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Titre : Les Nouveautés photographiques : complément annuel à La théorie, la pratique et l'art en photographie / par Frédéric Dillaye

Auteur : Dillaye, Frédéric (1848-1917). Auteur du texte

Éditeur : Librairie illustrée (Paris)

Date d'édition : 1896

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328258554

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb328258554/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 3855

Description : 1896

Description : 1896.

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5493127c

Source : Bibliothèque nationale de France, département Sciences et techniques, 8-V-24469

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 17/01/2011

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LES NOUVEAUTÉS

PHOTOGRAPHIQUES

ANNÉE 1896


l'ARIS.IMl'KIMKHIK LAROUSSE

17, KLMt MONTl'AKNASSE, 17


V -* ANNÉE 1896 H™

PHOTOGRAPHIQUES

4° COMPLÉMENT ANNUEL A LA THÉORIE, LA PRATIQUE ET L'ART EN PHOTOGRAPHIE

PAR

FRÉDÉRIC DILLAYE

Ouvrage orné de 97 illustrations

DONT 20 PIIOTOTYPOGaÀPHIES D'APRÈS DES PHOTOTYPES DE DIFFÉRENTS AMATEURS

,'ATTAQUE DU PLATEAU DE RUNOIS (Phototype de l'auteur)!

PARIS A LA LIBRAIRIE ILLUSTRÉE

8, RUE SAINT-JOSEPH, 8 Tous droits réservés.



PRÉFACE

Si les progrès de la photographie marchent d'un mouvement continu et rapide, il leur arrive parfois de faire des bonds considérables qui étonnent par leur hardiesse et con- . fondent par leurs résultats.

Au début de Tannée 1891, M. Gabriel Lippmann, contrôlant par Vexpérience les phénomènes d'interférence, nous donnait la réalisation complète du grand problème de la photographie des couleurs, au moins sous Vune de ses formes pratiques sinon sous sa forme définitive. Ce problème résolu, il semblait que la photographie n'eût plus à franchir de ces étapes vertigineuses, parce que dans les desiderata exprimés rien ne faisait supposer, dans sa marche, la rencontre de pareilles étapes. Voilà que tout à coup, à la finde l'année 1895, la merveilleuse découverte du professeur Rbntgen, nous montre une de ces étapes insoupçonnées, et nous la montre franchie. J'ai nommé la photographie à travers les corps opaques, la photographie de l'invisible. Des recherches commencées depuis plus d'un quart de siècle, ont, de ce fait, prouvé la sanction d'une application pratique et l'on est étonné d'apprendre que cette application pratique relève de la'photographie, alors que personne ne s'attendait à cette solution. Quant à ses conséquences qui atteignent à un degré beaucoup plus haut la physique pure, elles semblent immenses. Mais si de celles-ci nous n'avons pas à nous occuper, Vapplication demeure dans notre domaine et ne saurait être passée sous silence. Au demeurant


il LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

c'est une bonne fortune que d'avoir à relater des choses de cette importance.

Je n'y ai point failli.

Bien que la question soit fraîche et non encore nettement définie dans tous ses points ; bien que chaque semaine V Académie des Sciences ait encore à s'entretenir de faits nouveaux à son sujet, j'ai rassemblé tout ce qui formait un tout déjà sur la nature des rayons X découverts par le professeur Rontgen, cherchant à dégager ce qui paraît les différencier très nettement des rayons cathodiques, et établissant surtout, le mieux et le plus clairement possible, le mode opératoire nous permettant, à nous autres, d'employer ces rayons aux choses qui nous occupent, c'est-à-dire à photographier l'invisible.

Je suis certain qu'avec les indications que je donne, si sommaires qu'elles puissent paraître au premier abord, l'opérateur qui voudra les suivre strictement réussira du premier coup dans cette nouvelle voie ouverte à la photographie documentaire et pathologique, d'autant plus que l'illustration vient s'ajouter au texte.

Au sujet de T illustration, en général, j'ai suivi pour 1896 les mêmes errements que j'avais cru utile de suivre pour les Nouveautés photographiques de 1894 et de 1895, c està-dire de disséminer des exemples fournis par des amateurs et provenant de leur travail courant. Pour cela je me suis, comme précédemment, adressé aux oeuvres primées dans les concours du Journal des Voyages, dont je suis président du jury d'examen.

Je remercie, personnellement, le directeur du Journal des Voyages de la bonne grâce qu'il met à vouloir bien continuer à approvisionner d'illustrations mes Nouveautés photographiques, etje ne doute pas que mes lecteurs joignent leurs remerciements aux miens. Au demeurant ces concours ont cela de particulier que, tout en restant photographiques,


PRÉFACE. m

ils exigent des oeuvres n'étant pas la simple représentation de motifs quelconques, mais bien celle de motifs se rattachant à un endroit pittoresque ou historique d'une contrée. Ce sont vraiment des travaux de touristes présentant, en dehors de leur côté artistique, aussi bien que de leur côté technique, un indiscutable côté voyage et illuslratif. Or la véritable vulgarisation de la photographie, son application la plus étendue et son travail le plus courant, se trouvent justement dans le tourisme.

Parmi les concours parus depuis les Nouveautés photographiques, année 1895, j'ai choisi huit oeuvres d'auteurs différents me fournissant huit exemples pour illustrer les Nouveautés photographiques, année 1896. Ce sont :

Elude des figures allégoriques : L'ALSACE. Phototype de M. Léon Bovier, à Bruxelles. Plaque : 13 X 18; Lumière, étiquette bleue. — Objectif : Aplanat Suler. — Diaphragme : Vf (t. — Pose : instantanée. — Révélateur : Iconogène. — Tirage : Papier au platine développé à froid.

Etude des monuments du Moyen Age : LE VIEUX PONT DE CIIEVRÉ. Phototype de M. D. Fenaut, à Rennes. Plaque : 13x18; Lumière, étiquette bleue. — Objectif : le n° 1 de la trousse Berthiot. — Diaphragme : 1745. — Pose : trois secondes à onze heures du matin, par un temps clair et un peu à contre-jour. — Révélateur : Oxalale fer rcux. — Tirage : Papier albuminé traité par un virage à la craie.

Etude de coutumes locales : LES BRIC-A-BRAC SUR LA PLACE DU BRETAGNE, A NANTES. Phototype de Mlle D. de Suyrot, au château de La Gastière en Vendée. Plaque : 13 x 18; Lumière, étiquette bleue. — Objectif: Demi-grand angle Hermagis. — Diaphragme : F/15. — Pose : instantanée à trois heures de l'après-midi,au mois d'avril. — Révélateur: Développateur commercial Cristallos. — Tirage: Papier albuminé, viré à l'acétotungstate de soude.

Etude de montagnes : LA GORGE DE LA. Fou. Phototype de M. Victor Billes. Plaque : 13 X 18; Lumière, étiquette bleue. — Objectif: Anastigmat Zeiss 1 : 0,3. — Diaphragme : F/12,5. — Pose : une seconde, au mois d'avril, à trois heures du soir, par temps clair. — Révélateur : Hydroquinone. — Tirage : Papier mat Lumière, traité par bain de virage à la craie.


iv , LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Études de rivières accidentées : L'ARBUSE AUX ENVIRONS DE NEUCHATEL. Phototype de M. Armand Werner, à la Chaux-de-Fonds. Plaque : 13X18; Lumière, étiquette bleue. — Objectif: Rectilinéaire Berthiot. — Diaphragme : F/20. — Pose : dix secondes à dix heures du matin, par temps clair. — Révélateur : Acide pyrogallique. — Tirage : Papier au citrate d'argent Lumière traité par virage et fixage combinés.

Étude de coutumes religieuses : LA GRANDE PROCESSION DE NOTREDAME A TOURNAI. Phototype de M. Henry Dulieux. Plaque 13X18; Lumière, étiquette bleue. — Objectif : Rectilinéaire Ross. — Pose : instantanée, à trois heures de l'après-midi, par ciel ensoleillé. — Révélateur : Hydroquinone. — Tirage : Papier à lapyroxyline argentique Liébert, traité par virage et fixage combinés.

Étude de ponts pittoresques : PONT SUSPENDU SUR L'AMBLÈVE. Phototype de M. Jean de Bruyne, à Malines. Plaque : 13xl8;Nys. — Objectif: American Lcns. — Diaphragme : F/48. — Pose : une demiseconde, par un beau soleil du mois de mai. — Révélateur : Oxalatc ferreux. — Tirage : Papier au platine développé à froid.

Étude de photosléréograpkie : LES ROCHERS DE BIARRITZ. Phototype de M. Augustin Boutique. Plaque 8 X 16; Lumière, étiquette bleue. — Objectifs : Rectilinéaires Hermagis montés sur chambre Groult. — Pose : instantanée, à la grande vitesse de l'obturateur Groult, à trois heures au mois d'août. — Révélateur : Oxalato ferreux.— Tirage : Papier au citrate d'argent Lumière, viré à l'or et au sulfocyanuré d'ammonium, puis fixé après virage.

Cet ensemble donne bien, comme vous le voyez, un aperçu du travail courant des amateurs. Nous en avons de France, de Belgique, de Suisse. A côté de l'illustration variée et par tous, il y a là une étude comparative qui, je crois, ne laissera pas d'intéresser les lecteurs des Nouveautés photographiques.

FRÉDÉRIC DILLAYE.


LES NOUVEAUTÉS

PHOTOGRAPHIQUES

PREMIÈRE PARTIE THÉORIE ET PRATIQUE

LES CHASSIS A MAGASIN

Les appareils à main ont porté un coup aux châssis doubles. On a reconnu l'excellence, à tous points de vue, des châssis à magasin et même dans les chambres noires à pied on tend de plus en plus à substituer ceux-ci à ceux-là. Or parmi ceux-ci est le châssis Hanau, auquel M. F.-M. Richard a apporté des modifications qui rendent son fonctionnement parfait, irréprochable sa solidité et son élanchéité absolue contre les rentrées de la lumière.

Le châssis à magasin Hanau, modèle type parfait des châssis dits à tiroir, contient une ou deux douzaines de plaques et la place qu'elles occupent atteint le minimum absolu du volume possible. Placées dans des cadres de tôle mince, les plaques, empilôesles unes surles autres, peuvent, en effet, se substituer l'une à l'autre dans le même et seul espace correspondant à celui réservé à leur empilement. En principe, deux boîtes, formant tiroir, l'une par rapport à l'autre, constituent le châssis Hanau. C'est l'escamotage

1


2 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

employé dans le changement de plaques des photo-jumelles j. Garpentier. Lorsqu'on tire le tiroir toutes les plaques moins une, celle impressionnée, sont entraînées. La plaque restée seule dans la partie dormante tombe au fond, et, lorsqu'on repousse le tiroir, elle vient se replacer au-dessous de la pile restant à utiliser. Pour ouvrir le châssis Hanau-F.-M. Richard on tire le rideau en maintenant en E la barrette de cuivre B. Les porte-plaques sont retenus dans le maCliàssis

maCliàssis tiroir perfectionné.

gasin par un cadre à coulisse. G, que l'on retire quand le rideau est complètement ouvert. La moindre résistance prouverait que le volet n'a pas été tiré à fond. Les châssis une fois chargés, les plaques sont empilées par ordre do numéro, en plaçant la dernière au fond de la boîte et en remontant ainsi jusqu'au n° I. On replace le châssis cadre et on referme le rideau. Le contrôle des plaques impressionnées est des plus simples. Il suffit de lire, à travers un verre rouge, démasqué par le tirage, le numéro inscrit au dos du porte-plaque.

Si ce genre de châssis est inappréciable pour certaines chambres à main, il l'est non moins pour les appareils à pied. On ne peut, en effet, emporter une douzaine de plaques, par exemple, sous un plus petit volume, ni sous un poids moindre. De plus, on est toujours certain du nombre de plaques posées, et l'on n'a plus à se préoccuper d'ins-


NOUVEL OBJECTIF UNIVERSEL. 3

criptions sur la rondelle d'ivoire du châssis, ou du souci de voir l'indication posée se refermer par suite des cahots de

la roule.

C'est, à mon avis, un châssis des plus intéressants pour

les photographes touristes, au triple point de vue de la sécurité, du pelit volume et de la légèreté.

Le châssis cadre.

Glifissis il tiroir perfectionné. Mouvement du tiroir.

NOUVEL OBJECTIF UNIVERSEL

C'est, il me semble, à la fin de l'année 1893 que le Dr Rudolph, à qui nous devons les objectifs Zeiss, s'est occupé de cette question, à savoir : Trouver un système anastigmatique permettant de constituer des trousses, dont les foyers différents et variés éviteraient à l'amateur l'achat de plusieurs objectifs.

Or, en poussant ses recherches et en effectuant ses calculs, i'éminent physicien en est arrivé à la certitude qu'au triple point de vue de la correction des observations, de la luminosité et de l'angle ouvert, on pouvait obtenir des élé-


f.i

\ LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

ments d'objectifs en combinant les lentilles avec quatre verres au lieu de trois, employés couramment dans les anastigmats.

Le Dr Rudolph est arrivé ainsi à construire, pour la première fois, un objectif simple achromatique et anastigmatique pouvant, à la toute ouverture F/12,5, couvrir une plaque dont la diagonale reste sensiblement égale à la distance focale, sans qu'il y ait cependant une distorsion préjudiciable.

Si le fait est bien certain, c'est une véritable conquête. Avec une ouverture F/12,5 il serait loisible, même avec une assez faible lumière, de réussir des instantanées prises en moyenne vitessse avec une obturation de 1,'On de seconde. Or on bénéficie ainsi de tous les avantages de rapidité que donne un objectif rapide, et de tous les avantages perspectifs réservés aux objectifs simples.

En combinant doux à deux ces objectifs, le Dr Rudolph forme un objectif double universel.

Cet objectif ainsi constitué est un aplanat anastigmatique 1 : 0,3. La série II des objectifs Zeiss réalisait déjà cette ouverture. Mais la couverture de champ donnée par les 1 : 6,3 de la nouvelle combinaison dépasserait de beaucoup celle des 1 : 0,3 de la série II. Elle serait telle qu'elle permettrait de les comparer, avec une luminosité extraordinaire en plus, à la plupart des demi-grands angulaires et môme des grands angulaires. Dès l'ouverture F/12,5 on atteindrait déjà un angle d'image de 80".

On voit de suite, que l'objectif, ainsi compris, réunirait dans une même série, et la possibilité d'utiliser un champ de très grande extension angulaire avec la plus forte luminosité possible et la gradation considérable des distances focales.

Tout cela est-il rigoureusement exact? Les uns disent oui; les autres disent non. Différences ou inégalités dans la fabrication sans doute. Comme je n'ai pu encore expérimenter à mon aise cet objectif universel, je me garderai


LE PLANIGRAPHE. B

de vous donner mon avis personnel, que je tiens toujours à ne vous fournir qu'à bon escient. Libre à vous d'essayer la véracité des prospectus.

LE PLANIGRAPHE

.le me plais à constater que le succès des objectifs étrangers semble décider nos constructeurs français à se remuer

un peu. Ce ne serait vraiment pas dommage. C'est ainsi que M. Turillon, successeur de M. Darlot, vient de construire un nouvel objectif, dit planigraphe, qui donne de bons résultats avec le diaphragme normal F/10. On peut même, dans bien des cas, s'en servir à toute ouverture, c'est-à-dire à F/8. Son plan focal est d'une assez grande épaisseur pour laisser une latitude convenable dans la mise au point. Ce qui est toujours précieux lorsqu'il s'agit de choisir un objectif pour une chambre noire à main. C'est certainement un des meilleurs objectifs français que nous possédions pour l'heure présente.

Le planigraphe indiqué pour un 13x18 présente une

Objectif le Planigraphe.


6 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

distance focale de 0m,17 environ et le cône de netteté embrasse un angle de 55".

J'estime cependant que, pour un très bon travail, on ne doit pas prendre les numéros indiqués par le constructeur et, qui, à mon avis, le sont à l'extrême. En d'autres termes, pour un 13x18, mieux vaut prendre le numéro indiqué pour le 18x2i. Gela, parce que les foyers de ces objectifs sont véritablement par trop courts pour une bonne relation de la perspective. Sous le prétexte, un peu bien fallacieux, qu'on recherche avant tout la rapidité, on diminue le foyer tant que l'on peut. Il vaudrait beaucoup mieux chercher à garder le foyer long et à. augmenter l'ouverture. Mais, en général, on calcule si peu les objectifs et on les talonne tant, qu'on demande le plus souvent aux hasards de la fabrication de mettre la concordance entre les courbures des lentilles, les indices de réfraction des verres employés et les lignes perspectives de l'image obtenue. C'est cependant au calcul très soigné de cette concordance que certains objectifs étrangers doivent leur renom et leur réelle supériorité.

Pour en revenir au planigraphe, j'ai monté un 18x24 sur une chambre 13x18, j'avais ainsi une distance focale d'environ 0m,23 ce qui est pour ainsi dire la normale pour le format 13x18. Les images prises dans ces conditions présentent une bonne tenue perspective et de l'harmonie dans les teintes. On possède dès lors un bon objectif à tout faire en plein air.

LES NUMÉROS DES VERRES DE BESICLES

A propos des trousses-besicles dont je vous ai entretenus au sujet de la photographie monocliste', quelques lecteurs m'ont écrit en demandant qu'elles étaient les indications qu'il fallait donner aux opticiens. Les numéros indiqués par ceux-ci ne semblant pas correspondre au foyer. En oculistique en, effet, on se sert, pour caractériser un verre,

■1. Voir : Les Xouueaulés pholoyraphiques, année 1895, page 0.


LES NUMÉROS DES VERRES DE BESICLES. 7

d'un numéro. Ce numérotage a changé depuis quelques années, ce qui ne laisse pas de troubler les myopes et les presbytes habitués à demander des verres de tel ou tel numéro, et auxquels on répond en leur offrant des verres de tant de dioptries. Cela tient à ce que l'unité dont on se servait pour désigner une lentille a été changée. Je vais essayer d'expliquer la nouvelle unité adoptée, et, du même coup, je vous donnerai ainsi le moyen de convertir les deux numérotages l'un en l'autre.

Autrefois, le numéro d'un verre représentait sa distance focale évaluée en pouces. Ainsi, un verre n° i était une lentille (convergente ou divergente) dont la distance focale était de A pouces, c'est-à-dire approximativement de 0m,10, le pouce valant à peu près 0"',025.

Aujourd'hui, pour caractériser une lentille en oculistique, on ne se sert plus de sa distance focale, mais de ce qu'on appelle sa puissance. Par définition, cette puissance P est le quotient de l'unité de longueur, le mètre, divisée par la distance focale ou autrement dit :

Pour exprimer cette puissance, on se sert d'une unité spéciale, la dioptrie, qui désigne la puissance d'une lentille, de 1 mètre de foyer. On voit donc que, connaissant la distance focale d'une lentille, on peut facilement trouver sa puissance et inversement. Ainsi, la puissance d'une lentille de 0m,25 de foyer sera

Le calcul inverse serait aussi facile à faire.

Revenons maintenant à l'ancien numérotage. Le numéro inscrit sur le verre nous donnait sa distance focale évaluée en pouces. Supposons, comme plus haut, un verre n° A, et cherchons quelle sera sa notation en dioptries, c'est-à-dire quelle est sa puissance. Pour cela, il nous faut connaître


8 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

sa distance focale exprimée en centimètres, c'est-à-dire 4x0m,025 = 0m,10. Transportons cette valeur dans l'équation qui nous donne la puissance d'une lentille et nous aurons :

Nous voyons donc qu'il est facile de faire concorder les deux numérotages. Dans la pratique, on ne se sert point tout à fait de cette formule, mais de la suivante.

Appelons N le numéro des verres, nous savons que ce numéro nous exprime, en pouces, la distance focale. Si nous voulons l'exprimer en centimètres, nous aurons donc :

(2)

Mais la fraction décimale 0m,025 peut s'exprimer en fractions ordinaires par 1/40 puisqu'en divisant 1 par 40, nous aurons au quotient 0,u,025. Donc :

(3)

Remplaçons dans l'équation 0"',025 par 1/40 et nous

îinpnns "

(4)

En remplaçant dans l'équation f par cette valeur, nous aurons :

(«)

Suivant la règle de division d'un nombre entier par un nombre fractionnaire, cela nous donne, en multipliant 1 par la fraction diviseur renversée :

(6)

Autrement dit, pour exprimer en dioptries la puissance d'un verre dont on connaît le numéro, il suffit de diviser


L'OBJECTIF REMPLACÉ PAR LE TROU D'AIGUILLE. 9

40 par ce numéro. Et, reprenant notre exemple ci-dessus d'un verre n° 4, nous trouvons que sa puissance est égale à 10 dioptries, car :

Il est certain qu'on trouvera de la même façon le numéro d'un verre dont on sait la puissance puisque si

on aura

Ces calculs tout en étant d'une simplicité enfantine répondront au voeu de plusieurs de mes lecteurs qui me demandaient ou n'osaient me pas demander des renseignements à ce sujet.

L'OBJECTIF REMPLACÉ PAR LE TROU D'AIGUILLE

Pour ma part un bon objectif est précieux, .l'avoue que je ne prise guère la photographie sans objectif, parce que l'on peut toujours, au besoin, obtenir des épreuves d'effet analogue et très supérieures de résultat avec un objectif et un tirage approprié. Toutefois, en Angleterre, on est fort partisan de cette méthode photographique dite slénopé et qui consiste à obtenir des images à la chambre noire en remplaçant l'objectif par un simple trou d'aiguille percé dans une plaque métallique. Il ne faut pas songer à faire de l'instantanéité avec ce procédé, qui possède néanmoins un certain intérêt par la très grande douceur qu'il donne à l'image, on même temps que par la parfaite rectitude qu'il laisse aux lignes.

Mais comment percer soi-même de bons trous d'aiguille pour atteindre au but proposé? The Amateur Photographe)- répond à la question, en nous engageant à prendre une mince feuille de fer-blanc, une simple paroi de vieille boîte à sardines par exemple, et de la trouer avec des aiguilles anglaises. Ces aiguilles, possédant un numéro nettement


10 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

déterminé, notre confrère a donné le petit tableau suivant permettant de calculer facilement la mise au point et le temps de pose.

N»s des aiguilles.

3 4 3 G 7 8 '.) 10

Valeur des diaphragmes.

F/76 F/72 F/60 F/56 F/50 F/43 F/38 F/35

Distance de la plaque.

581/2 cm. 50 3/4 cm. • 38 cm. 33 cm. 25 1/2 cm. 20 1/3 cm. 151/4 cm. 12 2/3 cm.

Format couvert.

50 X 38 50 X 301/2 30X251/2 251/2X201/3 18X24 13 X 18 9X12 9 X 12

Supposons donc que nous disposions d'un appareil à plaque normale 18x24, nous voyons, d'après ce tableau, qu'il nous faut prendre, au moins, l'aiguille n° 8 pour percer notre trou. Ceci fait, nous mettrons notre plaque trouée au lieu et place de la planchette de l'objectif et, pour la mise au point, nous donnerons, à la distance qui doit la séparer du verre dépoli, une longueur égale à 0m,255. Quant au temps de pose nous considérerons, comme représentant des minutes, celui qui serait noté en secondes si l'on employait un objectif diaphragmé à F/50. J'ajouterai qu'il sera même d'une bonne pratique d'augmenter ce temps d'une demi-fois en plus.

Cette méthode, très simple, permet à ceux qui désirent se rendre compte de ce qu'est le sténopé d'opérer sans frais et avec la plus grande facilité.

PLAQUES PANCHROMATIQUES

Les plaques orthochromâtiques ne suffisaient pas. Et de fait elles pouvaient d'autant moins nous suffire qu'elles se gardaient mal. Aussi la maison Lumière vient-elle de lancer dans le commerce les plaques panchromatiques.

Le grand pan, comme nous disions au collège, de notre temps, le pan embrassant tout, MM. Lumière l'ont donc


AUGMENTATION DE LA SENSIBILITÉ DES PLAQUES. U

trouvé en ce qui concerne photographiquement l'obtention des valeurs relatives des couleurs. Us le disent ou le laissent croire.

Toujours est-il que les substances sensibilisatrices qui entrent dans la fabrication de ces nouvelles plaques sont obtenues et contrôlées de telle sorte, que la couche sensible garde ses propriétés spéciales panchromatiques, en même temps que sa sensibilité générale, aussi longtemps que (•elle qui recouvre les plaques ordinaires.

J'ai essayé ces plaques très intéressantes, puisqu'elles sont tout d'abord aussi sensibles que les étiquettes bleues. J'ai constaté, à premier examen, qu'elles n'ont aucun avantage sur les plaques ordinaires si on no les emploie pas avec un écran jaune foncé. Au contraire elles sont inférieures à celles-ci pour l'harmonie générale du sujet. Les bleus et les violets viennent plus clairs sur les photocopies et les blancs y sont moins éclatants. Tout change dès qu'on emploie l'écran jaune, et il est incontestable que le motif pris vient avec ses valeurs relatives. Mais je me bâte d'ajouter qu'avec une légère surexposition et l'emploi d'un écran jaune clair, on obtient presque les mêmes résultats avec les plaques ordinaires, étiquette bleue. 11 y a belle heurette que je me tue à répéter que la surexposition et l'écran jaune conduisent à l'orthochromatisme.

Les plaques panchromatiques se traitent exactement comme les étiquettes bleues. La seule précaution qu'il faille prendre avec elles, c'est de ne les introduire dans les châssis qu'à une lumière rouge très faible. Rien de plus simple donc que de mettre un carton devant sa lanterne. Aussi n'oubliez pas la recommandation.

AUGMENTATION DE LA SENSIBILITÉ DES PLAQUES

Lorsqu'il s'agit, dans le travail de l'atelier surtout, de faire le portrait d'un enfant, par exemple, on sent le besoin d'appeler à son aide la photographie instantanée. Mais à


12 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

moins de conditions de lumière toutes spéciales, et bien que l'on fasse emploi des bonnettes d'approche dont je vous ai parlé ', l'instantanéité dans ce cas présente encore des limites assez restreintes.

« Ah ! si nous possédions des plaques plus rapides ! »

Voilà la phrase qui s'échappe involontairement de nos lèvres.

Mais les plaques plus rapides sont un peu comme les merles blancs ! On n'en trouve pas ! Au demeurant, plus on pousse à la rapidité, plus il semble que ce soit au détriment de la conservation, et aussi plus la difficulté de manipulation augmente.

On peut cependant, sur le moment môme, augmenter la sensibilité d'une plaque. Donc, dans le cas de l'usage à l'atelier, ce petit tour de main demeure susceptible de rendre des services. Aussi je crois utile de vous le faire connaître, d'autant mieux que son emploi ne présente pas la moindre difficulté.

Vous faites une solution de 20 grammes de bichromate de potasse dans un litre d'eau distillée. Au moment d'opérer vous entrez dans le laboratoire obscur et vous immergez, une à une, dans cette solution, les plaques sensibles dont vous voulez vous servir. Vous laissez bien pénétrer la gélatine par la solution, ce qui demande de une à trois minutes, suivant la température. VOLIS égouttez bien la plaque, et vous épongez ses bords avec un tampon de ouate ou un morceau de papier buvard, puis vous la mettez, tout humide, dans le châssis négatif et vous procédez aussitôt à la pose.

Par le seul fait de cette immersion la durée de cette pose se trouve considérablement réduite. C'est simple et d'un effet certain. Toutefois, avant de développer, je vous conseille de laver abondamment votre plaque pour faire disparaître toute trace de bichromate de potasse.

Voir : Les Nouveautés photographiques, année 189a, page 11.


LA CHEMINÉE PHOTO-BICOLORE. 13

LA CHEMINÉE PHOTO-BICOLORE

M. Decoudun a déjà doté la pratique photographique de quelques menus appareils qui ne sont pas sans quelque importance '. Dernièrement, il nous offrait une lanterne de laboratoire d'un emploi commode. Mais cette lanterne, comme toutes ses congénères d'ailleurs, nous donne la lumière rouge foncé. Or cette lumière ne peut qu'être d'une luminosité très faible, surtout avec de petites lanternes, et par conséquent très fatigante.

Pour parer à cet inconvénient, M. Decoudun a songé à créer un dispositif permettant, suivant les différentes manipulations photographiques, de substituera la lumière rouge les lumières jaune ou verte. Ce dispositif, adaptable à toutes lampes à essence du commerce, genre lampe Pigeon, est une manière de petite cheminée de verre jaune entourée, sur l'une de ses moitiés, d'une coquille de verre vert, cl sur l'autre d'une coquille de verre rouge.

Avec une lampe munie de cette cheminée photo-bicolore, le chargement des châssis et les débuts du développement s'effectuent à la lumière jaune-rouge, placée en avant, pendant que la lumière jaune-vert, placée à l'arrière, éclaire beaucoup mieux les produits et les ustensiles.

Vous savez tous qu'une plaque perd beaucoup de sa sensibilité lorsqu'elle est abondamment mouillée et qu'elle présente un commencement de développement. A ce moment nous pourrons donc, sans crainte de voile, faire tourner le cylindre de notre cheminée et nous éclairer avec la lumière jaune-vert. Avec une moins grande fatigue d'accommodation, il nous sera dès lors permis de suivre beaucoup mieux la venue de l'image sur la plaque.

Pour compléter l'appareil, un fumivore, à emboîtement, permet le nettoyage ou le changement des verres pour toutes les combinaisons de couleurs diverses.

\oir : La Théorie, la Pratique et l'Art en photographie, page 80, et Les Nouveautés photographiques, année 1893, page 40.


14 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

LE NOUVEL OBTURATEUR DECAUX

Je crois utile de revenir sur l'obturateur Decaux, dont je vous ai déjà parlé lors de son apparition ', mais qui se présente de nouveau à nous, plus parfait. Comme je vous l'ai dit, au mois de juin 1893, à l'instigation de la Société française de photographie, la Société d'encouragement pour l'industrie nationale avait ouvert un concours pour un obturateur photographique à grand rendement. Le premier prix (1,000 francs) fut décerné à M. René Decaux pour le modèle qu'il avait proposé et qui réalisait le programme fixé. 11 fut fait quelques pièces de ce premier modèle. La pratique y révéla quelques organes d'une construction délicate. Soucieux de ne mettre dans le commerce qu'un appareil solide et susceptible de se détériorer le moins possible, M. Decaux jugea utile de perfectionner le sien. Divers incidents retardèrent l'éclosion du nouveau type. Ce ne fut qu'au printemps dernier que M. Decaux acheva le modèle industriel dont j'ai à vous entretenir.

Le principe de l'obturateur Decaux, aussi bien dans le premier modèle que dans le nouveau, est do démasquer l'objectif vivement, de le laisser en pleine ouverture, pendant un temps supérieur à la moitié au moins du mouvement total, puis de produire la fermeture instantanément. Cette fonction, admirablement réalisée par le système Decaux, est obtenue au moyen d'une came agissant sur les volets de l'obturateur.

Celui-ci se compose, en effet, de deux volets d'acier de un dixième de millimètre, soudé's sur deux tiges parallèles montées sur des leviers dits balanciers. L'ensemble forme un système solidaire, articulé et permettant aux volets d'occuper : 1° la position obturatrice (moment où les deux volets empêchent la lumière de pénétrer dans l'appareil) ; 2" la position d'ouverture totale.

Le système moteur consiste en un piston se déplaçant

Voir : Les Nouveautés photographiques, année 1894, page 4G.


LE NOUVEL OBTURATEUR DECAUX. 15

dans un tube D fermé à son extrémité par un robinet et mû par un ressort à boudin de section carrée. Le piston est monté à l'extrémité d'une tige dont une partie est dentée et s'engrène sur un pignon. Celui-ci porte, calée sur son axe, une came munie de trois saillies sur lesquelles agit un cliquet et une barrette communiquant à l'extérieur du système.

Si l'on tourne cette barrette R, on fait ainsi tourner sur lui-même le pignon et par suite la came. Le piston est entraîné et le ressort à boudin tendu.

Fait-on effectuer à la barrette un tour complet? Le cliquet dont nous avons parlé accroche la came. L'obturateur est ainsi armé et garde son ressort moteur bandé. Dans ce mouvement, les volets de l'obturateur n'ont pas bougé. En appuyant sur une poussette extérieure C ou en faisant fonctionner une poire de caoutchouc adaptée en P, on soulève le cliquet, le ressort se détend et la crémaillère entraîne la came. Celle-ci agit, par un plan incliné, sur les balanciers et ouvre, en 1/400 de seconde environ, les volets. Pendant le temps que la partie circulaire de la came passe sur les balanciers, l'ouverture de l'obturateur reste complète, mais sitôt que la came arrive à fin de course, elle libère les balanciers, qui reviennent à leur position et referment instantanément l'obturateur.

C'est donc la vitesse du piston dans son tube, piston mû par le ressort, qui donne la durée du temps de pose.

Pour faire varier cette durée du temps de pose, il suffit donc de faire varier la vitesse du piston. A cet effet, on utilise la fuite de l'air comprimé par le piston en ouvrant plus ou moins le robinet. Point important à signaler : la fermeture plus ou moins grande du robinet n'a pour effet que do modifier le temps de pleine ouverture. En effet, comme il agit en comprimant l'air dans le tube extérieur, au commencement de sa marche, le piston part avec sa pleine vitesse, que le robinet soit ouvert ou fermé. L'ouverture par la came se fait donc instantanément ; puis, si le robinet est fermé, ce piston se ralentit, la came main-


16

LES NOUVEAUTES PHOTOGRAPHIQUES.

tient l'obturateur ouvert jusqu'au moment où, le piston arrivant à fin de course, l'obturateur se referme instantanément.

L'obturateur Decaux, du modèle courant, donne comme maximum de vitesse le 1/130 de seconde. Comme minimum, il est loisible de régler l'appareil à toutes les vitesses possibles en ouvrant plus ou moins le robinet du piston, dont le noyau est muni d'un levier F se déplaçant devant un quart de cercle extérieur et divisé.

Pour faire la pose pendant une durée de temps supérieure au minimum de vitesse, on ferme le robinet, puis on arme. Par une pression sur la poire, on ouvre l'obturateur : la came se met en mouvement, mais comme on a cessé la pression, elle vient s'accrocher au cliquet d'arrêt et elle laisse l'obturateur ouvert jusqu'au moment où on le referme par une seconde pression sur la poire.

Comme rendement, on peut dire qu'à la plus grande vitesse, 1/130 de seconde, la période d'ouverture est de 1/400 de seconde, la période d'éclairage (pleine ouverture) de 2/400 et la période de fermeture de 1/400, soit un rendement de plus de 0,50 pour 100 dans la période la plus mauvaise.

Le rendement devient d'autant meilleur que la vitesse est moindre. M. Decaux a choisi la rapidité maxima de 1/130 de seconde comme éminemment pratique.

Le nouvel obturateur Decaux.


OBTURATEUR DECAUX. 17

Il est clair qu'en employant un ressort moteur plus fort, un peut atteindre à une vitesse plus grande, par exemple 1/250 de seconde.

Pour terminer, je rappellerai les qualités essentielles de

cet appareil : . , . .„

1" Il s'arme sans découvrir l'objectif ;

•>" Il se déclenche à la main ou pneumatiquement ;

3° Il fait la pose et l'instantanéité ;

A" 11 peut donner, dans ce dernier cas, toutes les vitesses demandées, depuis la seconde jusqu'au 1/130 de seconde, sans frein à frottement, par une simple fuite d'air, qui est toujours constante et comparable à elle-même par toutes les températures ;

5" Il peut se monter sur tous les objectifs, môme sur les anasfigmats ;

0" Il est absolument indéréglable.

L'obturateur Decaux remplit donc les conditions d'un obturateur à grand rendement, et par conséquent celles du programme imposé par la Société d'encouragement pour l'industrie nationale.

OBTURATEUR A LAMELLES METALLIQUES

Très intéressant est le nouvel obturateur construit par M. E. Krauss qui possède pour la France la licence exclusive de la fabrication des excellents anastigmats Zeiss. Cet obturateur diffère essentiellement de tous ceux qui ont été construits jusqu'à ce jour. Tous les obturateurs connus sont établis plus ou moins sur le système dit à guillotine. Celui de M. E. Krauss est formé d'un certain nombre de lamelles métalliques, pivotant chacune sur un axe, un peu à la manière de celles qui constituent ce genre de stores désignés sous le nom de jalousies. Ce mode de construction nous indique tout de suite que les lames, au lieu de se mouvoir dans un plan parallèle au plan des diaphragmes, comme cela se passe dans les obturateurs connus, se meu3

meu3


18 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

vent dans des plans perpendiculaires à celui des diaphragmes, démasquant et obturant l'objectif en une demirotation.

Par cette disposition, en jalousie, la surface obturatrice est en effet formée d'un certain nombre de petites bandes métalliques, dont la largeur est assez minime pour que les mouvements d'ouverture et de fermeture soient extrêmement rapides.

Un très grand avantage résulte de l'emploi d'un tel système : L'obturateur ainsi construit peut et même doit se placer derrière les lentilles. C'est non seulement une condition très avantageuse en ce qu'elle permet d'avoir le même instrument pour plusieurs objectifs, mais encore elle évite les risques de décentration que Ton court en plaçant l'obturateur au centre des lentilles. Or, certains objectifs, les anastigmats entre autres, sont d'une très grande sensibilité à ce sujet. Un rien peut fausser ce centrage, et, mal centrés, ils perdent toutes leurs qualités qui en ont l'ait, pour le photographe, des outils de premier ordre.

L'excellence de ce système d'obturateur se trouve encore dans cette remarque : les bandes métalliques, par leur pivotement sur un axe longitudinal, agissent de telle sorte que toute la surface de la lentille est découverte en même temps et que les rayons centraux et marginaux sont également utilisés. On peut ainsi arriver à des poses instantanées do 1/400 de seconde et même plus.

Quand on veut faire de l'instantanéité, on met le crochet C sur la lettre J et l'on tourne le bouton R dans le sens de la flèche. Si l'on presse sur Je bouton E ou sur une poire de caoutchouc communiquant avec la petite entrée d'air F on opère le déclenchement. Le ressort communiquant avec le bouton R, lorsqu'il est complètement armé, suffit pour six opérations sans qu'il soit besoin d'armer de nouveau. Pour les instantanées, comprises entre 1/10 de seconde et une seconde, il faut mettre le crochet sur la lettre P et amener, à l'aide du bouton D, l'index m représentant le nombre de 1/10 de seconde que l'on désire obtenir. Le


OBTURATEUR A LAMELLES MÉTALLIQUES.

19

déclenchement s'opère comme il a été dit précédemment. Pour le poser, on met le crochet G sous la lettre P et l'on tourne le bouton R dans le sens de la flèche. Une pression sur la poire ou sur le bouton E ouvre les lamelles A ; une seconde pression les referme. Cet obturateur est tel qu'il peut servir avec tous les objectifs n'ayant pas un diamètre intérieur de la rondelle des lentilles supérieur à 0"\05.

Des rondelles intermédiaires permettent facilement d'y ajuster des objectifs d'un diamètre moindre.

Pour les chambres à main, qui exigent un obturateur dont tous les organes soient à l'abri des poussières que le vent soulève, celui de M. E. Krauss me semble tout indiqué, puisque, se mettant à l'arrière de l'objectif il peut, à la rigueur, être monté à l'intérieur de la chambre noire.

En effet, il n'est rien de plus désagréable qu'un obturateur dont les parties vives sont en dehors, à la mer surtout, où l'on a souvent à lutter contre le sable.

Obturateur à lamelles métalliques.


20

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

APPRECIATION AUTOMATIQUE DES DISTANCES

Avec tous les appareils à main, qu'ils soient à châssis ou à magasin, la mise au point reste toujours fixe dès qu'on opère à une distance du sujet égale à la longueur focale dé l'objectif employé multipliée par 100. Cette distance, convenable pour la toute ouverture de l'objectif, peut être encore réduite par l'application des diaphragmes.

Dans les meilleures conditions possibles, cette réduction se trouve cependant limitée entre le 1/5 et les 2/5 de la distance totale. Donc, pour obtenir des images nettes, en opérant à une distance moindre du sujet, on doit avoir recours à une modification de la mise au point, soit par un tirage réglé de l'appareil, soit par l'application de bonnettes d'approche sur son objectif.

Ce deuxième moyen me semble de beaucoup préférable au premier en ce que : les bonnettes d'approche, ne faisant pas varier le tirage de la chambre noire, laissent à l'objectif toute sa rapidité première et qu'elles ont, en plus, l'avantage d'augmenter légèrement le champ de l'image et l'épaisseur du plan focal '.

Quoi qu'il en soit, tirage réglé ou bonnettes d'approche, on se trouve en présence d'un choix d'un certain nombre de distances fixes et préalablement calculées pour répondre aux besoins les plus ordinaires de l'opérateur. Mais celui-ci, si habile qu'il soit, se voit fort souvent embarrassé pour apprécier exactement, à l'oeil, la distance choisie. On a bien proposé l'emploi d'un ruban métallique, divisé en centimètres, ou d'une ficelle à noeuds. Mais on comprend, de reste, que dans la plupart des cas, surtout dans celui de l'instantanéité, ce moyen soit gênant et, partant, d'un emploi pour ainsi dire impraticable.

Le Duhè, du nom de ses inventeurs, renverse victorieusement cette difficulté. Avec lui l'opérateur peut, presque en un clin d'oeil, apprécier mathématiquement et automatiVoir

automatiVoir Les Nouveautés photographiques, année 189,5, page -H.


APPRÉCIATION AUTOMATIQUE DES DISTANCES. 21

quement la distance qui le sépare de son sujet et sans que celui-ci ait l'attention éveillée.

En principe, le Duhé est une manière de petite lunette composée de deux tubes rentrant l'un dans l'autre. L'extrémité du premier, qui s'applique contre l'oeil, est munie d'une loupe permettant l'emploi du Duhé pour toutes les

vues.

Pour régler le Duhé à sa vue, l'opérateur n'a qu'à appliquer son oeil contre cette loupe et à tirer le tube à soi, jusqu'à ce qu'il voie très nettement le réticule engravé sur un

verre douci maintenu dans la lunette. Cette manipulation faite une fois pour toutes pour chaque opérateur, l'appareil est prêt à fonctionner.

Deux cas se présentent : 1" la distance est déterminée d'avance par le choix du tirage ou de la bonnette ; 2° le sujet est aune distance inconnue.

Dans le premier cas, on tire le second tube du Duhé, le plus grand, jusqu'à ce que le numéro gravé sur le tube et correspondant à là désignation de la distance choisie vienne affleurer le bord du tube externe. On porte l'appareil à son oeil, côté de la lentille du réticule contre son oeil, on vise le sujet et l'on s'approche de celui-ci jusqu'à ce que son image renversée apparaisse, avec une mise au point absolue, sur le verre douci portant le réticule. L'opérateur est certain alors que s'il place son appareil de façon que la surface sensible de la plaque se trouve dans le plan, vertical

Le Duhé.

O I.onpo de mise au point adaptée à l'extrémité d'un petit tube

pouvant se tirer suivant la vue de l'opérateur. 1) Verre douci portant un réticule.

(J Tube extérieur glissant à frottement doux sur le tube intérieur T. O Graduations indiquant les distances.


22 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

de son oeil, cette surface sera éloignée du sujet exactement de la distance qu'il a choisie.

Dans le second cas, il vise d'abord le sujet, fait mouvoir le plus grand tube du Duhé jusqu'à mise au point absolue de l'image sur le verre douci, et lit alors le numéro affleuré par Je bord du tube externe. Si ce numéro ne correspond pas exactement aux tirages ou aux bonnettes dont il dispose, il voit immédiatement s'il doit se reculer ou s'avancer pour rentrer dans les conditions d'opération dont il a les moyens.

Rien que ces dispositions soient suffisantes pour constituer un appareil de première utilité, le Duhé se prêle cependant encore à d'autres applications que voici :

Si l'on retourne l'appareil et que l'on regarde par l'extrémité antérieure la loupe tournée vers l'objet, on a ainsi un véritable viseur permettant de chercher et de délimiter le motif à prendre.

Si l'on dévisse les deux tubes on a, avec le petit, une excellente loupe de mise au point. Il suffit d'appliquer l'extrémité ouverte contre la glace dépolie de la chambre noire et de regarder par l'extrémité portant la loupe.

Légèrement construit, d'une manipulation rapide et on ne peut plus simple, gradué avec soin, le Duhé constitue ainsi le complément indispensable de n'importe quelle chambre à main. Avec lui on est sûr d'une mise au point rigoureuse, d'une réussite certaine et absolue, du moment que l'on n'oubliera pas que la distance se compte à partir de l'oeil de l'opérateur. C'est là un point essentiel et sur lequel je ne saurais trop appeler votre attention pour obtenir un bon rendement de l'appareil.

LES TEMPS DE POSE AU CREPUSCULE

On a cru longtemps qu'il n'était possible d'obtenir une bonne épreuve photographique qu'en tournant le dos au soleil. Puis on a admis qu'on pouvait l'avoir à droite ou à


! LES TEMPS DE POSE AU CRÉPUSCULE. 23

tmuche de l'objectif. Enfin, la plaque au gélatino-bromure aidant, on a risqué l'obtention d'épreuves à contre-lumière, même avec le soleil complètement dans le champ du tableau. J'ai pu ' et je puis toujours, par expérience, vous o-arantir qu'avec un peu de soin dans la pose et de la sagacité dans le développement, on obtient ainsi de très belles épreuves. Je me suis risqué souvent à opérer, même après le coucher du soleil, et j'ai obtenu ainsi des résultats surprenants.

Or voici que la Photographische Rundschau nous donne les temps de pose, au crépuscule, en prenant pour unité le temps qu'il faut poser pour un objet dans l'ombre pendant lu journée.

Soit -|— IJ. S. et — II. S. la hauteur du soleil au-dessus ou au-dessous de l'horizon; H. A. l'heure approximative. T. R. le temps de pose relatif; T. A. le temps de pose absolu avec une ouverture F/7 ; on a :

11. S -|- 40° ; II. A. 6 heures et plus avant le coucher du soleil. T, R. 1 seconde ; T. A. 1/40 de seconde.

II. S. -\- A" II. A. 1/2 heure avant le coucher du soleil ; T. R. 10 secondes ; T. A. 1/4 de seconde.

II. S. -f- 2°; H. A. 1/4 d'heure avant le coucher du soleil; T. R. 20 secondes ; T. A. 1/2 seconde.

II. S. 0°; IL A. coucher du soleil ; T. R. 00 secondes; T. A. 1 seconde et demie.

II. S. — 2"; H. A. 1/4 d'heure après le coucher du soleil; T. R. 240 secondes ; T. A. 6 secondes,

ILS. — 4" ; II. A. 1/2 heure après le coucher du soleil; T. R. 1,200 secondes ; T. A. 30 secondes.

ILS. — 6°; H. A. 3/4 d'heure après le coucher du soleil; T. R. 7,200 secondes; T. A. 3 minutes.

H. S. — 8° ; H. A. 1 heure après le coucher du soleil ; T. R. 50,400 secondes ; T. A. 21 minutes. Ajoutons à cela :

H. A. au clair de lune ; T. R. 25,000 secondes; T. A. 1 heure 45 minutes.

1. Voir : La Théorie, la Pratique et l'Art en Photographie, page 376.


24 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Ces temps d'exposition sont calculés pour des plaques ordinaires au gélatino-bromure. Quant aux objets à photographier, ils sont supposés être tournés vers l'Ouest.

Essayez avec ces temps de pose. Vous avez toute une mine d'effets artistiques à exploiter.

DIAPHRAGME IRIS ET MODÉRATEUR DE VITESSE DES PHOTO-JUMELLES

Jusqu'à ce jour, les photo-jumelles J. Carpentier étaient munies de diaphragmes interchangeables. Leur adaptation nécessitait une manipulation encore trop lente, quoique rapide, au gré de l'amateur. M. J. Carpentier a songé à leur substituer le diaphragme iris. Mais si le montage d'un diaphragme iris, dans les objectifs rectilinéaires, n'offrait aucune difficulté, il était loin d'en être de même avec les objectifs Zeiss, que j'ai fort recommandés dès l'apparition des photo-jumelles 1 et qui sont, à l'heure présente, presque exclusivement employés sur ces appareils.

Ces objectifs, en effet, ont leurs lentilles d'avant et d'arrière tellement près l'une de l'autre qu'il n'y a entre elles, dans la plupart des cas, qu'une distance variant entre un millimètre et un millimètre huit dixièmes. Il faut encore déduire de cet espace celui réservé au passage de la guillotine de l'obturateur. Recourir à l'altération de la dislance des lentilles, comme on le l'ait quelquefois, ne pouvait entrer dans l'esprit d'un constructeur sérieux.

Aussi M. J. Carpentier a-t-il préféré, avec juste raison, créer un nouveau modèle d'iris qui ne modifie en rien le nouvel écartement adopté et le centrage de l'anastigmat 1 : 8 employé dans ses photo-jumelles.

Ce modèle est adapté à l'intérieur O du tube qui porte la lentille d'avant et se trouve commandé par un anneau molleté G faisant saillie sur l'extérieur de ce tube. Cet anneau est muni d'un repère se déplaçant devant une divi1.

divi1. : Les Nouveautés photographiques, année 1893, page :>7.


DIAPHRAGME IRIS ET MODÉRATEUR DE VITESSE. 25

siun indiquant, en millimètres, l'ouverture du diaphragme. Ou peut donc, suivant les besoins, modifier très rapidement et très sûrement l'ouverture de l'objectif.

En ce qui me concerne, et à moins de cas tout à fait spéciaux, je préfère travailler avec le grand diaphragme toujours, du moment que la plaque est nettement couverte. S'ils donnent de la finesse, les petits diaphragmes, je ne cesse de le répéter, enlèvent le relief de l'image. Au reste on ne saurait les employer en hiver, vu le peu de lumière

que nous possédons. Aussi le grand diaphragme est-il nécessaire en cette saison. Pour permettre de travailler encore mieux en hiver, M. J . Carpentier a muni ses photojumelles d'un modérateur de vitesse permettant de ralentir l'action de l'obturateur.

Ce modérateur, qui s'applique, au moyen de deux vis P 1, P" à toutes les photo-jumelles J. Carpentier 0,5x9, consiste en deux tubes, l'un fixe M, l'autre mobile à l'intérieur. Ce dernier est relié en R au bouton d'armement de l'obturateur par une boucle métallique Q, que l'on peut abaisser ou relever suivant que l'on veut employer ou ne pas employer le modérateur. Le tube intérieur se déplace en aspirant l'air à travers les ouvertures circulaires de diamètres différents percées sur le pourtour de l'extrémité du tube extérieur. Cette extrémité est coiffée d'un chapeau C tournant sur lui-même et percé d'une seule ouverture.

Le fonctionnement de ce modérateur est extrêmement

4

Le diaphragme iris et le modérateur de vitesse des photo-jumelles J. Carpentier.


26 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

simple. Ayant armé l'obturateur, on introduit le bouton d'armement dans la boucle métallique, et l'on rend ainsi le tube intérieur solidaire du mouvement de l'obturateur. On tourne le chapeau G du modérateur de façon à amener un repère en face de la vitesse que l'on désire. Dans ce mouvement, l'ouverture unique du chapeau vient se placer devant une des ouvertures du tube extérieur.

Si alors on presse sur le bouton R pour déclencher l'obturateur, celui-ci entre en mouvement, entraînant avec soi le tube intérieur, mais seulement avec la vitesse que lui permet la rentrée de l'air par l'ouverture laissée par le chapeau. Les vitesses données ainsi à l'appareil sont les suivantes :

Temps en secondes.

Sans le modérateur 1/60

Avec le modérateur, le repère étant à la vitesse de 5, 1/40

- — — 4, 1/30

- - - 3, 1/25

- — — 2, 1/20

- - - l, 1/10

- - - 0, 1/3

Il est facile de saisir le grand avantage que présente ce système de régularisation sur celui qui consiste à employer un frein à frottement. Celui-ci, suivant l'état de l'atmosphère, donne des vitesses absolument fantaisistes. Au contraire, le frein employé dans le modérateur de vitesse des photo-jumelles J. Carpentier est à pénétration d'air par une ouverture donnée. Donc, en vertu de la loi d'écoulement des gaz par une ouverture, le réglage reste toujours constant.

LA STÉNO-JUMELLE

De prime lecture, cette désignation ne nous dit pas grand'chose photographiquement. Sténos, en grec, signifie étroit. Qu'est-ce donc que cette jumelle étroite? Une jumelle qu'on glisse dans sa poche, dans un gousset môme? Quel rapport cette jumelle a-t-elle avec la photographie?


