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Titre : Le Ménestrel : journal de musique

Éditeur : Heugel (Paris)

Date d'édition : 1880-01-04

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb344939836

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb344939836/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 44462

Description : 04 janvier 1880

Description : 1880/01/04 (A46,N5)-1880/01/10.

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k56169317

Source : Bibliothèque nationale de France, TOL Non conservé au département des périodiques

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 01/12/2010

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25# -46e ANNÉE. -N° S

Dimanche 4 Janvier 4880.

PARAIT TOUS LES DIMANCHES

(Les Bureaux, 2 bis, rue Vivienne) (Les manuscrits doivent être adressés franco au journal, et, publiés ou non, ils ne sont pas rendus aux auteurs.)

, SOMMAIRE-TEXTE

ï. MADAME SAINT-HUBERTY A L'OPÉRA, monographie tirée de l'Histoire du Costume au théâtre (3° article), ADOLPHE JULLIEN.— II. Semaine théâtrale : FADRE à l'OpéraComique, les envois de Rome au Conservatoire, la Perle du Brésil de FÉLICIEN DAVID; une indiscrétion : H. MORENO. — III. Les instruments et la musique du passé au Conservatoire de Bruxelles : TH. JOURET. — IV. CLÉMENT MAROT et le Psautier Huguenot par M. DOUEN, (Bibliographie) J. B. WECKERLIN. — V. Saison de Madrid, ANT. PENA Y GONI. — VI. Nouvelles et concerts. — VII. Nécrologie.

MUSIQUE DE PIANO

Nos abonnés à la musique de PIANO recevront, avec le numéro de ce jour, la nouvelle polka viennoise :

BREDOUILLE

du cappelmeister STROBL. — Suivra immédiatement : la Gavotte du PÈRE MARTINI transcrite et variée par HENRY KETTEN.

CHANT

Nous publierons, dimanche prochain, pour nos abonnés à la musique de CHANT : une berceuse du xve siècle, 0 cher Enfantelet, extraite d'un sixain de mélodies de E. PALADILHE, actuellement sous presse au Ménestrel,

Le Ménestrel. offrira prochainement à ses abonnés la primeur des premières épreuves du second volume de F.-A. GEVAERT, sur l'histoire et la théorie de la musique de l'antiquité. Viendront ensuite : 1° de nouvelles lettres d'HEdOR BERLIOZ, recueillies par OCTAVE FOUQUE; 2" la troisième partie du grand travail de VICTOR WILDER sur BEETHOVEN et son oeuvre ; 3° Dum et les commencements de l'OpéraComique par ARTHUR POUGIN.

PRIMES DU MÉNESTREL 1879-1880

■ Voir, à la huitième page de nos précédents numéros le catalogue des primes PIANO et CHANT, tenues a la disposition de nos abonnés à partir dulundi 1er décembre Ï879 — date de la 46* année d'existenee du Ménestrel. Ces primes sont délivrées à tout ancien ou nouvel abonné sur la présentation de la quittance de renouvellement d'abonnement au Ménestrel pour l'année 1879-1880. Nos abonnés remarqueront qu'indépendamment du recueil des 30 mélodies de "WEBER, des volumes de BERLIOZ, CHOPIN, GOUNOD, obligeamment mis à noire disposition par les maisons Choudens, Hamelle et Lebeau, les éditeurs du Ménestrel offrent, au choix, à leurs seuls abonnés au journal complet (texte, chant et piano), soit la nouvelle partition illustrée de Psyché d'AMBROisE THOMAS, soit celles de la Perle du Brésil, de FÉLICIEN DAVID, ou de la Flâte enchantée, de MOZART, ou le 2° volume des Gloires d'Italie, de F.-A. GEVAERT, traduction française de VICTOR "WILDER.

Toute demande de renouvellement d'abonnement, ou tout abonnement nouveau, du 1" décembre 1879 à fin novembre 1880 (46e année), devra être accompagnée d'un mandat-poste sur Paris, adressé franco à M. J.-L. HEUGEL, directeur du Ménestrel. — Les abonnés au texte seul n'ont pas droit aux primes de musique. — On ne s'abonne pas pour moins d'un an. — Pour tous détails, voir la dernière page de ce numéro.

Les primes du Ménestrel ne sont pas envoyées à domicile, mais seulement tenues à la disposition de nos abonnés, dans nos bureaux, 2 bis, rue Vivienne ; ceux de nos souscripteurs de province qui désireraient les recevoir par la Poste sont priés de joindre a la demande de renouvellement un mandat-poste sur Paris du prix d'abonnement, en y ajoutant un supplément d'un franc pour l'affranchissement de la'prime simple, piano et chant, et de deux francs pour les primes doubles. (Pour étranger l'affranchissement des primes se traite selon les tarifs de la poste).

N. B.'— En réponse à plusieurs demandes de nos abonnés, nous leur faisons savoir que les volumes classiques de MARMONTEL, et les volumes de musique de danse de STRAUSS, de Vienne, peuvent être délivrés en primes, cette année, comme les précédentes; mais nous ne saurions répondre de même aux lettres concernant des opéras — autres que ceux annoncés à notre 8* page.

1 O .AJS-ISTiÉE 1880 -O —<i

Dans l'impossibilité de répondre à l'obligeant envoi de toutes les cartes de nouvelle année qui parviennent déjà au MÉNESTREL, de France et de

l'étranger, nous venons prier nos lecteurs, amis et correspondants, ■?.-'

vouloir bien considérer cet avis comme la carte du Directeur et des Col'/i- ï\

borateurs semainiers du MÉNESTREL. il

- jl

MADAME SAINT-HUBERTY A L'OPÉRA 0)

(Suite)

La Chimène de Sacchini et la Bidon de Piccinni furent représentées à la cour, durant l'automne de 1783. Malgré de grandes beautés, Chimène essuya un échec immérité qui fut, du reste, réparé par le succès qu'elle obtint plus tard à l'Opéra. Didon et sa sublime interprète remportèrent, au contraire, un véritable triomphe. Jamais la cour n'avait laissé éclater un tel enthousiasme; le roi lui-même, que la musique ennuyait assez d'ordinaire, déclara que « cet opéra lui avait fait autant de plaisir qu'une belle tragédie. » Il décida aussitôt qu'une pension de 1,500 livres serait donnée à la cantatrice et il envoya le maréchal de Duras la complimenter et lui témoigner toute sa satisfaction.

« Ce fut, écrit un des assistants, la plus belle scène de la soirée. Lorsque M. le maréchal de Duras entra dans les coulisses, suivi d'une foule de courtisans en habit de gala, Mme Saint-Huberty n'avait pas encore eu le temps de changer de costume. Elle était debout, sa couronne sur la tête, drapée dans le manteau de pourpre de la reine de Garthage. Marmontel et Piccinni, ivres de bonheur, s'étaient jetés à ses genoux et lui embrassaient les mains. On aurait dit deux coupables à qui elle faisait grâce de la vie. Ils ne se relevèrent pas quand M. de Duras s'approcha pour répéter les paroles du roi. L'actrice écoutait le maréchal, et son visage encore animé par l'inspiration, s'illuminait de la joie du

(1) Cette intéressante monographie est empruntée à l'Histoire du Costume au théâtre par M. Adolphe Jullien, publiée à la librairie Charpentier, 13, rue de G-renelle-Saint-G-ermain.


M

LE MÉNESTREL

triomphe, le rouge de l'orgueil montait à son front; c'était un spectacle admirable. Elle avait tant de grandeur, de noblesse, de majesté, avec ces hommes à ses pieds, que mieux ncore que sur le théâtre, elle donnait l'idée de la reine de Carthage; tous les grands seigneurs présents avaient l'air d'être ses courtisans. »

Quelques jours après cette glorieuse soirée et peu avant la représentation de Bidon à Paris, Mm 0 Saint-Huberty écrivait h un de ses amis d'Aix, la lettre suivante (18 novembre), où elle raconte ses succès avec une modestie assez bien jouée :

« Enchantée de votre souvenir, vous ne pouvez me flatter davantage qu'en me faisant accroire que l'on peut désirer me voir à Aix et à Marseille. Jugez combien je suis sensible au succès que j'ai obtenu dans votre pays puisque je me propose d'y retourner.

» La chaleur de votre aimable pays m'a gratifiée d'un rhume, si violent que je m'en ressens encore. Mais il m'a fallu aller à Fontainebleau jouer Bidon, qui a eu un succès fou. Le roi a bien voulu penser lui-même à augmenter ma pension, d'après la satisfaction qu'il a témoignée en me voyant jouer le rôle.

» On donne aujourd'hui le Cid, de Sacchini ; c'est une musique enchanteresse. Vous qui la cultivez et qui l'aimez, vous allez achever de devenir fou (de la musique s'entend), j'y joue ce soir.

» Le rôle de Didon étant fait pour moi, pour mes moyens, et étant le seul rôle très intéressant dans cette pièce, il sera impossible de la donner (en province) sans l'avoir vu représenter (à Paris). Cela a l'air de l'amour-propre, mais je vais vous expliquer ce qui en est. Le rôle de Didon est tout jeu ; le récitatif en est si bien fait, qu'il est impossible de le chanter (1).

» Un monde infini avait entendu les répétitions générales de Bidon et avait jugé que c'était un des plus mauvais ouvrages de Piccinni. Cet homme se consolait en disant : «Laissez » arriver Didon.» A la première répétition que j'ai faite, on dit: « Ah ! ah ! mais il a refait la majeure partie de l'opéra ! » (et il n'y avait que quatre jours d'intervalle). Piccinni entendit cela et dit: «Non, messieurs, je n'ai rien changé au rôle, mais on y> jouait Bidon sans Didon. » Enfin c'est la seule pièce jusqu'à présent à Fontainebleau qui ait fait plaisir au roi. Il l'a fait jouer trois fois, lui qui avait l'opéra en horreur.

» Je répondrais presque que Chimène fera aussi grand plaisir. Le poème n'est pas aussi intéressant, vu que la chevalerie française n'est plus à grand degré d'enthousiasme ; mais la musique est délicieuse en général. J'écris cette, lettre pour vous,; j'espère qu'on n'en saura que ce que votre prudence vous dictera. Vous savez qu'il n'est pas permis de juger, ou plutôt que je ne me le permets que très rarement.

