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Titre : Le Quotidien de Montmartre : journal hebdomadaire / directeur : Jules Bastia

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1930-03-09

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb421267926

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb421267926/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

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Description : 09 mars 1930

Description : 1930/03/09 (A2,N27).

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5504621p

Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, LC2-1681

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 06/02/2011

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2« ANNÉE. — N° 27

JOURNAL HEBDOMADAIRE Directeur : JEAN BASTIA

Dimanche 9 Mars 1930

LA CHRONIQUE DE LA MODE

Je l'ai rencontré au bois de Meudon, avant-hier ; je l'ai tout de suite reconnu à ses allures de parfumeur.

Je me suis caché dans un buisson frais verni pour surveiller son manège. Que pouvait-il bien faire '*?... Il se penchait de temps à autre vers le gazon, ou bien il s'arrêtait devant L un arbuste, le touchait, redressant ses branches pour arranger la disposition de son feuillage.

J'ai pu l'approcher sans qu'il me vît, et je l'ai entendu parler. Sa voix était douce comme le zéphir à l'aurore d'un beau jour. Voici ce qu'il disait :

— Voyez donc un peu, la Pâquerette 1... Vous avez une collerette, toute fripée !... Vous vous serez couchée dessus ce'tte nuit, pas possible I... Pour la nuit, Mademoiselle, on relève chaque pétale, comme le col d'un paletot, et on s'endort la tête entièrement cachée...

— Regardez-moi, s'il vous plaît, la Primevère !... Cette. année, le revers se porte un peu ondulé 1...

— Ah 1 voici le Lilas I... Ne penchez pas ainsi vos grappes 1... Vous vous laissez aller 1 Vous avez l'air flapi 1... Un peu de nerf !...

— La Rose 1... Vous êtes bien trop rouge, ma petite !... Ce n'est plus la mode !... Cette année, on est aux teintes un peu violacées 1... Tenez, comme le Pois-de-Senteur que vous voyez ici près. Ça ne fait rien, vous êtes toujours jolie 1... C'est que vous avez une réputation à soutenir I...

Et, relevant la tête, examinant les arbres :

— Ah 1 voici le Bouleau !... Il ne change pas I... Toujours sanglé dans son complet d'argent tacheté de noir !... Justement, on est aux tissus chinés, ça tombe bien 1...

— Dites donc, le Saule, il faudra vous faire couper les cheveux. Ça ne vous gêne pas cette tignasse 1 A la Ninon vous irait très bien 1... D'autant que vous avez un tronc luisant comme la nuque d'une jolie femme I...

Puis, repris par le ras du sol : ■— Dites donc, les Muguets, c'est bientôt le 1er mal, on vous attend 1... Il n'y a pas trop de bonheur dans le monde I... Allez signer la victoire de l'amant et la réconciliation de la droite et de la gauche !... Ils sont rigolos, les Muguets, avec leur petit nez retroussé 1... Ils ressemblent à Mayol I...

— Eh 1 là 1 le Pin, quelle est la méchante Arcachonnaise qui t'a causé de la peine ?... Tu pleures, mon garçon !... A ton âge !... Il faut te t résinier» I...

— Quant à vous, les Mimosas, tâchez de durer I... A peine êtes-vous éclos, que vous vous répandez sur le gazon, comme des oublis de jaune d'oeuf dans la barbe d'un pauvre homme. Un peu de ternie, s'il vous platt !...

— Très bien les Liliacées I Vous êtes souples, minces, hautes sur tige, tout à fait la silhouette à la mode 1... Mais ces petits volants superposés tout le long de vous-mêmes sont bien

désuets',!... Vous|';dcvriez essayer de la redingote. Il y a des femmes à qui ça va très bien... \

Ainsi chaque année, quand sonne au cadran du soleil l'heure du renouveau, le Printemps lui-même surveille ses étalages, passant la revue des fleurettes nouvellement poussées et des vétérans, pour leur apprendre ce qui se porte cette année, comment ça se porte, comment on se coiffe, comment on se tient.

Car la mode des plantes, comme celle des femmes, se modifie de saison en saison.

Aux Indépendants

Nous avons noté, au cours d'une visite au Salon des Indépendants, les quelques réflexions suivantes :

— Quel génie !

— Surhumain.

— Dites divin... C'est un dieu... A quoi quelqu'un réplique à

mi-voix :

■— Dieu, évidemment... puisque impénétrable en ses dessins.

— J'aime beaucoup les petits tableaux.

