps reculés n'était pas du tout lit faible créature qu'elle est devenue avec les progrès de la moralité. Des ossements préhistoriques témoignent que la différence entre la forco do Thommo et celle do la femmo était relativement beaucoup plus petite qu'elle n'est aujourd'hui (l). Maintenant encore, dans l'enfance et jusqu'à la puberté, le squelette des deux sexes ne diffère pas d'une façon appréciable : les traits en sont surtout féminins. Si l'on admet que le développement de l'individu reproduit en raccourci celui de l'espèce, on a le droit do conjecturer quo la mémo homogénéité se retrouvait aux débuts de révolution humaine, et de voir dans ta forme féminine comme une image approchée de ce qu'était originellement ce
(•) Topinard, Anthropologie, p. 140.