» A propos, vous avez un frère qui peint comme un ange ; rappelez-moi à son souvenir, vous m'obligerez.

» Votre très humble senjaiUite,. » DE SÀINT-HCBERTY. »

A Paris la pièce et la cantatrice obtinrent un succès encore plus grand qu'à la cour. La soirée du 1er décembre 1783 fu,t une soirée de transports et de délire. Après le grand air: « Ah ! que je fus bien inspirée , » tout le public se leva en masse, interrompant la représentation par des applaudissements frénétiques. L'air si beau : « Ah ! prends pitié de ma fài» blesse », fit couler des larmes de tous les yeux. Quel plus glorieux triomphe avait jamais pu rêver la pauvre artiste en ses jours de misère et de travail !

Grands seigneurs , artistes, philosophes, tous s'unirent dans

(1) «Vous aurez de longues scènes à mettre en musique,, a»yait dit Mar^ montel à Piccinni en lui proposant le sujet de Didon, et dans ces scènes je vous demanderai un récitatif aussi naturel que la simple déclamation. Vos oadences italiennes sont monotones ; la parole est plus variée, plus soutenue dans ses-acoents, et je. vous prierai de la noter comme je vous, la déclamerai. »Et le musicien avait accepté.

un concert de louanges à l'adresse de Bidon et de la tragédienne inspirée. « Mme Saint-Huberty, dit Bachaumont, a joué avec un talent supérieur ; elle s'est élevée au-dessus d'ellemême ».— «.C'est la voix de Todi, c'estle jeu de Clairon ! s'écrie Grimm. C'est un modèle qu'on n'a point vu sur le théâtre, et qui longtemps en servira. »

« Le talent de cette sublime actrice, dit Guinguené , prenait sa source dans son extrême sensibilité. On peut mieux chanter un air, mais on ne saurait donner aux airs, au récitatif un accent plus vrai, plus passionné. On ne peut avoir une action plus dramatique, un silence plus éloquent. On se rappelle encore son terrible jeu muet, son immobilité tragique et l'effrayante expression de son visage pendant la longue ritournelle du choeur des prêtres dans Bidon, vers la fin du troisième acte, et pendant la durée de ce choeur même. Elle ne fit aux représentations que se replacer dans la position où elle s'était trouvée naturellement à la première répétition générale. Quelqu'un lui parlait de cette impression qu'elle paraissait éprouver et qu'elle avait communiquée à tous -les spectateurs : « Je l'ai réellement éprouvée, répondit-elle; dès la dixième mesure je me suis sentie morte. »

Cette réponse révèle tout le secret du talent de la tragédienne lyrique. Actrice de génie, elle savait garder sa tête, mais elle livrait son âme et son coeur. Le succès de Bidon ne se ralentit pas de longtemps : chaque représentation était pour la Saint-Huberty l'occasion d'un notiveau triomphe. Un jour, on dépose une couronne aux pieds de l'artiste qui, hésitante, troublée au point d'en perdre la voix, ne peut que remercier du geste. La salle entière se lève et demande que Didon se couronne. L'artiste fait un signe négatif, mais Mlle Gavaudan, qui jouait Élise, ramasse la couronne et la met sur le front de la reine aux acclamations de la foule qui ~lit, brodée en or entre les feuilles, cette inscription prophé~ tique : « Didon et Saint-Huberty sont immortelles (J). » Cette soirée mémorable fut une revanche éclatante pour le compositeur, pour le chantre inspiré des amours de Didon et d'Énée. Didon n'est pas seulement le chef-d'oeuvre de Piccinni, c'est encore un des chefs-d'oeuvre de notre Académie de musique ; c'est une de ces créations qui, non plus que les Banaides, qu'OEdipe à Colone, la Vestale, Fernamd Cortez, Olympie et que tous les opéras de Gluck, n'aurait jamais dû disparaître du répertoire de notre première scène lyrique. Piccinni, Salieri, Sacchini, Spontini ont, comme Gluck, illustré à jamais notre Opéra par leurs admirables ouvrages ; leurs noms devraient toujours briller au premier rang et ne jamais s'éclipser devant des gloires, qui, pour être plus récentes, ne sont pas plus pures.

Quelle belle partition que toute cette tragédie lyrique! quelle fierté dans l'air d'Énée : « Régnez en paix sur ce rivage ; » quels remords et quelle douleur dans sa scène :

(1) Voici l'extrait d'une lettre adressée par M. de la Ferté au ministre, le 18 janvier i78i, et qui jette un jour nouveau sur cet incident, et aussi sur l'empire que Mmo Saint-Huberty exerçait àl'Opéra:« ...Autre embarras, monseigneur, je ne sçai si vous êtes informé que vendredi dernier on a jeté du parterre sur le théâtre une couronne qui portoit pour devise : « A l'immortelle Saint-Huberty ». L'actrice qui jouait avec elle l'a ramassée et l'a mise sur la tête de Madame Saint-Huberty. Ge jeu, qui paroîfc un arrangement concerté peut-être avec la dame Saint-Huberty, n'est pas indifférent, car ceux qui donnent ainsi des couronnes (chose sans exemple au théâtre pour un acteur), pourroient bien s'accoutumer aussi' à jetter des> pommes cuites ou oranges, comme en. Angleterre, aux acteurs qui leur déplairoient ; alors il n'y auroit plus moyen de se. mêler du spectacle. Cette espèce de triomphe n'a cependant pas rendu Madame Saint-Huberty plus reconnaissante, car elle refuse de jouer mardi prochain son rôle de Didon ; comme la recette de ce jour-là seroit médiocre si. 1,'btt ne dbnnoit pas ces opéra, j'ai pensé que vous approuveriez, monseigneur., que je donnasse des ordres pour bien faire remplacer la dame Saint-Huberty par la demoiselle Maillard, à laquelle M. Piccinni a montré le rôle de Bidon, et qu'il désire lui voir jouer. Si, comme elle est fort jeune, elle n'a pas autant de finesse de jeu que Madame Saint-Huberty, elle s'en; tirera. tour jours assez bien, malgré la cabale qu'il pourra y avoir, pour plaire au pu* blic, d'autant plus qu'elle a une voix qui peut faire envie à la darae.Saintr Huberty; mais M. Piccinni, qui forme des voeux pour cette jeune actrice, n'ose se. montrer à. découvert, de peur de déplaire à. Madame Saint-Huberty.» Archives nationales Ancien régime, G1 627.


LE MÉNESTREL

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« Au noir chagrin qui me dévore!...» Comme Iarbe montre bien son féroce orgueil dans l'air : « Je veux les voir réduire en cendres ! » et quelle hauteur superbe dans le défi des deux princes ! Mais c'est au rôle de Didon que le compositeur a prêté le plus de noblesse et de grandeur, par l'air : « Ah! que je fus bien inspirée », ou celui : « Ni l'amante ni la reine », par cet ardent duo d'amour, par la grande scène, enfin, où Énée s'engage à vaincre pour la reine, où les fières paroles de Didon se mêlent aux chaleureuses acclamations de son peuple, aux sourds murmures des Troyens, aux remords du fils d'Anchise. Tour à tour ardente, inquiète, passionnée, jalouse, accablée par le désespoir, telle nous apparaît Didon en ces pages d'un admirable sentiment.

ADOLPHE JULLIEN. (A suivre.)

SEMAINE THEATRALE

FAURE A L'OPÉRA-COMIQUE.

L'année 1879 s'est close sur l'audition des envois de Rome au Conservatoire et le triomphe de Faure à l'Opéra-Comique. Donnons la priorité à ce dernier événement qui a primé l'autre de cent coudées.

Disons bien vite, — non sans un profond regret, — qu'il ne s'agit pas, en la circonstance, de la rentrée si désirée de Faure sur l'une de nos scènes lyriques, mais simplement de son généreux concours à un concert de bienfaisance, celui « des incendiés algériens. » L'Opéra-Comique avait non moins généreusement donné sa salle et la plupart de ses premiers sujets, Mme Carvalho en tête. Notre grand chanteur, J. Faure, sollicité de reparaître pour cette bonne oeuvre, sur la scène de ses premiers succès, s'est empressé de s'associer à Mme Carvalho , à M» 8 Bilbault-Vauchelet , à Mme Engally, à MM. Talazac et Taskin, pour réaliser l'un de ces programmes à sensation malheureusement peu communs de nos jours. Par quatre fois il a paru et reparu sur la scène aux acclamations enthousiastes de tous les assistants. C'est qu'aussi il n'avait jamais plus magistralement chanté, et d'une voix plus superbe, plus mordante et plus onctueuse a la fois. De son côté Mme Carvalho a dit la romance de Chérubin comme aux plus beaux jours de sa carrière. Si bien que, dimanche dernier, à trois heures de relevée, salle Favart, on a pu proclamer que la grande école de chant français est vraiment incomparable à tous les points de vue. C'est là un fait que nous aimons à enregistrer, à constater, au grand honneur de l'année musicale 1880.

Ceci dit, laissons notre ami et collaborateur Octave Fouque nous raconter les hauts faits du programme organisé par la République Française au profit des incendiés algériens.

La matinée dramatique et musicale que nous avions annoncée a été donnée dimanche au théâtre de l'Opéra-Comique au bénéfice des incendiés d'Alger. Elle a complètement réussi. Un programme très varié y réunissait les talents les plus divers. En premier lieu, M. Faure, le chanteur toujours admirable et l'honneur de l'école française, a obtenu un triomphe avec une mélodie de sa composition, la Charité, une mélodie de M. G-ounod et la romance de Joconde, que, sur les bis enthousiastes de la salle entière, l'éminent. artiste a eu la gracieuseté d'ajouter au programme. C'est une rare et vraie fête d'entendre cette voix qu'une méthode absolument sûre dirige sans jamais faiblir, pleine d'effets inattendus, et façonnée par un art profond, dont la perfection ne saurait être dépassée. Mme Carvalho a été aussi acclamée dans l'air des Noces de Figaro : « Ce doux martyre » ; l'impeccable artiste chante et détaille cette exquise page avec un talent pour lequel on épuiserait toutes les formules de l'admiration. Mlle BilbautVauchelet a fait applaudir sa virtuosité dans un air de la Fée aux Roses. La belle voix de Mme Engally fait merveille dans les couplets de Méala, de Paul et Virginie. MM. Talazac et Taskin ont chanté, l'un la romance à'Aïda, 1 autre eelle du Chalet. Divers morceaux d'ensemble réunissaient à plusieurs reprises ces excellents chanteurs: le duo du Pré aux Clercs, dans lequel M1Ie Bilbaut, fort bien secondée par M. Taskin, a montré des finesses d'interprétation inconnues au théâtre, où le rôle dont s'était chargé la jeune cantatrice est habituellement confié à la dugazon; le duo de la Muette, qui a provoqué l'enthousiasme, chanté par MM. Faure et Talazac ; enfin, le quatuor de Rigoletto, par Mmes Carvalho, Engally, MM. Talazac et Faure. La phrase du ténor, dite avec le plus grand charme par M. Talazac, a été très applaudie, et ce morceau d'un effet saisissant a admirablement clos là partie musicale de la séance.