LA STÉNO-JUMELLE. 27

Voici :

Depuis le jour où M. J. Carpentier a eu l'heureuse idée et la bonne fortune, aussi bien pour lui que pour nous, de nous donner, sous le nom de photo-jumelle, un appareil pratique, dissimulable, nous permettant de photographier h hauteur de l'oeil, les fabricants ont senti qu'il y avait là une voie nouvelle ouverte. Or, comme l'appareil qui leur ouvrait cette voie empruntait son nom de jumelle à sa forme et à cette possibilité de visée, ils ont obstinément donné le nom de jumelle à tous les appareils analogues à ce type. Je n'y vois, pour ma part, aucun inconvénient. Au contraire, même, j'y trouve un avantage, puisque, sous cette étiquette généralisée, nous savons tout de suite à quelle classe appartient l'appareil qui la porte. Obéissant à ce principe généralisateur, M. L. Jouxne pouvait pas faire autrement que de dénommer aussi, jumelle, bien qu'elle soit plutôt monocle d'aspect extérieur, une nouvelle détective nous permettant la visée à hauteur de l'oeil. S'il a cru devoir faire précéder du mot sténo cette désignation générale, c'est qu'en somme le mot spécifie bien la particularité de sa jumelle à lui.

Prenons ce mot dans une de ses compositions les plus connues en français : le substantif sténographie. Par sa composition même, ce substantif signifie : écriture étroite, et elle est ainsi dite, soit parce que les signes y sont réduits à leur plus simple dimension, soit parce que les signes sténographiques retranchent presque toutes les voyelles et indiquent les finales entières par des signes particuliers. Il en va de même dans la sténo-jumelle. Elle est jumelle étroite parce qu'elle se trouve réduite aux plus petites dimensions possibles des détectives de ce genre, et par le retranchement de tout ce qui ne concourt pas directement à l'obtention de l'épreuve photographique et parce qu'elle laisse exister entièrement, mais strictement entièrement, toutcequidoitconcouriràl'obtentiondecette même épreuve. En effet, la sténo-jumelle, pouvant contenir dix-huit plaques 6, 5x9, ne mesure pas plus 0m,180 de longueur,


28

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

0m,083 d'épaisseur et O"1,110 de largeur. Son poids total, lorsqu'elle est chargée, s'élève à peine à 1 kilogr. 400. Elle rne paraît donc justifier, en tous points, son appellation de sténo, et je ne crois pas, dans l'espèce, qu'on puisse faire plus .sténo que cette sténo-là. 11 a même fallu pour y atteindre allier le bois à l'aluminium.

Cette réduction dans le volume a été surtout obtenue

par deux chambres rentrant l'une dans l'autre permettant l'escamotage dans leur développement, au lieu de se produire dans une seconde chambre accolée à la chambre utile.

Comme toute jumelle photographique qui se respecte l'appareil de M. L. Joux est muni d'un objectif Zeiss 1 : 8; d'un diaphragme iris ; d'un obturateur s'armant sans démasquer l'objectif, permettant la pose aussi bien que l'instantanéité; d'une mise au point automatique, facultative, rigoureusement réglée depuis 2 mètres jusqu'à l'inLa

l'inLa

Escamotage des plaques dans la Sténo-jumelle.

Chargement de la Sténo-jumelle.


LA STENO-JUMELLE.

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fini; d'un compteur de plaques automatique; d'un viseur et enfin de deux pas de vis du Congrès nous permettant de la placer sur un pied quelconque, soit dans le sens de la hauteur, soit dans le sens de la largeur. Mais, en plus, la sténo-jumelle possède deux autres petits dispositifs bien à elle et tout à fait remarquables.

Le premier est une mire placée devant le viseur et qui, lorsqu'elle se voit au centre des réticules médians de ce viseur, indique très exactement le point de l'image qui

se trouvera, non moins exactement, au centre de la plaque.

Le second est un petit mécanisme que M. L. Joux désigne sour le nom de block-syslem et tel qu'il empêche l'opérateur d'armer l'obturateur de l'appareil, si ledit opérateur a omis d'escamoter la plaque précédemment posée. C'est le mentor de tous les étourdis. Mentor d'autant plus sage que, sil'onjugeàpropos de déclencher, l'obturateur sans prendre une vue, l'objectif recouvert alors de son bouchon, ce mentor nous donne le moyen, par un dispositif complémentaire du premier, de débloquer l'obturateur sans qu'il

Coupe montrant le fonctionnement de l'escamotage dans la Sténo-jumelle.


30 LES NOUVEAUTÉS PII OTOGRAPHIQUES.

soit fatalement nécessaire d'escamoter la plaque qui, dans ce cas, n'a pas été impressionnée.

Pour charger l'appareil vous retirez les porte-plaques par la valve qui est sur le côté de la sténo-jumelle et vous faites jouer l'escamotage à vide jusqu'à ce que le compteur automatique qui se trouve sur le côté vous présente soit le n° 18, soit le n° 1. Si c'est 18 que vous prenez, le compteur vous indiquera ultérieurement le numéro de la plaque posée, si c'est 1, il vous indiquera le numéro de la plaque en batterie, celle qui est à poser. C'est à votre choix.

Vous amenez alors les verrous du magasin dans une direction parallèle au fond de l'appareil, et vous ouvrez le couvercle. Les porte-plaques étant chargés, vous les placez dans ce magasin par ordre de numéros et vous fermez le couvercle en ramenant les verrous perpendiculairement au fond de l'appareil.

A partir de 8 mètres aucune mise au point n'est nécessaire. En deçà vous faites manoeuvrer le levier qui se trouve sur le côté de la sténo-jumelle de façon à le faire coïncider avec le chiffre qui, sur un arc de cercle gradué, représente, en mètres, la distance à laquelle est situé le motif. Voulez-vous opérer instantanément? Vous faites jouer un bouton qui se trouve au-dessus de l'objectif de façon qu'il découvre la lettre I ; vous tirez à fond la tige d'armement de l'objectif et vous la laissez retomber d'elle-même, et vous voyez alors saillir une petite aiguille à côté du bouton de cette tige. Le déclenchement se fait soit au doigt, soit à la poire.

Pour le poser, vous faites jouer le bouton qui se trouve au-dessus de l'objectif de façon qu'il découvre la lettre P, et vous mettez le régleur de vitesse de l'obturateur à sa plus petite vitesse. Vous armez comme pour l'instantanéité et vous déclenchez de même, seulement en deux fois. La première est destinée à ouvrir l'objectif et la seconde à le fermer.

Pour escamoter la plaque visée, vous saisissez la sténojumelle de la main gauche, objectif bien en l'air; vous


LA STENO-JUMELLE.

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prenez de la main droite l'anneau qui est sous le volet du magasin, vous le tournez perpendiculairement, vous retirez à vous franchement et bien à fond, vous repoussez vivement et vous remettez l'anneau dans sa position première.

Dans le premier mouvement, la plaque visée est tombée au fond de la chambre, et, dans le second, elle est venue se loger sous la pile de plaques, permettant à la plaque n°2 de se mettre en batterie.

Je viens de dire bien à fond et vivement, et j'ai souligné parce qu'il peut y avoir là un insuccès. Si ces opérations se l'ont avec mollesse, le block-system peut très bien ne pas se dégager entièrement, et vous vous trouveriez dans l'impossibilité d'armer à nouveau l'obturateur, bien que la plaque soit escamotée. Recourir au débloquage du block-system peut être, dans ce cas, une manoeuvre vaine. Voici alors ce qu'il faut faire : vous introduisez une fine épingle dans le trou par où apparaît l'aiguille lors de l'armement, et vous tournez en tous sens, comme si vous vouliez agrandir ce trou. Cette manoeuvre enfonce une clenche du block-system qui n'a pas suffisamment joué, et vous pouvez continuer à opérer.

Il est encore un autre insuccès contre lequel j'ai à vous mettre en garde. Si bien construite que soit la sténo-jumelle, il peut se faire, pour une cause ou pour une autre, qu'il n'y ait pas contact parfait entre les parois des deux chambres, constituant le tiroir propre à l'escamotage. Donc, lors de l'escamotage, il y aurait une légère infiltration de lumière, par conséquent voile sur l'un des bords de la plaque. Il est donc toujours prudent de ne pas faire l'escamotage devant le soleil.

Voilà les qualités et les défauts qui m'ont été révélés par l'étude de ce nouvel appareil. Les qualités l'emportent de beaucoup sur les défauts, qui sont même plutôt des accidents de manipulation que des défauts d'appareil. Je n'hésite donc pas à comprendre la sténo-jumelle parmi les chambres à main sérieuses nous permettant de faire de l'art en photographie par les petites épreuves.


32

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

CHAMBRE NOIRE « LE MIXTE ».

Substantivement, le mot « mixte » désigne surtout un verre d'eau et de vin que, dans certaines communautés, le lecteur

de table prenait avant de commencer son office. Donc un mixte est un composé de deux choses différentes formant,

en un tout, une troisième chose définie nettement. Cela nous indique du même coup que le nouvel appareil « le mixte », construit par la maison Jontc, est un appareil

Chambre noire le Mixte fermée et un de ses châssis.

Chambre noire le Mixte ouverte.


LE GLOB-TROTTER.

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tenant à la fois de deux appareils. En effet, il peut être chambre noire à pied, ou chambre noire à main. Quelques dispositions ingénieuses le caractérisent.

Cette chambre noire nouvelle, pour la facilité de transport et d'emploi à la main, est d'une légèreté incroyable. Néanmoins, par son soufflet, elle permet le travail sur pied à toutes distances et avec des objectifs de foyers très différents. Il y a tout un monde de considérations au point de vue de l'art, j'y reviendrai sans doute.

Le modèle 13x18, qui a toujours été et reste encore le format courant de tout amateur pour les opérations très sérieuses, nous donne, avec ce nouveau système, une chambre noire qui, fermée, ne mesure guère que quatre centimètres d'épaisseur. Sans les châssis son poids n'atteint pas à un kilogramme. Grâce à une intelligente disposition de bascule, elle se monte, pour ainsi dire, instantanément. Une réglette à divisions métriques permet, sans hésiter, de fixer l'avant à des distances déterminées. On peut, par conséquent, sans avoir besoin de mettre au point, opérer immédiatement.

LE GLOB-TROTTER.

Le Glob-trotler constitue une excellente application du châssis Hanau-Richard dont je vous ai entretenu en commençant

commençant revue annuelle. Il est construit surtout, pour l'emploi d'un format très utile aux amateurs, le 9x 12, et je ne saurais leur en vouloir de cette préférence. L'épreuve

5

Glob-trolter. — Changement de la plaque.


34 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

9x12 est, en somme, parfaitement vue directement. Les plaques ne sont pas encore assez grandes pour devenir encombrantes lorsqu'on en emporte avec soi une grande quantité et, d'une épreuve 9x12, il est loisible de tirer largement tout ce qu'il faut pour la projection ou pour l'agrandissement.

La moindre détective qui se respecte, ou veut chercher à se faire respecter, présente un magasin renfermant un minimum de douze plaques. C'est le cas du Glob-trotter qui, sous sa couverture de maroquin, a une petite allure très

comme il faut qui le rend tout à fait apte à servir au travail photographique des jeunes filles, et les jeunes filles viennent de plus en plus à la photographie.

C'est la plus aimable des conquêtes que fait cette grande séductrice.

Les organes du Glob-trotter sont combinés de telle sorte qu'ils présentent une solidité, pour ainsi dire, complète, et une grande régularité do manoeuvre en même temps qu'une grande simplicité. Si, en réalité, ils se construisent sur plusieurs modèles différents, quatre je crois, ils peuvent cependant être réduits à deux types principaux. Ces principaux consistent dans l'adaptation de l'excellent châssis d'escamotage Hanau-Richard, que l'on substitue au mode d'escamotage par le sac de cuir, duquel, je l'ai dit bien des fois, je ne suis aucunement partisan parce qu'il peut produire des éraflures sur les plaques. Ces déboires ne sont jamais à craindre à l'aide de l'escamotage par les châssis à tiroir, dont les photo-jumelles J. Carpentier nous ont montré

Glob-lrotter. — Prise du sujet.


PIED-CANNE CONSOLIDE. 33

l'excellence d'emploi. De plus, le magasin constitué par ce châssis peut être, comme dans le Glob-trotter, absolument indépendant de l'appareil, de telle sorte que si l'opérateur veut se munir de châssis do rechange, ce n'est plus une provision de douze plaques qu'il a à sa disposition, mais une réserve de douze multipliée par le nombre de châssis qu'il possède. Veut-il même ne se charger que d'une réserve moindre? Le châssis à magasin, par sa mobilité, peut être remplacé par de simples châssis doubles ordinaires.

[1 va de soi que le Glob-trotter est, comme tous ses congénères,

congénères, de deux viseurs permettant d'opérer dans le sens de la largeur ou de la hauteur de la plaque, et que son objectif est accompagné d'un obturateur à vitesses variables permettant de faire de l'instantanéité ou de la pose. Cet objectif est un Darlot hémisphérique extra-rapide, ou un anastigmat Zeiss. C'est une question d'adaptation aux différents budgets des amateurs. Mais ces objectifs sont tous les deux montés sur une planchette déplaçable, ce qui permet à l'amateur de faire varier la mise au point suivant la distance à laquelle il se trouve du sujet à photographier.

PIED-CANNE CONSOLIDÉ.

De tous les supports de chambre noire à main, le piedcanne est, sans conteste, celui que les amateurs affectionnent le plus. Ils ont bien raison. Car si le support est utile au photographe touriste, la canne ne l'est pas moins.

Glob-trotter. — Changement de diaphragme.


36 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Toutefois ce genre de pied, par cela même qu'il est léger, n'offre pas des garanties de stabilité suffisantes les jours de vent.

Pour parer à cet inconvénient, il vient d'être fabriqué de nouveaux pieds-canne dont les branches intérieures sont munies de tenons s'ouvrant et se fermant à la manière des baleines d'un parapluie. De cette façon la stabilité .>st considérablement augmentée, et la consolidation de tout le système devient parfaite.

CYCLISME ET PHOTOGRAPHIE.

Quand le printemps revient, les vélocipédistes s'en donnent à coeur joie; à non moins coeur joie les photographes

aussi. Les plus heureux peut-être, mais en tous cas les plus malins, sont ceux qui pratiquent à la fois la bicyclette et la chambre noire. Je comprends très facilement, et pour cause peut-être, que celle-ci se passe bien aisément de celle-là; mais je comprends beaucoup moins que celle-là ne veuille pas compagnonner avec celle-ci. A mon sens, et à moins d'être un dessinateur émérite sachant enlever rapidement le croquis à la pointe du crayon, je ne sais guère comprendre le cyclisme sans la photographie. Les deux se complètent. Avaler des kilomètres comme la montre du Marseillais avale des heures, c'est sans doute fort beau, mais

Le « 1895 » fermé.

Le « 1S95 » ouvert.


CYCLISME ET PHOTOGRAPHIE. 37

d'une beauté qui dépasse mon intelligence. Combien mieux je saisis le cycliste qui fait acte do touriste, sachant voir, s'arrêter et prendre un souvenir. Il fait oeuvre hygiénique et oeuvre intelligente. Rien n'est plus facile avec nos appareils photographiques actuels. Et même il vient d'être

créé, sous ce titre bizarre, quoique très simple, le 1895, tout un matériel photographique complet pour les cyclistes.

Il se compose d'une photo-jumelle J. Carpentier 4,5x0. Je ne vous en renouvellerai point la description. Je rappellerai seulement que c'est l'appareil qui semble le mieux convenir aux touristes, partant aux cyclistes, et par son faible poids, et par son volume réduit, et par sa commodité, et par son infaillibilité, et par la simplicité de sa manipulation.

La photo-jumelle 4,5x0 est un appareil à magasin. A l'aide d'un étuisac, elle peut être très aisément et très solidement montée sur le guidon sans qu'elle ait à craindre les heurts, les poussières ou les intempéries.

Le magasin à accessoires, le laboratoire

laboratoire de forme trapézoïdale, s'assujettit par trois courroies à l'intérieur du cadre de la bicyclette. Il renferme : 1" Un abat-jour d'étoffe rouge complètement inactinique pouvant se plier et se réduire au plus faible volume possible, pouvant coiffer n'importe quelle lanterne-vélo, et. plus particulièrement le modèle en aluminium et à rabattement de M. Georges Richard, qui s'est fait une réelle réputation dans la construction des bicyclettes ;

2° D'une boîte contenant une douzaine de plaques de rechange ;

3° De trois cuvettes en celluloïd 9x12 de couleurs difLe

difLe télescopique.


38 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

férentes pour éviter toute erreur dans l'emploi des bains et d'une en aluminium;

4° De deux doses de révélateur en sel renfermées dans deux tubes scellés. Chaque dose peut servir pour une douzaine au moins de plaques 4,5x0 ;

5" De deux doses de fixage en sel, chaque dose pouvant servir pour deux ou trois douzaines de plaques 4,5. <6;

0° D'un châssis-presse affecté au tirage des épreuves diapositives par contact;

7° D'une douzaine de plaques magiques 4,5x6 en verre douci pouvant donner de magnifiques diapositives. Avec ces plaques, le développement, le lavage, le fixage et le virage compris n'exigent guère plus d'une minute de manipulation ;

8° D'un paquet de dix pastilles de photopoudre permettant de prendre dix instantanées la nuit ou dans des endroits obscurs ;

9" D'une notice sur la photo-jumelle et d'une instruction pour l'emploi du matériel du « 1895 ».

Enfin pour terminer et pouvoir, suivant le cas, faire du poser, un pied télescopique en aluminium, renfermé dans un sac de peau, peut être également assujetti sur le guidon.

Tout ce matériel si complet ne pèse pas très lourd et le cycliste peut, dans toutes les conditions imaginables, prendre une photographie. C'est ma foi très précieux.

Je viens de parler d'un pied télescopique ou lêlescopic, pour me servir de l'orthographe anglaise de son nom, en me demandant quand on voudra bien nous débarrasser de tout ces anglicismes de parade. Ce pied est extrêmement ingénieux et, en aluminium, ne pèse guère plus de 400 grammes. 11 se fait également en cuivre nickelé, en acier poli et en cuivre renforcé et nickelé. Dans ce dernier modèle, il supporte, sans tremblement ni fatigue, une chambre 13x18. Chaque branche est munie de quatre coulisses, ce qui permet d'amener l'appareil que supporte le pied à hauteur de la vision.


CARAMÉLISATION DES PLAQUES.

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CARAMÉLISATION DES PLAQUES.

Pendant les beaux jours d'été, où nous avons du soleil à objectif que veux-tu, les irradiations photographiques autrement dites : halo, solarisation, etc., ont beau jeu de se faire sentir, surtout chez les amis des grands effets de contrelumière. C'est le cas ou jamais de badigeonner l'envers des plaques d'un enduit absorbant, permettant d'éviter ou tout au moins d'atténuer considérablement ce grave phénomène.

Je vous ai déjà donné 1 la composition de plusieurs mixtures destinées à atteindre ce but. En voici encore une qui, quoique de date ancienne, n'en est pas moins efficace pour cela. Dans l'espèce, plus on a de formules à sa disposition, mieux cela vaut, puisque l'on peut choisir celle que l'on trouve le plus pratique dans le moment où l'on opère.

Si je ne m'abuse pas, c'est à feu A.-M. Lévy que nous devons celle dont je vais vous parler et qui consiste, en somme, à caraméliser sa plaque.

Vous prenez 500 grammes de sucre que vous pulvérisez finement. Vous placez le tout dans un plat émaillé que vous portez sur un réchaud à gaz. Le sucre fond et, tout en le remuant constamment, vous le laissez atteindre à une température de 410° C. 11 faut, par conséquent, employer un thermomètre pouvant marquer au moins 450° G. Le sucre fondu s'épaissit et vous le coulez sur une assiette.

Vous obtenez ainsi un beau caramel noir cassant, parfaitement soluble dans l'eau. On peut donc l'étendre aisément et il sèche en laissant sur le verre, où on l'a étendu, une pellicule dure que l'ongle ne saurait rayer.

C'est encore ce caramel qui va former la base d'une autre mixture, quoique, simplement dissous dans l'eau, il puisse nous permettre d'atteindre au but que nous visons.

Voir : La Théorie, la Pratique et l'Art en photographie, page 193 et Les Nouveautés photographiques, année 1893, page 96, et année 1895, page 17.


40 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Cette mixture est la suivante :

Alcool à 90° 62 crna.

Solution épaisse de gomme arabique. . . 31 —

Caramel 31 grammes.

Terre de Sienne brûlée en poudre. ... 31 —

Avec un tampon de ouate, recouvert de toile, vou.i appliquez cette mixture au dos de vos plaques. En une demiheure la couche est sèche et vous pouvez remballer vos plaques préparées, gélatine contre gélatine, pour ne les tirer de leur boîte qu'au moment de l'emploi.

Avant de les développer il suffira, pour enlever la mixture, de mettre le dos des plaques sous un robinet d'eau et de les frotter avec un chiffon.

DÉVELOPPEMENT A L'ACIDE PYROGALLIQUE.

L'Amérique est le pays des nouveautés, mais surtout des grands enthousiasmes, car ses nouveautés ne sont souvent que du vieux-neuf. Pour l'instant elle nous déclare à grand son de trompettes que rien ne vaut pour le développement la formule américaine Moreno.

Le meilleur moyen de vérifier le bien fondé de cette déclaration est d'essayer. Je vous engage à n'y pas manquer. Car en considérant la formule, elle ne peut que donner en effet de très bons résultats. Mais est-elle bien neuve? Tous ceux qui savent manier l'acide pyrogallique, le meilleur encore de tous les révélateurs à l'heure présente, opèrent d'une façon si analogue qu'elle frise l'identité. Jugez-en.

Trois flacons sont enjeu.

Le premier, A, contient une solution à saturation de carbonate de soude;

Le second, R, est rempli d'une solution à saturation de sulfite de soude;

On forme le contenu du troisième flacon C avec une quan-


lité quelconque de la solution R, dans laquelle on fait dissoudre, autant que possible, de l'acide pyrogallique.

Cet autant que possible me donne un peu à rêver, car l'acide pyrogallique se dissout déjà à 40 pour 100 dans de l'eau, et le sulfite est à saturation à 25 pour 100. Donc si l'on allait au bout de 1'« autant que possible », nous n'aurions pas assez do sulfite pour conserver l'acide pyrogallique, puisque nous estimons, dans la pratique courante, qu'il faut, pour une conservation moyenne, cinq à six fois plus de sulfite que d'acide pyrogallique. Pour rester dans la normale, le « autant que possible » me semble devoir se traduire par 5 grammes d'acide pyrogallique pour chaque 100 centimètres cubes de solution à saturation de sulfite prélevée sur la réserve R. A moins qu'on ne veuille pas chercher à garder cette dernière solution et qu'on la prépare seulement au moment de s'en servir et en quantité imposée par le besoin immédiat. Ma réserve faite sur le « autant que possible », continuons.

Pour développer, on prend 24 parties de la solution A, 48 parties de la solution R, et 2 parties de la solution G. Cette dernière proportion est un peu dépendante des plaques employées. Si certaines marques n'exigent que 2 parties de G, il en est d'autres qui en réclament jusqu'à 4.

On peut également, mais dans le cas de toutes les plaques, augmenter la quantité de la solution R. Plus on l'augmentera, plus le ton du phototype tournera au gris bleu.

Étant donnée cette grande quantité de sulfite employée, le bain développateur ne s'oxyde que très lentement et peut servir à développer une douzaine de plaques environ. Les images présentent des détails abondants et un modelé remarquable, et leur intensité permet une impression parfaite.

Vu les constituants mis en jeu, je n'y contredirai point. Toutefois je ferai remarquer qu'avec de telles quantités de produits, les solutions acquièrent une grande densité et coulent sur les plaques à la manière de l'huile. Il sera donc bon do bien surveiller l'immersion desdites plaques.

6

DÉVELOPPEMENT A L'ACIDE PYROGALLIQUE. 41


42 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

C'est, en somme, un développement pratique par sa simplicité et rappelant beaucoup celui à la cuillère, que j'ai donné dans tous ses détails '.

DÉVELOPPEMENT AU DIAMIDOPHÉNOL

Parmi tous les révélateurs lancés depuis quelques années dans le laboratoire du photographe, le diamidophénol est certainement un des moins mauvais et aussi un des plus commodes. Ce diamidophénol, que, d'après la désignation allemande, on nomme aussi amidol, mérite, pour deux raisons, la peine d'être étudié. D'abord il fond aussi rapidement que l'acide pyrogallique, ce qui permet, au besoin, de travailler le bain de développement comme avec le pyrogallol; ensuite il agit sans le secours d'un alcali. Or l'alcali est toujours une source de voile. L'iconogène et le pyrogallolpeuvent agir sans alcali, mais lentement; tandis que le diamidophénol est très rapide ot que tout alcali se montre même nuisible à son action.

La constitution d'un développement au diamidophénol est des plus simples et son maximum d'énergie semble être lié aux relations suivantes ;

Le bain de développement ne doit jamais contenir plus de 1 pour 100 de diamidophénol; la quantité de sulfite do soude anhydre à employer doit être, en poids, dix fois celui du diamidophénol.

Pour les papiers à tirage direct, insuffisamment impressionnés, le diamidophénol permet de les développer sûrement. Mais c'est surtout pour les photocopies diapositives destinées à la projection que ce révélateur est recommandable, et parce que son absence d'alcali empêche le voile et parce que les noirs les plus profonds qu'il donne gardent toujours une belle transparence.

Si vous en faites usage pour ce genre de travail, notez toutefois ceci comme une règle quasi absolue : Par cela

l. Voir : La Théorie, la Pratique cl l'Art en photographie, page 127.


LA PYROCATÉCHINE DE SYNTHÈSE. 43

même que les noirs donnés sont transparents, il faut que le développement soit poussé aux dernières limites, c'est-àdire que l'image soit entièrement et parfaitement visible au dos de la plaque et que les blancs se grisent franchement. Autrement l'image serait trop légère.

Ceci dit, pour employer le diamidophénol, il suffit de faire une solution titrée de sulfite de soude anhydre, qui se conserve indéfiniment. Celle que j'emploie est de 15 pour 100. Au moment de travailler, on pèse la quantité de diamidophénol dont on croit avoir besoin, et on la fait dissoudre dans de la solution de sulfite, en tenant compte de la loi que je vous ai donnée. Soit, par exemple, 3 grammes de diamidophénol. Nous prendrons 200 cm 1 de la solution do sulfite.

Remarquez que le bromure de potassium n'agit que faiblement sur le diamidophénol. Pour que l'action commence, il faut qu'il soit au moins en poids égal. En revanche, les acides retardent l'action de ce révélateur jusqu'à l'arrêter complètement. Une solution d'acide acétique à 10 pour 100 peut donc, par gouttes, être employée comme retardateur.

LA PYROCATÉCHINE DE SYNTHÈSE.

L'hydroquinono, si employée aujourd'hui comme révélateur, possède deux isomères : la rèsorcine et la.pyrocatéchine. En prenant pour unité le pouvoir révélateur de l'hydroquinone, on constate que celui de la résorcinc est : 0.32 et celui de la pyrocatéchine : 1,3. Encore si l'on s'en rapporte aux excellents travaux de MM. Lumière fils, les propriétés révélatrices de la rèsorcine ne seraient même dues qu'à son état d'impureté, c'est-à-dire à la présence do petites quantités de pyrocatéchine ou d'hydroquinone.

Toujours est-il que la pyrocatéchine agit plus rapidement que l'hydroquinone préparée dans les mêmes proportions , fournit beaucoup plus de détails dans les ombres, avec une pose moindre, et amène plus vite le phototype


44 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

négatif à l'intensité voulue. D'ailleurs, enregistrons, en passant que, de tous les révélateurs connus, c'est l'hydroquinone qui fait venir le moins de détails dans les ombres.

De plus, le bain à la pyrocatéchine s'altère très lentement à l'air, ce qui permet un développement prolongé. Chose à considérer maintenant surtout que l'on prise si fort l'instantanéité et qu'il parait parfaitement démontré que plus une image a été obtenue instantanément plus elle demande à être développée lentement.

Les phototypes obtenus avec la pyrocatéchine approchent très sensiblement, comme finesse, do ceux donnés par l'acide pyrogallique. Alors que l'hydroquinone pousse à la dureté de l'image par l'opacité des noirs du phototype, la pyrocatéchine, par la transparence de ces mômes noirs, conduit à l'obtention d'une image plus douce et incomparablement plus modelée.

Par malheur, la pyrocatéchine, par son prix élevé, n'a jamais pu entrer dans la pratique courante.

Justement émus de cet abandon auquel a été livrée la. pyrocatéchine, MM. Poulenc frères ont cherché à obtenir cet orthodiphénol de façon à pouvoir en abaisser considérablement le prix de vente. Pour atteindre ce but, ils ont employé la synthèse. Ne se servant plus alors pour la fabrication des produits utilisés autrefois et qui étaient d'un prix assez élevé par eux-mêmes, MM. Poulenc frères sont parvenus à fabriquer synthétiquement de la pyrocatéchine, pouvant être livrée à 0 fr. 15 le gramme. Ce prix tendra même à dimininuer quand la demande se portera sur ce produit. Or, il n'est pas douteux qu'elle s'y porte dès que l'on considère les éminentes qualités de la pyrocatéchine.

Cette résurrection, pour ainsi dire, de la pyrocatéchine, va inciter les chercheurs à étudier à fond ses meilleurs modes d'emploi. Je me borne donc, pour l'instant, à vous donner la formule préconisée par MM. Poulenc frères qui, telle qu'elle est, fournit de bons résultats.


SUCCÉDANÉS DES ALCALIS DANS LES RÉVÉLATEURS. 45

Vous préparez les solutions suivantes :

A. Eau distillée 300 cm 3.

Sulfite de soude 20 grammes.

Pyrocatéchine de synthèse .... 10 —

B. Eau 500 cm 5.

Carbonate de potasse 100 grammes.

Pour l'usage vous prenez une partie de A, une partie de R et une partie d'eau de dilution.

Le développement se conduit comme celui à l'acide pyrogallique. Si besoin est d'employer un retardateur, vous vous servez d'une solution d'acide borique à 2 pour 100 de préférence à une solution de bromure de potassium.

SUCCÉDANÉS DES ALCALIS DANS LES RÉVÉLATEURS ALCALINS

Est-il possible de substituer des substances à réactions alcalines aux alcalis caustiques ou carbonates employés jusqu'à ce jour dans les révélateurs alcalins? Cette question a. dû hanter bien souvent le cerveau de ceux qui rêvent de concourir aux progrès de la photographie. MM. Lumière frères et Seyewetz se sont livrés à de nombreuses expériences pour en trouver la solution.

Ils ont obtenu d'excellents résultats avec les sels basiques alcalins d'acides tribasiques, tels que les acides phosphoriques et arséniques. Leurs essais ont porté sur les révélateurs suivants : acide pyrogallique, hydroquinoneÂconogène, paramido'phènol, mêtol, glycin. Sauf avec le paramidophénol, les effets obtenus permettent d'affirmer qu'avec les autres révélateurs indiqués on peut avantageusement remplacer par le phosphate tribasique de soude les alcalis caustiques ou carbonates.

Déjà, d'après MM. Lumière et Seyewetz, avec une dose de phosphate correspondante.à celle du carbonate de soude, c'est-à-dire 133 grammes de phosphate tribasique de soude pour 100 grammes de carbonate de soude cristallisé, on a,


46 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

dans tous les cas, des phototypes négatifs plus intenses qu'avec le carbonate et, a fortiori, si l'on force la dose de phosphate, ce que l'on peut faire sans risquer de compromettre la solidité de la couche de gélatine. Il n'en est pas de même dans le cas des alcalis caustiques ou carbonates qui, à doses trop fortes, poussent rapidement au décollement et au voile.

Ces constations sont d'un grand intérêt. Elles nous permettent de prévoir que, dans un avenir très prochain, les les phosphates tribasiques alcalins remplaceront les alcalis caustiques dans la confection des bains de développement, constitués avec des révélateurs organiques.

DÉVELOPPEMENT LENT DES INSTANTANÉES

Il n'y a pas à le nier, la photographie instantanée est entrée victorieusement dans nos moeurs. Elle et la bicyclette sont, à l'heure présente, les deux grandes séductrices qui nous ont subjugués et nous subjuguent. A tout prendre, je n'y vois pas grand mal. Rien au contraire, si l'on veut se soumettre intelligemment à leur joug. Ron nombre de motifs artistiques et presque tous les grands effets de lumière, les plus artistiques de tous les motifs, ne se prennent bien qu'avecd'instanéité* Pourtant, je l'avoue, j'ai dit et écrit souvent que l'épreuve instantanée devient impropre à l'art par la difficulté où nous nous trouvons de la développer de telle façon qu'elle se montre harmonieuse clans son ensemble. Si donc, dans l'état actuel des outils que nous possédons, nous arrivons à récupérer cette harmonie, l'instantanéité nous donnera des résultats vraiment artistiques de premier ordre. Or, toutes les expériences que j'ai faites d'une façon continue depuis plus d'un an m'amènent à conclure qu'un développement lent, très lent même des instantanées nous conduit à l'harmonie de l'épreuve.

Depuis longtemps déjà je me suis nettement convaincu, à propos des posées, qu'un développement lent, très lent


DÉVELOPPEMENT LENT DES INSTANTANÉES. 47

est, en tous points, préférable à un développement rapide. C'était une indication. Elle a été suggérée à d'autres esprits. En Allemagne, en effet, le Dr Meydenbauer constatait qu'en laissant agir un révélateur très dilué pendant plusieurs heures, sur une plaque très nettement sous-exposée, il obtenait de la sorte beaucoup plus de détails dans les ombres qu'en employant un révélateur concentré, ou tout au moins à dose reconnue normale. Le Dr Neuhauss confirmait ces résultats. Tous les deux opéraient avec l'acide pyrogallique, qui est et reste au demeurant le plus parfait des révélateurs que nous possédions.

En France, notre regretté commandant Fourtier, dont j'ai tenu toujours en haute estime les travaux photographiques, reconnut la vérité de ces faits en faisant usage de l'hydroquinone, un révélateur dont on s'est engoué, bien à tort cependant, et les plus sincères n'hésitent pas à le reconnaître aujourd'hui,

C'était plus qu'il n'en fallait pour me décider à tenter des essais vers lesquels mon expérience et une secrète intuition me poussaient déjà. Et ces essais je les ai tentés non seulement avec tous les révélateurs connus, mais encore en combinant entre eux certains de ces révélateurs. Je vous dirai tout de suite que ceux pui se prêtent le mieux à ce genre de travail, sont : l'acide pyrogallique, le chlorhydrate de diamidophénol ou amidol, et aussi la pyrocatéchine de synthèse. Comme révélateurs mélangés nous avons l'acide pyrogallique allié à l'iconogène, puis, dans une plus faible mesure, l'iconogène avec l'hydroquinone, la pyrocatéchine de synthèse avec l'hydroquinone ou le paramidophénol. Je dis plus faible mesure, car les développements dans lesquels entre l'hydroquinone ne peuvent dépasser un certain degré de lenteur sans laisser à l'opérateur les craintes de l'obtention du fameux voile jaune de l'hydroquinone, absolument impropre à tout bon tirage.

Mais pourquoi cette lenteur dans le bain, alors qu'il est admis généralement que dans le développement des instantanées on doit remédier au manque d'action de la lumière


48 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

par une augmentation d'action du révélateur? D'abord, parce qu'un bain lent, de même que cela a lieu dans la gravure à l'eau-forte, donne plus de douceur et de finesse à l'image. Ensuite parce que dans le développement des instantanées un voile tend toujours à se montrer sur la plaque et à s'y montrer d'autant plus intense que la pose a été plus courte, d'autant plus vite que le révélateur esi plus concentré. L'image est à peine dessinée sur la surface sensible, que ce voile la recouvre aussitôt, qu'on ne suit plus

sa venue, qu'on fixe alors et que l'image finale insuffisamment profonde, manque de détails dans les ombres et présente, en même temps qu'une faiblesse générale, un très grand heurté entre les ombres et les lumières.

Ce voile est connu sous le nom de voile de sous-exposition. Il est produit par une certaine quantité de rayons lumineux traversant l'objectif, diffusés dans la chambre noire après en avoir frappé les parois. Si l'on emploie un obturateur à ouverture centrale, il se trouve encore augmenté par la diffraction produite par le minimum d'ouverture qui a lieu au départ et à l'arrivée, produisant ainsi un éclairage dont l'image ne bénéficie pas. Dans la photographie au poser, l'action du faisceau impressionnant devient assez grande pour primer, jusqu'à les annihiler, ces effets de diffusion.

Cuvette verticale pour le développement lent.


DÉVELOPPEMENT LENT DES INSTANTANÉES.

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Voilà vraiment de bonnes raisons militant en faveur du développement lent. Seulement nous développons d'ordinaire avec des cuvettes horizontales. Or si, opérant de la sorte, nous prolongeons notre développement pendant des heures et des heures, nous garderons infailliblement sur la

plaque des dépôts gênants, à moins de nous livrer à des balancements de cuvettes qu'il faudra automatiques pour n'être pas écoeurants. D'autre part, si chaque plaque nous demande des heures pour nous montrer son image complète, c'est à renoncer, je le reconnais, à développer ainsi des épreuves instantanées, que, parleur facilité d'obtention, nous prenons par douzaines et par douzaines.

11 faut donc abandonner la cuvette horizontale et prendre un autre mode opératoire, pour rendre pratique le déve7

déve7

Reproduction d'une épreuve obtenue par le développement lent.


50 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

loppement lent. Rien de plus simple. Il suffit de substituer à la cuvette horizontale une cuvette verticale. Par la disposition même de la verticalité et la grande quantité de liquide qu'elle exige, nous pourrons y immerger simultanément plusieurs plaques. De plus, l'insipide balancement nécessaire avec la cuvette horizontale n'existera plus. En effet, par suite des différences de densité qu'il prendra en agissant, le liquide se trouvera dans un mouvement constant de montée et de descente, et il se formera ainsi un brassage continuel et automatique.

On trouve bien, dans le commerce, des cuvettes verticales destinées au lavage ou même au fixage des phototypes. Je me hâte d'ajouter qu'elles sont tout à fait impropres au développement. D'abord, parce que les plaques n'ont pas entre elles un espace suffisant pour un bon brassage et qu'ensuite ces mômes plaques ne sont pas assez éloignées du fond pour n'être pas influencées par les résidus chimiques provenant du développement.

Toutefois, pour permettre d'appliquer ce mode de procéder aux photo-jumelles Carpentier si fort employées dans la photographie instantanée, le Comptoir général de Photographie a construit des cuvettes verticales propres à un bon travail. (Voir page 48.)

Elles se composent, en principe, de deux cuves en carton durci, noir, et de paniers d'immersion en ébonite également noirs. La plus petite cuve C contient le bain de développement. La plus grande D, recouverte do toile, sert de couvercle à la petite. Les paniers P',P 2 sont munis de rainures verticales dans lesquelles on glisse les plaques. Pour des 4,5x0 ou des 0,5x9 ces rainures sont séparées, les unes des autres, par une distance de 1 centimètre environ. Ces paniers sont munis, à leurs angles supérieurs et inférieurs, de petits bâtonnets d'ébonite, car il est à remarquer qu'il n'entre pas la moindre parcelle de métal dans la construction de ces cuvettes. Grâce à ces bâtonnets, les plaques se trouvent surélevées du fond d'environ 3 centimètres, et le liquide du bain peut les dépasser d'une couche, égale aussi à


DÉVELOPPEMENT LENT DES INSTANTANÉES. 51

3 centimètres. Pour les 0,5x0 chaque panier présente neuf rainures; et six pour les 4,5x9. Donc, dans le premier cas, on peut développer dix-huit plaques à la fois. Or, si nous mettons , je suppose , une heure et demie à effectuer le développement, vous voyez que cela correspond à une durée de cinq minutes par plaque. Ce qui revient à dire que le développement lent est en somme très rapide.

Avec un peu de pratique, une connaissance do la température au moment du développement, de l'action réductrice du révélateur employé, de la rapidité des plaques et de l'éclairage du motif on peut combiner son bain de telle sorte qu'il mette une nuit à agir, et l'on peut ainsi dormir tranquille... tout en travaillant. Je vous conseille cependant de ne pas débuter, par cet extrême, dans la pratique du développement lent. Ignorants de toutes les conditions que je viens d'émettre, vous marcheriez infailliblement vers des insuccès dont le plus commun serait une métallisation complète de vos plaques. A tout prendre, d'ailleurs, si la lenteur est bonne, une lenteur par trop grande n'est pas meilleure, ou du moins jusqu'à présent ne me semble pas telle dans les instantanéités permettant l'art. Réglez votre bain pour qu'il marche, en été, entre une heure et demie ou deux heures et demie. En hiver, ce même bain, si vous ne le chauffez pas, vous mènera entre quatre et cinq heures. Pour ne pas vous laisser indécis entre un trop grand choix de formules, je vous en indiquerai seulement une, celle d'ailleurs dont je me sers, pour ainsi dire couramment.

Pyrosidfde carbonate. — Vous faites préalablement les solutions suivantes :

A. Eau chaude bouillante et ayant bouilli. 1,000 cm 3. Sulfite de soude anhydre 150 grammes.

Laisser refroidir et filtrer soigneusement.

B. Solution A froide 100 cm 3.

Acide pyrogallique 5 grammes.


52 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

C. Eau distillée 100 cm 1.

Bromure de potassium 10 grammes.

D. Eau chaude ayant bouilli 100 cm'.

Carbonate de potasse 15 grammes.

Carbonate de soude 31.5 —

Ces solutions faites, le bain de développement sera composé dans les proportions suivantes :

Eau froide ayant bouilli (environ). . . . 3 litres.

Solution A 90 cm'.

Solution B 30 —

Solution C 3à 5 •—■

Solution D 3 à 15 —

Pour augmenter la durée d'action, on peut prendre lo maximum de C et le minimum de D ; pour la diminuer, prendre le minimum de G et le maximum de D. Je me sers couramment du maximum de G et de 9 centimètres cubes de D. — Pour des épreuves en belle lumière, on a dans l'espace de temps que j'ai indiqué plus haut le maximum d'intensité.

Au demeurant, voici certaines règles sur lesquelles doivent se baser le développement lent.

Une pratique constante du développement à l'acide pyrogallique m'a démontré que 0,3 grammes d'acide pyrogallique sont nécessaires, mais suffisants, pour arriver à révéler normalement, à bonne intensité, une image 13x18. C'est le minimum de la quantité qu'il faille employer.

Afin que le bain ne tache pas les doigts en jaunissant trop vite, on retarde sa coloration par une assez forte addition de sulfite de soude. Cette action retardatrice est encore augmentée par une addition faible de l'alcali employé.

En outre, en ajoutant du bromure, l'action retardatrice est encore augmentée et, en plus, on empêche la montée du voile et on conserve la pureté des blancs.

Pour une plaque 13x18 on obtiendra donc un déve-


DEVELOPPEMENT LENT DES INSTANTANÉES. 53

loppateur au minimum de force en le composant selon la formule ci-dessous :

Eau froide ayant bouilli Quantité suffisante.

Solution A . . . . 14 cm 5.

Solution 15 6 —

Solution C 1 —

Solution D 3 —

On obtiendra ainsi une grande transparence dans les noirs, un grand éclat dans les blancs, et une parfaite harmonie dans l'ensemble, ce qui est, somme toute, le desideratum à réaliser,

Or, si nous considérons que dix-huit plaques G,5x9 correspondent, comme surface sensible, à celle donnée par quatre plaques et demi 13x18, nous pourrons combiner notre bain lent, minimum, pour un chargement complet de photo-jumelle 0,5x9 en multipliant par 4,5 les quantités précédentes ; soit donc :

Eau froide ayant bouilli Quantité suffisante.

Solution A 63 cm".

Solution B 27 —

Solution C 4,5 —

Solution D 13,3 —

D'autre part, si nous considérons que pour conserver toutes les qualités ci-dessus énoncées de transparence dans les noirs, de clarté dans les blancs et d'harmonie dans l'ensemble, on ne doit pas sensiblement dépasser 0,5 grammes d'acide pyrogallique pour une plaque 13x18, on pourra établir un bain, à peu près maximum, avec les quantités :

Eau froide ayant bouilli Quantité suffisante.

Solution A 105 cm 3.

Solution B 45 —

Solution C . . 7,2 —

Solution D 22,5 —

Toutefois, dans le cas du développement simultané de dix-huit plaques en cuvette verticale, la quantité d'eau étant


54 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

très grande, on peut, sans inconvénient, forcer encore ce maximum et porter à 3 grammes la quantité totale d'acide pyrogallique employé. Dans ces conditions, on aurait comme bain, que je considère comme un maximum :

Eau froide ayant bouilli Quantité suffisante.

Solution A 140 cm 1.

Solution B 60 —

Solution C 10 —

Solution D 30 —

Donc, vous pourrez modifier, comme vous l'entendrez, votre bain, tout en vous tenant dans les limites extrêmes que je viens de vous donner.

Avant chaque opération, la cuvette et ses paniers d'immersion devront être lavés, essuyés et frottés avec beaucoup de soin, et vous emplirez, jusqu'à 3 centimètres du bord supérieur, la cuvette, ne contenant pas les paniers, avec do Veau froide ayant bouilli.

S'il s'agit d'un développement de plaques 0,5x9, on continuera la préparation du bain de développement en. versant dans la cuvette 90 cm: 1 de la solution A, en employant par exemple la première constitution de la formule indiquée. Remuer avec un agitateur de verre pour obtenir un parfait mélange.

Verser ensuite 30 cm 5 de la solution R. Remuer avec l'agitateur. Introduire dans le bain 0 cm 1 do la solution G. Remuer avec l'agitateur. Compléter avec 9 cm' de la solution D. Remuer avec l'agitateur pendant quelques minutes.

J'appelle tout particulièrement votre attention sur ces agitations successives du bain avant l'introduction d'un nouveau constituant. Il importe que le mélange des différents produits soit rigoureusement fait. Les plaques qu'on immergera dans le bain se trouveront, ainsi, régulièrement, attaquées.

S'il s'agit de plaques de 4,5x0, la cuvette étant plus petite, les constituants devront être introduits, toujours en nous servant du même exemple de formule, dans les pro-


DÉVELOPPEMENT LENT DES INSTANTANEES. 55

portions suivantes : Solution A GO cm 3; solution R20cm:i; solution G 4 cm' ; solution D G cm' 1.

Le bain étant ainsi constitué, on y plongera successivement les paniers d'immersion. On prendra ensuite, une à une, les plaques exposées, en ayant soin de les frotter vigoureusement avec le tampon de velours et de les blaireauter ensuite. Elles seront introduites, une à une, dans les rainures des paniers, et on imprimera successivement à chaque panier un petit mouvement de va-et-vient de bas en haut, pour détacher les bulles d'air qui auraient pu se former sur la surface des plaques.

11 est d'une bonne pratique que les plaques soient mises foutes dans le même sens, c'est-à-dire que la face gèlalinée de l'une se trouve en regard de la face verre de l'autre.

La cuvette est ensuite revêtue de son couvercle, et l'on peut sortir du laboratoire et vaquer à d'autres occupations. Des épreuves prises en été par un beau soleil, dans le plein du jour, atteindront leur maximum d'intensité dans un espace de temps Avariant entre deux heures et demie et trois heures et demie, suivant les différents degrés actiniques des tons qui se trouvent dans le motif.

Des épreuves prises dans les mêmes conditions, en hiver, et développées à la température ambiante pourront exiger une immersion de quatre à cinq heures pour arriver au même résultat.

Dans les deux cas, la durée d'action du bain sera réduite d'au moins moitié si l'on emploie la dernière constitution de la formule, celle indiquée comme maximum.

Les épreuves pourraient, à la très grande rigueur, être laissées ainsi dans le bain pendant l'espace de temps indiqué. Toutefois, par des considérations de température, le brassage automatique du liquide pourrait se faire irrégulièrement au grand dam des phototypes qui présenteraient des stries. Aussi est-il préférable, une demi-heure après l'immersion totale, ou un quart d'heure dans le cas de la formule au maximum, de rentrer dans le laboratoire, de découvrir


56 LES NOUVEAUTÉS PII OTOGRAPHIQUES.

la cuvette et de retourner les plaques en mettant en bas le côté primitivement en haut.

Suivant l'émulsion, même avec des plaques de même marque, l'image ne se présente pas toujours de la même façon : tantôt on ne la voit plus sur la surface gélatinée, et il faut suivre sa venue au dos de la plaque, où elle se montre de plus en plus nettement; tantôt on la suit tout le tjuips de l'opération sur la surface gélatinée et l'on ne voit rien ou presque rien au dos. Dans tous les cas elle peut, pour ainsi dire, être suivie continuellement par transparence. Toutefois, lorsque le dos de la plaque sera uniformément gris et que les arêtes apparaîtront comme noircies, on peut, si l'on n'a pu suivre l'image d'une façon ou de l'autre, considérer le développement comme poussé à fond.

Il y a lieu alors de procéder aux opérations do l'achèvement du phototype, c'est-à-dire au fixage et à l'alunage.

Le mieux est de faire également ces opérations dans des cuvettes verticales. A leur défaut on peut se servir de cuvettes horizontales divisées en compartiments.

L'achèvement d'un phototype, dans les meilleures conditions possibles pour la durée, la douceur, la pureté et l'éclat de l'image demande deux bains de fixage successifs et un bain d'alunage. Le premier bain de fixage débromure la plaque. Le second enlève l'hyposulfite double d'argent qui a pu se former dans le premier et qui est une des causes de détérioration ultérieure. De plus, il continue à fond la débromuration et dégage les grands noirs de tout empâtement. Le bain d'alun réduit l'hyposulfite dans une certaine mesure, éclaircit les grands blancs, enlève les légers voiles et tanne suffisamment la gélatine pour qu'on puisse se dispenser de vernir le phototype pour le protéger contre l'humidité. Il est bon de noter, cependant, que le bain d'alun rendrait très difficile, le cas échéant, les opérations consistant à renforcer ou à affaiblir le phototype.

Le premier bain de fixage se fait avec une solution aqueuse d'hyposulfite de soude à 25 pour 100. Le second bain de fixage s'obtient en faisant une solution aqueuse d'hyposulfite


DEVELOPPEMENT LENT DES INSTANTANÉES. 57

de soude à 20 pour cent à laquelle on ajoute 5 cm' de bisulfite liquide pur par chaque 100 cm 3 de la solution.

Le bain d'alun se compose d'une solution aqueuse d'alun de potasse à G pour cent, additionnée de 3 cm 3 d'acide acétique cristallisable pour chaque 100 cm 3 de la solution.

La plaque retirée du développement est rincée sous le robinet et mise dans le premier bain de fixage. Dans les grandes chaleurs, pour éviter un décollement possible, ce rinçage peut être remplacé par une immersion de cinq minutes dans de l'eau bien froide.

Sitôt que la grande couche laiteuse du dos a disparu, la débromuration est achevée. On remarquera qu'il reste presque toujours, au dos, une légère teinte opalescente qui persisle, bien que la débromuration soit complète. Elle n'influe en rien sur la transparence du phototype. Alors la plaque est reprise et plongée sans lavage dans le second bain d'hyposulfite. Un lavage entre les deux bains aurait pour effet de rendre insoluble l'hyposulfite d'argent formé dans la couche par le passage dans le premier bain. Il faut la laisser dans ce bain dix minutes au moins. Elle peut y être laissée davantage sans inconvénient, l'hyposulfite n'attaquant l'argent réduit par le révélateur qu'après plusieurs heures d'immersion. Après ce second fixage, la plaque est lavée et plongée pendant une dizaine de minutes dans le bain d'alun. S'il y avait, en été, trace de décollement, on pourrait diminuer la quantité d'acide acétique contenu dans le bain d'alun.

Aussitôt après on lave le phototype sous le robinet, jusqu'à ce que l'eau coule uniformément sur la gélatine sans former de stries, et on le met dans la cuve de lavage, où on l'y laisse à l'eau courante pendant une heure ou deux, ou cinq à six heures si on ne renouvelle pas l'eau de la cuve. On procède alors comme d'ordinaire au séchage. Il va de soi que si l'on peut développer un chargement complet de photo-jumelle dans le développement constitué comme il vient d'être dit, on peut également y développer un nombre inférieur de plaques. Toutefois, après développement, le bain ne pourra être mis en réserve pour une

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58 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

autre opération, attendu que les révélateurs très dilués ne se conservent pas. Donc, pour chaque opération, il faut employer un bain neuf.

Les posées se développent de la môme façon que les instantanées. La durée d'immersion dans le bain de développement est moins longue, voilà tout. On peut donc, sans inquiétude, mettre dans le même bain toutes les plaques que l'on a exposées, quelle que soit la durée de leur exposition. Les moins exposées exigeront une plus longue immersion, les plus exposées une plus courte.

On remarquera cependant que Vapparition totale a lieu dès le début du développement, attendu que l'image se révèle en même temps dans toute l'épaisseur de la couche, ce qui est la principale cause de sa douceur, de son harmonie et de sa finesse. La venue totale consiste donc à surveiller, et à ne pas dépasser un bon degré d'intensité, nécessaire au tirage des photocopies.

Si l'on ne veut pas laisser agir le bain d'une façon automatique, on fait dans une cuvette verticale un bain semblable au premier, mais dans lequel il n'entrera que 80 cm 3 d'eau de dilution au lieu de 3 litres. Alors clans ce second bain, dit normal, on plongera la plaque dès Y apparition totale de l'image, et l'on continuera le développement comme on a l'habitude de le faire, par la méthode ordinaire.

