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Titre : Bulletin mensuel de l'Académie des sciences et lettres de Montpellier

Auteur : Académie des sciences et lettres de Montpellier. Auteur du texte

Éditeur : [Académie des sciences et lettres] (Montpellier)

Date d'édition : 1918-07-01

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32729500t

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32729500t/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 6186

Description : 01 juillet 1918

Description : 1918/07/01-1919/04/30.

Description : Collection numérique : Fonds régional : Languedoc-Roussillon

Description : Collection numérique : Collections de Montpellier Méditerranée Métropole

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k55448432

Source : Académie des Sciences et Lettres de Montpellier, 2008-268563

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 17/01/2011

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N° 43

Juillet 1918-Avril 1919

BULLETIN

DE

L'ACADEMIE DES SCIENCES

ET LETTRES

IDE MONTPELLIER

MONTPELLIER

IMPRIMERIE DE L' " ÉCONOMISTE MÉRIDIONAL"

9, Boulevard du Jeu-de-Paume, 9

Téléphone 11-31

1919



Juillet 1918-Avril 1919

BULLETIN

DE

L'ACADEMIE DES SCIENCES

ET LETTRES

IDE MONTPELLIER

MONTPELLIER

IMPRIMERIE DE L' " ÉCONOMISTE MÉRIDIONAL "

9, Boulevard du Jeu-de- Paume, 9

Téléphone 11-31

1919


SOMMAIRE

Liste des membres de l'Académie.

Procès-verbaux :

Section des Sciences (Du 8 juillet 1918 au 7 avril 1919) ;

Section des Lettres (Du 12 juillet 1918 au 25 avril 1919) ;

Section de Médecine (Du 3 février 1919 au 26 avril 1919) :

Réunions générales de l'Académie (Du 15 juillet 1918 au 28 avril 1919).

Des Hématocholécystes, par le Professeur Tédenat.

Essai d'interprétation d'un texte très mutilé, le Psaume CX (CIX du grec et du latin), par M. le Pasteur Henry.

Allocution prononcée par M. le Président Racanié-Laurent à l'occasion de l'armistice.

Allocution prononcée par M. le Président Racanié-Laurens à l'occasion de la mort de M. Gennevaux.

Allocution prononcée par M. G. Mercier-Castelnau, président de la Section des Lettres, à l'occasion de la mort de M. le Professeur Mertant.

Allocution prononcée par M. Massol, président de la Section des Sciences, à l'occasion de la mort de M. le Professeur Delage.

Lettre de Mme de Lavèvre à M. le Président de l'Académie.

Lettre de M. le Président et de M. le Secrétaire général de l'Académie à Mme de Lavèvre.


LISTE DES MEMBRES

de l'Académie des Sciences et Lettres de Montpellier

Bureau général de l'Académie

MM.

Président RACANIÉ-LAURENS, Avocat à la Cour d'Appel, ancien Bâtonnier de l'Ordre.

Vice-Président GRYNFELTT, Professeur agrégé à la Faculté

de Médecine.

Secrétaire général MERCIER-CASTELNAU, Docteur en Droit, Avocat à la Cour d'Appel, ancien Bâtonnier de l'Ordre.

Vice-Secrétaire général.. MOYE, Professeur à la Faculté de Droit.

Trésorier VlALLES, Docteur en Droit, Avocat.

Bibliothécaire-Archiviste. BONNET, Docteur en Droit, Avocat à la Cour

d'Appel.

Bureau de la Section des Sciences

MM.

Président MASSOL, Directeur de l'Ecole supérieure de

Pharmacie.

Vice-Président MOYE, Professeur à la Faculté de Droit.

Secrétaire Et. DE ROUVILLE, Maître de Conférences à

la Faculté des Sciences.

Secrétaire adjoint : ASTRUC, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie.

MEMBRES TITULAIRES

MM.

AMANS, Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences.

ASTRE, Professeur à l'Ecole supérieure de Pharmacie.

ASTRUC, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie.

BOUTARIC, Chargé de Cours à la Faculté des Sciences.

CAZALIS DE FONDOUCE, Ingénieur, Président de la Société archéologique.

DAUTHEVILLE, Doyen de la Faculté des Sciences.

DERRIEN, Professeur à la Faculté de Médecine.

DUBOSCQ, Professeur à la Faculté des Sciences.

FABRY, Professeur à la Faculté des Sciences.

FAUCON, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie.

FONZES-DIACON, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie.

GAUCHER, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie.


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GÈZE, Docteur ès Sciences, Directeur des Avertissements agricoles.

GRANEL, Professeur à la Faculté de Médecine.

GRYNFELTT, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

IMBERT, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie.

JADIN, Professeur à l'Ecole supérieure de Pharmacie.

LEENHARDT (Charles), Professeur à la Faculté des Sciences.

MASSOL, Directeur de l'Ecole supérieure de Pharmacie.

MOURGUES, Docteur ès Sciences.

MOYE, Professeur à la Faculté de Droit.

PECH, Chargé d'agrégation physique à la Faculté de Médecine.

ROCHE, Docteur ès Sciences.

ROUVILLE (Et. DE), Docteur ès Sciences.

SOULIER, Maître de Conférences à la Faculté des Sciences.

TARBOURIECH, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie.

VALLOIS, Docteur en Médecine.

VENTRE, Docteur ès Sciences.

VlALLETON, Professeur à la Faculté de Médecine.

Bureau de la Section des Lettres

MM.

Président MERCIER-CASTELNAU, Avocat à la Cour

d'Appel, ancien Bâtonnier de l'Ordre.

Vice-Président VlANEY, Doyen de la Faculté des Lettres.

Secrétaire VlALLES, Docteur en Droit, Avocat.

Secrétaire adjoint COSTE, Notaire.

MEMBRES TITULAIRES

MM.

BENOIST, Recteur de l'Académie de Montpellier.

BERTHELÉ, Archiviste départemental, Membre non-résidant du Comité

des Travaux historiques. BONNET, Avocat à la Cour d'Appel, Docteur en Droit, Correspondant du

Ministère. BRÉMOND, Doyen de la Faculté de Droit. CABRIÈRES (S. Em. le Cardinal DE), Evêque de Montpellier. CHAMAYOU, Avocat à la Cour d'Appel, ancien Bâtonnier de l'Ordre. CHARMONT, Professeur à la Faculté de Droit. COSTE, Notaire.

DESPETITS, Ingénieur agronome, Licencié ès Sciences. GACHON, Doyen honoraire de la Faculté des Lettres. GAILLARD, Bibliothécaire universitaire.

GERVAIS, Ingénieur, Directeur de la Compagnie des Salins du Midi. GRANIER (Le Chanoine), Vicaire général honoraire, Secrétaire de S. Em.

le Cardinal de Cabrières. GUIBAL (Louis), Avocat à la Cour d'Appel, Docteur en Droit, Bâtonnier

de l'Ordre.


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GUIBAL (Jean), Avocat à la Cour d'Appel, Docteur en Droit.

HENRY, Pasteur de l'Eglise réformée.

HALLE (Mgr), Evêque de Pergame, Auxiliaire de S. Em. le Cardinal

de Cabrières. KUHNHOLTZ-LORDAT, Directeur des Mines de Graissessac. LAURENS, Avocat à la Cour d'Appel, ancien Bâtonnier de l'Ordre. MERCIER-CASTELNAU, Docteur en Droit, Avocat à la Cour d'Appel,

ancien Bâtonnier de l'Ordre. MlLHAUD, Avocat à la Cour d'Appel, Docteur en Droit, ancien Bâtonnier

de l'Ordre. MORIN, Professeur à la Faculté de Droit. REYNÈS-MONTLAUR (Mlle). ROCHE-AGUSSOL, Avocat à la Cour d'Appel, Docteur en Droit, Docteur

ès Lettres. RlVES, Conseiller à la Cour d'Appel. VALÉRY, Professeur à la Faculté de Droit. VlALLES, Avocat, Docteur en Droit. VlANEY, Doyen de la Faculté des Lettres. GERMAIN-MARTIN, Correspondant de l'Institut, Professeur à la Faculté de

Droit. DE CHAPEL D'ESPINASSOUX, Avocat, Docteur en Droit.

SECTION DE MÉDECINE

Bureau de la Section de Médecine

MM.

Président DELMAS, Professeur agrégé à la Faculté de

Médecine.

Vice-Président . . . VlRES, Professeur à la Faculté de Médecine.

Secrétaire DESMONTS, Chef de Travaux à la Faculté.

MEMBRES TITULAIRES

MM.

BATTLE, Docteur en Médecine.

BERTIN-SANS, Professeur à la Faculté de Médecine.

BlMAR, Agrégé à la Faculté de Médecine.

BOUDET, Docteur en Médecine.

CAIZERGUES, Docteur en Médecine.

CARRIEU (Marcel), Docteur en Médecine.

CHAUVIN, Docteur en Médecine (Hôpital suburbain).

DELMAS, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

DESMONTS, Chef de Travaux à la Faculté de Médecine.


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ESTOR, Professeur à la Faculté de Médecine.

ETIENNE, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

FORGUES, Professeur à la Faculté de Médecine.

GUIBAL, Docteur en Médecine.

GUEIT, Docteur en Médecine.

HORTOLÈS, Docteur en Médecine.

JEANBRAU, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

LISBONNE, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

LEENHARDT (E.), Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

MAGNOL, Docteur en Médecine.

MARGAROT, Docteur en Médecine.

OUY VERNAZOBRES, ancien Capitaine de Cavalerie.

RAUZIER, Professeur à la Faculté de Médecine.

RlCHE, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

RlMBAUD, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

ROUVILLE (G. DE), Professeur à la Faculté de Médecine.

SARDA, Professeur à la Faculté de Médecine.

SOUBEYRAN, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

TÉDENAT, Professeur à la Faculté de Médecine.

VEDEL, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine.

VlLLARD, Docteur en Médecine.

VlRES, Professeur à la Faculté de Médecine.

MEMBRES CORRESPONDANTS DE L'ACADÉMIE

MM.

BURNAND, ancien Elève de l'Ecole des Chartes, Bibliothécaire de la Ville de Paris.

DAURIAC, Professeur à la Sorbonne.

GESCHÉ, Professeur à l'Université de Gand.

MORGAN (Sherley W.), Capitaine-Commandant, Professeur d'Architecture, Princeton University (Etats-Unis).

PLAISANCE (Robert), Professeur de Littérature française, Williams College, Williamstown (Massachusetts) (Etats-Unis).

RODET, Professeur à la Faculté de Médecine.

SACHET, ancien Premier Président, Conseiller à la Cour de Cassation.

VlGIE, Doyen honoraire de la Faculté de Droit.


ACADÉMIE DES SCIENCES ET LETTRES DE MONTPELLIER

PROCÈS-VERBAUX

SECTION DES SCIENCES

Séance du 8 Juillet 1918

La séance est ouverte à 17 h. 30, sous la présidence de M. Massol, président.

M. Amans parle de l'hélice en acier, à pas variable. C'est un problème dont il s'était occupé il y a une vingtaine d'années et qui est maintenant tout à fait d'actualité.

Le National Advisory Committee for Aeronautics de Washington invite les inventeurs et techniciens à lui adresser toutes idées originales à ce sujet.

M. Moye expose alors la suite de ses observations concernant l'étoile temporaire apparue dans l'Aigle le 8 juin 1918.

Cet astre, après un maximum le 9 juin, a constamment décru d'éclat depuis lors. Le 15 juin, l'étoile nouvelle était de première grandeur; le 19 juin, elle tombait rapidement à la seconde. La chute s'est ensuite ralentie : la troisième grandeur était atteinte le 26 juin. De cette date au 7 juillet, la Nova a présenté de brusques fluctuations d'éclat de quelques dixièmes de grandeur au-dessus et au-dessous de la troisième.

Non seulement ces fluctuations se montrent d'un soir à l'autre, mais, ce qui est tout à fait exceptionnel, au cours même de l'observation, d'une minute à l'autre.

Le caractère d'incendie violent et temporaire est ainsi rendu de plus en plus probable comme cause de l'étoile nouvelle.

L'analyse spectrale indique, d'ailleurs, la présence de raies brillantes multiples et une prédominance de coloration rouge qui concordent avec l'hypothèse précédente.

M. Fonzes-Diacon dépose ensuite un mémoire intitulé : La valeur fertilisante des algues de l'étang de Thau.

M. le Président remercie MM. Amans, Moye et Fonzes-Diacon, et lève la séance à 18 h. 50.


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Séance du 11 Novembre 1918

Avant d'aborder l'ordre du jour, la Section des Sciences de l'Académie de Montpellier constate avec émotion que la reprise de ses travaux se trouve coïncider avec la signature de l'armistice sollicité par l'Allemagne vaincue. Saluant respectueusement la mémoire des Académiciens morts pour la Patrie et avant d'avoir connu la victoire finale, la Section est fière de rappeler la collaboration que plusieurs de ses membres ont donné sans compter à la Défense nationale, et elle adresse son salut ému à tous ceux qui ont lutté jusqu'à la victoire définitive, permettant ainsi, au prix des ultimes sacrifices, la reprise de la paix féconde et des travaux de pure science.

La Section, saisie par M. Grynfeltt d'une protestation de plusieurs savants de l'Université de Lille sur les violations du droit et de l'humanité commises à Lille par les Allemands, et demandant que les rapports scientifiques ne soient pas repris avec la nation germanique, donne son entière approbation à la proposition et décide d'en saisir sans délai la prochaine réunion générale de l'Académie.

Séance du 9 Décembre 1918

La séance est ouverte à 17 h. 30, sous la présidence de M. Massol, président.

La Section décide le maintien de son Bureau pendant l'année 1919.

Elle élit ensuite comme membres titulaires : M. Gèze, docteur ès sciences, ingénieur agronome, et M. Pech, chargé d'agrégation à la Faculté de Médecine.

Ces deux élections seront soumises au vote de la prochaine Assemblée générale.

M. Moye présente alors à la Section une série de mémoires de M. Courty, astronome à l'Observatoire de Bordeaux, relatifs à la protection contre la grêle par l'emploi de puissants paratonnerres dits « niagaras électriques ».

Il résulte des travaux de M. Courty, travaux dont l'auteur a désiré que l'Académie soit appelée à prendre connaissance (et qui seront déposés par M. Moye aux archives), que des expériences très précises ont été faites en Gironde et en Dordogne durant les années 1912 à 1918 inclusivement.

De nombreuses chutes désastreuses de grêle ont eu lieu pendant la période considérée sans que l'installation des « niagaras » paragrêles ait paru jouer un rôle appréciable. Si ces appareils ont eu leurs défenseurs énergiques, d'autres fois leurs abords immédiats ont été tellement éprouvés par les grêlons que des conseils municipaux ont prétendu qu'ils attiraient la grêle.