N'oublions pas M. Emile Bourgeois qui, assisté de M. Carré pour l'orgue,

a tenu avec honneur le piano d'accompagnement, et a su se faire remarquer à côté des grands artistes que le public a applaudis dans ce très intéressant concert.

Mais une grande part d'éloges revient à l'habile directeur du théâtre de l'Opéra-Comique : M. Carvalho, avec le goût si sûr qu'il apporte à toutes choses, a présidé à tous les détails de l'organisation de cette matinée. Le programme en était des plus heureusement disposés, de façon à faire valoir l'un par l'autre les artistes qui y figuraient. Tout a marché à souhait : M. Carvalho a droit aux très vifs remerciements des personnes qui ont eu l'heureuse inspiration de lui demander son concours, ainsi qu'à ceux de nos concitoyens d'Alger, éprouvés par une terrible catastrophe.

Il n'y avait pas que de la musique à la solennité des Algériens, les intermèdes littéraires et la comédie avaient large place au programme : Les Coquelin, Mounet-Sully, Prudhon, MUes Favart, Lloyd, Mme Provost-Ponsin, ont eu leur large part des succès d'une matinée qui a produit une recette maximum, cela va sans dire. Donc honneur et profit sur toute la ligne.

LES ENVOIS DE ROME.

Au Conservatoire, les choses se sont passées plus modestement: d'abord, on n'y était admis que sur billets d'invitation. Donc pas de recette possible. Ensuite, le programme ne se composait que d'essais dus à nos jeunes prix de Rome, Hillemacher et De La Nux, interprétés par des élèves du Conservatoire, pour ce qui concerne la partie vocale du moins. Seule, MIIa Marie Battu et le barytou Dufriche sont venus là gracieusement apporter leur personnalité et en faire bénéficier la Lucrèce de M. De La Nux. Il serait pourtant injuste de ne point citer M. Belhomme et la gracieuse Mlle Rémy qui ont comparu en solistes dans la légende de sainte Geneviève de M. Hillemacher.

Les deux oeuvres, insuffisamment répétées à l'orchestre, n'ont pas donné tout ce que les jeunes auteurs en espéraient, pas plus que ia suite d'orchestre de M. Hillemacher, avec laquelle on a ouvert la soirée. Cela tient aussi, il faut bien le reconnaître, à l'ambition démesurée des deux grands prix de Rome de 1876. Ils se sont attaqués à des sujets bien ardus, pour ne pas dire plus, et dans lesquels ils.ont TOUIU tout prouver, excepté, peuirêtre, ce qui est et restera éternellement l'élément constitutif de la musique : la mélodie. One Rossini a donc été bien inspiré de créer un prix « de mélodie • autrement dit « d'inspiration ». Puisse cette judicieuse disposa testamentaire de l'immortel chantre de Guillaume Tell arrêter ; jeune école française sur la voie de l'abîme -wagnérien. Il v:mi que temps,

Nous ne dirons rien de plus de cette séance des envois de Rome* tout en constatant qu'on sent déjà la main d'un jeune maître en M. De la Nux, et que M. Hillemacher nous paraît aussi prendre son art au sérieux et de haut; mais que l'un et l'autre se fassent plus simples, plus clairs, qu'ils se donnent grand souci des voix, et que leur instrumentation devienne plus tempérée, moins prolixe. Qu'ils étudient Mozart, Gluck, Rossini, Weber et Beethoven; ils apprendront au contact de pareils maîtres, « l'art des grands effets en peu de notes. » Tout le secret de la véritable musique est là.

UNE INDISCRÉTION

Avant de terminer cette semaine théâtrale, qui clôt l'année 1879 et ouvre celle de 1880, laissez-moi commettre l'indiscrétion do placer sous vos yeux, chers lecteurs, l'une des nombreuses lettrescartes de nouvelle année qui abondent en ce moment au Ménestrel. Celle-ci nous arrive d'Italie: elle est signée d'un nom bien cher aux habitués de la salle Favart. Chacun sait que Galli-Marié fanatise en ce moment les dilettantes de Naples, dans Mignon, après les avoir ensorcelés dans Carmen. Et cependant, notre Mignon, bien que pénétrée de gratitude pour les Napolitains qui la fêtent en reine... de théâtre, en enfant gâtée du succès, n'en soupire par moins, près des riants coteaux du Pausilippe, après les sombres brouillards de Paris. Écoutez-la plutôt :

Onze rappels, bis les Hirondelles, bis la Styrienne, que je chante

comme à Paris malgré votre recommandation (vous m'aurez entendue un soir où mon la n'était pas en voix) : S représentations de Mignon en 7 jours et à la S«, la Styrienne trisséel Malgré cela je ne forme qu'un voeu : revenir à Paris. — Dites-le à Carvalho, qu'il me découvre quelque chose de nouveau.

Je vous écris assise à ma fenêtre ouverte, par un soleil qui me rôtit. La mer est bleue et tranquille comme un étang, où se balancent des centaines de barquettes aux ailes blanches. Il fait bon, bon, bon, — et malgré tout cela je veux revenir à Paris.

O nostalgie de France ! de par toi nos artistes parisiens ne deviendront jamais, Dieu merci, les oiseaux chanteurs sans patrie, que produisent à l'excès les autres pays.


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LE MÉNESTREL

LA PERLE DU BRÉSIL DE FÉLICIEN DAVID.

En attendant que cette belle parlition nous soit rendue à l'OpéraComique, M"e Séveste, qui a eu la bonne fortune d'en recevoir les traditions de l'auteur, a voulu en régaler les dilettantes de Reims, où ses représentations font époque. Cela se comprend.

Donc, elle a demandé à M. De La Chaussée, son directeur, de monter la Perle du Brésil à son intention, et son directeur, qui est aussi son chef d'orchestre, s'est exécuté en artiste, ainsi que nous l'apprend le Courrier de la Champagne. Voici le compte rendu de ce journal :

La représentation de la Perle du Brésil a dépassé toute attente, et, d'un commun accord, a été l'une des plus remarquables que nous ayons eues depuis longtemps au théâtre. M. D. De La Chaussée avait particulièrement soigné la mise en scène, qui n'a rien laissé à désirer. Quant à l'exécution, tout le monde s'est surpassé, au point que, depuis l'ouverture jusqu'à la chute du rideau, tout a été applaudi, acclamé avec enthousiasme. On était en face d'un chef-d'oeuvre, d'un chef-d'oeuvre magistralement rendu, et l'on s'abandonnait avec plaisir à toutes les émotions douces, tendres, passionnées ou terribles que suggérait une suite de situations admirablement dépeintes par ce grand maître ès-mélodies qu'on appelle Félicien David.

C'est le 22 novembre 1851, au Théâtre-Lyrique, que la Perle du Brésil a été représentée pour la première fois. L'action se passe successivement à la cour du roi de Portugal, en pleine mer et dans une forêt brésilienne.

Il y a dans la Perle du Brésil de magnifiques tableaux descriptifs, comme le défilé du premier acte, la fête maritime du second, la scène du hamac dans la forêt, le chant des oiseaux, la tempête ; tout cela est exprimé avec cette magnificence de coloris qui avait fait la réputation du chantre du Désert et de Christophe Colomb.

Le succès le plus éclatant est incontestablement pour Mlle Séveste, qui a déployé toutes les ressources d'une riche organisation musicale, développées par le travail et l'art. La chanson brésilienne du premier acte, qui .se répète encore à la fin du troisième, est belle d'originalité, de couleur et de charmes, avec des modulations exquises de délicatesse et de suavité.

Quant au chant du Mysoli,

Charmant oiseau, qui, sous l'ombrage, c'estadorablo de composition; c'est frais, gracieux, ravissant de finesse et de légère té dan s l'interprétation. Notre première chanteuse, au talent remarquable do laquelle nous avons maintes fois rendu hommage, nous a révélé des qualités que nous ne lui connaissions pas encore, surtout dans cette lutte si réussie entre les modulations de la flûte et du hautbois. Ajoutons que l'intelligente artiste est une Zora accomplie de charme et de distinction, et que ses toilettes réunissent la richesse et le bon goût.

M. Durât (l'Amiral) a aussi mérité les applaudissements réitérés du public, notamment dans son grand air du premier et dans celui du troisième acte. M. Marris (Lorenz) a été merveilleux de douceur et d'expression dans son duo avec Zora, duo plusieurs fois interrompu par les applaudissements de la salle. Nos félicitations aussi à M. Barbe (Rio), qui joue et dit juste et bien. Les morceaux d'ensemble ont été splendides, les choeurs admirables, surtout celui du troisième acte, la Guerre. Enfin, pour finir par le commencement, l'ouverture elle-même avait été saluée d'une double salve d'acclamations.

Co n'était qu'une voix dans les entr'actes et à la sortie, pour regretter que les louables efforts do notre directeur, efforts couronnés d'un plein succès pour la satisfaction du public, ne soient pas mieux récompensés par une affluence sérieuse et continue du même public. Assurément, nous avons été, au point des représentations dramatiques et lyriques, beaucoup mieux partagés que le public parisien, qui voit à peine cinq ou six ouvrages par an. M. D. De La Chaussée, grâce à une infatigable activité, grâce au zèle, d'artistes aussi dévoués qu'habiles, réalise en ce genre de vrais tours de force. C'est un devoir pour tous de lui en témoigner de la. reconnaissance.

