Rappel de votre demande:


Format de téléchargement: : Texte

Vues 1 à 1 sur 4

Nombre de pages: 1

Notice complète:

Titre : La Presse

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1891-05-27

Contributeur : Girardin, Émile de (1806-1881). Directeur de publication

Contributeur : Laguerre, Georges (1858-1912). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34448033b

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34448033b/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 124274

Description : 27 mai 1891

Description : 1891/05/27 (Numéro 1086).

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Description : Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail

Description : Collection numérique : La Grande Collecte

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k546301x

Source : Bibliothèque nationale de France

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 03/04/2008

Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 83%.


SOBeiNOLëM~~ S LA GRÈVE DES OMNIBUS. CeïWittM!.

JÈCHOS.

PAMSSAMSOMfmBUS.

tES PARISIENS ET LA GREVE.

LA JOURNÉE D'AUJOURD'HUI.

]LARUE MER.

PHYSIONOMIE DE PARIS.

COMBATS EN AFRIQUE.

LA SEANCE DHÏER A LA CHAMBRE. AU SÉNAT.

~'AFFAIRE DE LA MÉLINITE.

AU CHAMf DE MARS. A. de La FA'eHe. APRÈS MINUtT.

REVUE DES JOURNAUX !)E CE MATM.

LU EREVE DES OMNtBUS Les employés de la Compagnie des Omnibus sont en grvèe et les actions de la Société dégringolent sur le marché. Le conseil d'administration, que préside M. deTavernier, ne Ta pas volé.

Il est impossible d'être plus aveugle, plus maladroite plus ignorant des obligations nouvelles que crée aux détenteurs de la richesse le courant de « justice sociale qui passe en ce moment à travers le vieux .monde et dont le chef de notre République bourgeoise a été forcé de reconnaître, luimême, l'importance et la légitimité. C'est à croire qu'un mauvais génie qui veut du mal à la Compagnie monopoleuse tui a dicté ses résolutions.

II ne faut, du reste, point s'en plaindre. Rien ne pouvait, mieux que cette aventure, éclairer la masse de l'opinion sur y état d'esprit de cette féodalité financière dont les cerveaux, moulés en je ne sais quelle matière insensible, tsont décidément irréformables. Sauf ce qui leur plaît, ils ne veulent rien voir ni entendre.

Un des directeurs de la Compagnie des omnibus n'a-t-il point été jusqu'à prétendre a un de -nos confrères que tout leur personnel était prêt à travailler hier matin et qu'il a suffit de « quelques mauvais sujets pour empêcher ces hommes de faire leur service ? Qu'ils aillent compter cela à d'autres qu'aux Parisiens qui voyent ce qui se passe et n'admettront jamais qu'une bande de meneurs fussent-ils trois cents peuvent détourner de leur ouvrage cinq ou six mille contrôleurs, conducteurs, cochers, côtiers, laveurs~ etc., bien déterminés à se rendre au travail.

La vérité~ c'est que le personnel de la Compagnie des omnibus est excédé, harassé, rendu, qu'il est à bout de forces et de patience, qu'il crie justice, et qu'il est unanime a se rebiffer contre d'intolérables exigences. S'il y a des « faiblards ils ne sont pas parmi les grévistes, mais chez les quelques malheureux qui, dans la crainte de perdre la maigre pitance qu'on leur assure en échange d'un labeur excessif, ont refusé, tout en en souhaitant intimement le succès, de s'associer à cette grève-populaire.

Car elle est populaire, cette grève Le peuple de Paris ne lui ménage pas ses sym- pathies, malgré l'ennui et le préjudice que tuî cause ~absence de son carrosse à six sous. Etil serait vraiment difncile/à moins devoir le cœur bourré d'actions de la Compagnie des Omnibus, de ne pas prendre en pitié profonde ces travailleurs du jour et de ta~nuit.