— Moi, je ne les aime que grands, très grands, le plus grand possible.

— Tiens ! pourquoi ?

— Je suis encadreur.

— Bien, ce paysage !

— Heu 1... oui... mais pourquoi les arbres sont-ils en bois 1

— Il faut se pâmer sans comprendre

— Ou comprendre sans se pâmer.

■— Chez les cubistes, les orphéistes, les intentionnistes, les loufoquistes, c'est le public surtout qui est exposé.

— La peinture, ça^n'est pas très difficile à faire.

— La difficulté, c'est de s'en défaire.

m

— Que représente votre tableau ?

— Les avis sont partagés.

— On devrait installer des baquets à la porte de certaines salles.

— Pourquoi ?

— A cause de toutes ces peintures à l'envers. Il me semble, quand je regarde ces tableaux, que je suis sur le pont d'un navire violemment secoué par la houle.

Face à d'immondes barbouillages, un petit enfant de deux à trois ans, qu'on avait amené là (on peut se demander pourquoi) s'écria tout à coup, comme le Corrège :

— Et moi aussi, je suis peintre.

On ne fit pas tout d'abord attention à cette exclamation, mais soudain, à la marche pénible du petit, on s'aperçut qu'il avait fait dans sa culotte.

— Qu'est-ce que c'est que ce peintre-ci ?

— C'est un ancien, un pompier d'avant-garde.

— Comme il peignait ingénuement 1

— C'est un primitif du Futurisme.

Devant un tableau de plusieurs nudités masculines, quelqu'un dit i

— C'est de la peinture d'histoires :

Un enfant interroge :

— Que faut-il pour peindre ?

•— Des toiles, des couleurs, des brosses, répond la mère. Le père ajoute :

— Et du culot.

L'étav^deSipeintre doit être un état voisin de:l'état d'ivresse.

5

Une dame qui en a assez :

— Par où est-ce qu'on s'évade ?

Dans une salle déserte, un bloc de plâtre informe. Un jeune sculpteur lave son oeuvre. Il ne m'a pas vu venir. Il monologue. Je me cache. J'écoute. Et voici ce qu'il dit : Praxitèle, pardon !... Ces sculptures baroques, Ne ressemblent en rien aux oeuvres que

[tailla Ton ciseau génial: Ces choses équivoques, Sont peut-être une lampe ou peut-être un

[tibia... Je ne sais plus moi-même. Avec amour

[j'évite De jamais préciser, je sculpte en liberté. Et comme, étant enfant j'eus une méningite, Je ne nie souviens plus de ce que j'ai sculpté D'ailleurs, de ton conseil j'ai respecté la

[lettre Quand, voulant être artiste, ignorant comment l'être, Je te pris pour patron et t'invoquai tout

[haut :

— Grand homme, enseigne-moi comme

[on tient un ciseau. Je t'ai crié : « Par où jaut-il que je commence ? Et tu m'as répondu : « Mon fils, par la [démence 1

Les Vieilles de notre Pays

Les vieilles de notre pays Ne sont pas des vieilles moroses... L'une porte des plumes roses, Des panaches, tout un fouillis...- Les vieilles de notre pays.

Elle descend dei escaliers ; Après quoi, elle les remonte Au music-hall... El l'on lui compte Tous les soirs, pour ça, dix billets... Pour descendre des escaliers.

Une autre régente aujourd'hui, L'antique Comédie- Française, Avec ses airs très Louis X VI. — Et même d'un plus vieux Louis... Les vieilles de notre pays.

Une autre interprète du Jiip En faisant des gestes folâtres... Ses premiers portraits au théâtre Etaient des daguerréolyp's... Une autre interprète du Rip.

Une autre, au toupet réfoui, Tout blond, avait pris sa retraite... Mais à Toulon elle regrette Ses chansons et ses lorlillis... Les vieilles de notre pays.

El les autres, pendant ce temps, Les jeunes actrices charmantes, Attendant leur tour, se lamentent Mais nul n'arrive à Paris tant Qu'il n'a pas au moins cinquante ans.

Les vieilles de notre pays

Ne sont pas des vieilles moroses...

Mais elles s'agrippent aux choses...

Elles durent, c'est inouï 1 •

Les vieilles de notre pays.

JEAN BASTIA.

PERMIS DE CONDUIRE

— Ne zigzaguez pas de trop, vous savez que nous n'avons droit qu'à deux colonnes dans Le Quotidien de Montmartre.