Rappel de votre demande:


Format de téléchargement: : Texte

Vues 1 à 1 sur 6

Nombre de pages: 1

Notice complète:

Titre : Le Petit Parisien : journal quotidien du soir

Éditeur : Le Petit Parisien (Paris)

Date d'édition : 1907-07-28

Contributeur : Roujon, Jacques (1884-1971). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34419111x

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34419111x/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 126844

Description : 28 juillet 1907

Description : 1907/07/28 (Numéro 11230).

Description : Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail

Description : Collection numérique : La Grande Collecte

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5625856

Source : Bibliothèque nationale de France, Gr Fol-Lc2-3850

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 27/03/2008

Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 100%.


EDITION DE PARIS

Lettre ouverte à Mimi Pinson Mademoiselle,

Vous ne me connaissez pas, mais moi je vous connais depuis longtemps quoique vous soyez bien jeune encore. Lorsque vous étiez toute petite, je vous ai rencontrée sortant de l'école, vêtue d'un tablier noir, serré à la taille par une ceinture de cuir. Vos cheveux blonds étaient courts, un nœud de ruban rouge les liait d'une coque savante et pointait dans leur broussaille comme un coquelicot dans les blés. Vous portiez à la main le panier où voisinaient les livres et le reste du goûter. Vous alliez par les rues d'un pas traînant, enlaçant la taille d'une petite camarade, échangeant avec elle des confidences.

Vous racontiez à l'amie élue par votre cœur toutes les menues choses qui composaient alors votre vie. Vous lui disiez ce que vous aviez surpris déjà des difficultés de l'existence, comment un sourire de la maîtresse d'école vous avait illuminée, pourquoi vos joues étaient rouges d'une taloche ou vos yeux brillants d'un plaisir promis. Votre camarade vous répondait. Elle aussi elle passait par les mêmes joies et les mêmes souffrances.

Ce rêve à deux, fait de plaisirs com- muns et de peines partagées, c'était alors tout votre roman quotidien. Vous vous sépariez au seuil du logis avec un gros baiser, en disant à demain. Jusqu'au lendemain vous viviez avec l'espoir du jour prochain qui ramènerait des confidences nouvelles sur des sujets toujours pareils. Ainsi passait votre enfance. et vous ne saviez pas alors toute la joie qu'il y a, à vivre au jour le jour, avec les seuls soucis de rheure qui passe. Puis vous avez grandi et je vous ai revue à l'heure où vous commenciez votre apprentissage.

Vous étiez encore une petite fille, et déjà vous connaissiez tous les soucis j d'une femme. Le dîner, le goûter, n'é- j taient plus préparés dans ces petits pa- niers où la maman jadis rangeait chaque matin des choses bonnes, venues on ne sait d'où, comme par miracle.

Vous appreniez alors qu'il faut tra- cailler pour vivre.

A midi, vous couriez acheter le plat du jour au.coin de la rue. Vos cheveux, tressés en un chignon serré, ne pen- jdaient plus sur vos épaules. Les grandes j vous regardaient avec hauteur et vous vous moquiez de leur allure coquette. L'emplette finie, vous rentriez vite à l'atelier dévorer sur un coin de table, en j croquant à belles dents, le pain blanc encore chaud du four.

Et vous parliez, vous parliez. Quand vous étiez seules, les petites, loin des grandes qui vous méprisaient un peu, vous songiez qu'un jour viendrait où vous seriez grandes aussi. Mais c'était' un éclair. Vite vous disiez des histoires « L'amoureux de la grande Marthe, qui est si vilain, ma chère Le frère de Renée, tu sais, ce beau brun qui vient la chercher tous les soirs et qui la recon- duit tout en prenant le bras de Lucie, la petite boulotte. »

Et cela durait. durait toute une heure, jusqu'à ce que les grandes revins- sent et que la première eut rétabli l'ordre d'un éclat de voix bref et sévère. Le soir, quand vous remontiez en bandes vers la demeure paternelle, vous étiez un peu lasses, mais vos yeux vifs regardaient chaque chose. Les passants, les boutiques, les voitures, les omnibus, les automobiles, tout était prétexte à un rire sonore, vite étouffé, de gamine qui s'amuse du spectacle de la vie des autres, avant de se retrouver seule en face de sa propre vie.