On ne saurait évidemment, aller jusque-là, mais l'enquête poursuivie avec patience et rigueur par M. Courty paraît une fois de plus malheureusement concluante qu'il n'existe pas de moyens actuellement connus pour protéger contre la grêle les récoltes et les vignobles.

La séance est levée à 18 h. 45.


Séance du 13 Janvier 1919

La séance est ouverte à 17 h. 30, sous la présidence de M. Massol, président.

Etaient présents, les membres inscrits sur le registre.

M. le Président, en ouvrant la séance, adresse les félicitations de la Section à MM. Grynfeltt' et Tarbouriech, nommés chevaliers de la Légion d'honneur.

M.. Moye fait ensuite part à l'Académie de ses observations relatives à la clarté du ciel nocturne. Dans les nuits de décembre 1918 notamment, vers minuit, après l'extinction complète des. lumières urbaines, le ciel demeurait cependant très largement éclairé au point de gêner considérablement l'observation des nébuleuses et petites étoiles.

Plus précisément, la clarté diffuse de l'atmosphère restait suffisante pour permettre de lire l'heure à une montre et des caractères d'imprimerie d'environ un centimètre de haut.

Le ciel lui-même paraissait gris, non noir, au point que les nuages et silhouettes d'arbres se profilaient sur lui en ombres chinoises.

M. Moye rappelle quelques-unes des nombreuses observations antérieures sur le même sujet, qui, toutes, indiquent le fait remarqué par lui aussi, à savoir : l'augmentation de la luminosité nocturne vers l'horizon. Il indique aussi les causes possibles de pareille clarté : aurore boréale diffuse, lumière zodiacale, phosphorescence du sol et de l'atmosphère, et il termine en invitant ses collègues à instituer une série d'expériences faciles pour contrôler et préciser l'intensité de la lumière restante en pleine nuit.

A propos de la communication de M. Moye, « Nuits claires », M. Pech rappelle qu'il est pratiquement impossible de faire une mesure photométrique exacte des phénomènes observés par M. Moye, car on ne peut comparer entre elles les intensités de deux lumières de teintes différentes ; quant la méthode photographique, ses résultats sont faussés par plusieurs phénomènes variables, les principaux étant la transparence atmosphérique et la quantité de radiations invisibles qui accompagnent presque toujours les radiations visibles.

M. Pech apporte ensuite un argument tendant à prouver que le phénomène est atmopshérique ; c'est la remarque faite par les aviateurs que la nuit devient plus obscure à mesure que l'on s'élève.

M. le Président remercie MM. Moye et Pech, et lève la séance à 18 h. 45.

Séance du 10 Février 1919

Présents, les membres inscrits sur le registre.

Le procès-verbal de la séance du 13 janvier est lu et adopté.

M. le Président donne la parole à M. Amans, qui développe sa communication sur les frottements des trains d'engrenage.

M. Amans étudie le rendement dans les trains d'engrenage mus par des poids. Quelles sont les pertes dues aux frottements des arbres sur les paliers et à ceux des dents entre elles ?


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En se servant des formules classiques, on voit que la force ultime disponible est sensiblement proportionnelle au poids moteur.

Il n'en est pas de même si le dernier arbre est uni au train d'engrenages par une courroie. La force utile est, dans ce cas, proportionnelle au poids diminuée d'une certaine quantité, ou poids mort uniquement destiné à vaincre les résistances parasites.

L'auteur décrit le système de frein à corde qui lui a servi à mesurer la force utile. Il montre à cette occasion les erreurs qu'on peut commettre en se servant des ressorts à boudin.

Application de ces appareils à l'étude des propulseurs aériens et à la discussion des équations de similitude.

Après un échange de vues entre MM. Massol, Amans et Pech sur les précautions à prendre dans l'emploi des ressorts à boudin, M. Moye expose la progressivité de l'impôt sur le revenu.

La séance est levée à 19 heures.

Séance du 11 Mars 1919

La séance est ouverte à 17 h. 30, sous la présidence de M. Massol.

M. de Rouville demande à être relevé de ses fonctions de secrétaire.

La Section le remercie des services rendus pendant de nombreuses années et charge M. Astruc des fonctions de secrétaire.

M. Pech est chargé des fonctions de secrétaire adjoint.

M. de Rouville donne lecture d'une communication de M. Boutaric sur : Quelques vérifications numériques de l'hypothèse de Nernst. Voici les conclusions de cette note : « Nous n'entendons point, par les remarques précédentes, diminuer l'importance de l'hypothèse de Nernst. Il est déjà fort intéressant d'obtenir dans toutes ces applications l'ordre de grandeur des valeurs expérimentales. Nous avons voulu simplement attirer l'attention sur une façon de présenter les résultats qui nous paraît surtout destinée à masquer le plus possible les écarts entre la théorie et les données expérimentales. »

M. Amans arrive à des conclusions analogues pour la loi de Newton sur la résistance des fluides. Cette loi a conduit aux équations dites fondamentales de l'aéronautique donnant la poussée et la puissance soit d'une voilure d'avion, soit de pales tournantes. Or, en 1910, M. Amans a montré avec l'appareil de Rateau, au laboratoire de physique de l'Ecole polytechnique, que la similitude géométrique n'entraîne nullement l'isodynamisme, c'està-dire que le coefficient K de la formule KSV 2 change avec les dimensions.

Il trouve de même que les équations dites de similitude des pales tournantes propulsives ne s'appliquent que dans quelques cas particuliers. Les coefficients de poussée et de puissance changent avec les dimensions; ils changent du reste, dans une même pale, avec l'incidence sur l'équateur et même avec le nombre de tours. Pour certaines incidences, la ligne des poussées, par exemple, en fonction du nombre de tours, décrit une sinusoïde, mais non une parabole. Il a trouvé, d'autre part, équivalence mécanique entre


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pales dissemblables, leurs lignes de poussée étant sensiblement superposables. La nature, en somme, a horreur de la similitude; elle obtient l'équivalence et le rendement maximum par des modifications de forme et de substance; elle emploie d'autres rapports que celui de similitude géométrique! et règle les flexions par des coefficients d'élasticité différents.

M. Amans avait effleuré cette question dans le Bulletin de l'Académie des Sciences et Lettres de Montpellier en 1914 (nos 8-12).

La séance est levée à 18 h. 45.

Séance du 7 Avril 1919

La séance est ouverte à 17 h. 30, sous la présidence de M. Massol.

Après lecture et adoption des procès-verbaux des deux dernières séances, le Président souhaite la bienvenue à M. Henri Vallois.

M. Amans a fait présenter récemment à l'Académie des Sciences, par M. Rateau, un note sur les équations de similitude dans les pales tournantes. Cette note a valu à l'auteur une correspondance très instructive avec M. Rateau. Celui-ci est célèbre dans le monde entier par ses travaux sur les ventilateurs, les turbines et, en outre, est un des premiers à avoir mesuré la résistance sur des ailes d'aéroplane.

Il a rappelé l'attention de M. Amans sur les phénomènes de discontinuité signalés pour la première fois dans ce dernier travail et qui, coïncidence assez curieuse, s'observent au voisinage d'une incidence de 25°, celle qui justement, dans les pales à torsion nulle, donne le maximum d'écart avec les équations de similitude. Il serait possible qu'à cette incidence, aussi bien pour les pales tournantes que pour les glissantes, il y ait changement de régime pour l'écoulement du fluide.

M. Amans expose le cas de M. Rateau ; il en rappelle un autre où il y a instabilité de régime, mais d'un caractère un peu différent, celui des ailes cylindriques à profil plan-convexe, à une incidence négative. Dans l'un et l'autre cas, cette instabilité se produit quelle que soit la vitesse. Dans la pale tournante, la poussée est une fonction périodique de la vitesse et l'instabilité ne se produit qu'à une certaine vitesse. A cette vitesse, l'axe de l'hélice a des oscillations d'avant en arrière plus ou moins violentes.

Ces considérations s'appliquant à des pales rigides, avec des pales souples les phénomènes sont plus complexes; M. Amans a déjà signalé les transformations du mouvement continu en mouvement alternatif et leur application au vol à voile.

M. Faucon rappelle les travaux de M. Rateau, et en particulier sa dernière invention, permettant aux moteurs d'avions d'avoir la même puissance à toutes les altitudes par régularisation de la carburation. C'est certainement une invention capitale pour l'avenir de l'aviation.

Un échange de vues sur les travaux de M. Rateau a lieu entre le Président, MM. Amans et Faucon.

M. Moye signale un montage simple de T. S. F. permettant l'emploi d'antennes monofilaires et de lampes à grille; ce montage, publié en Amérique, peut donc être vulgarisé en France sans encourir les foudres de la censure militaire. Ce montage paraît devoir rendre la tâche plus aisée aux


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sansfilistes français le jour, prochain peut-on espérer, où la réception des radiotélégrammes sera à nouveau autorisée. La séance est levée à 18 h. 30.

SECTION DES LETTRES

Séance du 12 Juillet 1918

La Section des Lettres s'est réunie le vendredi 12 juillet 1918, à 17 h. 30.

Présidence de M. Mercier, président. Les membres présents se livrent à une étude des statuts et règlement de l'Académie. La séance est levée à 18 h. 30.

Séance du 22 novembre 1918

Présidence de M. Mercier, président.

M. Robert Burnand, capitaine d'état-major, 4, rue du Sommerard, à Paris, est élu membre correspondant de la Section des Lettres.

M. le Président prononce l'éloge funèbre de notre regretté collègue Maurice Gennevaux, archéologue et préhistorien, enlevé dans la force de l'âge, et qui donnait les plus belles espérances.

M. Etienne Gervais présente certaines observations au sujet des projets de division de la France en régions. Il estime qu'il faudrait se garder, en créant des provinces, de les séparer par des limites rigoureuses qui ressembleraient à des frontières. Il insiste sur la nécessité de maintenir l'unité française.

Après une discussion sur cette communication, à laquelle prennent part la plupart des membres présents, la séance est levée à 18 h. 30.

Séance du 20 décembre 1918

La Section des Lettres s'est réunie le vendredi 20 décembre, à 17 h. 30.

Présidence de M. Vianey, vice-président.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

La parole est donnée à M. Coste pour sa communication.

Prenant thème d'un jugement du tribunal de la Seine du 21 juin 1910, qui a admis comme valable l'annulation d'un contrat de mariage français faite en Wurtemberg par des époux d'origine française naturalisés wurtembergeois, M. Coste examine sommairement la question de l'immutabilité des conventions matrimoniales, les motifs qui en ont imposé l'adoption et justifient son maintien. Sans attacher au document étudié plus d'importance


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que ne mérite un jugement d'expédient, il constate la concordance de la doctrine de ce jugement avec la Convention de La Haye du 17 juillet 1905. Il regrette que cette Convention codifie la possibilité de modifier le pacte matrimonial adoptant un système allemand, dont les conséquences peuvent être très préjudiciables aux tiers. Il termine en exprimant l'espoir que cette évolution n'ait été que temporaire, car M. Valéry lui a signalé que la Convention de La Haye du 17 juillet 1905 a été dénoncée par la France le 5 décembre 1916, ce qui permet d'escompter un prochain et définitif retour à la règle tutélaire de l'article 1395.

La vacance d'un siège de la Section est proclamée. Une Commission est nommée pour examiner les candidatures : MM. Vianey, Valéry et Vialles sont désignés.

La séance est levée à 18 h. 30.

Séance du 24 Janvier 1919

La Section des Lettres s'est réunie le vendredi 24 janvier 1919 sur convocation portant : « Election d'un membre », à 17 h. 30.

Présidence de M. Racanié-Laurens, doyen d'âge.

La Commission nommée dans la précédente séance pour examiner les candidatures au fauteuil proclamé vacant propose à la Section la nomination de M. Germain Martin, professeur à la Faculté de Droit, membre correspondant de l'Institut, et fait valoir ses titres.

Il est procédé au vote, et M. Germain Martin recueillant l'unanimité des suffrages, son nom sera proposé au vote de la prochaine Assemblée des trois Sections.

A propos du vote qui vient d'être réalisé, la Section déclare qu'elle accepte le vote par correspondance de ses membres empêchés d'assister à la séance.

Le procès-verbal de la dernière réunion est lu et adopté. Comme complément à la communication faite par M. Coste à la dernière réunion, M. Valéry donne des précisions relatives aux traités conclus à La Haye sur diverses questions de droit civil.

La séance est levée à 18 h. 30.

Séance du 21 Févrir 1919

La Section des Lettres s'est réunie le vendredi 21 février 1919, à 17 h. 30, dans la salle des délibérations de la Faculté de Droit, au Palais de l'Université.

Etaient présents : MM. Coste, Despetits, Gaillard, Germain-Martin, Mercier-Castelnau, R. Laurens.

Présidence de M. Mercier-Castelnau, président.

M. Vialles étant absent, le procès-verbal de la dernière séance sera lu ultérieurement.

Dès l'ouverture de la séance, M. le Président prononce l'éloge du professeur capitaine Merlant, dont il retrace la belle, glorieuse et trop brève carrière en des termes que l'affection du frère d'armes et l'admiration rem-


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plissent d'émotion et d'éloquence. M. R. Laurens, président de l'Académie, demande à abdiquer le privilège que lui donne sa fonction, de rappeler devant la prochaine Assemblée générale de notre Compagnie l'existence si bien remplie de notre regretté collègue, offrant de laisser ce pieux devoir à M. Mercier-Castelnau qui accepte.

Aucune communication n'étant à l'ordre du jour, M. Gaillard demande la parole pour une communication sur les privilèges français d'Aix-la-Chapelle sous l'ancien régime.

« Un diplôme de Charles V, de mars 13691, avait accordé aux habitants d'Aix la franchise de toutes taxes et redevances de circulation auxquelles les personnes et marchandises venues de l'extérieur pouvaient être assujetties en territoire français. Assimilés aux régnicoles par une sorte de naturalisation honoraire, les citoyens de la vieille capitale carolingienne, pour le fisc royal, n'étaient pas des étrangers.

« Cette charte, en qui l'on peut voir, par certains côtés, un des plus anciens monuments de l'influence politique et religieuse en France de la légende poétique de Charlemagne, se rattache en réalité, en même temps, à des dessous diplomatiques demeurés assez mystérieux.

« Ces privilèges ont été l'objet, aux dix-septième et dix-huitième siècles, de toute une série de renouvellements que M. Gaillard croit inédits, en tous cas peu connus.

« Leurs dates correspondent aux époques de grande activité politique et militaire de la France dans la région du Rhin : mai 1611, au moment de l'expédition de Juliers ; mars 1646, en corrélation avec les négociations de la paix de Westphalie; octobre 1672, à l'occasion de la campagne de Hollande. Le dernier, en mai 17642, étend le privilège jusqu'à la suppression du droit d'aubaine, en récompense des services rendus au roi par les gens d'Aix pendant la guerre de Sept ans.