Le devoir pour toute la Presse française, c'est de rendre un nouvel hommage à la mémoire de Félicien David, en proclamant le succès départemental de sa Perle du Brésil qui ne peut tarder à nous être rendue salle Favart. Cette mélodieuse partition, où brilla d'un si vif éclat Mra° Carvalho, durant cent cinquante représentations, est en tète du programme de l'Opéra-Comique, seulement, il faut une distribution digne de l'oeuvre, et c'est à quoi le directeur-artiste Carvalho met tous ses soins. H. MORENO.

P.-S. Demain lundi à l'Opéra, soirée de grande musique : reprise de Bon Juan pour la continuation des débuts du baryton Maurel et de MUo Heilbron. Mardi, à la Renaissance, première des Voltigeurs pour la rentrée de Jeanne Granier. Mercredi ou vendredi, à l'OpéraComique, reprise du Maçon d'Auber suivi des Rendez-vous Bourgeois avec distribution toute nouvelle. La presse sera convoquée.

Les trois dernières représentations de la Flûte enchantée sont annoncées salle Favart: Mme Carvalho chantera Pamina, mardi, jeudi et samedi, puis elle se rendra au théâtre de Monte-Carlo pour y chanter Faust et Hamlet en compagnie de Faure.

Lundi 12 janvier, première répétition à orchestre de Jean de Nivelle, "appelé à faire son apparition devant le public la semaine suivante.

LES INSTRUMENTS ET LA MUSIQUE DU PASSÉ

DEUXIÈME AUDITION DU CONSERVATOIRE DE BRUXELLES

L'Écho du Parlement, de Bruxelles, nous apporte le compte-rendu d'une intéressante pérégrination artistique faite au Conservatoire de Bruxelles dans la musique du passé, trop peu connue en France. Nous reproduisons avec.d'autant plus d'empressement le compterendu de cette solennité de musique rétrospective, qu'elle nous fournit l'occasion de dire et redire que c'est au regretté AMÉDÉE MÉREAUX que le monde musical doit la première grande collection qui ait été publiée des oeuvres célèbres des clavecinistes, de 163] à 1790, classées dans Jeur ordre chronologique, avec les agréments el ornements du temps, rhytmés et traduits en toutes notes. Cette superbe publication-Méreaux fit sensation à l'Exposition universelle de 1855, et le rapport de Fétis la classe en tête des grandes publications musicales connues jusqu'à ce jour. Elle contient 52 livraisons, renfermant plus de cent cinquante chefs-d'oeuvre du genre, précédés : 1° de considérations générales sur la nature et la tendance du génie des plus célèbres CLAVECINISTES, l'influence de leurs travaux, la cause et les résultats des progrès qu'ils ont fait faire à la musique de CLAVECIN, jusqu'à l'adoption du PIANO; 2° de notices biographiques avec portraits ; 3° de la théorie et traduction en toutes notes des signes d'exécution et des ornements du temps, d'après les principes et méthodes de Chambonnières, Purcell, Couperin, Bach, Rameau, Marpurg et Clementi. Bref, les Clavecinistes-Méreaux ré- : sument à tous les points de vue l'une de ces grandes publications ' historiques de l'art qui honorent le pays qui leur a donné le jour, Voilà pourquoi le Ménestrel en revendique la priorité, du reste non contestée, au nom de la France, tout comme il revendique au même titre la superbe publication de F.-A. GEVAERT, les Gloires de l'Italie, chefs-d'oeuvre anciens et inédits de la musique vocale italienne aux xviie et XVIH 0 siècles, recueillis, annotés et transcrits pour chant el piano, d'après les manuscrits originaux ou éditions primitives avec texte italien et traduction française de Victor Wilder. Ce sont là de véritables monuments élevés à l'art classique par la France, qui a le droit de s'en enorgueillir. Ceci dit, laissons parler notre collaborateur de Bruxelles :

La première audition avait été consacrée au piano à double clavier de M. Mangeot, et M. Zarebski nous avait révélé les ressources polyphoniques d'un instrument de musique de l'avenir : c'est principalement aux instruments du passé, choisis dans notre très riche musée du Conservatoire, que M. Gevaert avait demandé la curieuse attraction de la deuxième soirée intime; je dis: intime, pour désigner les artistes, la presse musicale et les quatre cents patronats du Conservatoire. La Reine et la Comtesse de Flandre honoraient de leur présence cette fête musicale, merveilleusement réussie de tous points. Toute la partie historique du programme avait été choisie parmi les oeuvres des trois derniers siècles, de manière à caractériser le style des maîtres en même temps qu'on montrait en pleine réalité le rôle des instruments du temps, soit dans l'accompagnement des voix, soit dans la virtuosité instrumentale.

Dès le premier morceau, trois Pièces de Rameau (1712) pour clavecin, dessus et basse de viole, le public a subi le charme de ces sonorités discrètes ; et le babil léger et piquant du clavecin a mis en lumière la netteté' du dessin, l'abondance, la variété, la finesse élégante et gracieuse des inventions mélodiques et rhytmiques du vieux maître.

Ce sont des musiciens inconnus, du xvr 3 siècle, qui nous ont laissé les belles et larges mélodies sur les psaumes de Clément Marot. Les jeunes élèves des classes de solfège ont chanté avec beaucoup de justesse un de ces psaumes, avec accompagnement d'un orgue de régale du temps de Henri IV : véritable orgue de petite chapelle calviniste, un orgue toujours prêt à se cacher dans un placard secret pour échapper aux espionnages des dénonciateurs de « parpaillots. » Un autre petit orgue, meuble de luxe celui-là, et qui vient sans nul doute de quelque oratoire du temps de Louis XIII, a accompagné deux No'éls français du xvne siècle, vraies chansons populaires, cantiques villageois auxquels les voix des fillettes du solfège laissaient toute leur couleur, naïve.

M. Tolbecque a marqué deux âges de la virtuosité de la basse en exé» tant, fort habilement, et en style d'exactitude irréprochable, une sonate de Hoendel pour viole de gambe (accompagné au clavecin par M. 'Wouters), puis, avec piano, une sonate pour violoncelle, de Boccherini.

Le clavecin a retrouvé de nouveaux triomphes sous l'exécution de M"e Kesteloot et de M»« Mary Gemma ; et quels bijoux de ciselure raffinée, quels ruisselets de perles sonores que le Menuet de Bach, la Bourbonnais* de Couperin, la musette des Fêtes d'Hébê de Rameau, la Toccata de Scarlattt et le menuet de Mathias Van den Gheyn, tiré de l'intéressante collectio» des oeuvres du maître louvaniste recueillies et publiées pas M. le chevalier X. Van Elewyck. Impossible de faire mieux parler ce diseur charma" 1 et de mieux laisser à la phrase musicale la précision de ses lignes, rel«


LE MENESTREL

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vée çà et là par les ornements qui suppléaient à la tenue du son et aux contrastes des accents forts et doux, interdits à la corde pincée. Le piano frappeur est lourd, gros, épais, dans ces trilles, ces grupetti, ces staccati battus de main légère, ces mordants que le clavecin enlève et détache avec une netteté indéfinissable.

La virtuosité vocale a eu sa part dans ce joli programme archaïque : un air à'Amadis, de Lulli (1684) chanté d'une belle voix par Mlle Botman, avec accompagnement de deux dessus, une taille et une basse de viole ; puis une « Brunette » très piquante de Guédron,maître de chapelle de LouisXIII, fort bien dite par MUo Mahieux, sur un accompagnement de virginale que M. Gevaert a fleuri d'arabesques « du temps » de façon très piquante ; et, pour morceau de clôture de cette petite veillée du Christmas Day, un Noël de M. Léon Jouret, de facture et de sonorité toutes modernes, fort bien exécuté par Mlu Heirwegh et un choeur de douze bonnes voix de la classe d'ensemble vocal.

Y II nous faut compléter la présentation des « instruments » et des artistes qui les ont fait valoir. Le clavecin de MUes Kesteloot et Gemma est un clavecin à deux claviers, de Vincent Thibaut, facteur toulousin (1679); le dessus de viole, joué par M. Colyns, est de Nicolas Bertrand (Paris 1701); la taille provient de la chapelle de Louis XIV ; l'orgue de régale (Henri IV) et le positif (petit orgue Louis XIII) ont été tenus par M. Léon Jouret; et la virginale qui a chanté les joyeux fredons de la « Brunette, » sous les doigts de M. Gevaert, est signée: Jean Ruckers (Anvers, 1628).

TH. JOURET.

CLÉMENT MAROT ET LE PSAUTIER HUGUENOT

PAR O. DOUEN

Le Ménestrel du 2 novembre dernier a déjà fait mention de cet ouvrage, sur lequel nous revenons après l'avoir étudié, en négligeant le côté dogmatique qui n'est pas de notre compétence.

M. Douen s'efforce, dans sa Vie de Marot, de nous présenter le poète comme un martyr de la foi protestante, en tirant des oeuvres de Marot, des fragments de poésies qui, à la grande rigueur, peuvent confirmer cette manière de voir. Il aura toutefois bien de la peine à persuader complètement ses lecteurs : Marot était l'homme le moins mystique du monde, sa vie passablement légère le prouve suffisamment.

Ce n'était d'ailleurs pas son inclination pour les réformes de Luther qui lui avait fait entreprendre la traduction des psaumes : on sait que ce fut à la requête de son ami Vatable, qui lui fournissait la traduction littérale d'après l'hébreu.

Il nous paraît difficile à admettre que Marot ait cru faire une oeuvre protestante en traduisant les trente premiers psaumes dédiés au roi François Ier dont il était le valet de chambre (1541), car on sait que ce roi n'était pas précisément le protecteur du calvinisme naissant. Ces poésies n'avaient d'ailleurs rien de dogmatique, on les reçut à la cour et à la ville comme des chansons nouvelles, car elles étaient rimées sur des airs qui couraient alors.

Ce n'est que quand la Sorbonne sévit contre les psaumes qu'on les attribua plus spécialement aux protestants, et sans cet acte d'autorité, il est probable que les catholiques qui chantaient des cantiques et des psaumes . en langue vulgaire, bien avant la réforme, auraient continué à le faire. La plus grande partie du premier volume de l'ouvrage de M. Douen est consacrée à la jeunesse de Clément Marot ; puis nous voyons l'homme et le poète de cour, ses relations avec Calvin et enfin la production des psaumes.

