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Notice complète:

Titre : Le Monde artiste : théâtre, musique, beaux-arts, littérature

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1911-03-25

Contributeur : Lemoine, Achille (1813-1895). Directeur de publication

Contributeur : Gourdon de Genouillac, Henri (1826-1898). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32818188p

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32818188p/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 19764

Description : 25 mars 1911

Description : 1911/03/25 (A51,N12).

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5455675p

Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, Z-1096

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 03/12/2008

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ANNEE — N° 12

Samedi 25 Mars 1191

MONDE ARTISTE

ILLUSTRÉ

LE NUMERO : 50 CENTIMES

Directeur : Paul MILLIET


Chemins de fer de l'Est.

FÊTES DE PAQUES

Train d'excursion d' AVRICOURT à PARIS

Le mercredi 12 avril, la Compagnie des Chemins de fer de l'Est mettra en marche, au départ d'Avricourt pour Paris, un train spécial d'excursion à prix très réduits composé de voitures de 3e classe.

Ce train prendra des voyageurs à certaines stations comprises entre Avricourt et Château-Thierry inclus.

Le nombre de places est limité.

Les prix des billets d'aller et retour sont les suivants :

3° classe.

D'Avricourt 6 60

De Nancy 16 60

De Bar-le-Duc 11 »

De Châlons-sur-Marne D'Epernay 9 "

De Dormans

De Château-Thierry. 7 50

Au retour, les voyageurs seront admis dans la limite des places disponibles dans tous les trains comportant des voitures de 3e classe aux mêmes conditions que les voyageurs à plein tarif.

Les billets de retour seront valables, au départ de Paris, jusque dans la nuit du 20 au 25 avril, a 1 h. du matin.

L'itinéraire à suivre au retour doit emprunter la ligne de Belfort.

Les bicyclettes sans moteur mécanique à l'exclusion des tandems, tricycles, etc., seront admises, sous certaines conditions; leur nombre est fixé à cinquante.

Pour tous renseignements détailllés, prière de cansulter les affiches spéciales.


LE MONDE ARTISTE 1

LE CARNET DE MADAME

DE L'AMOUR (Suite.)

En France, l'opinion forcerait ces gens à •prouver leur dire ou à rendre raison à l'étranger. Ici l'opinion publique et le mépris ne signifient rien. La richesse est toujours sûre d'être bien reçue partout. Un millionnaire déshonoré et chassé de partout à Paris peut aller en toute sûreté à Rome ; il y sera considéré juste au prorata de ses écus.

De l'Angleterre. — J'ai beaucoup vécu ces temps derniers avec les danseuses du théâtre Del Sol, à Valence. L'on m'assure que plusieurs sont fort chastes; c'est que leur métier est trop fatigant. Viganô leur fait répéter son ballet de la Juive de Tolède tous les jours, de dix heures du matin à quatre, et de minuit à trois heures du matin; outre cela, il faut qu'elles dansent chaque soir dans •les deux ballets.

Cela me rappelle Rousseau qui prescrit de faire beaucoup marcher Emile. Je pensais ce soir', à minuit, en me promenant au frais sur le bord de la mer, avec les petites danseuses, d'abord que cette volupté surhumaine de la fraîcheur de la brise de mer sous le ciel de Valence, en présence de ces étoiles resplendissantes qui semblent tout près de vous, est inconnue à nos tristes pays brumeux. Cela seul vaut les quatre cents lieues à faire, cela aussi empêche de penser à force de sensations. Je pensais que la chasteté de mes petites danseuses explique fort bien la marche que l'orgueil des hommes suit en Angleterre pour recréer doucement les moeurs du sérail au milieu d'une nation civilisée. On voit comment quelques-unes de ces jeunes filles d'Angleterre, d'ailleurs si belles et d'une physionomie si touchante, laissent un peu à désirer pour les idées. Malgré la liberté qui vient seulement d'être chassée de leur île, et l'originalité admirable du caractère national, elles manquent d'idées intéressantes et d'originalité. Elles n'ont souvent de remarquable que la bizarrerie de leurs délicatesses. C'est tout simple, la pudeur des femmes, en Angleterre, c'est l'orgueil de leurs maris. Mais, quelque soumise que soit une esclave, sa société est bientôt à charge. Dé là, pour les hommes, la nécessité de s'enivrer tristement chaque soir, au lieu de passer, comme en Italie, leurs soirées avec leur maîtresse. En Angleterre, les gens riches ennuyés de leur maison et sous prétexte d'un exercice nécessaire font quatre ou cinq lieues tous les jours, comme si l'homme était créé et mis au monde pour trotter. Ils usent ainsi le fluide nerveux par les jambes et non par le coeur..Après quoi ils osent parler de délicatesse féminine, et mépriser l'Espagne et l'Italie.