« Ainsi, ce n'était pas en ennemis héréditaires que ces populations accueillaient alors nos années. M. Gaillard conclut en exprimant le regret que la prussianisation des provinces rhénanes ait renversé le cours des sympathies qu'une politique constante et d'ailleurs voulue de part et d'autre avait entretenues pendant des siècles entre la patrie française et ces Marches de l'ancien domaine gaulois. »

M. le Président exprime à M. Gaillard le grand intérêt que ses auditeurs ont pris à cette communication.

Une conversation s'engage sur les probabilités et la possibilité de voir la rive gauche du Rhin demander spontanément, et dans un avenir plus ou

1. Publié d'après les vidimus de 1399, dans Ordonnances des Rois de France (Collection du Louvre), t. VIII, p. 365, et d'après le diplôme original, dans Zeitschrift des Aachener Gaschichtsvereins, t. I, p. 159, et Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, t. LII (1891). p. 587.

2. L'original est aux Archives Nationales (Monuments historiques. Cartons des Rois, K. 147, n° 4. N° 4321 des Inventaires et Documents). Il en existe une impression montpelliéraine (par la veuve Martel, 1764, in-4°), par ordre de la Cour des Comptes, Aides et Finances de cette ville. (Bibliothèque de la Société Archéologique de Montpellier.)


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moins proche, son rattachement à la France. Cette éventualité semble devoir résulter surtout de conditions économiques.

A ce propos, M. Germain-Martin expose quelques idées sur les moyens qui pourront permettre d'alléger le fardeau que la guerre a imposé à nos finances.

La séance est levée à 18 h. 30.

Séance du 21 Mars 1919

La Section des Lettres s'est réunie le vendredi 21 mars 1919, à 17 h. 30, dans la bibliothèque de la Faculté de Droit, au Palais de l'Université, sur convocations individuelles.

Etaient présents : MM. Coste, Despetits, Gaillard, Jean Guibal, Henry, Mercier-Castelnau, Racanié-Laurens, Valéry.

Présidence de M. Mercier-Castelnau, président.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté sans observations.

M. le Président propose de déclarer la vacance de la place de M. Merlant et de nommer, séance tenante, la Commission chargée d'examiner les candidatures qui seront produites et de faire un rapport. La Section décide de demander à l'Académie, à sa prochaine Assemblée générale, de déclarer la vacance d'une place de membre titulaire. Sont élus membres de la Commission : MM. Mercier-Castelnau, Racanié-Laurens et Valéry, qui acceptent.

L'ordre du jour n'annonçant aucune communication, M. Gaston Laurens indique qu'il avait commencé à réunir, pour une date plus éloignée, les éléments d'une communication qui lui avait paru de nature à intéresser l'Académie. Ce travail n'est pas terminé : il le sera sans doute ultérieurement; mais, pour remplir la séance de ce jour, il est tout disposé à donner connaissance à fa Section des notes qu'il a déjà prises sur l'oeuvre d'un membre peu connu, ou peut-être méconnu, de l'Académie française, M. de Jouy.

Dans un livre qui porte comme titre : L'Hermite en province ou observations sur /es moeurs et les usages français au commencement du dix-neuvième siècle, et dont M. Laurens cite de nombreux extraits, M. de Jouy fait notamment d'intéressantes observations sur les moeurs et usages de Montpellier en 1818, le caractère de ses habitants, l'origine de son nom, ses principaux monuments, les familles les plus notables de cette époque, les classes ouvrières, bourgeoises ou aristocratiques, les divers clubs ou sociétés de la ville, ses célébrités médicales, militaires, poétiques ou autres, les maîtres de la peinture, Sébastien Bourdon et Vien, etc., etc..

Ces observations de M. de Jouy, non dépourvues d'un humour de bon aloi, auraient pu et pourront peut-être, jointes à quelques traits de l'intéressante biographie de l'auteur lui-même, faire l'objet d'une véritable communication beaucoup plus complète.

M. le Président remercie M. Laurens et manifeste l'espoir qu'il nous sera donné prochainement d'entendre la communication plus étendue que le conférencier nous annonce.

La séance est levée à 18 h. 45.


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Séance du 25 Avril 1919

La Section des Lettres s'est réunie le vendredi 25 avril 1919, à 17 h. 30, sur convocations individuelles, dans la bibliothèque de la Faculté de Droit, au Palais de l'Université.

Etaient présents : MM. Benoist, Coste, Mercier-Castelnau et Valéry.

La présidence est occupée par M. le Recteur Benoist, doyen d'âge, M. Mercier-Castelnau, président en exercice, n'ayant pu arriver pour l'ouverture.

Le procès-verbal de la dernière séance est adopté sans observations.

Au nom de la Commission nommée à la précédente séance, M. Valéry fait un bref rapport sur les candidatures à la place de M. Merlant, décédé. La Commission propose l'élection de M. de Chapel d'Espinassoux, dont le rapporteur expose les titres.

Il est procédé au scrutin. A l'unanimité des membres présents, M. de Chapel d'Espinassoux est choisi pour être présenté à la prochaine Assemblée générale comme membre de la Section des Lettres.

Aucune communication n'étant à l'ordre du jour, M. le Pasteur Henry développe quelques considérations sur les connaissances linguitiques de Rabelais.

M. Henry rappelle que les questions relatives à la vie et à l'oeuvre de Rabelais ont complètement changé de face depuis ces vingt dernières années. Aujourd'hui, grâce à la Société des Etudes rabelaisiennes, grâce surtout aux travaux de M. Abel Le Franc, l'oeuvre du Maître a pris une physionomie nouvelle et plus vraie, dégagée en tous cas des hallucinations auxquelles elle était livrée depuis le début du siècle dernier. On pourrait donner comme nom à cette école de Rabelaisants celui d' « Ecole positive ». Finies les élucubrations fantaisistes des éditeurs du genre Ermangard et Eloi Johanneau. Finies aussi les « clefs » qui veulent chercher dans les caractères de Louis XII, François 1er et Henri II, et Grangousier, et Gargantua, et Pantagruel. On sait à quoi s'en tenir sur la Devinière, et sur la Guerre picrocholine, et sur les navigations de Pantagruel. Si bien qu'aujourd'hui chaque détail de l'oeuvre du grand Maître a son intérêt propre. L'objet de la présente communication — bien petit en lui-même — est de fixer un des procédés de travail de Rabelais.

« Au 2me Livre de Pantagruel, au chapitre IX, se lit le fameux épisode des Treize langages. C'est un des plus curieux du livre. Il suffira de se reporter au texte pour voir combien Rabelais a fait, à cette occasion, étalage de l'érudition linguistique la plus étendue. Cependant, il est assez difficile d'admettre que le célèbre écrivain ait possédé à fond tous les idiomes dont il nous présente des échantillons. Sur les treize langues que parle Panurge, deux sont de pure invention, l'une reconnue par Pantagruel comme " langaige de son pays de Utopie », l'autre pour du « Lanternois ». Une autre est totalement inintelligible. On y a vu de l'arabe et bien d'autres choses encore. Le basque — probablement fourni par un domestique de la famille — celui qui, dans les « propos des bien yvres » s'écrie : « Lagona


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edatera » ; puis du hollandais, de l'allemand, du vieux danois, du grec moderne — celui-ci sans la moindre difficulté — de l'hébreu, de l'anglais et du latin.

" Une remarque s'impose au lecteur un peu averti. Tant qu'il s'agit de langues classiques, grec et latin, le texte est pur et n'offre aucune difficulté d'interprétation. On sent que Rabelais s'y meut à l'aise. Le grec moderne lui était facilement accessible, étant donné le nombre considérable d'émigrés de Constantinople fixés en Italie et en France. Inutile d'insister sur le latin. Quant aux langues du Nord : danois, hollandais et allemand, je n'ai rien à en dire, et pour cause, je veux seulement présenter quelques observations sur l'hébreu et l'anglais, car il y a entre ces deux textes des rapports assez curieux qui nous feront saisir comment, dans cette occasion, le Maître a travaillé.

« On serait tenté de croire que Rabelais, qui savait à fond tant de choses, possédait à fond la langue sacrée des Juifs. Les références à l'Ancien Testament, les emprunts à la langue rabbinique abondent dans son livre. Ecrit-il une lettre sur l'Education — Gargantua à Pantagruel — on peut y lire en quelle estime il tient la littérature israélite. Cependant, lorsqu'il cite de l'hébreu dans le chapitre des Treize langues, on est surpris de voir qu'il semble avoir copié un modèle qu'il n'a pas compris. N'y aurait-il, en effet, qu'une mauvaise division des mots, on pourrait dire : « C'est la faute de l'imprimeur » — bien que le fait que cette division vicieuse reproduite d'éditeur en éditeur serait suffisant pour prouver qu'en relisant les épreuves l'auteur ne s'est pas aperçu des fautes commises antérieurement. Mais il y a plus. Deux confusions de lettres qui ne peuvent être du fait de l'imprimeur, qui retombent à la charge de l'auteur, permettent de juger que Rabelais savait assez d'hébreu pour le lire et pas assez pour se garder de confondre des lettres et formes voisines. Aussi écrit-il « harob » pour « hatob », " ral » pour « dal ». Ainsi, il oublie et confond les lettres du mot « mlarreh », dont il fait « laah ». Et il ne s'aperçoit pas qu'harob, ral et laah ne peuvent avoir aucun sens.

« De la nature des confusions sur les deux premiers mots relevés ci-dessus, « harob » pour « hatob », on peut inférer qu'il a travaillé sur un mo- . dèle écrit dans la graphie cursive des rabbins et qu'il a lu un groupe JU (tob) comme s'il y avait J I I (rob). Dans le second mot (ral), il a confondu daleth avec resch. D'où on peut conclure qu'il a lu sans bien comprendre.

« Le mot laah en fournit un indice de plus. S'il avait eu sous les yeux une édition imprimée, ce mot, qui fait partie d'une citation des Proverbes, aurait échappé à la déformalion, la netteté des caractères ayant certainement attiré son attention.

« Le même phénomène est aussi visible dans la transcription du texte anglais contenu au même chapitre. Disons, dès maintenant, que l'auteur s'est fait donner un modèle manuscrit par quelqu'un qui écrivait l'anglais d'une orthographe assez libre, ce qui n'a rien d'étonnant pour cette époque, et qui l'écrivait comme il l'entendait. Ceci est assez facile à démontrer. Comme dans le cas précédent, l'auteur a copié son modèle — dont il avait sans doute fourni le texte français — sans bien le comprendre. Qu'on veuille


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bien remarquer le mot thold, où tous les éditeurs ont reconnu le mot thou (tu). Première observation : jamais thou ne s'est orthographié par un groupe lb. C'est toujours u ou w qui le termine. Or, il est impossible de réduire ce groupe lb à u. Mais des monuments anglais en lettres de forme, en gothique si l'on veut, offrent pour w une figure très curieuse de lettre qui représente absolument LB, c'est LB. Cela abonde dans les manuscrits de Wycliffe. On peut donc reconnaître ici une erreur imputable à Rabelais, qui se méprit sur la forme du W gothique et le transcrivit par lb, ayant travaillé sur un modèle où persistait l'orthographe du quinzième siècle.

« D'après W.-P. Ker — dont nous n'avons eu connaissance qu'après notre travail — le modèle aurait été fourni par un étudiant écossais. [Soc. des Etud. Rab., Revue, tom. I, pp. 151-153.]

« Autre observation. Pendant fort longtemps, le th doux a été représenté par un signe spécial, le thorn, dont la forme) est celle d'une sorte de b et qui se rapproche quelquefois de l'Y. Or dans notre texte, Rabelais, qui a transcrit th là où l'écriture lui donnait nettement ce groupe, a constamment écrit y là où un th lui était fourni par le modèle'. Ex. : yi pour thy, oyis pour others (notez ici le « phonétisme » de cette! orthographe où e a été entendu i (français) et où l'r, r vocal, a été complètement noyée dans l's qui suit.

" Cette petite communication n'a pas d'autre intérêt que de fixer la manière dont le grand Maître a travaille son chapitre des Treize langues. En second lieu, elle nous permet de nous rendre compte de la manière dont Rabelais savait l'hébreu. Ceci dit non pour le diminuer. Il a su tant d'autres choses. Il a su si bien dire, ce merveilleux artiste du verbe français ! Il n'en reste pas moins l'esprit le plus compréhensif du seizième siècle. »

Cette intéressante communication, dont M. le Président remercie M. Henry, amène une conversation sur la linguistique et sur les difficultés souvent insurmontables de prononcer une langue étrangère, ou du moins certains de ses vocables. De nombreux exemples sont cités, tout à fait concluants.

La séance est levée à 18 h. 15.

SECTION DE MEDECINE

Séance du 3 Février 1919

Présidence de M. Paul Delmas.

Etaient présents, les membres qui ont signé au procès-verbal.

Le Président prononce l'éloge funèbre des professeurs Hamelin, Puech et Grasset, décédés depuis la dernière réunion.

Il adresse au nom de tous ses collègues ses félicitations les plus chaleureuses à MM. Tedenat et Jeanbreau, promus officiers de la Légion d'honneur; à MM. Ducamp, Soubeyran et Vires, nommés chevaliers de la


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Légion d'honneur ; Jeanbreau et Soubeyran, décorés de la Croix de guerre. Ces distinctions, si justement méritées, font honneur autant à leurs titulaires qu'à la Section de Médecine, qu'ils ont si dignement représentée au cours de la Grande Guerre.

Acte est pris de la démission de M. le professeur Forgue.

Après lecture du rapport de la Commission nommée à cet effet, les candidatures de MM. les docteurs Battle, Boudet, Etienne et Rimbaud, et celle de M. Ouy-Vernazobres sont mises aux voix : ils sont proclamés élus à l'unanimité des membres présents.

L'Assemblée est émue du peu d'empresseiment qu'un trop grand nombre de membres apporte à se rendre aux convocations régulièrement lancées par le Bureau. Elle formule le voeu que chacun concoure à redonner à la Section de Médecine son ancienne vitalité. Il serait à craindre, au cas où la situation actuelle ne s'améliorerait pas, que la nécessité d'une absorption par une Section plus vivante ne fût envisagée et soumise à la décision de l'Assemblée générale, toutes Sections réunies.

Une telle éventualité serait d'autant plus regrettable que la Section, est bénéficiaire de prix importants afférents à des mémoires sur des sujets de médecine. Il y aurait avantage à ce qu'elle pût continuer à prêter son très utile concours à l'Académie pour les décerner.

Un exemplaire du présent compte rendu sera exceptionnellement adressé à tous les membres de la Section.

Séance du 21 Mars 1919

Présidence de M. Paul Delmas, président.

Etaient présents, les membres qui ont signé au registre!.

Le Président souhaite la bienvenue aux nouveaux académiciens ; il exprime le voeu que leur activité vienne donner un regain de vie à la Section de Médecine.

Après avoir donné connaissance de la démission de M. le professeur Gilis, il présente les candidatures de MM. Riche et Lisbonne, professeurs agrégés à la Faculté de Médecine ; Margarot, Carrieu, Chauvin et Gueit, chefs de clinique à la Faculté.