M. Douen veut même faire un musicien de son poète, en citant un morceau à l'appui. Freig, dans son Proedagogus, donne en effet un chant qu'il attribue à Clément Marot; mais un pareil document, dont l'authenticité ne s'appuie sur aucune autorité, nous paraît insuffisant pour faire de Marot un harmoniste ou un compositeur. Nous remarquerons en passant que dans ce morceau reproduit, à la gamme descendante de la fin, il manque un la après le si grave, cette faute existe les deux fois. On connaît les vers suivants,,un petit chef-d!oeuvre poétique de Malherbe :

N'espérons plus, mon âme, aux promesses du monde ; Sa lumière est un verre, et sa faveur, une onde, Que toujours quelque vent empêche de calmer. Quittons ces vanités, lassens-nous de les suivre :

C'est Dieu qui nous fait vivre,

C'est Dieu qu'il faut aimer.

M. Douen trouve cela du prosaïsme et de l'impuissance, afin de mettre d'autant plus en relief Clément Marot : les lecteurs de Marot et de Malherbe décideront; pour nous c'est tout décidé. | • La longue discussion pour trancher la question de savoir si Goudimel - est l'auteur des Mélodies publiées avec les psaumes de Marot nous semble peu utile, puisque Goudimel dit lui-même qu'il a « adjousté au chant des pseaumes, trois parties ». Il n'est pas nécessaire d'être musicien ou compositeur pour comprendre ces mots, et les historiens ou les théologiens qui ont voulu prouver autre chose étaient mal instruits.

H est possible que Marot ait rimé quelques-uns de ses psaumes sur des

airs populaires, quoiqu'au premier aspect cela paraisse improbable, les airs des psaumes français ressemblant beaucoup plus à des chorals qu'à des chansons populaires; ces dernières sont d'ailleurs beaucoup plus courtes que les psaumes, à bien peu d'exceptions près.

Toutefois, en examinant encore dans ces derniers temps le Recueil de Petrucci, qui renferme près de deux cent cinquante chansons populaires françaises du xve siècle, on se prend a hésiter, et même à trouver une certaine ressemblance de forme; mais les valeurs des notes ont dû être tellement changées qu'on ne peut vraiment pas dire : Voici telle ou telle chanson» même en y mettant la bonne volonté la plus grande.

Observons encore que les compositeurs qui contrepointaient à quatre voix une chanson populaire, ou qui s'en servaient dans leurs messes, ne se gênaient nullement pour désarticuler les valeurs, selon que cela était utile pour tel ou tel accord. La chanson de l'Homme armé se présente chaque fois sous un aspect différent (quant aux valeurs et aux notes) dans les messes de Josquin Des Près, d'Obrecht, de La Rue, etc. M. Douen nous fournit également une preuve de cette liberté, en mettant en regard des chansons populaires avec les psaumes appliqués à ces airs. Les biographes de Goudimel, y compris M. Fétis, datent la mort de ce compositeur du 24 août 1572 (jour de la Saint-Barthélémy). Voici une lettre qui nous suggère fortement l'idée que Goudimel est mort de la fièvre et dans son lit.

» Au poète couronné Melissus.

» Mon Melissus, doux comme du miel, j'ai reçu tes deux lettres, et ton Symbolum en même temps que les belles poésies composées d'après ma recommandation, qui furent trouvées très excellentes par plusieurs savants. Si je n'ai pas répondu de suite à tes lettres, je te prie de me le pardonner, j'étais très occupé d'affaires d'intérêt à cause de l'argent prêté à mon p... qui me suscita les plus grands désagréments, au point que je fus obligé de faire le voyage de Besançon où ce p... est fixé.

» Dès que j'y fus arrivé, et en m'appuyant sur le paragraphe de la restitution, mon créancier se boucha les oreilles, au point que je chantais à un sourd, ou à un mort. Je l'appelai en justice, il comparut. Nousplaidâmes pendant deux mois, non sans les plus grands ennuis. Enfin, après que le fond a été suffisamment discuté, le jugement fut rendu contre mon adversaire, si bien qu'il perdit le procès, tandis que j'avais complètement atteint mon but.

» Après avoir quitté Besançon, et dès mon arrivée à Lyon, c'est-à-dire dès que j'apperçus les murs de la ville, je fus saisi d'une horrible fièvre qui me tourmenta et m'éprouva pendant un mois d'une singulière manière, et c'est là la raison pour laquelle je n'ai pas encore pu orner de musique ton Symbolum.

» Mais, dès qu'avec le secours de Dieu, j'aurai pu quitter mon ni et regagner des forces, ma main ressaisira certainement la plume, et je (..lisserai se répandre sur le susdit (Symbolum) tout ce que les muses vouJroi.;. bien m'inspirer.

» Porte-toi bien, mon cher Melissus, et garde-moi comme jusqu'ici ton amitié. Encore une fois porte-toi bien.

» Lyon, le 23 août 1372. » CLAUDE GOUDIMEL. »

Cette lettre écrite en latin se trouve dans les oeuvres du poète Melissus, dont le vrai nom est Paul Schede (voyez : Melissi Schediasmatum Reliquioe, 1375). M. Bellermann a déjà donné cette lettre traduite en allemand, ainsi que d'autres documents sur Goudimel, dans la Gazette Musicale de Leipzig, octobre 1874. ■

Pour en revenir aux psaumes, il paraît établi qu'un musicien nommé Franck a fourni quelques-unes de ces mélodies ou de ces chorals, que Bourgeois en fournit de son côté, et que Goudimel et Bourgeois les harmonisèrent les premiers.

Tant de compositeurs se sont depuis ce temps-là occupés des psaumes, que M. Douen a fait un très utile travail de patience et. de recherches, en tâchant d'attribuer à chacun de ces musiciens ce qui lui appartient, chose des plus délicates et des plus difficiles, les musiciens du xvie siècle signant fort peu leurs oeuvres.

Nous nous serions volontiers arrêté plus longtemps sur les curieuses recherches qui terminent le premier volume de M. Douen, la comparaison des psaumes avec les chansons populaires, qui ont pu leur servir de timbre ; mais la place qui nous est réservée ne nous permet pas d'en parler plus longuement.

Au second volume, M. Douen se trompe en disant que Fétis ne mentionne que Antoine Champion. Son prédécesseur homonyme, Nicolas Champion, se trouve au contraire dans la Biographie des musiciens seulement M. Fétis attribue à Antoine la messe qui paraît devoir revenir à Nicolas.

Ce second volume s'occupe tout particulièrement des compositeurs qui ont harmonisé les psaumes comme Bourgeoys, Goudimel, Clément Janequin, Philibert Jambe-de-B^tf, Claudin Le Jeune et d'autres. M. Douen voudrait faire volontiers de tous des martyrs protestants, et son zèle le pousse bien au-delà de la vérité : on n'est pas huguenot pour avoir mis des psaumes en musique.

Disons encore que François Paladin est cité par Fétis, de même que sa Tablature de Luth où sont contenus plusieurs psalmes, etc. C'est un erratum pour M. Douen, peu de chose, qu'il rachète et au-delà par d'intéressants détails biographiques et de nombreuses harmonisations notées des psaumes.

Au. point de vue musical, c'est là le côté pratique de l'ouvrage de M. Douen, les nombreux exemples du xvie siècle sont précieux à consulter;


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Lli MÉNESTREL

la plupart des oeuvres originales d'où ils sont extraits étant fort difficiles à rencontrer, même dans les plus riches bibliothèques, comme Clément Jannequin, Loys Bourgeois, Jean Louys, Philibert Jambe-de-Fer, Richard Crassot, Hugues Sureau, Jean Servin, Claude Goudimel (i), Orlando de Lassus, Claudin

Le Jeune, et bien d'autres moins célèbres.

Le chapitre XXIV traite de l'influence de la Réforme sur la musique ; nous l'aurions intitulé : Influence delà musique sur la Réforme, mais chacun a ses préférences. Par exemple de quelle influence peut avoir été dans tout cela l'Hymne de Denis à Apollon, reproduit par M. Douen, et qui prouve par sa marche chromatique que jamais pièce de plain-chant ne lui a ressemblé. Ou bien encore l'Ode à Boèce et les chansons des troubadours, quelle influence cela a-t-il bien pu avoir sur la Réforme ? De même que la Prose de l'âne et la chanson de Robin m'aime, du jeu de Robin et Mai-ion, d'Adam de la Haie ; à quoi bon cette réédition des oeuvres de M. de Coussemaker qui sont entre toutes les mains ; puis encore la chanson de l'Homme armé, d'après Bottée de Toulmon, qui l'a mal notée. Tout cela pour prouver que y le plain-chant ne vaut.pas un fétu. —M. Douen a voulu trop prouver. l/w\ 4u/^ Nous ne terminerons Èftf* cette conclusion ; nous louerons, au contraire, sans restriction, la belle Bibliographie française du Psautier que M. Douen a ajoutée à son second volume, elle est précieuse et sera bien certainement consultée souvent.

Quant à l'exécution typographique de cet ouvrage, elle est splendide ; il n'y a qu'un gouvernement français qui puisse établir de pareilles publications; plus d'un libraire s'y serait ruiné, même avec une bonne vente. J.-B. WECKEULIN.

SAISON DE MADRID

CORRESPONDANCE PARTICULIÈRE

Quand tout le monde a été malade, j'ai bien le droit de l'être un peu moi-même. Voilà ce qui explique mon retard. Au Théâtre-Royal tous les artistes y ont passé : Nilsson, Scalchi, Gayarre et d'autres. Il y a donc eu . une série de relâches forcés qui ont fait crier MM. les abonnés, et de sensibles lacunes dans le cours des représentations dont la plupart ont été comblées par le Trovatore et les Capuletti e Montecchi de Bellini. Je ne veux pas parler de ces soirées mémorables, où MM. les abonnés se sont ennuyés avec une béatitude sans exemple.

La direction peut être contente de ses victimes. Elles souffrent tout, leurs plaintes semblent s'élever quelquefois courageusement aux dernières limites de la gamme, mais elles s'adoucissent peu à peu, pour finir dans un morendo imperceptible. Et la direction d'afficher II Trovatore et I Capuletti e di Montecchi.