(A suivre.) STENDHAL.

(Henry Beyle.)

I. — L'AVIS DU DOCTEUR.

Acné. — Maladie des glandes sébacées, petites glandes situées dans l'épaisseur de la peau, qui sécrètent un liquide gras et huileux, le sebum, destiné à lubrifier les poils et le tégument. Pommades soufrées et scarifications (acide salicylique, 2 grammes; soufre précipité et savon de potasse, 30 grammes de chaque).

II. — LE CONSEIL D'ELEGANCE.

Les bas de fil à « jours », un peu délaissés pour la ville, vont, paraît-il, être de nouveau en vogue pour accompagner les souliers vernis. Le bas de soie, par contre, se réservera plutôt pour le soir, et il se fait non seulement d'une finesse arachnéenne, mais encore il s'incruste de motifs de chantilly noir, auxquels la transparence de la peau donne un charme subtil. Ces motifs se disposent soit en pointe sur le dessus du pied, soit en spirales, soit en entre-deux sur toute la hauteur. Une jolie nouveauté à signaler est le bas mitaine, fait en résille de soie noire et qui se porte sur un autre bas de soie de teinte vive et assortie à la toilette.

Les personnes pressées qui possèdent déjà beaucoup de chapeaux d'été les verront bientôt démodés, car chaque jour on nous montre une nouveauté. La dernière se porte vers les calottes, que l'on fait démesurément hautes. Elles ne sont pas gracieuses et prouvent une fois de plus que la mode pour être jolie doit être faite de modération. La couleur en vogue pour les chapeaux est indiscutablement le mélange du rouge, du noir et du blanc.

III. — RECETTE DE LA CUISINIERE.

Confitures trop cuites. — C'est un malheur, ou plutôt un accident assez fréquent. Il suffit, en effet, de quelques minutes de distraction pour que les confitures deviennent trop épaisses. Dans ce cas, il ne faut pas les croire manquées, car le remède est bien facile. Prenez la valeur d'une demilivre de fruits frais par livre de confitures et pressez le jus de ces fruits. Faites-lui donner un bouillon et écumez, puis mélangez ce jus à vos confitures trop épaisses, et remettez-les sur le feu en opérant le mélange jusqu'à consistance voulue.


2 LE MONDE ARTISTE

PROFESSEURS SPÉCIALEMENT RECOMMANDES par le "MONDE ARTISTE"

Déclamation.

ALBERT LAMBERT, 48, rue Monsieur-le-Prince.

Mlle GERFAUT, de l'Odéon. Diction, déclamation lyrique, préparation au Conservatoire,Comédie de salon, Conversation française à l'usage des étrangers — 22, rue Montaigne.

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LE

MONDE ARTISTE

ILLUSTRÉ

PAUL MILLIET DIRECTEUR

51e ANNÉE N° 12

SAMEDI 25 MARS 1911

FONDÉ EN 1860

NOS PORTRAITS

(Dessin original de Renefer.)

GEORGES LECOMTE


LE MONDE ARTISTE

LES AFFICHES DE LA SEMAINE

PARIS

OPÉRA. — Lundi, et samedi, Tristan et Isolde; mercredi, les Maîtres Chanteurs ; vendredi, Samson et Dalila, Coppélia. OPÉRA-COMIQUE. — Lundi, les Dragons de Villars, les Lucioles; mardi, le Roi d'Ys; mercredi, Madame Butterfly; jeudi (matinée), Galathée, la Fille du Régiment ; le soir, Carmen ; vendredi, Louise ; samedi, le Roi d'Ys.

COMÉDIE-FRANÇAISE. — Lundi, Ruy Blas; mardi et jeudi (soirée), le Joueur, les Fourberies de Scapin ; mercredi et samedi, les Marionnettes; jeudi (matinée),

Hernani ; vendredi, le Mariage de Figaro. ODÉON. —

Lundi, l'Armée dans la ville; mardi, mercredi, jeudi (matinée et soirée), vendredi et samedi l'Arlésienne.

GAIETÉ-LYRIQUE. — Lundi, Hernani; mardi, jeudi et samedi, Elsen ; mercredi, la Favorite, le Soir de Waterloo; jeudi (matinée), dimanche (matinée), Don Quichotte; vendredi, la Juive; dimanche (soirée), les Huguenots. TRIANON-LYRIQUE. — Lundi et dimanche,

Giroflé-Girofla; mardi, Zaza; mercredi, le Pré aux Clercs; jeudi (matinée), la Mascotte;, jeudi et dimanche (matinée), Miss Helyett : vendredi, Mam'zelle Nitoucke ; samedi, Fra Diavolo, Monsieur Choufleury.