La Commission nommée à l'effet d'examiner les titres et travaux des candidats donne un avis très favorable. Leur élection sera donc soumise à l'Assemblée lors de la prochaine séance de l'Académie, toutes Sections réunies.

La question des greffes est abordée par le capitaine Ouy-Vernazobres. Suit une discussion à laquelle prennent part les membres présents.

L'ordre du jour se trouvant épuisé, la séance est levée à 18 h. 30.

Séance du 26 Avril 1919

Présidence de M. Paul Delmas, président.

Etaient présents, les membres qui ont signé au registre.

En ouvrant la séance, le Président se félicite de la venue de nouveaux


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collègues, dont le passé scientifique est un garant de l'intérêt qu'ils sauront apporter aux travaux de la Section de Médecine.

Il est.procédé à l'élection d'un secrétaire : M. J. Margarot, chef du laboratoire des cliniques de l'Hôpital général, est nommé à l'unanimité des membres présents.

L'ordre du jour appelle une communication de M. Boudet sur les syndromes parathyroïdes.

Dans une étude très fouillée, l'auteur, à i occasion d'observations personnelles, trace un tableau d'ensemble des recherches effectuées à ce sujet.

Après avoir rappelé les faits anatomiques et expérimentaux déjà acquis, il fait un essai de leur application à la clinique et il montre que si certaines affections, comme la tétanie, paraissent répondre nettement à un syndrome parathyroïdien, il est plus difficile d'admettre une semblable interprétation pour d'autres maladies telles que l'épilepsie ou la maladie de Parkinson, que quelques médecins tendent actuellement à rattacher à une altération des glandules. Enfin, il rapproche de ces faits les observations des obstétriciens à l'occasion de la tétanie des femmes enceintes, des nourrissons et de l'éclampsie.

M. P. Delmas fait des réserves sur la signification de l'éclampsie, considérée comme une conséquence d'un fonctionnement défectueux des parathyroïdes. Par contre, il souligne l'importance du métabolisme de la chaux au cours do la grossesse et de l'allaitement ; la présence de l'oeuf dans l'organisme féminin détermine dans celui-ci la production d'anticorps qui, chargés en principe d'immuniser la mère vis-à-vis des produits solubles du syncithium, aboutissent en fin de compte, après ricochet sur les fonctions de l'appareil parathyroïdien, à l'édification du squelette foetal.

Ainsi, les processus de défense de la femme vis-à-vis de son hôte temporaire aboutissent-ils en fin de compte au premier sacrifice de la mère pour son enfant.

M. Vires demande à M. Bondet de préciser quel est, à son sens, le rôle des parathyroïdes dans les syndromes épileptiques.

M. Bondet signale la confusion qui règne encore dans cet ordre de recherchés. Aucun fait démonstratif n'a été apporté.

M. Ouy-Vernazobres amorce à nouveau la question de la survie des tissus hors de l'organisme.

Une discussion s'engage, à laquelle prennent part MM. Vires, Bondet, Margarot et P. Delmas.

REUNIONS GÉNÉRALES DE L'ACADEMIE

Séance du 15 Juillet 1918

Présidence de M. Racanié-Laurens, président.

Présents : MM. Vialle, Etienne de Rouville, Thomas, Dr Amans,

Moye, Gesché, Grynfeltt, Mgr Halle, Despetits et Mercier-Castelnau.

Le procès-verbal de la Section des Sciences est lu et adopté.


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Le procès-verbal de la séance générale de juin 1918 est adopté.

M. le Président prononce l'éloge funèbre de M. le professeur Grasset; cet éloge sera publié dans le Bulletin.

La parole est donnée ensuite à M. Thomas, qui nous décrit la vie de l'abbé de Labarthe, capitaine, physicien, agronome, personnage complexe, très représentatif de l'ancienne société française de province dans la deuxième moitié du dix-huitième siècle.

La séance est ensuite levée à 19 heures, après que M. le Président eut adressé à M. Thomas les remerciements de l'Académie pour sa très intéressante et très vivante communication, qui sera publiée dans le Bulletin.

Séance du 22 novembre 1918

Présidence de M. Racanié-Laurens, président.

Présents : MM. Benoist., Etienne de Rouville, Moye, Vialleton, Astruc, Despetits, Astre, Berthelé, Jadin, chanoine Granier, Valéry, Coste, Massol, Gaillard, Mercier-Castelnau.

M. le Président prononce! une allocution patriotique avant la reprise des travaux de l'Académie ; il envoie le salut de l'Académie à tous ceux qui ont contribué à la victoire de la Patrie. Cette allocution sera insérée dans le Bulletin.

Le Secrétaire général lit une communication de l'Académie de Turin annonçant la mort du professeur Giampietro Chirani, sénateur du royaume.

La Smithsonian Institution communique le décès de M. Richard Rathburn.

L'Institut de France fait part d'une notice sur la conférence interalliée des Académies scientifiques à Londres.

L'Union des grandes Associations françaises contre la propagande ennemie adresse un appel au public montpelliérain pour la création à Montpellier d'un Comité local. (Il faut dire que ce Comité vient de se constituer.)

Le Recteur et le Consistoire de l'Université de Lund (Suède) font part à l'Académie des fêtes qui ont été célébrées à l'occasion du deux cent cinquantième anniversaire de la fondation de leur Université.

Ces communications terminées, M. le Président prononce l'éloge funèbre de M. Gennevaux ; cette allocution sera insérée dans le prochain Bulletin.

Puis le procès-verbal de la séance précédente de la Section des Sciences est lu et approuvé.

Le procès-verbal de la dernière séance générale (15 juillet 1918) est aussi lu et approuvé.

L'Académie adhère à l'unanimité à l'éloquente protestation des membres de l'Académie de Lille, en date du 29 octobre 1918, contre les actes de barbarie des Allemands, et confirme à nouveau sa résolution, votée à la séance générale de novembre 1914, de ne plus avoir de rapports avec les Sociétés savantes d'Allemagne jusqu'à ce qu'intervienne de leur part une désapprobation publique des actes antisociaux accomplis au cours de cette guerre par leur gouvernement.


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La question du renouvellement du Bureau de l'Académie est posée par M. le Président ; on décide d'attendre, pour procéder à des élections, la rentrée de tous les membres de l'Académie.

La parole est ensuite donnée à M. Despetits pour sa communication sur les falsifications germaniques de l'Histoire de saint Roch. M. Despetits commence par la question de la réalité de l'existence de saint Roch ; il n'y a pas sur lui de document direct, mais on peut l'authentiquer par les personnages de son entourage : si ceux-ci sont certains, saint Roch l'est aussi. Le premier ouvrage sur saint Roch a été imprimé en Italie en 1478. Cet ouvrage a servi à la vie de saint Roch en allemand. Les Allemands se sont empressés d'accaparer saint Roch, tout au moins en prétendant qu'il serait allé mourir chez eux. De nombreux auteurs ont attesté le retour de saint Roch en France, à Montpellier, où il fut emprisonné. Quant à son origine, les uns le font naître dans la famille Roch ; d'autres l'ont rattaché à une famille de la Croix, alliée à la famille Roch ; certains ont fait de lui, à cause de son nom même, le patron des paveurs. En tous cas, il reste Français, malgré les prétentions allemandes; et les Montpelliérains n'ont pas cessé de rendre les plus grands honneurs à sa mémoire.

M. le Président remercie M. Despetits de! son intéressante communication.

La séance est ensuite levée à 19 heures.

Séance du 22 Décembre 1918

Présidence de M. Grynfeltt, vice-président.

Présents : MM. Vialles, Etienne de Rouville, Valéry, Vialleton, Moye, Dr Amans, Faucon, Coste, Gaillard, Massol et Mercier-Castelnau.

M. le président Racanié-Laurens, empêché, s'est fait excuser.

M. Gesché s'excuse de ne pouvoir assister à la séance et remercie l'Académie des témoignages de sympathie qu'elle lui a donnés à l'occasion de son grand deuil.

Le procès-verbal de la Section des Lettres est lu et adopté.

Le procès-verbal de la dernière séance générale est lu et adopté.

L'ordre du jour appelle l'élection de deux nouveaux membres de la Section des Sciences.

Votants : 12. Bulletins trouvés dans l'urne : 12.

Pour M. Gèze) : 12 oui.

Pour M. Pech : 12 oui.

En conséquence, le Président proclame membres de l'Académie des Sciences et Lettres de Montpellier :

M. Gèze, docteur ès sciences, ingénieur agronome, et M. Pech, chargé d'agrégation de physique à la Faculté de Médecine.

M. Moye offre à l'Académie une série de brochures contenant des rapports sur les paragrêles. Quelle est l'efficacité de ces instruments ? M. Courty exprime que les paragrêles ne font pas tomber la grêle, mais qu'ils ne l'empêchent pas de tomber. Les Compagnies d'assurances ont refusé de subventionner toute invention dans cet ordre d'idées.


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M. Moye parle ensuite de la répartition des orages par saisons. En Gironde, il y a 65 à 70 journées d'orage par an; dans l'Hérault, on compte 80 à 90 journées de pluie, tandis qu'en Gironde il y en a 240.

En Gironde, c'est pendant l'été qu'il y a le plus d'orages. Pour l'Hérault, M. Martin a observé : 40 % d'orages en été, 40 % en automne, 17 % au printemps et 3 % en hiver.

Il faut s'entendre sur la définition de l'orage : c'est le tonnerre, avec ou sans eau; l'orage, ce n'est donc pas une série d'éclairs ou bien de la pluie plus ou moins violente.

M. Vieillot a trouvé : 52 % d'orages en été, 30 % en automne, 10 à 12 % au printemps et 3 à 4 % en hiver.

Ces deux résultats ne paraissent pas concorder : l'explication de ces différences vient probablement de ce que M. Martin parle dés orages à Montpellier, et M. Vieillot des orages dans l'ensemble de l'Hérault, qui comprend, au point de vue météorologique, deux zones très différentes.

Diverses observations sont échangées entre les membres. Puis M. Massol demande des renseignements sur la dernière réunion convoquée par l'Association régionale du Languedoc.

M. Coste répond qu'on y a décidé la création d'un Comité qui comprendrait le président ou le délégué de chaque groupe adhérent.

La séance est ensuite levée à 18 h. 30.

Séance du 27 Janvier 1919

Présidence de M. Racanié-Laurens, président.

Sont présents, les membres qui ont signé au registre.

M. Mercier-Castelnau, secrétaire général, se fait excuser de ne pouvoir assister à la séance.

Les procès-verbaux des Sections des Lettres, des Sciences et de la dernière séance générale sont lus et adoptés.

L'ordre du jour appelle l'élection d'un nouveau membre de la Section des Lettres. Il est procédé au scrutin.

Votants : 12. Bulletins trouvés dans l'urne : 12.

Oui : 12 pour M. Germain-Martin. Non : néant.

En conséquence, le Président proclame M. Germain-Martin, membre correspondant de l'Institut de France et professeur à la Faculté de Droit, élu membre de l'Académie des Sciences et Lettres de Montpellier.

M. le Président présente les souhaits de bienvenue de tous aux nouveaux membres : MM. Gèze, Pech et Burnand, membre correspondant Les lettres de remerciements des élus sont également lues par le Président. Il adresse les douloureuses condoléances de l'Académie à M. Berthelé, dont le fils est mort pour la France ; à Mlle Reynès-Montlaur, dont le frère est mort récemment à Montpellier, où il était revenu après avoir été pendan trois ans prisonnier de guerre.

M. le Président adresse les félicitations de l'Académie à ceux de ses membres qui ont récemment obtenu des nominations ou des distinctions honorifiques : M. Derrien, titularisé comme professeur à la Faculté de


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Médecine; M. Astruc, nommé professeur titulaire de pharmacie galénique et industrielle à l'Ecole supérieure de Pharmacie ; MM. les professeurs Grynfeltt, Soubeyran, Jeanbrau et Tarbouriech, promus chevaliers de la Légion d'honneur.

Il est ensuite donné lecture du procès-verbal de la séance du Bureau, qui a eu lieu le 25 janvier 1919, pour l'étude de la situation financière de l'Académie.

A ce propos, M. Delmas, sur l'indication de M. le Président, expose la situation de la Section de Médecine, dont la vitalité laisse assez à désirer, et fait connaître les mesures envisagées pour améliorer cet état de choses.

M. le Président fait connaître que le Bureau a envisagé la possibilité de demander une subvention au Conseil général de l'Hérault. L'Assemblée décide à l'unanimité que cette demande sera adressée sans délai.

M. Grynfeltt présente diverses considérations importantes sur la nécessité et les moyens d'augmenter les ressources destinées à assurer les publications de l'Académie.

L'Assemblée décide d'étudier à nouveau, dans une prochaine séance, la question de savoir si on ne pourrait pas faire des publications en collaboration avec d'autres Sociétés savantes. M. Massol formule une proposition en ce sens.

L'Académie prie son Secrétaire général de régler au mieux des intérêts de tous la question de savoir s'il y a lieu de réduire à des extraits les tirages à part des articles publiés par l'Académie.

Le budget pour 1919 est mis aux voix et adopté.

La séance est levée à 19 heures.

Séance du 24 Février 1919

Présidence de M. Racanié-Laurens, président.

Présents, les membres qui ont signé au registre.

M. le Président annonce qu'il a reçu la démission de M. le professeur Ducamp (Section de Médecine), qui déclare que ses occupations ne peuvent pas lui permettre d'assister aux séances. M. le professeur Forgue a également donné sa démission.

Les procès-verbaux de la Section de Médecine (3 février 1919) et de la Section des Sciences (13 janvier 1919) sont lus et adoptés.

Le procès-verbal de la séance générale (27 janvier 1919) est lu et adopté.

Le procès-verbal de la Section des Lettres n'a pas été rédigé, aucune communication n'ayant été faite au jour réglementaire de la séance.

M. le Président souhaite la bienvenue à M. Plaisance, professeur de lettres à l'Université Williams, de la Nouvelle-Orléans.

Il le remercie du concours précieux que nous ont apporté les Etats-Unis.

Il exprime ses félicitations à M. le professeur Charmont, décoré de la Légion d'honneur, juste hommage rendu à ses longs et éminents services ; il félicite ensuite le capitaine Jean Guibal, nommé chevalier de la Légion d'honneur à Mayence, et lui témoigne toute la satisfaction éprouvée par


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l'unanimité de ses collègues de voir récompensée à sa valeur la belle conduite du plus jeune membre de notre Compagnie.

M. le Président annonce que les prochaines communications seront faites dans l'ordre suivant : professeur Tédenat, pasteur Henry, chanoine Grenier, professeur Delmas, bâtonnier Louis Guibal. Le Président constate ensuite que pendant sa longue présidence de cinq années, il a eu le douloureux privilège de prononcer douze éloges funèbres; il indique qu'il vaudrait mieux que ces allocutions fussent prononcées par les présidents des Sections, ceux-ci connaissant davantage les titres et les mérites de leurs collègues, qu'ils ont pu mieux apprécier et juger avec une entière compétence.