Mmo Nilsson a fait sa seconde apparition dans Faust, vendredi 19 décembre et elle a encore chanté deux fois le chef-d'oeuvre de Gounod au milieu d'un enthousiasme qui se maintient toujours a.\imaximum. Ovations et rappels sans fin. La grande artiste a conquis tous les coeurs. Que ne peut-elle conquérir le choeur de femmes qui continue toujours à outrager l'intonation. Le calembourg est déplorable, je le sais, mais la situation qui l'a fait éclore ne l'est pas moins.

Comme nouveauté, nous avons eu le début de Mme Ortolani Tiberini, une ancienne connaissance de notre grand théâtre où elle s'était fait entendre pour la dernière fois, il y a neuf ans. Mmo Ortolani a débuté dans les Puritains. Sa voix a perdu de la fraîcheur de son timbre et de sa souplesse; le temps n'a pas manqué à ses cruelles traditions, mais la chanteuse distinguée apparaît toujours avec son style charmant qui, avec l'aide des bons souvenirs d'autrefois, a fini par vaincre les difficultés de l'âge. Somme toute, on a fait à Mmo Ortolani un accueil fort bienveillant dans tout l'opéra et la bienveillance s'est transformée en enthousiasme dans le rondo du second acte qui a valu à Mme Ortolani une ovation et rappels.

Quand je parle de Gayarre, c'est pour dire toujours la même chose et il n'en peut être autrement. C'est toujours le même organe, la même superbe, admirable voix dont les accents pénétrants remuent tout le public ; c'est merveilleux, c'est inouï. Au troisième acte il soutient une note dans le médium qui fait littéralement crouler la salle. Il faut dire que le rôle d'Arthur sert magnifiquement les splendides facultés vocales de notre célèbre compatriote. Aussi quels applaudissements, quelles ovations !

Jo retourne aux Puritaiiis pour constater que le duo de « la liberté » enlevé av(!C une verve un peu trop libérale par MM. Kaschmann et Vidal a eu les honneurs du bis. Les deux artistes ont été applaudis, acclamés, rappelés gridaaaanda liberté-.

Mignon passera, dit-on, cette semaine. On y attend avec une impatience, très justifiée du reste par les beautés de cette adorable partition, le second début de M»"-' Nilsson. Le nouveau ténor chargé du rôle de Wilhem s'appelle Westberg. C'est un compatriote de Christine Nilsson. Mlle Torresella chantera Philine et M. Vidal, Lothario. Toutes les places sont prises d'avance. A bientôt les détails de cette soirée qui prend les proportions d'un événement. ANTONIO PENA Y GONI.

(4). Sur les trois ou quatre psaumes de Goudimel reproduits, le premier ost un arrangement, et il est bizarre que le 104e psaume de l'édition de 1565 ce ressemble en rien au même psaume, même édition que nous possédons.

NOUVELLES DIVERSES

ÉTRANGER

On nous écrit de New-York que la Mignon d'Ambroise Thomas s'y joue en ce moment, en italien, avec MUe Ambre et le ténor Campanini.et ej français, avec Paola Marié et le ténor Capoul. C'est la troupe d'opérette de l'imprésario Grau qui fait concurrence à la compagnie d'opéra de l'imprésario Mapleson. Seulement il y a une nuance à signaler dans ce coft- .; bat lyrique à outrance : M. Mapleson a reconnu le droit des auteurs en Amérique comme en Angleterre et leur paie une modeste mais équitable redevance, tandis que M. Grau méconnaît ce droit et fait représenter J Mignon d'après une partition copiée subrepticement. Quand donc les Américains, qui proclament la liberté universelle des Noirs, inscriront-ils dans leur code international le respect de la propriété des Blancs de tous pays ? Espérons que le congrès commercial franco-américain ne fera pas litière des intérêts de la propriété littéraire et artistique.

— Saint-Pétersbourg, 11-29 décembre 4879. — La première période de note saison musicale, va se terminer avec les fêtes de fin d'année, et, sauf , quelques exceptions, elle aura jeté peu d'éclat; il serait injuste cependant, , de ne point parler des belles. séances symphoniques qui ont lieu chaque quinzaine, dans la Salle de l'assemblée de la noblesse, sous l'habile direc- : tion de M. Naprawnik, le chef d'orchestre de l'Opéra russe. Au concert : du 1-13 décembre (pour me borner à ce qui peut intéresser plus particu- .; lièrement le lecteur français) l'ouverture dramatique Patrie, de Bizet, qui £ terminait la séance, a été accueillie' par les plus vifs applaudissements. ^ Dans la soirée du 15-27 on a exécuté, pour la première fois, une sympho- :• nie nouvelle de M. Naprawnik, admirablement écrite et dont l'Adagio etle ; Scherzo ont été particulièrement goûtés. Ceci (ou je me trompe fort) est de la bonne musique nationale, foncièrement russe, qui restera, et que vous entendrez un jour. Mlle Terminsky, professeur au Conservatoire (ancienne élève d'Antoine Rubinstein) a magistralement exécuté le concerto en /a mineur de Chopin. On a terminé par la charmante fantaisie de Glinka.la Jota aragonaise. s. M.

— Il paraîtrait que des dépêches arrivées de Bayreuth ont apporté les nouvelles les plus alarmantes de la santé de Richard "Wagner, qui souffrait depuis quelque temps d'un érésypèle. Le bruit de la mort du grand réformateur allemand a même couru à Paris, mais aucune attestation officielle n'est venu jusqu'ici confirmer cette grave nouvelle.

— Au prochain concert de la Société philharmonique de Bruxelles, on exécutera le premier acte de Judith, opéra biblique de M. G. Lefèvre, Evt et le troisième acte du Roi de Lahore, de M. Massenet. MM. Lefèvre cl Massenet iront personnellement diriger l'interprétation de leur oeuvre.

— On nous écrit de Rome que l'engagement du baryton Roudil, à l'Apollo, inspire l'idée de reprendre YHamlel d'Ambroise Thomas à ce théâtre. Oh sait qu'Hamlet est le rôle favori du grand artiste. Avec une Ophélie telle que Mlle Donadio, on arriverait à de superbes représentations.

— Au San Carlo de Naples, c'est réminent baryton Aldighieiï qui chantera Hamlet et Mme Rubini, Ophélie. On répète»

— Triomphe de MUe de Reszké à la Scala de Milan dans Aida.

— A Milan, les concerts populaires, fondés par le maestro Andreoli, ont commencé une série nouvelle. Ces séances se donnent au Conservatoire.

PAHI!) tl UtfAKItMtNNS,

Ainsi que nous l'avons annoncé, dans notre numéro de dimanche dernier, le lauréat du prix Rossini est Mm 8 de Grandval. On sait que le poè'me couronné qui a servi de thème à la composition musicale des concurrents est la Fille de Jaïre, de M. Colin. L'oeuvre de Mm 6 de Grandval sera exécutée solennellement au Conservatoire, lorsque les intérêts de la somme léguée à cet effet par Rossini auront atteint le chiffre de 6,000 francs. Jusqu'ici elle n'en a produit encore que 3,000. C'est évidemment un pr$ qui va devenir biennal au lieu d'être annuel ; on pourra de la sorte prélever sur la rente léguée une somme suffisante pour donner une exécution soignée de l'oeuvre couronnée. Ajoutons qu'en décernant le prix du concours Rossini à Mme de Grandval, l'académie des Beaux-Arts', qui faisait fonctions de jury, a attribué deux mentions : la première à la partition n° 27, la seconde à la partition n° 28, dont les auteurs sont invités à se faire connaître. Soyons indiscrets, et nommons-les ; ce sont : MM. HenW Maréchal et Georges Pfeiffer.

— C'est sur 42 concurrents que Mme de Grandval l'a emporté à l'unanimité pour le prix Rossini. C'est là ce qu'on peut appeler un véritable triomphe.


LE MÉNESTREL

m

— Le cours d'histoire do la musique que M. Bourgault-Ducoudray prosse au Conservatoire a été suspendu pendant la période des examens.

reprendra le jeudi 29 janvier. M. Bourgault, qui a fait cette année l'hisire de la naissance de l'Opéra-Comique, en est arrivé jusqu'à Grétry inusivement. Il traitera maintenant de l'histoire de l'Opéra et de celle de Opéra-Comique, qu'il conduira jusqu'à la Révolution de 89.

_ Le directeur du Conservatoire dé Bruxelles, M. F.-A, Gevaert, est à aris avec sa famille.

C'est par la Traviata que la diva Patti commencera le 14- février, au

éâtre de la Gaîté, la série des représentations italiennes organisées par imprésario Merelli. Là Patti chantera la Traviata avec le ténor Ravelli et baryton Broggi qui nous arrivent de Vienne et Saint-Pétersbourg. C'est maestro Vianesi qui tiendra l'archet du commandement.

— On nous écrit de Nice que loges et stalles s'enlèvent au Théâtrealien de cette ville pour les représentations de l'Albani, représentations

patiemment attendues et qui seront la great attraction de la saison içoise.

— Le concert que M. Lassalle a organisé à Madrid au profit des pauvres e Paris a produit 12,000 francs de bénéfice. A l'issue de ce concert,

. Lassalle a quitté Madrid. Il est venu passer deux jours à Paris, et s'est endu ensuite à Lyon, où la première du Rai de Lahore aura lieu le 10 janier. Les répétitions ont commencé avec le ténor Léon Achard. M. Massenet onduira l'orchestre à la première.

— L'éditeur-directeur Carlo Ducci, de Florence, est venu entendre, à aris, divers opéras français qu'il a l'intention de faire naturaliser en talie, ainsi qu'il l'a fait si heureusement pour les-Diamants de la Couronne.

— Le virtuose Paul Viardot est de retour à Paris; sa soeur Mmo Héritte Viardot est toujours à Stockholm, où elle doit diriger en personne, ni plus ni moins que Wagner ou Gounod, tout un programme de ses oeuvres.

— L'Association départementale des compositeurs de musique, professeurs artistes exécutants et amateurs, réunie en assemblée générale

ans la salle Pierre Petit, sous la présidence de M. Emile Pessard, présient fondateur, a procédé à l'élection des membres de la commission. Le omité directeur est ainsi composé: MM. Emile Pessard, Anthiome, dmond Audran, Donjon, Garigue, Lavignac, Alphonse Leduc, H. Maréchal, P. Puget, Théodore Ritter et Turban, membres fondateurs. MM. Emile Asse, Bertringer, Clayette, Colomer, Dardel, Arthur Desmoulins, Jules Javelot, Gabriel Marie et Veyret, membres élus.