CHATELET : Arsène Lupin contre Herlock Sholmès. — THÉATRE SARAH-BERNHARDT : la Dame de Monsoreau. — G YM: NASE : Papa. —RENAISSANCE : le Vieil Homme. — VAUDEVILLE : le Tribun. — PORTE-SAINT-MARTIN : l'Enfant de l'Amour. — AMBIGU-COMIQUE : le Roi Soleil. — FOLIESDRAMATIQUES : Fruit d'amour. — DÉJAZET : les Camelots du 210e — APOLLO : la Divorcée. — THÉÂTRE CLUNY : le Père la Frousse. — BOUFFES-PARISIENS : le Mariage de Mademoiselle Beulemans. — THÉÂTRE DES NOUVEAUTÉS : Et ma soeur. — ATHÉNÉE : les Bleus de l'Amour.

— PALAIS-ROYAL: l'Amour en manoeuvres. — VARIÉTÉS: le Bois Sacré — THÉÂTRE RÉJANE : l'Oiseau bleu. — THÉÂTRE ANTOINE : la Femme et le Pantin. — CAPUCINES : Avec le Sourire. — THÉÂTRE le MICHEL : le Veilleur de Nuit.

— THÉÂTRE DES ARTS : le Marchand de Passions, Fantasio. — COMÉDIE-ROYALE : le Petit Voyage.

TERNES, FANTAISIES-PARISIENNES, OLYMPIA, GAITÉ-ROCHECHOUART, CIGALE, ELDORADO, MOULIN-ROUGE, SCALA, LE CARILLON, LUNA-PARK, LA LUNE ROUSSE, PÉPINIÈRE, CONCERTS TOUCHE, CONCERT MAYOL, JARDIN DE PARIS, NOUVEAU THÉÂTRE DU CHATEAU-D'EAU, THÉÂTRE DE MONSIEUR, TRÉTEAU ROYAL, THÉÂTRE MONDAIN, THÉÂTRE MODERNE, THÉÂTRE MONCEY, MONTMARTRE, THÉÂTRE DES GOBELINS, THÉÂTRE DE GRENELLE, THÉÂTRE MONTPARNASSE, BELLEVILLE, MONTROUGE, COMÉDIE-MONDAINE, THÉÂTRE GRÉVIN: Spectacles-Opérettes-Revues.

ÉTRANGER

Berlin, — OPÉRA: 19, Quo Vadis? Manon Lescaut; 20, le Feu de la Saint-Jean, Cavalleria Rusticana; 21, Aïda; 22, Manon Lescaut; 23, Cavalleria Rusticana, le Feu de la Saint-Jean; 24, Faust; 25, la Traviata; 26, Cavalleria Rusticana, le Feu de la Saint-Jean.

Cologne. — OPÉRA: 19, les Contes d'Hoffmann; 20, Orphée dans les Enfers; 21, Carmen; 22, la Chauvesouris; 23, Mignon; 24, Rienzi; 25, la Bohème; 26, la

Traviata. COMÉDIE: 19, la Mort de Wallenstein ;

20, Lancelol ; 21, Comme il vous plaira; 22, Uriel Acosta*; 23, Die Rallen: 25, l'Oncle Bräsig ; 26, les Nibelungens (II); 27, l'Enlèvement des Sabines.

Dresde. — OPÉRA : 19, 24 et 26, le Chevalier à la Rose; 20, la Walkyrie; 21, Zar und Zimermann; 22, Aida; 23, Siegfried; 25, Madame Butterfly; 27, le Crepuscule

Crepuscule Dieux. COMÉDIE : 19, 23 et 26, Foi et

Patrie; 20, Guillaume Tell; 21, Der Damenhrieg ; 22, Hans Sonnenstöhsers; 24, Don Carlos ; 25, Docteur Klaus; 27, Agnes Bernauer.

Francfort-sur-le-Mein. — OPÉRA : 19, Mignon ; 19 et 25, la Jolie Risette; 20, Lohengrin; 21, Amélie ou le Bal masqué; 22, Die Fledermaus; 23, le Chevalier à la Rose ; 24, Der Wildschülz ; 26, le Comte de Luxembourg,

la Flûte enchantée. COMÉDIE : 19 et 24, Madame

Bonivard; 20, Herr und diener ; 21, Hamlet ; 22, Zopf und Schwert; 23, Glauhe und Heimat ; 25 et 26, Anatol Gyklus ; 26, l'Enlèvement des Sabines.