Je terminerai on vous engageant à ne jamais développer vos instantanées qu'environ quarante-huit heures après les avoir prises. Les vibrations moléculaires de la matière sensible ne s'arrêtent pas ric-à-ric au moment où l'obturateur se ferme. Elles continuent pendant un certain temps encore.

Non seulement les instantanées traitées de la sorte sont remarquablement fouillées dans les ombres, mais leur point typique est de ne présenter aucun empâtement dans les noirs du phototype. Il en résulte, par conséquent, une harmonie beaucoup plus grande entre les ombres et les lumières, qui par le fait même d'une courte impression seraient, sans


LE RAPPORT ARITHMETIQUE. 59

cela, nécessairement heurtées. De plus, vous arrivez ainsi à obtenir, en excellente valeur pour un bon tirage, tous les ciels et tous les effets de lumière qui accompagnent ou forment la base de vos motifs.

Ainsi, ce développement a cela de particulier qu'il conserve admirablement les ciels et tous les effets de lumière, et donne un phototype à la fois vigoureux et transparent, donc éminemment propre pour l'agrandissement. Or, l'agrandissement est un des meilleurs moyens d'arriver à l'art photographique.

LE RAPPORT ARITHMÉTIQUE DU TEMPS NÉCESSAIRE A UN PARFAIT DÉVELOPPEMENT

Je vous ai déjà entretenus d'un petit instrument présenté au Caméra Club de Londres sous le nom à'Eihronomeler, et qui, fonctionnant comme un sablier', permet d'arrêter juste le développement au moment où l'image possède une intensité considérée comme la plus favorable à un bon tirage. M. Watkins, l'inventeur de ce petit instrument, a continué ses études sur le rapport arithmétique du temps nécessaire à un parfait développement. Au demeurant, la méthode de M. Watkins est des plus intéressantes. Pour mon compte, je l'emploie journellement et je lui reconnais de réels avantages. Elle n'est point aussi absolument mécanique qu'elle en a l'air, et laisse encore à l'opérateur une très grande marge à son appréciation personnelle. En tous cas, elle diminue considérablement les chances d'erreurs. Pour le praticien consommé, comme pour le débutant, elle permet d'obtenir avec une très grande facilité des phototypes négatifs d'une intensité toujours égale.

M. Watkins pose ce principe : qu'il existe dans tout phototype trois tons principaux d'opacité qui restent entre eux en rapport constant, quel que soit le révélateur employé et par conséquent le temps que chaque ton mettra à paraître

1. Voir ; Les Nouveautés photographiques, année 1895, page 44.


60 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

dans le développement restera ainsi proportionnellement constant. La montée d'un voile ou une trop forte dose de bromures semblent seules modifier cette règle générale.

Or donc, si le ton d'apparition de chaque demi-teinte reste proportionnellement constant, il noussuffîra, pour obtenir un développement complet et à bonne intensité, dénoter soigneusement le temps écoulé entre le moment où la plaque est immergée dans le bain de développement et celui où les grandes lumières de l'image commencent à apparaître. Ce temps noté, il suffira de le multiplier par un coefficient connu pour obtenir le temps que doit durer le développement entier.

Opérant avec l'acide pyrogallique, M. Watkins a donné le tableau suivant :

Eau do dilution. Doses de révélateur. Coefficients.

!0,10 grammes. 10 0,20 grammes. 6

0,40 grammes. 4

0,80 grammes. 2,5

Donc, si nous employons un bain contenant 4 décigrammes d'acide pyrogallique pour 100 cm 3 d'eau, et que les grandes lumières de l'image mettent 3 minutes pour apparaître, nous voyons, d'après le tableau ci-dessus, qu'il nous faudra multiplier 3 par le coefficient 4 pour obtenir la durée du développement donnant une bonne image. Soit 3x4=12. Donc, 12 minutes après l'immersion dans le bain, le phototype sera prêt à être mis dans le fixage. Je puis dire que j'expérimente ce tableau avec des plaques Lumière étiquette bleue presque chaque- fois que j'opère et que j'obtiens toujours de très bons résultats.

J'ai aussi essayé cette méthode avec le chlorhydrate de diamidophénol ou amidol, et j'ai toujours trouvé un coefficient constant avec la même constitution de bain. Il semble donc que la méthode de M. Watkins s'applique à tous les révélateurs. C'est à chaque opérateur de dresser, pour son propre usage, un tableau suivant le


NOIRCISSEMENT DU RENFORCEMENT. 01

révélateur qu'il emploie. Il acquerra ensuite une grande régularité et une grande sûreté dans son travail, du moment que sa plaque ne présentera pas de voile, car, comme je l'ai dit, le voile modifie le rapport entre les tons.

NOUVEAU MODE DE NOIRCISSEMENT DU RENFORCEMENT AUX SELS DE MERCURE

Nous connaissons, en somme, deux excellentes manières de noircir un renforcement au bichlorure de mercure. L'une, avec une solution acidulée de sulfite de soude, donne un noir bleu très doux. Aussi est-ce celle-là qu'il est préférable d'employer lorsqu'on désire un renforcement léger. Elle réussit admirablement bien pour les portraits. L'autre se fait par l'emploi d'une solution d'ammoniaque très diluée. La teinte noir brun qu'elle communique au phototype rend plus énergique l'effet du renforcement. Il y a bien encore une troisième méthode, qui consiste à se servir de l'iodure de potassium, mais elle durcit tellement l'image qu'on ne doit en faire usage que dans les cas extrêmes.

Ne retenons donc que les deux premières. Mais de ces deux, la seconde a encouru bien des blâmes. On s'est ému du peu de stabilité donné par l'ammoniaque et aussi du brun quelquefois trop rougeàtre de sa teinte. Disons tout d'abord que cette coloration rougeàtre n'a lieu qu'autant que l'hyposulfite de soude du bain de fixage a été insuffisamment éliminé par les lavages.

Reste donc la question d'instabilité.

Je pense qu'on a grand tort de s'émouvoir outre mesure. Quand le noircissement a été poussé bien à fond, c'est-à-dire jusqu'à la parfaite coloration noire du dos du phototype, et que les lavages ont été suffisants, l'image reste stable, au moins en ce qui concerne les tirages que peut faire un amateur. Certes, s'il lui fallait tirer des milliers d'épreuves de ce phototype, peut-être en effet l'image descendrait-elle un


62 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

peu de ton. S'il ne s'agit que de quelques douzaines, on peut affirmer la stabilité.

Quoi qu'il en soit, vérité ou légende, on est parti de l'idée d'instabilité pour chercher un autre mode de noircissement. D'après M. C. Schiendl, on y serait arrivé en employant une solution d'hyposulfite de soude à 1 pour 100 additionnée de chlorure d'or. On ferait alors le mélange suivan! :

Eau distillée 1,000 cm».

Hyposulfite de soude 10 grammes.

Solution de chlorure d'or à 1 p. 100, 20 à 30 gouttes.

La quantité de chlorure d'or varie suivant le degré d'intensité que l'on veut donner à l'image.

Le phototype complètement blanchi dans une solution de bichlorure de mercure est dûment lavé. On verse alors dans un verre une quantité dp la solution ci-dessus suffisante pour couvrir la plaque; on y ajoute quelques gouttes d'ammoniaque concentrée et l'on projette le tout sur le phototype.

Cette méthode laisse toute leur pureté aux parties claires et conserve tous les détails de l'image même dans les parties les plus opaques. Le sel d'or aide non seulement à l'intensification de la teinte noire, mais encore à sa durée.

Avis à ceux qui rêvent des tirages nombreux.

RENFORCEMENT DES PHOTOTYPES SANS SELS DE MERCURE

Le renforcement des phototypes négatifs ne produit pas toujours de très bons résultats, parce que le plus souvent on s'ingénie à renforcer une image insuffisamment venue en croyant l'améliorer. Dans ce cas, c'est infailliblement l'inverse qui a lieu. L'image finale, au lieu d'être améliorée, n'est plus grise, il est vrai, mais considérablement heurtée. Le renforcement ne saurait produire de bons résultats qu'autant que l'image négative est faible mais très complète dans tous ses détails et parfaitement hamonieuse dans son


RENFORCEMENT DES PHOTOTYPES. 63

ensemble. Je l'ai déjà dit souvent et je ne saurais trop le répéter.

Le renforcement le plus pratiqué est celui aux sels de mercure. De fait, à part la toxicité des sels mercuriels, la méthode est simple et pratique; toutefois, avec elle, on arrive la plupart du temps à renforcer plus qu'on ne le veut, ne sachant pas s'arrêter à temps dans le degré de blanchiment de l'image, et aussi parce que les noirs formés par les sels de mercure sont d'une très grande opacité.

Pour ces raisons, aussi bien que pour éviter l'emploi d'un poison violent, je crois utile de vous indiquer d'autres moyens de renforcer un phototype négatif sans faire usage du bichlorure de mercure.

M. Jabez Doolhryoclnous donne, par exemple, une formule de renforçateur qui a cela de particulier que, l'opération terminée, les noirs des phototypes ne présentent pas l'opacité de ceux obtenus par un renforcement au mercure. Ils restent même suffisamment transparents pour que l'on puisse appliquer cette méthode de renforcement aux photocopies diapositives, dont la nature même exige toujours la vision par transparence.

Vous faites les deux solutions suivantes :

A. Eau distillée 480 cm 3.

Acide citrique 15 grammes.

Acide pyrogallique 6 —

I!. Eau distillée 480 cm».

Azotate d'argent 30 grammes.

Pour l'emploi, vous versez dans un verre la quantité de la solution A nécessaire et suffisante pour couvrir la plaque mise en traitement, et vous ajoutez à cette quantité 2 ou 3 gouttes de la solution R.

Le renforcement s'effectue alors avec lenteur, mais avec une sûreté absolue. On a en effet tout le temps de surveiller l'action du renforçateur, et l'augmentation du degré d'intensité de l'image peut être suivie en regardant celle-ci par transparence.

Les sels d'urane permettent également le renforcement.


64 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Autrefois même on les employait beaucoup dans ce but. Ils renforcent, pour ainsi dire, par virement. En d'autres termes, s'ils n'augmentent pas d'une façon très nette l'opacité des noirs, ils modifient le ton de ceux-ci et transforment le ton noir en un ton plus ou moins rougeàtre, beaucoup moins actinique que le noir, et par conséquent produisant au tirage les mêmes effets qu'une augmentation d'opacité. Les solutions nécessaires sont les suivantes :

A. Eau distillée 300 cm'.

Azotate d'urane 8 grammes.

Acide acétique cristallisable 8 cm'.

B. Eau distillée 300 cm 1.

Ferricyanure de potasse (prussiate rouge). 6 grammes. Acide acétique cristallisable 8 cm'.

Pour opérer, vous tenez le négatif par un de ses angles, gélatine au-dessus, et vous versez dessus une petite quantité de la solution A, agissant comme si vous vouliez vernir ou collodionner. Quand la plaque a été couverte, vous laissez écouler le liquide et vous égouttez légèrement. Puis, vous recommencez aussitôt la même opération, mais en employant cette fois la solution B. Cette opération alternée est recommencée autant de fois qu'on le juge nécessaire. L'image peut passer du sépia clair au brun rouge foncé. 11 est bon de vernir après, car la teinte n'est pas d'une solidité excessive.

Quelle que soit la méthode pratiquée, la plaque employée devra être abondamment lavée avant et après l'opération. Dans le cas du renforcement à l'urane, cependant, un lavage trop prolongé affaiblit la teinte.

LE FORMOL

Une des usines allemandes de produits chimiques a lancé dans le commerce, sous le nom de formaline ou de formol, un nouveau produit réputé désinfectant au premier chef. C'est une solution à 40 pour 100 de l'aldéhyde formique CH 30. Elle est transparente, incolore, et dégage une odeur pénétrante qui affecte douloureusement, mais sans conti-


LE FORMOL. 65

nuité, les muqueuses nasales, dès qu'on la respire fortement. On détermine assez facilement sa teneur par le titrage avec l'ammoniaque et en employant de l'acide rosolique comme révélateur. Le pouvoir désinfectant du formol est tel, paraît-il, qu'il est supérieur de deux fois et demi à celui du sublimé corrosif. Même dans une solution à 1/20000, le bacillus anlhracis, le plus virulent des microbes, y périt en moins d'une heure.

De plus, point absolument remarquable et digne de la plus haute attention, la formaline ne serait pas un toxique pour l'homme. Jugez alors de ce que l'on peut attendre d'elle.

Cependant le formol agit d'une façon particulière sur les tissus. Il adhère fortement à la peau dès qu'il est mis en contact avec elle. La conséquence de celte adhérence est un durcissement considérable, si bien que la peau peut se détacher sans laisser trace de suppuration ni de gerçure. Nul doute que la formaline ne devienne un très grand sujet d'études pour les médecins. Quelques-uns déjà s'en sont activement occupés.

Le D1 Bardet, entre autres, en faisant sécher des préparations microscopiques sur de la gélatine, a remarqué qu'elles deviennent absolument insolubles en présence de la formaline et qu'il pourrait bien y avoir là une application intéressante pour les phototypes négatifs.

Le Photographie Times en a déjà parlé et M. G. Mareschal a fait, à ce sujet, une série d'expériences sur des plaques sortant du bain de lavage dans l'ordre suivant :

1° La plaque a été séchée dans une boîte contenant un tampon de coton sur lequel on a versé deux à trois gouttes de formol ;

2° Une série de plaques a été séchée à l'air libre sur un chevalet sous lequel était un papier buvard légèrement imprégné de formol ;

3° La plaque a été trempée pendant trois minutes dans

un bain contenant 10 pour 100 de la solution de formol;

4° Quelques gouttes de formol, étendu de moitié d'eau,

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66 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

ont été versées, puis étendues avec le doigt, sur un phototype; au bout de trois minutes, la dessiccation était complète.

Mélangé à l'hyposulfite de soude, le formol donne un précipité de soufre au bout de quelques heures. Il est probable, qu'après décantation, on pourrait aussi l'employer dans ces conditions.

Il y a donc, comme on le voit, une grande variété dans le mode d'emploi du formol. Toutefois, M. G. Mareschal donne la préférence au dernier moyen dont il règle ainsi l'usage : « Après avoir laissé égoutter le phototype et l'avoir légèrement essuyé avec le doigt, de manière qu'il n'y ait plus d'eau libre à la surface de la gélatine, nous versons trois ou quatre gouttes de la solution de formol du commerce additionnée d'un égal volume d'eau ; puis nous l'étendons sur toute la surface avec le doigt et nous laissons le phototype à plat pendant deux minutes environ et nous exposons, au sortir de ce bain, la surface gélatinée au rayonnement d'un ardent feu de coke qui évapore toute l'eau contenue dans la gélatine en moins de cinq minutes, sans la moindre trace de fusion. »

Les phototypes'sont-ils modifiés dans leur ensemble? Voilà ce que ne nous dit pas M. G. Mareschal et ce qu'il serait bon d'examiner. Je le ferai pour mon compte, dès que j'en aurai l'occasion. On sait, en effet, que si, en hiver, on fait sécher très rapidement, près d'une source de chaleur, un phototype développé au pyrogallol, on constate que l'image s'engrave plus profondément dans la gélatine. Il s'opère vraisemblablement une transformation des molécules argentiques qui produit un renforcement véritable de l'image. Seulement ce renforcement ne semble pas être le résultat d'une augmentation d'opacité des noirs, mais plutôt celui d'un éclaircissement considérable des blancs. Les parties claires, en effet, deviennent aussi transparentes que le verre. Il va de soi, qu'au tirage, la différence entre les ombres et les lumières s'en trouve augmentée. Ce phénomène intéressant, qui a lieu, même avec un pho-


SÉCHEUR-VENTILATEUR.

67

lotype fortement aluné, a-t-il lieu avec le formol? Il me semble que rien ne s'y oppose.

SECHEUR-VENTILATEUR

Bien que cet appareil ne repose pas sur des principes absolument nouveaux, ses dispositions mécaniques sont telles qu'il devient un appareil très pratique et susceptible de rendre de réels services. Il comprend un ventilateur à ailettes A fixé horizontalement à la base d'un axe Aertical B entraîné par des roues et pignons dentés D, D', D", D"f que commande une manivelle C (Voir page 68). Celle-ci peut être actionnée à la main ou par un moteur quelconque. Deux plateaux horizontaux évidés, E et E', munis de rayons creusés en rainures H, H', H", servent à serrer les plaques et restent fous sur l'arbre. Le plateau supérieur E peut se déplacer dans le plan vertical. Il permet ainsi l'emploi du sécheur-ventilateur pour des plaques de plusieurs formats. Son moyeu porte un bouton molletô l qu'il suffira de serrer pour rendre le plateau solidaire de l'arbre B. Trois tiges verticales fixées sur le plateau E servent à guider le plateau E' dans ses déplacements, de telle sorte que les rayons des deux plateaux restent toujours parfaitement en face les uns des autres.

Un cercle échancré M, M', dit cercle de garde, contourne chaque plateau. On peut lui donner un déplacement alternatif à droite ou à gauche pour dégager ou obstruer l'entrée des rainures.

Pour employer ce sécheur-ventilateur, on ouvre la porte K, on amène les échancrurcs de chaque cercle de garde en face des rainures des plateaux, on écarte ceux-ci à la distance voulue pour permettre le glissement facile des plaques mouillées dans les rainures, en ayant soin de tourner, de préférence, les plaques mouillées du côté du sens de la rotation de l'arbre. On déplace de nouveau et en sens inverse les cercles M, M' et l'on ferme la porte.


68

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Tournons la manivelle en laissant les plateaux fous sur l'arbre. L'air appelé par l'orifice central du socle sera violemment projeté sur les parois et refoulé à la partie supérieure. Sous ce fort courant d'air, l'eau de la gélatine s'évaporera. Dès que l'émulsion aura fait prise sur les bords, ce qui aura lieu après quelques minutes, on serrera le bouton I sur l'arbre. Les plaques seront alors entraînées dans un mouvement rapide de rotation sans qu'il y ait à craindre

craindre la gélatine file vers la circonférence par suite de la force centrifuge.

J'ai essayé cet appareil avec des plaques 6,5 x9. Quinze minutes m'ont suffi pour amener une dessiccation complète à la température ordinaire de la chambre.

Mais où le sécheur-ventilateur rend surtout, pour nous autres amateurs, de réels services, c'est lorsque nous voulons orthochromatiser des plaques par immersion ou les enduire, au dos, d'une mixture destinée à éviter l'irradiation nommée halo. Dans ce cas, la dessiccation s'effectue complètement entre deux et cinq minutes. L'opération peut donc se faire immédiatement avant de charger le châssis. Ce qui est à considérer, puisque l'on peut opérer suivant les besoins ou la fantaisie du moment.

Sécheur-ventilateur.


PARAFFINAGE DES PHOTOTYPES. 69

PARAFFINAGE DES PHOTOTYPES.

Il est certain que grâce à la solidité de la gélatine les phototypes au gélatino-bromure d'argent n'exigent pas, comme ceux au collodion, l'emploi d'un vernis. Aussi peut-on poser en principe que les amateurs, qui ne tirent, en réalité, de leurs phototypes qu'un très petit nombre de photocopies, ne les vernissent jamais. Cependant un phototype non verni peut s'abîmer avec la plus grande facilité. Que dans les manipulations du laboratoire de l'eau éclaboussée vienne jeter ses gouttes sur un phototype sec, elles y forment aussitôt des taches souvent indélébiles. D'un autre côté, le vernissage pour être bon, demande à ôlre effectué à chaud et on hésite à l'employer.

Le Wilson's Magazine nous indique le moyen de tourner . la difficulté par le paraffinage, qui s'opère beaucoup plus facilement que le vernissage.

Pour cela vous faites une solution à 3 pour 100 de paraffine dans de la benzine, et vous en recouvrez, avec un pinceau, toute la gélatine de votre phototype quand celui-ci est bien sec. En quelques minutes la benzine est complètement évaporée, laissant, sur la gélatine, une mince couche de paraffine. Vous l'essuyez alors avec un linge fin et très doux et vous polissez le restant avec un morceau de papier de soie très doux également. C'est économique, facile, rapide et certain. En effet, le phototype, ainsi traité, repousse l'eau, et l'on n'a plus à craindre les taches d'humidité.

Si la paraffine se dissout vite dans la benzine, la solution montre, par les temps froids, des tendances à la solidification. On les combat en préparant la solution au moment de l'emploi, ou bien en la conservant dans une chambre chauffée.


70 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

CLASSEMENT DES PHOTOTYPES

Lorsque nous en possédons une certaine quantité, de bons, s'entend, nous finissons par ne pas trop savoir comment les garder. C'est très joli de dire : mettez-les dans vos vieilles boîtes à plaques. Eh oui ! j'en ai usé du procédé et combien il est défectueux ! Il faut d'abord garder les

boîtes à plat. Sur le champ, il n'y faut pas songer, car dès que vous prenez une boîte entre les autres vous courez les risques de voir les- boîtes voisines s'ouvrir au grand dam des phototypes. De plus, elles sont si justes, si justes ces boîtes qu'il est difficile d'y mettre les phototypes quand ils ont été préalablement enfermés dans une enveloppe. En Angleterre, on trouve des boîtes classeurs de tous systèmes, il y en a avec ou sans répertoire, avec ou sans rainures. C'est fort commode, mais nos fabricants nous montrent bien que nous ne sommes pas en Angleterre. Cependant je dois à la vérité de reconnaître qu'il vient enfin de naître en France un accessoire de ce genre. Quand je dis vient de naître, il y en a peut-être d'autres, après tout, qui sont nés avant ! C'est fort possible : ce qu'il y a de certain, c'est que leurs parents ne m'ont pas envoyé de lettre de faire part.

Celui dont je veux parler est le classeur-Richard qui affecte la forme et l'aspect d'un volume relié, et est muni

Classeur ouvert.


UN NOUVEAU CHASSIS-PRESSE A DEUX BRISURES. 71

d'une petite fermeture métallique qui empêche le couvercle de s'ouvrir inopinément ou intempestivement. Les classeurs-Richard ne se font pas au-dessous de 9 X 12, mais ils sont divisés par des cloisons mobiles. En réalité, ils servent donc jusqu'au 4,5x0. Les phototypes y sont posés à plat, empilés les uns sur les autres, ce qui, bien mieux qu'une boîte à rainures, permet d'en réunir un plus grand nombre dans un moindre espace. Un ruban piqué au fond

de chaque compartiment permet d'enlever la pile.

Mais ce qui complète surtout les classeurs-Richard ce sont les enveloppes parcheminées, satinées à l'intérieur, dans lesquelles les phototypes peuvent être préalablement introduits. Sur le plat est imprimé un passe-partout prêt à recevoir toutes les indications qu'on désire garder.

Sur l'envers, la patte est assez large pour qu'on puisse y coller une phototcopie qui aidera beaucoup aux recherches, qu'on ait ou que l'on n'ait pas fait de répertoire.

Classeur fermé.

UN NOUVEAU CHASSIS-PRESSE A DEUX BRISURES

Il est toujours difficile de contrôler la venue d'une photocopie avec la plupart des châssis-presse dont nous avons coutume de nous servir. Tant que nous ne tirons que des paysages, nous ne nous en préoccupons guère. Il en va autrement dès que nous tirons un portrait. Quatre-vingtdix neuf fois sur cent, la tète se trouve plus ou moins comprise sous la ligne des charnières des volets, que cette ligne soit parallèle au grand côté du châssis ou qu'elle le soit au petit.

Cet inconvénient disparaît complètement avec le châssis à deux brisures.

Ce « à deux brisures » vous indique tout de suite que la planchette de bois aidant à presser le papier contre le


72 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

phototype et à le maintenir en place est composée de trois parties égales, au lieu de deux. Des charnières réunissent ces trois parties entre elles, mais les deux parties extrêmes seulement sont engagées sous les ressorts presseurs. En débandant l'un de ces ressorts, nous libérerons donc deux des trois parties de la planchette. Ces trois parties, avons-nous dit, sont égales; donc, en en libérant deux, nous sur\eillerons, en réalité, la venue des deux tiers de l'épreuve. Rebandons-nous le premier ressort pour débander le second? En vertu du même principe, nous contrôlerons encore la venue des deux tiers de l'image.

En conséquence, dans les deux opérations, notre contrôle aura embrassé la totalité de l'épreuve, puisque le tiers médian nous sera apparu au cours des deux opérations.

LE PAPIER « PRESTO »

Le papier presto est un produit allemand lancé dans le commerce par M. Scholzig. Ce papier est brillant et s'imprime vite, même à la lumière artificielle. On n'attend pas que l'image soit entièrement venue mais simplement indiquée. Puis on la monte à sa valeur par développement. Ce développement se fait en employant l'iconogène comme révélateur.

La solution de réserve est constituée comme suif :

Eau distillée . 2,400 cm' 1.

Sulfite de soude pur 240 grammes.

Solution de bromure de potassium à 10 pour 100. 2 cm'.

Iconogène 60 grammes.

Carbonate de potasse pur 120 —

Le bain de développement se compose dans les proportions suivantes :

Eau distillée 4,800 cm'.

Solution de réserve 120 grammes.

Solution de bromure de potassium à 10 pour 100. 1 —

Dès que le bain commence à se colorer on le rejette.


LE PAPIER TRANSFERROTYPE. 73

Le bromure de potassium donne de la chaleur au ton. Si l'on désirait obtenir un ton noir gravure, il faudrait réduire la solution de bromure de potassium de 1cm 3 à dix gouttes.

L'exactitude la plus rigoureuse est recommandée pour le pesage et le mesurage des constituants du bain.

Comme avec les papiers aristofypiques, l'image développée du presto affecte une coloration rougeàtre. Pour faire passer cette teinte au noir, on lave l'épreuve et on la vire dans un bain composé de :

Eau distillée 7,680 cm'.

Sull'ocyanure d'ammonium 10 grammes.

Chlorure d'or 3 —

Les épreuves doivent être, dans ce bain, constamment tenues en mouvement.

Après le virage, elles sont fixées dans un bain d'hyposulfite de soude à 20 pour 100 et lavées abondamment pendant une heure.

L'inventeur recommande que les solutions, aussi bien que leseauxde lavage, soient toujours aussi froides que possible.

LE PAPIER TRANSFERROTYPE

La maison Liesegang de Dusseldorf a tout dernièrement lancé clans le commerce un nouveau papier dont la couche sensibilisée peut s'enlever facilement. Déjà la maison Eastman nous avait autrefois dotés d'un papier analogue. En France, nous avons actuellement plusieurs maisons qui essayent, par différents moyens, d'atteindre un but semblable. C'est qu'aussi ce genre de papier offre un intérêt incontestable. Il peut être utilisé avec avantage pour l'obtention des photocopies diapositives, ou de contre-types de phototypes ou encore pour la photo-miniature, l'ornementation des coquilles, des assiettes, etc.

A tout prendre, ce papier affecte l'aspect de celui connu et si fort employé aujourd'hui sous le titre générique de papier aristotypique et qui comprend les papiers à la celloï10

celloï10


74 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

dine, au gélatino-chlorure d'argent, au citrate d'argent, au pyroxylo-chlorure d'argent, etc.

L'insolation de ce papier sous un phototype négatif se fait à la manière ordinaire. Toutefois, il est bon de remarquer, tout d'abord, que si l'on désire opérer un transfert sur un objet opaque, tel que porcelaine, marbre ou bois, on doit pousser cette insolation au point d'obtenir une image très vigoureuse et qui, dans ces conditions, serait beaucoup trop foncée pour constituer une photocopie positive ordinaire sur papier. Il en sera de môme si la photocopie est destinée à être transportée sur une plaque de verre, aux fins d'obtenir une diapositive pour la projection.

Les photocopies une fois insolées sont plongées dans l'eau une à une et couche en dessous. Cette immersion doit durer de cinq à dix minutes avec un renouvellement constant de l'eau. Dans le but d'empêcher les épreuves de se rouler et de garder au papier toute la souplesse possible, il est d'une bonne pratique d'ajouter à la première eau de lavage quelques gouttes de glycérine. Ces épreuves peuvent être virées au ton que l'on désire. Pour cela, on fait les deux solutions suivantes :

A. Eau distillée 1,500 cm' 1.

Chlorure d'or, brun 2 grammes.

B. Eau distillée 1,500 cm 3.

Sulfocyanure de potassium. ... 50 grammes.

Hyposulfite de soude 3 —

Glycérine 60 cm 3.

Remarquons en passant que c'est le chlorure d'or brun, qui est spécifié et non un autre. Celui-ci, en effet, rend le bain légèrement acidulé.

Pour composer la solution virante vous versez A dans R, en prenant quantité égale des deux solutions. Ainsi composé, le bain agit avec une très grande rapidité. Nous estimons que les plus beaux résultats sont obtenus en le diluant avec de l'eau.

En sortant du virage, les épreuves, sans être lavées, sont plongées dans le bain fixateur qui se compose d'une solu-


IMAGES PASSABLES AVEC DE MAUVAIS PHOTOTYPES. 73

tion aqueuse d'hyposulfite de soude à 15 pour 100. Cinq minutes suffisent pour que le fixage soit complet. En immergeant alors le papier dans de l'eau tiède, on provoque le décollement de la pellicule.

Pour plus de simplicité, supposons qu'on veuille transporter la photocopie sur verre. L'opération sera la même pour tout autre corps plan. La lame de verre et la photocopie sont plongées dans une cuvette contenant une solution do :

Eau 230 cm'.

Gélatine blanche 5 grammes.

Cette solution doit marquer 35 à 38° C. La photocopie, côté de l'image, est appliquée sur le verre en ayant soin d'expulser toutes les bulles d'air. On retire le tout de la solution et on laisse sécher cinq minutes. Puis on plonge quelques instants dans une cuvette contenant de l'eau à 50" G. On retire du bain et l'on enlève facilement le papier en laissant la pellicule collée au verre. Il peut se faire qu'il reste un peu de gélatine non dissoute sur la pellicule. On l'enlève facilement en plongeant le tout dans un bain d'eau à 50° G et en promenant sur la couche un blaireau doux.

A cause de la transparence parfaite de la couche et de l'absence de tout grain, les résultats sont fort beaux.

S'il s'agit d'un transfert sur une surface non plane, le papier doit être préalablement enlevé dans le bain d'eau chaude, de façon que la pellicule y (lotte librement et ce n'est que celle-ci seule que l'on applique sur la surface réceptrice.

IMAGES PASSABLES AVEC DE MAUVAIS PHOTOTYPES

Avec les nouveaux révélateurs, qui servent à la confection des développateurs tout faits du commerce, lesquels contiennent presque toujours de l'alcali caustique et le plus souvent en excès, les voiles de sous-exposition tendent à paraître presque aussi vite que l'image. On suit mal, par conséquent, la venue de celle-ci et, quand on fixe, cette


70 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

image est le plus souvent d'une faiblesse extrême. De là une difficulté d'obtenir une bonne photocopie.

Déjà les papiers aristotypiques sont venus, comme une providence, en aide à ces mauvais phototypes, en ce sens qu'ils permettent de tirer avec eux des photocopies passables et qui seraient certainement de première nullité avec les papiers albuminés. Cependant toute providence a res bornes, et ils courent le monde les phototypes desquels on ne peut tirer grand'chose.

Je trouve dans le Scientific American un moyen, in extremis, de reculer encore les bornes de ladite providence.

Les photocopies sont tirées très noires, jusqu'au point où l'on est convenu de les considérer comme étant brûlées. On les enlève alors du châssis-presse et on les vire comme à l'ordinaire, c'est-à-dire dans un bain de virage-fixage combinés, puis on les immerge dans un bain composé de la façon suivante :

Eau distillée 1,000 cm 3.

Acide azotique 18 —

Ferricyanure de potassium (prussiate rouge). . 0,4 grammes.

Ce bain n'a aucune influence sur l'or mais dissout l'argent. Donc celui qui n'a pas été complètement remplacé par le virage disparaît et l'image s'éclaircit. Il suffit de une à cinq minutes d'immersion pour atteindre au but proposé. On lave abondamment, on fixe et l'on termine comme à l'ordinaire.

Le bain que nous indiquons s'affaiblit assez vite et doit être renouvelé pour chaque lot d'.images.

C'est pratique, mais si je vous conseille d'employer cette méthode, je vous conseille surtout d'obtenir de bons phototypes. C'est d'une bien meilleure pratique.


INALTÉRABILITÉ DES PHOTOCOPIES. 77

INALTERABILITE ET CONSERVATION DES PHOTOCOPIES

POSITIVES

Il devient oiseux et suranné de disputer si oui ou non la photographie est un art. Les deux premiers Salons d'art photographique, organisés par les soins du Photo-Club de Paris, sont venu consacrer tout ce que j'ai affirmé sur ce sujet depuis tantôt quatre ans. Le troisième Salon d'art photographique qui va s'ouvrir cette année même ne fera qu'apporter une prouve de plus.

Donc, en dehors de ses autres applications, la photographie est un art bien particulier, autonome, si je puis m'exprimer ainsi. Il devient alors de toute nécessité de chercher à donner aux photocopies la durabilité nécessaire et désirable pour toute oeuvre d'art qui doit pouvoir se transmettre, aussi intacte que possible, à l'examen des générations futures. On le comprend du reste, et de tous côtés un peu on cherche à atteindre ce but, à réaliser ce desideratum.

Jusqu'à ce jour, on n'a considéré comme photocopies inaltérables que celles au charbon. On désirerait, non sans raison, étendre cette inaltérabilité aux impressions par les sels d'argent.

A tout prendre, il me semble que l'on pourrait presque déjà considérer comme touchant à l'inaltérabilité les photocopies sur gélatino-bromure d'argent bien traitées. La durabilité des phototypes négatifs semble en être une preuve et un garant.

Au demeurant, ces derniers temps, mes études m'ont amené à traiter, pour des raisons particulières, des photocopies positives par différents acides. En dehors des résultats que je cherchais, on peut retenir ceux touchant à l'inaltérabilité de telles épreuves. Voici donc les quelques notes que je livre à ce sujet à vos médiations :

Trois bains d'eau acidulée ont été préparés. Le premier avec 7,5 pour 100 d'acide chlorhydrique ; le second avec


78

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

7,5 pour 100 d'acide azotique ; le troisième avec 7,5 pour 100 d'acide sulfurique. Dans chacun de ces bains ont été immergés, pendant dix heures, des morceaux d'une même épreuve à l'albumine, au citrate d'argent, au gélatino-bromure et au ferro-prussiate. Je dirai tout de suite que les morceaux de la photocopie au gélatino-bromure n'ont pas subi la moindre altération. Rapprochés du morceau qui n'avait été trempé dans aucun bain, ils n'ont pu déceler aucune trace de changement. Le développement avait eu lieu à l'acide pyrogallique, suivi, après fixage, d'un virage à l'or et au sulfo-cyanure d'ammonium. Dans la photocopie au ferroprussiate, la modification est insignifiante. Tout au plus si, avec une grande attention, on peut constater que le bleu a été légèrement avivé. Le lavage final de cette épreuve, avant expérience, s'était fait dans de l'eau, additionnée d'une petite quantité d'eau de javelle. La photocopie sur papier albuminé, virée à l'or et à la craie, s'est considérablement décolorée dans le bain à l'acide chlorhydrique, et fort peu dans les deux autres. Celle au citrate d'argent, par exemple, a été attaquée plus ou moins dans tous les bains. Pourtant, pour augmenter sa stabilité, elle avait été immergée dix minutes, après le virage-fixage Lumière, dans un bain d'hyposulfite de soude, additionné de sulfite de soude et de sel marin. Dans l'acide chlorhydrique, la décoloration a été presque complète; dans l'acide sulfurique moindre, mais avec un grand jaunissement dans les hautes lumières. Dans l'acide azotique, la décoloration plus grande que dans l'acide sulfurique a donné, à tout l'ensemble, une tonalité verdâtre.

Ce sont là de simples notes, mais qui peuvent avoir leur intérêt pour ceux qui s'occupent de l'inaltérabilité des épreuves.

Pour l'instant l'altérabilité existe, c'est incontestable. Laissons donc de côté le papier au gélatino-bromure qui paraît stable et voyons ce que l'on peut tenter au point de vue de la conservation pour les autres papiers à base de sels métalliques.


INALTÉRABILITÉ DES PHOTOCOPIES. 79

Voici d'abord le papier au platine, considéré comme très suffisamment durable, et sur lequel MM. Poulenc frères ont fait une communication à la Société française de photographie, concernant l'inaltérabilité des épreuves qu'il fournit, la restauration de ces mêmes épreuves jaunies par le temps ou les supports, ou bien tachées d'encre et de corps gras.

Les supports des photocopies doivent, en effet, être pris en très grande considération dès qu'il s'agit d'inaltérabilité. Le carton de montage, avec sa couleur séduisante, son aspect coquet et flatteur, est bien souvent le baudet dont nous vient tout le mal. Et mal d'autant plus grand que nous ne nous sommes pas méfiés des traîtrises de ce séducteur.

Or, si inaltérables que soient les épreuves sur papier au platine lorsqu'elles sont collées sur un carton bleuté, rose, crème, noir ou d'une autre couleur, on les voit devenir jaunes avec le temps, et jaunes à un tel degré qu'on éprouve le besoin de les mettre au rebut, si bon conservateur que l'on soit.

Eh bien, au lieu de mettre de telles épreuves au rebut, MM. Poulenc frères ont eu l'idée d'essayer sur elles s'il ne serait point possible de les restaurer. Entre autres produits divers essayés, ils ont employé le permanganate de potasse, l'eau oxygénée et l'hypochlorite de sodium.

Les résultats donnés par le permanganate de potasse n'ont pas été jugés suffisants. Ceux provenant de l'eau oxygénée, à 12 volumes, l'étaient davantage. Mais la palme revenait à l'hypochlorite de sodium, autant par les bons résultats obtenus que par la facilité des manipulations. Le procédé opératoire est des plus simples : l'épreuve à restaurer se place dans un bain composé de 5 parties d'hypochlorite pour 100 parties d'eau. On laisse agir en renouvelant le bain de temps à autre jusqu'à ce que l'on juge que le papier est redevenu suffisamment blanc. Vous lavez alors, abondamment et soigneusement, en ayant soin d'ajouter quelques gouttes d'acide chlorhydrique aux deux pre-


80 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

mières eaux du lavage. Grâce à cette précaution, on neutralise les traces d'hypochlorite de sodium restées dans la pâte du papier, et l'épreuve reprend l'aspect qu'elle avait avant le montage.

Pour démontrer la parfaite inaltérabilité des photocopies fixées sur papier au platine, MM. Poulenc frères ont coupé des épreuves par le milieu et n'en ont soumis qu'une moi lié à l'expérience. Cette moitié, une fois restaurée, ils ont pu constater qu'aucun détail n'avait disparu et qu'elle conservait toute sa finesse originelle. Pourquoi, maintenant, doit-on préférer l'hypochlorite de sodium à tout autre produit similaire? Parce que l'hypochlorite de sodium, en même temps qu'il ravive les blancs, peut enlever les taches d'encre dont une épreuve pourrait être souillée.

On peut aisément fabriquer soi-même l'hypochlorite de sodium. Il suffit de mélanger 120 parties d'eau avec 20 parties de carbonate de soude et 10 parties de chlorure de chaux. 11 se forme, par double décomposition, un abondant précipité de carbonate de chaux. On filtre, pour se débarrasser de ce précipité, on concentre et on fait cristalliser.

Quant à la disparition des taches graisseuses, il suffit de procéder comme pour un simple paletot, c'est-à-dire d'imbiber largement la tache de benzine, et d'appuyer fortement, sur l'endroit taché, un morceau de papier de soie ou de papier Joseph, après avoir eu soin de mettre un petit coussinet sous l'épreuve. La matière graisseuse se dépose sur ce coussinet.

En ce qui concerne les épreuves sur papier à base d'argent, qui donnent, quoi qu'on en ait, des résultats immédiats et des imagos très typiques qu'on ne saurait obtenir par un autre procédé, M. Léon Vidal nous offre un moyen d'assurer leur conservation pendant un laps de temps très long. Ce moyen est le paraffînage des épreuves.

Avant le montage on imbibe le dos de la photocopie d'une solution de paraffine dans de la benzine et on recouvre la face d'une nappe de cette solution. Après évapora-


INALTÉRABILITÉ DES PHOTOCOPIES. 81

tion de la benzine, on provoque la fusion de la paraffine déposée en passant un fer à répasser, modérément chaud, sur la photocopie emprisonnée entre deux feuilles do papier buvard blanc. A 45"G la paraffine entre en fusion. De cette façon l'image se trouve enfermée dans la paraffine, qui est un composé stable, incolore, hydrofuge, inattaquable par l'oxygène, les acides et les bases, suffisamment translucide pour ne modifier que très peu l'aspect de l'image, et susceptible d'être enlevé facilement en cas de besoin, par une simple immersion dans une cuvette contenant un peu d'essence minérale. Donc l'imago ne sera plus accessible ni à l'humidité ni à l'action des gaz de l'atmosphère.

Un petit point noir se dresse sur les séductions de ce bel horizon. Par cola même qu'elle est hydrofuge, la paraffine repoussera les colles en solution aqueuse et nous ne pourrons plus monter nos épreuves sur carton.

M. Léon Vidal a vu le mal et du môme coup a indiqué le remède. On fait dissoudre, jusqu'à consistance de collodion normal, du caoutchouc naturel dans de la benzine. Pour ce faire, le caoutchouc, à l'état de rognures, est mis à macérer dans la benzine pendant vingt-quatre heures. Si la température ambiante n'est pas suffisante pour obtenir une dissolution complète, on a recours au bain-marie, à température peu élevée.

Vous posez cette colle, avec un pinceau plat sur le clos de l'épreuve, coupée aux dimensions voulues. La benzine s'évapore. Le caoutchouc, à l'état visqueux, reste, formant une manière de pellicule. A l'aide de points, préalablement repérés, vous posez votre épreuve sur le carton support et vous lui faites subir une bonne pression, celle de la presse à satiner, par exemple. L'adhérence est parfaite et les causes de détérioration sont considérablement atténuées, sinon entièrement détruites. A la grande rigueur, on peut paraffiner de nouveau, épreuve et support après dessiccation très complète pour ne pas emmagasiner de l'humidité. Ce mode de procédé peut être employé avec avantage pour les images au platine, au charbon et aux encres

11


82 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

grasses. Son seul défaut, à mon sens, est le léger voile qu'il laisse sur l'image, et qu'on n'arrive pas toujours à faire disparaître entièrement, même avec l'emploi du fer chaud.

VIRAGE, AU CACHOU, DES IMAGES OBTENUES SUR PAPIER AU PLATINE

La platinotypie est très en vogue en Angleterre. On a pu s'en rendre compte à la dernière exposition d'Art photographique. La plupart des photocopies émanant de la Grande-Bretagne étaient tirées sur papier au platine. Il est donc tout naturel que l'on s'inquiète, dans ce pays plus qu'ailleurs, des moyens de faire varier la teinte noire, mais un peu froide et un peu grise, de l'image obtenue sur le papier au platine.

Dans une séance de la Royal Photographie Society, M. J. Packham a donné quelques renseignements intéressants sur un procédé qui consiste à amener, par un virage au cachou, un changement de teinte dans les épreuves au platine. Le cachou, très communément employé dans l'industrie, pour la teinture en brun des matières textiles, est facile à. se procurer. Donc on peut aisément et sans grands frais tenter l'essai.

Extrait do différentes parties de plusieurs espèces de plantes et notamment de l'acacia catechu, le cachou se compose de tanin, d'un principe extractif amer et d'une substance, sorte de mucilage, qu'on a longtemps regardée comme une terre. A l'état pur, il est fragile, compact, il présente une cassure brillante, d'une couleur approchant de celle de la châtaigne et fond entièrement dans l'eau.

Or, il paraît, d'après M. J. Packham, que ce produit montre une très grande affinité avec tout dépôt métallique de platine. De là, possibilité de faire varier la teinte des images formées par ce dépôt.

En considération de l'affinité très grande du cachou pour l'image platinique, il faut tout d'abord que celle-ci ne pré-


VIRAGE AU CACHOU. 83

sente pas la plus petite trace de voile. Si léger fût-il, le cachou agirait sur lui et donnerait aux blancs de la photocopie une coloration très nette.

Faits à remarquer : les anciennes épreuves se virent beaucoup mieux que les épreuves récentes; l'adjonction au développement de substances organiques telle que la glucose, le sucre ou le miel, augmente d'une façon sensible le pouvoir absorbant du platine.

Ceci posé, voyons à quelles manipulations nous devons nous livrer.

Nous composerons, tout d'abord, notre bain de développement comme suit :

Eau distillée 14 parties.

Oxalate neutre de potasse 7 parties.

Sucre de canne 1/3 de partie.

Pendant cinq à dix minutes nous ferons bouillir le tout ensemble, et lorsque ce liquide ne sera plus qu'à 30° C, nous développerons, soit en y plongeant l'image, soit en la faisant simplement flotter.

Notre solution de cachou sera faite avec 7 grammes de cachou finement pulvérisé, mêlé à d'autres matières colorantes, suivant notre goût ou nos besoins, et 14 centilitres d'eau. Ce mélange devra bouillir pendant 3 à 4 minutes. Après refroidissement complet on y ajoutera 3 centilitres d'esprit-de-vin. Dans des tlacons bien bouchés, cette solution se conserve très longtemps.

Quand il s'agira de virer la platinotypie obtenue, on portera 60 centilitres d'eau à la température de 35° C, et on y ajoutera 15 à 20 centilitres de la solution de cachou. Cette mixture sera versée sur l'épreuve et l'on aura soin de maintenir sa température jusqu'à l'obtention de la teinte voulue.

Quelques minutes suffisent en général.

Ce virage peut s'effectuer à froid. Dans ce cas la durée d'action se trouve augmentée, et peut atteindre une heure environ.

Dans le cas où le virage rougirait par trop on y ajouterait un peu d'oxalate neutre de soude ou d'oxalate de potasse.


LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

PREPARATION D'UN PAPIER CHARBON-VELOURS

La dernière exposition d'Art photographique, organisée par les soins du Photo-Club de Paris, a montré, par de nombreux exemples, combien les photocopies sur papiers au charbon sont supérieures à toutes les autres, pour donner aux images un grand cachet artistique, en même temps qu'une tonalité chaude. Mais les papiers au charbon rebutent un peu les amateurs, à cause de la nécessité du transfert. Transfert qui doit même être double si l'on veut l'image dans son vrai sens. Le papier charbon-velours, dont je vous ai longuement entretenu, l'an dernier, présente au moins cet avantage de ne point exiger de transfert. Mais pour ce qu'il est, il demeure d'un prix assez élevé. Aussi, bien que son mode de fabrication reste un secret, cherche-t-on à l'imiter.

A ce sujet, le Dr Mallmann s'est livré à de nombreuses expériences dont il nous donne les résultats.

Si, pour faire un civet, vous prenez un lièvre, pour fabriquer du papier charbon-velours vous prenez du papier. Le meilleur est le papier Rives, lisse, de qualité moyenne. Vous l'étendez, en l'humectant, sur une glace parfaitement horizontale, et vous répandez à sa surface une solution de gélatine Nelson à un et demi pour 100. Cette solution doit être préalablement mesurée de façon qu'il y ait, environ, 0,032 centimètres cubes par centimètres carré do papier.

Sitôt que la couche gélatineuse est complètement sèche, vous introduisez la feuille dans un récipient contenant du noir d'ivoire et du brun d'ivoire en poudre fine. L'on a eu soin d'agiter vigoureusement ce récipient avant l'introduction du papier. La poussière se dépose alors lentement et régulièrement sur le papier.

La sensibilisation et le développement se font comme s'il s'agissait du véritable charbon-velours. Les résultats obtenus sont d'ailleurs identiques à ceux donnés par ce papier.


KALLITYPIE. 85

Au reste, le Dr Mallmann ne semble pas vouloir s'en tenir là, car il annonce qu'il continue ses expériences. Nous ne les perdrons pas de vue.

KALLITYPIE

Ce serait donner un croc-en-jambe à la vérité que de nier l'excellence des épreuves au platine au point de vue do leur durée et de leur beauté. Toutefois, même en employant, suivant les cas, le développement à chaud ou le développement à froid, il faut, pour la platinotypie, des phototypes possédant encore une certaine intensité. Or le papier kallitype, tout en offrant les qualités du papier au platine, a sur lui l'avantage de donner des photocopies bien brillantes avec des phototypes de trop mince intensité. Sa préparation est assez facile et à la portée de tous.

On fait, tout d'abord, une solution sensibilisatrice composée de :

Eau distillée 30 cm 3.

Oxalate ferrique 5 grammes.

Azotate d'argent 2 —

Avec un pinceau plat ou même simplement avec une touffe de coton, on étend cette solution aussi régulièrement que possible sur le papier que l'on a choisi et, une minute après l'étendage complet, on sèche rapidement devant un bon feu pour empêcher la solution de pénétrer dans le papier. A l'abri de la lumière et enfermé dans un tube contenant du chlorure de calcium, le papier ainsi sensibilisé peut se conserver plusieurs mois.

L'insolation se fait de la même façon que celle du papier au platine, et l'image qui apparaît, également brunâtre, est très faible.

Pour composer le bain de développement on prend 100 cm 3 d'une solution saturée de borax dans laquelle on fait dissoudre 100 grammes de tartrate double de potasse et de soude. Ge bain peut servir pour plusieurs épreuves, cependant il doit être rejeté dès qu'il se colore.


86 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Pour obtenir des tons bruns il suffit de diminuer la quantité de borax.

On peut employer, comme retardateur, une dizaine de gouttes d'une solution de bichromate de potasse à 1 pour 100. Au demeurant, l'effet le plus certain de ce retardateur est de conserver la pureté des blancs. Si le phototype dont on tire une photocopie est par trop faible, on peut même porter jusqu'à trente gouttes la dose de la solution de bichromate. Il est possible,ainsi, d'obtenir une photocopie très brillante alors qu'avec tout autre procédé elle n'eut été que grise et veule.

La durée du développement est d'environ quinze à vingt minutes.

Aussitôt après, on lave dans une cuvette dont on change l'eau trois ou quatre fois et l'on plonge, pendant un quart d'heure, dans une solution d'ammoniaque à 1 pour 100.

Après un lavage d'une demi-heure à l'eau courante, vous faites sécher, en suspendant, et l'épreuve est bonne à être coupée et montée.

LES PHOTOCOPIES SUR PAPIER AU. GÉLATINO-BROMURE D'ARGENT

Le grand courant vers l'Art photographique, que détermine par ses expositions le Photo-Club de Paris, et la création d'un Musée de photographies documentaires à laquelle M. Léon Vidal met toute sa notoriété et toute son activité, appellent l'attention des véritables amis de la photographie vers l'obtention d'épreuves à la fois artistiques et indélébiles. 11 s'en va donc temps que l'on reprenne la question ab ovo et qu'on mène d'ensemble les études diverses qui peuvent nous conduire à ce double but. Si l'on n'y atteint pas complètement, au moins est-on certain de glaner, chemin faisant, bon nombre de choses intéressantes. Je tâche à ce but, et je puis vous assurer personnellement que la glane vaut la peine de glaner.

D'abord et puisque j'ai mis l'art en premier, parce que


PAPIER AU GÉLATINO-BROMURE D'ARGENT. 87

l'art m'est plus cher que le document, quel est le mode de tirage qui nous offre une souplesse assez grande pour nous permettre, par des moyens purement photographiques, d'obtenir l'épreuve artistique? Eh bien! j'ai expérimenté tous les papiers dont nous disposons pour nos tirages — ils sont nombreux — et j'en suis arrivé à cette conclusion très nette : nous devons employer des papiers donnant une image latente dêveloppable. En effet, si avec un développement bien conduit, truqué même, on peut diriger comme on veut l'arrivée de l'image d'un phototype négatif, on pourra, par la même raison, diriger encore mieux celle de l'image d'une photocopie positive, puisque, pour celle-ci, nous aurons toujours été maître de lui donner la pose convenable, suffisante et nécessaire. Joignez encore à cela que certains de ces papiers, ceux au gélatino-bromure d'argent, par exemple, se prêtent à l'agrandissement direct. Or l'agrandissement est une des bonnes voies menant à l'Art photographique.

Dans son ensemble complet, le sujet comprend bon nombre de points : le révélateur; le développement; le fixage; la nature de l'image formée ; ses changements de coloration par des virages aux sels d'urane, de fer, de cuivre, de mercure, d'or, de platine, etc. ; l'étude sur les modifications pouvant être apportées, après coup, à ces virages; la valeur réelle de leur fixité réciproque ; les moyens de la reconnaître et enfin la possibilité d'atteindre, par les papiers développables, à cette durabilité complète qui est certainement le grand souci des créateurs du Musée de photographies documentaires.

Nous commencerons par le révélateur. Ron nombre d'entre vous ont sans doute été, comme moi, étonnés et navrés en voyant que tous les fabricants de papiers au gélatino-bromure d'argent recommandent invariablement pour leur produit l'oxalate ferreux. En effet, quelques modifications que l'on apporte dans les dosages de ce révélateur, on ne modifie que très peu son action. De plus, il nécessite des lavages prolongés à l'eau acidulée.


