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Titre : Le Quotidien de Montmartre : journal hebdomadaire / directeur : Jules Bastia

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1930-06-15

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb421267926

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb421267926/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

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Description : 15 juin 1930

Description : 1930/06/15 (A2,N41).

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5504651t

Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, LC2-1681

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 06/02/2011

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2» ANNÉE. — N» 41.

JOURNAL HEBDOMADAIRE

Directeur : JEAN BASTIA

Dimanche 16 Juin 1930

CHI VA AU PIANO VA IAHTAMQ

Nous entrons dans l'ère des concours du Conservatoire. C'est une vieille maison prise. Or, les maisons aujourd'hui ne sont plus prises. Elles sont blanches, propres, aérées, les façades révèlent la ligne droite et le bon sens. -

Du Conservatoire sortent, tons les ans, des tragédiens qui beuglent le vers comme on le beuglait avant eux, des ingénues qui minaudent éternellement et de même façon que le. petit chat, et. des pianistes. Ah t les pianistes !...

Comment peut-il y avoir encore autant de pianistes à l'âge du phono ?

Le phono a sur .le pianiste cet

avantage qu'on l'arrête quand on

veut.

Tandis que le pianiste vous impose

. ses acrobaties dactyles jusqu'à ce

que votre mort s'ensuive.

Je sais bien que nous avons opposé au pianiste le dédain le plus complet. Qui les écoute encore ?

Ils s'en moquent, d'ailleurs, et continuent de jouer. Au fond, ils ne jouent que pour eux-mêmes et se fichent qu'on les écoute ou non.

Tandis que le phono, lui, si on oublie de le remonter, s'arrête.

Il n'y avait personne à qui l'on prêtait moins d'attention qu'au pianiste louant une page de muslone savante. Il était reçu partout, invité de tous côtés pour, après le rincebouche, s'asseoir devant son meuble et charmer, soi-disant, rassemblée. ' Dès qu'il avait tapé les premières notes, les conversations particulières allaient leur train, couvraient sa voix et fournissaient un accompagnement qui n'était pas dans la partition ni le morceau interprété.

Quand un tragédien vient déclamer la Mort du loup, ou la jeune première débiter les stances de la Fiancée du timbalier^ il règne dans l'assistance un silence • presque . » relatif : quand le violoneux râpe ses boyaux de chat, déjà des chuchotis se font entendre : mais quand c'est le tour du pianiste, alors tout le monde y va, à voix haute, de ses histoires personnelles ou de ses médisances générales.

J'ai connu un pianiste qui avait un truc. Il usait d'un morceau de piano relativement court, composé d'un thème, d'une reprise d'à capo et d'une coda. L'auditoire écoutaitil ? H jouait le morceau tel qu'il se présentait et ça n'était pas long. Mais s'il n'écoutait pas, l'autre n'en finissait plus : il reprenait indéfiniment le thème, laissant de côté là coda, évitant d'y glisser, se redressant immédiatement, alors qu!il était à la fin de l'air, retrouvant *dn souffle et imposant encore une fois, et dix fols, et vingt fois, le sempiternel thème. Quand il y avait uiiie demi-heure qu'il jouait ainsi, oh commençait A s'inquiéter autour de lui, quelqu'un plut intelligent comprenait, at disait aux autrei

qu'il fallait se taire si l'on voulait qu'il finît.

On écoutait alors, ou l'on faisait semblant. Lui, pour remercier du silence rétabli autour de son clavier, aboutissait enfin à cette coda seulement éloignée par son bon vouloir.

L'Homme est

roseau dansant

Le championnat de danse vient d'avoir Heu. . Car la danse a cessé d'être une récréation.

C'est devenu un sport.

Nous savions, à considérer le visage tourmenté des danseurs, que la danse n'était plus un amusement.

Comme dit Sacha dans le couplet de l'Amour masqué :

Je n'eonnais rien Qui soit plus affligeant

Que ces feun's gens Surtout quand ils dans'nt bien.

Quand ils dans'nt mal Au moins ils s'amus'nt bien

Et puis, enfin,' Ils ont l'air d'être au bal...