Plus tard, vous étiez une jeune fille déjà consciente de tout ce qu'il y avait en vous de grâce et de beauté.

Le matin et le soir, tout le long de la route qui conduit à l'atelier, vos yeux se miraient aux glaces des devantures et d'une main rapide, vous redressiez votre chapeau, vous rameniez une mèche rebelle ou vous tapotiez doucement votre jupe pour effacer un pli malencontreux. Les passants vous regardaient, et vous éprouviez un léger orgueil en sentant peser sur vous les regards des hommes. Vous alliez par les rues, comme au temps lointain de l'école. Mais vos pensées ne s'arrêtaient plus aux petites choses qui les retenaient jadis.

Des femmes passaient dont vous regardiez avec un peu d'envie les robes et les bijoux Toutes ces voitures qui se croisent, toute cette vie intense de la ville, vous disaient qu'il existe au monde d'autres préoccupations que celle d'aller Chaque jour à l'atelier ou d'en revenir. Et pourtant vous alliez droit votre chemin sans vous en laisser détourner par des pensées vagues ou de chimériques désirs. Pendant des années je vous ai rencontrée ainsi, seule, jusqu'au jour où la solitude enfin, vous a pesé. Les parents étaient vieux, la mort cruelle les avait enlevés, soudain. Alors vous avez compris qu'il ne fallait pas vivre dans la solitude mauvaise conseillère. Vous avez écouté les propos d'un ami, d'un véritable ami, qui a mis loyalement sa main dans la vôtre.

Maintenant vous êtes deux, quand je vous rencontre. Ensemble vous allez par les rues, le soir, recherchant les coins d'ombre et de mystère. Vos mains se joignant et vos deux têtes sa pen&heAt

l'une vers l'autre, comme pour se prêter un mutuel appui.

Vous faites des rêves d'avenir, de bonheur, toutes vos espérances volent autour de vous comme des oiseaux légers. C'est l'heure douce de la vie, mademoiselle, savourez-la bien.

Mariez-vous et plus tard, à l'heure où tous vos rêves se seront évanouis, après qu'ils vous auront déçue ou comblée, pensez à l'instant où ils sont éclos, pensez-y sans amertume. La vie vaut la peine qu'on la vive tout entière, avec courage quand elle est mauvaise, avec enthousiasme quand elle est belle. C'est le vœu de votre vieil ami qui vous connaît depuis si longtemps, quoique vous soyez bien jeune encore.

LES

Elections d'aujourd'hui On va procéder aujouixitrai aux élecOg* tions des conseillers généraux dans des conditions de calme absolu. Jamais une consultation du suffrage universel n'a causé aussi peu d'agitation et H faut s'en féliciter. Sans doute les assemblées départementales n'ont pas de rôle politique à jouer et elles doivent se consacrer aux intérêts locaux mais pendant trop longtemps les adversaires de la République livraient des combats sur tous les champs de bataille.Maintenant üs y ont renoncé, et ceux qui posent leur candidature ne se risquent pas à discuter nos institutions.

Les lois qui avaient excité le plus de colères sont acceptées en fait par ceux-là mémes qui espéraient trouver là une plateforme d'opposition. Le temps a fait son œuvre habituelle.

D'une façon générale, il faut reconnaître, d'ailleurs, que le pays se désintéresse de plus en plus des luttes purement politiques. Il a trouvé dans le régime républicain la forme de gouvernement qui convient à la passion du Français pour l'égalité. Le système électif, à tous les degrés de l'organisation gouvernementale, répond à la conception nationale.

Les monarchistes, qui se déguisaient sous le nom de ralliés, ont déserté la lutte. Le scrutin, qui s'ouvre en ce moment, va choisir parmi des candidats républicains ceux qui sembleront répondre le mieux aux aspirations des électeurs. Les résultats touchent des questions de personne et rien de plus. On a dit souvent « Heureux les peuples qui n'ont pas d'histoire cette pensée peut s'appliquer au fonctionnement normal d'une constitution.

