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Titre : Le Matin : derniers télégrammes de la nuit

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1903-07-31

Contributeur : Edwards, Alfred (1856-1914). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328123058

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb328123058/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

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Description : 31 juillet 1903

Description : 1903/07/31 (Numéro 7096).

Description : Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail

Description : Collection numérique : La Grande Collecte

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k559311b

Source : Bibliothèque nationale de France

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 29/04/2008

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LE PION DÉCORÉ Puisqu'il est vrai, événement unique, qu'un vieux « Petit Chose » vient d'être décoré; puisque, parmi tant de croix destinées à d'illustres poitrines universitaires, le ministre en a dérobé une pour la poster sur la plus humble puisque M. Chaumié, écartant recommandations et .suppliques, est allé avec ce ruban rouge. vers celui-oi, pour qui l'on ne suppliait pas; et,puisqu.e,comme tant d'autres, comme nous tous, hélas moutards méchants, moi aussi j'ai fait pleurer, j'ai vu pleurer de douleur les vieux n Petit Chose », j'ai pensé qu'il convenait sans. doute de s'arrêter un instant devant ce geste inattendu et juste, à cause de quoi vont couler des larmes heureuses. Souvenons-nous. Je sais qu'il en est )otrmi nous qui ont conservé du lycée, de lâ boîte, du collège si triste et si froid de la province glacée, la haine des pauvres pions martyrs, et qui, lorsqu'ils interrogent aujourd'hui le fond de leur cœur, l'y trouvent aussi vivace qu'au jour qu'ils entrèrent dans la liberté de la vie, après tant d'années, tant d'années. S'imagine que ceux-là n'ont point pardonné à leurs victimes leur propre enfance si savamment cruelle, est qu'ils en veulent encore à leurs vieux maîtres de toutes les petites et sournoises misères dont leur âge impitoyable sut les accabler.. Car l'expérience des enfants est innombrable. et eux, ils étaient tout seuls, tout seuls contre eux tous, contre les traditionnels supplices que les générations adolescentes se passent de dasse en classe, d'étude en étude, depuis tant d'années, tant d'années.

Ils furent injustes ? Comment n'auKôeat-UV pas été injustes ?. Leur miaère est si longue. Songez que vous partez et qu'ils restent, que vous réalisez rvos espoir,s et qu'ils n'ont pas d'espoir. tel que celui que Fon décore aujourd'hui met des nptes sur les cahiers de correspondance depuis plus de quarante anmées. quarante années.

Oui, vous toucherez à la tombe, après avoir parcouru le cycle de la vie, et lui, vieillard usé au frottement de tant de successives jeunesses, surveillera encore le berceau de vos fils. S'il s'exaspère de leurs cris, pardonnez-lui, c'est vous qui criez depuis quarante années. c'est l'enfance, la même enfance, sans trêve et sans merci, l'enfance du monde renouvelé, et qui lui paraît cependant immobile, qui ne cesse, à travers les âgés, dé le tourmenter. Et lui aussi est immobile. Oh 1 avoir vingt ans et apprendre aux petits l'aventure de Numitor et d'Amulius avoir cinquante ans et enseigner Numitor et Amuliùs; "n'être plus qu'une ombre et conter, comme lorsqu'on était une aurore, Amulius et Numitor. '̃

.Alors, M. Chaumié dit ïf Je veux en écorer un. n Et il fit apporter le dossier 'l'ancêtre des pions.

