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mais aussi des passions consecutives a une deliberation raisonnable.
La raison cree en nous par son estimation une disposition grace a
quoi les objets sont appreliendes comme convenables ou non ; a
1'instar de la nature, la raison dispose Pappetit. Comme la disposition
disposition cette disposition deliberee concerne aussi bien le bon
que Putile, — ce qui est bon aux sens, ce qui est utile a Pindividu.
Neanmoins, quant au « bon », il ne lui revient que de determiner
les dispositions fondamentales deja fournies par la nature ; tandis
que, dans Pordre de Putile, cette disposition peut concerner tin
objet entierement nouveau et que la nature n'avait pas propose.
Comme la disposition naturelle, la disposition deliberee est principe
aussi bien des passions irascibles que des passions concupiscibles.
Le dereglement de telles passions peut tenir soit a Pobjet lui-meme
qui est deraisonnable : et dans ce cas, il n'est aucun mouvement
de la sensibilite qui ne soit un peche ; soit, a propos meme d'un objet
bon, a quelque circonstance defectueuse de quantite, de temps etc. :
et dans ce cas, le mouvement est un peche, pour autant que la rectitude
rectitude ces circonstances relevait de Pautorite raisonnable \
Les determinations qui precedent interessent le cas ou Phomme
est en possession de sa raison. S'il advenait que celle-ci lui echappat,
le debat est regle d'avance : aucun mouvement de sensualite" ne
saurait alors avoir raison de peche, puisque l'app£tit sensible serait
restitue a sa nature propre et ne participerait plus de la raison.
Le cas s'en rencontre chez Ies dements, voire chez tout homme endormi
endormi
* * *
II ne semble pas que la doctrine thomiste du peche de sensualite, qui exprime au demeurant une opinion theologique des plus accreditees au moyen-age, doive susciter aucune defiance. Elle fait la juste part aux necessit6s de Pappetit sensible. Par ailleurs, elle
1. Le premier mouvement des epoux n'est point davantage un peche que 1'acte conjugal iui-meme : 1'objet en Stant bon, ce mouvement ne souffre d'aucun desordre. Supplemenium, q. 41, a. 4, ad 5m (= IV Sent., d. 26, q. 1, a. 4, ad 5m) : « Primus motus, secundum quoi dicitur peccatum veniale, cst motus appetitus in aliquod inordinatum delectabile. Quod non est in actu matrimoniali». Cependant, l'on sait que les relations conjttgales pratiquees par seule concupiscence, quoique dans les limites du mariage, sont peche veniel; le premier mouvement ordonne a de telles relations est lui-meme reprehensible. Pour en oter toute culpabiirte, il suffira que les epoux tournent leur concupiscence aux fins qui Ia justifient: De Veritate,q. 25, a. 5, ad 7m : « Cum aliquis accedit ad uxorem suam ex concupiscentia, dummodo non excedit limites matrimonii, est peccalum veniale; unde patet quod ipse motus concupiscentiae in conjugato judicium rationis praevcniens peccatum veniale est. Sed quando per rationem determinatur quod est licitum concupisci, tametsi scnsualitas in id feratur, nullum erit peccatum».
g,2. Sur ce point : Sum Theol., II a II ae, q. 148., a. 1, ad 3m.