La tranquillité, quand des élections ont lieu, est un fait favorable à tous égards, un gage de stabilité et par suite de progrès car les temps calmes permettent seuls la réalisation des sages réformes.

LA MORT DE M. Of GEYER O'ORTH LES AUTEURS DO CRIME DEVANT lE JURY CORSE /ne notre correspondant particulier/

Bastia, 27 juillet.

Une cause sensationnelle se déroule actuellement devant le jury de la Corse, siégeant à Bastia.

On y juge, en effet, l'auteur du meurtre commis sur le lieutenant de Geyer d'Orth. Les lecteurs du Petit Parisien se rappellent que ce jeune officier, arrivé en Corse depuis tràs peu de temps, fut tué d'un coup de revolver par un jeune homme corse, Philippe Antonetti, qw prétendit avoir voulu venger l'honneur de sa jeune sœur, Angèle, que j M. de Geyer d'Orth avait séduite.

Jules Antonetti, frère cadet de Philippe, et la jeune Angèle, comparaissent comme complices.

Les affirmations u" Angèie

On procède tout d'abord à l'interrogatoire 1 d'Angèle Antonetti, jeune fille de seize ans, qui prétend avoir été séduite par l'officier, ce que ce dernier a nié avant sa mort. La jeune Angèle, servante à la pension où mangeaient les officiers, avait remarqué le lieutenant de Geyer d'Orth et avait été à ce point familière avec le jeune officier qu'à maintes reprises elle lui avait adressé des billets que le jeune officier trouvait dissimuI lés dans sa serviette.

Des relations intimes suivirent-elles cette petite intrigue ? La jeune fille l'affirme, mais le fait est loin d'être établi. Et c'est sur ce point que se concentre tout l'intérêt de l'affaire, car si la victime a eu des relations avec la jeune servante, on se trouve en présence d'une vendetta, crime de peu d'importanoe, étant données les mœurs corses, tandis que, dans le cas contraire, les membres de la famille Antonetti se seraient livrés à un odieux chantage.

Les témoins entendus jusqu'ici et l'interrogatoire de la jeune fille tendraient plutôt à faire admettre cette seconde hypothèse les premiers sont très affirmatifs et des contradictions 'lagrantes ont été relevées dans les réponses d Angèie Antonetti.

La jeune fille prétend notamment avoir p&ssé la nuit du lundi de Pàques dans la chambre de l'officier, qu'elle aurait quitté seulement à sept heures du matin, alors que l'ordonnance de M. de Geyer d'Orth affirme que le lieutenant était seul à six heures du ¡matin lorsqu'il est venu le réveiller. Après un sévère réquisitoire du ministère public et une belle défense de M" Paul Roux, le jury rapporte un verdict affirmatif à la suite duque! sont condamnés Philippe Antonetti, aux travaux forcés à perpétuité; .Jules Antonetti, à dix ans, et Angèle Antonetti, à cinq ans de la même peine. ÉCRASÉ PAR UNE CHAUDIÈRE iDe notre correspondant particulier/

Remiremont, 27 juillet.

Un terrible accident vient d'arriver à la 1 grande usine de filature. Un employé de cet établissement, M. Augustin Claudel, trentesix ans, dirigeait le chargement sur un wagon d'une chaudière du poids de 5,000 kilogrammes, lorsque soudain une chalne d'attache se rompit et l'énorme masse en tombant écrasa lUtéxaleiAeni M. Claudel.

LA LÉGENDE DE VOGRESSE A VÉCU

l'INNOCENCE DE JEANNE WEBER EST ENCORE UNE FOIS RECONNUE Procédant à une nouvelle autopsie, les médecins légistes de Paris établiaeent que le petit Bavouzet a succombé à une affedion intestinale. L'incroyable oubli de lenrs confrères de province.