Je causais samedi, chemin faisant, avec le conducteur d'un petit omnibus, un brave h~mme qui fait le service de la même ligne, de la même voiture, depuis un peu plus de vingt-cinq ans. Voilà~ je suppose~ un brevet d& bon serviteur. Figure franche~ ouverte, réjouie; avec cela, excellente tenue et, sans familiarité, grande politesse pour les voyageurs. Le type <Tun brave homme, fort raisonnable et pas malheureux dntout. Si un employé devait être hostile ou indifférent à Ia~ grève, ce devait être celui-là.

Ah! bien oui! il était enragé. Il ne Il~ne m'aurait rien dit, mais, quand je Fan. interrogé, il ne m'a rien caché. Il est comme les camarades, il n'en peut plus. II est là, sur sa petite plate-forme, je ne *dirai pas quinze heures durante mais c'est tout comme~. car le temps des repas qu'il faut en défalquer est vraiment insignifiant. Une moyenne de .quinze heures de travail! Nous voilà loin des « troi~huit Dimanche, ce n'était plus quinze heures qu'il allait besogner, mais dix-sept. De sept heures et demie du matin à minuit et demie comptez .Et puise'est soncaùtionnement qui lechiSonne. Deux cents francs depuis vingt-cinq ans Songez aux intérês qu~it a perdus et qui sont sdiés, chaque année, grossir les dividendes des sociétaires.

Il aurait pu ajouter, le pauvre diable, que les actions de la Compagnie qui le fait trimer, pour une pièce de cent sous, jusque dix-sept heures par jour, ont été ésiiges à cinq cents francs et qu'elles en valent aujourd'hui plus du double, et que MM. les capitalistes, qui ne savent pas se décider à $oulaarer leur vieux et Sdète nersonnet~n

luidonnant quelques auxiliaires, ont empoché l'année dernière,– sans compter les jetons de présence et les gros traitements, un bénénce de près de cinq millions. Il paraît que cette bourgeoise et égoïste société, prise de peur, vient d'appeler le Conseil municipal de Paris à son aide, en le priant de jouer le rôle d'intermédiaire entre elle et ses employés~ comme cela s'est passé, il y a deux ans, pour la Société des petites voitures. Il n'y a aucune analogie entre ces deux grèves. Le Conseil municipal de Paris ne peut pas s'y méprendre et, espérons-le, il saura faire son devoir. Ce n'est point le rôle d'un intermédiaire qu'il a à remplir, mais bien~ puisqu'on le lui abandonne, celui d'un administrateur.

Si, au lieu d~être administrée par un préfet Benoiton~ la capitale de la France était tout bonnement régie par le droit commun, il est probable que les gourmands de dividendes qui savent si bien extraire la quintes- sence des monopoles, auraient depuis longtemps été rappelés à la modération et à la sagesse par le maire de Paris.

GERMINAL..

~M~Saot **B** "aao~ _i~ ~~N~

ECi:-EOS3

Observations météorologiques de~ la Presse s duZ5mai 1891

Température la plus basse de la nuit 8° au-dessus 7 heures du matin. 9"1/2– j 2 heures du soir. 14" 7 heures du soir. 10" (Baisse.) Hauteur 6aroM~W~ue 756 millim. (Stationnaire). DtreehOM au cen< Sud-Sud-Ouest modére. Etat dM Cte~ à -Pans Couvert, pluies et orages mêlés de grêle à différentes reprises.

y~mps pro6a&!e poMf aMjoMrd'Aut Ciel nuageux, orage & redouter, température plus fraîche.

Aujourd'hui, à 2 h-, courses à Saint-Oueu. Pronostics de la .PrMM

Prix du Saint-Bernard. C<B<t~

Prix de Saumur. Rapin.

Prix de Sceaux. Arse~a!.

Prix de Sens. Z<e[ GiraMa.

Grande course de haies de Saint-Ouen.– ~tmt<e~. A

Toute la vie de Paris a été hier matin en retard d'une demi-heure.