L'ordre du jour appelle ensuite l'élection de cinq membres proposés par la Section de Médecine. Ce sont : MM. le Dr Battle, le professeur Rimbaud, le professeur Etienne, le capitaine Ouy-Vernazobres, le docteur Boudet.

Il est procédé au vote. Bulletins trouvés dans l'urne : 28. Chacun des candidats a obtenu 28 voix. En conséquence, ils sont proclamés membres de l'Académie.

M. Mercier-Castelnau, président de la Section des Lettres, prononce l'éloge funèbre de M. le professeur Merlant et exprime en termes émouvants tous les regrets causés à l'Académie par cette grande perte. L'allocution de M. Mercier-Castelnau sera insérée dans le Bulletin de l'Académie.

La parole est ensuite donnée à M. Jean Guibal pour sa communication : Vers le Rhin. En termes élevés, il nous dit l'état d'esprit des Français entrant à Metz avec de la joie au coeur et des larmes aux yeux, avec de la fierté et du respect pour toutes les douleurs et les tristesses du passé, à l'heure où nous étions des vaincus. Mais, à cette heure, nous sommes des vainqueurs. M. Guibal décrit ensuite, en traits pittoresques et précis, l'entrée solennelle à Mayence, l'état d'âme du vainqueur, l'attitude de la population, les paroles prononcées par le général Fayolle et par le général Mangin, et termine en disant son espoir de voir maintenant les hommes de pensée mettre en oeuvre la victoire obtenue par les hommes d'action. M. le Président remercie le capitaine Jean Guibal de sa très belle conférence, qui sera insérée dans le Bulletin. « Il a prouvé, dit-il, par son héroïque conduite devant l'ennemi, si justement récompensée, comme par son émouvante conférence de ce soir, unanimement applaudie, qu'il réunissait en lui les deux traits caractéristiques du Gaulois d'après César : rem militarem argute lequi. "

Une question se pose ensuite : celle de savoir s'il conviendrait d'accepter l'offre de la Société de Géographie, qui se chargerait d'imprimer les mémoires de l'Académie. M. Moye dit, en effet, que les colonnes du Bulletin de la Société sont ouvertes aux membres de l'Académie, mais qu'en ce moment même les disponibilités sont assez rares, car il y a des manuscrits en publication et, de plus, l'état des prix d'imprimerie a aug menté dans des conditions exorbitantes.

M. Bonnet s'élève contre cette mesure; il préférerait que l'Académie se


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chargeât elle-même de ses publications. M. Delmas propose alors d'élever la cotisation à un chiffre supérieur; cette proposition n'est pas adoptée. D'autres ont pensé à admettre des annonces dans le Bulletin ; mais ces annonces n'ont d'utilité qu'autant qu'elles atteignent un grand public, ce qui n'est pas le cas. Cette proposition est donc ajournée à une séance prochaine.

Mieux vaut en revenir, pour accroître nos finances, à la demande de subvention qui sera présentée à la prochaine session du Conseil général de l'Hérault par notre collègue M. Louis Guibal.

Ce dernier promet tout son concours.

La séance est ensuite levée à 19 heures.

Séance du 31 Mars 1919

Présidence de M. Racanié-Laurens, président.

Présents : MM. Et. de Rouville, Coste, Vialles, Valéry, professeur Delmas, capitaine Ouy-Vernazobrels, professeur Vialleton, docteur Amans, professeur Gèze, professeur Massol, professeur Moy, professeur Grynfeltt, professeur Fonzes-Diacon, professeur Henry, Gaillard, docteur Villard, docteur Faucon, docteur Boudet, professeur Tédenat et Mercier-Castelnau.

Le Président souhaite la bienvenue à M. le général de Piépape, qui nous fait l'honneur d'assister à la séance. M. le général de Piépape consacre à la littérature les loisirs de sa retraite. Il est l'auteur de nombreux ouvrages d'histoire ou de poésies, dont plusieurs couronnés par l'Académie française, le collaborateur de la Revue des Deux-Mondes et ancien président de plusieurs Académies de province; il fait hommage à l'Académie d'un volume de vers : Les Etapes de la Victoire, que l'Académie accepte avec reconnaissance.

Le procès-verbal de la séance de la Section de Médecine est lu et adopté.

Le procès-verbal de la Section des Sciences sera lu à la prochaine séance.

Le procès-verbal de la Section des Lettres est lu et adopté.

Le procès-verbal de la séance générale de février est lu et adopté. Sur la proposition de M. le Président, l'Académie décide que l'allocution prononcée par M. Mercier-Castelnau sur le professeur Merlant sera insérée au prochain Bulletin.

La démission de M. le professeur Gilis est acceptée.

Le Président souhaite la bienvenue aux nouveaux élus : MM. les docteurs Battle, Boudet, professeur Etienne, professeur Rimbaud, ainsi qu'à M. le capitaine Ouy-Vernazobres, ancien officier de cavalerie, qui consacre ses loisirs à la littérature et à des études biologiques. Notre nouveau collègue fait hommage à l'Académie de son livre : Le Journal d'un Officier de Cavalerie, qui sera mis en bonne place dans notre bibliothèque.

Le Président lit ensuite une lettre de Mme de Lavèvre qui, en souvenir de son frère M. Henry de Lunaret, fait don à l'Académie d'une somme de 1.000 francs pour les publications de l'Académie. Le Président exprimera à Mme de Lavèvre tous les remerciements de notre Compagnie, Les deux


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lettres seront insérées au Bulletin pour qu'il reste trace de cette libéralité et de la gratitude de l'Académie.

Il est procédé ensuite à l'élection de sept membres proposés par la Section de Médecine.

Votants : 22. Bulletins trouvés dans l'urne : 22. Oui : 22.

En conséquence, les sept candidats proposés sont nommés membres de l'Académie, savoir : MM. Riche, Lisbonne, Magnol, Margarot, Marcel Carrieu, Chauvain et Gueit.

L'Académie déclare ensuite la vacance du fauteuil de M. Merlant. Une Commission, composée de trois membres de la Section des Lettres, fera un rapport sur les candidats proposés.

Le Secrétaire général lit enfin les lettres de remerciements des nouveaux membres de la Section de Médecine, et aussi une lettre de M. le professeur Forgues qui, sollicité de retirer sa démission de membre de l'Académie, demande un congé d'un an; après quoi il reprendra sa place si ses occupations le lui permettent.

La parole est donnée à M. le professeur Tédenat pour sa communication sur l'Hêmatocholécyste.

Cette communication, très intéressante et très applaudie, sera publiée dans le Bulletin. M. Moye présente, à cette occasion, quelques remarques personnelles sur les dangers dé l'absorption des oeufs en trop grande quantité.

Puis la séance est levée à 19 heures.

Séance du 28 Avril 1919

Présidence de M. le Recteur Benoist, en l'absence de M. Racanié-Laurens, président, empêché.

Les procès-verbaux des Sections des Lettres et de Médecine sont lus et adoptés. Il en est de même du procès-verbal de la dernière réunion générale.

L'ordre du jour appelle l'élection d'un membre dans la Section des Lettres.

Le scrutin donne les résultats suivants :

Votants : 20. Bulletins affirmatifs : 20.

En conséquence, M. de Chapel d'Espinassou, avocat, docteur en droit, est déclaré élu membre de l'Académie pour la Section des Lettres.

La parole est ensuite donnée à M. le pasteur Henry pour sa communication intitulée : Essai d'interprétation d'un texte très mutilé : le Psaume CX.

Ce psaume est très connu, mais ses mutilations donnent lieu à de graves difficultés d'interprétation. Avant d'en aborder le sujet lui-même, M. le pasteur Henry expose les grandes règles d'interprétation des textes de l'Ancien Testament et combien les transmissions et traductions successives en altèrent facilement le sens initial.

L'orateur donne ensuite lecture des principales leçons du Psaume CX, tant dans la Vulgate que dans le Septante ou le texte hébreu, faisant res-


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sortir les ressemblances et différences qui se dégagent du rapprochement de ces versions.

Abordant ensuite l'exégèse des versets les uns après les autres, M. le pasteur Henry en fait ressortir les obscurités, les incertitudes et les sens plausibles que l'on peut leur donner. La vraie conclusion est que le Psaume CX est un texte mutilé, mais néanmoins on peut en déduire certaines hypothèses quant à la situation et à la date auxquelles il se rapporte.

Le psaume lui-même s'applique à un prêtre, très probablement Simon Macchabée ou son fils Hircan, certainement pas à David, à qui le psaume a été attribué faussement par des interprètes subséquents.

La date elle-même peut s'inférer de considérations sur la vie politique de Jérusalem vers l'an 106 avant J.-C., plutôt après qu'avant.

Le Psaume CX a des ressemblances de texte et de style avec le Psaume II. Il a d'ailleurs beaucoup servi à la construction théologique des premiers siècles de l'ère chrétienne.

Après observations de divers membres de l'Académie, M. le Recteur Benoist remercie M. le pasteur Henry de son importante et savante communication.

M. Racanié-Laurens, arrivé au cours de la séance, s'excuse de n'avoir pu venir plus tôt, retenu qu'il était dans l'intérêt de l'Académie.

DES HEMATOCHOLECYSTES

Par le Professeur TÉDENAT.

La cholécystite a pour cause habituelle les microorganismes qu'apporte dans la vésicule la bile venant du foie ; plus rarement ils viennent du duodénum et atteignent la vésicule par voie ascendante.

Le bacille d'Eberth occupe le premier rang et on connaît la fréquence des cholécystites consécutives à l'infection éberthienne ; qu'elle se manifeste sous la forme de la classique fièvre typhoïde ou sous la forme de synoque ou de léger embarras gastrique.

On a attiré l'attention, dans ces dernières années, sur la présence fréquente du bacille d'Eberth, pendant des mois et des années, dans la vésicule biliaire. Les « porteurs de germes » sont dangereux pour leur entourage. On a publié l'histoire bien établie de cuisinières qui ont porté la fièvre typhoïde, pendant plusieurs années, dans les maisons où elles ont servi. Aussi, logique jusqu'au bout, un bactériologue allemand a-t-il conseillé d'enlever la vésicule aux typhoïdiques. Faudrait-il pourtant les consulter, à moins de pousser à l'extrême les principes du socialisme d'Etat.

Le colibacille, les staphylocoques, le pneumocoque sont, par le même mécanisme, mais avec une moindre fréquence, agents d'infection de la vésicule biliaire. Je devrais dire agents d'infection de la bile. Celle-ci peut, en effet, contenir des microorganismes sans que la paroi de la vésicule présente des lésions infectieuses appréciables.


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La cholécystite, quand elle a atteint un certain degré d'intensité et aussi une certaine durée, s'accompagne de formation de calculs biliaires, en lesquels on trouve habituellement le microbe infectant. Les frères Mayo ont bien montré l'influence de la durée de l'infection. Sur 365 cas de cholécystite très nette, ils trouvèrent des calculs dans 69 % des cas récents, dans 76 % des cas relativement anciens, dans 93 % des cas vraiment anciens. J'ai moi-même opéré six cas de cholécystite avec distension de la vésicule, avec du pus dans quatre cas, et n'ai pas trouvé de calculs.

La statistique des Mayo montre qu'il y a, en plus de l'inflammation, un autre élément plus ou moins important et nécessaire à la formation des calculs. Ce facteur a été mis en évidence par Chauffard et ses élèves (Flandin, Grigaut, Guy Laroche), par Aschoff et d'autres en Angleterre, en Allemagne, en Hollande. De 1 à 2 p. 1000 à l'état normal, le taux de la cholestérine du sang s'élève à 4 et même 7 p. 1000 dans la fièvre typhoïde et d'autres maladies infectieuses, à la fin de la grossesse et pendant les suites de couches. Les lésions des capsules surrénales, la rétention biliaire par infection des voies biliaires interviennent aussi pour produire l'hypercholestérinémie et la précipitation de la cholestérine surabondante dans le sang.

Ajoutons le rôle des aliments très riches en cholestérine : ris de veau, cervelle, même et surtout les oeufs. Un oeuf de poule contient autant de cholestérine que 400 grammes de viande de boeuf et de mouton, que 500 grammes de porc. Chez les sujets quelque peu prédisposés, un oeuf cru ou à peine tiédi peut provoquer une crise de colique hépatique ; l'oeuf bouilli et dur est moins nocif.

Chez certains sujets à estomac et foie « délicats », les oeufs crus ou insuffisamment cuits provoquent des phénomènes toxiniques remarquables qui surviennent souvent demi-heure, une heure après ingestion. Ils se manifestent par coliques violentes, vertiges, selles fétides, quelquefois sanguinolentes. L'intoxication journellement répétée peut provoquer du purpura. Voici, de ce fait, un exemple remarquable :

Une femme de 38 ans vient me consulter pour un adénome du sein. Elle porte un peu partout, sur le tronc et les membres, de larges ecchymoses d'âges divers, faciles à établir par leur coloration variable. Elles datent de deux mois et se produisent sous la plus légère chiquenaude. La dame prend, depuis deux mois et demi, une douzaine d'oeufs crus tous les jours. Je supprime les oeufs et conseille les viandes grillées, les légumes verts, un verre à bordeaux d'eau de Vichy avant les repas. Après quinze jours, la peau est nette et sans ecchymoses. J'ampute le sein. Réunion immédiate. Dix jours après, les ecchymoses se reproduisent. On apprend que depuis qu'elle peut se lever et se promener dans le jardin de la clinique, l'opérée prend de huit à dix oeufs crus, apportés en cachette par sa cuisinière. Sévère admonestation, oeufs supprimés. Les ecchymoses disparaissent. Depuis quatre ans qu'elle a renoncé aux oeufs, Mme C... n'a plus ni gastralgies, ni coliques, ni ecchymoses.

Il est bien établi que, primitifs ou secondaires à la cholécystite, les calculs accompagnent tôt ou tard la plupart des cas de cholécystite.


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Les calculs, formés presque toujours dans la vésicule, aggravent ses lésions inflammatoires. Avec ou sans calculs, la cholécyste, surtout éberthienne et streptococcique, peut être purulente, aiguë et gangreneuse (Lejars, Tédenat). Cette forme, presque toujours mortelle, est très rare.

Plus fréquentes sont les cholécystites subaiguës et chroniques. Cellesci, au cas de calculs multiples, s'accompagnent de lésions scléreuses qui épaisissent le cholécyste, le rapetissent. La vésicule calculeuse est une vésicule petite, ratatinée (loi de Courvoisier-Terrier).

Ce n'est pas toujours ainsi que les choses se passent. Moynihan, Lawson Tait, Kocker ont cité des cas de vésicules avec calculs contenant demilitre de liquide (mucus, pus plus ou moins mêlés de bile). J'ai opéré deux cas de cholécystite avec rares grains de cholestérine et contenant plus d'un litre de liquide.