— Le Caveau, qui depuis 1737, vide chaque mois le verre de PANARD et agite lé grelot de COLLÉ, vient de reconstituer son bureau pour 1880.

Ont été nommés : Président, Eugène GRANGE. — Vice-Président, Charles VINCENT. — Secrétaires, Louis PIESSE et J. ECHALIÉ. — Archiviste, MONTARIOL. — Trésoriers, MOUTON-DUFRAINE et JULLIEN. — Les maîtres de cérémonie, RIPAULT et POULLAIN.

— Voici une intéressante lettre adressée par Duprez à M. Jules Prével :

« Monsieur le rédacteur,

» Je viens demander à l'impartialité du Figaro de vouloir bien m'accorder l'hospitalité pour une rectification, au sujet des études vocales d'une jeune artiste de talpnt, qui vient de débuter à l'Opéra dans les Huguenots. Il s'agit de Mlte Marie Vachot, qui, par un engagement payable après ses études, est venue me demander mes leçons et mes conseils. Ne possédant alors qu'un filet de voix fort limité, des dispositions et aucun style arrêté, pendant treize mois consécutifs, et trois fois par semaine, je lui ai consciencieusement donné mes soin1'.

» Aujourd'hui, je lis dans les journaux qu'elle est l'élève de beaucoup de monde, excepté de moi ; j'ignore ce qu'ont pu lui enseigner de plus et de mieux ces maîtres et ces maîtresses dont, à mon exclusion, elle se dit l'élève,, mais il m'eût été agréable que MUe Vachot voulût bien reconnaître que» pendant, treize mois, les cent trente ou cent quarante leçons qu'elle a reçues,, si elles ne lui ont fait aucun bien, ne lui ont, du moins, fait aucun mal. Est-ce se montrer trop exigeant?...

«Dans l'espoir que vous voudrez bien faire droit à ma réclamation, je vous prie, monsieur, d'agréer l'expression de ma gratitude et de mes sentiments les plus distingués. » G. DCPREZ, de l'Opéra. »

— Voici, la réponse de M1Ie Vachot :

« Paris, 30 décembre 1879. » Mon cher maître,, » J-'arrive de Bordeaux, où je viens d'avoir l'honneur de chanter au concert du Cercle philharmonique, et l'on me remet le Figaro où se trouve une lettre de vous, qui me fait le plus grand plaisir, le plus grand honneur.'Tous daignez revendiquer vos droits au sujet de mes études vocales; croyez bien, cher maître, que je n'aurai ni l'ingratitude ni l'indélicatesse de ne-pas vous donner ce qui vous appartient. » Seulement vous énoncez que lorsque j'ai été vous demander des • leçons, « je n'avais qu'un filet de voix fort limité, des dispositions et au; osa- style arrêté-. ^

» Ce jugement, de votre part, me semble injuste pour ma mère, qui, seule,

; était mon professeur depuis quinze mois, lorsque je fus engagée à l'Opéra

,• par M. Halanzier, après l'audition de l'air des Bijoux de Faust et. celui

d'Ophélie i'Hamlet. C'est alors, seulement, que ma mère ne voulant pas

assumer seule la responsabilité de mon éducation, crut bien faire en me confiant à vous; elle me continua ses leçons quotidiennes et dé tous les instants.

» Je suis venue, comme vous le dites, cher maître, vous répéter pendant un an les airs qu'elle m'apprenait et dont vous approuviez la méthode, me faisant des observations telles qu'un illustre artiste et professeur' comme vous pouviez les faire, et j'en ai profité, mais il y a deux ans de cela, et depuis je n'ai reçu d'autres leçons de chant que de ma mère; une éducation musicale ne se fait pas en un an, et si je me flatte de grand coeur d'avoir travaillé avec vous," vous trouverez très juste, je penso, queje laisse à ma mère ce qui lui appartient aussi. De même, ce que je tiensencore à constater ici, ce sont les excellentes leçons de mise en scène et de déclamation lyrique que j'ai reçues de l'éminent professeur du Conservatoire, M. Obin, qui m'ont donné la confiance et le courago d'affronter la scène de l'Opéra.

» Veuillez agréer, cher maître, l'assurance de ma gratitude et de mes sentiments distingués.

» Marie VACHOT. »

—• L'inauguration du grand orgue de la cathédrale de Montpellier, construit par M. Merklin, aura lieu le mercredi 7 janvier prochain. M. Alex. Guilmant est appelé à'faire entendre ce nouvel instrument.

— A Roubaix, la semaine dernière, inauguration d'un nouvel orgue, à l'église Notre-Dame, excellent instrument qui sort des ateliers de MM. Stoltz frères. MM. Koszul et Pens se sont charges d'en faire ressortir tous les mérites.

— On nous annonce que le Miserere à quatre voix, soli et Ghoeurs, composé et dédié à la mémoire de Mmo de Beaucourt par GoUnod, va paraître prochainement chez l'éditeur Lemoinè.

— Le Valcspirc, c'est le nom de la pittoresque localité du Roussillon dans laquelle le Canigou dresse son pic géant; c'est aussi le titre de la remarquable mélodie qu'elle a inspirée à deux hommes de talent, enfants de ce beau pays, MM. Talrich et Taudou. La poésie de M. Talrich est pleine de couleur et comme imprégnée de ce vague parfum acre et pénétrant que l'on respire dans les régions pyrénéennes. Toujours mélodique et expressive, la musique de M. Taudou se recommande, non moins par la valeur de l'idée, que par la distinction de l'harmonie et l'ingénieuse ordonnance de l'accompagnement; ajoutons qu'elle est écrite dans une texture qui permettra à presque toutes les voix d'hommes ou de femmes de chanter cette mélodie.

—- On annonce le mariage de M 110 Angèle Julian avec M. Henri Perry, le jeune compositeur qui s'est produit récemment au théâtre avec la Croix de l'Alcade.

— L'Harmonie de La Chapelle, fondée il y a trois mois à peine, fêtait 1« Sainte-Cécile, la semaine dernière, dans un banquet. Une quête a été faite au profit des pauvres du quartier.

CONCERTS ET SOIRÉES

Aujourd'hui dimanche, à la Société des Concerts du Conservatoire : 1° symphonie en la mineur de Mendelssohn; 2° La Mort d'Ophélie, choeur de Berlioz; 3° musique écrite par Beethoven pour l'Egmont de Goethe (traduction de M. Trianon) : a) Couplets de Claire, 6) 1er et 2° entr'actes, c) Romance de Claire, d) 3° et 49 entractes, e) Mort de Claire, f) Mélodrame et songe d'Egmont, g) Symphonie triomphale; ■&" Près du fleuve étranger, choeur de Gounod. Le concert sera dirigé par M. Altès, les solis à'Egmont seront chantés par MUe Dihau et les récits parlés seront dits par M. Sylvain.

— Au Concert populaire, relâche pour aujourd'hui. On nous prépare la Gréattionie Haydn et la Lyre et la Harpe, do M. Saint-Saè'ns, avec Mmo LemmensSherington comme interprète principale, pour dimanche prochain. Un morceau, non inscrit au programme do dimanche dernier, a eu un très' gros succès, c'est le speech bien senti, improvisé par M. Pasd^loup et inspiré parla Charité. La quête faite à ce propos a dépassé 1,000 francs.

— Au Concert du Châtelet,, 2i° audition de la Damnation de Faust, de Berlioz, avec MUo Vergin, MM. Lauwcrs, Lamarche et Luekx. Le concert sera dirigé par M. Colonne.

— Un salon où l'on cultive par excellence les vieux maîtres de piano, e'est celui de M. et Mmo Vigaier, rue Gaumartin, 22» En un seul exercice d'élèves, dimanche dernier, nous avons entendu tour" à tour Haydn, Dussek, Sieibelt, démenti, Mozart, Beethoven, Weber, Mendelssohn, Chopin et Schumann, interprétés- avec style et maestria, tantôt au piano seul ou sur deux claviers, tantôt avec accompagnement de violon. Bref, tout un concert de musique de chambre défrayé par les élèves de Mmo Viguier., assistés de l'archet classique-de M. Viguier. On ne se lassait pas d'entendre- de bonne musique,: aus-i bien comprise de ceux qui l'éeoutaient que des- jeunes filles et jeunes femmes qui l'exécutaient. A côté de MUo Jenny Godin, une élève passée virtuose, citons M" 13 et MUe Ferry, des amateurs qui jouent en artistes;.MUo Cécile Loriol et Mm' Marie de Bonnechose qui en a fait entendre- d'auorables sur le clavier d'ivoire. Encore un pou et nous allions trahir toutes les *** du programme. Que M" 13 Viguier nous pardonne l'indiscrétion déjà commise et ne s'en prenne qu'à ses leçons qui font de véritables artistes de simples amateurs. H*. M.


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LE MÉNESTREL

— Sous le titre de concerts populaires de chambre, une Société de musique de quatuors vient de se fonder dans le but de jouer exclusivement les oeuvres des auteurs modernes : elle donnera huit séances pendant la saison d'hiver 1879-1880, salle Herz, 48, rue de la Victoire. Voici les noms des fondateurs de cette société, qui mérite tous les encouragements : 1er violon : R. Montardon, ex-professeur du Conservatoire de Strasbourg; 2« vioon : Italiaender, chef des seconds violons des concerts Colonne ; alto : Giannini, alto-solo des concerts Colonne ; violoncelle : De Mouskoff, violoncelle-solo de l'Opéra-Populaire. Siège de la Société, chez M. R. Montardon, 111, boulevard de l'Hôpital - où l'on peut se procurer des billets.