Les danses ont cessé d'être gaies depuis qu'elles sont devenues compliquées,- mathématiques et rythmiques au point d'être arythmétiques. Autrefois, on nommait des danseurs aux emplois de calculateurs ; aujourd'hui, les danses modernes exigent de sérieuses connaissances

connaissances calcul. Il faut' jêtre fort en maths pour faire un bon danseur.

De Centrale, de Polytechnique, les premiers numéros sortent maintenant dans la danse. C'est que les pas, contre-pas, figures, etc. ne sont pas à la portée de n'importe quel bon comptable.

La danse a déjà eu ses morts, comme l'automobile et l'aviation ; elle a eu ses Six-Jours comme le cyclisme. Oh a vu des champions tourner, compter, fox-trotér, pnestoper — ce qui ne veut pas dire «stopper» — pendant un temps qu'on peut bien mieux employer à sester calme.

Quel dommage, en effet, que ces sortes d'épreuves ne s'appliquent pas à des besognes plus utiles :

Si M. le Chef des travaux de voirie de la ville de Paris avait l'idée de lancer les Six-Jours de pavage — en langage sport : « the paving » — avec prix et primes offertes par le monde des théâtres qui, après ,.le spectacle, viendrait pour voir, des trottoirs, les athlètes paveurs poursuivre leur besogne et s'attaquer aux records ; si l'Auto publiait leur portrait en première page, gageons que la ville serait, en un tournemain, refaite à neuf.

Et les Six-Jours des peintres en bâtiment : the picturing 1...

Et les Six-Jours des expéditionnaires du ministère : the fonctionnaring t...

Il n'y a qu'à changer les vocables : dire au lieu de travail : sport ; en place de chantier : piste ou ring : appeler la journée de huit heures : attaque du record de durée. Un jeu de mots.

— Et il appelle ça une nuit d'orgie

SUR PLAN

■— Monsieur l'Architecte... Ma fiancée...

— Mademoiselle, enchanté 1...

— Nous venons voir la maison... le nid.

—> Oh ! mais... il n'est pas encore bâti, le nid I... Je vais toujours vous faire voir les plans.

-— Ah I oui...

— C'est parfait !... Maintenant, allons voir le terrain...

— Quel terrain ?

— Où s'élèvera le toit de votre bonheur.

— C'est ici... '

— Où ?

— Là... Suivez bien la direction de mon doigt. Vous habiterez au septième étage... ce sera là... .

— Où ?

— Au bout de mon doigt... suivez la ligne imaginaire et arrêtezvous à vingt et un mètres à peu près au-dessus du sol... Vous voyez ce pâté de maisons...

— Quel pâté de maisons ? •— Il n'y a rien.

— Il n'y a rien, c'est vrai; mais imaginativement, mdi, je le vois... C'est ici que sera bâtie la maison dans laquelle Mdhsieur votre père a retenu pour vous, au septième étage, un appartement moderne. L'escalier sera là..., la dernière marche sur votre palier viendra mordre ici... Voici la porte d'entrée de votre appartement.., suivez bien mon doigt t... voici le couloir, de l'ouest à l'est... trois pièces au nord : salon, salle à manger, boudoir... ira petit placard...

— Ah ! oui, c'est commode,,.

— ...Au midi, une chambre, la salle de bains, la cuisine... une autre chambre à l'est, sur la cour.

— Claire la cour ?

— Ah!'oui... tout ce carré-ci.

— Mais vous avez à peine bougé le doigt...

— Evidemment... ' mais, là-haut au septième étage, ça fait un très grand carré... Vous serez là comme deux oiseaux dans un joli nid.

— Oui, mais, les oiseaux, ils ont le nid tout de suite.

— Ah 1 évidemment t... mais nous vivons plus longtemps que

les oiseaux.

— Vous n'auriez rien de moins moderne, mais tout construit.

"•— Tout construit ?:.. Ça n'existe pas 1 Aujourd'hui, on se loge sur plan, des plans établis d'après des projets, des projets construits sur des probabilités, des probabilités échafaudées sur des calculs,,:des calculs, nés. sur des imaginations, des imaginations imaginées 'selon des images,.. Il n'y a pas d'autres façons d'avoir sa maison.

JEAN BASTIA.