Ces grosses vésicules se voient surtout dans le cas de calculs solitaires, tantôt obstruant le canal optique, tantôt le laissant libre. Alors la vésicule tantôt se remplit, tantôt se vide. Fenget (de Chicago) a bien montré la fréquence relative de tels cas, à variations du degré de distension de la vésicule.

Il existe une forme rare de gros cholécyste biliaire. Bouveret, Jaboulay en ont publié cinq ou six cas. J'ai observé le suivant :

Le docteur Garimond, d'Anduze, m'adressa une jeune fille de 19 ans avec une grosse tumeur remplissant l'hypochondre droit, plongeant dans le bassin, dépassant la ligne médiane de deux à quatre travers de doigt, suivant les points. Elle est modérément tendue et fluctuante, ne détermine que de la pesanteur, sans douleurs vraies. Nous pensons à un kyste inclus de l'ovaire. Laparatomie. C'est une grosse vésicule qui, soulevée, se vide. Elle a ses parois libres d'adhérences, souples. Je fixe par des sutures le foie abaissé. Guérison rapide. L'opérée évite le retour de la distension de sa vésicule par l'usage d'une sangle de Glénard. Il est probable que, dans ces cas, la ptore du foie fait plicature et oblitération du cholédoque.

Quand, avec ou sans coliques hépatiques, la vésicule se distend, il s'agit ordinairement d'un calcul du cystique du cholédoque, ou encore et plus souvent d'un cancer dans la traversée du pancréas. On sait d'ailleurs la fréquence du cancer de la vésicule chez les vieux lithiariques. Le cancer fait ictère permanent et progressif ; le calcul du cholédoque ictère variable nul par périodes.

Il est une forme de gros cholécyste certainement très rare, puisque aucun auteur n'en fait mention. Il s'agit des hématocholécystes constitués par la distension plus ou moins grande de la vésicule par du sang mêlé d'une proportion variable de mucus et de bile.

Mes observations se réduisent à trois. Toutes sont caractérisées par la distension de la vésicule par du sang évacué dans l'intestin à intervalles variables, au prix de coliques hépatiques plus ou moins pénibles. La présence du sang dans les matières fécales et les douleurs épigastriques m'ont fait penser, dans un cas, à un ulcère du duodénum.

Les lésions hémorrhagipares de la vésicule ont varié :

Dans l'observation I : cholécystite avec boue biliaire contenant de menus


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grains de cholestérine. Dans l'observation II : ulcère post-typhoïdique. Ces deux cas ont nécessité l'excision de la vésicule, qui a donné une guérison durable. Dans l'observation III, il s'agissait d'un épithélioma de la vésicule, avec foyers métastatiques dans le foie et le grand épiploon. La cholécystostomie a donné soulagement temporaire des douleurs ; la cholécystectomie était impossible et n'aurait pas eu de résultat utile.

OBSERVATION I

Hématocholécyste. Selles hématiques coïncidant avec des coliques hépatiques et une augmerdation notable, et variant d'un jour à l'autre, de la vésicule. Papillome au voisinage de l'origine du canal cystique. Cholécystectomie. Guérison.

Mme Emilie D..., 39 ans. Rien à noter du côté de l'hérédité. Réglée à 13 ans. Accouchements normaux à 23, 26, 30 ans. Fièvre typhoïde peu grave à 21 ans. Santé générale bonne. Depuis quatre ans, dyspepsie fréquente, douleurs gastralgiques une ou deux heures après les repas, survenant de loin en loin et cédant aux alcalins, au sous-nitrate de bismuth. Depuis deux ans, les douleurs sont plus fréquentes et la malade éprouve de vraies crises courtes et peu intenses de coliques hépatiques, rarement avec vomissements. Jamais d'ictère, mais teint plus pâle.

Il y a six mois (juin 1910), le docteur Dussaud constate une augmentation de volume de la vésicule biliaire qui fait, au-dessous du rebord costal droit, une saillie semblable à un oeuf de poule. Le lendemain, la tumeur avait à peu près disparu, en coïncidence avec une crise de coliques assez vives pendant la nuit. Les selles furent examinées dans l'après-midi pour y chercher des calculs biliaires. Elles étaient noires, avec des traînées rouge sang. Le salicylate de soude, l'extrait de fiel de boeuf furent employés pendant plusieurs semaines. Des crises analogues à celle décrite ci-dessus se reproduisirent de loin en loin, toujours avec du sang noir dans les fèces, où on ne trouva jamais de calculs. Ces crises devenaient plus pénibles. D'abord espacées souvent de cinq ou six semaines, elles revenaient depuis deux mois tous les huit ou dix jours. La dyspepsie était plus marquée ; la malade avait perdu en trois mois 12 kilos (de 70 à 58).

Le docteur Dussaud adressa la malade à M. Tédenat, le 22 décembre 1918. La chirurgien constata, du 23 décembre au 5 janvier, trois crises très nettes : douleurs vives, nausées. Vésicule distendue et dépassant le rebord costal de cinq à sept travers de doigt, selon la crise. Après trois à cinq heures de douleurs, la vésicule subissait une diminution considérable de volume. Dans les matières fécales, on constatait chaque fois la présence du sang. Il y persistait, mais peu abondant, dans l'intervalle des crises.

M. Tédenat pensa à un ulcère du duodénum coïncidant avec une cholécystite calculeuse.

10 janvier. — Cholécystectomie. Incision de Mayo Robron. Vésicule non adhérente. Evacuation par ponction capillaire de 150 grammes de


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sang. Opération rapide et facile. Cicatrisation complète en vingt-trois jours, avec écoulement de bile du cinquième au douzième jour.

La vésicule a sa paroi légèrement amincie, de couleur rouge foncé et un plexus veineux très développé, surtout au voisinage de son col. Une injection poussée par le canal cystique permet de la distendre sans violence jusqu'à 250 grammes d'eau. Incisée de son fond jusqu'à l'origine du canal cystique, on y voit, au niveau du col, un papillome siégeant sur son bord postérieur, dont il occupe un peu plus de la demi-circonférence, long de deux centimètres, épais de un centimètre à sa partie moyenne, s'amincissant à ses extrémités. L'ensemble du néoplasme, grenu, dur, présente par place des arborescences dendritiques. La muqueuse de la vésicule présente, sous forme exagérée, les saillies qui circonscrivent les petits espaces déprimés de la muqueuse normale.

L'examen microscopique montre sur des coupes perpendiculaires un plan de la paroi vésiculaire du tissu fibroïde, avec quelques rares cellules rondes et des culs-de-sac à épithélium plat. A la surface, revêtement épithélial à cellules cylindriques. Les couches externes ont un aspect normal.

A noter que les oeufs conseillés à la malade depuis le début de ses souffrances parurent, à plusieurs reprises, les augmenter et accroître la distension de la vésicule. En celle-ci il n'y avait pas de vrais calculs, mais une espèce de bouillie qui, prise entre les doigts, donnait l'impression de menus grains qui s'écrasaient par la pression. L'examen chimique n'en fut pas pratiqué. Eut-il montré qu'il s'agissait de grains de cholestérine ou de sable calcaire ?

J'ai revu Mme D... avec le docteur Dussaud en juillet 1916 (six ans après l'opération). Elle était en parfaite santé, digérant bien et sans aucune souffrance du côté de l'abdomen.

OBSERVATION II

Hématocholécyste pendant la convalescence d'une fièvre typhoïde. Cholécystectomie. Ulcération siégeant au fond de la vésicule. Guérison.

Auguste Aub..., 38 ans, cocher, fortement constitué, pas d'alcoolisme, pas de syphilis. Fièvre typhoïde grave du 15 avril au 25 mai 1895. La convalescence se faisait bien quand, le 20 juin, survint une douleur violente à l'épigastre. Elle dure cinq heures, avec nausées et deux vomissements. Injection de morphine. Le lendemain, 21 juin, la douleur se localise à la région de la vésicule qu'on sent distendue et dépassant le rebord costal de quatre travers de doigt. P. : 100. T. : 38° le matin, 38°5 le soir. 22 juin, même douleur à peine un peu diminuée et exigeant encore une injection de morphine. Même volume de la vésicule. 25 juin au matin : vraie crise de coliques hépatiques, moins intense que la crise du 20 juin. T. : 38°4, pas d'ictère. Le 2 juillet, les douleurs persistaient, mais légères ; la vésicule restait distendue. Selles noires par présence du sang depuis trois jours.

3 juillet : éthérisation. Incision de Beevan. Légères adhérences récente; autour de la vésicule. Compresses protectrices. Incision de la vésicule remplie de sang noir, en faible partie coagulé. Le sang est évacué avec le


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doigt. Alors du sang coule rouge assez vif. L'hémorrhagie est tenace, quoique peu abondante. M. Tédenat se décide à enlever la vésicule. Il la bourre de gaze, la décolle facilement et l'excise après ligature du cystique et de son artère. Le cholédoque exploré au doigt (extus) et à la sonde (intus) est libre et ne contient pas de calculs. Drain flanqué d'une mèche de gaze. Suture de la paroi abdominale. 15 juillet : cicatrisation parfaite, sans incidents post-opératoires.

Depuis l'opération, Aug. Aub... jouissait d'une excellente santé quand, cinq ans après, il succomha à une hernie étranglée opérée au huitième jour, en pleine péritonite et gangrène de l'anse herniée.

L'examen de la vésicule montra, vers le fond, une ulcération de deux centimètres en carré, avec des vaisseaux dilatés sur le pourtour de l'ulcère assez profond et par des calculs. L'examen microscopique n'a pas été fait.

OBSERVATION III

Enorme hémalocholécyste. Epithélioma du fond de la vésicule biliaire. Mort deux mois après l'opération.

Le docteur Philippe F... me donne sur son père, âgé de 68 ans, les renseignements suivants : santé robuste, pas d'excès alcooliques. Depuis huit mois, douleurs fréquentes dans la région du foie, surtout après les repas. Ces douleurs durent deux ou trois heures, puis disparaissent, ne laissant qu'une vague pesanteur. Depuis cinq ou six semaines, ces douleurs sont permanentes, surtout très vives après les repas, mais la vésicule reste volumineuse. Loin des repas, elle dépasse le rebord costal de trois travers de doigt, de cinq à six au moment des crises. A plusieurs reprises, on a constaté un mélona très net. Le malade se nourrit mal ; dégoût des aliments, nausées fréquentes, souvent des vomissements après le plus léger repas. Amaigrissement de 10 kilos.

10 avril 1898. Masse noduleuse du volume de la paume de la main audessous du rebord costal droit. Pâleur subictérique. Ventre ballonné, un peu d'ascite. Anesthésie à l'éther. Epais rouleau sous la région lombodorsale. Incision de Beevan. Adhérences dures et épaisses unissant le rebord du foie à l'estomac et au duodénum. Elles sont déchirées, incisées. Suintement sanguin tenace. La vésicule apparaît, par son quart inférieur, blanchâtre, épaisse, vaguement noduleuse. Elle est incisée sur une longueur de trois centimètres. Il s'écoule du sang noir accumulé dans sa cavité (150 gr. environ). On voit sur sa coupe une masse néoplasique noduleuse, avec quelques longues végétations. Un bloc du volume d'une noix est excisé, le reste est touché au thermocautère dans le but de tarir le suintement sanguin assez abondant et tenace. Drain et suture de l'incision. A noter des nodules néoplasiques sentis au doigt sur le grand épiploon et la région du pylore.

Le malade a été soulagé de ses coliques pendant une quinzaine de jours. Par le drain laissé dix jours se faisait un léger écoulement sanguin et une sérosité abondante obligeant de changer le pansement matin et soir. Ce


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suintement a persisté, variable mais peu abondant, jusqu'à la mort survenue le 1er juin, c'est-à-dire cinquante jours après l'opération. Vomissements fréquents, ascite, oedème des membres inférieurs, tuméfaction massive et noduleuse au voisinage de l'ombilic.

L'examen microscopique a montré les lésions d'un épithélioma à cellules cylindriques courtes, à gros noyau basai, plus développées dans des fentes multiples plus ou moins perpendiculaires au plan des coupes. Stroma fibroïde abondant.

Communication de M. le Pasteur HENRY

Essai d'interprétation d'un texte très mutilé, le Psaume CX

(CIX du grec et du latin) (Académie des Sciences et Lettres — Séance générale du 28 avril 1919)

M. Henry donne lecture de sa communication sur : Un texte très mutilé. Le Psaume CX (Grec-Latin CIX). Essai d'interprétation.

Ce psaume est très connu des lecteurs de l'Ancien Testament. Il figure dans l'office des vêpres.

Questions préalables. — Comment se présente un texte biblique devant son critique ? 1 ° Ce sont des textes vocalises, alors que jusqu'à saint Jérôme, et sans doute bien après, il n'y avait que le texte consonnantique d'écrit. D'où il résulte que la vocalisation est déjà un commentaire ; 2° l'auteur de la communication relève la possibilité des doubles lectures pour un seul vocable ; 3° l'accentuation constitue un troisième commentaire surajouté au texte ; 4° il faut aussi tenir compte des confusions paléographiques très possibles ; 5° l'accident fréquent des gloses tombées dans le texte ; 6° autres causes d'altérations : les passions politiques et religieuses du milieu où le texte s'est produit.

De ces causes, lesquelles ont joué pour amener l'altération du Ps. CX.

Examen du psaume : 1 ° dans le texte de la Vulgate ; 2° dans celui des Septante ; 3° dans l'hébreu massorétique. Les trois textes sont, en bien des endroits, également inintelligibles ; le texte massorétique paraît plus complet, bien qu'également en désordre.

L'auteur de la communication propose un certain nombre de corrections appuyées sur les versions des Septante, de Symmaque et d'Aquila.

Il relève ce fait déjà signalé que le! Psaume CX est l'acrostiche du nom de Simon.

Passant ensuite à l'examen de la situation politique qu'on peut déduire de ce psaume, on fait remarquer que jamais, avant l'époque macchabéenne, il n'y a eu de prêtres-rois en Israël. Il s'agit donc très probablement de Simon Macchabée, 144-105 (av. J.-C). Le psaume aurait été composé après 106, sous le règne d'Aristobule 1er, fils de Jean Hyrcan.


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Son but aurait été de déclarer par un oracle solennel que les rois-prêtres asmonéens sont prêtres légitimes et rois de droit divin, tout comme l'était l'énigmatique Melchisedech du midrash contenue au XIVe chapitre de la Genèse.

En terminant, l'auteur de la communication indique la grande influence que ce Psaume CX et son parent, le Psaume II, ont exercée sur la théologie des premiers siècles de l'ère chrétienne dans la construction du dogme christologique.

ALLOCUTION

prononcée par M. le Président RACANIE-LAURENS à l'occasion de l'armistice.

(Séance du 29 novembre 1918)

MES CHERS CONFRÈRES,

Depuis notre dernière séance du mois de juillet, il s'est produit de tels événements que vous me reprocheriez certainement d'inaugurer nos travaux de cette année sans saluer la victoire de notre chère Patrie et sans rendre hommage aux ouvriers de cette victoire.

