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Titre : Un mâle : fragments / Camille Lemonnier

Auteur : Lemonnier, Camille (1844-1913). Auteur du texte

Éditeur : Messageries de la Presse (Bruxelles)

Éditeur : Librairie universelle (Paris)

Date d'édition : 1888

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb30788471s

Type : monographie imprimée

Langue : français

Langue : Français

Format : 8 p. ; 19 cm

Format : Nombre total de vues : 8

Description : Collection : Anthologie contemporaine des écrivains français et belges ; série 3, vol. 31, n°7

Description : Avec mode texte

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5528921h

Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, 8-Z-11501 (31)

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 04/05/2009

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avait l'air de rouler sous les tables et par moments était dominé par des éclats de voix plus hauts.

Dans l'intérieur des cabarets, une fumée bleue battait les plafonds et de là retombait en nuage sur les gens assis. Des dos s'arrondissaient dans des sarraux indigo, lustrés par les filées de jour qui passaient sous les siores demi-clos. Des coudes nageaient dans de la bière; sur les faces plus rouges grandissait l'ivresse.

Tout le monde fumait. Des étincelles braséaient au creux des pipes. Ça et là, une allumette éclatait, lueur phosphorescente dans l'obscurité brune. Les bouches rejetaient les bouffées de tabac, bruyamment; des salives claquaient à terre; parfois, un hoquet mettait comme une coupetée brusque sur le ronflement de toutes les voix parlant ensemble.

On entendait tinter les verres sur les plateaux portés par les servantes. Celles-ci, la robe troussée, circulaient difficilement, bousculées par l'animation générale. Un juron leur sortait des lèvres alors, tandis que les plateaux chaviraient à moitié dans un large épanchement de liquide. Puis des poussées les prenaient en flanc. Des mains talaient leurs gorges, par dessus les plateaux, et elles avaient à se défendre contre des libertés de gestes. L'échauffement des esprits se mêlait d'un peu de lubricité à la vue de celte chair mafflue qui frôlait les tables ; et à chaque verre, l'effervescence s'accroissait. Les torses se tassaient sur les chaises. 11 y avait des écrasements d'épaules lelong des murs. Des gens avaient l'air de s'être effondres sous une tapée de coups de poing. Les mains faisaient dans le vide des mouvements vagues. Lentement, la bière assommait cette cohue.Et une odeur de brassin montant des caves où fermentaient les futailles, achevait de griser les cerveaux.

Dans les cours, le brouhaha n'était pas moindre. On criait, on cognait les tables, des rires battaient les feuillages et le bruit s'augmentait autour des jeux de quille, et du roulement des boules et des chamaillis de contestations. A tout instant, la boule partait, frappait la planche d'un coup sec, puis ronflait à ras du sol jusqu'à l'instant où les quilles cognées s'abattaient. Toutes les voix éclataient alors, criant le nombre des quilles abattues. Les joueurs avaient des trognes rouges sur lesquelles les charmilles mettaient un reflet vert clair. Midi tomba sur la soûlerie.

Des grillements de beurre à la poêle sifflèrent dans les maisons. On entendit remuer les vaisselles dans les bahuts, et dans le relent des fumiers chauffés par le soleil, passa une odeur grasse de soupe au lard. Le besoin de manger crispant les estomacs, les cabarets se vidèrent. Les hommes allèrent nourrir leur ivresse d'une tranche de boeuf; quelques-uns, après avoir mangé, se jetèrent pendant une heure sur des bottes de paille, au fond des hangars. Le soleil cuisait, du reste, allumant une réverbération aveuglante, à ras du pavé.