CL Valéry. Jeanne Weber CI. Pirou, bd St-Germain Le docteur Socqnet Le docteur Thoinot

(DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL)

Villedieu-sur-Indre, 27 juillet

Pour la seconde fois le cercueil du petit Auguste Bavouzet vient d'être ouvert et, pour la seconde fois aussi, la science a proclamé l'innocence de Jeanne Weber. Après l'autopsie minutieuse qui a été pratiquée, ce matin, au cimetière de Villedieusur-Indre, par les professeurs Thoinot et Socquet, les docteurs Charles Paul et Dervieux et à laquelle j'étais seul à assister, après la discussion qui a suivi entre les éminents praticiens et leurs collègues de Châteauroux, il ne peut subsister aucun doute Jeanne Weber est victime d'une inconcevable fatalité, mais elle ne saurait être- suspectée plus longtemps des manœuvres criminelles dont on l'accuse. Elle n'a été pour rien dans la mort de cet enfant, qui a succombé normalement à une affection grave, dont les docteurs Thoinot et Socquet ont pu déterminer nettement le caractère. Le poids du passé

Jeanne Weber a été suspectée puis accusée, non pas après le décès immédiat du petit Auguste Bavouzet, mais çraand on a connu sa véritable identité. C'est là une remarque à retenir. Si Jeanne Weber avait pu garder l'anonymat, personne n'aurait songé à l'incrimurer. Que s'est-il donc passé ? Après que le jeune Bavouzet eut rendu le dernier soupir, un premier médecin, le docteur Papazoglou, auquel on avait raconté que, la veille, l'enfant était allé à la noce et s'était bourré de galette, conclut tout naturellement à une indigestion. Il ne fut pas sans voir des traces rougeâtres sur le front, au cou et sur différentes parties du corps mais, parce qu'elles ne lui paraissaient pas anormales, il ne chercha pas. à en connaître les causes.

On allait procéder à l'enterrement, lorsque, tout à coup, une accusatrice se dressa Germaine, la fille aînée du père Bavouzet. Elle courut à la gendarmerie et révéla tout ce qu'elle savait sur cette femme étrangère que son père avait fait venir sous son toit, et qui, du jour au lendemain, avait pris dans la maison une autorité contre laquelle elle avait vainement essayé de lutter.

Aux gendarmes, elle dit que cette étrangère était la fameuse Jeanne Weber. Vous savez, celle qui a assassiné tous les enfants qui lui ont été canfiés bien sûr c'est elle qui a fait mourir mon frère. N'at-elle pas déclaré un jour qu'elle était en colère qu'elle nous supprimerait tous comme les autres.

Et, à l'appui de cette déclaration, la jeune fille invoqua les témoignages de sa propriétaire, Mme Faguet-Belaire, et de sa fille, qui occupent une cnaumière voisine de la sienne. Plus tard, ces dames, entendues par le juge d'instruction, tirent cette déposition Nous ignorions quel était le vrai nom de la femme que M. Bavouzet avait fait venir chez lui. Jamais nous n'avons entendu le propos que lui prête Germaine. Elle était bonne pour les enfants et notre impression sur elle n'est pas mauvaise.

Les docteurs Audiat, médecin légiste, et Bruneau sont commis par le parquet. Ils doivent pratiquer l'autopsie afin de déterminer la cause de la mort du jeune Auguste Bavouzet.

J'ai eu sous les yeux le premier rapport du docteur Audiat. fait le lendemain du décès. Il y est écrit en toutes lettres La mort est naturelle. Toute idée criminelle doit être écartée Il.

Il n'était pas alors question de Jeanne Weber, mais, après l'autopsie, les révélations se sont produites. L'opinion publique s est émue tout le monde accuse, tes apparences sont contre cette mauvaise femme. L'enfant était bien portant, on le croyait du moins, il n'aurait pas dû mourir aussi brusquement si une main criminelle n'avait, ou serré la gorge ou comprimé son coeur.

Les docteurs Audiat et Bruneau remettent un second rapport. Cette fois, il diffère sensiblement du premier. Ils n'affirment rien, ils ne le peuvent pas, mais les réserves qu'ils font permettent au juge d'instruc-' tion d'emprisonner Jeanne Weber. Et la voilà à la prison de Châtetturoux sous man-'dat de dépôt.