Dimanche, après une journée de distractions et de plaisirs, employés, contre-maîtres, ouvriers, les modistes et même les demoiselles du téléphone,. tout le monde s'était couché tard. Le réveil fut lent, sous le ciel maussade. Tout en se hâtant, chacun et chacune songeaient «Bàst! 1 je prendrai le second omnibus

Mais quel effroi en arrivant à la station. Pas une voiture ) Quoi ? Qu'y a-t-il ? On s'interroge la grève générale. Allons, bon 1 Et sous l'averse, qui commence à tomber, on se retrousse en maugréant, et petits pieds de trotter et grosses bottes de courir. a Gare à l'amende Et voilà comment hier matin, au bureau, à l'atelier, tous entraient haletants et ruisselants.

Patrons et patronnes seront indulgents, nous n'en doutons pas, et suspendront l'amende encourue par force majeure.

Paris hier, désagréablement surpris par l'absence des moyens de locomotion, a néanmoins accueilli les grévistes des omnibus avec une sympathie marquée.

Dans les rues, on n'entendait que des récriminations contre la Compagnie, seule fautive, tant le public sait combien les revendications des employés sont justes.

Et le Parisien, oblige de courir à pied ou en fiacre à ses affaires ou à son travail, n'a pas un mot de blâme pour les cochers~

<x Ils ont bien fait », entendait-on dire partout.

M. Carnot est rentré à Paris hier matin, à onze heures, ainsi que MM. Constans et Barbey.

Il a été reçu sur le quai de la gare d'Orléans par le colonel Lichtenstein, MM. Cazelles, directeur delà sûretégénérale, et Lozé, préfet de police.

Avant de monter en voiture, il a remercié M. Heurteau, directeur de la Compagnie, d'avoir bien voulu l'accompagner et il l'a félicité de l'exactitude avec laquelle la marche du train a été réglée, malgré les difficultés queprésentent ces sortes de voyages.

Nous avons annoncé qu'une représentation devait avoir lieu à Versailles, au théâtre du Petit-Trianon, au bénéfice du monument de Houdon.

Nous apprenons qu'à la suite de certains faits portés à sa connaissance et au sujet desquels le comité a décliné toute responsabilité, M. Yves Guyot vient de retirer l'autorisation qu'il avait donnée au comité.

A

M. Clemenceau, député du Var, pris d'une indisposition assez sérieuse, a été, ii y à trois jours, contraint, parordre des médecins, de quitter momentanément ses occupations et de prendre le plus grand repos.

L'assaut annuel des Saint-Cyriens et des Polytechniciens a eu lieu dans l'après-midi d'hier, ainsi que nous l'avons annoncé, à la caserne de la rue Bellechasse.

Le général Rothwiller présidait, assisté des commandants de nos deux écoles militaires. A signaler dans la partie réservée à SaintCyr, un magnifique assaut de sabre où M. de Calmel a été très applaudi.

1 Les deux premiers prix ont été pour MM. Ferré, un excellent gaucher, et Morel. Les premiers prix, pour Polytechnique, ont été décernés à MM. Meunier et Caron. A signaler l'absence désagréable de tout

programme.

PAR)S Sm OMNtBUS LA GRÈVE DÉCLARÉE

La réunion do Tivoli. Plus d'omnibus A la préfecture de police. Au siège ~te la Compagnie. La situation

Hier Paris s'est éveillé sans omnibus 1

Le service a été interrompu complètement sur toutes les lignes.

Ainsi que nous l'avons annoncé, une réunion avait eu lieu dans laquelle la grève a été votée à l'unanimité.

On trouvera plus loin le récit des incidents qui se sont produits dans la rue et aux alentours des dépôts.

Le syndicat des employés des omnibus* fait connaître en ces termes les motifs de la grève « Les employés de la Compagnie des omnibus ont dû, devant le refus formel de la compagnie d'entrer en négociations avec eux, se mettre en grève ce matin.

