LIV. IV, CIIAP, VIL 307
droit des gens. Je suppose que le sénat de Venise, découvrant la conjuration du marquis DEBEDMAII (a), et convaincu que cet ambassadeur en était l'âme et le chef, n'eût pas eu d'ailleurs des lumières suffisantes pour étouffer cet horrible complot, qu'il eût été incertain sur le lieu où elle devait éclater, qu'il eût été en doute si on se proposait de faire révolter l'armée navale, ou les troupes de terre, de surprendre quelque place importante, aurait-il été oblige de laisser partir l'ambassadeuren liberté, etparlàde lui donner moyen d'aller se mettre à la tête de ses complices et de faire réussir ses desseins? On ne le dira pas sérieusement. Le sénat eût donc été en droit défaire arrêter le marquis et toute sa maison, de leur arracher même leur funeste secret. Mais ces prudents républicains, voyant le péril passé, et la conjuration entièrement étouffée, voulurent se ménager avec l'Espagne; et, défendant d'accuser les Espagnols d'avoir eu part an complot, ils prièrent seulement l'ambassadeur de se retirer, pour se garantir de la fureur du peuple.
§ 100. — D'un ambassadeur qui attente tï la vie du prince.
On doit suivre ici la même règle que nous avons donnée ci-dessus {liv. III, § i3G), en traitant de ce qui est permis contre un ennemi : dès que l'ambassadeur agit en ennemi, on peut se permettre contre lui tout ce qui est nécessaire pour faire avorter ses mauvais desseins et pour se mettre en sûreté. C'est encore sur ce même principe, et sur cette idée, qui présente l'ambassadeur comme un ennemi public quand il en fait les actions, que nous déciderons son sort au cas qu'il porte ses attentats jusqu'au plus haut degré d'atrocité. Si l'ambassadeur commet deces crimes atroces qui attaquent la sûreté du genre humain, s'il entreprend d'assassiner ou d'empoisonner le prince qui l'a reçu à sa cour, il mérite, sans difficulté, d'être puni comme
{a) Voyez l'Histoire de celte conjuration, par Sr. HÉAL