M- Henri Robert, l'éminent avocat, qui. déjà fort de l'opinion des hommes de science les plus e.ulorisés, avait, une première fois déjà, devant la cour d'assises de la Seine, fait triompher l'innocence de Jeanne Weber, tient à l'assister une seconde fois et demande et combien il a eu raison qu'une contre-autopsie soit pratiquée. Les viscères, analysés au laboratoire de toxicologie, par le docteur Ogier, ne contiennent rien d anormal et ne peuvent donner lieu à aucune interprétation ambiguë. Te1, est le premier résultat obtenu.

Les docteurs Thoinot et Socquet qui, sur la demande du parquet de Châteauroux, fui rent désignés par le parquet de Paris, prenlient tout d'abord connaissance du rapport dans lequel leurs confrères avaient consii|BQé te résultat de. leurs observât»!». M ne

leur semble pas que oeux-ci aient suffisamment démontré que la mort du jeune Bavouzet puisse être imputée soit à la suffocation, soit à la compression du coeur., Il était nécessaire d'exposer ces préliminaires d'une instruction, laquelle, péniblement échafaudée, vient de s'écrouler alors qu'au contraire on croyait l'étayer sur des bases solides.

L'Exhumation

A neuf'heures donc, ce matin, MM. Blavin, procureur de la Répuhlique Bellot, juge d'instruction, et son greffier, M. PérardMasson de Mcntalivet, maire de Villedieusur-Indre Rathouis, adjoint, et les professeurs lhoinot et Socquet, assistés des docteurs Charles Paul et Dervieux, pénètrent dans le cimetière du village.

Devant le caveau de la famille Montalivet, une table était dressée sur deux tréteaux, et aussitôt les fossoyeurs y déposent le cadavre du petit Auguste Bavouzet, dont la décomposition est déjà très avancée.

Les médecins, en blouse blanche, se mettent aussitôt au travail. Les docteurs Audiat et Bruneau qui, eux, n'ont pas dépouillé !eu*>s vêtements; les regardent (aire, 'arpentent les allées de long en large et n'ont pas Vair satisfait. Ils manifesteront tout à l'heure leur mauvaise humeur d'une façon plus précise. Pour le moment, ils se contentent de se désintéresser des opérations en cours. L'Autopsie

Cependant, le docteur Socque! a ouvert le l'enché sur le cadavres, le praticien plon- ge tout naturellement tes mains dans une bouillie visqueuse et noirâtre, retire ce qui reste des viscères et les dépose à côté de lui, dans une cuvette- Pendant qu'il les lave et les examine, le professeur Thoinot reconstitue le ccu à moitié décollé du tronc et, avec une lancette, il pratique, tout autour, de petites incisions qui vont lui permettre de voir dans cette chair pourrie, s'il y a des traces d'ecchymoses, car on sait qu'elles ne disparaissent pas sur les cadavres même les plus putréfiés. Il en relève une seule, insignifiante et légère, derrière la colonne vertébrale. Le coeur le foie et les poumons sont tour à tour détachés, sectionnés, examinés, tournés et retournés dans tous les sens ils ne présentent aucun caractère anormal.

Mais voici l'intestin que le docteur Socquet, qui s'est assis sur une chaise devant la table, coupe tout doucement dans toute sa longueur, Son. examen est plus long à lui seul que celui de tous les autres organes réunis. Par moments le docteur Thoinot pousse des exclamations, regarde en transparence

Voyez donc, voyez donc, ces taches rouges, dit-il, je ne m'étonne plus à présent. Et ces grosseurs, qu'en penses-tu, Socquet ? M. Socquet jette un coup d'œil de mon côté et répond

Nous en reparlerons tout à l'heure. Et le docteur Thoinot, après avoir prié ses confrères Audiat et Bruneau de venir constater ce qu'il avait découvert, prélève différentes parties de l'intestin et les remet aux docteurs Charles Paul et Dervieux qui les enferment dans des flacons de formoL La Mort était naturelle

C'est certainement une affection très grave, et nettement caractérisée, de l'intestin qui a déterminé le décès du jeune Auguste Bavouzet,. Or, retenez bien ceci les docteurs Audiat et Bruneau avaient déclaré tout simplement dans leur rapport qu'il était sain et ne donnait lieu à aucune remarque. Comment pouvaient-ils le savoir, puisqu'ils ne l'avaient même pas ouvert ? C'est l'observation qu'a faite, très justement, le professeur Thoinot quand ces messieurs lui ont déclaré qu'ils s'étaient bien doutés des phénomènes relevés par eux, mais qu'ils les avaient attribués à une cause toute autre.