« Confiants dans la sollicitude que la presse parisienne n'a cessé de leur montrer, depuis qu'ils ont élevé la voix contre l'oppression dont ils étaient victimes, ils espèrent qu'en cette dernière et suprême phase de la lutte ~clle ne les abandonnera pas et les aidera, par voie de souscriptions, à soutenir jusqu'au bout le combat.

« Merci pour ce que la presse parisienne a fait pour nous, merci pour ce qu'elle fera.

« Merci à tous ceux qui viendront nous soutenir dans la défense de nos revendications.

« Pour le syndicat A. MoREAu, CoNTENSOUZAC, se- crétaires.

La lettre suivante a été adresséé sous pli recommandé à la Compagnie par le syndicat:

A ~ons&Mr ~e président du conseil d'adminis<ra<tOM de la Compacte <<cs om)M&:M.

« La chambre syndicale des employés de la Compagnie générale des omnibus a rhonneur de vous informer que la grève a été votée cette nuit en assemblée générale.

« Cette grève cessera dès que vous aurez adhéré aux revendications ci-après

« 1° Réintégration immédiate des employés révoqués depuis le 1" mai

« 2" Acceptation en principe de la journée de douzs heures;

« 3° Discussion, avec la représentation, du syndicat des revendications formulées par les employés. « Recevez, monsieur le président,, l'assurance de nos salutations respectueuses, a

(~Mtuettt ?$ M~na~M!). »

A l'heure où nous mettons sous presse, aucune réponse de la compagnie n'est encore parvenue au syndicat, et tout porte à croire qu'il n'en viendra pas. Au siège de la Compagnie Au siège de la Compagnie, depuis le matin, c'estdire depuis qu'ils ont appris qu on dételait les chevaux et rentrait les voitures, les administrateurs, directeurs et ingénieurs sont anblés. A dix heures, coup sur coup, arrivent les membres du conseil d'administration l'un d'un, ne pouvant marcher, se fait apporter dans un fauteuil. M. Gasmescasse, tout essoufflé, se présente à onze heures.

Pendant ce temps, ordre est expédié à tous les chefs de dépôt de diriger sur le bureau contrai tous les palefreniers et les postulants à une place de cocher ou de conducteur; c'est donc bientôt une longue procession de charretiers ou de gens sans place qui viennent s'embaucher.

Ces licences sont généralement accordées. C'est ainsi que l'administration compte recruter pour ce matin le personnel nécessaire. Après une discussion qui a duré près d'une heure, le conseil d'administration a décidé de demander au bureau du Conseil municipal de vouloir bien servir d'intermédiaire entre la Compagnie et les grévistes. On en trouvera le texte plus loin.

M. Guérin assistait à la séance dans un but d'apaisement et pour rendre compte au préfet de la Seine de la décision prise par le conseil d'administration de la Compagnie. Quant a M. Alphand, il n'y représentait, a-t-il dit à la sortie, que le public qui souffre de là grëvedes employés d'omnibus, et il n'avait pas, a-t-il ajouté, à intervenir dans les débats autrement qu'en cette qualité.

Les administrateurs prétendent que sur 925 voitures, 300 étaient sorties hier matin. Ils ont donc déclaré que si des violences n'avaient pas été exercées, que si l'on n'avait pas contraint ces voitures de rentrer, soit en dételant les chevaux, soit en coupant les traits, ils auraient pu assurer le service public en employant des surnuméraires. On verra plus loin que c'est inexact.

Au siège de la Compagnie, un rassemblement assez nombreux a stationné toute la matinée devant les bureaux qu'elle occupe place du Théâtre-Français. De temps à autres passaient des nacres conte~nant de véritables changements de grévistes qui s'arrêtaient sous les fenêtres pour crier Vive la grève! »

Au Conseil municipal

Voici le texte de la lettre que le conseil d'administration a adressée à M. Levraud, président du Conseil municipal de Paris

« Monsieur le président,

« Dans les circonstances actuelles, la Compagnie des omnibus pense que le bureau du Conseil municipal pourrait utilement remplir un rôle d'intermédiaire pour tenter d'arriver à une entente prbntable à tous et avant tout à la population parisienne, que vous représentez.

