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Titre : Le Ménestrel : journal de musique

Éditeur : Heugel (Paris)

Date d'édition : 1834-05-18

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb344939836

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb344939836/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 44462

Description : 18 mai 1834

Description : 1834/05/18 (A2,N25)-1834/05/24.

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5619275x

Source : Bibliothèque nationale de France, TOL Non conservé au département des périodiques

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 01/12/2010

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DIMANCHE 48-MAI 4854.

DE1X1ÊME ANNÉE. — N" 25.

DES BERGERS CÉVENOLS.

Le cliant des bergers dans l'intérieur des Cévennes a, comme tous les chants montagnards, un caractère particulier, une physionomie na'ive qui est à lui, et l'on reconnaît que les générations successives des pâtres de ce pays l'ont transmis jusqu'à nous dans toute son originalité primitive aussi fidèlement que leur long manteau doublé de laine écarlate, leur feutre à larges bords et leur grand bâton recourbé.—Ce chant, d'une facture singulière, atlire l'attention, et fait éprouver d'abord plus de surprise que de plaisir. ™ La mesure en est rapide, le motif fort court et d'une mélodie simple, où l'on remarque assez généralement une note aiguë qui lui imprime une certaine gaîté.

Le refrain de toutes les chansons consiste à répéter en entier l'air sans les paroles ; et, soit instinct musical, intention réelle de la part du chanteur, ou simplement une disposition organique qui fait que la voix baisse comme pour chercher à se reposer, ce refrain prend toujours une allure lente et mélancolique et dispose à la rêverie, quelque rapide et joyeux que soit le motif qu'il reproduit.

Les Cévenols ont un beau timbre de voix, et, de même que pour eux la meilleure danseuse est celle qui danse le plus long-temps, ils regardent assez volontiers comme le plus habile chanteur celui qui chante le plus fort. Cependant sur les bords du Gardon, dans l'ancien comté d'Alais, il y a une jeune tille qu'on appelle du joli nom de Galtie, qui chante d'une manière merveilleuse tous les airs de ces montagnes ; et, le soir, quand elle fait rentrer ses chèvres, c'est délicieux d'entendre sa voix fraîche, souple et expressive, dont

chaque éclat se prolonge, s'adoucit, et va se perdre dans les mille échos du vallon.—Dans le pays, la supériorité du chant de cMe enfant ne surprend personne, car l'on a partout la conviction qu'elle s'est vouée au génie du mal, et qu'elle est initiée aux redoutables secrets de la sorcellerie.— Or, tout danssa personne paraît venir à l'appui de ce qu'on lui attribue de surnaturel : ses grands yeux noirs bordés de longs cils, et le reflet cuivré de sa peau brune, donnent à sa physionomie quelque chose d'asiatique, tandis que son regard voilé à demi sous ses paupières, ses lèvres minces et arquées , et sou menton un peu prononcé, y répandent un air moqueur. Souvent, et semblant trahir une pensée intime et violente, celle figure mobile s'anime, se contracte, pâlit, et prend une expression si étrange de terreur et de joie folle, qu'elle rappelle ces têtes fantastiques que dans le délire de la fièvre l'imagination emprunte à un autre monde. — Son corps, un peu fort pour son âge, est bien pris, et sa démarche ne se ressent nullement de la gaucherie ordinaire d'une paysanne. Elle est coiffée d'un bonnet phrygien en laine rouge, ses cheveux noirs s'échappent en boucles nombreuses, et son vêlement se compose d'un petit corset, d'un jupon fort court, et d'une sorte de cape faile de peaux de boucs. —La pauvre petite est presque folle; le moindre bruit lui fait peur; elle se reproche ses actions les plus simples, et elle se prend à pleurer lorsque du bruit de ses pas ou de sa chanson elle a effrayé le héron , hôle triste et constant de ces rives poissonneuses, qui se dresse alors de toute sa hauteur, replie son long cou, et, rejelant ses jambes en arrière, déploie lentement ses ailes grises comme deux grandes voiles ternies par de fréquens orages, puis s'élève d'un vol uniforme en poussant un cri bref et mélancolique, image de sa vie de souffrance et d'anxiété....

Evariste MARANDON DE MONTYEL.