DIMANCHE 7 SEPTEMBRE 4854.
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DEUXIÈME ANNÉE. — N° M.
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PARAISSANT TOCS LES DIMANCHES AVEC UNE ROMANCE INÉDITE DE MADAME PAULINE DUCHAMBGE, MM. EDOUARD BRUGUIÊRE, AUGUSTB PANSERON, AMÉDÉE DE BEAUPLAN, ADOLPHE ADAM, CH. PLANTADE, TH. LABARRE, MASINI, THÉNARD, JACQUES STRUNZ, ETC.
MUSIQUE O&ÏEITTÀLE.
II y a des peuples en Asie chez qui, depuis deux mille ans peut-être, la musique demeure invariable, pareille à ces oiseaux sacrés que l'on vénère à genoux, mais que l'on prive de la liberté de leurs ailes.
Et comment voudrait-on qu'il en fût autrement? Aussi haut dans le passé que peut atteindre la lumière de l'histoire, le principe du bien-être matériel apparaît comme base unique des gouvernemens orientaux.Or.ee principe entraîne le despotisme, et le despotisme parfait, aussi bien que la parfaite liberté, commande le sacrifice entier de la passion et de la pensée individuelle. Donc les arts, qui ne sont,dans leur essence que le jeu de cette passion ou l'exaltation de cette pensée, sont nécessairement enchaînés par les institutions asiatiques; la musique surtout, qui est indiscrète et retentissante.
Les nations asiatiques ne connaissent,pour la plupart,qu'un certain nombre d'airs sacrés qu'il leur est défendu de changer ou d'augmenter. Dévolus au culte qui s'en pare comme d'une inaltérable beauté , ils deviennent immobiles comme lui, et restent renfermés loin du peuple, au sein du temple ou de la pagode.
A cet égard même, la sévérité des législateurs s'est souvent montrée excessive. En Chine, la loi civile menace de graves châtimens l'audacieux qui introduirait une fioriture parmi les anciens airs de Tchoug-Young et Chi-King. Parcourez les établissemens fondés par les sectairesdeConl'ulzée, vous trouverez des théâtres chinois et des orchestres exécutant chaque soir une ouverture ; mais si, sur un seul de ces points, vous entendez trois notes qui diffèrent de l'ensemble, tenez-vous pour assuré qu'il y a eu sédition dans la colonie.
Les brahmes indiens ne se montrent pas moins fidèles à leurs antiques mélodies. Ils en possèdent, dit-on, trente-six, sur lesquelles ils chantent tout ce qu'il y a de sanskrit au monde ; et il ne faudrait pas moins d une nouvelle incarnalion de brahme en joueur de cistre ou de flûte, pour les obliger d'augmenter d'un air leur répertoire.
S'il faut ajouter foi à l'assertion d'un auteur vénitien, les Turcs eux-mêmes n'auraient eu long-temps que vingt-quatre chants , savoir : 6 mélancoliques, 6 gais, 6 furieux, 6 emmiellés ou amoureux.
LE PIANO.
A deux lieues de Catane, au milieu d'un site pittoresque où la nature semble avoir résumé toutes les richesses de la Sicile, s'élève le château de la marquise de la Piazza.
La noblesse des environs conservera long-temps le souvenir des fêtes que lui donnait la marquise dans des temps plus heureux. Aujourd'hui un silence glacial règne dans les antiques galeries du château : le deuil a passe par-là.
Vers la fin de septembre 18.., un convoi funèbre traversa les rues de Catane. On remarquait un saint recueillement parmi le peuple : de nombreux équipages suivaient le cortège, et des larmes sincères furent répandues sur la tombe.
C'était la tombe de la marquise. Depuis deux années le château de Laura avait cessé d'être le joyeux rendez-vous de la noblesse d'alentour. Des cha-