— Nous avons dit que le piano de Francis Planté avait fait fondre neige et glace en Bretagne. Nous ne recevons que lettres et vers à ce sujet. De Brest, le paniste-compositeur Th. Lecureux nous apprend sa surprise de se trouver à la gare du chemin de fer avec nombre de dilettantes brestois, se rendant comme lui à Morlaix, afin d'avoir une seconde édition du concert de la veille. A ces intrépides du clavier d'ivoire, Francis Planté répond par une galanterie toute spéciale. A l'issue du concert des Morlaisiens, il leur offre tout un programme de minuit. On sait que Planté vit dans son piano, donc nulle fatigue pour lui. Quant à ses auditeurs, ils se sont aperçus du lever de l'aurore au sortir de cette séance improvisée. De Rennes, c'est à qui se rendra à Laval dans le même but. Mais ce n'est pas tout, nous apprend le feuilleton musical du Siècle : « Planté n'est pas seulement un grand virtuose, il est aussi le plus galant, le plus aimable des hommes. Savez-vous ce qu'il a fait à Rennes ? Ayant appris que la doyenne des professeurs de piano de cette ville, une honnête et vaillante femme qui a formé deux générations de pianistes, n'avait pu, à cause de son âge avancé, se rendre au concert, ce qu'elle regrettait infiniment, il alla la trouver chez elle, et, pour elle seule, joua dix des plus beaux morceaux de son riche répertoire. L'aventure s'ébruita, et on trouva cela plein de coeur. Moi, j'en suis particulièrement touché, car cette femme vénérable, cette vaillante musicienne, cette doyenne des professeurs de piano à Rennes, est la très chère et excellente mère de celui qui écrit ces lignes. Merci, mon cher Planté 1 — OSCAR COMETTANT. »

— Par cet hiver rigoureux, la Charité revêt toutes les formes, et celle de.la musique n'est pas la moins sympathique de ses transformations, surtout lorsqu'elle a pour inspirateur un artiste tel que Faure. Aussi son hymne de la Charité est-il fort recherché en ce moment dans nos concerts. On l'acclamait dimanche dernier salle Favart et quelques jours avant il brillait sur le programme de l'oeuvre de la Société protectrice de l'Enfance, salle Philippe Herz. — Interprète : M1Ie Càrrol, de l'OpéraComique.

— Très intéressante matinée, dimanche dernier, chez MM. Debain et Cia. On y a entendu d'excellents artistes : notamment MUe FoUquet, de l'Opéra, qui a dit en perfection deux mélodies de Massenet ; M 110 Desehamps, avec sa belle fantaisie pour harmonium sur des motifs de Faust; M. Quirot, de l'Opéra-Populaire ; Mn° D'Iven, contralto; le violoniste Nacher, et enfin Coquelin cadet, dont les spirituels monologues ont égayé l'auditoire très nombreux et fort élégant qui se pressait dans la charmante salle de concert que la maison Debain inaugurait ce jour-là et qui va être mise gracieusement à la disposition des artistes, pour soirées et matinées de musique intime.

— A Angers, dimanche dernier, grand festival en l'honneur de M. Massenet, avec le concours de M 110 Jeanne Fouquet de l'Opéra, M. Breitner, le jeune brillant pianiste. M. Massenet était venu exprès de Paris, et conduisait plusieurs oeuvres nouvelles pour Angers, entre autres les Scènes Napolitaines, le Roman d'Arlequin, le Festin de Macbeth et la Marche deSzabady: grand succès et bis pour plusieurs de ces morceaux. Bis également pour MUo Jeanne Fouquet qui a dit avec une voix charmante et beaucoup de sentiment, le grand air de Marie-Magdeleine, « Si tu veux, Mignonne » et la Sérénade du Passant, du même auteur. MUe Fouquet,'dont la voix et le talent grandissent tous les jours, sera bientôt une cantatrice avec laquelle on devra compter. M. Breitner a exécuté avec succès plusieurs morceaux de Schubert, Chopin et Beethoven. Belle séance pour tous, qui s'est renouvelée le lendemain dans la salle de la Renaissance, à Nantes, où M. Massenet, à la tête de la valeureuse phalange orchestrale angevine, s'était transporté.

— On vient de donner à l'Alhambra de Bordeaux — un vrai cirque — un grand concert au bénéfice des cercles catholiques d'ouvriers. Voici ce: que dit la Guyenne de cette fête de bienfaisance, pour laquelle on avait fait appel à trois de nos artistes parisiens : « La soirée a été des plus brillantes, par le succès des artistes comme par la composition de la salle, où se pressaient environ trois mille auditeurs. M. Offroy et son orchestre, M. Lejeune, sur son violoncelle, et M. Legros, dans ses accompagnements,' ont donné beaucoup d'éclat et de relief à la partie instrumentale. Le baryton Lauwers, dans les divers morceaux annoncés (les Myrtes de Faure entre autres), et dans son duo d'Uamlet avec MUo Fechter, s'est montré digne de sa réputation. Quant à MUo Fechter, très goûtée dans Mignon et dans Fattst, elle a été ravissante dans l'Andante des Saisons, de Victor Massé. La gaieté du concert c'était M. A. des Roseaux. Elle a été expahsive

et bruyante même, sans excéder, néanmoins, les bornes prescrites par l'esprit de bonne compagnie. En somme, grand succès sur toute la ligne. * Quelques jours après, le 27 décembre, le cercle philharmonique de Bordeaux donnait un concert non moins brillant, salle Franklin. M. J. Diàz de Soria et M"e Marie Vachot de l'Opéra avaient été appelés, à faire les honneurs de la partie vocale du programme. Ovation, surtout dans leut duo de Mireille, bissé d'enthousiasme.

— Le pianiste compositeur Schiffmacher vient de donner, à Maçon et à Tonnerre, deux séances musicales, devant des salles combles, malgré la rigueur de la saison. ' '■'.-' ' "." f; '

— L'imprésario Ullmann prépare l'une de ces grandes tournées de concerts à l'américaine dont il a le secret. Cette fois, son manifeste-prologue nous annonce, à côté de Mmo Harris-Zagury, « la plus grande virtuose vocale,des temps modernes», le signorBonetti, baryton de l'Opéra-Italien de Londres le pianiste-compositeur Georges Leitert, professeur au Conservatoire de Dresde et la violoniste américaine Fernanda Tedesca — une jeune émule d'Ole Bull, paraît-il. .

— Le baryton Bonetti vient de partir pour Londres où l'appellent plusieurs concerts à donner avant la tournée Ullmann.

— Une bonne nouvelle pour le commerce parisien. La saison des Bals de l'Opéra s'annonce sous les meilleurs auspices; à peine le bureau de location est-il ouvert que déjà il est encombré. Comme l'an dernier, l'Opéra donnera quatre grands bals :

1er bal, samedi, 10 janvier;

2°, samedi, 24 janvier;

3e, samedi-gras, 7 février;

4e, Mi-Carême, 11 mars.■■■

Ainsi que nous l'avons dit, le chef du grand orchestre de 120 musiciens des trois premiers bals, sera le vaillant Arban, avec son nouveau répertoire et ses merveilleuses petites clarinettes en fa. L'orchestre de concert du foyer, composé de cinquante artistes d'élite, sera dirigé par le célèbre capellmeister hongrois Philippe Fahrbach,assisté de sonlieutenant Thibault,

Le -4e bal, celui de la Mi-Carême, est conservé à M. Olivier Métra et à son répertoire. Bref, abondance de richesses.

— Arban, demandé à Lyon, à l'occasion d'un grand bal salle Bellecout, sera de retour à Paris pour sa répétition des bals de FOpéra, cette semaine même, mercredi 7. — La salle Bellecour veut avoir pour chacun de ses grands bals le valeureux chef d'orchestre de l'Opéra. — Arban a promis de se multiplier sur la ligne de Paris à Lyon. On chauffera un train spécial à son intention. - ,;_<;■

— Le capellmeister hongrois Philippe Fahrbach est attendu à Paris après-demain mardi avec toute une bibliothèque de nouveautés musicales destinées à charmer les promeneurs du foyer et des couloirs de l'Opéra. —On cite déjà sa polka du Réveil-matin, son galop de la Cigogne, sa mazurka printanière, une tyrolienne instrumentale, sa marche des Adieux à la Hongrie et sa grande valse de l'Opéra dont on dit merveille. Fahrbach sera le lion de la saison de carnaval 1880.

NÉCROLOGIE

Nous apprenons la mort de Mm 8 Bockholtz-Falconi, cantatrice née à Francfort vers 1820. Mme Bockholtz-Falconi s'était fait connaître à Paris en 1845 par la part importante qu'elle prit aux concerts historiques organisés par le prince de la MoSkowa. Après avoir terminé sa carrière théâtrale en Italie et en Allemagne, elle était venue se fixer à Paris pour se livrer à l'enseignement. Mme Bockholtz-Falconi a publié un certain nombre de morceaux de musique vocale, où l'on trouve des lieder gracieux et mélodieux. Mme Bockholtz, qui était membre de la Société des concerts, est décédée en son domicile, avenue de "Wagram. Ses obsèques ont et lieu à Saint-Ferdinand-des-Ternes.

— La charmante et si sympathique Mme Polonski, que ses succès au Conservatoire et au Trocadéro avaient fait engager à l'Opéra, vient de mourir à Paris, à l'âge de 27 ans ! Mme Polonski avait gardé son nom déjeune fille pour débuter au théâtre ; elle s'appelait aujourd'hui, de par son mariage, Adélaïde Marcinkiewicz. C'était une belle espérance pour le théâtre.

— VÈcho de Berlin annonce la mort de M. Henri Schlesinger, iondateiï de ce journal, décédé à l'âge de 72 ans. Il était le fils de Martin Schlesinge'i qui avait fondé en 1795, à Berlin, la maison d'édition encore prospère aujourd'hui sous la direction de M. Robert Liénau, et le frère de Maurice Schlesinger l'éditeur parisien. Par une coïncidence vraiment étrange, lf journal l'Écho suspend sa publication au moment même où son fondateur disparaît de ce monde.

— De Bautzen, on annonce la mort du compositeur Charles-Edouarf Hering, né à Oschatz, en 1809. Il fut longtemps l'ami de Charles-Marie de "Weber, avec lequel il vécut dans une étroite camaraderie artistique a Dresde. Hering a écrit des oratorios tels que le Sauveur et la Nuit saintil des opéras tels, que Conradin et beaucoup de musique d'église.

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J.-L. HBHGEL, directeur-gérant.

1MPBIMEBIE CENTBALE DES CHEJIINS DE ÏEB. — A. CH.1IX ET C!«, ROK BEBGÉBE, 20, A PABIS