porta le dossier d'un homme qui, né à .Rendez, en fit ses études au collège devRodez, et, de bachelier devenu immédiatement maître répétiteur, est encore aujourd'hui maître répétiteur à. RoM. Maurel passa de l'état d'élève à l'état de maître à l'âge de dix-neuf ans. Il est dans l'enseignement depuis 1867. Les services qu'il rendit à l'Université furent publiquement reconnus. Il fut nommé officiers d'académie en 1894, et l'on songeait à lui pour la rosette de l'instruction publique,dans deux ou trois ans, quand M. Chaumié s'en vint avec sa Légion d'honneur. Il est marié il a deux enfants, et l'Etat lui donne 2,000 francs par an. La persistance dans le travail et dans la vertu est toujours récompensée. Quand on feuillette le dossier de M. Maurel, on ne peut se défendre d'une mélancolique admiration. En 1870; il avait à sa charge sa mère et ses deux frères. Il gagnait alors 600 francs par an, «• couchait et mangeait au lycée. Savezvous ce qu'il fait en 1871 ? Il se marie. Il épouse une femme qu'il aime, ce qui est bien, mais qui a deux soeurs à sa -̃ charge, ce qui est sublime. Total deux frères, deux belles-sœurs, une mère, une femme, lui et 600 francs. Ces choses-là ne se voient pas qu'à Rodez, mais c'est tout de même un miracle qu'il y ait si peu de gens qui meurent de faim.

Voulez-vous les notes du « Petit Chose Elles sont excellentes quant à la conduite il est exact, surveille bien les élèvesî est qualiûé bon disciplinaire obtient des résultats satisfaisants ». Le malheur est qu'il n'est point partisan des méthodes nouvelles, n'est pas au courant de la nouvelle pédagogie. Il fait de louables efforts pour s'y mettre, sans y parvenir.

Je vois qu'en 1885 il gagne 1,500 francs, et qu'il surveille le réfectoire. Cepen- dant, il ose demander à l'administration supérieure une indemnité de nourriture de 500 francs. Il trouve « que ce serait un grand bienfait s'il pouvait dîner en famille ». Remarqué qu'il a trentesept ans et qu'il est marié depuis 1871 iL.. Eh bien les années se passent et il continue à exprimer le voeu de dîner chez lui. Et ce vœu si modeste, et si-humble, et si timide, vous fait veuir les larmes aux veux il dit « Ce serait un acte d'humanité.» La note porte « On pour-

rait peut-être examiner ce voeu avec faveur. » Mais les années se passent, elles se passent les années, et le malheureux continue à dire le Benedicite au réfectoire.

Avant que de désirer prendre ses repas chez lui, il avait demandé à y prendre son repos une indemnité de logement. ne plus surveiller le dortoir. Ce lui fut accordé plus tôt, mais non sans difficultés.

Vous rappelez-vous le maître qui surveille le dortoir ?. Entre la double rangée des couchettes qui font des taches pâles dans la nuit du dortoir, le petit pion se promène, longtemps, des heures, des heures qui tombent dans le silence de la petite' ville endormie, dans la grande paix des cours désertes, du haut du clocher de la chapelle. Il ne surveille plus, il veille. A quoi songet-il. ? Qu'est-ce qu'il y a dans son crâne, dans sa poitrine, dans son cœur ? Il marche, il marche, les mains derrière le dos, interminablement. Chaque fois qu'il passe sous la veilleuse, on aperçoit son front pensif, son regard flxe, sa bouche triste. Pense-t-il à l'avenir ? A-t-il de l'ambition ? Veutril de la gloire ?. Modeste, plus modeste que tous, notre « Petit Chose » à nous ne devint ambitieux qu'à l'âge de. quarante ans, quand il ne faisait plus le dortoir. Il demande en tremblant à faire son stage d'économat, pour devenir un jour commis économe.

On lui fait répondre « qu'il est trop vieux

En 1889, on lui-reproche de ne pas songer d l'avenir. Il ne prépare aucun examen. Il a quarante et un ans Sa famille, naturellement, n'a fait que croître et embellir. Avant de songer à se faire examiner, il-pense sans doute à la nourrir, avec des leçons supplémentaires, car il a deux enfants. dans la même année. C'est ce à quoi, sans aucun doute, fait allusion la note qui constate avec un regret timide que, pendant cette périodé;. il faiblit, comme maître répétiteur, cependant qu'il se livre à des travaux extrauniversitaires Le pauvre papa I. Mais vite il se reprend, et sa situation s'améliore. Vers 1890, il- devient polycopiste, en 1891 il gagne 1,500 francs; en 1893, il touche 1,700 en 1897, on l'augemente de 300 francs. En 1894, il avait eu les palmes, après 27 ans de service. Alors, la physionomie des notes, toujours excellentes, se transforme. Il de. vient très digne homme, très respectable c'est le répétiteur de tout repos Il devient bibliothécaire du lycée. Il devient « de première classe » depuis 1898. Il devient enfin, depuis hier, de la Légion d'honneur.