« Dans une situation analogue, intéressant une autre industrie, le bureau bien voulu récemment remplir un semblable rôle.

«Si vous acceptez cette mission d'apaisement, nous nous mettons à votre disposition.

« Veuillez agréer, monsieur le président, etc. « Le président du conseil d'administration, « Signé DE TAVERNIER. ))

La convocation suivante a été adressée aux membres du Conseil

« Mon cher collègue,

« Nous vous prions de vouloir bien assister à une réunion plénière des membres du conseil municipal, qui aura lieu à l'Hôtel de Ville (ancienne saIJe du Budget~, le mardi 26 mai, à une heure précise. « Ordre du jour Question des Omnibus. « Revevez, mon cher collègue, l'assurance de nos meilleurs sentiments, a

Cette convocation est signée par MM. Bassinet, Baudin, Brousse, Caumeau, Chauviëro, Poussier, Gaufrés, Grébauval, Heppenheimer, Hervieu, Lopin, L. Lucipia, Maury, Patenne, Perrichont, Pétrot, Piperaud, Prache, Prudent Dervilliers, Rousselle, Ruel, Sauton, Stupuy, Thuillie, Vaillant, Vorbe. a Les conseillers municipaux possibilistes viennent d'adresser au préfet de la Seine une lettre lui demandant de prendre immédiatement possession du matériel et des locaux de la Compagnie des

omnibus.

A la préfecture de police

Plus de d9Q2 cents individus, candidats pour le poste de cocher dans la compagnie des Ommbus se sont présentés & la préfecture de police pour obtenir l'autorisation d'entrer immédiatement en fonction. Ha Étaient tous porteurs d'un certmcat d ad-

mission qui leur a été délivré par la compagnie. Ces autorisations leur étaient accordées sur-le-champ par la préfecture de police.

M. Rouanet, conseiller municipal, s'est rendu à la préfecture de police et a eu une entrevue avec M. Lozé.

M. Rouanet a fait au préfet le recit de sa visite à travers les dépôts et lui a affirmé qu'il avait constaté que partout l'attitude des grévistes était très énergique, mais très calme.

Le préfet, a dit, M. Rouanet, a reconnu que la grève était restée dans des limites très sages. Je lui ait fait ensuite observer qu'un grand nombre de cochers et de conducteurs mis ce matin par la Compagnie sur les voitures n'avaient pas de permis pour conduire.

« Par exemple, j'avais été appelé à constater moimême que des contraventions avaient été faites à quatre "cochers des lignes Saint-Ouen-Bastille et place de l'Etoile-La Villette.

« En passant, j'ai insisté pour que les gardiens do la paix ne refusent pas de dresser ces contraventions.

« Enfin j'ai demandé à M. Lozé que les omnibus dont les conducteurs et les cochers n'auraient pas de permis pour conduire fussent envoyés en fourrière. Le préfet de police s'y est absolument refusé en invoquant la nécessité pour lui de ne pas contribuer à désorganiser un service public. H Deux membres du conseil d'administration de la Compagnie se sont rendus auprès du préfet de police pour lui demander quelles mesures il compte prendre dans le but d'assurer la libre circulation des voitures, ce soir, demain et les jours suivants,

si c'est nécessaire.

Le préfet de police leur a répondu qu'il ne disposait pas de forces suffisantes pour garantir sur tous les points de Paris un service d'ordre complet; qu'il allait en référer au ministre de l'intérieur et que celui-ci, après avoir consulté M. le ministre de la guerre, aviserait sans retard.