88 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Ceux-ci, encore si abondants qu'ils soient, n'éliminent qu'imparfaitement les sels de fer contenus dans le papier. Or ces sels jouent un rôle néfaste dans les opérations subséquentes des virages. L'hydroquinone reste dans l'espèce ce qu'elle est toujours : un révélateur brutal, peu maniable, donnant sec et celui qui, comparé à n'importe quel autre révélateur, donne le moins de détails dans les ombres. Le glycin se prête surtout aux reproductions. Lemétol, le diamidophénol ou amidol, l'iconogène et le paramidophénol, se valent. Le chlorhydrate de paramidophénol me semble cependant se mettre au premier rang du groupe. Ces révélateurs fournissent des images claires,propices pour des virages qui agissent par renforcement, mais donnant des noirs d'une profondeur insuffisante quand on veut garder l'image telle quelle. J'ai entendu dire et répéter qu'ils donnaient des noirs verdàtres. Je répondrai à cela que ce défaut tient, non à un certain révélateur, mais à tous les révélateurs. Il ne provient pas du révélateur lui-même, mais d'une insuffisance de développement, c'est-à-dire d'un développement que l'on n'a pu pousser à fond, soit parce que la pose était trop courte, soit parce qu'elle était trop longue et que l'on a dû s'arrêter sous la menace d'un voile. Toutes les fois que la réduction de l'argent n'est pas complète, vous aurez cette teinte verdâtre.

Dans tout cela nous n'avons pas parlé de l'acide pyrogallique? Un jour, seul le Dr Eder a, je crois, insinué qu'avec ce révélateur les papiers étaient développables. Personne n'y a pris garde ! Un révélateur qui jaunit les doigts et les phototypes, pensez donc comme il va jaunir le papier ! Erreur ! J'emploie le pyrogallol à -longueur d'année et je déclare bien haut, aussi haut que ma tête peut en porter, qu'un développateur au pyrogallol bien composé reste parfaitement incolore pendant la durée de la révélation. Par conséquent, le développement ne saurait jaunir ni les doigts ni les phototypes. Ceux qui veulent bien suivre mes conseils savent du reste que je ne les trompe pas.

Ceci dit, j'ai cherché le meilleur mode d'emploi de


PAPIER AU GÉLATINO-BROMURE D'ARGENT. 89

l'acide pyrogallique pour le développement des papiers au gélatino-bromure d'argent. Je l'ai employé avec alcali et sans alcali, en opérant sur des papiers de la maison Morgan. Dans les deux cas, papier et révélateur m'ont donné des images qui se recommandent par l'éclatante pureté des blancs et la profondeur veloutée des noirs. A telles enseignes qu'une épreuve développée au pyrogallol avec alcali et séchée sur verre dépoli joue, à s'y méprendre, les images données par le papier charbon-velours. Mais, n'oubliez pas ceci : pour arriver à ce point, il faut, comme avec les autres révélateurs, que la réduction de l'argent soit complète. Toutefois, quand elle ne l'est point, les demi-teintes fournies par le pyrogallol sont plutôt gris chaud que noir verdâtre.

Je fais les solutions suivantes :

A. Eau chaude ayant bouilli. .... 1,000 cm:i. Sulfite de soude anhydre 150 grammes.

B. Solution A 100 cm 3.

Acide pyrogallique 5 grammes.

C. Eau 100 cm'.

Carbonate de soude 25 grammes.

Carbonate de potasse 31,3 —

Pour une feuille 13x18, vous prenez : Eau, 100 cm 3; solution A, 15 cm 3 ; solution B, 5 cm 3 ; solution G, 2 cm 3, et vous y ajoutez 1 cm 3 d'une solution de bromure de potassium à 10 pour 100. Avec une pose exacte, le développement est complètement achevé en cinq minutes au plus.

Mais, toutes les fois que vous aurez à traiter très artistiquement une épreuve et que vous voudrez faire varier ultérieurement sa tonalité, je vous engage à composer le bain sans alcali de la manière suivante :

Eau 100 cm 3.

Solution A 20 —

Solution B 10 —

Vous augmenterez la pose, vous pouvez même la doubler, ce qui est une grande latitude.

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90 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

L'image tarde un peu à venir, puis se montre complète mais comme nébuleuse, et monte graduellement, sans la moindre chance de voile, jusqu'au point où vous voudrez l'arrêter. En effet, si l'image est destinée à des virages ultérieurs, il faut la tenir en dessous du ton final. Un développement complet demande de sept à dix minutes.

Pour me permettre de vous décrire, en une seule fiis, toutes les opérations qui doivent nous conduire infailliblement à l'épreuve artistique, nous prendrons pour exemple un phototype négatif de paysage, très brillant, d'une bonne densité, présentant un beau ciel chargé de nuages et des avant-plans constitués par les verdures extra-sombres de quelques conifères. Le papier sera encore celui de la maison Morgan, puisque c'est surtout avec lui que j'ai mené, pendant plusieurs mois, toutes mes séries d'expériences. Phototype et papier sont mis au châssis-presse, puis bien et dûment exposés à la lumière d'un bec de gaz. Je reviendrai un jour, très en détail, sur la manière pratique d'effectuer cette exposition. Pour l'instant, il ne s'agit que du développement.

L'exposition terminée, le verre rouge remis sur la lanterne, vous prenez deux godets et deux pinceaux bien propres, puis aussi une cuvette remplie d'eau. Dans l'un des verres vous mélangez 100 cm 3 d'eau à 2 cm 3 d'une solution de carbonate (la solution G indiquée plus haut). Dans l'autre, vous mélangez 100 cm 3 d'eau à 2 cm 3 d'une solution de bromure de potassium à 10 pour 100. Un pinceau est mis dans chaque godet, et vous placez celui contenant le carbonate à gauche de la cuvette d'eau et celui contenant le bromure à droite, vous aurez ainsi ce que je nommerai votre palette.

Ces proportions sont absolument modifiables dans le sens que vous jugerez le plus convenable. Ce n'est là qu'une moyenne. En principe, des solutions faibles sont de beaucoup préférables, comme résultat, à des solutions fortes, bien qu'elles exigeront de vous un peu plus de temps dans leur emploi.


PAPIER AU GELATINO-BROMURE D'ARGENT. 91

Vous remplirez alors d'eau pure votre cuvette à développement et vous immergerez la feuille de papier impressionnée que vous retirerez du châssis-presse. Pendant qu'elle s'y détrempe, vous faites, dans un récipient quelconque, le bain de développement sans alcali tel que je vous l'ai indiqué, et vous agitez vigoureusement le récipient pour obtenir un mélange parfait. Vous rejetez alors l'eau de la cuvette de développement. La feuille de papier reste collée au fond. Vous précipitez dessus le bain de développement et vous attendez la venue de l'image.

Comme je vous l'ai dit, celle-ci tarde un peu à venir, puis se montre complète, mais comme nébuleuse. En admettant même que vous n'ayez jamais tiré d'épreuves sur un papier quelconque, avec le phototype employé, vous vous rendrez facilement compte, à cette première apparition de l'image, des parties qui viendront trop vite et de celles qui viendront trop lentement pour une parfaite harmonie. Vous reversez le bain dans le récipient et, avec le pinceau trempé dans la solution de carbonate, vous touchez plus ou moins, suivant le besoin, les parties lentes et, avec celui trempé dans la solution de bromure, les parties rapides. Puis vous projetez sur le tout votre bain de développement mis de côté.

Il va de soi que vous pourrez recommencer l'opération autant de fois qu'il vous conviendra. Si même vous désirez avoir plus de temps devant vous, vous n'aurez qu'à diluer plus abondamment votre bain de développement.

Cependant, toutes les fois que vous aurez touché l'épreuve positive avec l'un des pinceaux, avant de recommencer un second contact, vous devrez laver abondamment le pinceau employé dans la cuvette que vous avez placée entre les deux verres. Autrement le liquide contenu dans le pinceau pouvant se colorer, vous risqueriez de teinter les parties touchées. Accident d'ailleurs qui peut également vous arriver si les solutions employées sont trop fortes.

Dans le cas du phototype que nous avons choisi, vous pourrez ainsi, en conservant l'harmonie complète de l'image,


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LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

récupérer entièrement tous les détails de votre ciel et empêcher l'empâtement des verdures sombres de vos premiers plans. Vous pourrez encore, comme recours, employer un tour de main mis en vigueur pour le développement du phototype et qui consiste à incliner la cuvette pour ne faire agir le bain que sur certaines parties.

La seule chose qu'il y ait à craindre, dans ce mode de procéder, est de ne pas réduire également l'argent sur toutes les parties de l'image, et, par conséquent, de l'empêcher de présenter une franche tonalité noir brun. Vous n'avez aucun souci à avoir de ce résultat. Nous verrons, tout à l'heure, comment il nous sera facile, par voie de virage, de donner à l'épreuve finale une coloration harmonieuse et uniforme.

L'image une fois venue à point est légèrement rincée, puis immergée dans une cuvette à fixage contenant :

Eau 200 cm 3.

Solution d'hyposulfite de soude à 50 pour 100. 20 — Solution de bisulfite de soude du commerce

à 37° Beaumé 5 —

Vous laissez séjourner l'épreuve dans ce bain pendant le temps que vous mettez à. développer une seconde épreuve. Vous la retirez alors pour la mettre dans une seconde cuvette à fixage, contenant un bain semblable au premier. Ce double fixage a pour but de débarrasser l'image de l'hyposulfite double d'argent, qui est une des vraies causes de détérioration des épreuves en dehors des colles et des cartons.

Vous procédez alors au développement de la troisième image. Quand elle est à point, la première est mise dans la cuve à laver, la seconde est immergée dans le deuxième bain de fixage, et la troisième dans le premier bain de fixage.

Un lavage d'une heure à l'eau courante est amplement suffisant. Les épreuves sont alors égouttées et suspendues pour sécher.


PAPIER AU GELATINO-BROMURE D'ARGENT. 93

On obtient des résultats analogues en opérant de même avec le développement que j'indique au chapitre suivant : les agrandissements.

Il est bon, en été surtout, d'opérer pour les lavages avec de l'eau très froide, pour les fixages et les lavages, afin d'éviter tout soulèvement de la gélatine. Je ne saurais, en effet, vous conseiller l'emploi d'un bain d'alun. II est nuisible, toujours, pour les virages ultérieurs, et nous pouvons avoir besoin de ces virages pour achever notre couvre ou obtenir certains effets spéciaux.

Dans le cas, par exemple, que je viens de signaler, celui où toutes les parties de l'image ne présentent pas une tonalité égale partout, vous pouvez récupérer le ton noir général par un virage à l'or. Toutefois, tous les bains de virage à l'or ne virent pas des épreuves qui ont été préalablement fixées, ce qui est le cas des nôtres. Ceux contenant du sulfocyanure d'ammonium permettent seuls d'atteindre ce but. Plus ils contiennent de sulfocyanure, plus le ton noir de l'image sera bleuté. Une proportion de 4 pour 100 do sulfocyanure est une bonne moyenne. Donc vous aurez un bain excellent avec :

Eau distillée 1,000 cm'.

Sulfocyanure d'ammonium 40 grammes.

Chlorure d'or 1 —

L'épreuve une fois sèche est remise à tremper deux à trois minutes, puis plongée clans le bain de virage. Elle peut exiger, pour atteindre le ton voulu, de un quart d'heure à trois quarts d'heure. Cette durée dépend de causes difficiles à déterminer : état de l'argent réduit, température, etc., etc. Quand ce virage est achevé, il faut fixer de nouveau et laver abondamment.

Si nous voulons maintenant obtenir des teintes autres que le noir, nous pouvons employer les virages aux sels d'urane. Voici ceux qui, tout en me donnant de très bons résultats, me semblent les plus pratiques d'emploi.


94 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Vous préparez les trois solutions aqueuses suivantes qui, séparées, se conservent indéfiniment :

A. Solution d'azotate d'urane à 1 pour 100.

B. Solution de ferricyanure de potassium (prussiate

(prussiate 1 pour 100.

C. Solution de perchlorure de fer à 10 pour 100.

En mélangeant, au moment de s'en servir, ces solutions dans des proportions déterminées, vous obtenez facilement des tons très différents et très francs :

Brun : 10 parties de A et 1 partie de B.

Brun rouge : parties égales de A et de B.

Rouge orangé : 1 partie de A et 2 parties de B.

Bleu verdâtre : Obtenir d'abord le ton brun et traiter l'image ainsi colorée dans une partie de C et 5 d'eau distillée.

Bleu de Prusse : Obtenir d'abord le ton brun rouge et traiter l'image par la solution G.

On peut détruire complètement les colorations ou arrêter leur action à l'aide d'un pinceau trempé dans une solution de carbonate de soude.

Vous pouvez vous ingénier, en appliquant ces solutions au pinceau, sur certaines parties de l'image, à obtenir des photocopies polychromes, par exemple le bleu pour les ciels, le vert pour les arbres, le rouge et le brun pour le toit des maisons et les terrains. La délicatesse du procédé résiste dans le raccord des teintes.

Après les virages à l'urane, les lavages doivent être peu abondants et surtout courts, sous peine de compromettre la valeur du ton obtenu'et désiré. 11 est bon aussi d'arrêter avant l'obtention complète du ton désiré, car au séchage il monte en intensité.

Vous pouvez également préparer les deux solutions suivantes :

A. Eau distillée 500 cm 3.

Acide acétique 28 —

Azotate d'urane 2,5 grammes.


PAPIER AU GÉLATINO-BROMURE D'ARGENT. 93

B. Eau 500 cm 3.

Acide acétique 28 —

Ferricyanure de potassium. . . . 2,6 grammes.

Séparées, ces solutions se conservent indéfiniment. Comme dans le cas précédent, l'épreuve ne doit présenter aucune trace d'hyposulfite, autrement il se formerait des taches rouges.

On compose le bain de virage en mélangeant A et B en parties égales. L'épreuve y est plongée après avoir été préalablement trempée dans de l'eau pure. Quand le ton désiré est obtenu, on lave jusqu'à obtention de pureté complète des blancs. Si, finalement, le ton ne satisfait pas, vous le faites disparaître en passant l'épreuve dans une solution de carbonate de soude à saturation et... vous recommencez.

Je préfère toutefois de beaucoup les variations précédentes à ce bain unique. On atteint moins rapidement, partant plus sûrement, au ton que l'on désire obtenir.

N'oubliez pas aussi que l'azotate d'urane agit toujours un peu comme renforçateur. Il est donc bon que l'image destinée à être virée avec lui soit claire et légère. Donc surexposez légèrement et diluez votre bain de développement. 11 en sera de même si vous voulez faire virer au noir par l'emploi du bichlorure de mercure.

Là aussi le lavage après le fixage exige un soin minutieux.

Il faut que l'épreuve ne contienne plus la moindre trace d'hyposulfite. Vous prenez alors un bain de bichlorure de mercure, celui par exemple dont vous avez l'habitude de vous servir pour le renforcement. L'image séjourne dans ce bain jusqu'à disparition complète. Aussitôt après elle est passée dans une solution de sulfite de soude à 15 p. 100. On pourrait employer le carbonate de soude dans les mêmes proportions. Toutefois il ne donne pas des résultats aussi sûrs que le sulfite et peut, dans certains cas, détériorer l'épreuve. On obtient ainsi un ton d'un noir assez franc. Ce


96 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

ton est fortement réchauffé par une immersion dans le bain suivant :

Eau 1,000 cm».

Solution de sulfite de soude à saturation 2,5 —

Solution de bromure de potassium à 10 pour 100. 10 —

Les tons seront d'autant plus chauds qu'on diminuera le sulfite et qu'on augmentera le bromure. Mais il ne faut pas diminuer la concentration du bain.

Les virages à l'azotate de plomb permettent également bien de modifier la teinte de l'image sur papier au gélatinobromure d'argent. Je ne vous cacherai pas, cependant, qu'ils sont d'un emploi beancoup plus délicat cpie ceux aux sels d'urane.

Dans ce cas, comme dans tous les cas des virages, l'image doit être imprimée faiblement et développée avec tout autre révélateur que l'oxalate ferreux.

L'épreuve sèche, retrempée dans l'eau pendant deux à trois minutes, ensuite dans l'une des solutions suivantes ou dans plusieurs successivement :

Eau 100 cm 3.

Azotatede plomb 4 grammes.

Ferricyanure de potassium (prussiate rouge). 6 —

Ce bain blanchit l'image et la rend apte à virer dans les bains qui suivent :

En brun :

Eau 150 cm 3.

Sel de Schlippe 10 grammes.

Ammoniaque 5 —

En jaune :

Eau 100 cm 3.

Chromate jaune de potasse 4 grammes.

En vert : virer d'abord en jaune et tremper dans :

Eau 100 cm 3.

Perchlorure de fer 10 grammes.


PAPIER" AU GÉLATINO-BROMURE D'ARGENT.

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En rouge : virer d'abord en jaune et tremper dans :

Eau 100 cm*,

Chlorure de cuivre 10 grammes.

En vert nicliel :

Eau " 100 cm 3.

Chlorure de nickel 10 grammes.

En orange :

Eau 100 cm 3.

Iodure de potassium 4,5 grammes.

Bichlorure de mercure 3 —

Les tons rouges donnés par ces différents procédés tendent plutôt vers la terre de Sienne brûlée ou le brun rouge que vers le beau rouge sanguine qui a souvent son charme, pour les portraits surtout. Il semble que les sels de cuivre seuls soient plus aptes à nous les donner que les sels, d'urane ou que les sols de cuivre combinés avec les sels de plomb. Voici le moyen d'opérer avec eux.

Faites les solutions suivantes :

A. Eau 100 cm 3.

Bichlorure de cuivre 15 grammes.

li. Eau 100 cm 3.

Ferrocyanure de potassium (prussiate

(prussiate 5 grammes.

C. Eau 100 cm 3. .

Bichlorure de cuivre . 2 grammes.

Vous remarquerez qu'il s'agit cette fois de ferrocyanure et non plus de ferri. Tout comme précédemment, vous remouillez votre photocopie durant quelques minutes et vous la plongez dans la solution A. L'image se brouille, blanchit et disparaît. A ce moment vous retirez votre photocopie et vous la lavez à fond pour la plonger ensuite, quelques minutes seidemenl, dans la solution B. Vous lavez encore très à fond et vous immergez finalement l'épreuve dans la solution G. L'image réapparaît formée par des sels do cuivre qui jouent assez bien l'aspect sanguine.

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98 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Je n'hésite pas à vous prévenir que si cela est très simple à dire ce n'est pas aussi simple à faire. Pour obtenir une image dont les blancs ne soient pas teintés en rose, il ne faut opérer qu'à une très faible lumière blanche, et mieux encore à la lumière jaune, et ne pas oublier la recommandation de laver à fond. En dehors de l'image redevenue latente, il ne faut pas qu'il reste sur ou clans le papier la moindre trace des sels de cuivre, autrement le rosisscment des blancs a lieu. Quand on parvient à éviter cet accident on est payé de ses peines.

Toujours est-il qu'avec ces divers procédés vous pouvez obtenir une grande variété d'effets artistiques sur un papier qui est certainement un des meilleurs comme durée et un de ceux de l'avenir, puisqu'il se prête à l'agrandissement direct qui reste un des meilleurs moyens d'atteindre à l'Art photographique.

LES AGRANDISSEMENTS

L'agrandissement donne des épreuves éminemment artistiques, par l'enveloppement des plans et le rétablissement de la perspective d'une image prise avec un objectif ayant une distance focale inférieure au trentième delà longueur de la vue distincte et normale, le gras des lignes et le fondu des teintes. On ne saurait toutefois admettre que l'agrandissement soit sans limites. Ces limites mêmes sont assez restreintes en principe. D'une part le phototype négatif, si net soit-il, n'est pas d'une netteté absolue. Le maximum généralement atteint est d'un dixième de millimètre. D'autre part, l'ômulsion au gélatino-bromure d'argent possède un grain qui, grossi par l'agrandissement, peut nuire aussi à la netteté de l'image. Le docteur Eder estime qu'un phototype au gélatino-bromure d'argent ou au collodion humide ne saurait supporter un agrandissement supérieur à 4 ou G fois la plus grande longueur linéaire de l'image primitive. C'est même, à notre avis, faire une part trop belle au gélatino-bromure. Trois fois et demie la longueur


LES AGRANDISSEMENTS. 99

linéaire est bien assez. Soit au maximum environ 50XG0 pour un 13X 18.

Toutefois on peut tourner la difficulté et augmenter ces limites. Si le gélatino-bromure d'argent donne un grain évalué par le docteur Eder à trois ou quatre centièmes de millimètre, celui du collodion humide n'est plus que de un à deux centièmes do millimètre. Le grain des émulsions au eollodion-bromure d'argent est encore plus petit, mais demeure cependant sensiblement plus gros que celui des émulsions au gélatino-chlorure et au chloro-bromure d'argent, généralement employées pour les plaques diapositives. Notons encore que le grain d'une émulsion au chlorocitrate d'argent est particulièrement petit, et que celui d'une couche albuminée argentifère n'est même pas visible pour un agrandissement au centuple.

Donc si nous voulons faire subir à notre épreuve des agrandissements considérables, nous la tirerons d'abord, sur des plaques diapositives au chlorure ou chloro-bromure d'argent, avec développement ou sur une émulsion au ohloro-eitrate d'argent avec ou sans développement. On pourra même encore employer les papiers en pelliculant la couche sensible après l'obtention de l'image. D'après ce que nous venons de dire, il est certain par exemple que le papier au pyroxylo-chlorure d'argent devra nous donner des résultats remarquables du moment qu'il sera rendu couramment pelliculable.

Au demeurant, je n'ai point à insister outre mesure sur les limites des agrandissements. L'amateur lorsqu'il agrandit ne va guère au delà de 4 à G fois l'épreuve primaire. Il reste donc dans les limites données par le docteur Eder pour l'agrandissement du phototype au gélatino-bromure et emploie de préférence des dimensions fixes en se servant des châssis amplificateurs.

A ce sujet, je remarquerai que si parfaits que soient ces châssis amplificateurs, ils ne donnent l'image agrandie qu'en une seule grandeur nettement déterminée et invariable. Or depuis longtemps nous demandons un châssis


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LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

amplificateur qui, tout en demeurant avec des dimensions fixes, puisse nous permettre de faire varier le rapport de l'image agrandie à la petite épreuve. Souvent, en effet, des phototypes présentent un centre intéressant avec des alentours qu'on peut sacrifier sans inconvénient. Il est donc tout à fait agréable, en faisant le sacrifice de ces alentours, d'avoir le centre intéressant plus grand que ne le donne le rapport immuable des images dans un châssis amplificateur de telle ou telle dimension.

Le problème se posait donc ainsi : construire un châssis amplificateur invariable clans sa forme et permettant néanmoins do faire varier les rapports de l'image.

M. L. Gaumont est arrivé à le résoudre en employant des lentilles additionnelles connues sous le nom de bonnettes d'approcJie.

L'amplificateur à bonnettes, à commande automatique et à agrandissements variables que M. L. Gaumont a construit, affecte la forme d'un tronc do pyramide rectangulaire. Sa base est formée par un châssis de plaque 18 X 24 à rideau R, et son sommet par une série I d'intermédiaires permettant de mettre dans leurs feuillures, depuis et inclus les phototypes 9 X 12 jusqu'aux 4,5xG. Un volet D les recouvre lorsque l'appareil doit être porté à la lumière diurne.

Dans le châssis de la base est une glace 18x24 sans défaut, rigoureusement plane sur ses deux faces et sous laquelle on applique la feuille de papier au gélatino-bromure d'argent. Au clos de la feuille de papier et pour la mettre bien en contact avec la glace, on met une planchette, puis un volet à ressort fermant par trois petits verrous.

La première planchette, au lieu d'être en un seul morceau, est constituée par un cadre intermédiaire muni, dans son évidement, d'une planchette 13x18. Ce qui permet, au besoin, de faire une photocopie de cette dimension.

A l'intérieur de ce tronc de pyramide existe une planchette que l'on peut déplacer par un bouton extérieur B et


LES AGRANDISSEMENTS.

101

au centre de laquelle est vissé un objectif rectilinéaire 0 couvrant parfaitement la grandeur maxima des phototypes à agrandir. En même temps des bonnettes, montées sur une lame d'acier L, se meuvent quand on agit sur le bouton

bouton viennent, suivant, les cas, s'appliquer contre le diaphragme.

Ce mémo mouvement du bouton B entraine encore celui d'un disque extérieur P portant une flèche dans le sens d'un de ses rayons, et qui se meut concentriquement à un cercle gradué G, présentant les différents rapports des images entre elles.

Faisons-nous tourner cette aiguille de façon, par exemple, qu'elle vienne pointer vers le repère portant le chiffre 4 et que Von entende le léger bruit d'un déclic? La bonnette nécessaire et l'objectif se seront déplacés automatiquement aux

Amplificateur à bonnettes, à commande automatique et à agrandissements variables.


102

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

fins de nous donner une image agrandie, dont les dimensions extrêmes seront, linéairement, quatre fois celles de l'épreuve à agrandir, et nous aurons, de cet agrandissement, toute la partie centrale délimitée aux dimensions maxima 18x24.

Si l'on veut faire l'agrandissement sur plaque au lieu de le faire sur papier, on mettra la plaque au lieu et place de celui-ci ; mais, en refermant le châssis, on supprimera la planchette intermédiaire dont le secours n'est plus nécessaire dans l'espèce, puisque la plaque est plane d'ellemême et d'une épaisseur suffisante.

L'amplificateur à bonnettes, à commande automatique et à agrandissements variables est donc un progrès réalisé dans la pratique des agrandissements faciles.

La durée de l'exposition dépend de plusieurs facteurs qu'il est impossible de prévoir d'avance tel que l'état du ciel, la transparence du phototype négatif, la sensibilité des plaques et des papiers employés, le révélateur, etc. Il est donc impossible de fixer à priori la durée exacte de la pose. Toutefois mon expérience croit pouvoir vous donner, comme guide, les renseignements suivants :

Avec du papier au gélatino-bromure d'argent Morgan émail blanc, un phototype négatif en bonne valeur, clair et très brillant, susceptible de fournir une excellente image par un tirage sur papier albuminé, les durées d'exposition maxima seraient pour les différents rapports de grandeur :

Rapport 2 durée de l'exposition 8m26s.

— 2,66 — 13"'26s.

— 3 — 31'"18s.

— 4 - 52»>33s.

Ces durées d'exposition sont comptées au plein du jour, au solstice d'été et par la lumière diffusée par un ciel bleu ensoleillé. Pour l'emploi atout autre moment, il y a donc lieu de tenir compte de l'heure du jour, du mois et de l'état du ciel, et par conséquent de multiplier les temps de pose ci-dessus par l'un des coefficients que j'ai indiqués dans


103

LES AGRANDISSEMENTS.

mes tableaux de temps de pose 1 ou par l'un des coefficients du tableau approximatif ci-dessous :

I MOIS :

HEURES. E, ciel ensoleille'' ; N, ciel nuageux ; C, ciel couvert.

SEPPTUMimii M.VUS FÉVUIIIR DÉCEMBRF.

JUIN ET JUILLET MAI ET AOUT.

ET AVRIL. ET OCTOBRE. ET NOVEMBRE. ET JANVIER.

- S

SK | N C E N C E N C E N C E N C E N C

11 à 1 1 2 3 1 2 3 1,1 2,2 3,31,22,4 3,61,63,2 4,81,83,6 5,4

10 OU 2 1 2 3 1,1 2,2 3,31,22,4 3,0 1,4 2,S 4,21,73,4 il,12 4 6

<>ou3 1,1 2,2 3,3 1,2 2,4 3,61,42,8 4,21.63,2 4,82 4 6 3,57 10,o

Sou4 1,3 2,6 3,!J 1,4 2,8 4,21,63,2 4,82 4 6 3,57 10,5

7ou5 1,6 3,2 /i,8 1,7 3,4 5,1 2 4 6 4 8 12

6 ou 6 I,!)j 3,8 5,7 3 6 !J 4 8 12

!i OU 7 3,6 7,2 10,8 6,5 13 111,5

I 5 ou 8 S 16 24 ' I

Je vous ferai remarquer, en outre, que ces temps de pose coïncident avec le développement suivant :

Comme alcali j'emploie toujours le même, c'est-à-dire une solution de 15 gr. de carbonate de potasse et de 31,5 de carbonate de soude dans 100 cm 3 d'eau. Comme révélateur, je me sers de préférence, soit de l'acide pyrogallique, soit du chlorhydrate de paramidophénol. Pour le premier je vous ai donné la méthode au chapitre précédent. Pour le second ie fais d'abord la solution suivante :

Eau chaude ayant bouilli 1,000 cm- 1.

Sulfite de soude anhydre 37,5 grammes.

Chlorhydrate de paramidophénol. . . 5 —

Je compose mon bain de développement neuf avec : eau distillée 500 cm 3, solution de chlorydrate de paramidophénol 50 cms, solution de carbonate 4 cm 3. Quand la pose a été ce qu'elle doit être, il ne faut que deux à cinq minutes pour que l'image soit complètement développée.

Quant à la façon d'opérer l'exposition on porte l'amplificateur à bonnettes en plein air et à l'ombre, et on le pose sur sa base, parallèlement au sol, de façon que son sommet

•1. Voir : La Théorie, la Pratique et VArt en photographie, page 74.


104 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

regarde le ciel. Dans le cas où l'on ne pourrait pas le placer ainsi verticalement, il faut alors diriger le sommet obliquement vers le ciel en tournant l'appareil sur lui-même pendant toute la durée de l'exposition. Si, pour une cause quelconque on ne peut obtenir cette direction vers le ciel, on place l'appareil horizontalement sur une fenêtre ouverte de manière que son sommet déborde cette fenêtre, et l'on met en regard du phototype négatif un miroir regardant le ciel sous une inclinaison de 45°. Ce sont là les trois moyens nécessaires et suffisants pour égaliser l'arrivée de la lumière sur le phototype négatif.

On démasque alors la feuille sensible en tirant le rideau à fond par la tirette d'arrêt que l'on a soin au préalable de dégager de son logement en le soulevant, et l'on ouvre le volet du sommet de l'amplificateur à bonnettes et on le rabat complètement sur le côté.

L'amplificateur à bonnettes possède encore cela de particulier qu'il est réversible, c'est-à-dire qu'il peut servir pour la réduction des phototypes 18x24 et au-dessous. Dans ce but, on substitue au châssis de pose R une série d'intermédiaires, et aux intermédiaires I un petit châssis à rideau dans lequel on peut mettre une plaque 8 1/2x10, pour projection et au gélatino-chlorure d'argent.

Les opérations se font de même que pour l'agrandissement, mais en sens inverse.

LES PROJECTIONS

J'ai déjà eu bien souvent l'occasion de parler de l'irradiation photographique connue vulgairement sous le nom de halo. C'est un débordement lumineux qui se voit sur le phototype et, par conséquent, sur la photocopie au voisinage immédiat de tous les contours d'objets blancs, d'un motif, se détachant sur un fond très obscur, ou inversement de tous les objets très obscurs se détachant sur un fond très clair. Ainsi dans ce second cas les contours d'un patineur


LES PROJECTIONS.

105

noir, par exemple, se détachant sur une glace frappée par le soleil, sont frangés d'une ligne lumineuse. Ce phénomène photographique subsiste même lorsqu'on ne fait pas emploi d'un objectif, et quelle que soit la rapidité ou la lenteur de l'émulsion.

Sans entrer aujourd'hui dans une longue étude théorique

de ce phénomène, je puis dire dès maintenant que l'irradiation photographique provient d'une action combinée de l'épaisseur du verre de la plaque sensible et de la couche diffusante dont cette plaque est recouverte. Celle-ci, en effet, ne peut point être considérée comme transparente mais seulement comme translucide à la manière du verre dépoli. Le rayon incident d'un objet lumineux, frappant la plaque sensible, se trouve donc diffusé par les petites sphérules opaques de bromure d'argent. Il est aisé, au demeurant, de se représenter la marche de ces rayons diffusés

14

Lanterne de projection modèle « Pbébus ».


106

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

depuis les plus perpendiculaires à la plaque, les moins obliques, pénétrant la couche jusqu'à ressortir presque complètement de l'autre côté, jusqu'à ceux qui, bien incidents, restent emprisonnés dans l'épaisseur du verre et se trouvent totalement réfléchis au delà.

Si l'on considère, la photographie d'un point extraordinairement

extraordinairement on remarque que l'irradiation photographique se présente sous un aspect qui, au demeurant, est double. C'est-à-dire à quelque distance du point lumineux, une circonférence lumineuse aussi et dont ce point est le centre, puis dans tout le cercle, délimité par cette circonférence, une zone lumineuse dégradée. C'est, le cas du soleil pris dans le motif. Doit-on considérer l'irradiation annulaire comme émanant des rayons lumineux totalement réfléchis sur la face postérieure de la plaque, et l'irradiation dégradée comme le résultat d'une diffusion des rayons

Support de bec de gaz Aller.


LES PROJECTIONS. 107

lumineux dans la couche sensible? C'est fort possible. Mais alors il nous deviendra très difficile de faire disparaître celle-ci entièrement, alors que nous pouvons détruire tout à fait celle-là.

Pour empêcher le halo de se montrer sur le phototype, le capitaine Abney avait déjà indiqué trois méthodes que je rappellerai : 1° enduire le dos de la plaque d'une couche non actinique ; 2" supprimer, autant que possible, la translucidité de la couche sensible ; 3° donner pour véhicule, au sel d'argent, un excipient possédant un indice de réfraction aussi peu différent que possible de celui du verre, M. A. Cornu a préconisé l'emploi d'un badigeon, au dos de la plaque, fait d'une mixture composée d'essences de girofle et de thérébentine dans lesquelles on mélange du noir de fumée. Je n'insisterai pas sur ce procédé, déjà donné. Je veux parler aujourd'hui de celui présenté à la Société française de photographie par M. Drouct, et qui est • surtout propre aux épreuves de projection.

Ce procédé plus ou moins nouveau, mais en somme assez pratique, consiste à mélanger à sec cent parties d'ocre rouge ordinaire en poudre fine, avec cinquante parties de dextrine, et d'y ajouter 50 cm 3 d'eau et 5 cm 3 de glycérine. Ce mélange, ne se gardant pas à l'état humide, demande à être fait au moment de s'en servir. Après l'avoir bien malaxé de façon à éviter la formation de grumeaux, l'on en enduit le dos des plaques avec un large pinceau en évitant les stries. On peut laisser sécher ou employer à l'état humide en protégeant cette couche par l'application d'un papier.

Au développement cette couche d'ocre qui, paraît-il, empêche le halo dans tous les cas peut ne pas être enlevée. On se contente, lorsqu'on veut juger par transparence de la force du phototype, de frotter avec le doigt, ou une éponge, l'enduit qui s'efface très bien.

Ce mode d'usage est entièrement propice aux plaques de projection qui gagnent, de ce fait, en transparence, en brillant et en finesse. Il est aisé de s'en rendre compte en


108

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

ocrant seulement la moitié d'une plaque tirée par contact d'un phototype. Ceci vous permettra d'obtenir des diapositives merveilleuses de clarté en même temps que très douces de ton. De plus, vous pourrez surexposer sans crainte de voile. Or, par la surexposition vous ramenez à la douceur des images heurtées sur le phototype, et de plus vous faites, par cela môme, varier à votre guise le ton final de la photocopie diapositive. Plus vous posez longtemps et

plus vous développez longtemps, plus vous obtenez de tons chauds.

La diapositive, étant par l'ocrage merveilleusement brillante, donnera de très belles projections même avec la lampe au pétrole, .le crois cependant que ce modo d'éclairage a fait son temps. Il est précaire, sent mauvais, et il est si facile avec l'emploi de l'oxygène et de l'éther d'avoir une lumière étincelante, propre, commode et inoffensive qu'on ne saurait hésiter à proscrire celle au pétrole. C'est depuis, je crois, une quinzaine d'années que les Américains et les Anglais se sont occupés d'une lumière utilisant l'oxygène et l'éther. Ils la nomment àtlio-oxygène et nous oxy-èthèrique.

Le non-emploi consistait dans le manque d'un bon appaLo

appaLo tic M. Molteni.


LES PROJECTIONS.

109

reil. Cette lacune vient d'être comblée par M.Molteni avec son chalumeau multi-satùrateur.

En principe, ce chalumeau se compose d'un corps cylindrique ou saturateur divisé en un certain nombre de compartiments, au minimum deux, contenant les matières absorbantes destinées à emmagasiner le liquide volatil.

Au saturateur sont fixés les différents organes complétant l'appareil, c'est-à-dire le chalumeau, le porte-chaux et les robinets ou valves de réglage.

Par suite de sa construction, le multi-saturateur de M. Molteni ne laisse jamais arriver l'oxygène dans des proportions susceptibles de former un mélange détonant, même en fin de charge. Dans ce dernier cas la lumière baisse et s'éteint d'elle-même. Grâce à ses compartiments multiples il assure une comburation complète de l'oxygène et d'autant plus complète même que la chaleur de la lanL'ii'radiaUon

lanL'ii'radiaUon et l'effet de soleil direct dans le tableau.


110 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

terne la favorise. Seul, l'intérieur du bec présente un espace pouvant servir de magasin au mélange de l'oxygène et de l'éther, et cet espace est beaucoup trop petit pour qu'une détonation accidentelle puisse produire un effet nuisible.

On peut donc résumer, comme suit, les avantages de cet appareil :

Transport facile, grande intensité de la lumière, suppression du gaz d'éclairage, manoeuvre commode, petitesse du point lumineux. Ce dernier avantage est du plus haut intérêt dans le cas surtout où l'on désire faire un agrandissement par projection. On sait, en effet que, dans l'espèce, la netteté de l'image est d'autant plus grande que In. source lumineuse est plus petite.

Mais beaucoup d'amateurs hésitent malgré tout à se servir de tubes d'oxygène. De plus, pour bien des raisons, ils ne sont pas toujours à même d'en avoir. Aussi, préféreraient-ils l'emploi du gaz. Leurs désirs peuvent être satisfaits et amplement satisfaits par l'adaptation du bec Aùer à la lanterne de projection. Toutefois, en songeant à adapter le bec Aûer à la lanterne de projection, il fallait aussi songer à le monter sur un dispositif permettant de le déplacer de haut en has, de droite à gauche, et d'avant en' arrière, afin d'arriver vite et aisément au centrage mathématique. C'est la création de ce dispositif que M. L. Gaumont a réalisée.

Sur 'un sommier de fonte très lourd, et qui par cela même est susceptible de communiquer une plus grande stabilité aux lanternes de projection, se trouve une tige verticale d'acier poli. Le tube adducteur de gaz, fortement surbaissé dans la partie qui doit rester tournée vers le condensateur, présente, en son centre, un forage annulaire qui permet de le faire glisser, à frottement doux, sur la tige d'acier poli qui entre dans ce forage, et par conséquent de le faire pivoter autour de cette tige avec une douceur extrême et une grande facilité. La partie droite du tube adducteur de gaz est alors à angle droit avec la tige d'acier. Une vis de pression, adaptée au diamètre horizontal du forage annu-


LES PROJECTIONS. 111

laire, permet de maintenir solidement le tube dans la position qu'il doit définitivement occuper.

L'extrémité de la partie surbaissée de ce tube est munie d'un pas de vis sur lequel s'adapte le bec Aùer. On sait que le principe de ce bec est d'éclairer non par le gaz mais bien par l'incandescence d'oxydes métalliques.

La lumière obtenue par ce procédé est inodore, d'une intensité beaucoup plus grande que celle d'une lampe à pétrole à quatre mèches, d'une égalité parfaite et ne dégage qu'une très faible quantité de chaleur. Toutes ces qualités sont autant d'avantages pour la lanterne de projection. Aussi n'hésité-je pas à appeler toute l'attention des amateurs sur ce nouveau mode d'éclairage ainsi adapté aux lanternes, d'autant mieux que n'importe quelle lanterne de projection peut être munie de ce dispositif rêvé, sans autres frais que le prix de ce dispositif même.

Si le bec Aùer est adapté à ce dispositif, il est inutile d'ajouter que tous les becs de gaz, dérivés du bec Aùer, le sont également.

Le Comptoir général de Photographie a créé en même temps une nouvelle lanterne spéciale, modèle Phoebus, pour le bec Aïier, mais cependant susceptible d'être éclairée par n'importe quel autre luminaire. Elle se présente sous un volume restreint, élégant, et permet aussi bien la projection que l'agrandissement (Voir page 105).

Comme dans ce dernier cas, toute lumière irradiante doit être absolument voilée, la lanterne est livrée avec une seconde cheminée spéciale. En plus de cette cheminée se trouve un porte-phototype muni d'une bague à vis, qui se monte, à fermeture complètement étanche, entre le condensateur et l'objectif.

Un dispositif très ingénieux permet d'ailleurs, dans le cas de la projection, de disposer entre ces parties des photocopies diapositives de toutes les dimensions. Ainsi, par exemple, si l'on a une photocopie diapositive 13 X 18 dont une partie puisse être détachée pour former un tableau de projection et que l'on ne veuille pas, pour une


112

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

raison quelconque, faire une diapositive spéciale de cette partie, on peut mettre la plaque 13 X IX dans l'appareil de façon à ne projeter que la partie que l'on désire montrer. Par sa simplicité autant que par son peu de volume et et ses adaptations variées, cette nouvelle lanterne réalise un progrès très réel dans la pratique des projections et dans celle des agrandissements à ;a lumière artificielle. Or l'agrandissement et la projection sont, pour l'heure et à bien juste titre, les grands favoris de tous les amateurs sérieux et amis do l'Art photographique.

LA PHOTOSTÉRÉOGRAPHIE

Prenons un objectif photographique quelconque et braquons-le sur un objet éloigné que nous pouvons pratiquement

pratiquement par cet éloignement môme, comme étant situé à l'infini. Les rayons émanant de cet objet arriveront à l'objectif parallèlement à l'axe horizontal du système lenticulaire de cet objectif. Puis ils traverseront ce système lenticulaire pour continuer leur marche au delà. Toutefois, cette traversée du système lenticulaire aura pour

Différents moyens d'opérer avec le Vérascope.


LA PHOTO STEREO GRAPHIE.

113

effet immédiat de modifier la marche de ces rayons. En le touchant ils étaient parallèles ; on le quittant ils deviendront obliques, de telle sorte que le pinceau lumineux primitivement parallèle deviendra conique après sa traversée de l'objectif. La distance qui séparera la dernière lentille du sommet de ce cône est ce que nous désignons par les mots distance focale ou foyer de l'objectif. En outre, au sommet de ce cûne apparaît l'image do l'objectif nettement

visible et délimitée. Supposons qu'en ce point nous puissions mettre l'objet visé. Les rayons qu'il émanera formeront un cône qui viendra frapper l'arrière du système lenticulaire de celle-ci et, après l'avoir traversé, ils ressortiront en un pinceau parallèle à l'axe du système.

C'est le phénomène que l'on désigne sous le nom de principe du retour inverse des rayons.

Donc si au foyer de l'objectif ou, pour mieux parler, si dans son plan focal nous plaçons une photographie obtenue avec cet objectif, les rayons lumineux émanant des différents points de cette photographie ressortiront à l'avant de cet objectif, exactement dans les mêmes fonctions qu'ils avaient à l'entrée. Par conséquent en regardant une photographie à travers l'objectif ayant servi à son

1 L>

Différents moyens d'opérer avec le Vcrascope.


114 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

obtention, et à condition que cette photographie soit placée dans le plan focal de ce même objectif, elle nous représentera les objets qui la composent tels qu'ils ont été vus par cet objectif. Pour que la reconstitution fût exactement vraie, il faudrait cependant que cet objectif possédât le même angle et la même distance focale que notre oeil. Ce qui n'a pas lieu dans la pratique, car les objectifs des petits appareils surtout possèdent des foyers notablement inférieurs à la distance de notre vue distincte, et, en outre, des angles considérablement plus grands que l'angle moyen de l'oeil humain.

Encore, en admettant que cette double condition existât, l'image revue serait-elle réellement celle que nous avons vue dans la nature et dont nous avons voulu prendre l'image? Nullement. En effet, elle a été vue par deux yeux, avec le relief inhérent à notre vision binoculaire, alors qu'elle n'a été enregistrée que par un objectif correspondant à la vision monoculaire qui ne saurait nous donner la sensation du relief. Donc une photographie, même regardée à travers l'objectif qui a servi à son obtention, ne saurait nous donner l'impression naturelle de l'objet qu'elle a enregistré. Pour récupérer cette impression il faut deux photographies, correspondant chacune à l'image de l'objet pris par chacun de nos yeux et par conséquent prise, de deux stations différentes.

En d'autres termes, pour qu'une photographie nous donne l'impression naturelle, il faut 1° qu'elle soit prise en stéréographie ; 2° que les objectifs qui ont servi à la prendre aient le même écartement que nos yeux ; 3° que les images soient revues à travers les mêmes objectifs.

La préoccupation de ce but à atteindre a donné naissance au Vêrascope. Appareil photostéréographique à main et réversible, c'est-à-dire pouvant s'employer pour revoir avec lui les images prises par lui et dont je vous ai signalé l'apparition l'année dernière '.

Le Vêrascope est donc en réalité une sorte de jumelle

Voir : Les Nouveautés photographiques, année 1895, page 89.


LA P1I0T0STÉRE0GRAPHIE.

115

stéréoscopique se composant de deux parties principales : la chambre noire A et le magasin B.

La chambre noire se trouve constituée par une boîte métallique en tronc de pyramide rectangulaire. Son sommet porte deux objectifs O dont les centres sont distants de (>3 millimètres, ce qui correspond à l'écartement moyen des yeux humains. Sur l'axe médian de ces deux objectifs

objectifs placée une lentille L donnant sur un verre dépoli encastré dans une fenêtre l'image un peu réduite de l'objet que l'on vise. Les différentes pièces C, 1), A et B résistent au déclenchement do l'obturateur.

Le magasin B contient douze porte-plaques recevant des plaques sensibles qui peuvent être utilisées soit pour douze vues stéréoscopiques, soit pour vingt-quatre vues simples. Il est muni : 1° d'un viseur opaque II pour centrer les motifs pris à hauteur de l'oeil (dans ce cas le réticule que porte ce viseur doit être placé verticalement en face de l'oeil et passer au milieu du sujet choisi); 2° d'un

Détails de construction du Vêrascope.


116

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

compteur F permettant d'enregistrer le nombre de plaques exposées d'une poignée P servant à l'escamotage.

Grâce aux deux viseurs que je viens de signaler le vêrascope permet de prendre un sujet dans n'importe quelle position, soit à la hauteur des yeux, soit à la hauteur de la poitrine, soit de coté, soit au-dessus de la tête.

On arme l'obturateur en tirant jusqu'à bout de course le

bouton A et en le laissant brusquement retomber aussitôt. Vous vous trouvez dès lors prêt à prendre une vue instantanée. Dès que le motif se présente à vous, vous contrôlez sa mise en plaque en l'encadrant bien dans le viseur, vous passez l'ongle dans l'échancrurc S et vous tirez en dehors de l'appareil et à fond la lamelle d'acier Q qui protège la plaque sensible. Appuyez ensuite sur l'extrémité du levier B. Le déclenchement de l'obturateur s'opérera aussitôt et sans secousse. Repoussez alors la lamelle métallique.

La vue est faite et remise à l'abri de toute intrusion de lumière. Il faut dès lors procéder à son escamotage, c'està-dire lui substituer une plaque neuve afin de vous trouver prêt à prendre une nouvelle vue.

Pour ce faire, vous saisirez le Vêrascope avec la main

Le Vêrascope en demi-grandeur nature.


117

LA P II OTOSTEREOGRAPINE.

gauche, les objectifs tournés verticalement vers le ciel, tandis que de la main droite vous tirez franchement à vous et d'un coup sec la poignée P. Onze plaques sont entraînées

entraînées dehors do l'appareil. La douzième, celle impressionnée, ne se trouvant plus soutenue tombe au fond du

magasin. Vous repoussez vivement le tiroir de ce magasin, et la plaque impressionnée vient so loger sous les onze autres.

11 ne vous reste plus qu'à faire avancer d'un cran le compteur F pour indiquer, à votre choix, le numéro d'ordre de la plaque qui a été utilisée ou qui est à utiliser.

Châssis porte-plaque positive.

Châssis .Inntc pour la transposition des phototypes entiers.

Châssis J. Richard pour la transposition des phototypes coupés.


118

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Si l'on a armé en vue de prendre un motif et qu'on ne prenne pas ce motif, on peut mettre le vêrascope dans sa gaîne en le laissant armé. Un dispositif des plus simples permet toujours de reconnaître si l'objectif est armé ou non. Quand il est armé, un trait brillant apparaît sous les objectifs perpendiculaires à leur axe horizontal.

Si au lieu de prendre un motif instantanément on désire le prendre au poser, on arme l'obturateur de la façon que je viens d'indiquer, mais on l'enclenche aussitôt en poussant le verrou D vers la lentille L, ce qui fait saillir le levier C. L'appareil est ensuite posé sur un support solide et maintenu avec la main. On tire la lamelle métallique, on appuie sur le bouton B, l'objectif s'ouvre et quand on juge la durée de la pose suffisante, on fait pression sur le levier C qui déclenche définitivement, l'obturateur. La lamelle métallique est repoussée et la plaque changée comme précédemment.

On sait que les vues stéréoscopiques, prises ainsi par un appareil binoculaire, présentent finalement adroite l'imag-e de l'objet perçu par notre oeil gauche et réciproquement. Il y a donc lieu, pour obtenir et monter les deux éléments qui' doivent former la vue stéréoscopique , de transposer ces images. Rien de plus simple dans le cas du tirage des photocopies positives sur papier. On les insole comme d'ordinaire, on les coupe et on les colle en les transposant, c'est-à-dire que l'on colle adroite l'image de gauche et réciproquement.

Mais l'image sur papier est loin d'être aussi belle que l'image sur verre. Au point de vue stéréoscopique, le mieux consiste donc à toujours faire des photocopies diapositives. Pour le tirage, rien de particulier. Le travail s'exécute comme pour les diapositives ordinaires. Mais on doit les transposer. Il faut alors les couper au diamant, ce qui n'est pas difficile, puisqu'on a affaire à des plaques de verre extra-minces et de très petites dimensions (15mmX 107mm). Il ne restera plus qu'à les mettre dans un porte-plaque spécial muni d'un verre dépoli et traversé en son centre


LA PHOTO STÉRÉO G RAPINE. 119

par une lame opaque représentant exactement l'écartcment que les deux images doivent avoir, pour que leurs points homologues puissent se superposer et donner un bon relief. Si simple que soit ce coupage, il peut effrayer. Lorsqu'on n'a pas l'habitude de couper du verre on craint toujours de briser sa plaque. On peut alors tirer les deux images sur une même plaque et à la place qu'elles doivent définitivement occuper, en se servant d'un petit châssis spécialement construit à cet effet par la maison Jonte. Je vous le recommande tout particulièrement. S'il évite un travail ennuyeux et dangereux , il a encore l'avantage de nous permettre de conserver nos vues sur une seule plaque et de ne pas nous tromper quand nous aurons à les placer dans le châssis du stéréoscope.

Or, le stéréoscope, dans l'espèce, puisque le Vêrascope est construit en vue de la réalisation du principe du retour inverse des rayons, est le vêrascope lui-même. On enlève le magasin contenant les plaques, et on lui substitue le châssis métallique muni d'un verre dépoli dont j'ai parlé plus haut et dans lequel on glisse la photocopie diapositive, que l'on regarde alors à travers les objectifs môme qui ont servi à la prendre.

Le Vêrascope réalise-t-il complètement ce principe du retour inverse des rayons? Oui et non. Oui, parce qu'il en est une application vraie ; non, parce que notre oeil n'ayant ni le foyer ni l'angle de l'objectif employé, est forcé de se livrera un travail d'accommodation assez désagréable. Il est vrai qui si L'oeil est trop fatigué par ce travail, on peut regarder les photocopies dans un stéréoscope ordinaire, et, la même maison Jonte, qui a construit un châssis do tirage, fabrique des stéréoscopes spéciaux pour le format du Vêrascope.

Toujours est-il que le Vêrascope nous permet l'obtention d'épreuves stéréoscopiques très fines et délicieuses, malgré leur format réduit, et qu'il reste, en ce genre, l'appareil le plus pratique que je connaisse, puisqu'il peut à la rigueur être mis dans la poche.


120 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

En outre, il est scientifiquement le point de départ d'appareils construits sur ce principe éminemment intéressant du retour inverse des rayons, qui nous permet de voir l'image dans ses dimensions et avec sa perspective juste, même si elle est prise avec un objectif imparfait et déformant les lignes, puisque l'on emploie le même objectif à l'examen de l'image. Les conditions psychologiques de noire vision se trouvent ainsi remplies du même coup. Le champ visuel étant, en effet, limité à l'image, tout point de comparaison fait défaut et nous la revoyons ce qu'elle est en réalité. Pour ce faire nous n'avons qu'à donner à l'appareil, devenu stéréoscope, exactement la même inclinaison qu'il avait lorsque, étant chambre noire, nous avons exposé la plaque qu'il renfermait.