Cette existence de dur et monotone et si nécessaire labeur j'ai tenu à la retracer dans sa simplicité et son abnégation admirables, dans sa blanche honnêteté, aussi dans sa belle souffrance morale, car elle n'appartient point en propre à M. Maurel, elle fut aussi celle de tant d'autres que vous avez connus, qui nous firent copier des fois innombrables rosa la rose et la règle du gérondif en di, qui nous aimèrent bien tout de même. Elle continue pour beaucoup à être celle des jeunes universitaires d'aujourd'hui. Seulement, ce ne sont plus des bacheliers. Les pions de ce temps sont plus ambitieux que M. Maurel; ils ont leur agrégation, ou presque. Mais ils n'ont plus le droit de. donner des pensums. En décorant l'ancêtre des maîtres répétiteurs de France, M. Chaumié a commis une bonne action. Autant que tous autres, ils ont le droit d'être à l'honneur. Plus que tous autres, puisque l'honneur est la seule chose qu'ils peuvent espérer de cette vie, sur le seuil de laquelle ils se seront tenus jusqu'à la mort, et qu'ils n'auront point connue.

.Aie donc au moins l'allégresse de cette croix, brave homme qui préparas tant de moissons qui mûrissent sans se souvenir de toi, ô toi qui, depuis quarante années, fais le geste du semeur, en sàchant que tu ne récolteras jamais 1 Gaston Leroux.

DE MIDI A MINUIT

Les faits d'hier En France et à l'étranger. Solennités universitaires à Paris et dans les départements. La distribution des prix du concours général, présidée par M. Chaumié, ministre de l'instruction publique, a eu lieu à la Sorbonns sans incidents. Mais à Marseille le discours de M. Dautresme, qui présidait la distribution des prix, du lycée, a provoqué un violent tumulte.

Le roi de .Grèce est arrivé à quatre heures 'à Modane il est reparti à cinq heures pour Aix-les-Sains.

Hier matin a eu lieu au Vatican la dernière congrégation cardinalice avant l'entrée en Conclave. A Rome, on dément de bonne source que notre ambassadeur près le Quirinal, M. Barrère, qui est d'ailleurs en ̃congév se soit occupé de près ou de loin du prochain Conclave.

La séance scandaleuse du Reichstag hongrois va avoir son' épilogue devant les tribunaux le ministère public a, dit-on, porté plainte pour calomnié il l'adresse du gouvernement contre M. Diemes, qui a remis au député Zoltan Papp 12,000 couronnes, à la condition que celui-ci renoncerait il intervenir au Parlement.

En Autriche, l'émotion causée paF la marche meurtrière de Bilek n'est pas encore calmée. Aussi affirme-t-on il nouveau en haut lieu que le chiffre des soldats victimes d'insolations reste bien limité à quinze. Il est vrai que, depuis, ces déplorables faits cint failli se renouveler. Pendant une rnarche exécutée. le 22 juillet, quatorze hommes

du 12' régiment d'infanterie ont dû entrer. à l'hôpital. Bien qu'ils soient tous actuellement hors de danger, une enquête a été ouverte sur cette affaire.

Le pacha de Tanger est sorti avec un fort contingent pour châtier les tribus des Nadras, des Agherra et des Beni-Kif qui avaient assiégé Tetuan.

Le Vorwaerts publie une note intéressante relativement à l'attitude que prendra le parti socialiste allemand au moment de l'élection du bureau. « Nous sommes prêts à accepter les obligations prévues par le règlement. Un vice-président socialiste, d'accord avec le parti socialiste, remplirait avec tact ses de•voirs politiques et mondains. ».

Le prince royal de Portugal a reçu l'amiral américain Cotton.