Les arrestations y

Dès la première heure, le préfet de police a transmis par télégraphe ses instructions à tous les officiers de paix des quartiers excentriques, où se trouvent des dépôts. Il recommandait à ses agents d'assurer la libre circulation des voitures dans Paris, et donnait l'ordre de mettre en état d'ar~station tous les grévistes qui tenteraient de dételer les chevaux ou de faire dérailler les tramways.

En exécution de ces ordres, des escouades d'agents occupaient dès cinq heures du matin les abords des dépôts de la compagnie et faisaient ~circuler au large les grévistes nombreux qui stationnaient aux alentours.

A deux heures, cinquante et un grévistes avaient été arrêtés et écroués dans les différents postes de police; voici les noms de quelques-uns

Henri Dutoit, employé de la Compagnie des omnibus, arrêté rué Ordener, devant le dépôt; Pierre Schauken, sujet belge, palefrenier; Jean Boix et Alexandre Guillemin, cochers, au dépôt des omnibus du quartier de Charonne; Louis Portariès; Alphonse Trichât, cocher gréviste, demeurant rue des Batignolles, arrêté devant le dépôt des omnibus de la rue des Dames; Eugène Baudin, arrêté au dépôt de la'rue Lebrun; Rosalie Tournier, fille soumise, laquelle excitait les grévistes à couper les traits des chevaux d'omnibus; Louis Gaston, imprimeur Fugène Paget, conducteur d'omnibus; Gabriel Guy, palefrenier Charles Verne, palefrenier. M. Boulanger, président du syndicat, avait été arrêté dans la matinée, mais son arrestation n'avait pas été maintenue.

Le bruit courait dans la soirée qu'il avait été arrôtô une seconde fois et envoyé au Dépôt. Sur la convocation de M. Auguste Vacquerie, les rédacteurs en chef des journaux parisiens se sont réunis hier dans les bureaux du~appe~. Aucun procès-verbal de cette réunion n'a été ré-

digé.

11 a éM décidé que les journaux dévoués à la cause. ouvrière ouvriront une souscription en faveur des grévistes.

La Presse recevra et transmettra avec empressement les secours que ses lecteurs voudront bien lui faire parvenir.

L& JOURNEE D'AUJOURD'mjt L'entêtement de la Compagnie

Dans la soirée, nous nous sommes rendus au ministère de l'intérieur pour savoir si des mesures spéciales seraient prises pour la journée d'aujour-

d'hui.

On nous a répondu que le ministre avait eu une conférence dans la journée avec M. Lozé, préfet de police, et qu~I avait également reçu MM. Mersillon et de Tavemier, directeurs de la Compagnie.

On nous a afnrmé que le ministre n'avait pris ni ordonné de prendre aucune mesure extraordinaire..

Dans la soirée, plusieurs corporations et chambres syndicales ont annoncé leur résolution de venir en aide aux grévistes. La Bourse du Travail a voté 100 francs.

La grève continuera aujourd'hui et se prolongera plusieurs jours encore si la Compagnie ne veut pas enfin entrer directement en arrangement avec ses employés.

D'autre part, le conseil d'administration est résolu à faire sortir des voitures ce matin, avec un personnel improvisé.

Ils est à craindre que de nombreuses rixes n'aient lieu, car de leur côté les grévistes sont résolus, comme hier, à empêcher la circulation des voitures.

Dernière heure. Capitulation de la Compagnie

On nous confirme que la Compagnie des omnibus accepte d'entrer directement en pourparlers avec Je bureau du syndicat et qu'elle a décidé de proposer les concessions suivantes « Suppression de la prime et augmentation du prix de journée de 1 fr. « Les surnuméraires assurant le service depuis la sortie de la première voiture jusqu'à la dernière et ne travaillant pas, toucheront une indemnité de 2 fr. par jour.

« Les contrôleurs auront un jour de congé payé par mois. )' p.

La Compagnie annoncerait également l'intention d'étudier un système d'équipes de conducteurs et df cochers devant permettre de donner une heure pour chaque repas.