On l'a déjà fait avec une vibrante éloquence le jour de la rentrée solennelle des Facultés, où nous avons applaudi de tout coeur le discours magistral de M. le Doyen Vianey, et les accents si profondément et si légitimement émus du chef de notre Université, M. le Recteur Benoist. On l'a fait aussi en termes non moins heureux aux dernières séances de notre Section des Sciences par l'organe de M. le Président Massol, et de notre Section des Lettres, où M. le Président Mercier, ancien capiatine de notre armée, s'est fait l'interprète, très autorisé à tant de titres, de la pensée de tous.

A raison de ces précédents, j'ose à peine vous dire, à mon tour, notre joie et notre fierté de voir le drapeau tricolore, après quarante-sept années de séparation et de deuil, flotter sur le Palais de l'Université de Strasbourg et sur son admirable cathédrale, comme sur celle de Metz, en même temps que le drapeau belge flotte sur l'Hôtel-de Ville de Bruxelles, sur l'Université de Gand, si dignement représentée ici par notre distingué collègue, M. le professeur Gesché ; enfin, sur les ruines de l'Université de Louvain, immortalisée par la sauvage barbarie d'une race vouée à l'exécration universelle !

Nous ne témoignerons jamais assez notre reconnaissance à ceux qui ont accompli cette oeuvre grandiose, dont la réalisation semblait si loin de nous il y a quelques mois à peine ; à Clemenceau, ce grand Français, qui


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a vu, mieux que tout autre, se former autour de son nom cette union sacrée dont la continuation après la paix est si souhaitable pour notre cher pays; au glorieux maréchal Foch — qui, ainsi qu'on le sait, a tenu garnison à Montpellier, où il était officier d'état-major, de 1890 à 1892 ; — au maréchal Joffre, — lui aussi ancien capitaine du génie à Montpellier, — tous les deux enfants du Midi, comme le général de Castelnau, le parent et l'ami d'enfance de celui qui vous parle ; au maréchal Pétain, aux généraux Gouraud, Mangin, Debeney, Fayolle, à tant d'autres encore, dont les noms, avec ceux du général Pershing et de Lloyd George, inscrits au Livre d'or de l'Histoire de France, ou plutôt de l'Histoire universelle, seront désormais immortels !

A côté de ces noms figureront aussi, auréolés de la même gloire, ceux du président Wilson, de Leurs Majestés le roi Albert 1er, cette haute personnification de la droiture et de l'honneur ; George V, notre hôte d'aujourd'hui ; des rois d'Italie, de Roumanie et de Serbie, de tous nos autres fidèles alliés.

Ils ont noblement relevé le prestige des Chefs d'Etat, si gravement atteint par la fuite honteuse de l'infâme Guillaume II et de tous les siens, sortis sains et saufs de l'effroyable tourmente que leur criminelle folie avait déchaînée sur le monde et qui, après avoir fait des millions de victimes et semé sur leurs pas tant de ruines et tant de deuils, n'ont même pas eu le courage de chercher la mort dans un combat final !

Nous ne saurions oublier toutefois, dans la joie de notre triomphe, que cette victoire est faite de sanglants sacrifices : 1.700.000 Français sont tombés au champ d'honneur !... Chefs renommés, officiers d'un haut mérite, soldats obscurs, tous réunis dans l'égalité dé la mort comme ils le sont dans notre reconnaissance, nous saluons avec un respect religieux votre mémoire vénérée, et j'adresse ici un souvenir particulier et profondément ému aux fils des membres de notre Compagnie qui ont généreusement versé leur sang pour le salut de notre chère Patrie : MM. Benoist, Astre, Berthelé, Brémond, Cazalis dé Fondouce, Grasset, et j'en omets peut-être d'autres, si nombreuses ont été ces nobles victimes!

Puissent leurs familles, douloureusement étreintes par cette immense et bien légitime affliction, trouver une consolation et un réconfort dans la pensée que leur sacrifice n'a pas été inutile et qu'ils ont sans doute déjà reçu les récompenses éternelles de Celui auquel nous devons avant tout témoigner notre gratitude infinie !

Gesta Dei per Francos !


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ALLOCUTION

prononcée par M. le Président RACANIE-LAURENS à l'occasion de la mort de M. GENNEVAUX.

MES CHERS CONFRÈRES,

Les joies de la victoire ne sauraient nous faire oublier ceux qui sont morts avant d'avoir pu les goûter. Notre distingué confrère, M. Maurice Gennevaux, a été malheureusement de ceux-là et c'est à l'âge de trentesept ans seulement, alors qu'un avenir plein de promesses lui semblait réservé, qu'il a été enlevé à notre estime et à notre affection. On a dit, non sans raison, que ceux qui meurent jeunes sont aimés des dieux et que les tout jeunes qui s'en vont ainsi, n'ayant connu de la vie ni les difficultés, ni les chagrins, ni les laideurs, sont des bénis. S'il en est bien ainsi — et les heures inoubliables que nous vivons en ce moment pourraient nous en faire douter — M. Maurice Gennevaux est parmi les bénis. Son existence fut bien courte, mais elle fut du moins bien remplie, et il est peu d'hommes de son âge qui aient accompli une tâche aussi laborieuse et aussi féconde. On l'a rappelée en excellents termes dans une notice nécrologique où les lettrés ont cru reconnaître la plume exercée et la haute compétence de l'un des membres de notre Académie, qui était aussi le collègue de M. Gennevaux à la Société archéologique. Vous me pardonnerez d'y faire quelques emprunts. Contrairement aux emprunts habituels, ils augmenteront, s'il en était besoin, la richesse de notre patrimoine, le débiteur n'ayant ni l'obligation ni la possibilité de payer sa dette.

Tout jeune, notre collègue s'était passionné pour l'étude de la géologie. Il fut l'un des élèves les plus assidus et les plus enthousiastes de l'éminent et regretté Doyen de la Faculté des Sciences, M. le professeur de Rouville, dont le nom est doublement et si bien représenté au sein de notre Compagnie. Par une pente toute naturelle, la géologie l'amena à la paléontologie et à la préhistoire, qui fut pour lui le chemin de l'archéologie, sa science préférée. Sa jeune renommée le fit admettre rapidement au nombre des membres résidents de notre Société archéologique, et bientôt après il était choisi comme conservateur de ses précieuses collections. « Noblesse oblige », et c'est surtout depuis ce moment qu'il s'occupa, avec une inlassable ardeur, de l'étude de tout ce qui se rattachait au passé de la région montpelliéraine, depuis les grossiers instruments de l'âge de pierre jusqu'à ces belles faïences des XVIIe et XVIIIe siècles, ou à ces merveilleuses plaques de cuivre qui firent l'ornement de cette intéressante exposition « du Vieux Montpellier », organisée il y a deux ans, à la Préfecture, par M. l'avocat général Creissels, et dont le succès fut si grand, beaucoup grâce à notre collègue, malgré les angoissantes préoccupations de la guerre.


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M. Gennevaux y prenait part comme tous les bons Français ; quoique d'une santé délicate qui l'eut dispensé de tout service, il n'avait pas hésité à contracter un engagement volontaire, et c'est dans un hôpital militaire qu'il a trouvé la mort.

Parmi ses plus importantes découvertes, il convient de signaler celle d'une station néolithique sur le domaine de la Taillade, près de la Mosson. Il en fit une intéressante étude qui a été publiée dans le Bulletin de la Société languedocienne de Géographie.

M. Gennevaux avait aussi, à une date récente, entrepris des recherches fructueuses à Castelnau, sur l'emplacement de la station romaine de Substantion, où il a notamment sauvé d'une destruction certaine une admirable mosaïque romaine, comme il devait découvrir — et c'est l'un de ses titres les plus précieux à la reconnaissance du monde savant — des monuments lapidaires d'origine gauloise de la plus grande rareté et d'un haut intérêt pour l'histoire de la période préromaine.

Je ne saurais oublier que, grâce à ses fouilles incessantes du sol de Montpellier, et particulièrement des sablières de la Pompignane, il en a retiré des documents paléontologiques de grande valeur dont il avait formé une inestimable collection.

Comment ne pas rappeler enfin avec quelle ardeur — dont l'origine était due à la passion de l'archéologue, doublée de la foi du croyant — il poursuivit dans les premiers mois de l'année 1914, en collaboration avec la très regrettée Mlle Guiraud, les fouilles laborieuses qui devaient mettre au jour les restes de la vénérable crypte de l'ancienne église de NotreDame des Tables et une partie de sa chapelle souterraine, sur l'emplacement occupé autrefois par la Halle aux Colonnes, et l'on peut dire à juste titre que le dessous, si longtemps ignoré, valait mieux que le dessus.

Malgré son rare mérite, M. Gennevaux était d'une extrême modestie et, pressé bien souvent de publier le résultat de ses travaux, il a rarement consenti à le faire, estimant — contrairement à l'avis de tous — que son apport scientifique était encore insuffisant. On peut cependant signaler parmi ses principaux travaux une étude sur Un nouveau gisement de mammifères eogènes aux environs de Montpellier, publiée en collaboration avec M. Roman, de l'Université de Lyon, et des Recherches spéléologiques dans la région de Saint-Loup, en collaboration avec M. Albert Mauche.

M. Gennevaux — qui n'avait certes point suivi le conseil de Pascal : « Tout le malheur des hommes vient de ne pas savoir se tenir en repos dans une chambre » — était, malgré ses occupations, très assidu à presque toutes les séances de l'Académie, soit à la Section des Lettres, dont Il faisait partie, soit à nos séances en Assemblée générale. Sa rare érudition et sa parfaite courtoisie y étaient hautement appréciées de tous. Il nous avait fait cette année — et il devait compléter prochainement — une communication d'un grand intérêt sur les fouilles d'Enserune, près de Béziers. Il les avait visitées, comme délégué de la Société archéologique, en même temps que MM. les professeurs Salomon Reinach, Pottier et Cartailhac, et nous avait décrit, avec une compétence toute particulière, le cimetière


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ibérique découvert là par M. Mouret, en nous donnant de nombreux détails sur les vases grecs et le mobilier funéraire mis récemment à la disposition des savants par cette très importante découverte. Il projetait encore de nombreux travaux, quand la Mort impitoyable est venue le faucher avant qu'il eût terminé sa tâche, ce qui est, comme l'a si bien dit notre philosophe montpelliérain Renouvier, « la plus triste des tristesses de la vie ».

Si le confrère regretté, dont notre Compagnie conservera fidèlement le souvenir, a certainement ressenti cette tristesse, il a trouvé du moins la consolation suprême dans la pensée des espérances étemelles ! Puisse aussi cette pensée atténuer la douleur de sa famille que je prie, au nom de l'Académie, d'accepter l'expression sincèrement émue de notre profonde sympathie.

ALLOCUTION

prononcée par M. G. MERCIER-CASTELNAU, président de la Section des Lettres, à l'occasion de la mort de M. le Professeur MERLANT.

En ouvrant cette séance, j'ai à coeur d'adresser un souvenir ému à la mémoire d'un des meilleurs d'entre nous que la mort vient de nous enlever. Ce n'est pas ici le lieu de prononcer une oraison funèbre et de détailler ce que fut M. Joachim Merlant, professeur à la Faculté des Lettres de Montpellier et capitaine dans notre armée : d'autres l'ont dit ou le diront avec plus de compétence et d'autorité. Né en Bretagne, où sa famille s'était fixée, M. Merlant fut amené par les hasards de la carrière de son père, commissaire général de la marine, à passer son enfance à la Martinique — et ce séjour ne fut pas peut-être étranger à la formation de son esprit. Reçu à l'Ecole normale supérieure, il en sortit agrégé des lettres, passa par Lorient et Brest, et, dès qu'il eut soutenu sa thèse de doctorat ès lettres, il vint à Montpellier pour occuper à notre Université successivement les postes de maître de conférences (1er novembre 1909), de professeur adjoint (1er janvier 1912) et de professeur titulaire de littérature française (1er novembre 1918)) : il n'a pas eu le temps de prendre possession de sa chaire ; déjà la maladie l'immobilisait au Mont-des-Oiseaux.

Je ne veux point m'attarder à étudier le professeur incomparable que fut Joachim Merlant : ceux d'entre vous qui l'ont entendu ne peuvent oublier la clarté de son exposé, la sûreté de l'érudition, la finesse des aperçus, le charme prenant qui rayonnait de lui ; malgré son apparence frêle, et bien qu'il ne disposât pas d'un fort volume de voix, il la maniait avec une telle souplesse en même temps qu'avec une telle autorité, qu'il se faisait écouter d'abord, et puis peu à peu on était convaincu et séduit ; alors le charme


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opérait et l'on se laissait aller à sa suite partout où il lui plaisait d'entraîner ses auditeurs, certains d'aller avec lui très loin, très haut !

M. Merlant, dans le court espace de temps qui lui a été mesuré, a travaillé avec passion. Après sa thèse sur le Roman d'analyse depuis JeanJacques Rousseau, il publia, en 1907, un ouvrage sur Sénuncour, sa vie, son oeuvre, son influence. Puis il donna Notre Balzac où, dans un seul volume, il a rassemblé les meilleures pages du fécond et puissant romancier, chacun des morceaux précédé d'une explication de l'ouvrage dont il est tiré et accompagné de notes abondantes où se révèlent la variété, la finesse et l'étendue des connaissances du commentateur. Dans son livre : De Montaigne à Vauvenargues, il étudia ensuite le Moi ou l'Egotisme dans la littérature française; enfin, en 1917, il a fait paraître un Commentaire des oeuvres choisies de Musset, ouvrage déjà prêt au moment de la déclaration de guerre et dont la publication fut retardée. Là, comme pour Bal zac, il suit la même méthode, et ses notes se font plus abondantes, plus pénétrantes aussi. Il y a quelques jours à peine paraissait aux vitrines des libraires son livre sur l'Amérique et la Guerre de l'Indépendance. Merlant était mieux placé que quiconque pour parler de l'Amérique, parce qu'il la connaissait, qu'il l'avait parcourue, et que sur le sol américain il avait travaillé pour une grande cause, travail qui devait produire de magnifiques résultats.