Un incendie a détruit à Grimsby (Angleterre) un grand entrepôt des docks. Le chiffre des dommages s'élève à cent' mille livres sterling.

Un nouvel incendie s'est déclaré dans les usines à pétrole de la région de Bakou. Les constructions de vingt-deux puits d'exploitation ont été réduites en cendres.

PROPOS ïïWj>ARISIEN Un discours prononcé l'autre jour à la Chambre des communes par M. Chamberlain a ramené l'attention sur le Transvaal. Lorsque la guerre durait encore, M. Chamberlain annonça qu'elle serait suivie- d'une période de prospérité comme on n'en a jamais vu.

Or, voilà un an et demi que la paix est rétablie et l'Afrique du sud attend toujours la prospérité promise. Vraisemblablement, elle l'attendra longtemps.

Cette prospérité repose uniquement sur l'exploitation des mines, qui ne peut redevenir ce qu'elle était avant la guerre et se développer parce que la main-d'œuvre est insuffisante.

On n'avait pas pensé à cela. Du reste, on n'a jamais pensé à rien, là-bas, ni rien prévu. Les grands hommes des mines ont alors dit Les noirs manquent? Faisons venir des Mais aussitôt une opposition formidable est née dans le pays. Personne ne veut des Asiatiques. Vainqueurs et vaincus sont d'accord sur ce point.

Et cette opposition est encore une chose à laquelle on n'avait pas pensé, de même qu'on n'avait pas pensé, lors du raid Jameson, qu'il fallait plus de six cents hommes pour conquérir le Transvaal, de même qu'on ne supposait pas que cette opération demanderait près de six milliards, deux ans de campagne et 250,000 soldats.

Le fait amusant à noter est qu'avant la guerre les gens des mines gagnaient de -l'argent gros. comme eux.

Cela ne leur a pas suffi, ils ont voulu avaler le pays, tellement leur appétit était insatiable et ils ont fait marcher M. Chamberlain qui a fait marcher l'Angleterre. Aujourd'hui, ils le possèdent ce pays. Mais ils ne gagnent plus d'argent et même très probablement ils en, perdent Voilà ce que c'est que d'être gourmand. L'avarice perd tout en voulant tout gagner. Lafontaine avait raison. comme toujours. H. Harduin.

,LES EXPÉDITIONS lu POLE SiJD A LA RECHERCHE DE NORDENSKJOLD Suède et France Le commandant Gyldén, MM. Jean Charcot et de Gerlache au u Matin » Entente préalable.

Ainsi que nous l'avons annoncé, le commandant Gyldén, avant de repartir pour la Suède, a eu hier, dans les bureaux du Matin et du Français, une entrevue avec son émule, M. Jean Charcot, l'initiateur et le courageux commandant de l'expédition française au Pôle Sud.

A cette réunion assistaient deux des collaborateurs les plus immédiats de M. Charcot le commandant de Gerlache et M. J. Bonnier, chef du laboratoire de Wimereux, l'un des savants qui accompagneront FexpéditioH.

Des drapeaux français et suédois avaient été arbores au balcon des immeubles qui abritent les rédactions du Matin et du Français, comme un témoignage de sympathie pour le commandant du Frithiof et un symbole d'union entre la Suède et la France. Ces messieurs, après que les présentations eurent été faites, s$ sont mis à l'étude des itinéraires à suivre et ont jeté les bases de l'accord amical dont nous parlions ici, sans lequel il faudrait renoncer, en pareille matière, à toute chance de succès.

La carte devant les yeux, ils ont définitivement déterminé leftrs routes respectives. Ils ont choisi les endroits où ils laisseront, dans des cairns, toutes les indications qu'ils auront pu recueillir sur l'expédition Nordenskjold, avec des renseignements sur l'état de leur propre expédition et sur les agissements ultérieurs, subordonnés dans ces régions il de nombreux aléas.

Il a été décidé que, de toutes façons, lors-

LE DOCTEUR CHARCOT ET LE COMMANDANT GYLDEN Conférant dans les bureaux du sur 'cars expéditions au Pôle Sud,

LA GUERRE EN BALLON UNE EXPÉRIENCE MILITAIRE Le Santos-Dumont à la revue du' 14-Juillet Une idée du général André Les dirigeables dans les places fortes Curieux essai Lettre du mi-

nistre de la.guerre.

