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Titre : Le Ménestrel : journal de musique

Éditeur : Heugel (Paris)

Date d'édition : 1920-06-04

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb344939836

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb344939836/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 44462

Description : 04 juin 1920

Description : 1920/06/04 (A82,N23)-1920/06/10.

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5615272f

Source : Bibliothèque nationale de France, TOL Non conservé au département des périodiques

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 01/12/2010

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EMMANUEL CHABRIER et PAUL DUKAS (i)

Conférence prononcée le 8 avril igso aux Concerts historiques Pasdeloup.

II. - Paul Dukas

ED de musiciens sont aussi différents que celui que nous venons de quitter et celui dont je vais essayer maintenant de vous présenter une hâtive esquisse. Chez l'un l'inspiration jaillira avec une spontanéité toute méridionale, elle éclatera comme une pièce d'artifice en une lumière crue, parfois même ontrancière ; chez l'autre, l'oeuvre sera le résultat d'un travail conscient et réfléchi, attendant toujours pour >e produire l'appel de l'inspiration. 1 „Nevois-je pas quelques sourires sur le visage de certains jeunes musiciens ou musicographes épars dans cet auditoire ? Oh ! je sais, ce vocable que je n'ai pas craint d'employer par deux fois est bien suranné,.. bien vieux)■ p... Inspiration, ça n'a plus cours maintenant, c'est i tout à fait démonétisé...

P Vieux mot, je le veux bien, mais idée éternelle. ^ Sans l'inspiration, il n'est point d'art; c'est la seule ^inspiration qui pourra fournir à l'artiste les rares et I riches matériaux dont un métier, souvent péniblement \ acquis, lui permettra de composer son oeuvre. | Beethoven répondait, en 1817, au musicien anglais Porter qui lui faisait compliment sur le succès « mondial » du Septuor, op. 20 (écrit en 1799) ; « Oh ! en ce [ temps-là, je n'entendais rien à la composition ; mainte1 MM, je sais composer ! » "~ ■ lu est-ce donc que composer ?

f çien peu de gens chez nous, depuis qu'en notre pays l5non a abandonné les études latines, seraient capables de donner de ce terme une définition exacte. Composer... compotiere : poser avec — établir enseme~ constituer côte à côte, voilà pour le sens matériel "mot. Mais les latins attachaient à ce noble vocable * autre sens plus abstrait, complétant la définition "e a terre par un sentiment de comparaison, d'ordre, De Proportion logique :

Si parva licet componere magnis, jj|'èren m°difiait singulièrement la signification pre<m*»e> nl c'est cette acception seule qui doit être appli^a l'oeuvre d'art. F

toutes choses humaines — en art surtout — on 'JJue la matière et la forme.

jja°^ler la matière musicale et l'ordonner de façon àtionf n oeuvrei n'est-ce pas là toute la compo|,)V°irfe

compo|,)V°irfe du 28 mai 1920;

En musique, l'agent principal de l'oeuvre est ce que nous appelons thème ou idée.

Vidée musicale est constituée au moyen d'éléments sonores dotés d'une réelle valeur intrinsèque ; ces éléments sont fournis par V imagination (qui, ici, se confond avec l'inspiration), choisis par le coeur, mis en ordre par Vintelligence. Ce n'est pas le lieu d'entrer dans des détails, mais on peut affirmer que si l'intelligence seule ne peut enfanter que des productions froides et inutiles lorsque l'étincelle du génie (inspiration toujours !) ne vient pas les réchauffer, d'autre part, le génie, tout seul, demeure totalement impuissant à édifier une oeuvre sans l'aide de l'intelligence, et n'arrive qu'à balbutier d'ingénieuses mais toujours éphémères improvisations. Ces deux facultés, toutefois, ne suffiraient pas à assurer l'éclosion d'une oeuvre de beauté, si le sentiment, l'émotion, le coeur, en un mot, ne venaient choisir les éléments propres à l'expression, répudier ceux qui ne le sont point et animer ainsi la superbe mais rigide statue, en lui donnant, par l'opération d'un souffle inspiré, le mouvement et la parole.

Ne croyez pas que ce que je viens de vous exposer représente un système de composition, celui du seul Beethoven, par exemple, et qu'il en puisse exister ' d'autres ; non, ceci est la composition même, et, s'il est naturel que des artistes divers diffèrent sur les détails, tous les génies, ceux du moins dont il a été permis de contrôler le travail, n'ont jamais procédé autrement.

Eléments fournis par le génie instinctif (inspiration), choisis par le sentiment émotif, coordonnés en un tout par l'intelligence au moyen du métier acquis, ainsi procédera la genèse de toute belle oeuvre.

Et c'est ainsi qu'après plus de vingt ans d'une carrière déjà remplie de compositions admirables, Beethoven pouvait dire, à l'aube de sa quarante-septième année : « Maintenant, je sais composer! »

Eh bien, je ne crains pas de le dire : comme Beet-_ hoven, Paul Dukas, lui aussi, sait composer.

Né en 1865, élève de Guiraud en 1884, second prix de Rome en 1888, Dukas, muni de cette distinction officielle, s'aperçut tout à coup, à sa grande stupéfaction, qu'à part le métier terre à terre de l'écriture musicale, appris au Conservatoire, il ne savait rien, mais absolument rien de l'art de la composition...

Doué d'une intelligence supérieure et animé du désir ardent de créer des oeuvres vraiment belles, il comprit très vite qu'il ne devait pas se laisser aller à l'illusion qui pousse tant de jeunes artistes à entrer prématurément dans la carrière de la production, et il se rendit compte qu'avant de produire, il fallait savoir comment produire. C'est ainsi qu'après avoir écrit déjà plusieurs oeuvres qu'il laissa ensuite volontairement dans l'ombre, il cessa complètement de composer, pendant plusieurs années, afin de refaire lui-même sa propre éducation, sa vraie éducation, dans la société des grands maîtres

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