Je précise. Deux cas extrêmes peuvent se présenter à nous dans le travail courant: 1° nous sommes à une fenêtre et nous voulons prendre uni! scène de rue; 2" nous nous trouvons un peu près d'un monument dont nous voulons avoir les détails du fronton. Dans les deux cas, notre appareil plongeant vers le sol ou vers le ciel, aura son centre optique très en dessus ou très en dessous do la ligne horizontale. Les lignes verticales des monuments fuiront donc vers ces centres optiques, rayons d'éventail dont le pivol serait en bas dans le premier cas et en haut dans le second. Il est certain que si nous avions voulu dessiner perspecti. vement ces mêmes images en tenant compte des mêmes points de fuite, nous eussions eu les mêmes déformationsNôtre goût nous aurait empêché de le faire, guidé qu'il eût été surtout par la comparaison des objets environnants.

Le Vêrascope, devenu stéréoscope, nous éliminant cette comparaison, notre goût sera déjà moins choqué en regardant l'image par l'objectif qui l'aura fournie et se trouvera tout à fait satisfait si, en regardant l'image, nous l'inclinons, pour le premier cas, en dessous de l'horizon et pour le second en dessus. Les verticales obliques , dans l'image réelle, reprendront leur verticalité dans l'image vue ; pour obtenir cette verticalité, complète


LA C II RONOPHOTO GRAPHIE.

121

nous serons forcément obligés de ramener d'une façon précise, l'appareil à l'endroit où il se trouvait durant la pose. Au point de vue purement scientifique, il y a là une possibilité d'applications très sérieuses au plus grand profit de la levée des plans.

LA CHRONOPHOTOGRAPHIE A LA PORTÉE DES AMATEURS

Je vous ai déjà indiqué ce qu'est la chronopholog rapine' et les différents moyens employés pour obtenir des images

O, objectif. — l\ porto-volet. — A, disque do verre ou de pellicule transparente.

I) et V, trous servant au centrage et au ropoi-age des images positives. — "lî, disque

opaque. — U, fcnèlrc du disque opaque. — O, coffre du bioscope. — M, manivelle.

L, lanterne de projection. — S, support de l'appareil.

LE B i o s o o i" i:

l. Voir: Len Nouveautés photographiques, année IStKt, page 222.

115

photographiques par cette merveilleuse méthode d'enregistrement.


122 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Evidemment, les amateurs n'ont pas le moindre souci de la chronophotographie pour la chronophotographie en ellemême. Que le galop d'un cheval puisse se décomposer en vingt-cinq mouvements ou en cinquante, cela peut piquer leur curiosité, éveiller leur intérêt, mais laisser parfaitement sommeiller leur envie de coller dans des albums ces interminables successions d'images, ou même de les faire passer dans un appareil zootropique construit exprès.

Tout autre devient leur intérêt s'ils peuvent faire, quand bon leur semblera, avec la facilité de la photographie instantanée courante, des sujets de genre animés, des scènes de rues ou de campagne, et surtout, oui surtout des portraits vivants en plein air, et même à l'atelier, quand celui-ci est bien éclairé. Ils remplaceront l'album vulgaire par un appareil zootropique reconstituant, par synthèse, le mouvement dont ils auront pris l'analyse et ils auront une source de plaisirs nouveaux, d'une vérité et d'un intérêt bien autrement puissants que la simple image ordinaire. Combien encore cette vérité et cet intérêt seront augmentés dès qu'ils projetteront cette synthèse au lieu de projeter un tableau immobile !

Le portrait animé? Mais il suffit, à lui seul, pour susciter une révolution dans lit photographie. C'est la possibilité d'obtenir une ressemblance parfaite, dans des attitudes qui ne sont ni apprêtées, ni guindées, ni grotesques à force de raideur. C'est la possibilité de saisir les expressions les plus fugaces du visage, de rendre tous les mouvements des passions tristes ou gaies, do consigner la beauté du geste, de donner à chacun sa véritable caractéristique.

La photographie instantanée permet tout cela clirez-vous? Que non pas. Une photographie instantanée du mouvement ne saurait rendre le mouvement. Si rapide que soit la reconstitution du pourpre rétinien, sur lequel l'image s'imprime au fond de notre oeil, elle ne peut lutter avec l'instantanéité d'une impression lumineuse. L'image formée, reçue et vue persiste dans notre oîil d'une façon encore appréciable. Pendant un trentième de seconde, au moins, la


LA CHRONOPHOTOGRAPHIE. 123

décroissance de l'image paraît insensible. Donc, des impressions lumineuses renouvelées trente fois à la seconde produiront sur notre vision une sensation continue. Le fait est connu. De petites expériences de physique amusante l'ont vulgarisé. Il n'en demeure pas moins d'une importance capitale dans la vision et explique pourquoi l'image du mouvement même nous donne rarement la notion du mouvement quand elle nous est présentée par la photographie instantanée. En dehors de la grâce, manquant presque toujours aux images instantanées, nous n'y trouvons, le plus souvent, que le mouvement autre que nous le voyons dans la nature. Au lieu de l'image du mouvement nous avons celle d'une phase du mouvement, c'est-àdire celle d'une immobilité complète, dans un équilibre plus ou moins stable ou dans une attitude grotesque, ou dans une grimace ridicule, ou dans une expression de physionomie bouffonne. En conséquence , prendre une phase d'un mouvement, c'est détruire la sensation de continuité qui reste la condition primordiale du mouvement, partant de la vie.

L'instantanéité ne peut donc reproduire le mouvement qu'autant qu'elle nous en donne au moins l'équivalent optique. Combien de fois cet équivalent ne nous est-il pas offert! Combien de fois avons-nous des images très exactes, nous n'y contredirons point, mais des images ne donnant pas l'impression de la nature, parce que, si grande que soit notre acuité visuelle, nous ne les avons jamais perçues ainsi et que ne les ayant point perçues nous ne saurions les comprendre.

Par conséquent, si nous voulons de la vie au portrait photographique, avoir et garder le portrait vivant, bien vivant, réellement vivant, nous devrons prendre une série d'épreuves instantanées, en faire ensuite la synthèse et constituer ainsi une véritable photobioscopie.

Or, M. Georges Demeny a mis enfin l'amateur à même de réaliser ce rêve, en faisant construire deux appareils, maniables, très abordables de prix, dont l'un, le Biographe,


124

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

est destiné à l'analyse, et l'autre, le Bioscope, est destiné à la synthèse.

Le Biographe, constitué, en principe, par un mécanisme très simple qui ne se dérange plus une fois réglé, est contenu dans une boîte de 28 centimètres de côté et de 10 centimètres d'épaisseur. Tous peuvent le manier sans

apprentissage, il ne demande aucune installation spéciale; eu plein air, à l'ombre, il donne les épreuves instantanées les plus rapides avec tout leur modelé; il permet d'obtenir une série continue de 80 images et même davantage, avec une vitesse de 8 à 20 images à la seconde; il faut compter A images par tour de manivelle. Il permet d'obtenir aussi une série de 10 à 20 images à la seconde, une suite de plusieurs séries interrompues et reprises instantanément au moment que l'on désire, aussi bien que l'image unique posée ou instantanée comme dans les autres appareils. La grandeur des images et la longueur des séries dépendent

Le Biographe vu de face (échelle 1/11).


LA CHRONOPHOTOGRAPHIE.

12o

seulement de la dimension des appareils. Dans l'appareil d'amateur, ces images ont la dimension 6emx4"n, c'est-àdire une dimension suffisante pour avoir des épreuves pleines de détails, susceptibles d'agrandissement, et à laquelle

l'amateur est habitué depuis la popularisation des jumelles photographiques. Il y a donc sensiblement 25 images par mètre de ruban sensible. Il permet d'opérer aussi lentement ou aussi vite que l'on désire, sous toute inclinaison.

Il se charge avec facilité, se place sur un pied quelconque, sur ses deux faces, se porte sur l'épaule ou à la main.

L'appareil est muni d'un anastigmat de Zeiss de 12 cenOrganes

cenOrganes du Biographe.


126 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

timètres de foyer à diagphragme iris et à mise au point par vis hélicoïdale. Le magasin peut contenir 12 bobines qui permettent de prendre un millier d'images.

Le Biographe doit sa qualité à la simplicité de son mécanisme, dont je vais vous donner sommairement une idée.

A. — Bouton de prise des images. En l'enfonçant avec la paume de la main gauche pendant que l'on tourne la manivelle la pellicule se déroule et la lumière pénètre dans l'appareil par la fenêtre du disque, qui s'entr'ouvro, à des degrés divers, suivant la position par rapport au repère R des traits gravés sur la bague C, montée sur l'axe du bouton A (Voir page 125).

M. — Manivelle qui communique un mouvement de rotation au disque obturateur. Chaque tour de manivelle correspond à 4 tours du disque et par suite à A images, il faut donc faire 2 tours et demi de manivelle pour prendre 10 images en une seconde.

B. — Bouton d'arrêt du disque ; tourné vers le bas, le disque est libre; tourné vers le haut, un ressort frotte à la circonférence du disque et vient tomber dans un cran d'arrêt de façon que la fenêtre soit en regard de l'objectif. Quand on veut ainsi arrêter le disque dans son cran d'arrêt, il faut avoir soin de tourner la manivelle très lentement et surtout de ne jamais tourner le bouton d'arrêt quand le disque est en rotation.

G. — Cadre de celluloïd dépoli servant à la mise au point ; pour cela on remplace l'écran opaque II parle cadre C, que l'on glisse entre les rouleaux et la ptaroi de la boîte, les ressorts compresseurs de ce cadre appuyant contre celle-ci.

I. — Bobine-magasin chargée de pellicule sensible et placée sur son axe. Cet axe porte un frein à serrage gras.

K. — Bobine-réceptrice sur laquelle s'agrafe l'extrémité de la pellicule. Cette bobine est entraînée par le disque lorsque l'on pousse le bouton A. Les bobines se fixent indifféremment sur Tune ou l'autre des broches qui leur servent d'axes. La bobine doit être présentée du côté du trou libre, et la goupille qui traverse le trou opposé doit venir


LA CHRONOPHOTOGRAPHIE. 127

s'engager dans l'encoche taillée à la partie supérieure de chaque broche. Il faut avoir soin de faire porter la goupille de la bobine au fond de l'encoche de la broche.

L. — Tige excentrique sur laquelle se réfléchit la pellicule et qui a pour fonction essentielle de communiquer à cette pellicule un mouvement intermittent.

NN'. — Compresseurs élastiques en baleine et que l'on doit abattre sur les bobines, une fois celles-ci placées sur leurs tiges. Ils ont pour but d'empêcher les extrémités des bandes de se dérouler avant et après la prise des images.

E. — Verrou d'embrayage. En le tirant à droite après avoir eu soin de donner un tour de manivelle, on met en prise les organes entraîneurs de la pellicule, sans ouvrir la fenêtre du disque, et l'on rend ainsi indépendants le passage de la lumière et le mouvement delà pellicule. Ce verrou d'embrayage a son utilité : 1° Quand on veut mettre au point le disque arrêté dans son cran d'arrêt et éviter que les tocs de l'embrayage se rencontrent, ce qui pourrait arriver quelquefois et ce qui empêcherait d'ouvrir la fenêtre entièrement en poussant avec le bouton A.

2° Quand on veut prendre des successions d'images uniques.

F. — Compteur de tours de la tige excentrique ou du nombre d'images. Quand le verrou E n'est pas tiré, ce compteur se met en marche dès qu'on appuie sur le bouton A. On lit sur le cadran le numéro correspondant et on en déduit le nombre d'images, à moins que l'on ait eu le soin de le mettre tout d'abord à 0, en tournant la manivelle et en appuyant sur le bouton A, jusqu'au passage de ce chiffre.

P. — Magasin renfermant les accessoires de l'appareil, objectif, manivelle, bobines chargées, tirées et non tirées. Q,Q.— Boutons d'attache de la courroie qui sert à porter l'appareil sur l'épaule.

Ces boutons à vis se fixent dans des écrous au pas du


128

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Congrès. On peut, donc, à leur place, y visser une clef et immobiliser ainsi l'appareil sur une de ses faces inférieure ou latérale, suivant que l'on veut prendre des vues dans le sens de la longueur ou de la largeur de l'épreuve. V. — Viseur mobile à double effet.

X. — Réglette métallique permettant de fermer hermétiquement la partie supérieure de l'appareil formant chambre noire.

Z. — Cale maintenant les deux bobines-magasins I et Iv lorsque l'appareil est retourné.

Rien n'est plus simple que de prendre des vues avec un tel appareil. Quant au développement, tous les révélateurs conviennent. On prend, pour développer, deux cristallisoirs ou deux vases quelconques suffisamment grands pour contenir chacun toute la bande pelliculaire. L'un renferme de l'eau pure, l'autre le révélateur. Mouiller d'abord la pellicule entièrement, puis la plonger dans le bain, la faire passer ensuite, alternativement et à plusieurs reprises, dans le premier vase, puis dans le second, jusqu'à complet développement, fixer ensuite, après lavage à grande eau, dans un bain d'hyposulfite de soude à 15 pour 100, suivant la méthode ordinaire. Voilà pour le Biographe, quant au Bioscope il constitue un petit meuble peu encombrant, susceptible de trouver sa place même dans l'appartement le plus exigu. C'est une boîte percée sur ses deux grandes faces par deux ouvertures circulaires mesurant une dizaine de centimètres de diamètre et telles que leurs axes horizontaux médians sont exactement dans le prolongement l'un de l'autre.

Dans l'une de ces ouvertures, celle qui se trouve sur la face antérieure, c'est-à-dire celle qui sera devant le spectateur quand celui-ci voudra regarder dans l'appareil, est sertie une loupe à fort grossissement; dans la seconde, celle de la face postérieure, est logé un verre dépoli. Il régularise la lumière introduite dans l'appareil et permet d'isoler l'image synthétique des objets environnants.

De même que l'analyse de la vie est faite par la prise d'une


LA CHRONOPHOTOGRAPHIE. 129

succession de vues, de même la synthèse sera reproduite par une succession d'images.

Pour obtenir cette succession, les images, au nombre de trente et représentées par des photocopies diapositives, sont réparties le long du bord d'un disque de verre et sur l'axe de ses rayons.

Ce disque est percé en son centre d'un trou rodé et exactement calibré au diamètre du pivot do l'appareil, lequel est monté horizontalement au centre de l'intérieur de la boîte rectangulaire. Sur ce même pivot et en avant du disque de verre, appelé à être changé suivant les vues que l'on veut regarder, se trouve, à demeure, un disque de tôle noircie, d'un diamètre très légèrement supérieur à celui des disques do verre, et percé, à la presque extrémité de l'un de ses rayons, d'une petite fenêtre, moins large mais aussi haute que les images dont on doit rétablir la synthèse.

Le pivot soutenant ces deux disques est monté sur un système d'engrenage que commande, de l'extérieur de l'appareil, une manivelle placée sur son côté droit. Cette manivelle est actionnée à la main. Dès qu'on la met en mouvement les deux disques tournent, seulement le disque de tôle tourne en sens inverse du disque de verre.

Si donc le spectateur met son oeil contre la loupe du Bioscope et qu'il fasse tourner la manivelle, le passage successif de la fente devant son regard et simultané de la fente devant les images, lui fera voir celle-ci en une image unique et mouvementée, en une image ayant vie.

Comme il y a trente images et que l'impression lumineuse sur notre rétine dure environ un trentième de seconde, on aura la sensation d'un mouvement continu si l'on actionne les disques de façon qu'ils opèrent une révolution complète en une seconde.

Cette rapidité de mouvement et le pou de largeur de la fente du disque de métal exigent un bon éclairage. Le verre dépoli de l'appareil devra donc être tout près d'une fenêtre ou, le soir, tout contre le foyer d'une bonne lampe. Le Bioscope peut même être utilisé pour la projection.

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130 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Dans ce cas, on enlève l'objectif de la lanterne et on l'adapte au lieu et place du verre dépoli, puis on installe la lanterne du côté de l'ouverture dans laquelle la lampe est sertie, de manière que le condensateur de la lanterne soit aussi près que possible de cette ouverture.

On allume la lanterne, on fait le point sur l'écran récepteur et l'on tourne la manivelle. L'amateur se trouve donc en mesure, grâce à ces deux appareils, relativement très simples, de M. G. Demeny, parfaitement en mesure de faire le portrait vivant, et de reproduire, dans leurs mouvements propres, toutes les scènes animées qu'il jugera à propos de prendre.

LA PHOTOGRAPHIE PANORAMIQUE

Le panorama, dont l'étymologie grecque signifie « toute vision », est certainement un des aspects intéressants de la nature et qui séduit le spectateur le moins enclin même aux spéculations artistiques. A proprement parler, dire panorama, c'est comprendre l'ensemble do tous les objets embrassés par l'oeil d'un observateur qui, pivotant sur place, effectue un tour entier sur lui-même.

Le professeur Breysig, de Dantzig, essaya de réaliser par le dessin la représentation de ces vues séductrices. En 1793, à Edimbourg, Robert Baker exécuta le premier tableau de ce genre. Au point de vue du dessin, une telle exécution est le triomphe de la perspective. Elle suppose le spectateur placé au centre d'une sphère d'un rayon quelconque et embrassant d'un seul coup d'oeiltous les objets susceptibles de se projeter sur cette sphère.

Le désert, la mer et le steppe appellent le panorama par les espaces considérables qu'ils embrassent dans tous les sens. Les paysages de montagne le réclament également par leur étendue en largeur et en profondeur. D'autres motifs imposent presque la nécessité de s'en servir, soit par leur heureuse disposition, soit par le maximum d'effet artistique


LA PHOTOGRAPHIE PANORAMIQUE.

131

ou pittoresque qu'ils produisent sous cette vision particulière.

On s'est demandé, non sans juste raison, si la photographie, qui semble propre à tout, ne pouvait donner aussi bien, sinon mieux, que tout autre art graphique, la représentation exacte d'une vue panoramique. Certes elle le peut. Il faut néanmoins pour cela certaines conditions particulières. Ce sont ces conditions que nous allons examiner

aujourd'hui, soit avec une détective à magasin, soit avec une chambre noire de touriste, soit enfin avec un appareil spécial, construit particulièrement en vue des études panoramiques.

Pour la détective je prendrai la photo-jumelle à répétition J. Carpentier. Aussi bien ferai-je, puisque son inventeur a fait à l'Académie des Sciences une communication relative à la possibilité d'obtenir des vues panoramiques avec ce petit instrument. Pour appuyer sa communication, M. J. Carpentier a présenté à la docte assemblée un certain nombre de photocopies sur verre obtenues par agrandissement de phototypes 4,5x6 fournis par le modèle type de ses photo-jumelles.

Ces photocopies provenaient de vues prises dans les Alpes par M. J. Vallot, à qui l'on doit le premier observatoire établi près du sommet du mont Blanc. Leur union en

Chambre brevetée de Jonte dans ses positions extrêmes.


132

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

séries, en dehors de l'intérêt particulier attaché à chacune d'elles, formaient de véritables panoramas.

Comment, avec une simple détective à main, cette condition a-t-elle été réalisée? Simplement par l'adjonction à la photo-jumelle d'un petit support combiné spécialement à cet effet (Voir page 134).

C'est sur un pied photographique quelconque que cet

accessoire s'adapte. Il se compose d'une broche conique, fixée perpendiculairement au centre d'un petit plateau circulaire horizontal de 6 centimètres de diamètre. La couronne extérieure dece plateau porte une douzaine d'encoches équidistantes. Trois vis calantes complètent ce plateau. Grâce à elles, on peut, à l'aide d'un niveau de poche, obtenir très exactement l'horizontalité du plateau et, en même temps, la verticalité absolue de la broche.

Or, j'ai eu occasion de vous le dire, le corps de la photojumelle J. Carpentier est foré pour permettre son adaptation sur un pied. La broche fixe de l'accessoire, pour le panorama, trouve donc là un pivot tout prêt à la recevoir. La broche une fois introduite dans ce forage, la photoVue

photoVue prise avec une chambre noire ordinaire.


LA PHOTOGRAPHIE PANORAMIQUE

133

jumelle se trouve montée sur le pied, sans qu'il soit besoin de l'y fixer autrement. De plus, elle s'en sépare sans le moindre effort, sitôt qu'il s'agit d'opérer le changement de plaque par escamotage.

Il va de soi qu'ainsi monté, l'appareil peut effectuer dans le plan horizontal une révolution complète sur lui-même. En vue de l'obtention d'épreuves destinées au panorama,

l'appareil est, de plus, muni d'un doigt métallique façonné de manière à pénétrer dans les encoches du plateau de support, et permettant ainsi à la photo-jumelle de se placer successivement dans douze orientations distinctes régulièrement distribuées dans un tour d'horizon. Elle peut donc prendre, de la sorte, un panorama complet. Quelques minutes suffisent pour toute l'opération. Cette rapidité de manoeuvre offre un grand avantage : les phototypes pris ainsi présentent une grande homogénéité d'éclairement.

La mise au point des photo-jumelles J. Carpentier, celle des châssis amplificateurs, qui lui sont adjoints, aussi bien que celle de l'amplificateur à bonnettes, à commande automatique et à agrandissements variables, dont je viens de

La même vue panoramique avee la chambre brevetée Joute.


134

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

vous entretenir longuement au chapitre agrandissement, étant faites par des procédés mécaniques, se trouvent être d'une précision rigoureuse et expliquent les quantités de détails que l'on remarque dans les photographies panoramiques obtenues ainsi. Il est bon d'ajouter que les épreuves de M. J.Vallot présentées à l'Académie dés Sciences avaient été obtenues sur plaques orthochromaùques, et un écran

translucide, jaune foncé, obligeant de multiplier la pose par le coefficient 15. Au demeurant et pour des raisons que j'ai souvent données ici même, on ne devrait jamais tenter la vue panoramique, quel que soit l'appareil employé, qu'avec un écran jaune.

Le cas de la photo-jumelle J. Carpentier appliqué à l'obtention des vues panoramiques a cela de très particulier que l'appareil ne charge pas l'ascensionniste d'une façon appréciable et qu'il peut, par l'agrandissement, arriver aisément à des épreuves de 24x30, grandeur de celles de M. J. Vallot présentées à l'Académie.

Avec l'appareil courant du touriste, qui est le 13x18, peut-on faire des vues panoramiques ?

Support de photo-jumelle pour la prise des vues panoramiques.


LA PHOTOGRAPHIE PANORAMIQUE. 135

Oui, très approximativement, si l'appareil offre certaines particularités de construction. Mais hélas! les constructeurs, en général, ne se préoccupent guère de ce côté de la question photographique quand ils fabriquent une chambre noire 13 X 18 ! Cependant la chambre dont je me sers, qui n'est point nouvelle, mais qui tient toujours son rang dans le commerce, présente ces particularités dont je viens de parler. Je la prendrai donc comme type. C'est la chambre brevetée de Jonte.

A un moment donné les appareils de papa Jonte, comme on le nommait amicalement, mais un peu irrévérencieusement, constituaient les meilleures chambres qui fussent en France. Leur réputation avait passé la frontière et était devenue quasi universelle. Ce n'était que justice. Je peux même dire ce n'est, car elles n'ont point démérité dans les mains du successeur de papa Jonte. Au contraire, elles ont été agrémentées de perfectionnements nouveaux qui les rendent impeccables.

La chambre brevetée se recommande tout d'abord par un fonctionnement d'une précision absolue ; ensuite par des dispositifs qui lui permettent d'obtenir des images conformes aux lois de la perspective. Cela dans les cas même les plus compliqués.

Ainsi, avons-nous à photographier un monument d'une grande hauteur, tout en manquant de recul et sans avoir à notre disposition un moyen d'élévation quelconque? Nous pouvons, tout en maintenant la chambre brevetée parfaitement de niveau, et par conséquent la glace dépolie dans une position rigoureusement verticale, nous pouvons élever la planchette portant l'objectif et l'incliner légèrement en arrière, non seulement de façon à avoir toute l'image, mais encore à conserver le parallélisme des lignes verticales, tel que l'oeil le conçoit. Le maximum de la course et de l'inclinaison de cette planchette assure, pour tous les besoins, ces conditions essentielles.

Au lieu d'une vue en hauteur, nous trouvons-nous en présence d'une vue en profondeur? Soit, par exemple, que


136

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

nous nous trouvions sur une colline et que nous voulions prendre un village en contre-bas. Nous baisserons alors la planchette, porte-objectif et nous l'inclinerons en avant, cette fois, la chambre noire restant toujours de niveau et la

glace dépolie bien perpendiculaire au sol. Comme dans le cas précédent, les verticales resteront bien parallèles.

Le parallélisme des horizontales est tout au moins aussi nécessaire à assurer que le parallélisme des verticales. La

chambre brevetée prévoit le cas. Mais, cette fois, ce n'est plus à la mobilité de l'avant qu'on demande le parallélisme, mais bien à la mobilité de l'arrière. Pour y atteindre, l'arrière de la chambre brevetée Jonte est monté sur un excentrique dépendant du chariot, mais laissant pleine indépendance à cet arrière. Il en résulte que la glace dépolie, tout en demeurant dans un plan rigoureusement perpendicuCh&ssis

perpendicuCh&ssis du cylindrographe.

Introduction de la pellicule dans le châssis du cylindrographe.


LA PHOTOGRAPHIE PANORAMIQUE.

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laire au sol, peut se mouvoir de droite ou de gauche sur son axe vertical, permettant ainsi d'obtenir des vues partielles jusqu'à 45° à droite et à gauche (Voir page 131).

Ainsi donc par le parallélisme gardé aux verticales et nlus encore par celui conservé aux horizontales, nous pouvons, avec cette chambre noire 13 X18 de l'amateur, établir des vues panoramiques par la juxtaposition d'épreuves séparées se raccordant parfaitement et sans que les lignes

horizontales décèlent la plus petite trace de fuite vers le point de vue. Au raccordement elles se présenteront chacune très exactement dans le prolongement l'une de l'autre sans trahir la moindre brisure au raccord. Trahison qui aurait fatalement lieu avec toute chambre noire ne présentant pas ces dispositifs.

Les dessins que nous en donnons, pages 132 et 133, gravés d'après des photocopies, en sont une preuve évidente.

11 existe encore, dans la chambre brevetée Jonte, un repérage intéressant et pouvant rendre des services dans le cas qui nous occupe. C'est celui fourni par les échelles graduées du chariot. Ces échelles permettent, en effet, une mise au point immédiate, à une longueur déterminée, comme

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Le Cylindrographe Moëssard.


138 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

celle que donne le calcul, ou la connaissance de la distance focale de l'objectif employé.

En dehors de ces appareils, pour ainsi dire d'un emploi courant, par les amateurs, il existe des chambres noires spéciales pour ceux dont les travaux tendent surtout à obtenir des vues panoramiques.

Le type de ces appareils est le Cylindrographe du lieutenant-colonel du génie Moëssard. On obtient avec lui des photographies panoramiques beaucoup plus complètes et beaucoup plus scientifiquement exactes.

Son nom indique que son inventeur, en la construisant, a fait appel à la perspective cylindrique, qui d'ailleurs fut la première employée à la reproduction du panorama. Dès 1845, Arago présentait, en effet, à l'Académie des Sciences, un appareil panoramique inventé par M. Martens, dans lequel un objectif, tournant autour d'un axe vertical, venait projeter l'image sur une plaque daguerrienne de forme cylindrique. L'emploi des plaques au collodion amena des transformations dans ce premier appareil, jusqu'à lui faire recevoir l'image sur une surface plane, au lieu d'une surface courbe. On chercha bien, mais sans résultats très appréciables, à remplacer la glace collodionnée, par une surface sensible souple, telle que papier ou toile. En cela, comme en beaucoup d'autres points de la photographie, il était dû au gélatino-bromure d'argent de remettre la question à l'ordre du jour et de la résoudre.

C'est ainsi que M. Damoizeau, employant la pellicule au gélatino-bromure d'argent, fit construire un appareil dans lequel la pellicule, portée sur deux rouleaux solidaires, se transporte d'un rouleau sur l'autre, en même temps que l'appareil tourne sur lui-même. Le tout est actionné par un mouvement d'horlogerie à vitesse variable et réglé de telle sorte que l'image paraît immobile sur la pellicule. En une seule opération, avec un appareil léger et de petit volume, on obtient ainsi tout un panorama complet de quelque étendue qu'il soit. Malheureusement tous les appareils à


LA PHOTOGRAPHIE PANORAMIQUE. 139

double mouvement présentent toujours une grande délicatesse d'emploi.

Il était donné au lieutenant-colonel du génie Moëssard d'atteindre le but beaucoup plus victorieusement. C'est en 1883 que cet officier distingué eut l'heureuse idée d'utiliser la propriété qu'ont les points nodaux d'un objectif quelconque d'être le point de concours de deux portions de chaque axe optique secondaire, allant l'un vers l'objet, l'autre vers l'image. Il est évident que, si l'on prend un objectif exempt de distorsion et qu'on lui donne toutes les positions possibles en maintenant immobile son pointnodal d'émergence, l'image restera également immobile, puisque sa position sur l'écran ne dépend que de ce point nodal et de la direction de l'axe secondaire reliant le point nodal d'incidence à l'objet, direction toujours invariable.

C'est en s'appuyant sur ce principe que le lieutenantcolonel du génie Moëssard a fait construire son Cylindrographe, c'est-à-dire une chambre noire photographique qui, mise en station en un point, donne l'image de tous les objets situés dans un secteur de 170", de telle sorte que le panorama complet vu du point de station n'exige que deux épreuves égales et une fraction de 20° de champ environ.

Le système visuel du Cylindrographe se compose d'un objectif tournant, dans un plan horizontal, autour d'un axe de rotation vertical, choisi de telle sorte que le point nodal d'émergence de l'objectif reste immobile. La chambre noire se compose essentiellement de deux demi-cercles de bois, égaux et horizontaux, l'un dit le plancher, l'autre dit le plafond et réunis, sur leur diamètre, par un cadre également de bois. Pour le transport, ces trois pièces, assemblées à charnières, se replient facilement l'une sur l'autre. Le tout se monte sur un pied de campagne. Une tringle de laiton réunissant, à l'arrière, le plancher et le plafond, assure la solidité de l'ensemble.

Quant aux images sur lesquelles l'objectif est successivement dirigé, elles se forment sur un cylindre vertical,


140 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

dont l'axe de figure coïncide avec l'axe de rotation et dont le rayon est égalàla distance focale principale de l'objectif employé. La pellicule sensible constitue la paroi intense de ce cylindre et se trouve maintenue dans un châssis flexible en celluloïd qui prend, à volonté, la forme plane pour le transport, ou la forme cylindrique pour la pose. Un jeu de diaphragmes, de formes variables, plaçables dans le parasoleil de l'objectif, permet de faire varier la pose suivant les plans en vue et la disposition du motif à prendre.

Ainsi établi, le Cylindrographe Moëssard se prête à toutes les combinaisons possibles. En utilisant toute la pellicule, on peut, d'un seul coup, obtenir à 10° près le demi-panorama. Veut-on n'utiliser que des portions de pellicule, il est loisible de recueillir jusqu'à quarante-deux portraits ou vues de détails différentes sur le même phototype. Par une simple question de manoeuvre, la pose étant variable à volonté, l'opérateur peut, suivant la qualité de l'éclairement, attribuer des temps de pose différents à diverses parties du paysage. C'est un voile noir opaque, fait d'une double étoffe caoutchoutée, qui intercepte le jour entre la pellicule et l'objectif, sans gêner, en rien, le mouvement de ce dernier.

Le réglage du Cylindrographe Moëssard s'obtient en amenant le point nodal d'émergence de l'objectif sur l'axe de rotation. Ce déplacement de l'objectif est facilité par quatre vis de réglage, sur le carré desquelles on agit avec une clef spéciale. Le réglage fait, demeure, sauf accidents, pour ainsi dire immuable. Les dimensions de la vue panoramique, en largeur ou en hauteur, sont données soit à l'aide d'un viseur, soit à l'aide du verre dépoli sur lequel on reçoit l'image pour la mise au point.

Quant aux images obtenues, il est bon de remarquer qu'étant formées sur un cylindre, elles doivent, d'après les lois de la perspective, et par conséquent pour donner tout leur effet, être regardées sur un cylindre de même rayon, l'oeil étant placé sur l'axe. Résultat facile à réaliser, au demeurant, avec des épreuves qui ont, au moins, 30 cen-


LA PHOTOGRAPHIE PANORAMIQUE. 141

timètres de foyer, c'est-à-dire la distance moyenne de la vision distincte. Il est néanmoins, sans grand inconvénient, possible do conserver, aux photographies panoramiques, la forme plane dos photographies ordinaires. Si, théoriquement, ce développement sur plan transforme en sinusoïdes toutes les lignes droites de la vue, autres que les verticales et la ligne d'horizon, pratiquement ces effets deviennent à peine sensibles, à moins que l'opérateur n'ait commis l'imprudence de comprendre dans son tableau de très longues lignes droites fort rapprochées du point de vue. En revanche, une vue panoramique regardée à plat procure une impression d'étendue fort supérieure à la même vue obtenue directement sur une surface plane. D'abord l'angle d'ouverture peut aller jusqu'à 170°, ensuite la loi fondamentale de la perspective qui proportionne la grandeur des objets à leur rapprochement est exactement observée. Enfin l'extension de la paroi cylindrique sur le plan tangent fait fuir encore plus les ailes de l'image et les agrandit.

Il est juste d'ajouter que le Cylindrographe Moëssard, en dehors de son application spéciale aux vues panoramiques, se prête à tous les travaux, en général, du photographe touriste : vues limitées, groupes, portraits, quelle que soit sa dimension, il est en général toujours transportable pour le touriste. Toutefois celui qui présente de 10 à 20 centimètres de rayon constitue un appareil peu encombrant et toujours assez léger pour le voyage. Avec 10 centimètres de rayon on obtient une épreuve longue de 28 centimètres, haute de 8 centimètres et donnant un panorama complet de 63 centimètres de développement. Pour 15 centimètres de rayon on a 42 centimètres de longueur, 12 centimètres de hauteur, 94 centimètres de développement complet du panorama. Enfin, 20 centimètres de rayon nous donnent des épreuves de 56 centimètres de longueur, de 16 centimètres de hauteur et de 1 m. 25 de développement complet de panorama.

Ce dernier cas correspond, à peu près au format 13x 18


142 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

ordinaire, le plus souvent employé par le touriste et l'amateur, et vous voyez que les vues panoramiques obtenues avec lui ont déjà des dimensions d'un réel intérêt.

CHROMOPHOTOGRAPHIE

Dans VAnnuaire du Photographie Times, M. Léon Vidal, au sujet de la photographie des couleurs par la méthode interférentielle de M. Lippmann, a publié un article qui, bien que purement suggestif, vaut la peine qu'on s'y arrête. Peut-être se trouve-t-il vraiment là une méthode pratique.

D'après le système émis par notre excellent confrère, le procédé Lippmann deviendrait dorénavant un moyen de tirage et de multiplication des images polychromes. En effet, pour retrouver les couleurs et reproduire l'image telle qu'elle nous apparaît dans la nature, on se contenterait de procéder par voie de reconstitution en projetant un chromogramme sur l'écran.

L'obtention de ce chromogramme devra se faire par la méthode photochromographique de M. Louis Ducos du Hauron, déjà, ancienne, mais continuellement perfectionnée et perfectionnable, par les progrès de l'orthochromatisation des plaques. Il se composera donc de trois photocopies diapositives éclairées par trois milieux colorés convenables, projetés sur un écran, de façon à reconstituer l'image en couleurs telle qu'elle se trouve dans la nature. La. reproduction de cette projection polychrome mettrait l'expérimentateur dans des conditions identiques à celles où l'on se trouve en photographiant le spectre par la méthode Lippmann.

Dans ce mode de procéder, les trois épreuves originaires, fournissant à elles seules la sélection des couleurs, mériteraient un soin tout spécial. On comprend, de reste, que plus cette sélection serait complète, plus la reproduction finale serait parfaite.

Le dispositif convenable est facile à imaginer. L'éclairage


CHROMOPHOTOGRAPHIE. 143

électrique nous permet d'opérer sans avoir à compter avec les radiations plus ou moins jaunâtres des diverses autres sources de lumière artificielle.

Certes ce n'est pas, à proprement parler, un procédé direct de reproduction des couleurs, mais le résultat n'en sera pas moins obtenu directement d'après un sujet polychrome. De plus, on pourra ainsi imprimer successivement un nombre plus ou moins grand d'images en couleurs d'un même sujet, et cela à telle échelle déterminée que l'on voudra.

Très suggestive, n'est-ce pas, cette idée? Au demeurant, elle ne nous semble pas d'une application impossible et se montre, pour le moment du moins, comme un moyen de rendre utilisable la méthode interférentielle de M. Lippmann.

De fait, si la découverte de M. Lippmann est absolument merveilleuse et d'une rigueur scientifique indiscutable, on ne peut nier cependant qu'elle ne parvient pour ainsi dire pas à entrer dans la pratique. C'est qu'il y a, dans ce procédé, des plaques à préparer et, qui plus est, des plaques émulsionnées dans des conditions spéciales et orthochromatisées. Difficulté grande pour un praticien émerite; difficulté quasi insurmontable pour un amateur.

Au demeurant, s'il nous est permis d'émettre ici notre opinion personnelle, nous ne croyons pas que la pratique de la photographie des couleurs nous sera donnée avec la méthode interférentielle de Lippmann. Il y aura, il y a certainement autre chose.

C'est sous la conviction d'une idée analogue, sinon identique, que M. Otto Wiener vient de reprendre l'examen critique de toutes les expériences qui ont été tentées sur l'obtention de la couleur en photographie. Les travaux d'Edmond Becquerel, Zenker, Seebeck, Poitevin, Lippmann, etc. ont été passés en revue par lui. Avec la logique claire, simple et convaincante qui caractérise toujours l'exposé de ses expériences, M. Otto "Wiener arrive à conclure qu'il existe en réalité deux espèces de photographie des


144

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

couleurs : celle où les couleurs de l'épreuve sont des couleurs & interférence, par conséquent des couleurs non réelles mais d'apparence, et celle où les couleurs de l'épreuve sont

des couleurs à'abso?*ption, et par conséquent de véritables couleurs réelles absolument propres au corps qui a subi l'action lumineuse.

La Revue générale des sciences pures et appliquées a donné, sous la signature de M. Bernard Brunhes, un excelLantcrne

excelLantcrne projection pour la reconstitution des couleurs.


CHROMOPHOTOGRAPHIE.

14îi

lent extrait du travail très complet de M. Otto Wiener. C'est tout un monde d'idées ouvert non seulement aux amateurs de photographie, mais encore aux physiciens, aux chimistes et aux physiologistes.

Le mémoire complet de M. Otto Wiener, publié dans les

Annales de Wiedelmann, porte pour titre : « Photographie des couleurs propres aux corps et mécanisme de l'adaptation à la couleur de la nature. »

Pour ce savant, la couche sensible qu'il faudrait employer pour avoir photographiquement les couleurs réelles, et non d'apparence, par conséquent visibles sous toutes les incidences, serait une substance noire absorbante, composée

19

Épreuve obtenue au travers d'un écran rouge.


146 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

elle-même de diverses substances absorbantes et absorbant chacune toutes les couleurs, sauf une couleur donnée et impressionnée par les couleurs qu'elle absorbe. En conséquence, il en faudrait au moins trois, correspondant à trois couleurs simples, suffisamment différentes pour pouvoir, par leurs combinaisons, redonner du blanc.

Nous rappellerons, pour nos lecteur-; qui aiment à faire autre chose que de la photographie courante, ou qui désirent pousser leurs investigations dans cette voie pleine d'attraits, nous rappellerons, disons-nous, une des plus anciennes expériences de ce genre, celle de Poitevin.

Poitevin prenait du papier, non collé, et l'immergeait durant deux minutes dans une solution de sel marin à 10 pour 100, puis une minute dans une solution d'azotate d'argent à 8 pour 100. Après un lavage rapide, la feuille ainsi préparée était alors plongée dans une solution de chlorure de zinc à 5 pour 100, puis portée et maintenue à la lumière diffuse du jour, jusqu'à ce que la couche impressionnée devînt foncée, dans une certaine mesure cependant. Elle était alors retirée du bain et baignée dans un mélange formé d'une solution concentrée de bichromate de potasse pour deux parties d'une solution également concentrée do sulfate de cuivre. On la prenait alors, pour la faire sécher, entre deux doubles de papier à filtrer. Avant dessiccation complète, ou alors légèrement humectée, on l'insolait sous un vitrail colorié. Les couleurs s'imprimaient par simple exposition et sans développement. Malheureusement, Poitevin et ceux qui l'ont imité ne sont pas parvenus à fixer ces couleurs. A force de les regarder à la lumière blanche, elles disparaissent petit à petit.

M. E. Vallot, se basant sur ces indications, vient de réaliser l'obtention d'une couche chromosensible, d'un autre genre que celle de Poitevin et donnant la photographie des couleurs. C'est une vérificfition, par expérience, des idées nouvellement émises par M. Otto Wiener.


CHROMOPHOTOGRAPHIE. 147

M. E. Vallot prépare les trois solutions suivantes :

A. Alcool Î30 cm 3.

Pourpre d'aniline 0 jçr. 2.

Iî. Alcool 50 cm'.

Iileu Victoria 0 f,'r. 2.

C. Alcool KO cm 3.

Curcuma 10 grammes.

On mélange ensemble ces trois solutions, et l'on fait flotter le papier sur ce mélange. Ainsi préparé, il ressemble, à s'y méprendre, à celui préparé au sous-chlorure d'argent violet par le procédé Poitevin que je viens de vous indiquer, au moins quant à la teinte. Quand ce papier est sec, on l'insole pendant trois ou quatre jours sous un écran coloré, un vitrail. A la sortie du châssis-presse, l'épreuve est terminée sans autres opérations.

De l'avis même de M. E. Vallot, le curcuma n'est pas encore le véritable jaune qu'il faudrait employer. Le curcuma est généralement détruit par la lumière plus rapidement que le pourpre d'aniline et que le bleu victoria.

Les images sont plus belles par transparence que par réflexion et, sans être fixes, le sont cependant assez pour être examinées sans danger à la lumière diffuse.

Le fixage est le point à chercher, de ces procédés et des autres, que je garde en réserve et que je vous indiquerai ultérieurement, pour vous permettre de vous distraire, ou de tenter des essais dans cette voie intéressante, et qui certes n'a pas dit son dernier mot, malgré la difficulté de fixage que je signale.

Pour l'instant, la réalisation qui se montre encore la plus pratique est la reconstitution dont je parle au début de ce chapitre. Revenons-y donc, pour en enregistrer les perfectionnements.

Vous savez que l'Héliochromoscope de M. Frédéric lves, de Philadelphie 1, permet de réaliser ce phénomène de la reconstitution des couleurs, en fondant en une seule image

Voir : Les Nouveautés photographiques année 1893, page 125 et année 1894, page 252.


148

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

les trois épreuves en couleurs différentes. M. B. D. Gray, opticien américain, a récemment perfectionné la méthode optique permettant cette reproduction par projection, donnée en France par M. Léon Vidal.

Pour la reproduction des sujets en couleur, la méthode

habituelle consiste à prendre d'abord, à la chambre noire, avec un écran rouge et sur plaque orthochromatique, une image de laquelle sont exclues toutes les radiations rouges du sujet embrassé par l'objectif. Cette première épreuve est celle qui exige la plus grande durée d'exposition. Ainsi, par exemple, en se servant d'un diaphragme F/8, elle demandera pour le moins une pose de trois minutes.

Épreuve obtenue au travers d'un écran vert.


CH ROMOP II OTOG RAPINE.

149

La chambre noire étant rigoureusement maintenue dans la même position, on prend un second phototype dans lequel aucune autre couleur, si ce n'est le vert seul de l'objet, ne sera reproduite.

Puis, dans les mômes conditions de maintien de la chambre

noire on tire un troisième phototype, à la façon normale, sans écran coloré, avec la lumière blanche, en un mot, ou encore avec un écran bleu. Ce dernier phototype représente toutes les valeurs des radiations bleues et blanches réfléchies par l'original.

Une fois ces trois phototypes obtenus, en tirer des épreuves pour la projection n'est plus qu'une question de photographie courante.

Épreuve obtenue au travers d'un écran bleu.


FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE

loO LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES..

La lanterne pour la reconstitution des couleurs naturelles par la projection est formée d'un ensemble de trois objectifs et de trois condenseurs. En avant de l'un d'eux on place un verre bleu, en avant d'un autre un verre rouge, et enfin un verre vert en avant du troisième. Trois lumières calciques ou trois arcs électriques éclairent ces trois systèmes optiques.

La méthode, très ingénieuse et très pratique de M. B. D. Gray, consiste à employer un léger cadre de bois divisé en quatre compartiments, qui doit servir pour l'application des plaques, et en même temps pour supporter les épreuves de projection. Les photocopies diapositives se trouvent donc disposées dans l'emplacement même où les phototypes négatifs ont été pris (Voir page 144).

La grande difficulté dans les projections de ce genre consiste dans l'obtention d'un repérage exact des trois images. M. Gray y arrive d'une façon fort élégante. Pour cela, il place et fixe dans l'un des quatre compartiments de son châssis une photocopie et met le tout à la lanterne. Dans la deuxième division du cadre, il introduit et assujettit une seconde photocopie. Une personne se tient à la lanterne et une autre à l'écran récepteur. La première fait marcher la crémaillère de la lanterne jusqu'à ce que la personne qui est près de l'écran constate la coïncidence parfaite des deux images. La troisième photocopie est introduite dans le châssis-cadre, et son image est repérée sur l'écran de la même façon. On enlève alors le tout de la lanterne, et les photocopies sont définitivement et immuablement fixées dans la position qu'elles occupent sur le cadre. Le châssiscadre se trouve donc ainsi prêt à servir et toutes les images qui viendront successivement prendre place dans les cadres coïncideront parfaitement et tout d'un coup sur l'écran.

Avec ce système, les positions des images correspondent aux écrans colorés à travers lesquels l'original a été reproduit.


DEUXIÈME PARTIE ART ET NATURE

LE FORMAT DES PHOTOCOPIES

Quel que soit l'appareil que nous employions, nos images se trouvent toujours dans un format fixe et prévu. Il va de soi, en effet, qu'on ne peut construire, ni surtout que l'amateur, même le plus fortuné, ne pourrait posséder des chambres noires pour chaque motif qu'il veut prendre. Or cette question do format, au point de vue artistique de l'image, garde une importance primordiale et qui est outrageusement méconnue. Les peintres, lorsqu'ils ont un tableau à faire, commandent leurs toiles dans les dimensions qu'ils jugent être au mieux de l'ensemble esthétique do l'oeuvre qu'ils rêvent de produire. Nous ne pouvons pas agir de la sorte. Mais il y a moyen d'y remédier. Envisageons donc un instant cette question du format photographique si méconnue et pourtant qui vaut qu'on la. compte.

Pour limiter leur construction à des appareils marchands, et en cela ils ont bien fait, les fabricants ont adopté des formats fixes, réglés par des multiples ou des sousmultiples de la plaque dite normale, parce qu'elle est celle généralement couverte par l'objectif présentant 0°,30 de distance focale, c'est-à-dire la longueur considérée comme étant celle de la vision normale, et par conséquent donnant à l'image la tenue réglementaire d'une bonne perspective. Cette plaque normale est 18 X 24. Pour augmenter encore le nombre des formats, ils ont construit les chambres noires propres à prendre l'image, de telle sorte que ses lignes ver-


lo2 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

ticales soient, à volonté, perpendiculaires au petit côté ou au grand côté.

Malgré cela il s'en faut de beaucoup que tous les motifs soient au mieux dans ces limites. Vous ne me demanderez aucune explication si je vous affirme qu'un même corset ne saurait aller à toutes les femmes. Pourquoi voulez-vous alors que tous les sujets se prêtent aux mêmes dimensions? C'est cependant ce que l'on fait à chaque instant, en tirant à plein des photocopies positives d'un phototype d'un format déterminé par la chambre noire que l'on possède, et en se croyant obligé de rogner le moins possible cette photocopie. Je connais des adeptes de la chambre noire qui vont même jusqu'à laisser sur l'image finale les marques des taquets soutenant la plaque dans les châssis plutôt que de la rogner de quelques millimètres de plus. On dirait que d'enlever une bandelette de papier leur fait plus de mal que d'enlever à eux-mêmes un lambeau de chair!

Que diable ! si pour la prise du phototype négatif nous sommes limités à des formats fixes, pourquoi donc nous astreindre à les garder si notre motif gagne à être vu sous d'autres dimensions?... Ah ! je sais... on va m'objecter les cartons. Ceux-ci se font également sur des dimensions déterminées avec des filets, des grecques, des biseaux,., que sais-je encore?... Eh bien ! pourquoi vous servir de ces cartons dont le moindre défaut, d'ailleurs, est une écoeurante banalité. Collez votre épreuve sur un carton de dimensions plus grandes et que vous rognerez ensuite à la demande. Ou bien montez-lez, à plein, sur les pages d'un album auxquelles vous demanderez seulement d'excéder les dimensions maxima des formats que vous employez d'ordinaire. C'est vraiment d'une simplicité enfantine.

Pour les marines, par exemple, les peintres se gardent bien d'employer un format carré. Ils prennent, au contraire, un format très allongé dans le sens de la mer. Pour les motifs en hauteur, c'est l'inverse. Donc, quand vous tirez une photocopie d'une plaque d'un format photographique quelconque, prenez quatre bandes de carton


CE QUE DOIT ÊTRE L'ART PHOTOGRAPHIQUE. -K53

blanc et appliquez-les sur les quatre côtés de l'image, en faisant varier leur écartement jusqu'à ce qu'elles arrivent à former un cadre donnant le maximum de pondération à l'image. Fichez une épingle aux quatre angles de ce cadre et rognez sans hésiter votre épreuve en passant par ces quatre repères. Ne vous inquiétez pas s'il y a un ou plusieurs centimètres de sacrifiés. Ne songez qu'à une chose : l'art se fait de sacrifices, et, sans sacrifices, il n'y a pas d'art possible.

CE QUE DOIT ETRE L'ART PHOTOGRAPHIQUE

Le succès des tentatives du Photo-Club de Paris a prouvé surabondamment la possibilité de l'Art, photographique. Plus n'est besoin, aujourd'hui, de le soumettre aux célèbres doutances d'IIamlet.

L'Art photographique est.

Ce que nous on avons vu dans les expositions organisées par le Photo-Club de Paris nous montre même que l'Art photographique aura tous les rameaux que peut donner un arbre jeune, vigoureux, plein de sève.

Mais si l'Art photographique est, que doit être l'Art photographique ?

Voilà certes une question qui a dû boucler son point d'interrogation devant l'esprit de bien des gens.

On ne se demande point ce que doivent être les autres arts. Ils poussent, fleurissent et s'affruitent depuis bon nombre de siècles. Consciemment ou inconsciemment, suivant les aptitudes sensorielles et l'éducation artistique de chacun, on se rend compte, peu ou prou, do ce que peut nous donner la peinture, la sculpture, la gravure, la poésie et la musique. Le profane, lui-même, sent, plus ou moins, mais instinctivement, par une sorte de science infuse, ce qu'il est en droit d'exiger de chacun de ces arts. C'est qu'il y a dans tout esprit — si je puis m'exprimer ainsi sans une trop forte prétention — une sorte d'endosmose

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!o4 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

psychique des règles esthétiques, vulgarisées de siècle en siècle et mélangées à l'atmosphère vivifiante dans laquelle éclosent, se meuvent et pensent les nations civilisées.

Rien de tout cela n'existe pour l'Art photographique. Né d'hier, son esthétique est peu connue et encore moins affirmée. Sa vulgarisation n'a pas eu le temps de se propager : partant, l'endosmose psychique n'a pu avoir lieu. De là, l'air désorienté de beaucoup en présence d'une manifestation d'Art photographique. Désorientaion qui n'a rien de déshonorant. Elle demeure tout à fait naturelle et parfaitement compréhensible. Il ne saurait en être autrement.

Toutefois, par cela même qu'elle existe, il serait bon de voir, de chercher et d'établir, sommairement, dans ses grandes lignes au moins, ce que doit être l'Art photographique. J'y vais tâcher.

Tout d'abord l'Art photographique doit rester bien nettement photographique.

Ce n'est même qu'à cette condition absolue qu'il doit être admis comme art. Toute oeuvre cherchant à amener une confusion demeure bâtarde et rejetable. On ne doit point, devant un morceau d'Art photographique, se complaire à trouver qu'il imite, plus ou moins bien, un fusain, ou un crayon, ou un lavis, ou une aquatinte. 11 faut qu'il soit et reste une photographie, c'est-à-dire une chose qu'on ne saurait visiblement obtenir que par des moyens purement photographiques. Si même ces moyens, employés seuls, conduisent à la confusion, il est sage de ne point s'en servir.