Ceux qui souriaient autrefois quand on parlait de faire la guerre avec des ballons et de livrer des combats dans les airs ne souri- ront plus. Si la nouvelle sensationnelle que publie ce matin notre confrère le New York Herald est exacte-et elle l'est certainement nous sommes proches, très proches, du temps où on se tirera des coups de fusil dans les nuages aussi, bien que sur terre ou sur mer.

Voici les faits tels que le Herald les rapporte

<c M: Santos-Dumont a reçu hier à son hangar de Neuilly la visite d'une délégation représentant le général André, ministre de la guerre. Les membres de cette délégation étaient le commandant Hirschauer, directeur du service aérostatique, et le colonel Bourdeaux,. sous-chef du cabinet du minisPendant deux heures; ces officiers sont restés avec M. Santos-Dumont, examinant son grand ballon n° 10, essayant le moteur de soixante chevaux, mettant en marche et arrêtant l'immense propulseur, étudiant le ballon dans tous ses dé tails avec un soin minutieux, une patience infatigable.

L'opinion exprimée par les délégués du ministre a été si favorable, qu'un essai pratique sera fait sous peu. S'il réussit, cet essai établira la valeur de l'engin au point de vue militaire.

L'épreuve consistera à fournir,dans une seule journée, le trajet de Paris à l'une des places fortes de la frontière, soit Nancy, soit Belfort.

» Naturellement, il ne serait pas nécessaire que le voyage tout entier fût effectué en ballon. Le projet de M. Santos-Dumont est de quitter Pans par je train, de bonne heure le matin, emportant son enveloppe, ses tubea d'hydrogène et toute la machinerie, puis de descendre à une courte distance de la ville choisie. Une équipe de soldats accompagnant les officiers délégués par le ministre de la. guerre décrocheront alors le wagon contenant le ballon et ses accessoires et, sous la direction de M. Santos-Dumont, disposeront le ballon pour le départ.

» M. Santos-Dumont estime que deux heures suffiraient pour tout préparer et il ten'terait de passer au-dessus de la ville désignée pour l'expérience.

La visite du lieutenant-colonel Bourdeaux et du commandant Hirschauer au hangar de M. Santos-Dumont était la conséquence d'une lettre que ce dernier adressa au général André après la revue du 14-Juillet. Dans cette lettre, M. Santos-Dumont offrait son ballon et ses services à la France, dans l'éventualité d'une guerre avec n'importe quelle nation, à l'exception de l'Amérique du nord et de celle du sud, ajoutant loyalement qu'au cas, fort improbable; d'une guerre avec le Brésil, il se mettrait il la disposition de son pays natal.

que l'un ou l'autre serait fixé sur le sort de l'explorateur perdu, il se rendrait à un lieu de rendez-vous d'ores et déjà déterminé. Etant donné que la vie de Nordenskjold et de ses compagnons peut être/une question d'heures, chacune des deuxmissions tâchera d'arriver le plus rapidement possible, mais en agissant toujours avec un accord parfait et en ayant uniquement en vue l'intérêt des malheureux il secourir.

Vers la fin de la conférence, nos photographes, ont surpris tant bien que mal les explorateurs au moment où ceux-ci s'y attendaient le moins. Nous reproduisons ci-dessous un cliché dans lequel la silhouette de M. de Gerlache, qui se trouve, sur la droite de la photographie et à gauche du commandant Gyldén, est malheureusement à peine indiquée.

Un mot encore pour flnir.