D'ailleurs, a ajouté M. le docteur Audiat, sur un ton aigre-doux, vous avez discuté notre rapport d'une façon peu courtoise, vous avez été meint jusqu'à en critiquer lu forme. Si vous aviez vu. comme M. Bruneau et moi le corps immédiatement après la mort, vous auriez une tout autre opinion.

Mais, a fait remarquer M. Socquet, vous constatez bien avec nous les traces que nous vous avons montrées dans l'intesLin.

C'est possible, mais nous ne pouvons les apprécier au même point de vue le notre est tout diflérent.

Cependant, dit le docteur Thoinot, c'est l'évidenoe mème et vous êtres commis comme nous Mon confrère et moi, répliqua sèchement le docteur Audiat, ne pouvons nous associer à votre rarport. Nous ne le signerons donc pas. Nous n'avons plus rien à faire ici, conclut le docteur Bruneau, allons nous-en.

Et après avoir salué cérémonieusement les docteurs Thoinot et Socquet; ces messieurs se retirèrent et allèrent porter leurs doléances au procureur et au juge, très ennuyé de l'incident.

plue que les docteurs Charles Paul et Dervieux, n'ont émis le moindre doute sur les causes du décés du jeune Bavouzet. leur opinion est faite sans restriction et leur rapport, qu'ils vont rédiger, obligera le juge d'instruction, que cela lui plaise ou non, à rendre Jeanne Weber, injustement emprisonnée depuis trois mois, à la liberté. ÉVADÉ DE LA GUYANE

Coutances, 27 juillet.

Le parquet été informé ce matin que Bazire, condamné à mort le 18 mars 1905 par la cour d'assises de la Manche, pour avoir assassiné, le 12 janvier précédent, son oncle, M. Le Juez, retraité de la marine, habitant la commune de NouainviLle, et dont la peine avait été commuée en celle des travaux forcés à perpétuité, s'est évadé de la Guyane où il avait été transporté. LA MOITIÉ DU QUARTIER NECKER PRIVÉE D'EAU PENDANT 43 HEURES Cela est à peine croyable. C'est pourtant vrai. Toute la partie du quartier Necker située entre la rue de Vaugirard et le boulevard Pasteur a été, du lundi soir 22 juillet au mercredi matin 24, absolument privée d'eau.

Aucun avis préalable n'avait été adressé aux locataires de ce quartier si populeux! 125 bis, rue de l'Abbé-Groult, au service municipal des eaux, les bureaux sont fermée « pour quelques jours u, dit une affiche laconique

Au siège social de la Compagnie, où les habitants affolés téléphonent, on répond Le service du quartier est seul compétent.

Or, le « service compétent » est fenné Il pour quelques jours et c'est pourquoi on ne put faire, pendant quarante-trois heures, ni cuisine, m toilette dans un quartier de Paris

L'HOMME DE SAINT-NOM-LA-BRETÈCtiE

m POUR LE RESTE, RETICENCES ET MYSTERE Tout est troublant et déconcertant dans l'aventure de Robert ou Léon Klein. Les Médecins croyant avoir affaire à un simulateur l'ont soumis à une épreuve décisive. Un curieux d'amnésie.

Le réveil du jeune inconnu trouvé à SaintNom-la-Bretèehe dans les étranges circonstances que nous avons relatées fut celui de l'homme dont le sommeil a été hanté par un affreux cauchemar.

Ou suie-je ? s'écria-t-iL levé sur son séant.

Le mystérieux personnage avait été transporté, nous l'avons dit, à l'hôpital de SaintGermain.

A scn arrivée, dans l'après-midi de vendredi, on l'avait installé dans la salle SaintVincent et couché dans le lit n° 17.