Or, quelle est la caractéristique de la photographie? Une définition complète, exacte, minutieuse même, de tous les objets. Définition que ne saurait atteindre n'importe quel autre art graphique, dût-on lui adjoindre la patience proverbiale d'un bénédictin du moyen âge. Il faut donc que l'Art photographique, sous peine de ne plus être photographique, garde cette définition.


CE QUE DOIT ÊTRE L'ART PHOTOGRAPHIQUE. loi}

Doit-il la garder avec son absolutisme originel? Non, vraiment. L'oeuvre photographique aurait alors trop de minutie et trop de sécheresse, deux qualités-défauts incompatibles avec l'Art. Elle présenterait, poussée à l'extrême, cette absence d'art par trop de détails que les peintres nomment pignochage. C'est, entre autres raisons, parce que ceux qui ont cultivé la photographie dès son éclosion ont trop tardé à comprendre cette vérité, que les meilleurs esprits se sont refusé à reconnaître, dans l'oeuvre photographique, les germes d'un art nouveau. Aujourd'hui on l'a compris. De cette compréhension est né spontanément l'Art photographique. Il y a eu, il y a une révolution. Comme dans toute révolution les révoltés ont visé à l'extrême, par antithèse de réaction. Or les extrêmes n'ont jamais rien valu. Quelquefois le génie les a fait tolérer sinon admettre. Mais le génie est rare et se présente lui-même comme une exception.

Dans certains pays étrangers, où l'Art photographique a fleuri beaucoup plus tôt qu'en France, il s'est formé deux écoles : les jlouisles et les nellisles.

Les premiers ne veulent rien de net dans leurs u;uvres, exigent d'elles un vague insensé dans les lignes, dans les formes ot dans les masses. Ce ne saurait être l'Art photographique, puisque c'est la négation de la caractéristique de la photographie. Ces fanatiques sont même allés jusqu'à répudier l'objectif. Mais l'objectif, c'est l'oeil de la chambre noire! Remplacer un bon oeil par un mauvais, n'est-ce pas de gaieté do coeur diminuer ses ressources et faire du progrès à reculons.

Sans objectif, la photographie n'est plus la photographie, parce qu'elle perd cette définition exacte des choses qui la caractérise.

Les nettistes ont tenu ce raisonnement et ils ont voulu des oeuvres minutieusement détaillées dans toutes leurs parties, aussi bien dans les premiers plans que dans les plus éloignés. Ils ne s'aperçoivent point de la sécheresse ni de la platitude qu'ils donnent ainsi à leurs images. Ils ne sen-


Iû6 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

tent point qu'ils aggravent ainsi tous les défauts de la photographie qui, eux aussi encore, ont fait qu'on a nié jusqu'à ce jour son essence artistique.

L'Art photographique réside dans des images exactes sans sécheresse, détaillées sans minutie.

On y atteint, au plus court et au mieux, en faisant de petites épreuves aussi nettes que possible et en les agrandissant pour avoir l'oeuvre finale. N'est-ce pas, au demeurant, un excellent moyen de concilier les deux écoles? Prendre un peu à chaque extrême et mélanger le tout : voilà le secret culinaire des institutions bonnes et durables.

Au surplus, voyez comme tout s'arrange ! Si la photographie est faite avec un objectif possédant un foyer inférieur à la distance de la vision normale, et un angle supérieur à celui de l'oeil humain, elle ne nous représente plus les objets d'après les règles de perspective qui ont été établies. Encore un défaut qui a valu à la photographie le haro de tous les amis des Arts. Or si, dans le cas d'un objectif à court foyer, l'artiste agrandit l'image obtenue dans des dimensions qu'un calcul facile lui détermine, il rétablit la perspective exacte des objets, récupère tout l'enveloppement atmosphérique de la nature. Les lignes, au lieu d'être formées par des traits secs et mesquins, deviennent larges et grasses, les masses s'estompent et l'image, tout en restant nettement photographique, gagne en profondeur, en relief, en harmonie. On n'a donc plus à compter que sur l'erreur d'angle, avec laquelle d'ailleurs le véritable artiste n'a aucune maille à partir, parce que, pour l'obtention de l'image primitive, son goût et sa raison lui ont conseillé de n'employer qu'un objectif dont l'angle se rapproche le plus de celui de l'oeil humain.

Par conséquent on atteindra à l'Art photographique, au plus court et au mieux, en faisant de petites épreuves aussi nettes que possible et, je le répète, en les agrandissant, pour avoir l'oeuvre finale, dans des dimensions minima qu'un calcul facile détermine et qui, en rétablissant la perspective


CE QUE DOIT ÊTRE L'ART PHOTOGRAPHIQUE. IÎ37

exacte des objets, récupère tout l'enveloppement atmosphérique de la nature.

Ce dernier point, très typique, est loin d'être donné par l'épreuve directe. La comparaison se montre aisée. Faites-la. En ce qui est du rétablissement de la perspective exacte, je ne veux pas dire que l'image de la petite épreuve soit déformée et que l'agrandissement corrige, jusqu'à l'annihiler, cette déformation. Au demeurant, l'image photographique ne saurait être déformée dès qu'on emploie de bons appareils et qu'on a surtout soin de mettre entre l'objectif et le sujet une distance égale à trois fois, deux fois et demi au moins la hauteur de co sujet.

Lorsqu'elle a été obtenue dans ces conditions et avec un bon objectif, bien corrigé, l'imago de la petite épreuve se montre parfaitement en perspective, mais en perspective par rapport à l'oeil qui l'a vue et prise, c'est-à-dire par rapport à la distance focale de l'objectif employé. Donc, si cette distance focale, ce qui est le cas pour tous les petits appareils, reste inférieure à la distance de la vision normale, la petite épreuve ne se trouve plus pour nous exactement en perspective, à moins que nous puissions la contempler et la bien lire d'une distance égale à la distance focale de l'objectif qui l'a donnée. Or, en général, cette distance est de 10 à il centimètres. Donc, à moins d'être d'une myopie fâcheuse, la petite épreuve ne nous semble pas en perspective exacte. Il faut donc, au minimum, la rétablir telle que si elle avait été prise avec un objectif de distance focale égale à la distance de la vision normale.

De combien, toujours au minimum, devrons-nous agrandir l'épreuve primaire pour rétablir la perspective exacte? Pour la facilité de la démonstration, supposons que nous ayons employé une détective à visée à hauteur de l'oeil, possédant un objectif d'ouverture d'angle sensiblement égale à celle de l'angle de l'oeil humain. Si nous considérons alors l'image primaire telle qu'elle est, séparée de notre oeil de la distance focale de l'objectif, et telle qu'elle


T68 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

devrait être, si elle était séparée de notre oeil de la distance normale, nous pourrons construire deux triangles rectangles semblables dont les rapports nous amèneront à la formule :

dans laquelle c représente le coefficient d'amplification ; D correspond à la distance du motiî' à l'objectif, distance qu'on peut toujours estimer d'une façon suffisamment approximative; v représente la distance de la vision normale susceptible d'embrasser tous les détails dans leur ensemble; d est la distance du point de vue exact, c'est-àdire, dans l'espèce, la distance qui sépare l'objectif de la plaque photographique.

Les objectifs donnant la petite image mesurent, en moyenne 10 centimètres do distance focale ; la distance du motif à l'objectif, pour une bonne tenue perspective, est généralement, dans la pratique courante, cent fois le foyer, soit donc pour le cas choisi 10 mètres. En réalité, cette distance doit être, comme je l'ai déjà dit, au moins égale à deux fois et demi ou trois fois la hauteur du motif. Quant à la vision normale, physiciens et physiologistes la prennent égale à 30 centimètres.

Si donc, dans la formule précédente, nous remplaçons les lettres par des chiffres, nous aurons :

Par conséquent, en chiffre rond, il faudra, dans les conditions que nous avons choisies, agrandir, au minimum, trois fois linéairement, la petite image.

J'ai pris un cas simple, très suffisant dans la pratique. Il y en a de plus compliqués quand on fait usage d'un objectif à grand angle ou même à angle dépassant la moyenne. Je vous renvoie, pour les étudier, aux ouvrages traitant spécialement de perspective.

Donc, l'Art photographique doit être surtout demandé à


CE QUE DOIT ÊTRE L'ART PHOTOGRAPHIQUE. 159

l'agrandissement des épreuves primaires. On obtient un enveloppement qui n'est plus l'indéterminé, le vague à outrance des flouistes; on obtient une image nette qui n'est plus l'image plate et un peu bien en zinc des nettistes.

Quant au choix du motif, quant à l'ordonnance des lignes, quant à la pondération des lumières et des ombres, quant à l'harmonie générale et à l'équilibre de la composition, ce sont points relevant de l'esthétique générale et communs à tous les arts graphiques, et en ce qui concerne la photographie je les ai longuement exposés déjà. Nous sommes donc en droit d'exiger leur application complète, absolue, à toutes les oeuvres qui veulent se masser sous le drapeau de l'Art photographique.

Partant, si l'Art photographique se montre déjà tout cela, il satisfera nos sens et notre raison aussi bien qu'aucun autre art graphique. Mais la jouissance esthétique s'adresse à l'homme tout entier. Or l'homme n'est pas en entier avec ses sens et sa raison. Dans le monde social et divin tout marche par trinité. L'homme ne saurait se soustraire à cette règle. Un troisième terme devient nécessaire pour le compléter. Ce troisième terme est l'intelligence.

J'arrive, insensiblement, au point le plus délicat du thème que j'ai choisi.

Pour être vraiment oeuvre d'art, l'image photographique, après qu'elle a satisfait nos sens et notre raison, doit donc satisfaire aussi notre intelligence. Le peut-elle?

Les détracteurs de l'Art photographique l'ont toujours nié. C'est là une outrance aveugle. Certes, le poète avec sa plume, le peintre avec son pinceau, possède, pour traiter son sujet, un instrument plus souple que le photographe avec sa chambre noire. Le premier, par le charme de son verbe, la musique de ses rimes et la puissance de sa rhétorique, peut admirablement allier à son oeuvre les sentiments qui l'émeuvent et nous émouvoir par cela même. Le second, par sa liberté d'interprétation et par le secours des couVoir

couVoir La Théorie, la Pratique et l'Art en photographie.


160 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

leurs, trouve mille moyens de nous faire deviner ce qu'il n'exprime pas matériellement.

Quant au photographe, il reste, j'en conviens, beaucoup plus servilement soumis au réalisme de l'imitation. De prime abord il semble ne posséder qu'une façon unique de traiter son sujet. Toutefois, un esprit impartial, en examinant soigneusement et intelligemment cette façon unique, trouve que son unité n'est qu'un trompe-l'oeil.

Dans le genre paysage, par exemple, une oeuvre photographique pourra, par des points de fuite habilement choisis, donner pâture à notre imagination. N'est-ce pas, en effet, parler à notre imagination que de ne pas tout lui montrer de prime coup? Sous l'ordonnance de ses lignes, sous l'harmonie de son clair obscur, une oeuvre atteint à l'Art dès qu'elle laisse quelque chose à deviner et à suivre, quelque chose d'immatériel que le spectateur recueille, comprend et savoure; elle atteint à l'Art, en fin de compte, quand elle nous montre une âme qui parle à notre âme et l'emporte dans l'an delà des choses vues par notre oeil et goûtées par notre raison.

L'Art photographique ne serait pas un art s'il ne pouvait incarner cette âme. Or il le peut, non certainement au même degré que d'autres arts, au moins en ce qui est de la généralité des motifs représentés, mais puisqu'il le peut nous sommes en droit d'exiger de lui cette manifestation psychique.

Comment le peut-il?

Il y arrive dans le paysage, je l'ai déjà dit, par des points de fuite habilement choisis, un arrêt des fuyantes du motif qui les laisse se perdre dans l'indéterminé où vaguera l'esprit de l'artiste et celui du spectateur. Inversement, dans une nature morte ou dans une représentation d'intérieur, nous trouverons l'âme de l'oeuvre dans la parfaite détermination des objets représentés du moment que leur groupement, ou leur mise en valeur, correspondra à une association d'idées qui éveillera en nous des sentiments intimes. Dans le sujet de genre, non celui que procurent les hasards


LES ÉCOLES EN PHOTOGRAPHIE. 101

de la photographie instantanée, mais le sujet de genre conçu à l'avance, longuement médité, posé avec goût, éclairé avec intelligence, exécuté avec soin, nous trouverons l'âme dans l'au delà de la chose représentée, dans la discrétion du motif, dans ce qui ne se voit pas, en un mot, mais existe suffisamment à l'état latent pour nous contraindre à découvrir des choses que les lignes, les ombres et la lumière ne nous montrent point. Quant au portrait, ce genre redoutable, que doit-il être pour posséder le côté psychique de l'Art? La ressemblance d'une personne tout entière en même temps qu'une page d'histoire contemporaine. L'exactitude photographique nous garantit l'obtention de ce point. Quant au « tout entière », on comprend non seulement une représentation figurée par les contours extérieurs de la nature physique du sujet, mais encore une manifestation de son côté moral. Or, il existe une banalité qui court le monde avec une allure d'axiome, à savoir que : la photographie rend les traits mais la physionomie jamais. Aux temps où il fallait soumettre le modèle à une ou à plusieurs minutes dépose, je reconnais parfaitement la presque impossibilité où se trouvait l'artiste de saisir la physionomie. Les temps sont changés. La perfection actuelle des outils du photographe ont fait litière de ce préjugé. La plaque photographique peut, maintenant, saisir et garder la vérité morale du modèle, si fugace soit-elle. Nous sommes donc en droit de demander au photographe cette vérité morale dès qu'il vise à l'Art photographique.

Voilà, très sommairement, ce que doit être dans ses différentes parties l'Art photographique. Voilà ce que nous devons trouver en lui ou exiger de lui.

LES ÉCOLES EN PHOTOGRAPHIE

On peut presque dire déjà qu'il existe en Art photographique des écoles bien distinctes. Cette distinction ira-t-elle en s'accroissant à mesure que s'affirmera plus nettement

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162 LES NOUVEAUTES PHOTOGRAPHIQUES.

l'Art photographique? Je n'en voudrais point parier. Il pourrait bien se faire, au contraire, que ces écoles se fondissent peu à peu, en s'cmpruntant mutuellement de leurs richesses propres. Cette tendance à la fusion se constate dès maintenant, en France surtout. Il est vrai que la France est la plus nouvelle venue dans l'Art photographique, et que son génie artistique, si indiscutable, si vivace, si puissant, est souverainement éclectique.

Mais n'anticipons point sur les événements. Tenons-nous à ce qui existe actuellement, à ce que la propagande par les faits, émanant des expositions d'Art photographique organisées par le Photo-Club de Paris, nous a montré l'an dernier et cette année.

Donc, dès maintenant, nous pouvons dire que l'école anglaise ne ressemble nullement à l'école autrichienne, pas plus que celles-ci ne trouvent leurs similaires dans l'école américaine ou dans l'école française. Voyons-les dans cet ordre que, tout compte fait, je préfère encore à l'ordre alphabétique.

Ecole anglaise.

L'Angleterre, dans laquelle je comprendrai l'Ecosse, .non parce qu'elle est tout à fait semblable, mais parce qu'elle appartient au Royaume-Uni, l'Angleterre se montre tout d'abord à nous avec un cachet très particulier, très typique, très climatologique, si je puis dire. C'est une tonalité grise fortement aecentuée. Un ressouvenir et une empreinte de la lumière le plus ordinairement voilée et nacrée que tamisent les brumes marines et terrestres ceignant et enveloppant le territoire pittoresque, et varié en somme, sur lequel trône Sa Gracieuse Majesté la reine Victoria, qu'il nous faut dépouiller, dans l'espèce, de son titre d'Impératrice des Indes.

Je dois à la vérité de constater que si cette tonalité grise est bien réelle, elle se trouve encore considérablement accentuée par la façon dont l'école anglaise nous présente ses oeuvres. Le plus souvent elles sont mises, à plein, dans


LES ÉCOLES EN PHOTOGRAPHIE. 163

des cadres neutres de ton, ou bien encastrées dans des passe-partout d'un gris neutre également. Je me suis même demandé, à prime vue, si la tonalité grise de l'ensemble ne provenait pas de ces deux modes d'encadrement. C'est pourquoi j'ai examiné attentivement; c'est pourquoi je puis dire que, s'ils accentuent la tonalité grise, celle-ci n'en existe pas moins très nettement, formant ainsi une des caractéristiques de l'école anglaise.

Une autre caractéristique, non moins grande, des photocopies exposées par l'Angleterre, est une affirmation très nette de leur origine britannique. Les photographes anglais agissent en cela comme les peintres anglais. Les uns et les autres sont imbus de cet esprit national, déclarant qu'en dehors de ce qui est anglais il n'y a pas de salut. Esprit étroit sans doute, parfaitement incompris des cosmopolites, mais qui, bien entendu, peut cependant, par l'unité de son absolutisme, produire de grandes choses. Types, personnages, vêtements, meubles, paysages et ciels, tout cela est bien local, bien particulier au génie et au sol insulaire de la Grande-Bretagne. Eh! eh ! savez-vous que ce système un peu bien exclusif constitue, quoi qu'on en ait, un art vraiment national. Nous n'avons eu à Paris que deux expositions d'Art photographique et déjà du premier coup d'aùl nous pouvons dire ceci est anglais ou ne l'est pas. Reste à savoir si un art national ainsi constitué est progressiblo. Je n'en voudrais pas jurer.

Autre point. Les photographes anglais, beaucoup peutêtre sans bien s'en douter, subissent les préceptes de ce cénacle de peintres qui a formé une école dans l'école de peinture anglaise sous le nom, un tantinet prétentieux mais très expressif, de préraphaélisme. Il semblerait en effet que la photographie fut bien faite pour le préraphaélisme qui exige de l'artiste une mise sous nos yeux de la réalité même du fait ou du personnage ou du site qu'il a entrepris de nous montrer. Mais le préraphaélisme dans la photographie se fait surtout sentir dans le sujet de genre. Dans le paysage il cède le pas à l'école photographique très


164 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

moderne et surtout très anglaise du sténopé. Les flouistes l'emportent sur les préraphaélistes. Mais les uns et les autres se montrent semblables par un amour profond de la nature. Quand j'aurai dit encore que les photographes anglais se plaisent à piquer la curiosité sur leurs photocophies par la recherche ingénieuse du titre, avec une disposition d'esprit accusant quelque chose de plus qu'un caprice humoriste, j'aurai signalé les principales caractéristiques de leur art sans avoir tout dit sur cet art. Il faudrait, en effet, un article tout spécial et d'une certaine longueur pour épuiser le sujet. L'école anglaise est actuellement, avec l'école autrichienne, que nous verrons tout à l'heure, la plus complète et la mieux affirmée de celles qui battent pavillon d'Art photographique.

Les oeuvres qui composent cette école touchent presque toutes, dans leurs genres, à la maîtrise et leurs auteurs sont bien réellement des maîtres, surtout si l'on envisage leur esthétique nationale mais, à mon sens, un peu trop particulière.

Ecole autrichienne.

Très bien aussi, mais très différente de l'école anglaise est l'école autrichienne. Le portrait, la grande étude de la tête même, reste la dominante de celle-ci; alors que le paysage se dégage comme la dominante de celle-là. L'art autrichien est plus posé, sans être plus froid. C'est le monsieur bien calme, très correct, bien peigné, bien rasé, opposé à la chevelure byronienne et au manteau rejeté sur l'épaule, avec un faux semblant de négligé. On ne cherche point à y cacher l'ordre ni l'harmonie par un désordre voulu ni une extase factice. L'école autrichienne n'a aucun souci de la vague poésie ossianesque, pas plus que des raffineries outrancières du préraphaélisme. Elle voit consciencieusement et rend consciencieusement ce qu'elle voit. C'est net et propret. De cet assemblage de qualités un défaut naît : la froideur. Oui tout cela est peut-être un peu trop correct. Il ne faut pas oublier que notre vieux Boileau


LES ECOLES EN PHOTOGRAPHIE. 165

a dit : « l'ennui naquit un jour de l'uniformité », et si cette uniformité dans un travail impeccable ne nous ennuie pas encore, on pourrait à la longue le trouver monotone, réclamer un peu les dérèglements de la fantaisie. Du varié dans la facture! Donnez-nous du varié, n'en fùt-il plus au monde!

Par le classement fait à la deuxième exposition d'Art photographique, classement qui avait réuni dans un même groupement tous les membres du Camera-Club de Vienne, c'est ainsi que l'école autrichienne nous est apparue : très correcte, mais un peu monotone. Dans l'école anglaise, c'était une monotonie de ton en gris majeur; dans l'école autrichienne, c'est une monotonie de facture, car ici le ton général est en somme assez varié.

Je disais tout à l'heure que le portrait demeure la dominante de l'école autrichienne. De fait, dans cette école, nous trouvons les chefs-d'oeuvre du genre. Il est difficile, en effet, sinon impossible, de rendre avec plus de vérité physique et de vie morale une tête humaine. Que nous voilà loin des portraits que nous sommes habitués de voir dans les albums de nos amis et connaissances ! Que nous sommes loin même des portraits qui relèvent ou veulent relever de l'Art photographique ! Ceux qui attaquent le portrait, sans doute parce qu'ils ont eu le goût faussé, ont beaucoup de mal à comprendre que la chair, étant foncièrement jaunâtre, ne saurait venir en blanc en photographie, quelle que soit la vivacité de l'éclairage. 11 ne peut y avoir de blanc que les à vif des hautes lumières, un point par exemple au bombé suprême du front, une ligne imperceptible sur l'arête du nez et légèrement aplatie sur la pomme, une virgule au sommet de la lèvre supérieure, ou, dans le cas de l'éclairage arrière, toutes les saillies frappées par la lumière frisante. En dehors de cela, le blanc pur sur la figure n'est, ne peut et ne saurait exister. Réservez-le pour les mousselines, les lins et les toiles. C'est une des causes de la très grande vérité des études autrichiennes. En dehors de cette qualité provenant d'une graduation bien entendue


16b LES NOUVEAUTES PII OTOGRAPHIQUES.

des valeurs, l'école autrichienne sait admirablement enlever les têtes sur les fonds et les faire tourner. Ceci semblerait l'ABC du métier. Pourtant combien peu de têtes en général tournent bien! Combien peu aussi ne paraissent point plaquées sur le fond! On ne saurait jamais trop éloigner le modèle du fond, pour qu'il y ait une masse d'atmosphère suffisamment importante entre les deux. Au demeurant, si je rappelle ces principes pour la généralité des portraitistes, je n'ai pas à le faire pour ceux de l'école autrichienne. Les artistes do cette école me paraissent bien convaincus de la vérité de ce que je viens de dire.

Ecole américaine.

L'Amérique moderne s'est formée de tous les peuples un peu. Il va donc de soi que les qualités et les défauts inhérents à chacun s'y trouvent mêlés. Cela se reconnaît aussi bien dans les arts qu'autre part. Ce sont les aspirations mystiques de l'école anglaise se fondant dans les tendances de précision de l'école autrichienne, s'amalgamant à l'éclectisme de l'école française, au réalisme de l'école belge, avec une pointe du caractère particulier à l'Américain moderne.

Le nombre n'est pas très grand des amateurs américains qui se risquent à nous adresser leurs (ouvres, mais la qualité est de premier cru. Ce sont des marines au soleil couchant, à contre lumière, qui doivent être rangées parmi les plus beaux joyaux de l'Art photographique. Ce sont de très excellentes séries de genre dans une note un peu grise cependant.

Oui vraiment cette école américaine possède des qualités tout à fait dignes d'attention et qui restent bien dans le ce que doit être l'Art photographique tel que je le comprends et tel que je l'ai défini.

Ecole française.

A la première exposition d'Art photographique la France essayant ses premiers pas, et forcément un peu flottante


LES ECOLES EN PHOTOGRAPHIE. 167

sur l'orientation à donner à sa boussole, n'avait point trop osé s'affirmer en écolo ni par le nombre ni par la liberté des oeuvres. A la deuxième exposition cela a été bien différent. Elle a marché franchement, abandonnant ses lisières. Elle a résolument mis l'aiguille au nord et, le regard fixé sur l'habitacle, elle a navigué grand'erre. Aussi peut-on dire qu'il existe en Art photographique une école française très caractérisée et très typique. C'est déjà celle qui, sauf de rares exceptions, serre de plus près la définition que j'ai donnée de l'Art photographique.

Je dis rares exceptions. Elles sont rares, en effet, mais sautent aux yeux par leur affirmation. Ce sont ces photocopies directes, sèches et glaciales, tirées sur papier au gélatino-chlorure, pignochées à l'extrême, mises péniblement au point avec des loupes. (Euvres de bons ouvriers de laboratoire, qui croient avoir fait oeuvre d'art sans rien comprendre à l'Art et qui visiblement n'y comprendront jamais rien. Elles servent de repoussoir aux clartés éblouissantes de l'école. Mais je crois ces clartés-là dès maintenant suffisamment éclatantes pour n'avoir point besoin de repoussoir. C'est pourquoi je signale ces oeuvres à toutes les rigueurs de l'ostracisme du prochain jury. Que leurs auteurs se contentent de rester dans l'armée des photographes sans chercher à entrer dans le bataillon de l'Art photographique. A quoi bon tenter un but auquel leur aptitude ne leur permet pas d'atteindre? Que diable! tout le monde n'est pas artiste et ce n'est pas un déshonneur que de ne point l'être? Rester photographe sans prétention est fort estimable, mais lorsqu'on y met de la prétention que ne saurait soutenir aucun talent, ni aucune aptitude, cela devient blâmable.

Vie et couleur. Telles sont les deux qualités les plus frappantes de l'école française. Tout vibre, tout est chaud de ton. Avant qu'il soit longtemps, mettons la fin du siècle pour préciser, je crois bien que l'école française n'aura de commun avec les autres écoles que les outils : objectifs, chambres noires, plaques.


168 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Sous l'action de l'influence de race, sous l'action de la persistance de l'éducation, le sentiment esthétique français est composé de deux goûts quasi contradictoires. Le premier affirme des préférences pour des formes belles dès qu'elles sont surtout généralisatrices. Il aime que tout accident soit radicalement supprimé en faveur de l'unité harmonieuse. D'instinct, je dirai même de parti pris, il tend à l'abstraction, il ramène le particulier au général, le réel à l'idéal. De cet idéal, connu sous le nom de grand art, il a le culte. Culte platonique, j'en conviens, mais culte, et culte dont il aime à parader par vanité inconsciente, ou plutôt parce qu'il lui a été appris et ressassé sur les bancs du lycée que rien n'était plus beau ni plus noble. Au tréfond, le sentiment esthétique français considère l'art élevé comme un peu bien ennuyeux, qu'il le comprenne ou non, mais il ne l'en exalte pas moins. Goût d'apparat, en somme.

Le second est un goût de race et d'éducation aussi, mais encore plus de civilisation. Il s'adresse, avec une vivacité surprenante, à tout ce qui est facilement intelligible quoique ingénieux, quelles que soient la petitesse et la légèreté de la forme. Il se préoccupe, en un mot, de l'intérêt du sujet, soit qu'il se montre simple, dramatique ou spirituel. Tout d'abord, il ne demande à l'oeuvre que l'émotion que je nommerai plastique, sans grand souci de l'émotion esthétique. Seulement, comme son commerce avec les oeuvres d'exécution saine est constant et qu'il en a subi de siècles en siècles l'endosmose psychique , il en arrive, sans y prendre garde, à des saveurs toutes nouvelles, imprévues même, et qui se montrent toujours dans une excellente tenue artistique.

Le résultat de ces deux goûts contradictoires se fait sentir dans tous les arts, et nous le voyons nettement paraître dans le nouveau venu : l'Art photographique.

Ecole belge. L'école belge a cela de très particulier qu'elle affecte en


LES ECOLES EN PHOTOGRAPHIE. 169

général une forme essentiellement réaliste. C'est une transfusion du vieux sang flamand dans la vie moderne, vue, vécue, coudoyée. C'est incontestablement une qualité très belle. De plus, une qualité qui aiguille constamment la voie de l'artiste vers le progrès et le mène infailliblement au succès, un jour ou l'autre. L'élévation, les métamorphoses et la régénération de l'Art sont toujours parties d'une étude approfondie et fouillée de la nature. Rien ne vaut cette étude pour élargir l'horizon intellectuel. Le sujet de genre y prend des faces multiples, le portrait y acquiert son cachet de page d'histoire, le paysage y prend la vie, si longtemps méconnue, mais si réelle des choses. En peinture, les écoles de Velasquez, de Franz Hais et des petits maîtres hollandais avaient du bon. La jeune école belge de photographie s'en souvient. Elle se complaît à refléter la société, et elle opère dans un pays où décor et population se prêtent admirablement à cette tendance. Si elle le veut, aucune école, par cela même, ne pourra mieux qu'elle cultiver ce terrain si riche en sujets de tous genres, de la vie sociale.

Ecoles diverses.

L'Allemagne, la Hollande, la Suisse, l'Italie et la Russie n'ont point une exposition suffisamment fournie, ni suffisamment typique pour qu'on puisse en dégager, de ce que nous avons vu cette année et l'année dernière, une caractéristique d'école. En y regardant de très près, peut-être pourrait-on esquisser un vague ensemble sur l'école hollandaise. C'est, eu effet, la Hollande qui, de tous les pays que je viens de citer, a un semblant d'accentuation personnelle.

En parcourant, étudiant, examinant l'exposition, je ne me souviens pas avoir vu une oeuvre aussi simple, ni aussi saisissante à la fois que le Médecin de M. A. Pereira. H y a là toute une indication d'école. Ecole tenant de bien près à la belge, comme jadis l'art hollandais a tenu à l'art flamand.

En revanche, les autres pays que j'ai cités ne fournissent

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170 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

pas la moindre trace de caractéristique. Ceci pourrait tout aussi bien appartenir à l'école française qu'à l'école anglaise; cela à l'école américaine qu'à l'école autrichienne. Loin de moi la pensée de vouloir en inférer que les oeuvres exposées par les artistes de ces différents pays ne valent guère. Ce serait une erreur qui friserait l'ineptie. On aurait, ajuste titre, droit de s'inscrire en faux contre mon ostracisme. Il n'y a pas ombre d'école particulière dans les envois qui ont été faits à nos deux expositions d'Art photographique, voilà tout. Qui sait si l'année prochaine je n'aurai pas à en définir une ou plusieurs.

EIN DE LA DEUXIEME PARTIE


TROISIÈME PARTIE FANTAISIES ET PETITES INDUSTRIES

LES AGRANDISSEMENTS PAR LES MIROIRS CONCAVES

Qui dit miroir entend, dans le sens le plus général, une surface polie, étaméc et ordinairement plane, dont la destination est de reproduire, par réflexion, l'image des objets qu'on place devant elle. L'usage en est ancien. On peut même dire qu'il remonte, pour le moins, à Adam et à Eve, si l'on veut bien considérer que l'eau claire des ruisseaux ou des fontaines constitue un véritable miroir.

Nos miroirs modernes sont faits de glaces de verre très uni et étamé. Les anciens, quoi qu'en aient dit certains chercheurs, ne semblent point les avoir connus. Pourtant les Romains avaient poussé à un bien haut degré l'art de travailler le verre et le cristal. A telles enseignes même qu'ils auraient pu, quelques siècles d'avance, paraphraser le fameux vers de Boileau et dire : « Aimez-vous le verre, on en a mis partout. » En effet, ne trouve-t-on pas dans les Epislolaires de Sénèque cette notation caractéristique : « Celui-là s'estime bien pauvre, dont la chambre n'est pas tapissée de plaques de verre. » D'aucuns y ont voulu voir des miroirs. J'en doute. Pline nous indique bien que, de son temps, on voyait des miroirs de la grandeur d'un homme incrustés dans les murailles. Mais ces miroirs étaient fabriqués avec la pierre obsidienne, ce verre noir des volcans auquel Obsidius a laissé son nom après avoir découvert cette matière en Ethiopie. Il n'y avait pas que les murs qu'on incrustait ainsi, mais encore les plats, les


172

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

bassins, les tasses, les gobelets, histoire de multiplier à l'infini l'image des convives, le populus imaginum, comme dit Pline.

A côté de la pierre obsidienne, et plus employé qu'elle encore, se montrait le métal poli. A quand remonte-t-il? Si nous nous en rapportons aux textes existants et connus, ce serait Moïse le grand inventeur. Il est dit, en effet, au verBusle

verBusle son image agrandie.


AGRANDISSEMENTS PAR LES MIROIRS CONCAVES. 173

set VIII du chapitre XXXVTII de VExode « qu'il fit un bassin d'airain des miroirs des femmes qui se tenaient assidûment à la porte du tabernacle ».

Ces miroirs de métal sont encore en usage aujourd'hui pour les télescopes et autres instruments d'optique fréquemment employés en physique pour démontrer et expliquer les phénomènes de réflexion qui ont lieu à la surimage

surimage et image renversée se présentant simultanément.


174 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

face libre des liquides. Mais si la forme plane a été, est et reste la plus connue, la plus courante, les miroirs peuvent être cependant et sont quelquefois concaves, convexes, cylindriques, coniques, paraboliques, elliptiques,etc. Parmi ces différentes courbures, il en existe une qui donne à la surface réfléchissante la propriété de produire une image nette des objets mis en présence, image amplifiée ou réduite, mais sans déformation sensible. C'est la surface sphérique. La plus facile à obtenir, avec quelque perfection, après la surface plane.

Les miroirs sphôriques se présentent sous deux espèces : les concaves, formés par une portion de sphère polie à l'intérieur; les convexes, constitués par une calotte sphérique polie à l'extérieur. Les premiers sont dits convergents parce qu'ils concentrent à leur foyer les rayons lnmineux ; les seconds sont nommés dirergenls parce qu'ils éparpillent ces mêmes rayons. Dans les miroirs convexes, l'image est toujours vue derrière le miroir, mais petite et plus rapprochée de la surface réfléchissante que n'est l'objet luimême. Dans les miroirs concaves, si l'objet est placé en avant du centre de la sphère, l'image est vue en avant du miroir. Elle est alors plus petite que l'objet et renversée. Si l'objet est très éloigné l'image apparaît au foyer principal. A mesure que l'objet se rapproche du miroir, son image s'en éloigne, et lorsqu'il se trouve au foyer principal, elle va se former à l'infini.

Supposons que nous placions une flèche AB en avant d'un miroir concave 1IGD et dans un plan perpendiculaire à l'axe principal OC du miroir, axe passant par son centre de courbure O. Le rayon AD émis par le point A parallèlement à l'axé OC, après avoir frappé la surface réfléchissante en CD sera réfléchi dans la direction DF, passera par le foyer principal F au milieu de OC. Un autre rayon partant du point A passera par ce même foyer F, frappera le miroir en H et sera renvoyé parallèlement à l'axe principal OC. L'intersection de ces deux rayons réfléchis formera en A' l'image du point A. Cette image A' sera symé-


AGRANDISSEMENTS PAR LES MIROIRS CONCAVES. 175

trique do A par rapport au point O. 11 en sera de même pour le point B dont les rayons qui en émanent viendront former image au point B'. Or, le phénomène présenté par A et B sera le même pour tous les autres points de AB. De sorte que l'objet complet AB aura une image complète A'B' placée au-dessus de l'axe, puisque nous avons supposé AB placé au-dessous. On remarquera que l'image de l'objet est renversée. Si donc on a mis l'objet à l'envers on aura une image droite de cet objet.

Cette image aérienne est si nettement visible qu'elle

peut impressionner une surface sensible et donner une image photographique. Nous avions constaté déjà cette obtention photographique des images aériennes comme possible, quand nous avons donné le moyen de photographier un mirage 1. M. Bollinet, attaché au cabinet de physique du collège Chaptal, en a fait pour les miroirs concaves une démonstration très élégante. Plaçant en vVB, au lieu d'une flèche, un bouquet renversé, il a mis une potiche en V, c'est-à-dire exactement au-dessous de l'image aérienne, et il a braqué l'objectif d'une chambre noire sur cette potiche. Le phototype développé a très nettement donné l'image du vase et celle du bouquet qui semblait baigner ses tiges dans ce vase même.

D'après ce que j'ai dit plus haut de la formation de l'image , par rapport à la distance de l'objet au miroir, l'image aérienne sera d'autant plus petite [que l'objet sera

Schéma de la marche des rayons.

1. Voir : Les Nouveautés photographiques, année 1S95, page 136.


176 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

plus éloigné du foyer principal et réciproquement d'autant plus grande qu'il en sera plus rapproché.

Il résulte donc de la démonstration élégante de M. Rollinet que nous pouvons, à l'aide d'un miroir concave, non seulement faire des agrandissements photographiques, mais encore photographier des objets orientés dans le même sens que l'objectif. Nous sommes ainsi en possession d'un moyen de reproduction d'un objet que, sans lui, nous ne pourrions photographier directement faute de place.

Est-il besoin d'insister sur toutes les fantaisies photographiques qu'il est loisible de tirer de ce moyen. Je ne le crois pas. Leur nombre n'a de limites que la fécondité d'imagination de l'opérateur. Nous donnons ainsi l'image d'un vase, celle de son image virtuelle placée derrière le miroir, image agrandie, puis l'image réelle et renversée de la pièce dans laquelle il se trouve. Soit trois images différentes sur un même phototype. Nous donnons ainsi un buste de Molière et son image agrandie. L'agrandissement dans ce cas est d'autant plus grand que l'objet, placé entre le foyer et le miroir, est plus rapproché du foyer. Il est aisé de construire géométriquement la marche des rayons lumineux. On obtient ainsi deux triangles semblables comme ayant leurs angles égaux. En prenant les rapports de ces triangles, on arrive facilement à traduire la formule d'agrandissement par ce rapport :

dans laquelle /"représente la distance du foyer du miroir à la surface réfléchissante, distance qui est égale d'ailleurs à la moitié du rayon de la sphère dont le miroir est une portion et p la distance de l'objet au miroir. On voit donc de suite, comme je disais tout à l'heure, que l'image est d'autant plus grande que p s'approche davantage d'être égal à f, c'est-à-dire qu'elle augmente à mesure que l'on place l'objet plus près du foyer principal.

Cette nouvelle application des miroirs concaves n'a pas sans doute tout l'intérêt général de celle que leur donna


LES PHOTOCOPIES LUMINEUSES. 177

Archimède, mais elle n'en a pas moins un intérêt secondaire digue d'attention et qu'il est bon de noter. C'est en science surtout qu'il ne faut rien rejeter. Une fantaisie peut y être le point de départ d'une grande découverte. Si le nez de Newton n'avait pas été endommagé par la chute d'une pomme, nous aurait-il donné son superbe système de la gravitation universelle?

LES PHOTOCOPIES LUMINEUSES

Voir ses photographies la nuit, sans avoir pour cela des yeux de nictalopes, voilà qui rentre dans les fantaisies qui ne sont pas banales. Le procédé pourtant est d'une telle simplicité, qu'on est tout étonné qu'il ne soit point tombé lui-même dans la banalité.

Vous comprenez bien que tous les papiers sensibles connus n'ont rien à faire dans l'espèce. 11 vous en faut un tout spécial, si spécial même que nous n'hésitons pas à déclarer, sans crainte d'être démenti, que vous n'en trouverez pas le plus petit échantillon, même chez le fournisseur le mieux monté. Résignez-vous donc, si vous désirez tenter l'aventure, à confectionner vous-même votre support sensible. Au demeurant un enfant peut suffire à cette préparation, qui consiste simplement à badigeonner un morceau de carton bristol avec une peinture lumineuse faite de sulfure de calcium ou de strontium, ou de baryum, et que vous laissez sécher.

C'est ce carton sensibilisé d'une nouvelle manière que vous mettez sous le... j'allais écrire phototype, et je vous aurais induit de belle façon en erreur. Un instant de réflexion vous prouve, en effet, qu'on ne saurait employer un phototype... et pourtant!... Mais procédons par ordre. Si nous mettons sur la face sensibilisée de notre carton une image translucide, et que nous insolions le tout, que se passera-t-il ? Les rayons lumineux, traversant les parties claires de l'image, viendront frapper la mixture au sulfure

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178 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

de calcium qui s'empressera de les happer au passage et de les garder. Suivant les différentes nuances de ces claires la mixture emmagasinera plus ou moins de lumière, jusqu'à ne pas en emmagasiner du tout lorsqu'elle se trouvera sous les noirs de l'image.

Donc, lorsque viendra la nuit, et que nous aurons ôté l'image translucide de dessus le carton, le sulfure de calcium nous renverra tous les rayons qu'il aura emmagasinés, et nous verrons l'image en noir sur une surface lumineuse. Par conséquent si l'on a fait emploi d'un phototype, ce seront les ombres du sujet qui seront lumineuses et les blancs qui seront noirs. C'est le « pourtant » suspensif de tout à l'heure, car on peut, en effet, obtenir de curieux effets en opérant ainsi. Toutefois, comme le résultat est anormal, il faudra donc insoler, non sous un phototype, mais sous une photocopie diapositive.

Ce procédé a un défaut, en ce sens que l'image ne possède qu'une durée éphémère, subordonnée à la quantité de rayons emmagasinés. Peu à peu, la déperdition amène l'effacement de l'image. Pour la récupérer on est obligé de recourir à une nouvelle insolation.

Si donc on désire que la luminosité soit continue, comme celle de ces surfaces de boîtes d'allumettes par exemple, qui, restant exposées tout le jour à la lumière diurne se montrent lumineuses dans la nuit, on doit opérer d'une autre manière.

Pour cela, au lieu de badigeonner le carton avec une peinture au sulfure de calcium, on le peindra avec la mixture suivante :

Eau distillée 50 cm 3.

Gomme arabique 4 grammes.

Glucose 3 —

Glycérine 6 cm'.

Bichromate de potasse 2 grammes.

Cette solution, soigneusement filtrée, est étendue sur le support préalablement chauffé. Après dessiccation on insole. Sous un phototype, cette fois. Les parties touchées


OBTURATEUR A CISEAUX. 179

par la lumière deviennent insolubles, en raison directe de l'absorption qu'elles ont faite de cette lumière. Si donc, après insolation, le carton impressionné est mis à l'humidité, les parties qui n'ont pas été frappées par la lumière deviennent gluantes dans des proportions correspondant aux nuances du phototype. Si alors on les saupoudre d'un des sulfures que nous avons indiqué plus haut et qu'on expose le tout à la lumière diurne, ou à la lumière magnésique ou électrique, l'image nous apparaîtra lumineuse dans l'obscurité, et cela d'une façon constante. Pour la régénérer il n'y aura qu'à la remettre à la lumière.

Ce procédé, vous le voyez, n'est pas beaucoup plus compliqué que le premier, et la constance de l'épreuve s'en trouve beaucoup mieux assurée.

OBTURATEUR A CISEAUX •

Pour ceux dont le budget est maigre, les obturateurs coûtent cher. Or, M. G. Hopkins qui reconnaît, comme nous tous, la nécessité d'employer un obturateur automatique dans les cas d'instantanéité, nous donne un moyen d'en construire un très simple et agissant sûrement dans la circonstance. Au dire de l'auteur, il vaut autant et même mieux que les plus beaux obturateurs connus.

Vous prenez deux parois rectangulaires d'une boîte de carton, quatre épingles à cheveux, quatre épingles ordinaires, un long ruban étroit, un morceau de velours noir et une bobine de fil. Vous avez ainsi ramassé tous les matériaux nécessaires à la construction de votre appareil. Ce n'est, vous le voyez, ni difficile à se procurer, ni dispendieux à acquérir. Ceci obtenu, vous vous mettez à l'oeuvre.

Dans le centre de l'un des morceaux de carton, vous entaillez une ouverture circulaire telle que vous puissiez l'appliquer sur le pas de vis de votre objectif. En vissant celui-ci à fond, le carton se trouve ainsi serré et maintenu


180

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

fixe dans une position verticale. Dans le centre de l'autre morceau de carton, vous découpez une entaille rectangulaire ayant, en largeur, le diamètre de votre objectif, et, en hauteur, la dimension qui vous conviendra. Plus elle sera petite, plus l'obturation sera rapide, et inversement. Une

bonne moyenne est de donner à cette hauteur la dimension du parasoleil de l'objectif. Si vous désirez un obturateur à vitesses variables, vous aurez alors tout un jeu de cartons présentant des ouvertures différentes, et vous emploierez celui-ci ou celui-là suivant le besoin. Un morceau de velours noir découpé, d'une ouverture égale à celle du carton, est collé sur la face postérieure de celui-ci. Les quatre épingles à cheveux sont redressées. 11 va de soi qu'à défaut d'épingles à cheveux, un fil de métal rendrait le même service. Les extrémités des épingles redressées sont courbées à angle droit, formant de la sorte des crochets qui servent à relier entre elles les extrémités des deux cartons. L'ensemble représente alors une sorte de

Obturateur à ciseaux.


L'INSTANTANEITE

Reproduction d'une photocopie obtenue avec l'obturaleur à simple guillotine.


182 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

parallélipipède. Deux épingles ordinaires sont fichées, en inclinaison opposée, dans un angle de l'extrémité inférieure du carton destiné à être placé devant le parasoleil, et les deux autres dans l'angle correspondant de l'extrémité supérieure du carton fixe. Ils forment ainsi deux taquets.

Notre ruban mince sert à former des diagonales b, reliant, à l'intérieur des barres métalliques, les côtés opposés du carton (Voir page 180). Comme les épingles à cheveux traversent les cartons et sont recourbées à leurs extrémités, on engagera le ruban sous ces extrémités, et il s'y trouvera parfaitement maintenu. Ces diagonales guideront les mouvements de haut en bas et de bas en haut du carton mobile, lui permettant de couvrir l'objectif par sa partie pleine, ou de le découvrir par sa partie évidée.

Pour armer l'obturateur, on passera un fil dans les taquets constitués par les quatre épingles ordinaires, et on le tendra comme il est indiqué en o, pour que la partie pleine obture l'objectif.

La mise au point se fera quand le fil sera tenu plus long, de façon que la partie évidée du carton (fig. 3) se trouve en face de l'objectif. Le déclenchement s'opère au moyen de ciseaux en coupant ce fil (fig. 1).

Veut-on faire de la pose au moyen de cet objectif? Cela est possible. Autour des épingles taquets on enroulera alors deux fils. L'un, c, tendu pour l'obturation, l'autre, d, tendu pour la mise au point. On coupera alors le fil c {fig. 2), la guillotine s'abattra, mais sera retenue en pose par le fil d. Le temps d'exposition expiré, on coupera ce fil d, et la guillotine, remise en mouvement, viendra appliquer sa partie pleine contre l'obturateur et le fermer.

Vous aurez ainsi un obturateur qui ne vous coûtera ni peine, ni temps, ni grand argent. Avec lui vous obtiendrez de très belles instantanées dans la montagne ou à la mer. Avec une ouverture rectangulaire, très réduite dans sa hauteur, vous pouvez atteindre à de très grandes instantanéités. Un jour de pluie, amusez-vous à cette petite cons-


CUVE POUR ÉCRANS COLORÉS. 183

truction, et lorsque le soleil reviendra, servez-vous de l'appareil devant une belle vague, et vous serez surpris du résultat obtenu avec des moyens aussi simples.

CUVE POUR ÉCRANS COLORÉS

Je vous ai souvent entretenus de l'excellence de l'emploi de l'écran translucide jaune, je vous ai décrit par le menu le porte-écrans colorés que M. Ch. Monti a construit, à cet effet, sur mes indications'. L'écran coloré que, à l'état jaune très clair, je considère presque toujours comme bon dans tout travail en plein air, devient, à l'état plus foncé, une nécessité absolue quand on vise à obtenir surtout des nuages de toute forme et de toute lumière. Il est difficile de s'entendre sur la teinte. Aussi préfère-t-on avoir à faire à une solution titrée d'un sel quelconque. Par exemple, dans le cas du ciel : une solution de bichromate de potasse à saturation. Comme cela on est sûr de sa nuance.

Mais pour se servir d'une solution il faut une cuve. Et une cuve ne semble pas, au premier abord, d'un emploi facile. Voici cependant un moyen assez simple d'en placer une maniable à l'arrière de l'objectif, comme l'indique la figure 1 (Voir page 184).

La construction de la cuve est montrée dans la deuxième gravure, dans laquelle a, «'sont des verres plats et carrés, et b est un anneau coupé dans un tube de verre, puis poli pour rendre ses bords parallèles et lisses. Cet anneau est percé et pourvu d'un bouchon. On le cimente entre les deux verres plats avec du baume de Judée, ou tout autre ciment semblable. La solution saturée de bichromate de potasse est introduite par le trou, et la cuve, ainsi préparée, est insérée dans un morceau de liège c, lequel est fixé à l'arrière de l'objectif monté sur la chambre noire. L'ajustement approprié pour la cuve est montré dans la figure I.

1. Voir : tes Nouveautés pictographiques, année 189o, page 14.


18i

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Le diamètre doit varier naturellement avec le diamètre et l'angle de l'objectif. Avec une cuve ainsi faite et remplie d'une solution à saturation de bichromate de potasse, on obtient de fort beaux ciels avec des poses de trois à quatre secondes.

Cette construction de cuve, extrêmement simple, peut être une excellente indication, puisqu'il semble qu'en fait d'orthochromatisation et de chromophotographie nous sommes appelés à nous servir constamment d'écrans colorés.

Dispositif d'une cuve à l'arrière de l'objectif.


FAHRICATION DES FONDS POUR PORTRAITS. 18o

PHOTOLITHOPHANIE

A un moment les lithophanies obtinrent une vogue qui tint de la fureur. On en voyait à toutes les fenêtres, devant tous les luminaires. Ces lithophanies représentaient de petits tableaux en monochrome blanc. Les ombres et les lumières étaient produites par des dépressions plus ou moins grandes dans une pâte de porcelaine.

Voici un moyen de reproduire, par la photographie, ces effets dans de la pâte de papier. Sur une glace horizontale bien nettoyée et bien cirée, on étend une couche de collodion normal. Dès qu'il a fait prise, on verse dessus, et pour former une épaisseur de '.'> millimètres environ, une mixture composée comme suit :

Eau 192 cm».

Gélatine 72 grammes.

Sucre 24 —

Bichromate de cotasse 2 —

On laisse sécher à l'obscurité complète. On enlève la pellicule ainsi formée de son support, et on l'impressionne sous un phototype négatif, face gélatinée de celui-ci contre face collodionnée de la pellicule. L'insolation jugée suffisante, vous lavez à l'eau tiède. Vous obtenez ainsi une image en relief, que vous laisserez sécher.

Prenant alors une plaque de métal poli, vous y placez votre épreuve en relief, et, au-dessus, une feuille de papier épais, mais aussi mou que possible. Vous passez le tout sous la presse à satiner et vous obtenez une image engravée dans la pâte du papier, véritable imitation de lithophanie.

FABRICATION DES FONDS POUR PORTRAITS

Avez-vous déjà essayé de fabriquer vos fonds vousmêmes?... Heuh!... Je ne parle pas des fonds unis et pour lesquels vous vous êtes contentés d'aller dans un magasin de nouveautés prendre quelques mètres d'une étoffe

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186 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

de ton gris fer, crème, noir, rouge ou bleu foncé. Ils ne coûtent guère de confection, mais en revanche, quand ils ont été employés chacun une douzaine de fois, on les trouve un peu bien plats et toujours les mêmes. A moins d'éclairages spéciaux, le modèle s'enlève difficilement sur les sombres ou trop sèchement sur les clairs. Sans être dans un gîte comme le lièvre de la fable, on se prend à songer. .. et à songer que le moindre fond dégradé ferait bien mieux l'affaire, surtout s'il présente des clairs contre le côté sombre du visage, et des ombres contre le coté clair. Mais on n'est content de rêver d'une chose qu'autant qu'on cherche la réalisation du rêve.

De là ma question : « Avez-vous déjà essayé de fabriquer des fonds vous-mêmes? »

Si oui, vous avez sûrement employé ou la peinture à la colle ou la peinture à l'essence, sachant bien que la peinture d'un fond doittoujours se présenter mate. Or l'essence ne donne qu'imparfaitement la matitô. Quant à la peinture à la colle, elle la donne bien, mais avec quelles difficultés! Il faut employer cette peinture à chaud, et, lorsque la peinture appliquée est sèche, elle n'a plus du tout, oh ! mais du tout, le ton qu'elle présentait au moment de son application. A moins d'être bien habitué à la peinture en décors, on barbotte effroyablement.

Or voici qu'il nous arrive du Canada, par l'organe de M. Hammer-Groughton, un moyen de fabriquer des fonds parfaitement mats, ne craquelant pas et gardant le ton tel qu'on l'a appliqué.

Pour cela, il suffit de prendre de la terre à modeler ou de la terre de pipe. Dans l'espèce c'est même farine. Vous achetez, en plus, en poudre impalpable, du noir de fumée, des ocres jaunes et rouges. Ces acquisitions, peu coûteuses, une fois opérées, vous procédez vous-mêmes à la confection de vos couleurs qui sont, au demeurant, des sortes de pastels.

La terre est malaxée dans l'eau pour l'amollir, et vous lui ajoutez de la couleur en plus ou moins grande quantité sui-


FABRICATION DES FONDS POUR PORTRAITS. 187

vant ce que vous voulez faire. Afin d'obtenir une bonne répartition de la teinte vous triturez bien le tout.