Le grand regret de M. Charcot est de ne pas avoir assez d'argent à sa disposition pour installer à bord du Français la télégraphie sans fil, alors que lès deux autres navires, le Frithiof et l'Uruguay, communiquéront ensemble par les nouveaux procédés. Le ministère de la marine, qui a déjà fait beaucoup pour l'expédition du Français, pourrait peut-être lui prêter un ensemble d'appareils et la dynamo nécessaire A moins qu'un généreux Mécène ne prenne à sa charge les seize ou dix-sept mille francs que représenterait cette installation, si elle était commandée à l'industrie privée. ? Mais l'Etat possède' des engins déjà payés qui ne font rien en ce moment. Peut-être voudrait-il les occuper pendant quelques mois à bord d'un navire qui, là-bas, va représenter la France ? Nous soumettons le cas à M. Camille Pelletan," certain d'avance que, s'il peut faire quelque chose encore pour l'expédition française. du Français, le ministre de la marine n'hésitera pas un instant.

» En réponse à cette offre! il a reçu la lettre suivante

MINISTÈRE DE LA GUERRE

CABINET DU MINISTRE

Paris, le 19 juillet 1903.

Monsiéur;

Au'cours de la revue du 14-Juillet j'avais remarqué et admiré la facilité et la sûreté avec lesquelles évoluait le ballon que vous dirigiez. Il était impossible de ne pas constater les progrè's dont vous avez doté la navigation aérienne. Il semble que, grAce à veus, elle doive se prêter désormais à des applications prati-' ques, surtout au point de vue militaire. t J'estime qu'à cet égard elle peut rendre des t services très sérieux en temps de guerre. Je suis donc très heureux d'accepter l'offre au«* vous me faites de mettre, en cas de besoin, < votre flottille aérienne a la disposition du gou- i vemement de la République, et, en son nom, je vous remercie, monsieur, de votre gracieuse proposition qui témoigne da votre vive symp.vthie pour la France.

J'ai désigné M. le chef de bataillon Hirschauer, commandant le bataillon d'aérostiers au 1er régiment du génie, pour examiner, de concert avec vous, les dispositions à prendre pour mettre à exécution les intentions que vous m'avez manifestées. M. le lieutenant-colonel Bourdeaux, sous-chef de mon cabinet, se joindra d'ailleurs & cet officier supérieur, afin da me tenir personnellement au courant des résultats de votre collaboration.

Recevez, monsieur, les assurances de ma considération la plus distinguée.

Général ANDRÉ.

A Monsieur Alberto Santos-DumMit Et maintenant, il n'y a plus qu'à attendre les résultats de la première expérience L.. L'INTERRÈGNE PONTIFICAL Les médailles du Conclave Tout est prêt Les derniers conciliabules.

ROME, 30 juillet. A la congrégation cardinalice d'aujourd'hui, ont été distribuées les médailles du Conclave.

La chapelle Sixtine est déjà prête pour le Conclave. On a érigé soixante-quatre trônes, tous de couleur violette, excepté celui du cardinal Oreglia, qui est de couleur verte. Le prince Chigi, en sa qualité de maréchal du Conclave, a Constitué sa cour. Il a nommé cinq capitaines-assistants de rote. Parmi les cardinaux deux idées paraissent prévaloir faire l'élection le plus rapidement possible, et élire un pape âge.

L'animation est très grande. Il y a un grand échange de visites entre les cardinaux et un actif travail électoral par l'intermédiaire des secrétaires. Le seul cardinal qui ne travaille pas est le cardinal di Pietro, qui semble avoir une très grande probabilité de réussir.

Plusieurs cardinaux font observer que, quel que soit le cardinal élu pape, la prophétie de saint Malachie, contenant les mots ignis ardens, se verra vérifiée, car l'élection aura lieu dans le mois le plus chaud de l'année, à savoir le. mois d'août.

On augmente les mesures de (prudence pour maintenir le secret pendant le Conclave, car on craint des indiscrétions. Les cuisiniers et le bas personnel n'auront pas5 de communication avec les domestiques des cardinaux. Les lettres et les journaux adressés aux cardinaux seront préalablement vérifiés par les cardinaux chefs d'ordres, et la correspondance des autres personnes encloses 'à cause du Conclave sera vérifiée par les assistants de rote.

L'équipage du « Firth-of-Forth Il Ramenés par l' u Abd-el-Kader Il Le récit du sinistre.