De son côté le Syndicat des grévistes se montre fermement résolu à exiger, en outre, la réintégration des employés révoqués et le principe de la journée de douze heures.

Il est à prévoir que cette dernière condition ne soulèvera aucune difficulté, puisqu'elle~serà'. certainement résolue par un vote du Parlement. On dit que M. Mesureur aurait tenu le propos suivant 1

Comme on lui demandait dans les couloirs de la Chambre s'il devait interpeller. « A quoi bon porter la question à la tribune, aurait répondu le député de Paris, quand demain j'aurai peut être à interpeuer sur des faits bien plus graves. »

Le gouvernement a refusé de mettre des soldats du train des équipages à la disposition de la. Compagnie. Il y aura seulement des patrouilles (~ cavalerie dans les r*

& TR&VERS PARtS ,'p AUTOUR DE LA GRÈVE

Dans les dépôts d'omnibus. Attitude réS<~ lue des grévistes. Les voitures en dé"tresse. Les accidents. La foule elles grévistes. Vive la grève!

Comme on le pense bien, la grevé générale <îea employés d'omnibus ne s'est pas passée sans incidents.

Voici, très complètement, le récit des manifestations diverses qui se sont produites, un peu partout, à travers Paris.

Boulevard Contrescarpe

Place de la Bastille où nous arrivons vers cinq heures du matin en même temps que les employés des omnibus du dépôt du boulevard Contrescarpe. et celui des omnibus de la Madeleine, nous aperce-. vons le chef du dépôt auquel nous demandons si les voitures partiront à l'heure réglementaire, c'està-dire la première à six heures un quart. Sa réponse arrogante est affirmative'. Toutes les voitures partiront. »

Jusqu'à six heures les marchands de vins sa remplissent de grévistes, aucun cocher, ni conducteur n'est entré au dépôt. A six heures dix un vieux cocher, le père Pougeol, dénommé Jésus-Christ, pénétra son fouet à la main dans le dépôt. C'est la seul qui ait l'intention de partir.

Sortie de la première voiture ? A six heures un quart on attelle les premières voitures 143 et 144, les grévistes en foule sont devant la porte du dépôt. M. Lyon-Alemand, conseiller municipal, vient d'arriver; quelques agents regardent tranquilement les groupes qui se forment.. Un quart d'heure après, aucune voiture n'est encore sortie, mais une est prête; le cocher,' ancien conducteur, est sur le siège et M. Leller, de la Compagnie, fait les fonctions de contrôleur.

La voiture s'ébranle pour sortie du dépôt. A ce moment, M. Lyun-AIemand réquisitionne deux agents pour vérifier si les conducteurs et cochera ont bien leur permis de la préfecture.

Dès que la voiture est sortie du dépôt, les agents arrêtent les chevaux pendant que les grévistes montrent le poing au- cocher et au contrôleur. M. Carlier, commissaire de police du quatrième.! arrondissement, arrive et prétend que les grévistes portent atteinte à la liberté du travafh-lf fait rentrer la voiture qui ressort cette fois sans' encombre, mais arrivée à la station près du caha~ les grévistes détachent les chevaux, sonnent le ca~; } dran, et après que le brigadier des agents de police: prend le nom du condcteur, chevaux et voitures sont rentrés au dépôt. Des hourrahs frénétiques acclament la grève. Une demi-heure après, une autre voiture essaye de sortir mais elle a le même sort que la précédente. Le dépôt est alors fermé ainsi que les bureaux de la place de la Bastille.

Pendant ce temps, un tramway de CharentonLouvre arrive en face le dépôt du boulevard Contrescarpe, mais des grévistes lui font rebrousser chemin. li rentre au dépôt.