Terre et noir seuls donnent un ton gris bleu qui, en photographie, viendra beaucoup plus clair qu'il ne parait en réalité. Si vous y ajoutez une petite quantité d'ocre rouge et d'ocre jaune, le gris se réchauffera, et le ton obtenu viendra en photographie à la même valeur que celui perçu par l'oeil. Basez-vous là-dessus et faites au besoin des essais préalables, comparant les teintes obtenues avec celles qu'elles présentent en photographie.

Toujours est-il que vous devrez préparer cinq ou six mélanges formant une gamme allant du gris clair au gris noir. Vous les moulerez en bâtons pour en faire usage quand ils seront secs et durs.

La toile, ou autre étoffe, destinée à recevoir la couleur sera fortement tendue sur un châssis et on la badigeonnera, à chaud, avec un mélange de colle-forte et de blanc d'Espagne ayant la consistance d'une crème fluide. Il faudra avoir soin d'étendre cette couche en tous sens pour éviter les stries.

C'est l'encollage du support. Vous attendrez, pour y

poser votre pastel, que cet encollage soit parfaitement sec.

L'étcndage du pastel se fera par hachures serrées, suivant

le sens de la dégradation que vous voulez obtenir, en allant

des teintes foncées aux teintes claires.

Quand toute la toile sera couverte par ce travail de badigeonnage, vous prendrez un tampon, fait avec de vieux chiffons, et vous fondrez les teintes les unes dans les autres, estompant le tout, retouchant au pastel et estompant de nouveau les parties mal venues.

Ainsi appliqué, le pastel adhère très suffisamment à la toile pour ne plus s'effacer, et vous pouvez ainsi confectionner, à votre guise, et beaucoup plus sûrement qu'en peignant à la colle, tous les fonds qu'il vous plaira si vous êtes amateurs de fonds peints en photographie, lesquels, pour ma part, je regarde comme étant tout ce qu'il y a de plus vieux jeu.


188

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

LA PHOTOGRAPHIE ORNEMENTATIVE

La variété de l'ornementation dans les appartements est augmentée par ces fameux rideaux de verre, qui obtiennent en ce moment un si grand succès. Ils sont formés, dans le commerce, par de petits cadres métalliques s'accrochant les

une aux autres et supportant des verres colorés de diverses teintes. Mélangés ave goût, ils constituent des vitraux, avec cet avantage que ces vitraux peuvent se soulever, se relever, presque se draper, comme s'ils étaient en simple mousseline, la fameuse sainte mousseline de la famille Benoîton.

M. F.-M. Richard a vu là un moyen pratique de monter les diapositives pour l'ornementation des appartements, surtout quand on emploie les photo-jumelles J. Carpentier, qui nous font rapidement possesseurs d'une multitude de petits phototypes. Sur sa demande, l'inventeur du procédé, M. Ilérard, a établi des cadres spéciaux, à feuillures assez larges pour recevoir à la fois la diapositive, un verre dépoli

Rideau de verre drapé.


FABRICATION DUNE LAMPE A ACÉTYLÈNE.

189

et un verre protecteur. On fait couramment des cadres métalliques pour les formats 4,5xG et 6,5x9. De petits crochets permettent aux cadres de s'accrocher les uns aux autres. Avec la possibilité que l'on a aujourd'hui d'obtenir

des diapositives à tons variés, on peut agencer chez soi des rideaux de verre du plus pittoresque effet.

Détail d'un cadre.

Assemblage des cadres.

FABRICATION D'UNE LAMPE A ACÉTYLÈNE.

Les propriétés éclairantes de l'acétylène qui ont excité si vivement la curiosité pendant l'année qui vient de s'écouler, trouveront certainement leur emploi dans la photographie. Or mon excellent confrère de la Science illustrée, M. G. Teymon, nous décrit un petit appareil que chacun peut construire à peu de frais, et qui constitue une lampe à acétylène d'un maniement délicat, mais qui permet de juger de l'extraordinaire puissance éclairante de ce gaz, quinze l'ois supérieure à celle du gaz ordinaire d'éclairage.


190 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Le dégagement de l'acétylène se produit par le seul contact de l'eau. Qu'on laisse tomber, dans un verre d'eau, gros comme un pois de carbure de calcium, aussitôt des bulles montent à la surface en grande quantité. Une allumette approchée de l'accumulation des bulles fournit une série de lueurs successives. Il s'agit seulement de régulariser cette effervescence trop rapide, et d'obtenir un écoulement à peu près régulier du gaz. L'appareil figuré par notre gravure (Voir page 192) donne, à peu de frais, un résultat satisfaisant.

Il faut d'abord se procurer une poterie semblable à celle dont on use pour la confection des éléments de pile électrique. Celle qui est représentée ici est supposée en verre, car l'hypothèse de la transparence rend le dessin plus explicite.

On choisit alors une de ces bouteilles qui servent de corps aux lampes ordinaires. Ces bouteilles ou gourdes sont ouvertes à chaque extrémité pour qu'on puisse fixer en haut le bec d'éclairage, en bas, l'embasement qui sert d'assiette. On découpe alors un liège de grandeur suffisante, pour obturer l'orifice supérieur. Un bouchon de bocal remplit l'orifice, et, pour le rendre moins perméable, on peut l'enduire de cire ou de paraffine, que l'on étale et que l'on égalise au moyen d'une tige de métal chauffé.

Dans ce liège, on perce régulièrement un trou pour le passage d'un tube de fer, qui se termine en brûleur, avec un robinet pour régler ou arrêter le passage du gaz. A la rigueur, on peut se servir d'un tube de verre étiré et aminci, de façon à ne laisser qu'un étroit passage, qui ne sera jamais d'assez petite dimension, car lorsque l'acétylène ne brûle qu'imparfaitement, sa flamme s'accompagne d'une abandante émission de fumée et de suie. Si l'on ne veut s'astreindre à se précautionner d'un bec à brûleur et à robinet, si l'on se méfie de la fragilité du verre, on prend un tube de fer que l'on bouche par un tampon également de fer, dans lequel on perce un trou vertical avec le drille armé d'un très petit foret. Ne pas oublier que l'acétylène attaque le cuivre.


FABRICATION D'UNE LAMPE A ACÉTYLÈNE. 191

Cela fait, à peu de distance du trou destiné au passage du tube, on en perce un second dans lequel on entre, à frottement dur, une tige de fer de mince échantillon. A l'extrémité inférieure de cette tige, on fixe un petit panier fabriqué au moyen d'un morceau de toile métallique de 0m,02 à 0'",03, en carré, que l'on estampe en creux, ce qui se fait assez facilement en appuyant et en frottant avec un objet dur de forme sphérique. C'est ainsi que les ouvrières en fleurs artificielles gauffrent les pétales d'étoffe ou de papier. Le petit panier ou corbeille bien arrondi est attaché à l'extrémité inférieure de la tige ; on recourbe en crochet le bord supérieur de cette même tige, pour offrir une meilleure prise à la main. L'appareil est alors complet, on peut passer à la production du gaz.

Lajarre est emplie d'eau ordinaire, jusqu'à 0m,07 ou 0m,08 du bord ; la petite corbeille reçoit quelques fragments de carbure de calcium ; le bouchon est bien fixé sur la bouteille de lampe; le tuyau de robinet est solidement assujetti; onplonge alors la bouteille dans la poterie et l'on amène la corbeille de toile métallique, et le carbure qu'elle contient, jusqu'à ce qu'ils affleurent l'eau qui est entrée dans la bouteille ; le dégagement de l'acétylène est immédiat. Avant d'allumer, il faut attendre que l'air contenu dans le haut de la bouteille soit complètement expulsé, car, uni à l'acétylène, il constitue un mélange explosif assez redoutable. On reconnaîtra que l'acétylène sort pur du récipient quand l'odeur sui generis de ce gaz sera plus forte. Cette odeur est désagréable et malsaine à respirer. Quoi qu'il en soit, on allumera alors, au moyen d'une longue mèche, pour plus de prudence.

La lumière qui se produit est éclatante ; elle garde son éclat pendant quelques minutes, puis cet éclat s'affaiblit pour briller de nouveau. Lorsque le gaz s'est accumulé dans le haut de la bouteille, il refoule l'eau et le panier au carbure émerge. La production s'arrête; le gaz se détend peu à peu ; la flamme baisse et l'eau remonte, jusqu'à ce qu'elle atteigne le carbure de calcium en déterminant un


192

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

nouveau dégagement, On comprend la nécessité qui s'impose d'ajuster serré dans le bouchon la tige qui porte le panier au carbure, car si elle glisse, le dégagement instantané de l'acétylène est tellementviolent qu'il, forait déborder

l'eau du récipient, tout au moins, s'il ne causait un accident plus grave. La circonspection la plus grande s'impose donc dans cette manipulation. »

Une lampe à acétylène.

FIN DE LA TROISIEME PARTIE


QUATRIÈME PARTIE APPLICATIONS

LA PHOTOGRAPHIE DE L'INVISIBLE

( A Il AN ET 1". P II OTO OU AI'III K)

Vous connaissez tous les tubes de Geissler, soit pour vous en être amusés, soit pour les avoir vus le soir aux vitrines des opticiens, fixes ou gironnants sous l'impulsion de minuscules moteurs. Ce sont, au demeurant, de simples tubes de verre, droits ou tortus, et dans lesquels on a raréfié, à un degré plus ou moins grand, le gaz qu'ils contiennent : air, hydrogène, oxygène, etc. Dans la matière qui les forme sont soudées des armatures métalliques. Si l'on met chacune d'elles en communication avec chacun des pôles d'une bobine d'induction, le courant d'électricité qui traverse alors les tubes produit des lueurs de couleurs variées, suivant la nature du gaz emprisonné dans les tubes.

Quand le constructeur allemand Geissler fabriqua ces ' tubes, auxquels d'ailleurs il a laissé son nom, il ne songeait guère, je présume, qu'à faire un petit instrument démonstratif pouvant constituer un jouet pour l'amusement des enfants. Assignation, du reste, que la suite des ans lui ont déterminée.

Mais dans notre siècle, tout de recherches scientifiques, il n'est point de jouet ou d'idée de roman qui ne serve de point de départ aux études des savants. La liste en serait même curieuse adresser et féconde en enseignements. Si le Nautilus des Vingt mille lieues sous les mers de M. Jules Verne a été le point originaire du Goubet, les tubes de Geissler sont l'embryon d'une des découvertes les plus extraordinaires et la plus importante peut-être de ce

2t>


194 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

xix° siècle, près de finir, et si riche déjà en découvertes produisant et qui peuvent produire beaucoup.

Vous avez lu, dans le journal quotidien que vous achetez chaque matin, qu'un savant professeur de mathématiques, M. Poincaré, avait mis sous les yeux des membres de notre Académie des Sciences des épreuves photographiques représentant, entre autres, le squelette d'une main photographié ■à travers cette main même.

Quand je dis photographié, je mo conforme aux termes employés dans la communication, mais ce serait peut-être bien radiographié ou effluviographié que je devrais plutôt écrire, ou quelque autre vocable approchant, car il s'agit là d'un genre de fixation de l'image tout particulier, et qui n'a rien de commun avec la fixation du phénomène de la chambre noire, puisqu'il n'est plus question, dans l'espèce, ni de chambres noires, ni d'objectifs.

Au sens général du mot, je sais bien que la photographie est l'art qui consiste à reproduire l'image des objets sur des supports plus ou moins variés et recouverts d'une matière sensible en se servant de la lumière pour faire naître ces images. Dans une acception plus spéciale et aussi plus communément répandue, la photographie est, comme je viens de le laisser entendre, la fixation sur une matière sensible du phénomène produit par la lumière dans la chambre noire. Or, dans les images présentées par M. Poincaré à l'Académie des sciences, il n'est point question de chambre noire et l'on ne sait pas encore s'il est vraiment question de lumière, au sens propre du mot.

Donc, si le terme photographie doit rester applicable dans ce cas, il faut lui donner un qualificatif très spécial, et qui détruise les confusions, déjà trop nombreuses, que son emploi, pur et simple, a fait naître même dans les meilleurs esprits. On pourrait, par exemple, employer l'expression aphanètèphotographie, signifiant photographie de l'invisible.

Si les images présentées ont été fixées sur un support recouvert d'une matière sensible, sur une plaque identique


LA PHOTOGRAPHIE DE L'INVISIBLE. 19Î3

à celle que nous employons en photographie, elles l'ont été abstraction faite de toute chambre noire, de tout objectif et par l'action de rayons invisibles. C'est la constatation de l'existence de ces rayons invisibles qui constitue l'étonnante découverte communiquée au monde savant.

Et maintenant que je crois avoir suffisamment précisé pour éclairer la religion de ceux qui demandent à chaque instant : quelle chambre noire faut-il employer? de quel objectif dois-je me servir pour obtenir des photographies à travers les corps opaques? reprenons la question ab ovo. Depuis longtemps, déjà, il est d'une admission courante qu'il existe dans la nature trois sortes de rayons : les lumineux, les caloriques, les actiniques. Ainsi on a supposé que les rayons actiniques produisaient une action sur les plaques photographiques alors que les rayons lumineux, d'une nature différente, affectaient l'oeil seulement. Pourtant il a été constaté que les rayons susceptibles de donner lieu à la vision sont susceptibles aussi d'échauffer un corps et. de donner lieu à un travail photographique. En un mot, tous les rayons ont des propriétés caractéristiques similaires. Nous devons donc admettre qu'il n'existe point d'ondulations spéciales de l'éther pouvant être appelées lumière. Ce que nous désignons par cette expression n'est, en réalité, qu'un phénomène physiologique n'existant pas en dehors des yeux.

Qu'est-ce qu'une plaque photographique? Un composé chimique instable, modifiable soit par une pression mécanique, soit par la chaleur, soit par les ondes et l'éther. La longueur d'onde qui convient, pour modifier une plaque, dépend de la nature de la couche impressionnable de cette même plaque. Elle n'est point la même pour un fruit ou pour la peau. Cependant la coloration des fruits et le tannage de la peau sont, à tout prendre, des processus photographiques. Le démontrer est chose aisée. D'ailleurs, la légende ne place-t-elle pas le germe de la photographie moderne dans la célèbre anecdote des pèches à initiales ? Or, l'électricité étant propagée dans l'air sous forme


196

LES NOUVEAUTES PHOTOGRAPHIQUES.

d'ondes semblables à celles de la lumière, mais plus larges, on est en droit de supposer que tous les effets de la lumière peuvent être obtenus avec des appareils électriques convenables. En d'autres termes, si les ondes de l'électricité sont trop grandes pour être saisies par l'oeil, elles peuvent néanmoins

néanmoins les produits chimiques comme le fait la lumière.

Il est une expérience de laboratoire qui consiste à placer une pièce de monnaie sur une lame de verre et à faire traverser la pièce par quelques étincelles d'une machine électrique. La pièce retirée, la lame de verre ne paraît avoir subi aucune modification. Cependant, si vous halenez sur sa surface, vous verrez aussitôt se dessiner l'image de la

Impression d'une plaque par le cathode rayon.

Le cathode rayon et l'expérience de M. Lenard.


LA PHOTOGRAPHIE DE LINVISIRLE.

197

pièce sur la matité du verre halené. Par le passage des étincelles électriques il y a eu engravure de la pièce. En se

rappelant cette expérience, il était à présumer qu'on aurait une épreuve photographique en substituant une feuille de papier sensible à la lame de verre.

L'expérience a démontré la vérité de cette présomption.

Image radiograpliique du squelette d'une main prise au travers des chairs par la pénétration des rayons X ou rayons ROntgen.


198 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Une médaille d'or a été placée sur une substance sensible à la lumière et enfermée dans une boîte parfaitement étanche aux rayons lumineux. Des étincelles électriques ont été produites par une machine de Holtz ou des jarres de Leyde. Les ondes déterminées par le passage des électrodes de la machine ont été suffisamment courtes pour affecter la surface photographique qui a pu être développée ensuite à la façon ordinaire. C'est ainsi que M. Draper, de New-York, obtenait déjà, en 1840, des épreuves daguerriennes ; c'est ainsi que M. Brook soumettait, en 1877, à la Société photographique de Londres, des épreuves obtenues dans l'obscurité complète.

Un phénomène d'espèce semblable sont les raies lumineuses émanant de la cathode, ou pôle négatif, dans vin tube de Geissler. Il y a quelque vingt ans, M. Hittorf, à Munster, on Westphalie, et M. Goldstein, à Berlin, observaient que, dans les tubes de ce genre, la lumière, visible à l'oeil, allant d'une électrode à l'autre, était due à un vide imparfait dans ces tubes, et que plus le vide s'accentuait, plus cette lumière s'affaiblissait, jusqu'à disparaître complètement lorsque le vide était complet. Us reconnurent encore qu'à ce moment le verre du tube devenait fluorescent et prenait une jolie couleur vert émeraude intermittente. Ils en conclurent que cette fluorescence provenait de décharges oscillatoires de rayons invisibles dont la cathode était le point d'origine. De là le nom de rayon cathodique donné à cette lumière.

M. Crookes reprit ces études et les mena avec une assez grande continuité. Quand il en fit part à la British Association, il omit de signaler les travaux de ses devanciers, omission qu'il répara plus tard, le 30 mai 1879, dans le Chemical News.

Toutefois, l'omission originaire porta fruit. Les rayons cathodiques s'appelèrent aussi rayons de Crookes et surtout le tube de Geissler, avec le vide parfait, prit définitivement le nom de tube de Crookes.

M. Hertz, physicien allemand, reprenant et continuant


LA PHOTOGRAPHIE DE L'INVISIBLE. 199

ces expériences, démontra, en 1889, que les rayons cathodiques peuvent traverser plusieurs feuilles de métal mince, bien qu'elles soient, séparément, imperméables à la lumière. Ce fut, en réalité, M. Lenard qui établit d'une façon définitive, dans trois mémoires insérés aux Annales de Wiedemann, années 1894 et 1895, que les rayons cathodiques, se produisant dans des milieux extrêmement raréfiés, étaient susceptibles d'en sortir et de se propager à travers tous les corps ; que, dans l'air, ils se manifestaient par des phénomènes de fluorescence et d'impression de la plaque photographique ; et d'autres choses encore qui relèvent de la physique générale pure.

Notre gravure, page 196, représente un des dispositifs de M. Lenard. En Acst l'anode, cylindre de métal, enfermée dans le tube vide E. En C est la cathode, plaque circulaire de métal également enfermée dans ce tube vide. L'anode est en rapport avec le pôle positif; la cathode avec le pôle négatif d'une bobine de Ruhmkorff I. Le tube est enfermé dans une boîte de métal G. Une petite feuille d'aluminium, formant vitre, constitue la paroi extrême de gauche du tube. Bien que cette feuille soit opaque pour les rayons lumineux ordinaires, les rayons cathodiques la traversent et ressortent au dehors de la boîte, en une sorte de buée lumineuse comme l'indique notre gravure. Or, M. Lenard a démontré que ces rayons sont susceptibles d'impressionner une plaque photographique, môme si elle est enfermée dans une boîte, comme l'indique notre figure 2.

Dans cette figure, P est la plaque placée contre une demi-cloison de métal épais. La boîte est mise devant la buée lumineuse des rayons cathodiques. Ceux-ci pénètrent les parois de la boîte de telle sorte que si, au bout d'un certain temps, on développe la plaque, suivant les méthodes photographiques, on constate très nettement sur elle une impression, comme on le voit en P' sur la gauche de la figure 2. M. Lenard reconnut également que les rayons cathodiques excitent à un très haut degré les corps phosphorescents sur lesquels ils tombent; ainsi, par exemple,


200

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

une feuille de papier de soie, trempée dans une solution do platino-cyanure de baryum, prend, sous l'action des rayons cathodiques, une belle teinte phosphorescente.

De tous ces faits, il résulte que l'illumination d'un tube à vide donne lieu à une production d'oscillations électriques sur la nature desquelles on n'a pas encore une idée bien fixe. M- Crookes a voulu y voir la matière radiante déjà entrevue en 1816 par Faraday. D'après l'expérimentateur anglais, les phénomènes se passant dans des vides très grands seraient dus à un transport de molécules dans un état spécial, chargée négativement par la cathode, se mouvant en ligne droite, restant obscures sur tout le parcours de leur trajectoire, mais rendant phosphorescents les corps qu'elles frappent, par l'effet de la vitesse énorme avec laquelle elle se propage.

MM. Hertz etWiedemann ont battu en brèche cette hypothèse de la matière radiante et ont émis l'idée que les phénomènes des tubes de Crookes étaient plutôt dus à des oscillations analogues à celles de la lumière.

La question en était là vers la fin de l'année 1895, lorsque le professeur Rontgen, à Wurzbourg, en Bavière, répétant et continuant les expériences sur ce sujet, observa qu'une main interposée entre un tube de Crookes en fonction et une plaque photographique n'arrêtait pas complètement tous les rayons cathodiques, que les parties molles restaient transparentes, que les os, au contraire, se montraient opaques, et qu'en un mot on pouvait avec un tube de Crookes obtenir, sur une substance ordinairement sensible à la lumière, l'ombre portée par le squelette de la main. M. Rontgen donna le nom de rayons X h ces rayons invisibles et pénétrants. Ce fut alors à qui répéterait cette expérience dont le résultat semblait si paradoxal, et il n'est guère, à l'heure qu'il est, un laboratoire de physique qui n'ait fait sa petite photographie à travers les corps opaques. Les rayons X sont-ils, comme l'estime M. Rontgen, essentiellement différents des rayons cathodiques do M. Lenard? Sont-ils, au contraire, de même nature avec certaines parti-


LA PHOTOGRAPHIE DE L'INVISIBLE.

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cularités nouvelles? Nous laisserons à la haute science le soin d'en décider. Je me contenterai de consigner certaines caractéristiques curieuses de ces mystérieux rayons.

Ainsi les rayons X ne sont ni déviés par l'aimant, ni réfractés par les prismes, ni converges ou diverges par les lentilles, ni réfléchis par les miroirs; ils déchargent instantanément un électroscope à lames d'or. Si l'on place sur une plaque photographique des lames de platine, de plomb,

26

Le docteur Rontgen.


202

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

de zinc, de cuivre et d'aluminium, on observe que, s'il n'y a aucune impression sous l'aluminium, il y en a, mais à valeur inégale, sous les autres métaux. En comparant ces différentes valeurs, on remarque que la vitesse de pénétration semble être en raison inverse de la densité du métal.

Si, dans une épaisse lame de plomb, vous faites à l'emporte-pièce des évidements circulaires, que vous recouvriez chacun d'eux d'un morceau de gélatine, coloré l'un en rouge, l'autre en vert, celui-ci en bleu, celui-là en jaune, etc., etc., que vous laissiez une ouverture libre et que vous placiez le tout sur une plaque photographique pour l'exposer à l'action des rayons X, vous ne pourrez, après développement, constater la moindre différence entre la teinte des images données par les évidements circulaires. Donc les rayons X semblent traverser avec la même vitesse tous les milieux colorés.

Voulez-vous faire agir les rayons X sur un lorgnon placé sur plaque photographique? Vous constaterez que les verres dudit lorgnon se comporteront comme une substance considérablement plus opaque que l'acier formant la monture de ce môme lorgnon. Donc les rayons X ne traversent le verre que péniblement. Cela vous montre tout de suite que dans la photographie des corps opaques il ne saurait être question de l'emploi d'un objectif.

Ce sont là des faits généraux dont la somme s'augmente chaque jour un peu, et dont l'ensemble finira par déterminer nettement, il faut l'espérer, la nature des rayons X dans lesquels, de prime abord, le professeur Rontgen se refuse à reconnaître soit des rayons ultra-violets, soit des rayons purement cathodiques, ceux-ci étant déviés par l'aimant alors que les rîiyons X ne le sont pas ; ceux-là étant réfrangibles alors qu'un prisme n'a pas d'influence sur la marche des rayons X. On a cru toutefois remarquer qu'ils étaient déviés par un prisme d'ébonite ou d'aluminium, mais la déviation est tellement minime que le fait lui-même peut être mis en doute.


LA PHOTOGRAPHIE DE L'INVISIBLE.

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Quand au mode opératoire il reste tout ce qu'il y a de plus simple au monde. La seule difficulté consiste à se procurer un bon tube de Crookes, généralement formé par une ampoule sphérique de 0"',10 à 0m,15 de diamètre. Tous ceux vendus, sous ce nom, dans le commerce sont souvent loin, en effet, de présenter la qualité désirable et nécessaire, c'est-à-dire un vide assez absolu pour que la décharge électrique, produite dans le tube, détermine le phénomène de la fluorescence verdàtre des rayons cathodiques. En dehors de la perfection du vide, la nature du verre employé joue aussi un certain rôle.

Ceci obtenu, on n'a plus à compter qu'avec la tension du courant électrique. Une batterie de six piles au bichromate de potasse pouvant développer dans une bobine de Ruhmkorff un courant de 8 à 15 ampères est tout à fait suffisante.

J'ajouterai encore que les rayons X se propageant en ligne droite, il est beaucoup plus commode que les électrodes du tube de Crookes soient disposées à angle droit plutôt que dans le prolongement l'une de l'autre. En effet, pour maintenir l'objet à photographier bien perpendiculaire aux rayons X, on pourra se contenter de le placer à plat sur une table, en suspendant au-dessus de lui le tube de Crookes, de façon que l'une des électrodes soit parallèle à cet objet. '

Supposons que nous désirions obtenir le squelette de la main d'une jeune fille, celui d'une grenouille ou de tout autre animal.

Comment pouvons-nous opérer pour obtenir un bon résultat? Rien de plus simple. Nous introduirons comme d'habitude notre plaque dans un châssis dont l'étanchéité à toute lumière visible est parfaitement reconnue. Pour rendre encore l'étanchéité plus parfaite, si possible, nous mettrons ce châssis dans deux ou trois enveloppes de papier noir dit papier aiguille. A la rigueur on peut fort bien se dispenser du châssis et se contenter d'introduire la plaque sensible, purement et simplement dans plusieurs enveloppes


201

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

de papier aiguille. Ce qu'il importe, dans l'un ou l'autre cas, c'est de faire un signe quelconque sur le papier enveloppant afin de nous permettre de reconnaître, à coup

sûr, le côté de la plaque qui est recouvert de la préparation sensible.

Nous avons vu, en effet, que les rayons X traversent difficilement le verre. Il va donc de soi, que pour réduire le temps de pose, et obtenir un bon résultat, nous devrons

GRENOUILLE. (Reproduction d'un phototype obtenu par la méthode Rontgen.)


LA PHOTOGRAPHIE DE L'INVISIBLE.

20o

mettre sur ce côté sensible l'objet à photographier. Cet objet devant être, dans le cas présent, le squelette d'une grenouille, nous poserons donc cette grenouille, à plat.

sur une plaque préalablement posée, à plat, aussi, sur une table.

Au-dessus de cette grenouille et à une distance de 0m,08 à 0m,15, suivant la force électrique dont on dispose, on placera le tube de Crookes, de telle façon que l'une des

GRENOUILLE. (Reproduction d'une photocopie obtenue par la méthode ROntgen.)


206

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

électrodes, si elles sont perpendiculaires l'une sur l'autre, soit, comme je l'ai dit, parallèle à la table. Cependant quelle que soit la disposition de ces électrodes, la cathode devra toujours se trouver à la partie supérieure.

La cathode se reconnaît très aisément, lorsqu'on ferme le circuit électrique, à une légère auréole violacée qui l'entoure. Si donc, le circuit fermé, on s'apercevait que la cathode se trouve à la partie inférieure, au lieu de changer la position du tube de Crookes, on se contenterait d'inverser le courant dans la bobine Ruhmkorff.

Quel que soit le voltage de la batterie de piles au bichromate de potasse, l'appareil est en bon état de fonctionnement, sitôt qu'apparaît, dans la partie du tube de Crookes située près de l'anode, une lueur phosphorescente intermittente et d'un beau vert émeraude.

11 semble être de toute nécessité que cette lueur soit visible pendant la durée du temps de pose. Si, par hasard, elle ne parvenait point à se produire, c'est que vraisemblablement le contact des fils du circuit secondaire de la bobine Ruhmkorff serait mal assuré avec les électrodes du tube Crookes ou que les piles fonctionneraient mal. Au demeurant, pour assurer au mieux du possible, le contact des fils du circuit secondaire, il est bon que ceux-ci constituent des spires à leurs extrémités. Ces spires formeront une manière de ressort suffisant pour atteindre le but.

Au début de l'expérience on peut monter les éléments de la batterie en tension, c'est-à-dire réunir le zinc d'un élément au charbon de l'élément suivant, autrement dit le pôle positif de l'une au pôle négatif de l'autre et ainsi de suite. Sitôt que, par le fait de la polarisation et de l'altération des liquides, l'énergie de la batterie diminue, au point que la phosphorescence cathodique ne se produit plus, on accouple alors les éléments en quantité, c'est-à-dire qu'on relie ensemble, d'un seul et même côté, tous les pôles positifs, et de l'autre côté tous les pôles négatifs, soit donc une réunion en deux groupes de trois éléments chacun. La durée du temps de pose est fort difficile à déterminer


LA PHOTOGRAPHIE DE L'INVISIBLE.

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pour obtenir des résultats parfaits, car elle dépend de la force des rayons X, de leur continuité et de leur plus ou moins grande facilité de pénétration des corps à photographier. Si, par exemple, en une pose de quinze à vingt minutes, on obtient, au développement, le squelette de la grenouille, avec le contour distinct de chacun des os, un certain modelé dans ceux-ci, des stries révélant des tendons et des muscles et une vague indication des chairs recouvrant le tout, on n'aura plus, avec une pose de trois quarts d'heure ou d'une heure, qu'une ombre chinoise charbonneuse de la charpente osseuse dépouillée de tout simulacre d'enveloppe. Nous ne sommes pas près encore, pour ce genre de photographie, de voir éclore un bon tableau de temps de pose.

Toutefois, on peut agir à la manière des artilleurs, réglant leur tir par coups courts et'coups longs, c'est-à-dire photographier en posant peu, renouveler l'expérience en posant trop, et la reprendre en cherchant le meilleur intermédiaire. Si l'on veut s'en tenir à des silhouettes, quinze à vingt minutes suffisent le plus souvent.

Quand ce temps est expiré, vous arrêtez le courant, vous retirez la grenouille de dessus la plaque, et vous allez développer celle-ci dans votre laboratoire obscur exactement comme s'il s\igissait d'une simple plaque exposée dans la chambre noire et sous un objectif.

Tel est le mode opératoire, très simple vous le voyez, de cette aphanètèphotographie.

Je ne vous ai parlé strictement que des rayons X émanant de la phosphorescence cathodique, mais les communications faites chaque lundi à l'Académie des Sciences semblent tendre à démontrer que ces curieux rayons se retrouvent avec leurs qualités découvertes par M. Rontgen, ou avec des variantes, dans toutes les sources de lumière en général. Ainsi le Dr Gustave Lebon les retrouve dans la lumière du gaz et du pétrole, mais il leur donne le nom de lumière noire parce qu'il a constaté qu'ils ne se comportaient point exactement de la même façon que les rayons X.


208 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

M. Murât a mis en évidence que cette lumière noire ou ces rayons Xse trouvaient dans la lumière solaire. Le Dr Zenger, de Prague, croit les reconnaître dans des expériences photographiques, qu'il continue, depuis une vingtaine d'années, dans l'obscurité profonde de la nuit. Votre journal quotidien, à défaut d'un journal scientifique spécial, se fera certainement un devoir de vous signaler tous ces points particuliers. Quant à moi, je les suivrai attentivement pour en grouper tout ce qui s'en dégagera d'intéressant surtout au point de vue technique, de façon, quand viendra le moment, à constituer des monographies intéressantes sur chaque question séparée, et par conséquent à former des suites et des compléments sur cette merveilleuse découverte de la photographie à travers les corps opaques dont les résultats semblent tenir de la magie.

LA PHOTOTELEGRAPHIE

Dès la première moitié de ce siècle, en 1889, si ma. mémoire est fidèle, E. Davy utilisa, les réactions électrochimiques

électrochimiques imprimer des signaux. Une douzaine d'années plus tard, M. Bain construisait un télégraphe impriSchéma

impriSchéma le fonctionnement de l'appareil.


LA PHOTOTÉLÉGRAPHIE.

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mant. Son invention était fondée sur la propriété que possède un courant voltaïque de décomposer le cyanure de

potassium en donnant naissance à un produit coloré, connu sous le nom de bleu de Prusse. Ce produit se déposait sur le papier du récepteur toutes les fois que le courant passait

27

Reproduction d'un dessin obtenu au moyen de lclectro-artographe.


210 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

et pendant toute la durée de son passage. D'autres télégraphes électro-chimiques succédèrent à ceux-là. Ce sont les aïeux du système d'appareils connus aujourd'hui sous le nom de télégraphes autographiques et qui ont reçu une sanction absolument pratique avec le pantélégraphe de l'abbé Gaselli, qui figurait au nombre des curiosités de notre Exposition universelle de 1867.

Le pantélégraphe est un appareil éminemment ingénieux, mettant loin derrière lui tous les autres télégraphes imprimeurs. En effet, il ne se contente plus, comme ceux-ci, de transmettre des signaux en laissant des traces de la dépêche, soit en caractères conventionnels soit en caractères alphabétiques, mais il donne, au poste récepteur, la reproduction fidèle, le véritable fac-similé de la dépêche et au besoin celle de dessins, de cartes, de plans, de portraits. Le récepteur peut donc présenter un document d'un caractère tout à fait authentique.

A prime-vue, la solution d'un tel problème semble la chose du inonde la plus extraordinaire. L'abbé Caselli a su cependant la trouver avec une élégance rare.

S'appuyant, lui aussi, sur la décomposition des sels métalliques par les courants électriques il écrivait sa dépêche, avec de l'encre grasse, isolante, sur une lame d'étain ou une feuille de papier métallisé. Cette dépêche était posée sur la plaque de la station du départ. Sur la plaque de la station d'arrivée on plaçait une feuille do papier, imprégnée d'une solution à base do ferrocyanure de potassium. Deux styles, d'une mobilité extrême, étaient mis, l'un au départ, l'autre à l'arrivée. Dès qu'ils se trouvaient en communication avec la pile et le fil d'une ligne télégraphique, ils pouvaient se mouvoir en décrivant synchroniquement, avec la même vitesse, des lignes parallèles très rapprochées, sur la dépêche et sur la feuille réceptrice. Le mouvement de ces styles était obtenu et régularisé par des pendules afférents à chaque station et oscillant simultanément. Il va de soi qu'il devait y avoir un synchronisme parfait entre leurs mouvements. Non seulement il fallait que les oscillations


LA PIIOTOTÉLEGRAPHIE.

211

fussent isochrones mais encore qu'elles possédassent des amplitudes parfaitement égales. L'abbé Caselli obtenait ce résultat en munissant chacune des extrémités de l'arc que décrivait la masse de fer du pendule, d'un électro-aimant dirigé dans le sens même de l'arc et présentant ses armatures en face de la masse de fer quand celle-ci parvenait

au bout de chaque oscillation à droite ou à gauche.

Ces pendules accomplissaient ordinairement quarante

oscillations par minute. Dans cette période de temps les

styles traçaient donc quarante hachures espacées de 1/3 de

millimètre.

Il est bon d'ajouter qu'avec le pantélégraphe, la netteté

de la reproduction exigeait que l'écriture primitive fut très lisible et en gros caractères.

Ce résultat ne pouvait manquer d'attirer l'attention des chercheurs. Un employé de la télégraphie française, M. Meyer, imagina et construisit un autre télégraphe autographique. Bien que d'un principe différent du pantélégraphe de l'abbé Caselli, il réalisait cependant encore le problème de la reproduction, en fac-similé, des dépêches expédiées.

Les appareils transmetteur et récepteur se composaient de cylindres recevant, d'un rouage d'horlogerie, un mouvement uniforme et régularisé par une lame vibrante. Au transmetteur correspondait un style qui devait suivre toutes les lignes du manuscrit; au récepteur correspondait une hélice saillante dont le pas était précisément égal à la longueur de la circonférence du cylindre transmetteur. Donc toutes les fois que le style du transmetteur rencontrerait des parties isolantes ou des traits de dépêche, le papier

Sections agrandies des deux feuilles de gélatine de l'élcctro-artographe.


212

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

du récepteur, soulevé par une palette, s'appliquait contre la pointe de l'hélice saillante qui, en ce moment, se trouvait sur la génératrice inférieure du cylindre. Cette hélice, constamment imprégnée d'encre grasse par un rouleau, laissait sur une ligne droite, occupant la largeur du papier, une série de points ou de traits noirs reproduisant identiquement

identiquement figure de la ligne rencontrée par le style traceur sur un tour de la dépêche. Inutile d'ajouter qu'au départ et à l'arrivée, les appareils devaient présenter dans leurs mouvements un synchronisme parfait.

Si donc le pantélégraphe de l'abbé Caselli offrait une manière de combinaison du télégraphe électro-chimique de Bain, le pantélégraphe Meyer présentait une sorte de combinaison de celui de Caselli avec certaines parties des systèmes Morse et Hughes.

Ces appareils, qui sont tombés dans l'oubli beaucoup plus qu'ils n'auraient dû, ont été le point de départ d'une invention de M. Amstutz,de Cleveland (Ohio), et qui semble appelée, je l'espère du moins, à une meilleure pratique. Ce

Appareil transmetteur do l'élcclro-arthographe.


LA PHOTOTÉLEGRAPHIE.

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fut vers 1893 que les journaux américains commencèrent d'en parler 1. Mais on peut dire qu'il se trouvait encore un peu à l'état embryonnaire. Il se comprend, du reste, qu'une chose de cette importance n'atteigne pas, de prime coup, à la perfection. Le but de M. Amstutz n'était plus de transmettre

transmettre un appareil électrique des lignes simples, plus ou moins diverses, mais bien des teintes avec leurs infinies variations d'intensité constituant les effets d'ombre et de lumière, et de les transmettre de telle façon qu'elles pussent, servir immédiatement à la reproduction par la typographie.

Dans le système de M. Amstutz, il y a, si je puis m'exprimer ainsi, comme une combinaison du téléphone avec le phonographe. Dans son appareil, qu'il dénomme électroVoir

électroVoir Les Nouveautés photographiques; année 1894, page 219.

Appareil récepteur de l'électro-artographe.


214 LES NOUVEAUTES PHOTOGRAPHIQUES.

artographe, on rencontre, en effet, les caractéristiques des deux appareils que je viens de citer : l'envoi se fait par un courant ondulatoire, comme dans le téléphone; la réception s'effectue sur un cylindre à révolution synchrone enduit d'une couche de cire comme dans le phonographe.

Quant au principe même de l'appareil, au lieu de faire appel à la décomposition des sels métalliques par le courant électrique, comme dans le pantélégraphe Caselli, ou aux encres grasses comme dans le pantélégraphe Meyer, il est basé sur les propriétés de la gélatine bichromatée. Depuis longtemps déjà, on sait que la gélatine, additionnée de bichromate de potasse, devient dure et insoluble après son exposition à la lumière. L'ingénieur américain, partant de cette connaissance, photographie l'image à transmettre sur une pellicule de gélatine bichromatée. L'insolation faite, il suffit de quelques lavages à l'eau tiède pour débarrasser cette pellicule des parties gélatineuses dont l'état moléculaire ne s'est pas trouvé modifié par l'action de la lumière. Il reste alors un dessin en relief, plus ou moins accusé, suivant l'intensité de l'original, mais dont l'épaisseur demeure, en chaque point, exactement proportionnelle au rayon lumineux qui a frappé la gélatine bichromatée en ce même point. Les variations d'épaisseur représentent donc les variations de tonalité du modèle. C'est, vous le voyez, le même principe que celui de la photocollographie. L'image en relief ainsi obtenue est soigneusement tendue sur un cadre de celluloïd et adaptée sur la circonférence d'un cylindre, à la manière d'un cliché typographique quand on fait usage d'une machine rotative. Un style ajouté à un levier est mis en contact avec la surface de cette pellicule et sitôt que le cylindre est entraîné dans un mouvement de rotation, il se lève ou retombe suivant les ondulations de la surface de l'image. Ce style communique au. levier qui le soutient, mais en amplifiant ses mouvements de haut et bas produits dans le plan vertical. Par rapport à l'extrémité horizontale de ce levier, et pouvant être en contact avec elle, se trouvent, en certain nombre, des


LA PHOTOTÉLÉGRAPHIE.

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petits taquets entraînés par un mouvement de rotation autour d'un axe qui les supporte, et appuyant par leurs autres extrémités contre une série de dents.

Par suite d'une dépression dans la pellicule de gélatine bichromatée, le levier se tient à son point le plus bas et tous les taquets pressent contre les dents. Sitôt que le relief se présente au maximum, dans la rotation du cylindre, tous les contacts avec les dents, sauf un, sont interrompus. Donc les degrés dans le relief se mesurent par le nombre des taquets en contact. Par conséquent, plus on pourra mettre de taquets, plus l'électro-artographe sera sensible et mieux il définira les nuances de l'image.

M. Amstutz estime qu'avec dix taquets on peut obtenir toute la sensibilité désirable pour une bonne reproduction artistique, et que ce nombre peut être de beaucoup réduit s'il ne s'agit que d'épreuves destinées au travail courant d'un journal illustré.

Au bureau récepteur se trouve un cylindre identique à celui du bureau transmetteur. Seulement la pellicule de gélatine bichromatée y est remplacée par une feuille de papier recouvert d'une couche de cire ou d'une couche de gélatine ordinaire. En outre, au lieu qu'il y ait un style perpendiculairement en contact avec cette feuille cirée, c'est un burin à section triangulaire qui s'y trouve. La tige de ce burin est placée en face des pôles d'un électro-aimant que la ligne du courant actionne. Le burin creuse dans la cire un sillon continu mais dont la profondeur varie suivant l'intensité du courant qui, elle-même, dépend des reliefs de l'image représentée par la pellicule de gélatine bichromatée. Mais ces sillons, par cela seul qu'ils sont plus ou profonds, laissent entre eux des épaisseurs plus ou moins grandes et forment ainsi, à la surface de la cire, des lignes continues dans leur durée, quoique variant dans leur épaisseur. Si donc on développe sur une surface plane cette pellicule de cire ainsi engravée et qu'on la traite par la galvanoplastie, on obtiendra tout aussitôt un cliché propre à l'impression typographique, par cela même qu'il sera


216 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

constitué par des lignes, dont les parties épaisses ou minces reproduiront, dans leur ensemble, les ombres ou les clairs de l'image originale et sans qu'il y ait d'empâtement.

Plus les lignes seront serrées plus le galvano obtenu sera fin, plus la vérité des nuances sera observée. Or ce serrement des lignes est dû au nombre des taquets dont j'ai parlé plus haut, et pour lesquels M. Amstutz estime qu'un nombre de dix est tout à fait suffisant.

J'ai sous les yeux les épreuves obtenues en 1893. Dans notre dessin (Voir page 209) nousen donnons une obtenue en 1895. Il y a tout un monde entre ces deux images. Les progrès sont merveilleux. Si l'on considère encore que M. Amstutz cherche actuellement à perfectionner son appareil, et pour obtenir une plus grande rapidité et pour le rendre indifféremment utilisable aussi bien avec les courants continus qu'avec les courants alternatifs, on comprendra que nous sommes appelés, par exemple, à voir, le lendemain, dans un journal illustré de Paris, la reproduction d'une photographie prise la veille à New-Vork, sans qu'il soit nécessaire de modifier d'aucune sorte les conditions de la télégraphie existante. C'est là un de ces résultats féeriques dont le xx° siècle semble appelé à voir de si nombreux échantillons.

MOYEN DE PHOTOGRAPHIER DES PIÈCES ANATOMIQ.UES FRAICHES

Ceci est pour ceux qui dirigent leurs études vers les sciences médicales. Ils savent combien il est difficile d'obtenir photographiquement la reproduction de pièces anatomiques fraîches, et combien pourtant cette reproduction serait intéressante pour leurs travaux. Jusqu'à ce jour on soumettait le plus souvent, au préalable, ces pièces au durcissement. Ce mode de procéder, malgré les plus grands soins, pouvait donner lieu à des déformations. Pourtant, sa quasi-nécessité s'imposait, car les pièces fraîches, flasques et sans consistance, ne pouvaient qu'être très difficilement


PHOTOGRAPHIE AU KILOMETRE.

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maintenues dans le plan vertical. Or, le docteur Flatan préconise la position horizontale de ces pièces, en disposant alors la chambre noire de telle sorte que l'axe principal de l'objectif se trouve dans la verticale.

Pour atteindre à ce dispositif, il emploie un trépied très grand adapté à une large planchette percée, en son centre, d'un trou assez large pour laisser passer l'objectif. L'avant de la chambre est tout simplement posé sur cette planchette, et la pièce à photographier mise dans l'écartement du trépied, sur une manière de socle que l'on peut monter ou abaisser à volonté.

Il peut arriver que la pièce anatomique présente des luisants très vifs. Il est bon dès lors d'interposer, entre cette pièce et la lumière, un morceau de papier de soie que l'on fixe, à l'aide de punaises, aux jambes du trépied.

Cette disposition est-elle bien nouvelle? Je ne voudrais pas en parier. Je crois savoir que tout dernièrement, au laboratoire municipal do la ville de Paris, le docteur Ogier a montré un pied analogue, construit en vue de la photographie des cadavres de la Morgue. Qu'importe! C'est en répétant qu'on arrive à se faire entendre.

PHOTOGRAPHIE AU KILOMÈTRE

Si ma mémoire est fidèle, et j'ai tout lieu de la croire telle, dans l'espèce, il y a tout juste une quinzaine d'années que M. Lamy, en France, et M. Morgan (à quelques semaines près), en Angleterre, dotaient la photographie d'un nouveau papier dit au gélatino-bromure d'argent. Avec la manie que l'on avait, à l'époque, des photocopies bien glacées et bien brillantes, manie qui décroît, mais beaucoup trop lentement, hélas! pour le plus grand bien de l'art photographique, le nouveau venu ne fut guère remarqué. Pourtant, il offrait un avantage énorme sur tous les autres papiers photographiques : on pouvait, avec lui, obtenir des photocopies positives très rapidement et à la lumière artifi28

artifi28


218 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

cielle. Un autre avantage, plus grand encore, impossible à constater alors, mais que l'on a constaté depuis et que l'on peut sûrement constater chaque jour, consiste dans la quasi-certitude d'inaltérabilité des images fournies par ce papier.

Dans la première partie des présentes Nouveautés photographiques, je vous signale cette inaltérabilité en vous faisant part d'études récentes.

Malgré cela le nouveau-né attendait son heure. L'agrandissement vint, et l'on sentit que cette heure était près de sonner, car seul de tous les papiers photographiques, celui au gélatino-bromure d'argent permettait et permet d'obtenir directement des photocopies positives agrandies. Avec cet élan, et par conséquent avec une pratique plus mûre de ce papier, il ne fait aucun doute, pour moi, que l'on s'en servira de plus en plus et peut-être, un jour, presque exclusivement pour les photocopies positives obtenues par contact. Je m'en plaindrai d'autant moins que ces photocopies ont le ton de la gravure, qu'on peut les obtenir mates, sur papiers à tout grain, et qu'elles sont parfaitement inaltérables. Toutes conditions dignes d'être prises en très haute considération dès qu'il s'agit d'obtenir, à la fois, une oeuvre d'art et une oeuvre durable.

En attendant cette heure, qui me semble d'ores et déjà très peu lointaine, la rapidité d'impression offerte par ce papier vient de permettre de créer une industrie nouvelle. Elle consiste à imprimer mécaniquement et en nombre considérable des photocopies positives. Certes, nouvelle est cette industrie, mais encore fort peu répandue. Elle ne compte, je crois, que deux... comment dirai-je? deux usines. L'une en Allemagne, où cette industrie a pris naissance, et l'autre aux Etats-Unis.

Examinons-la donc dès maintenant pour avoir toute la primeur de sa nouveauté.

Tel qu'il est dans sa nouveauté, le procédé permet de tirer d'un seul phototype 13x18 et par jour, jusqu'à dix mille photocopies positives, offrant toutes un réel cachet


PHOTOGRAPHIE AU KILOMETRE.

219

artistique, par cela même qu'elles sont impressionnées sur papier au gélatino-bromure d'argent.

Dans une chambre éclairée par une lumière parfaitement inactinique, rouge ou verte, se trouve un rouleau de papier au gélatino-bromure d'argent, mesurant une centaine de mètres de long sur 0m,90 environ de large. Ce rouleau est monté sur un axe horizontal mobile. Parallèlement à ce rouleau se trouve un demi-tambour dans lequel sont rangés les phototypes négatifs. Par un mouvement de rotation, le

papier sensible vient se glisser sur la feuille de verre formant la section de ce tambour, présentant sa face sensible à la face gélatinée de chaque phototype, contre laquelle elle se trouve automatiquement pressée. Le rouleau se déroule, non d'un mouvement continu, mais par intervalles égaux et réglés d'avance. Les temps d'arrêts de ces intervalles sont assujettis au temps jugé nécessaire, à des lampes électriques à incandescence, pour réaliser une exacte impression du phototype sur le papier sensible.

La section du tambour correspond donc ainsi et successivement à une partie nouvelle de la bande de papier.

Dès qu'elle quitte le phototype contre lequel elle est appliquée, la bande de papier, alors impressionnée, passe dans une autre chambre où l'image latente est automatiquement développée, fixée, alunée et séchée. Puis le papier,

Délai! du mécanisme amenant le papier sous la chambre d'exposition.


PHOTOGRAPHIE AU KILOMÈTRE

Chambre d'impression.


PHOTOGRAPHIE AU KILOMETRE

Chambre de développement


222

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

portant ses images complètement terminées, s'enroule sur un dernier rouleau et les épreuves sont coupées, collées et montées sur des cartons, tout comme des photocopies positives ordinaires.

Les vieux collodionneurs, qui cherchent à nous faire croire, quoique le contraire soit facile à prouver, que rien ne vaut les procédés du bon vieux temps, les vieux collodionneurs, dis-je, devront montrer à la lecture de cet aperçu un visage un peu bien étonné, en y joignant des

hochements de tête d'incrédulité et l'esquisse d'un sourire qui essayera tant bien que mal de prendre un air malin et sera, pour eux, le doute le plus parfait.

De fait, cette industrie nouvelle est susceptible d'en étonner beaucoup d'autres; voyons-Ià donc d'un peu plus près.

Notre figure, page 220, représente et la chambre où se fait l'insolation par voie de lumière artificielle, et l'appareil dans lequel cette insolation est faite et dont le détail est visible sur la figure de la page 219. L'axe du rouleau portant le papier est monté sur un support incliné.

Quand les phototypes sont en position, on les recouvre, à l'envers, de caches ou de dégradateurs destinés à vignetter l'image. La difficulté de ce nouveau mode d'impression est de trouver un temps de pose qui soit exact, et le même pour tous les phototypes mis dans lp tambour.

Il ne saurait, en effet, être de prime coup identique pour des phototypes, semblant même présenter, par transpaDétail

transpaDétail la cuve de développement.


PHOTOGRAPHIE AU KILOMETRE.

223

renées, une intensité égale. Il faut donc faire une expérience préalable, et couvrir les phototypes d'une ou de plusieurs feuilles de papier à copie de lettres, pour les rendre tous égaux à l'insolation. C'est la mise en train de ce nouveau mode d'impression.

Elle est forcément très délicate et d'une très grande importance pour le résultat final.

Dans le demi-tambour, constituant la chambre exposante, se trouvent huit lampes électriques à incandescence de trente-deux bougies, reliées contre le mur à un bouton de contact; sur le côté se voit une fenêtre carrée munie d'un verre rouge et permettant de s'assurer que toutes les lampes fonctionnent bien, et à la fois. Une pompe envoie constamment un courant d'air dans cette chambre exposante, afin que la chaleur dégagée par les lampes n'affecte pas la gélatine du papier.

Quand l'exposition est terminée, l'homme de surveillance désembraye sa machine, les lampes s'éteignent, la bande de papier exposée quitte la chambre exposante, est remplacée par une nouvelle bande neuve, simultanément les lampes se rallument, et l'opération recommence. Tous ces mouvements sont automatiques et assez semblables à ceux d'une machine à impression typographique.

