14 LES UOUGON-MACQUART
— Tu es donc mauvaise? dit doucement le brodeur. C'est pour ton bien, si nous voulons savoir qui tu es.
Et, par-dessus l'épaule de sa femme, il parcourait le livret, que feuilletait celle-ci. A la page 2, se trouvait, le nom de la nourrice. « L'enfant Angélique, Marie, a été confiée le 25 janvier 1851 à la nourrice Françoise, femme du sieur Hamelin, profession de cultivateur, demeurant commune de Soulanges, arrondissement de Nevers; laquelle nourrice a reçu, au moment du départ, le premier mois de nourriture, plus un trousseau. » Suivait un certificat de baptême, signé par l'aumônier de l'hospice des Enfants assistés; puis, des certificats de médecin, au départ et à l'arrivée de l'enfant. Les paiements des mois, fous les trimestres, emplissaient plus loin les colonnes de quatre pages, où revenait chaque fois la signature illisible du percepteur.
— Comment, Nevers! demanda Hubcrtine, c'est près de Nevers que tu as été élevée?
Angélique, rouge de ne pouvoir les empêcher de lire, était retombée dans son silence farouche. Mais la colère lui desserra, les lèvres, elle parla de sa nourrice.
— Ah! bien sûr que maman Nini vous aurait battus. Elle me défendait, elle, quoique tout de même elle m'allongeât des claques... Ah! bien sûr que je n'étais pas si malheureuse, là-bas, avec les botes...
Sa voix s'étranglait, elle continuait, en phrases coupées, incohérentes, à, parler des prés où elle conduisait la Rousse, du grand chemin où l'on jouait, des galettes qu'on faisait cuire, d'un gros chien qui l'avait mordue.
Hubert'l'interrompit, lisant tout haut :
•— « En cas de maladie grave ou de mauvais traitements, le sous-inspecteur est autorisé à changer les enfants de nourrice. »
Au-dessous, il y avait que l'enfant Angélique, Marie, avait été