s( 1° GERMINAL
Puis, c'étaient les anu-e» fosses à l'horizon, la Yictoire, Saint-Thomas, FeutryCanlei; tandis que, vers le nord, les tours élevées des hauts fourneaux et les batteries des fours à. coke fumaient dans l'air transparent, du matin. S'il voulait ne pas manquer le train de huit heures, il devait se hâter, car il avait, encore six kilomètres à faire.
Et, sous ses pieds, les coups obstinés des rivelaines continuaient. Les camarades étaient tous là, il les entendait le suivre à chaque enjambée. N'était-ce pas la Mabeude, sous cette pièce de betteraves, l'échiné cassée, dont le souffle montait si rauque, accompagné par le ronflement du ventilateur? A gauche, à droite, plus loin, il croyait en reconnaître d'autres, sous les blés, les haies vives, ses jeunes arbres. Maintenant, en plein ciel, le soleil d'avril rayonnait dans sa gloire, échauffant la terre qui enfantait. Du flanc nourricier jaillissait la vie, les bourgeons crevaient en feuilles vertes, les champs tressaillaient de la poussée désherbes. De toutes paris, des graines se gonflaient, s'allongeaient, gerçaient. la plaine, travaillées d'un besoin de chaleur et de lumière. Un débordement de lève coulait avec des voix chuchotantes, le bruit des germes s'épandail. en un grand baiser. Encore, encore, de plus en plus distinctement, comme s'ils se fussent rapprochés du sol, les camarades tapaient. Aux rayons enflammés de l'astre, par cette matinée de jeunesse, c'était de cette rumeur que la campagne était grosse. Des hommes poussaient, une armée noire, vengeresse, qui germait lentement dans les sillons, grandissant pour les récolles du siècle futur, et dont la germination allait faire bientôt éclater la terre.
FIN.