Vers quatre heures, le médecin de service jetait venu l'examiner. Le cas lui parut extraordmaire. A sa connaissance, jamais il n'avait eu un malade de ce genre. L'homme devait simuler le sommeil. Des pointes de feu lui feraient certainement reprendre ses sens. Et, sur-le-champ, il lui en appliqua un dizaine aux poignets et aux jambes. L'homme ne broncha pas. A peine remarqua-t-on une imperceptible contraction de ses paupières. Ses lèvres ne remuèrent pas. Il ne prononça pas un mot. Il s'éveille et parle

Il avait repris son somme et continuait à respirer avec une sorte de ronfle.nent dénoi tant l'extrême faiblesse dans laquelle il se trouvait lorsque, brusquement, un peu après minuit, il s'était réveillé.

Le garçon de salle et le gardien de la paix qui se tenaient assis non loin de scn lit étaient accourus.

Qui êtes-vous donc ? Me direz-vous enfin où je suis fit-il sur un ton décelant une certaine irritation.

Calmez-vous, mon ami, lui répondit le garçon de salle. Vous étiez malade et on i vous a conduit à l'hôpital.

Tout en lui parlant ainsi, il l'obligea à s'étendre dans son lit.

Un peu rassuré, il voulut bien faire connature son idenüté.

Je m'appelle Léon Klein, dit-il. J'ai vingt-six ans. Je suis arrivé de New-York depuis le 18 courant. J'étais là-bas profesBien que sachant parfaitement notre langue on n'allait pas tarder à savoir, en effet, qu'il était de nationalité française et avait vu le jour à Paris Klein parlait avec une extrême difficulté. Le débit était haché. On l'eût crû affligé de bégaiement. C'est que l'épreuve qu'il yenait de traverser avait complètement épuisé ses forces.

Laissez-moi, dit-il, je n'en puis plus. Et sa tête retomba lourdement sur l'oreil1 ler. Jusqu'au matin huit heures, on le laissa reposer.

Ce qu'il dit au commissaire oe moment arriva à l'hôpital M. Carette commissaire de police de Saint-Germain, qu'accompagnait son secrétaire. Le magistrat s'approcha du lit. Il avait hâte d'être fixé sur 1 aventure.

Une heure durant il le questionna. A la fin les médecins intervinrent. Klein était harassé. Ordre fut donné de ne plus laisser personne arriver jusqu'à lui. M. Carette avait d'abord appris à Klein qui disait ne se souvenir de rien qu'on l'avait trouvé étendu sur le sol et paraissant dormir à Saint-Nom-la-Bretèche, sur la place de l'Eglise.

Le professeur, après un moment de silence avait prononcé

¡ Pourtant, monsieur, je ne connais pas du tout le pays dont vous me parlez. Comment y suis-je venu ?

» Ah! mais oui. On m'y a amené. C'est cet homme brun qui conduisait l'automobile, mardi.

Petit à aetit» ses souvenirs lui revenaient

NOTRE APPEL A ETE ENTENDU

l'Académie das Sciences, des Amis, secourent ;e professeur Mouchot,

M. Darboux, secrétaire perpétuel de l'Adémie des sciences, fera le nécessaire pour que le vieux savant puisse terminer paisiblement sa vie.

Le monde savant, les anciens élèves du professeur Mouchai ont été profondément émus par les révélations du Petit Parisien sur la situation du vieux savant.

C'est ainsi qu'hier M. Darboux, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, se rendait chez NI. Buchotte, commissaire du quartier et lui déclarait

« Le Petit Parisien nous signale une infortune. Je viens au nom de l'académie, la soulager. L'argent dont a besoin M. Mouchot, il l'aura. Si sa pension de retraite ne lui suffit pas, nous y pourvoirions. Nous allons, d'ores et déjà, nous occuper de lui trouver une demeure paisible et saine où il puisse, sans inquiétude, achever son œuvre et sa vie.