Marseille, 30 juillet. De notre correspondant particulier. Le paquebot Abd-elKader, de la Compagnie transatlantique, venant de Bône et de Philippeville, a rapatrié ce matin dix-neuf naufragés d'un navire anglais. J'ai pu interroger plusieurs d'entre eux qui m'ont fait le récit suivant du sinistre

Le navire le Firth-of-Forlh allait de Hambourg à:Vladivostock avec une cargaison de fer, lorsque, le 25 courant, à soixante milles environ de BOne; une importante voie d'eau se déclara à bord. Immédiatement on essaya de mettre les pompes en mouvement, mais il fut impossible de les amorcer et le navira s'enfonça rapidement.

»'Le Firih-of-Forth menaçant de couler dune minute à l'autre, l'équipage mit les embarcations à la mer et, avec les quelques passagers que le steamer transportait, abandonna le navire. Il était temps, car les barques venaient à peine de s'éloigner que le bateau en détresse sombrait à pic.

Les naufragés voguèrent pendant plusieurs heures. Un autre navire anglais, l'Eddytone, qui les rencontra, les pnt en remorque et les conduisit dans le port de Bône.

n L'équipage du Firth-of-Forth, qui se* compose de dix-neuf personnes, dont six seulement européennes et les autres chinoises ou japonaises, est rapatrié par les soins du consul anglais.

ÉTOILE DISPARUE Mort d'une grande cantatrice Stoltz, créatrice de la Favorite » Un roman bizarre.

Hier est morte à l'hôtel Bellevue, avenue' de l'Opéra, une cantatrice dont le nom, célèbre jadis à l'égal de celui de la Patti, est totalement oublié Rosine Stoltz.

Née en Espagne, le 13 février 1815, elle dut à cette coïncidence de nattre le jour de la mort du duc de Berry la protection de la duchesse, qui la gt élever au couvent et lu' fit suivre les cours du Conservatoire. Après diverses créations en province et à l'étranger, elle débuta à Paris dans le rôle de Rachel de la Juive, en i838, créa en 1840, avec un succès rententissant, Léonor, de la Favo.rite, et dès lors, pendant sept ans, ne connut que des triomphes. La première représentation de Robert Bruce, où la claque se montra, d'une maladresse insigne, lui valut la désapprobation du public. La cantatrice décida aussitôt d'abandonner la scène. •Mme Stoltz ne contracta depuis lors aucun engagement. Après sa séparation d'avec son premier époux, M. Lécuyer, ancien régisseur du théâtre de Rouen, elle était devenue successivement baronne de Kirehendorff, puis comtesse de Lesignano.

D'après les connaisseurs qui l'entendirent il y a soixante ans, jamais on n'a égalé Mme Stoltz dans la Favorite. Son talent, tout d'énergie, de puissance et d'éclat, fut l'un des plus, étranglement savoureux.

LE CONCOURS GÉNÉRAL UNE SOLENNITÉ UNIVERSITAIRE

La cérémonie d'hier à la Sorbonne'- Dia tribution des prix Un cortège imposant Le discours d'usage Allocution du ministre de l'instruc-

tion publique.

L'entrée de M. Chaumié, ministre de l'ins.truction publique, dans le grand amphithéâ.tre de la Sorbonne, ce matin de distribution solennelle des prix du concours général, a été réglée comme une entrée de théâtre. Elle aurait ravi d'aise M. Frédéric Febvre. Jamais cortège ne fut mieux ordonné et ne déploya une pompe plus majestueuse.

M. Chaumié

Ministre de l'instruction publique.

D'abord les massiers, graves comme des hérauts d'armes, portant avec emphase les lourdes masses d'argent,-insignes héréditaires qui disent les fastes glorieux de l'antique maison. Puis les huissiers de la Sorbonne et ceux du Collègue de France les appariteurs des facultés et maints imposants magisters, revêtus de robes multicolores et marchant au pas de parade, cependant- que dans l'immense salle retentissent les accords du Cortège nuptial; de Vessella, sorte de musiqua d'église qui ajoute il la solennité de l'heure. Accompagné de M. Rabier, .directeur de l'enseignement secondaire de M. Liard, vice-recteur de l'académie, et de MM. De- bov,e, Stapfer, Appell et Glasson, doyens des facultés, voici M. Chaumié. Il s'avance len, tement. Il est le grand-maître de l'Univer- sité de France. Son port est empreint de dignité. La main gauche est gantée. il la tient appuyée sur le gilet, dans un geste noble. La main droite tient un manuscrit celui du discours.