Clichy-Odéon

Les deux premières voitures sont arrivées à sept heures et sept heures quarante, suivies de plusieurs autres. Toutes étaient conduites par des cochers et des conducteurs improvisés, coiffas de chapeaux do paille à ruban blanc auxquels les cochers en station près du Luxembourg lancent force quolibets. Bientôt les grévistes, soutenus par .les curieux, se massent et font rebrousser chemin aux trois voitures, qui retournent au dépôt sans conducteurs, envahies par quelques gamins. Pas d'autres incidents. Au dépôt des omnibus Clichy-Odéon, avenue de Clichy, 143, vers six heures et demie, le chef du dépôt, ne voyant pas un seul cocher se présenter pour commencer son service, a voulu, conformément aux ordres reçus de l'administration, faire sortir une première voiture, conduite par un palefrenier. Mais les grévistes et curieux, au nomBre de trois cents environ, qui stationnaient à la por.te, se sont mis à pousser des cris de « Vive la grever x en envahissant l'omnibus. Le cocher improvisé, tout interloqué, a déguerpi, et les grévistes ont dételé les chevaux, qu'ils ont tranquillement recon-~ duits à l'écurie. Les pauvres bêtes ne s'étaient;' f 'jamais trouvées à pareille fête.. Quelques minutes plus tard, le chef du déposa voulu renouveler sa tentative, les mômes mcMtsnta

se sont alors reproduits.

Enfin, de guerre lasse, le chef du dépôt a. fait ren-. trer ses voitures et ordonné la fermeture des portes du dépôt. Une dernière tentative est néanmoins faite parja rue Lemercier où le dépôt a. une sortie, mais sa~~s plus de succès. Les grévistes forcent les voitures~ rentrer.

Dépôt de la Villette

Au dépôt de Chaumont, 53, boulevard de la Viîlette, trois voitures seulement sont sorties sur vingtsix. La première rentra aussitôt, avec ses vitres brisées, les traits et les guides coupés.

Boulevard Richard-Lenoir

Au dépôt du boulevard Richard-Lenoir, toutes Ie9 voitures qui étaient sorties dans la matinée ont dû rentrer aussitôt après être arrivées à leur point de départ, place de la Bastille.

Là, un incident regrettable s'est produit. Au moment où le conducteur d'un tramway faisant le service entre la Bastille et Saint-Ouen, recevait lesnuméros d'ordre des voyageurs, un gréviste s'approcha de lui et le somma de rentrer sa voiture. N'ayant pas répondu à cette injonction, le malheureux fut frappé violemment à la tête avec une cale que le gréviste tenait dissimulée derrière son doa~ Le pauvreconducteur tout ensanglanté dut, sur les menaces des grévistes, reconduire sa voiture au dépôt du boulevard Richard-Lenoir.

BastilIo-St-Ouen

Sur la ligne de Saint-Ouen à la Bastille, une seule voiture est sorti, mais n'a effectué qu'une partie de son parcours, comme toujours envahie par les gr6< vistes.

Boulevard Bourdon

Au dépôt du boulevard Bourdon, où sont remisés la plupart des omnibus Madeleine-Bastille et les tramways Gare de Lyon Pont de l'Aima, aucune voiture n'était sortie. Un certain nombre de Cochers et de conducteurs se sont bien présentés, mais tous, intimidés par les scènes de violence dont ils avaient été témoins et s'estimant InsufSsam. ment protégés par la police, ont déclaré ne pas vouloir sortir.

Aux abords de ce dépôt une centaine de grévistes se sont réunis dans la matinée, chez un marchand de vin, voisin du bureau des omnibus, faisant l'angle des boulevards Henri IV et Bourdon. On y a décide qu'avant' de prendre aucune résolution il fallait attendre le résultat de la démarche que se propose de faire dans l'après-midi d'aujourd'hui auprès du conseil municipal, la délégations des gré-

vistes.

A l'issue de cette petite réunion, quelques grévistes sont montés dans des fiacres et se sont dirigea vers le boulevard Saint-Germain, se découvrant en passant devant les omnibus de la. ligne SamtJMar-