Le papier impressionné passe sur plusieurs cylindres pour venir finalement s'enrouler sur un dernier rouleau, face impressionnée en dedans. A l'aide de papier noir enroulé immédiatement après, comme cela a lieu pour les bobines de nos appareils à pellicules, ou de toute autre façon, le rouleau est protégé contre tout rayon actinique et transporté dans la chambre du développement (Voir page 221), où on l'accroche horizontalement sur un support dressé à l'extrémité d'une immense cuve de bois d'une trentaine de mètres de long, rendue étanche et divisée en compartiments par des cloisons également étanches. Le premier compartiment, d'une capacité d'environ cinq à six cents litres, contient un vieux bain de développement à l'oxalate ferreux. Le papier, guidé par trois cylindres de cuivre poli,


224 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

est appelé au fond de la cuve, remonte en son milieu, redescend au fond et ressort, présentant des images à demi développées, pour passer dans un second compartiment contenant un bain développateur frais. Dans ce compartiment, le papier n'est entraîné qu'une seule fois au fond. Quand il en ressort, l'image est complètement développée. Continuant toujours sa marche, le papier vient s'enfoncer dans le troisième compartiment, contenant de l'eau acidulée par de l'acide acétique, afin de neutraliser le fer provenant du développement et infiltré dans la pâte du papier. Pour que cette élimination soit mieux faite, de petites pommes d'arrosoir placées de-ci, de-là, dans le compartiment, pulvérisent encore de l'eau acidulée sur toute la surface de l'image. Le papier passe ensuite dans un quatrième compartiment contenant de l'eau ; dans un cinquième, rempli d'une solution d'hyposulfite de soude; dans un sixième, plein d'eau; dans un septième, où se trouve une solution d'alun, et finalement dans trois cuves d'eau, où sa surface reçoit, comme dans le troisième compartiment, le pulvérin de plusieurs pommes d'arrosoir.

11 est alors entraîné, par une longue corde sans fin, dans la chambre servant de séchoir, dans laquelle circule constamment un courant d'air chaud, et dont la température est telle que le papier, arrivé à l'extrémité de cette chambre, se trouve parfaitement sec.

Les épreuves sont alors coupées et montées. Pratiquement, l'insolation des images dure environ deux secondes, et l'on peut insoler 245 épreuves en une minute. Avec une journée de travail ordinaire de dix heures, on produit 157,000 épreuves très satisfaisantes, très uniformément venues à point.

Pendant que le papier voyage sur les rouleaux, des ouvriers passent doucement sur sa surface des éponges mouillées, pour enlever toutes les saletés ou toutes les matières organiques qui pourraient s'attacher à la gélatine, soit qu'elles fussent déposées par l'air ambiant ou par les diverses solutions.


Fac-similé d'une épreuve photographique obtenue par M. Maurice Loewy avec l'équatoriul coudé de l'observatoire de Paris.


226 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Il existe dans la chambre de développement un dispositif très curieux qui rend cette chambre éminemment claire, et permet aux ouvriers de vaquer sûrement et sans fatigue à leurs tâches respectives. Cette chambre, en effet, est complètement éclairée par la lumière blanche; seulement, au-dessus de la caisse de développement sont suspendues de fortes lampes à incandescence, envoyant leur lumière à travers un verre rouge. Il y a juste assez de rouge pour neutraliser le blanc ambiant et permettre de continuer le développement sans craindre de voiler le papier.

Je ne sais ce que l'avenir réserve à cette nouvelle industrie, mais il pourrait bien se faire qu'un jour elle servît à l'illustration du livre. La phototypographie serait remplacée alors par la photographie directe. Si les graveurs sur bois voient déjà celle-là d'un mauvais oeil, comment verront-ils l'avènement de celle-ci? Tous les quolibets dont ils chargent la phototypographie cesseront de porter coup, et peut-être que nos neveux, sans même attendre nos arrière-neveux, priseront plus la photographie directe que sa meilleure reproduction par la gravure sur bois.

EMPLOI DES CHAMBRES NOIRES ORDINAIRES POUR LA MICROPHOTOGRAPHIE

Pour nos lecteurs qui sont en même temps photographes et qui aiment les études faites à l'aide du microscope, nous recueillons, dans VInternationale Medisinisch Photographische Monatscrift un moyen pratique de satisfaire leurs goûts.

Les appareils spéciaux pour.la microphotographie sont, en effet, très dispendieux. Or le professeur Morokhovetz, de Moscou, préconise l'emploi d'une chambre noire ordinaire très simple, à laquelle il adapte un microscope aux lieu et place de l'objectif. Les micrographes se servent d'habitude de l'oculaire à projection. Notre professeur qui substitue l'oculaire microscopique ordinaire en suppri-


S ELKNEPH OTOGRAPHIE.

227

mant la lentille la plus rapprochée de l'oeil et en ne conservant que la lentille de champ.

Reste à savoir quelle lumière employer ? C'est bien simple : celle que l'on voudra. Il n'y a, dans son choix, qu'une question de temps dans la durée de la pose. Toutefois que ce soit lumière du soleil, lumière de l'électricité, lumière du gaz ou lumière du pétrole, vous devrez, pour obtenir des images microphotographiques très nettes, en diriger les rayons à l'aide d'une lentille collective de champ.

SELENEPHOTOGRAPHIE

Grâce à l'obligeance de M. Maurice Loewy et à celle de mon excellent confrère, M. Wilfrid de Fonvielle, je puis reproduire le fac-similé exact de l'agrandissement d'une portion de photographie lunaire obtenue avec le grand équatorial coudé de l'Observatoire de Paris (Voir page 225).

L'épreuve a été prise dans la nuit du 13 au 14 février 1898, alors que la Lune était voisine de son premier quartier. Cette épreuve a été soumise à un agrandissement. Les opérations, d'une délicatesse inouïe, ont été exécutées par M. Loewy, son collaborateur M. Puiseux, et son aide M. Le Morvan. Chacun de ces habiles physiciens doit être fier d'avoir contribué à une si belle oeuvre.

En effet, comme le dit très justement M. de Fonvielle, tous les détails visibles avec une lunette grossissant sept à huit cent fois les objets sont reproduits avec une fidélité telle qu'on peut les étudier comme si l'on avait l'astre sous les yeux. Onpourra ainsi, en répétant l'opération dans un nombre quelconque d'années, comparer ce qu'était la Lune à deux époques différentes, étudier àloisirles moindres différences, se rendre compte des changements d'éclairage, de transparence de l'air, et par conséquent savoir s'ils tiennent à ce que le relief du terrain a été modifié, à ce que l'atmosphère de la Lune est devenue brumeuse ou même à ce que la surface s'est couverte de quelque végétation. Quant à décou-


228 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

vrir les traces de l'action intelligente d'un être jouissant de facultés analogues à celles de l'homme, il faut y renoncer, car nous sommes bien loin de la Lune à 1 mètre, dont quelques rêveurs, que l'on chansonne maintenant, voulaient faire un des clous de l'Exposition de 1900. Chaque millimètre de notre figure représentant, sur la Lune, une longueur de A kilomètres, la base de la grande pyramide d'Egypte n'y posséderait pas la surface d'une pointe d'aiguille.

l-IN 1)K LA QU.VriUKME PARTIE


CINQUIÈME PARTIE

VARIETES

LA PLUS GRANDE CHAMBRE NOIRE DU MONDE

Je ne crois pas qu'il existe de chambre noire d'un format supérieur à celle qu'on signale en Irlande.

Elle appartient à M. A. Werner, photographe de Dublin. Il s'en sert pour obtenir des portraits en grandeur nature. Oh ! l'Art en photographie par les petites épreuves ! Que devenez-vous ?

Cette chambre ne mesure pas moins de 2m,40 de hauteur, de 1 mètre de largeur et de 3 mètres de longueur. Elle est montée sur de très fortes roulettes. On dirait une cahute de berger dans la montagne, ou quelque chose ressemblant aux anciens laboratoires portatifs dont on se servait aux temps, lointains déjà, du collodion humide.

Une personne peut s'y tenir et, de fait, l'opérateur y pénètre à son aise par une double porte. C'est ainsi qu'il vient appliquer, dans le cadre destiné à la recevoir, la glace sensible, préalablement recouverte d'une toile imperméable à la lumière. Afin de ne point aller à l'aveuglette, l'objectif est recouvert d'un verre rouge, mobile et parfaitement vérifié au spectroscope. Quant à la glace dépolie, elle est absente. La plaque sensible étant assujettie dans son cadre, c'est sur la surface elle-même que s'effectue la mise au point, le verre rouge masquant toujours l'objectif. Je doute, à moins de posséder un objectif d'une très grande épaisseur de surface focale et présentant un foyer chimique très exactement le même que le foyer optique, je


230 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

doute que cette mise au point puisse être extrêmement rigoureuse, attendu que la lumière rouge n'a pas des longueurs d'onde semblables à celles de la lumière blanche.

La mise au point faite, l'opérateur sort de la chambre et fait agir le mécanisme qui commande le verre rouge. L'image reçue sur la plaque devient dès lors photogénique, et le même verre rouge sert de bouchon à l'objectif dès que la pose estterminée. L'opérateur rentre dans la chambre, réintègre sa plaque dans son voile noir et s'en va au laboratoire.

Mon correspondant oublie de me donner les dimensions des cuvettes employées alors pour le développement, le fixage et le lavage. Elles doivent être, à tout prendre, d'assez jolies petites baignoires.

ESSAI DE LA GLYCÉRINE

Au temps du collodion, la glycérine servait à maintenir

humides les glaces collodionnées. On l'employait égale.

égale. avec le bain de fer pour obtenir plus d'intensité et

aussi à la préparation du papier albuminé, bien que, dans

ce cas, elle retarde un peu l'action du virage.

Dans les commencements du gélatino-bromure on sembla la délaisser. Peu à peu elle revint dans le Laboratoire. On la trouva propre à l'assouplissement des plaques gélatinées : on découvrit même qu'elle servait d'antiseptique pour la gélatine. On se souvint qu'elle constituait un assez bon conservateur pour l'acide pyrogallique et ses isomères. On la toléra donc ; on la garda ; on se mit à refaire bon commerce avec elle ; si bien que maintenant on la rencontre un peu partout dans les préparations les plus diverses.

C'est parfait. Toutefois nous ne devons pas perdre de vue que ce produit secondaire des bougies stéariques et des savons ne se présente pas toujours, dans le commerce, avec la pureté chimique nécessaire pour les manipulations pho-


ESSAI DE LA GLYCERINE.

231

tographiques. D'abord, par cela même qu'elle contient de l'eau, on la rencontre à divers degrés, généralement 28° en France ou en Italie, 26° en Allemagne. Il est facile, d'ailleurs, de pourcenter sa teneur en eau par la formule connue

cl étant la densité de l'échantillon essayé, P sera le poids de l'eau qu'il contient.

On peut encore, la densité déterminée, chauffer à l'étuve à une température constante de 110", pendant une heure, en pesant avant et après le passage à l'étuve.

La recherche et le dosage des matières organiques se fait à l'aide du sous-acétate de plomb. Ajouté à la glycérine, augmentée du double de son poids d'eau, il donne un précipité d'autant plus abondant que la glycérine est moins pure.

Si, additionnée d'oxalate d'ammoniaque elle donne, un précipité blanc, c'est qu'elle contient de la chaux.

Une solution de chlorure de baryum décèle les sulfates, les sels de plomb et l'acide sulfhydrique.

La fraude la plus courante est l'addition de glucoses pour les glycérines blanches, les seules que l'on emploie en photographie. Si alors vous agitez le produit en le mélangeant avec du chloroforme, il y a immédiatement dislocation des produits : la glycérine pure étant insoluble dans le chloroforme.

Mais, me direz-vous, tout cela est un peu bien... chimique et nous autres amateurs, nous faisons en somme beaucoup plus de... cuisine que de chimie réelle. Partant il nous faudrait un moyen qui... que... Patience ! Nous avons satisfait les chimistes, nous allons satisfaire les... autres. Primo, une glycérine chimiquement pure doit être neutre au papier de tournesol. Rien de plus facile à constater. Secundo, plus une glycérine est impure, plus elle mousse avec l'eau distillée et plus cette mousse est durable.

Si donc il vous faut choisir entre plusieurs glycérines,


232

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

d'aspect semblable, il vous suffira de mettre dans un tube à essais parties égales d'eau distillée et de glycérine et d'agiter le tout vigoureusement. La mousse la moins épaisse et la moins tenace proviendra de la glycérine la plus pure. C'est très empirique, mais très juste et très certain. Un essai chimique ultérieur pourra le prouver aux disciples de saint Thomas.

LES EFFETS DES TORPILLES SOUS-MARINES

J'emprunte au Génie civil, qui le tient lui-môme de l'Amérique, une intéressante application de la photographie instantanée.

On sait que, pendant la guerre de Sécession de l'Amérique

l'Amérique Nord, les États du Sud, dont la flotte était peu nombreuse, firent grand usage de torpilles et de mines sous-marines. Ils employèrent, au début, pour le chargement de leurs engins, de la poudre de guerre ordinaire ; mais l'expérience démontra bientôt que la poudre à grains

Essai de destruction d'une torpille Sims à l'aide des boites à cartouches.


LES EFFETS DES TORPILLES SOUS-MARINES.

233

fins était bien préférable, comme résultats obtenus, à celle à gros grains. Dans une expérience comparative, faite à ce sujet, une charge de 23 kilogrammes de poudre fine souleva, par son explosion, une colonne d'eau de 70 mètres

de hauteur, tandis que le même poids de poudre à gros grains, placé dans les mêmes conditions d'expérience, ne produisit, en explosant, qu'une colonne d'eau de 21 mètres de hauteur et de même diamètre que la précédente ; la couleur foncée que prit l'eau, après cette dernière expérience, montra qu'une partie delà charge n'avait pas été consumée. Les meilleurs résultats sont obtenus par des explosifs

30

Effet produit par Mi kilogrammes de charge.


234

LES NOUVEAUTES PHOTOGRAPHIQUES.

brisants, tels que la dynamite et le fulmicoton. Ce dernier, lorsqu'il est humide, étant très facile à manipuler et à conserver, est presque exclusivement employé pour la confection des torpilles et des mines sous-marines ; on l'amorce ordinairement avec une faible charge de fulmicoton sec. La

puissance explosive du fulmicoton est environ six fois plus grande que celle de la poudre ordinaire ; dans la pratique, on suppose ce rapport égal seulement à 4/1.

Le problème consistant à déterminer la charge d'explosif nécessaire pour faire sauter un navire dans des conditions données semble, en théorie, assez facile ; cependant on a été obligé, dans la pratique, de recourir à des expériences souvent très coûteuses et la plupart du temps tenues secrètes

Effet produit par 108 kilogrammes de poudre à obusier.


LES EFFETS DES TORPILLES SOUS-MARINES. 235

par les États qui les ont faites. Voici pourtant quelques indications.

La figure de la page 232 représente un essai de destruclion d'une torpille à l'aide de boîtes à mitraille : à 10 mètres au-dessus du niveau de la mer, on avait placé un obusier lançant, à environ 180 mètres, une charge à mitraille composée

composée projectiles; la torpille ne put être atteinte, même avec plusieurs décharges successives. La photographie a été prise au moment où les projectiles rencontraient les surfaces de l'eau.

La figure de la page 233 montre le résultat obtenu par l'explosion d'une torpille sous-marine chargée avec 45 kilogrammes d'un mélange d'explosifs divers et placés à5m,500 sous l'eau, la profondeur de la mer étant de G™,800. L'appareil

Effet produit par .'i;> kilogrammes de dynamite.


236 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

photographique se trouvait placé à environ 180 mètres du point d'explosion. La hauteur de la colonne d'eau soulevée a été de 33 mètres ; cette colonne indiquait surtout la présence, dans sa masse, d'une grande quantité de vapeur d'eau.

La figure de la page 234 représente une colonne d'eau de 84 mètres de hauteur obtenue par ''explosion d'une charge formée de 108 kilogrammes de poudre à obusier et placée à 2,u,40 sous l'eau. L'appareil photographique était éloigné de 210 mètres du point d'explosion.

On fit, en procédant à la destruction de la goélette Olive Brandi, une expérience très intéressante. On avait suspendu, à 0"l,910 sous la quille de ce navire, deux torpilles distantes entre elles de 3 mètres environ et qui se trouvaient ainsi à 2"',100 sous l'e^au ; la profondeur de l'eau à l'endroit où l'explosion se produisit était de 4m,500. La charge de chaque torpille se composait de 22 kgr 5 do poudre à obusier. La flamme du grand mât se trouvait à 20 mètres au-dessus du niveau de l'eau. Un dixième de seconde après l'explosion, la colonne d'eau soulevée atteignait 22 mètres, après 1/5 seconde elle s'élevait à 48 mètres et après 2,3 secondes à 58 mètres. A ce moment, les débris du petit bâtiment étaient projetés dans toutes les directions et la colonne commençait à diminuer do hauteur.

La figure de la page 235 représente la masse liquide soulevée par l'explosion d'une torpille fixe, chargée avec 45kilogrammes de dynamite, et placée à G mètres sous l'eau. La vue photographique a été prise 3,9 secondes après l'explosion et à une distance de 175 mètres du point d'explosion. Il est regrettable que ces expériences ne puissent être renouvelées plus souvent, car les démonstrations qu'elles fournissent sont du plus haut intérêt pour la défense des ports et des littoraux. Malheureusement ces essais sont très onéreux, non seulement par la valeur des poudres et autres matières bourrant les mines, mais encore par celle des objets sur lesquels l'effet de la puissance explosive doit être essayé.


LA » LINOTYPIE ».

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LE CELLULOÏD REMPLAÇANT LE MAGNESIUM DANS LA PYROPHOTOGRAPHIE

Pour les amateurs de la photographie à l'éclair magnésique, j'ai trouvé dans The Anthony s Bulletin un nouveau mode d'éclairage qui consiste à substituer le celluloïd au magnésium.

Le celluloïd, découpé en copeaux fins, est embrasé avec une allumette. L'inflammation a lieu instantanément et la combustion ne produit aucun déchet.

On sait qu'une des forces, mais aussi qu'un des défauts de l'éclair magnésiquc est de dégager une somme considérable de radiations bleues et violettes, par conséquent d'être extraordinairement actinique. Cette propriété est une qualité pour la rapidité do prise de l'image; elle est un défaut pour l'obtention d'une bonne harmonie. La flamme du celluloïd, beaucoup plus jaunâtre que l'éclair magnésiquc, diminue la qualité de celui-ci, mais aussi son défaut. Toutefois la combustion du celluloïd, s'effectuant plus lentement que celle du magnésium, permet de récupérer, par le temps, un peu de la qualité de celui-ci, tout en laissant le défaut diminué.

C'est à essayer, surtout si l'on considère avec The Anthony'& Bulletin qu'un photographe américain obtient avec ce procédé des résultats merveilleux.

LA « LINOTYPIE

Linotypie vous indique tout de suite qu'il y a du lin dans l'affaire. De fait vous n'avez pas tort de croire à l'indication. C'est, au demeurant, un papier sensibilisé, monté sur un tissu de lin, de telle sorte que les photocopies obtenues avec lui sont indéchirables, n'ont pas besoin d'être montées sur carton, restent par cela même plus planes, plus légères et


238

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

moins encombrantes. On peut les relier et constituer ainsi de véritables volumes de bibliothèque.

Les tirages sur les papiers « linotypes » se font exactement de la même façon que ceux effectués sur les papiers ordinaires. Actuellement il s'en fabrique de trois catégories : Linotypes aux sels de fer; linotypes aux sels de platine; linotypes aux sels d'argent.

Les premiers se traitent par simples lavages, comme les papiers au ferroprussiate ;

Les seconds par le développement à froid que je vous ai indiqué au sujet de la platinotypie ' ;

Les troisièmes, par des bains de virage et fixage séparés ou par des bains de virage et fixage combinés, dont celui donné par la maison Lumière, pour ses papiers au citrate d'argent reste le meilleur type.

Dans ce dernier genre de traitement, si, malgré l'alun contenu dans le bain, la couche sensible du linotype tendait à devenir molle ou à se détacher de son support, il faudrait l'immerger, pendant une dizaine de minutes au moins, dans une solution d'alun à 2 pour 100.

Pour ceux qui voudraient avoir des épreuves linotypes sans se servir de papiers linotypes, ils peuvent les faire entoiler sur tissu linotype sans craindre qu'on les leur détériore. .Ils auront ainsi une collection d'épreuves indéchirables, planes, souples et légères. Les matières collantes employées, qui pourraient bien être simplement de la pâte de papier, ne contiennent aucun principe chimique réagissant sur le papier photographique. Le procédé de montage diffère, en réalité, du tout au tout de l'entoilage à la colle de pâte, ne donnant qu'une adhérence médiocre et souvent des causes de détérioration.

Je crois qu'il y a là, pour certaines collections photographiques, un progrès très réel.

1. Voir : Les Nouveautés photographiques, année 1894, page 109.


LE MICROGRAPHE.

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ÉPREUVE PHOTOGRAPHIQUE SERVANT D'ESQUISSE POUR LA PEINTURE A L'HUILE

Pour atteindre ce but on a déjà tenté de sensibiliser avec une émulsion au gélatino-bromure d'argent des toiles destinées à la peinture à l'huile. Malheureusement l'émulsion rend la toile cassante et fait craqueler la peinture. Or il faut avant tout que la fixation de l'image sur la toile puisse se faire sans crainte de détérioration de la peinture. Il paraît que l'on trouve maintenant dans le commerce des toiles sensibilées, sans émidsion, au chloro-azotate d'argent. Avis donc aux amateurs d'art facile.

LE MICROGRAPHE

Le Micrographe, dit M. G. Teymon, dans la Science illustrée, est un petit instrument destiné à montrer une succession d'épreuves photographiques, en un nombre plus considérable et sous des dimensions plus grandes que l'aspect de l'objet ne le peut faire supposer, « Micrographe » est un nom assez mal choisi par l'inventeur; microscope serait plus juste, puisqu'il s'agit de contempler, sous un grossissement considérable, des réductions photographiques de paysages, monuments, portraits, tableaux, statues, et, en général, de toutes les scènes pouvant intéresser la curiosité. Mais le mot de microscope éveille dans l'esprit le souvenir précis d'un instrument connu, tandis que « micrographe », en dépit de l'étymologie, est plus vague, et sonne suffisamment bien aux oreilles du gros public qui ne va pas chercher si loin.

Comme on le voit, d'après nos gravures, le micrographe est en forme de boîtier de montre. Ce boîtier est percé d'un trou, dans lequel est serti une lentille minuscule. A l'intérieur du boîtier évolue un disque, dont le tour porte une


240

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

série de photographies très réduites ; 0m,004 de diamètre environ. Le doigt de l'observateur suffit à amener chaque partie du disque devant la lentille. Ces photographies sont des positifs sur verre qui sont éclairés par transparence, ce qui veut dire que le disque mobile est lui-même en verre, mais qu'il est repéré de façon à présenter chacune des vues qui sont figurées sur sa conférence extrême devant la petite lentille.

Notre seconde figure présente l'instrument eu grandeur naturelle ; il n'est pas meublant, comme on en juge. Le disque de verre peut être remplacé par un autre ; il n'y a qu'à ouvrir et à fermer le boîtier. Le constructeur du micrographe a eu soin de se procurer toute une série de ces disques, si bien qu'un amateur est à même de s'offrir une collection de plusieurs centaines de sujets, et le tout tient une place équivalente à celle de trois ou quatre pièces de 5 francs en argent.

L'invention est américaine; nous verrons certainement avant peu, à Paris, des échantillons du micrographe que nous saluerons comme une vieille connaissance, car les photographies, ainsi réduites et grandies par une lentille • minuscule, ont été, il y a longtemps déjà, une des curiosités de la petite industrie parisienne. Les premières datent de l'Exposition universelle de 1859; mais à. l'Exposition de 1867, les photographies microscopiques eurent leur heure de grand succès, et l'on vendit à des milliers d'exemplaires une petite lunette, en forme de breloque de montre qui montrait très distincts, sur une diapositive grosse comme une tête d'épingle, les 450 têtes des députés du Corps législatif. On adapta les photographies microscopiques, en variant les sujets, à tous les objets possibles : porte-plume, épingles de cravates, pommes de cannes, etc.

Le fabricant, M. Dargon, avait éprouvé quelques difficultés à disposer, sous un aussi petit volume, une lentille assez forte pour assurer le grossissement. Il eut recours au microscope Stanhope. C'est une demi-lentille qui se façonne très simplement en coupant en deux un petit mor-


LE MICROGRAPHE.

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ceau de cristal de crownglass. 11 n'y a plus qu'à adapter ce fragment de cristal à une baguette de verre, et l'on a en main un microscope qui amplifie l'image trois cents fois au moins.

La manipulation et l'obtention des diapositives microscopiques

microscopiques très difficultueuses. La mise au point surtout est fort délicate. Il faut régler au microscope l'image réduite et projetée sur un écran. Ce procédé, qui avait été utilisé pour la fabrication de bimbelots fantaisistes devait, dans un moment critique, rendre au pays un signalé service.

C'était pendant le siège de Paris ; afin d'assurer les communications entre la capitale et la province, les ballons

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Le Micrographe et le disque porteur d'images.


240

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

série de photographies très réduites; 0m,004 de diamètre environ. Le doigt de l'observateur suffit à amener chaque partie du disque devant la lentille. Ces photographies sont des positifs sur verre qui sont éclairés par transparence, ce qui veut dire que le disque mobile est lui-même en verre, mais qu'il est repéré de façon à présenter chacune des vues qui sont figurées sur sa conférence extrême devant la petite lentille.

Notre seconde figure présente l'instrument eu grandeur naturelle ; il n'est pas meublant, comme on en juge. Le disque de verre peut être remplacé par un autre ; il n'y a qu'à ouvrir et à fermer le boîtier. Le constructeur du micrographe a eu soin de se procurer toute une série de ces disques, si bien qu'un amateur est à même de s'offrir une collection de plusieurs centaines de sujets, et le tout tient une place équivalente à celle de trois ou quatre pièces de 5 francs en argent.

L'invention est américaine ; nous verrons certainement avant peu, à Paris, des échantillons du micrographe que nous saluerons comme une vieille connaissance, car les photographies, ainsi réduites et grandies par une lentille • minuscule, ont été, il y a longtemps déjà, une des curiosités de la petite industrie parisienne. Les premières datent de l'Exposition universelle de 1859; mais à l'Exposition de 1867, les photographies microscopiques eurent leur heure de grand succès, et l'on vendit à des milliers d'exemplaires une petite lunette, en forme de breloque de montre qui montrait très distincts, sur une diapositive grosse comme une tête d'épingle, les 450 têtes des députés du Corps législatif. On adapta les photographies microscopiques, en variant les sujets, à tous les objets possibles : porte-plume, épingles de cravates, pommes de cannes, etc.

Le fabricant, M. Dargon, avait éprouvé quelques difficultés à disposer, sous un aussi petit volume, une lentille assez forte pour assurer le grossissement. Il eut recours au microscope Stanhope. C'est une demi-lentille qui se façonne très simplement en coupant en deux un petit mor-


RECETTES ET FORMULES.

243

suite d'imprudences de ce genre, en ouvrant le flacon et portant le nez dessus pour sentir l'odeur et savoir ce qu'il y a dans la bouteille, il y a eu de véritables accidents. La respiration de ce gaz provoque toujours une très vive irritation de la muqueuse nasale : on éternue, l'oeil pleure et l'on éprouve dans le front une sensation douloureuse. A un degré plus intense, il peut survenir des conjonctivites graves, tenaces, avec ulcères de la cornée pouvant amener la perte de l'oeil, comme l'a signalé le Dr Trousseau... A des degrés moindres, l'inhalation intempestive des vapeurs d'alcali peut déterminer des troubles oculaires sérieux. Il faut y songer et ne déboucher ces flacons qu'avec précaution. Du reste, quand on prend une bouteille sans savoir ce qu'elle contient, il ne faut jamais flairer directement au goulot; s'il s'agit de liqueurs à dégagement gazeux, on en respire des quantités toujours nocives. Il faut se contenter de flairer simplement le bouchon ; la minime partie du liquide qui y adhère suffit à vous faire reconnaître sa nature par l'odeur.

FABRICATION D'UN VERRE ROUGE POUR LABORATOIRE

Si vous avez brisé le verre rouge de votre laboratoire et que vous vous trouviez dans l'impossibilité de vous en procurer un autre avant un certain temps, vous pouvez parer au désastre de la façon suivante.

Faites à chaud la mixture suivante :

Eau distillée 4S0 parties.

Glycérine 7 —

Acide azotique 2 —

Gélatine K

Lorsque toutes ces substances seront intimement mélangées, vous y ajouterez :

Carmin îi parties.

Ammoniaque 40 —

Et vous étendez sur une lame de verre.


244

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Comme tous ces produits se trouvent un peu partout, vous pourrez patiemment attendre que vous soyez en mesure de vous procurer un autre verre rouge.

ENLÈVEMENT SUR LE LINGE DES TACHES D'AMIDOL

On. raconte souvent qu'il ne faut pas employer l'acide pyrogallique parce qu'il tache les doigts et le linge. D'abord tous les révélateurs ont des inconvénients à peu près analogues et plus ou moins rapides. Ensuite, quand l'acide pyrogallique est convenablement dosé avec du sulfite de soude, on n'a pas plus de taches à craindre avec lui qu'avec aucun autre révélateur. Il suffit de savoir s'en servir.

Je me propose un jour de constater les dégâts causés par les divers révélateurs. Pour l'instant occupons-nous de Pamidol, autrement dit du chlorhydrate de diamidophénol. Celui-là, réputé si inoffensif, maltraite le linge de de la belle façon. Un chimiste lyonnais, M. Mathet, a indiqué quatre procédés de faire disparaître ces taches. Les voici, dans l'ordre de leur degré d'efficacité, tels que les rapporte Y Amateur pliotograplie :

1° Tremper le linge taché dans de l'eau oxygénée. 2° Faire des lavages aux hypochlorites étendus d'eau. L'eau de Javelle, étant un hypochlorite, peut servir.

3° Faire tremper le linge dans une solution assez concentrée de sulfite ou mieux de bisulfite de soude; exprimer légèrement le liquide, puis pîisser le linge taché dans une eau légèrement acidulée par de l'acide acétique. Renouveler ce traitement deux ou trois fois.

4° Mouiller légèrement le linge et l'exposer humide, au-dessus d'une petite quantité de soufre enflammé.

COMPOSITION D'UN VERNIS A FROID POUR PHOTOTYPES

Nous ne vernissons pas nos phototypes. C'est une affaire parfaitement entendue. Avons-nous raison d'agir ainsi?... Hé! Hé! en présence du nombre considérable de mauvaises


RECETTES ET FORMULES.

24:;

photographies qui pleuvent sur le monde comme des prospectus tombant de la nacelle d'un ballon-réclame, on semble avoir raison. A quoi bon dépenser son temps et son argent à vernir des phototypes qui ne valent pas la peine d'être conservés?... Cependant une boutade n'est point une raison sérieuse. Ceux qui travaillent beaucoup et bien, peuvent regretter de ne pas assurer par un vernis protecteur la bonne conservation de leurs oeuvres. Au demeurant, si nous ne vernissons pas, c'est que vernir demande une manipulation un peu bien délicate, dont, toutefois, l'amateur s'effraye bien à tort. Il faut chauffer la plaque, étendre le vernis, réchauffer la plaque, c'est-à-dire courir de nombreux risques de bris. Je vous ai, pour éviter ces risques, indiqué le paraffinage. Mais le paraffinage ne vaut pas en somme le vernis. Ah ! si nous avions un vernis qu'on pût étendre facilement à froid!...

Or je trouve dans le « Bulletin du Photo-Club de Constantine » ce rara avis de la photographie.

Pour l'obtenir, il suffit de faire un mélange, à poids égaux, d'èther et de chloroforme. Ou, ce qui revient au même, un mélange dans la proportion de deux volumes d'éther pour un volume de chloroforme. La densité de ces deux corps est, en effet, très approximativement dans la proportion de 1 à 1/2.

Ce mélange fait, vous pulvérisez soigneusement 80 grammes de gomme de copal blanche de la meilleure qualité possible. Cette poudre est introduite dans un flacon d'une capacité de 1 litre. Vous versez dessus, le liquide éthéroehloroformique en qualité suffisante pour obtenir le volume de 1,000 centimètres cubes. Vous bouchez hermétiquement. La dissolution de la gomme copal s'opère très rapidement. Si un léger trouble se manifeste, il suffit de filtrer.

Vous obtenez ainsi un produit présentant sensiblement la densité de l'eau distillée, qui ne vous coûtera guère plus de 5 à 6 francs le litre et que vous pourrez étendre, à froid, sur votre phototype, soit au pinceau, soit à la manière du collodion.


246

LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

TRAITEMENT POUR RECUPERER LE PLATINE

On sait que dans la platinotypie, la quantité de métal qui forme l'image est infime par rapport à la masse enlevée par le développement et inutilisée. Voici un moyen de récupérer le métal perdu.

Les vieux bains, soigneusement conservés, sont chauffés à 65°. Dès que leur masse atteint cette température, on verse dedans une solution très concentrée de sulfate de fer. Il se forme aussitôt un précipité noir de platine métallique. On décante, on lave le précipité et on le garde en botte jusqu'à ce que l'on en ait suffisamment pour l'envoyer à l'affineur.

ASSOUPLISSEMENT DES TUYAUX DE CAOUTCHOUC

Autrefois pour faire poser on se contentait du vulgaire bouchon. L'instantanéité aidant, on a fait usage d'obturateurs. L'on s'est même si bien fait, si bien habitué aux obturateurs qu'on a exigé des constructeurs qu'il nous en fabriquassent à deux fins, c'est-à-dire qu'ils nous donnassent des obturateurs pouvant faire, suivant le cas, la pose ou l'instantanéité.

Il en est résulté que nous avons à peu près relégué l'antique bouchon au grenier et que nous employons indifféremment l'obturateur mécanique à toutes les poses.

Or tout obturateur mécanique qui se respecte est invariablement muni d'un tuyau de caoutchouc terminé par une poire de même matière. Mais le caoutchouc a des caprices, des caprices changés même en mauvaises habitudes. Le plus constant est de se durcir à la longue au point de devenir impropre à tout service.

M. Corsi nous donne un moyen simple de remédier à cet inconvénient. C'est de plonger, de temps en temps, pendant quelques minutes, voire pendant une demi-heure, sui-


RECETTES ET FORMULES.

247

vant leur dureté, tous les objets en caoutchouc dans le bain suivant :

Eau 2 parties.

Ammoniaque 1 —

Au cas où l'on découvrirait des fissures, il faudrait, dès que le caoutchouc est ramolli, les aveugler avec un vernis composé de caoutchouc dissous dans de la benzine.

COLLE A LA GELATINE

La Société d'études microscopiques et d'histoire naturelle de Croydon a longuement discuté ces temps derniers sur l'emploi de l'amidon pour coller les épreuves photographiques. Nous aurons sans doute l'occasion d'y revenir. La question vaut examen. C'est de la collé que, le plus souvent, en effet, proviennent les détériorations d'épreuves. Pour l'instant, nous nous contenterons de constater qu'il a été reconnu que la colle à base de gélatine était préférable à toute autre. Or M. Weise, de Hambourg, vient de faire breveter une colle de gélatine liquide se composant, paraît-il, de :

Eau distillée 1,000 cm 3.

Hydrate de chloral 250 grammes.

Gélatine 400 —

Au bout de quarante-huit heures la solution est prête pour l'usage. Voilà déjà un point de départ en attendant que nous reprenions la question.

MENSURATION DES GOUTTES

Nous trouvons souvent, dans les formules photographiques, l'indication de gouttes. Mais les gouttes ne sont pas toutes les mêmes; elles dépendent du liquide employé. Le docteur Elder a dressé à ce sujet le petit tableau sui-


248 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

vant, dans lequel il indique combien il faut de gouttes de tel ou tel liquide, pour atteindre un centimètre cube.

Eau 20 gouttes.

Acide chlorhydrique 20 —

Acide azotique 27 —

Acide sulfurique 28 —

Acide éthérique 38 —

Huile de ricin 44 —

Huile d'olive 47 —

Essence de térébenthine .... 'ô'ô

Alcool à 86° 62

Éther 83 —

Ce tableau peut rendre quelques services, et il est aisé de le continuer, en se servant d'un compte-gouttes donnant exactement 20 gouttes d'eau distillée pour 1 centimètre cube.

NETTOYAGE DE DE LA SURFACE GELATINÉE DES PHOTOTYPES NÉGATIFS

Gomme nous ne vernissons généralement pas nos phototypes, il arrive trop souvent, hélas! qu'ils se couvrent de taches qui vienne d'on ne sait d'où. En général, on arrive assez facilement à les enlever en prenant un tampon de ouate ou un morceau de flanelle, que l'on imbibe de térébenthine en frottant, doucement et à plusieurs reprises, la surface à nettoyer.

Si les taches résistent, on peut se servir d'essence grasse, en opérant comme il vient d'être indiqué, mais on devra toutefois terminer le nettoyage en reprenant l'essence de térébenthine.

RENFORCEMENT DES ÉPREUVES AU PLATINE

Certes, c'est souvent un défaut des épreuves au platine de présenter des images d'une tonalité généralement grise. M. Dollond a indiqué, à la Société photographique de Grande-Bretagne, un moyen de remédier à ce mal, ou plus


RECETTES ET FORMULES. 249

justement une méthode d'améliorer les épreuves au platine manquant d'intensité.

L'épreuve, une fois sèche, est plongée pendant quelques minutes dans l'eau et essorée rapidement entre deux feuilles de papier buvard blanc. Vous versez alors de la glycérine dans un godet et, à l'aide d'un blaireau, vous en badigeonnez largement toute la surface du papier du côté où se trouve l'image. Ainsi préparée, l'épreuve est immergée dans une solution de chlorure d'or qui a été préalablement neutralisée, puis rendue acide. Dans ce bain, l'image prend une coloration noir bleu et monte en intensité. A l'oeil, l'effet est le même que celui qui se produit sur une épreuve sur papier au gélatino-bromure d'argent plongée dans un virage sulfocyano-ammonio-aureux. Dès que l'intensité est jugée suffisante, vous rincez à l'eau courante et vous traitez l'image comme si vous aviez à la développer, en vous servant d'un bain de développement très dilué, au métol.

Les contrastes de l'image se trouvent très accentués et le ton général considérablement amélioré.

POUR LES PORTRAITS AVEC OBJECTIFS SIMETRIQUES

Les amateurs qui font des portraits avec leurs objectifs symétriques dits aplanétiques obtiennent généralement des têtes qui ne tournent pas, parce que l'aplanétique convient mal au portrait. De plus, l'objectif symétrique employé pour le portrait communique à celui-ci une dureté dans les traits, dureté qui provient encore d'une mise au point trop rigoureuse. Or, voici un petit moyen qui, sans déformer l'image, atténuera cette dureté.

Prenez un morceau de verre mousseline, collodionnez-le et fixez sur le collodion un morceau de canevas. Assujettissez le tout derrière l'objectif, la mise au point une fois faite, et opérez.

Rappelez-vous cependant que le temps de pose devra être à peu près doublé.

32


250 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

PETIT PROCÉDÉ POUR BIEN SUIVRE LE DEVELOPPEMENT DE L'IMAGE LATENTE

Dans la majorité des cas, sous le fallacieux prétexte qu'on craint les voiles, le laboratoire obscur de l'amateur photographe est. éclairé par une lumière très insuffisante et qui, tamisée par un verre rouge rubis, devient très fatigante et quasi impropre à tout bon travail. Je l'ai souvent dit et je ne cesse pas de le répéter, la lumière peut être très large du moment que le verre rouge ne laisse passer que les rayons rouge-orangé. Il suffit donc de le vérifier au spectroscope. Quant à l'intensité lumineuse, elle doit être au moins telle qu'on puisse lire très commodément, quand elle est interceptée par le verre rouge, à 30 centimètres de la lanterne.

Toutefois, malgré cet éclairage, il faut encore une certaine habitude pour bien suivre le développement de l'image latente et surtout pour juger de la bonne intensité du phototype. Or, voici un petit moyen très pratique, très commode et très simple qui permet d'atteindre ce double but.

Vous taillez un vieux calendrier exactement à la dimension du verre de la lanterne et vous pratiquez, en son centre, une ouverture circulaire de la grandeur d'une pièce de cinq francs. Quand vous avez à examiner votre phototype, vous appliquez exactement ce carton contre le verre rouge, et vous promenez ledit phototype devant la petite ouverture. Vos yeux n'étant plus influencés par les rayons rouges ambiants, vous jugez très sûrement de l'opacité atteinte par l'image.

PHOTOCOPIES SUR VERRE OBTENUES DIRECTEMENT A LA CHAMBRE NOIRE

Voici la recette telle que nous la donne l'Anthony's Photographie Bulletin :


RECETTES ET FORMULES.

251

1° Poser longuement.

2° Développer à l'oxalate ferreux jusqu'à apparition des grands noirs au dos du phototype.

3° Laver, toujours à la lumière rouge, bien entendu.

4° Immerger dans la solution suivante, qui doit être libre de toute trace de chlorure.

Eau distillée 800 parties.

Bichromate de potasse 5 —

Alun 75 —

Acide azotique 5 —

Acide sulfurique 10 —

5° Laver abondamment et bien à fond.

6° Redévelopper avec n'importe quel révélateur jusqu'à obtention de l'intensité désirée.

Il est bon de remarquer que les opérations 4 et 5 peuvent être faites à la lumière blanche diffuse bu à celle d'une lampe ou d'une bougie. L'opération G doit s'effectuer à la pleine lumière du jour.

La bonne réussite de ce procédé réside dans la réduction complète du sel d'argent dans les grandes lumières, de telle sorte qu'il soit totalement dissous dans la solution de bichromate de potasse et que la surface sensible devienne absolument transparente dans toutes les grandes lumières.

REBOUCHAGE DES PHOTOTYPES TROUES.

Malgré tous les soins que l'on peut prendre, il arrive presque toujours que les phototypes négatifs présentent de petits trous lumineux qui se traduisent en points noirs sur la photocopie.

Pour les boucher, on les touche avec un pinceau chargé d'une couleur composée d'une mixture de carmin, de bleu d'outre-mer, de sépia et d'eau gommée. On fait varier la quantité de chaque constituant suivant le degré d'intensité de la partie environnant le point lumineux.


252

LES NOUVEAUTES PHOTOGRAPHIQUES.

On arrive beaucoup plus sûrement ainsi à un rebouchage parfait que par l'emploi des couleurs spéciales à tons neutres dites couleurs photographiques.

COUCHE PROPRE A L'IMPRESSION AUX ENCRES GRASSES

Pour l'aire de la photocollographie, c'est-à-dire pour imprimer ses phototypes aux encres grasses, il faut tirer l'image sur une plaque de gélatine bichromatée. M. Farmer, à qui nous devons déjà le réducteur à l'hyposulfite de soude et au l'erricyanure de potassium, vient d'indiquer un moyen très simple d'arriver au même résultat sans se servir préalablement de gélatine bichromatée.

L'épreuve est tirée sur une plaque ordinaire au gélatino-bromure d'argent, mais plutôt lente que rapide, développée à l'oxalate ferreux, puis immergée dans une solution de bichromate de potasse.

Il paraît que l'on obtient ainsi des effets identiques à ceux qui sont produits par l'exposition, à la lumière, de la gélatine bichromatée. La plaque ainsi traitée se prête fort bien, par conséquent, aux usages photocollographiques.

FIN DE LA CINQUIEME ET DERNIERE PARTIE


INDEX ALPHABETIQUE

A

Acétylène (fabrication d'une lampe à

F), 18!». %

Acide pyrogatlique (développement u

F), «0.' Agrandissement par les miroirs concaves), 171. Agrandissement redonnant la perspective exacte, lîis. Agrandissements, 98. Aldéhyde formique, (i.'i. Amtdol (enlèvement des taches d'), 244. Ammoniaque (dangers des vapeurs d'),

232. Amplificateur h bonnettes et à agrandissements variables, 101. Assouplissement des tuyaux de caoutchouc, 240. Anti-halo, 39. Aphanèlephotographie, 193. Applications, 193.

Appréciation automatique des dislances, 20. Art et nature, 151 .

Art photographique (ce que doit ôtre 1"), 153.

B

Biographe, 124. BioscopCy 121.

c

Cachou employé pour le virage au platine, 82. Cathodiques (rayons), 198.

Celluloïd remplaçant le magnésium, 237. Chambre brevetée Jontc, 131-135. Chambre noire la plus grande du monde,

229. Chambre noire « le Mixte >. 32. Châssis à magasin, I. Chiissis-jiresse à deux brisures, 71. Cheminée photo-bicolore. 13. Chromopliolog'raphie, 142. Clironop/iotographie à la poi'lée des

amateurs, 121. Claiscur de phototypes, 00. Colle à la gélatine, 247. Coloration des épreuves obtenues sur

papier au gélatino-bromure d'argent,

94.

Conservation des photocopies positives. 77.

Couleurs d'absorption, 144.

Couleurs d'interférence, 144.

Crookes (tube de), 198.

Cuves pour écrans colorée, 183.

Cyclisme et photographie, 30.

Cylindrographe Moéssard, 139.

D

Développement à l'acide pyrogallique, 40. Développement du papier au gélatinobromui'ed'ai'gent,

gélatinobromui'ed'ai'gent, Développement au diaminophénol, 42. Développement d'images latentes, 250. Développement (rapport arithmétique du

temps de), 59. Développement lent des instantanées, 46. Diaminophénol (développement au), 42. Diaphragme in'sdes photo-jumelles, 25. )>uhé, 21.


LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

254

E

École américaine, 156.

École anglaise, 152.

École autrichienne, 151.

École belge, 168.

École française, 166.

Écoles diverses, 169.

Écoles en photographie (les), 151.

Effluviographie, 194.

Électro-arlographe Amstutz, 212.

Enveloppes pour la conservation des phototypes, 71.

Épreuves photographiques, servant d'esquisses pour la peinture à l'huile, 239.

Épreuves photographiques servant pour la peinture, 239.

F

Fabrication des fonds pour portraits, 185. Fabrication d'une lampe à acétylène, 189. Fabrication d'un verre rouge pour laboratoire, 243. Fantaisies et petites industries, 171. Flouisles et nellistes, 155. Format des photocopies, 151. Formol, 64.

G

Glob-trotler, 33. Glycérine (essai de la), 230.

H

Halo, 104.

1

Images passables avec de mauvais phototypes, 75.

Impression aux encres grasses, 252.

Inaltérabilité des photocopies positives, 77.

Instantanées (développement lent des), 46.

Irradiation photographique, 104.

K

Kallitypie, 85.

L

Lanterne de projection (Phoebus), 111.

Linotypie, 237.

Lumière oxy-étherique, 10S.

M

Mensural'on des gouttes, 247.

Micrographe, 239.

Micrographie avec les chambres noires ordinaires, 226.

Miroirs concaves (agrandissement par les), 171.

Modérateur de vitesse des photo-jumelles, 24.

Multisaturateur, 108.

N

Nettoyage de la surface gélatinée des

phototypes, 248. Noircissement du renforcement au noir

de mercure, 61. Numérotage des verres de besicles, 6.

0

Objectif simple anastigmatique, 4.

Objectif universel, 3.

Obturateur à ciseaux, 179.

Obturateur à lamelles métalliques, 17.

Obturateur Decaux, 14.

Ocrage des plaques pour projection. 107.

P

Papier au gélatino-bromure d'argent, 86.

Papier charbon-velours, sa préparation, 84.

Papier « Presto», 72.

Papiers transferrotypes, 73.

Paraffinage des phototypes, 69.

Petites industries et fantaisies, 171.

Perspective exacte, 157.

Photocopies lumineuses, 177.

Photocopies sur verre obtenues directement il la chambre noire, 250.

Photographie au kilomètre, 217.

Photographie de l'invisible, 193.

Photographie des pièces anatomiques fraîches, 210.


INDEX ALPHABÉTIQUE. 255

Photographie des couleurs par le procédé Poitevin, 146. Photographie monoclisle, 6. Photographie ornementative, 188. Photographie panoramique, 130. Photolithophanie, 185. Photostéréographie, 112. Phololélégraphie, 208. Pied canne consolidé, 35. Pyrocatéchine de synthèse, 43. Pyrophotographie, 237. Pied télescopic, 38. Planigraphe, !>. Plaques panchromatiques, 10. Platine (méthode pour récupérer le), 246. Portraits animés, 122. Portraits avec objectif aplanétique, 249. Pratique et théorie, 1. Projections, 104. Projections en couleurs, 148.

R

Radiographie, 194.

Rapport arithmétique du temps de développement, 49.

Rayons cathodiques, 198.

Rayons X, 200.

Rebouchage des phototypes, 251.

Renforcement au sel de mercure (noircissement du), 61.

Renforcement sans sel de mercure, 62.

Renforcement au sel d'urane, 64.

Renforcement des épreuves au platine, 248.

Retour inverse des rayons, 113.

Rbnlgen (docteur), 201.

S

Sécheur-ventilaleur, 67.

Sélênépholographie, 227.

Sensibilité des plaques augmentée, 11.

Sténo-jumelle, 26.

Slénopé, 9.

Succédanés des alcalis dans les révélatours alcalins, 45.

Support du bec Aucr pour la projection, 110.

Support des photo-jumelles pour les vues panoramiques, 132.

T

Temps de pose au crépuscule, 22. Temps de pose pour les agrandissements, 102. Théorie et pratique, 1. Torpilles sous-marines (effet des), 232. Tubes de Croohes, 198. Trou d'aiguille remplaçant l'objectif, 9. Trousse d'objectifs anastigmatiques, 4.

V

Variétés, 229.

Vérascope, 112.

Vernis à froid pour phototype, 244.

Virage au cachou des papiers au platine, 82.

Virage des épreuves obtenues sur papier au gélatino-bromure d'argent, 93.

Voile de surexposition, 48.



TABLE DES MATIERES

PREMIERE PARTIE

THÉORIE ET PRATIQUE

Pages.

Les châssis à magasin 1

Nouvel objectif universel 3

Le planigraphe 5

Les numéros des verres de besicles G

L'objectif remplacé par le trou d'aiguille : 9

Plaques panchromatiques 10

Augmentation de la sensibilité des plaques -11

La cheminée photo-bicolore 13

Le nouvel obturateur Decaux 14

Obturateur à lamelles métalliques 17

Appréciation automatique des distances 20

Les temps de pose au crépuscule 22

Diaphragme iris et modérateur de vitesse des photo-jumelles. ... 24

La sténo-jumelle 20

Chambre noire « Le Mixte »> 32

Le Glob-trotter 33

Pied-canne consolidé 35

Cyclisme et photographie 36

Caramélisation des plaques 39

Développement à l'acide pyrogallique 40

Développement au diamidophénol 42

La ipyrocatéchine de synthèse 43

Succédanés des alcalis dans les révélateurs alcalins 45

Développement lent des instantanées 46

Le rapport arithmétique du temps nécessaire à un parfait développement 59

Nouveau mode de noircissement du renforcement aux sels de

mercure. 61

Renforcement des phototypes sans sels de mercure 62

Le formol 04

33


258 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

l'ages.

Sécheur-ventilateur 67

Paraffinage des phototypes 69

Classement des phototypes 70

Un nouveau châssis-presse à deux brisures 71

Le papier Presto 72

Le papier transferrotype . 73

Images passables avec de mauvais phototypes 75

Inaltérabilité et conservation des photocopies positives 77

Virage, au cachou, des images obtenues sur papier au platine .... 82

Préparation d'un papier charbon-velours 84

Kallitypie 85

Les photocopies sur papier au gélatino-bromure d'argent 86

Les agrandissements 98

Les projections 104

La photostéréographie 112

La chronophotographie à la portée des amateurs 121

La photographie panoramique 130

Chromophotographie 142

DEUXIEME PARTIE

ART ET NATURE

Le format des photocopies 151

Ce que doit être l'Art photographique 153

Les écoles en photographie 161

TROISIÈME PARTIE

FANTAISIES ET PETITES INDUTRIES

Les agrandissements par les miroirs concaves 171

Les photocopies lumineuses 177

Obturateur à ciseaux 179


TABLE DES MATIERES. 259

Pages.

Cuve pour écrans colorés 183

Fabrication des fonds pour portraits 185

La photographie ornementative 188

Fabrication d'une lampe à acétylène 189

QUATRIEME PARTIE

APPLICATIONS

La photographie de l'invisible ' 193

La phototélégraphie 208

Moyen de photographier des pièces anatomiques fraîches 216

Photographie au kilomètre .' 217

Emploi des chambres noires ordinaires pour la microphotographie. 226

Sélénéphotographie ' 227

CINQUIEME PARTIE

VARIETES

La plus grande chambre noire du monde 229

Essai de la glycérine 230

Les effets des torpilles sous-marines 232

Le celluloïd remplaçant le magnésium dans la pyrophotographie. . 237

La « Linotypie » 237

Épreuve photographique servant d'esquisse pour la peinture à

l'huile 239

Le micrographe 239

Danger des vapeurs d'ammoniaque 242

Fabrication d'un verre rouge pour laboratoire 243

Enlèvement sur le linge des taches d'amidol 244

Composition d1un vernis à froid pour phototypes 244


260 LES NOUVEAUTÉS PHOTOGRAPHIQUES.

Pages.

Traitement pour récupérer le platine 246

Assouplissement des tuyaux de caoutchouc 246

Colle à la gélatine 247

Mensuration des gouttes 247

Nettoyage de la surface gélatinée des phototypes négatifs 248

Renforcement des épreuves au platine 248

Pour les portraits avec objectifs symétriques 249

Petit procédé pour bien suivre le développement te l'image latente. 250

Photocopies sur verre obtenues directement à la chambre noire. . . 250

Rebouchage des phototypes troués 251

Couche propre à l'impression aux encres grasses 252

Paris. — Imp. LAROUSSE, rue Montparnasse, 17.