Le cortège, parvenu devant la haute chaise dorée réservée au ministre, s'arrête. Les massiers font demi-tour et se placent, la masse entre les jambes, en face de l'estrade. M. Chaumié pose son chapeau sur la table, s'assied, assure son lorgnon, étale le manuscrit, croise les jambes et, négligemment, pour se donner peut-être un maintien oui pour cacher une émotion légitimé; tambourine avec les doigts sur le bras du fauteu*l. La musique joue toujours. Le Cortège nuptial permet aux personnages notoires de se composer une attitude et au public de dénombrer les professeurs illustres.

Lorsque la musique se tait, M. Chevalley se lève. M. Chevalley, professeur d'anglais au lycée Voltaire, a été chargé du discours d'usage. Il avait choisi pour sujet t'Esprit de notre temps et l'enseignement des langues vivantes. M. Chevalley est un confrère. Il écrit des articles sur l'Angleterre, chaque fois qu'un événement d'importance se produit là-bas. Il a le style académique et le ton qui convient aux harangues de ce genre. Son discours, fort bon en soi, est construit selon la formule. Il a paru un peu froid et d'une philosophie sommaire. Mais peut-être faut-il tenir compte que M. Chevalley s'adressait à des jeunes gens et que sa pensée, forcément limitée à ce cadre restreint d'une harangue scolaire, ne pouvait se déployer avec la liberté nécessaire. Le sujet, d'ailleurs, était banal. On a tout dit sur l'utilité des langues vivantes. J'eusse aimé, pour ma part, qu'en une pareille occasion, une voix s'élevât, au contraire, dans l'enceinte de la vieille Sorbonne, pour défendre le latin et honorer les humanités:

M. Chevalley parle clairement. Sa voix est sonore, savante dans les inflexions et d'um timbre agréable. Elle s'accompagne de genstes à effet, qui ponctuent les finales des périodes, mais qui ne provoquent aucune émotion. On devine trop, bien que ces gestes, pour si éloquents qu'ils veuillent paraître, ont été étudiés devant le miroir. Ce sont des gestes pour armoire à'glace.

Moins précieux, moins prétentieux, le discours de M. Chaumié m'a plu davantage. M. Chaumié a dit aur jeunes gens des paroles sensées et simples, et il les a débitées sur le ton de la bonhomie, sans éclats oratoires, sans mouvements de tribune. Il a eu beaucoup de succès.

«Vous irez au régiment, mes amis ;.vous' y rencontrerez des paysans et des ouvriers. » Ce sont de braves gens, mais des gens simples. Ils n'ont ni votre éducation ni votre culture. Soyez bons avec eux aimez-les, aidez-les. Mêlez-vous à leur vie. Vous intéresser à leur sort, à. leurs espoirs, leurs peines, c'est vous intéresser à la nation elle- même, c'est la connaître et c'est l'apprécier. »

M. Chaumié a dit à peu près cela, mais plus longuement, avec la sollicitude d'un vieil homme pour les petits enfants et l'autorité que donnent l'expérience et la sagesse. Par une habitude de parlementaire blanchi se us le harnais, le ministre, aux endroits où ii avait placé les mots sonores, les phrases qui appellent l'applaudissement, enflait un peu la voix. Naturellement, professeurs et élèves frappaient des. mains et murmuraient ue discrets bravons.

Le dernier feuillet posé sur la table, M. Chaumié s'est assis, a croisé les jambes et a recommencé à tambouriner avec les doigts. La musique a entonné l'ouverture de Peter Schmoli, de Weber, et la distribution des prix a commencé.

JEAN DE Mirrx,