C'est qu'en effet M. Merlant ne s'est pas contenté d'être professeur et écrivain ; à l'heure nécessaire, il a su agir. Incorporé au 122me régiment territorial d'infanterie dès le deuxième jour dé la mobilisation, il partit avec ce régiment désigné pour la place de Toulon à l'heure où nous pouvions craindre l'entrée en scène de l'Italie. C'est là qu'il m'a été donné d'apprécier ce que fut Merlant, plus qu'une intelligence, un caractère ; alors qu'il lui eut été facile de trouver à l'arrière, grâce à son âge et à sa situation, un poste de tout repos, il ne demandait qu'une chose : aller se battre sur le front, dans les Vosges, sur l'Est ; et je me souviens avec émotion de nos longues et amicales causeries dans les forts de la côte ou sur la place de la petite ville d'Ollioules, riante et calme, où il rongeait son frein, quand nous lisions avec angoisse les laconiques communiqués qui nous disaient à mots voilés les retraites successives de nos armées. Ses voeux furent enfin exaucés ; après la bataille de la Marne, on l'envoya sur sa demande au 3me de ligne, en Argonne et, de là, au 173me d'infanterie, où il fit héroïquement son devoir ; toujours sur la ligne pour donner l'exemple à ses soldats, actif, plein d'entrain, insouciant du danger comme un jeune sous-lieutenant de vingt ans, montrant une fois de plus, comme ses camarades les professeurs Babut, Stavlaux, Bonnefoy, Lafont et tant d'autres, qu'on peut être à la fois un homme d'études et un homme d'action.

Un jour, au bois Bouchot, près de Verdun, il fut grièvement blessé, et tandis qu'il souffrait sur un lit d'hôpital, un malheur irréparable le frappait encore : sa jeune femme mourait, lui laissant trois enfants en bas âge. Tout autre eut été terrassé par cette double blessure ; Merlant estima qu'il se devait à lui-même, à ses enfants, à la Patrie, de survivre ; par un effort de volonté il se redressa, décidé à agir plus et mieux encore. C'est


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alors que nous le vîmes entreprendre ce voyage en Amérique où, dans une série de conférences, il parla de la grandeur de la France et ne fut certainement pas étranger au mouvement de sympathie qui devait entraîner les, Etats-Unis à nous offrir leur concours pour incliner définitivement en notre faveur la victoire indécise. Par là, Merlant fit grande oeuvre, utile entre toutes, et, de retour en France, il continua auprès des soldats, des étudiants et du public, son apostolat. Ne voulant pas connaître la fatigue, refusant de se soigner, il allait plein de confiance, souriant à la victoire qu'il entrevoyait. Tant de fatigues accumulées lui commandaient de prendre du repos ; il se refusait à entendre les conseils de prudence, car il prenait de sa santé moins de souci que nous n'en avions pour lui. Chateaubriand disait de Joubert : « Il avait l'air d'une âme qui avait rencontré par hasard un corps et qui s'en tirait comme elle pouvait. » La grande âme de Merlant a su tirer de ce corps un service extraordinaire.

Et pourtant un moment vint où il fallut céder. Hélas ! c'était trop tard ! Après quelques semaines de repos au Mont-des-Oiseaux, dans le calme attiédi de la Côte d'Azur, où il croyait retrouver les forces nécessaires à une activité nouvelle, il s'est éteint doucement. J'imagine, s'il a vu venir à lui le grand mystère, qu'il l'a affronté sans appréhension et sans faiblesse, malgré la tristesse de laisser après lui trois jeunes enfants orphelins ; il avait, en effet, des convictions fortes qu'il ne craignait pas d'affirmer. L'an dernier, devant une assemblée de jeunes, il avait exposé le problème de l'idée chrétienne face à la guerre, et je me souviens d'un très beau passage où il rappelait une nuit de garde aux tranchées, une nuit d'hiver, sous la neige ; il parcourait les premières lignes pour s'assurer que les sentinelles veillaient. A ce moment, nous dit-il, une immense pitié emplit son coeur ; il eut voulu prendre sur lui les souffrances de tous ses soldats, souffrances physiques, souffrance morales, toutes les détresses connues ou inconnues de ceux dont il avait la garde. Mais il se sentit incapable de porter un pareil poids... Pour cette oeuvre, il fallait plus qu'un homme... il fallait un Dieu !... Alors sa pensée s'éleva jusqu'à Celui qui, jadis, avait pris sur lui et porté toutes les souffrances non pas seulement d'un groupe d'hommes, mais de toute l'humanité... Et il comprit, dans leur plénitude, la passion et l'amour complet du Christ sauveur. Ce fut, vous pouvez me croire, une très belle conférence, ce fut un puissant réconfort !

Comme un bon soldat qui est relevé de sa faction, sa garde terminée, Merlant a atteint le grand repos ; mais à nous, qui restons, il laisse un regret poignant, le regret de voir sitôt finie une vie aussi utile ; par sa valeur intellectuelle et sa valeur morale, il fut pour ses élèves, pour ses soldats, pour ses concitoyens, un bel excitateur de nobles idées et de sentiments élevés. Honnête homme, dans le sens ancien de ce terme, serviteur passionné de son pays, il laisse le bel exemple d'une vie harmonique consacrée au beau, au vrai, au bien. Messieurs, saluons sa mémoire et gardons pieusement son souvenir.


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ALLOCUTION

prononcée par M. MASSOL, président de la Section des Sciences, à l'occasion de la mort de M. le Professeur DELAGE.

MESSIEURS,

La Section des Sciences de notre Académie est particulièrement éprouvée ; après Ville, Planchon, Jules Castelneau, Meslin, nous venons de perdre, il y a quelques jours à peine, Delage, l'un de nos membres les plus anciens et aussi l'un des plus sympathiques, des plus estimés, des plus aimés de notre Compagnie.

Auguste Delage était né en 1849, à Chabanais, dans la CharenteInférieure. Après avoir fait ses études à la Faculté des Sciences de Paris, où il fut licencié en 1877, il se spécialisa dans la géologie et la minéralogie, et fit toute sa carrière dans l'enseignement. Il débuta pomme maître de conférences de minéralogie et d'exploitation des mines à Alger. Pour ses débuts, il se trouvait dans une région encore peu explorée, aussi se mit-il immédiatement à l'oeuvre. Il étudia la géologie de cette vaste contrée que l'on appelle le Sahel d'Alger et dressa plusieurs cartes de diverses échelles qui, au dire des spécialistes, constituent encore les documents les plus importants que l'on possède à l'heure actuelle sur cette région fi variée, si intéressante et si fertile de notre belle colonie.

En 1887, M. Delage fut nommé maître de conférences dé géologie et minéralogie à notre Faculté des Sciences, à côté du professeur de Rouville, à qui il succéda en 1894. Pendant 32 années sans interruption, Delage a étudié la géologie de notre région d'abord avec le professeur Paul de Rouville, ensuite seul, et enfin plus récemment avec M. Mourgues, maître de conférences de géologie.

J'emprunterai au discours prononcé au nom de la Faculté des Sciences par le professeur Curie, son collègue et ami, la liste si importante des travaux de notre savant et regretté collègue.

Tout d'abord il fut le collaborateur du professeur de Rouville et publia avec lui une série de mémoires sur les porphyrites de Gabian, les porphyrites de Cavenac, le Cambrien de l'Hérault, le Dévonien inférieur, le Cambrien de Vélieu.

La région de Cabrières, si difficile et si compliquée, attira longtemps l'attention des deux savants géologues, et les beaux travaux qu'ils ont publiés ont fait de cette partie de notre département une Région devenue classique au point de vue du Cambrien, du Dévonien et du Silurien.


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Non moins importants furent leurs travaux sur la région du Pic Saint-Loup, dont ils ont montré la formation toute particulière et dressé la carte géologique détaillée à l'échelle du 1/40.000.

Vient ensuite une vaste étude sur le terrain primaire de l'arrondissement de Saint-Pons, avec carte géologique au 1 /80.000, et enfin une série de notes sur le paléozoïque central de l'Hérault, sur les terrains éocène et oligocène de la région de Montpellier, sur les phosphates du Gard, sur le genre lithotamnium dans le miocène de Montpellier.

M. Delage, devenu professeur titulaire depuis 1894, collabore ensuite avec son maître de conférences, M. Mourgues, notre collègue dans cette Académie.

Je citerai d'abord deux études importantes sur la pétrographie des Cévennes : la région de l'Aigoual et la région de Mont-Lozère, avec deux cartes géologiques au 1/200.000 ; puis une série de notes sur un gisement de phosphate de chaux au village de Bouzigues, sur la découverte d'un Lophiodon à Fonfroide dans le terrain lacustre des environs de Montpellier, sur les alluvions quaternaires du Lez, sur la terre réfractaire de Murviel qui est Utilisée pour la confection des poteries, sur le travertin de Saint-Gély du Fescq à Flore de Sézanne, enfin une étude générale sur le terrain lacustre du Languedoc.

Une série de recherches des plus intéressantes sur la constitution de la terre arable ont été poursuivies pendant plusieurs années par M. Delage en collaboration avec M. Lagatu, professeur à l'Ecole d'Agriculture. La détermination des éléments constitutifs du sol cultivé, la connaissance de leur nature minéralogique et de leur constitution chimique présente une importance capitale pour les agriculteurs ; les travaux de ce genre ont un intérêt particulier aussi bien au point de vue pratique qu'au point de vue scientifique.

Enfin, vous avez tous, Messieurs, présentes à la mémoire la série des communications si intéressantes que nous fit notre regretté collègue en 1912 et 1913, lorsqu'il nous rendit compte de sa découverte de toute une série d'empreintes de pied laissées par des quadrupèdes de grande taille dans le permien inférieur de l'Hérault, c'est-à-dire dans les schistes à Walchia ou schistes de Lodève. En nous montrant les diverses photographies qu'il avait prises, M. Delage nous faisait observer qu'il s'agissait d'empreintes absolument nouvelles et uniques en ce sens qu'on n'en avait signalé nulle part de pareilles. La largeur atteignant au niveau des doigts jusqu'à 15 centimètres, elles avaient été nécessairement laissées par des quadrupèdes de grande taille, par des animaux gigantesaues : or, le seul reptile permien décrit jusqu'alors avait seulement la taille d'un lézard ! Enfin la nature du terrain devait faire considérer ces animaux, qu'il dénomma Permomégathérium Zailleri, comme les plus anciens qui aient jamais été signalés en France.

M. Delage fut admis comme membre titulaire de la Section des


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Sciences de notre Académie en 1891, et pendant longtemps il compta parmi les plus assidus à nos séances. Vice-président en 1898 et président en 1899, il nous a entretenus constamment de ses travaux, et l'on peut retrouver la trace de la plupart d'entre eux dans nos Mémoires et dans nos Bulletins.

Je me suis borné à une simple énumération, elle a suffi certainement à montrer quelle somme considérable de travail ils représentent, et leur importance assurera à notre savant collègue une place dans les sciences géologiques.

Le savant était doublé d'un professeur consciencieux, qui a travaillé sans relâche jusqu'au dernier jour. Le mardi 7 mai, M. Delage avait fait son cours et passé plusieurs heures au laboratoire avec ses élèves; leur donnant rendez-vous pour le lendemain, il rentrait chez lui et quelques heures après décédait subitement.

Dans notre Académie, Delage avait su s'attirer l'estime et la sympathie de tous par la droiture de son caractère, sa franchise et sa simplicité : c'était un modeste à l'âme sensible, au coeur généreux. Nous avons entendu sans surprise l'un de ses élèves venir affirmer devant sa dépouille mortelle « qu'il aimait ses élèves et que ses élèves l'aimaient ». Je puis dire à mon tour que dans notre Académie Delage comptait de solides amitiés et que tous nous conserverons longtemps son souvenir.

Permettez-moi, au nom de l'Académie, d'adresser à sa famille, si subitement et si cruellement frappée, l'expression de notre respectueuse et profonde sympathie.

G. MASSOL, Président de la Section des Sciences.

Lettre de Mme de Lavèvre à M. le Président de l'Académie

Montpellier, le 12 mars 1919.

MONSIEUR LE PRÉSIDENT,

Mon frère regretté, M. Henri de Lunaret, avait toujours eu le goût de la littérature et des arts. Il l'a témoigné aussi bien par ses dispositions dernières que par la citation de Pline le Jeune, rappelée en tête de son testament : « S'il n'est pas en notre pouvoir de vivre longtemps, laissons du moins après nous quelque oeuvre qui atteste que nous avons vécu. »

J'ai su par vous, qu'encouragé par votre fidèle et trop indulgente amitié, comme par celle de notre cousin, le docteur Grasset, il avait


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même eu un moment la pensée, un peu téméraire peut-être, de se laisser présenter aux suffrages de votre savante Compagnie.

La mort ne lui en a pas laissé le temps ; mais j'ai la conviction que si sa candidature avait été favorablement accueillie, il aurait très probablement songé à donner à l'Académie quelque témoignage de son intérêt et de sa gratitude.

Je crois donc m'inspirer de ses intentions, et rendre hommage à sa mémoire, en vous priant de remettre en son nom à l'Académie la somme de mille francs pour faciliter l'impression de vos travaux.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes sentiments distingués.

LUNARET-LAVÈVRE.

Lettre de M. le Président et de M. le Secrétaire général de l'Académie à Mme de Lavèvre.

Montpellier, le 14 mars 1919. MADAME,

Nous avons l'honneur de vous adresser, au nom de l'Académie, nos respectueux remerciements pour le don généreux que vous avez bien voulu lui faire en mémoire de M. Henri de Lunaret.

Si votre frère regretté, dont les dispositions testamentaires sont d'une si haute inspiration, et qui fut l'insigne bienfaiteur de notre Cité et de la Société Archéologique, avait pu réaliser son intention de se présenter à nos suffrages, sa candidature eut été certainement accueillie avec la plus grande faveur.

La mort ne lui en a pas laissé le temps, mais soyez du moins assurée que son souvenir, comme le vôtre, seront fidèlement conservés dans notre Compagnie qui eut été heureuse de le compter au nombre de ses membres, et veuillez bien trouver ici, Madame, avec nos respectueux hommages, l'expression réitérée de notre vive gratitude.

Le Président de l'Académie,

Gaston RACANIÉ-LAURENS.

Le Secrétaire général,

G. MERCIER-CASTELNAU.



Adresser les manuscrits et épreuves au

Secrétaire général, M. G. MERCIER-CASTELNAU

Rue Fournarié, 3, Montpellier




Prix qui seront décernés

par l'Académie des Sciences et Lettres

de Montpellier

En 1920

1° Prix Alphonse Jaumes

Mémoire sur un sujet de médecine légale au choix des concurrents.

La valeur du prix put atteindre le montant de quatre années d intérêts d'une somme de 30,000 francs placée en rente sur l'Etat.

2° Prix Alphonse Jaunies

Mémoire sur un sujet de pathologie et de thérapeutique générales au choix des concurrents.

La valeur du prix peut atteindre le montant de trois années d'intérêts d'une somme de 30,000 francs placée en rente sur l'Etat.

Pour les deux prix ci-dessus, les Mémoires manuscrits ou imprimés devront être déposés au Secrétariat de l'Académie (Palais de l'Université) avant le 31 décembre 1919.

Sont exclus des concours ci-dessus les travaux ayant plus de quatre ans de date, ceux qui auront été présentés la même année ou qui auraient pris part antérieurement à d'autres concours. Les Mémoires doivent être écrits en français.

Le Secrétaire général,

G. MERCIER-CASTELNAU.

Le Président,

G.-R. LAURENS.