CHAPITRE II
LE VAISSEAU D'ESCULAPE
L'arrivée du serpent d'Esculape. — L'histoire primitive des divers quartiers delà Rome ancienne est obscure et incertaine. Au temps mythique des rois et aux débuts même de l'époque républicaine chaque point du sol de la cité aurait été, d'après la tradition fidèlement recueillie et embellie d'âge en âge, le théâtre d'aventures merveilleuses ou d'interventions surnaturelles. Il est souvent malaisé de dégager les faits réels de cette parure tardive et factice qui les dissimule. Le développement monumental de la ville de Rome aux premiers siècles n'est pas moins difficile à suivre et à reconstituer que le développement politique et social de l'Etat romain.
L'ile tihérine a partagé la destinée commune. Jusqu'au iie siècle avant l'ère chrétienne il n'est question d'elle que deux fois dans tes récits des écrivains anciens, à propos de la chute des rois en 245/509, à propos de l'arrivée d'Esculape à Rome en 463/291, et les deux fois la légende se mêle à l'histoire, qu'elle défigure. Entre ces deux dates l'île n'est même pas nommée par les autours. Peut-être n'était-elle pas encore habitée '. Le temple d'Esculape fut du moins le premier édifice important qu'on éleva sur son territoire. En 461/293 une épidémie de peste désolait Rome ; désespérant de triompher du fléau avec le seul secours de leurs dieux nationaux, les Romains
1. Voir, par exemple, BECKEII, Topogr. d. Si. liom, Leipzig, 1843, p. 051 ; — REREH, die Ruinen Itoms, 2e éd., Leipzig, 1879, p. 291; — O. RICIITEII, Topogr. d. St. Rom, 2' éd., Munich, 1901, p. 2S2. — Dans le silence absolu des documents, on ne peut ni prouver ni réfuter celte assertion, a priori assez vraisemblable. BÊCHER, loc. cit., et O. GILIIERT, Gesclt. und Topogr. d. SI. Rom., Leipzig, 1883-1890, t. III, p. 73, noie 3, se demandent même si dès le début et en souvenir de son origine légendaire l'île n'avait pas été déclarée sainte et sacrée, avec défense d'y bâtir aucun monument profane.