2e Année. N° 23 25 Juin1905.
BULLETIN MENSUEL
D'ÉTUDES SOCIALES & D'ACTION CATHOLIQUE
De l'exercice actuel du droit de coalition et de grève
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Les grèves ne sont point une manifestation d'un mal tout moderne. L'un des précurseurs des économistes, Boisguilbert, lieutenant-général au baillage de Kouen, qui vivait de 1646 à 1714, nous rapporte plusieurs cas, au xvne siècle, de désertion de travail par sept ou huit mille ouvriers agissant de concert. Pendant tout le moyen âge, les grèves ont été extrêmement fréquentes. Elles se manifestent dans l'histoire, du jour où les travailleurs ont cessé d'être esclaves ou serfs.
La coalition ne doit pas être confondue avec la grève. Ce sont deux situations différentes. La coalition est un simple concert; c'est l'entente entre ouvriers dans le but d'amener les patrons à certaines concessions : augmentation de salaires, renvoi d'un contremaître... La grève, qui est la cessation collective du travail, est la sanction logique de la coalition. Ce n'en est pas, heureusement, la sanction nécessaire. Souvent, en effet, les patrons n'attendent pas, pour accorder les concessions demandées, que le travail soit interrompu. Parfois, aussi, les ouvriers renoncent d'eux-mêmes à leurs prétentions. Quelquefois, également, d'ingénieux organismes : chambres d'explication, comités de conciliation et d'arbitrage..., permettent de résoudre à l'amiable le différend.
Mais si les grèves ont existé de tout temps et par la force même