» Du reste, de la rapide enquête à laquelle j'ai procédé dès que j'ai eu sous les yeux l'article du Petit Parisien, il résulte que, depuis pas un centime n'a été versé au professeur sur sa retraite. Personne ne s est présenté, et nous ignorions cet état de choses. Nous allons y remédier sans retard » Il ressort indirectement de ccs paroles que Mme Mouchot, dont la raison était très affaiblie, avait négligé depuis longtemps de toucher la rente du vieux savant.

Ajoutons que deux anciens élèves de M. Mouchot ont adressé à M. Buchotte la somme de 40 francs pour leur maitre d'autrefois, et que c'est d une voix émue que le vieillard, auquel nous sommes allés nousmêmes porter ces bonnes nouvelles. a remercié le Petit Parisien et ses bienfaiteurs.

On a voulu me faire disparaître, repritil. Pourquoi '? Je ne sais pas. Peut-être pour me voler. Il me restait encore 125 dollars. Le magistrat apprit alors au jeune homme que cette somme n'avait pas été retrouvée sur lui et qu'il lui manquait également son gilet.

Depuis mardi, continua le jeune homme, depuis le moment où, vers six heures du soir, on me mit dans une automobile, j'ai perdu la notion de tout. J'ai beau chercher, je ne puis parvenir à me rappeler quelles manœuvres ont été opérées sur moi qui m'ont mises dans l'état où l'on m'a trouvé. Klein raconte sa vie

Voulant lui donner un peu de répit, le commissaire de police fit faire une diversion à son questionnaire.

Klein parla alors de sa jeunesse.

Il dit qu'il avait fait ses études à Paris et qu'il était parti pour l'Amérique, il y a cinq ans, comme professeur de français. Il se rendic au Canada, laissant en France sa mère, sa soeur et une tante.

A Montréal, l'hiver dernier, le jeune homme était tombé gravement malade. Il dut entter à l'hôpital où il fit un long séjour. A sa sortie de cet établissement, il se rendit à New-York où il fut présenté à Mme Pierpont-Morgan, la femme du célèbre multi-milliardaire, qui voulut bien s'intéresser à lui.

Quand, quelque temps a.près, Klein annonça à sa bienfaitrice son intention d'aller faire un séjour en France pur rétablir sa santé, Mme Pierpont-Morgan délia pour lui les cordons de sa bourse. Elle paya son passage à bord du transatlantique la Provettce et lui donna quelques lettres de recommandation. Elle fit plus. Elle inséra, dans una enveloppe, un chèque de 125 dollars. La riche Américaine avait recommandé au professeur de ne toucher à cet argent qu'à la dernière extrémité. C'est, du moins, ce que déclare Klein. Cest également ce qui paraît se dégager du texte de la lettre signée de Mme Pierpont-Morgan, que nous avons publiée hier.

Le voyageur débarqua au Havre le 18 juillet. Il prit aussitôt le train pour Paris où il arriva dans la soirée.

Il laissa en consigne à la gare Saint-Lazare ses bagages et se mit en quête d'un hôtel pour la nuit.

Klein n'espérait faire qu'un court séjour dans la capitale. Il voulait se rendre à Baugé (Maine-et-Loirel, pour achever sa convalescence.

Il passa la première nuit dans un petit hôtel du passage Tivoli, l' ·· Hôtel du Vaucluse », au numéro 3.

Il arriva le soir à dix heures et s'inscrivit sous le nom de Robert Klèin, vingt-six ans, professeur, venant d'Amérique.

Le lendemain matin, de très bonne heure, il payait sa chambre et s'en allait.

Il donne l'impression

d'un détraqué

La nuit suivante, le professeur changeait d'hôtel.

Il cheminait sur le trottoir de la rue d'Amsterdam, un peu après minuit, lorsque le propriétaire de l'hôtel portant le numéro 26, qui était sur la porte, l'avisa. Il lui parut que le passant était en quête d'un lit. Il l'interpella

Si vous cherchez une chambre, lui-ditil, entrez donc dans mon hôtel.

Klein entra. Il tenait à la main un petit Il demande au garçon qui le conduisait à la chambre numéro 30 de le réveiller à cinq heures du matin.

A l'heure dite, le professeur quitta t'hAtal. On ne le revit plus.