Leipzig. — NEUES THEATER : 19, Mignon; 20, Zopf und Schwert; 21 et 27, Der Dorfwahrlager, le Bonhomme de Neige, Cavalleria Rusticana; 22, Guillaume Tell; 23, Carmen; 24, Kiefland; 25, la Veuve joyeuse; 26, Rienzi.

Vienne. — OPERA: 19, Der Zigeunerbaron; 20, Elektra; 21, Der Musikant; 22, Aschenbrödel; 23, Violetta; 24, les Joyeuses Commères de Windsor ; 25, Coppelia, l'Homme de Neige, Tannhaüser; 26, Mignon.

Weimar. — 19, le Crépuscule des Dieux; 21, Zar und Zimmermann; 22 et 25, Ein Nachllager Corvins; 23, Der Bürenhaüfer; 26, le Wildschülz.

NOS GRAVURES

Nos dramaturges, quoi qu'on en ait dit, sont les plus appréciés par l'opinion mondiale et notre théâtre occupe une bonne part des soirées sur la plupart des grandes scènes de l'Europe ou de l'Amérique. En tête d'une série d'études que publiera le Monde Artiste, M. Marcel Rolan 1, l'auteur apprécié de Presqu'Homme et du Déluge Futur, le poète des Insoumis, consacre un article à Georges Lecomte, qui avant d'être le romancier considérable et l'érudit critique d'art que nous connaissions, donna au théâtre des oeuvres du plus haut mérite. M. Georges Lecomte reviendra à la scène, et tous s'en réjouiront.

— Nous publions ensuite une photographie amusante, montrant, sur la terrasse du New-Theater, les jeunes interprètes de l' Oiseau bleu et un très beau portrait du célèbre acteur anglais Benson.

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SILHOUETTES D'AUTEURS

GEORGES LECOMTE

Si les romans de M. Georges Lecomte d'une vision saine, d'une profonde acuité d'analyse, l'ont placé parmi les premiers de nos écrivains, si sa personnalité comme

critique d'art est une de celles qui ont su s'imposer par leur érudition, leur clairvoyance et leur courage absolu dans la sincérité, celui qui précéda M. René Doumic à la présidence de la Société des Gens de Lettres, est sans contredit moins connu par son théâtre. Pourtant Georges Lecomte a écrit des pièces qui méritent autre chose qu'une brève mention dans une nomenclature. A l'heure où l'on assiste à un cruel débat qui livre nos scènes à des auteurs sans talent, à des trafiquants sans scrupules, et où l'on voit imposer au public français, sous l'étiquette de chefs-d'oeuvre, des productions dénuées de pensée, écrites d'une plume barbare, amoindrissantes par le fond et par la forme, il est intéressant et nécessaire de rappeler que nous possédons des auteurs dramatiques dignes de ce nom et de notre littérature.

Georges Lecomte figure dans cette réconfortante phalange avec deux pièces : La Meule et Mirages, jouées l'une et l'autre au Théâtre Libre... Le Théâtre Libre ! Qui d'entre ceux que l'évolution théâtrale ne laisse pas indifférents a oublié les temps héroïques où, vers 1885, un jeune homme, employé à la Compagnie du Gaz, louait une salle du passage de l'Elysée des Beaux-Arts, pour y donner des représentations d'avant-garde ? Le Théâtre Libre, ayant à lutter, vécut, contrairement à tant de tentatives analogues, qui meurent écrasées sous les applaudissements trop indulgents d'une unique représentation.

Là débutèrent Brieux, avec sa première pièce en trois actes : Ménages d'artistes; Pierre Wolff, avec une comédie : Jacques Bouchard. Là fut donné, le 21 octobre 1889 (précisons !), cet infortuné Père Lebonnard, de Jean Aicard, lequel, reçu depuis des années à la Comédie-Française, sous l'administration — déjà! — de M. Claretie, qui n'avait pas perdu l'occasion d'être ineffable, ne put jamais arriver à être joué, du moins à ce moment, sur cette scène ultra-officielle. Elle en a pourtant vu d'autres depuis!... Là encore, Rodolphe Darzens fit représenter sa traduction des Revenants, laquelle vaut bien, j'imagine, toutes celles du comte Prozor.

Georges Lecomte confia la Meule à Antoine en 1891. Pièce sobre, prenante, d'une vérité douloureuse qui force à penser. D'emblée, le futur auteur des Cartons verts, de l'Espoir et des Allemands chez eux, y donnait la mesure de son esprit attentif aux graves réalités de la vie.

Rousselot, un avocat besogneux de province, est marié à une femme frivole qui l'a trompé jadis avec un élégant viveur de Paris, René de Stellanville. Brave homme, il a pardonné, d'abord parce qu'il est droit et ne croit pas, comme tous les êtres normaux, à la récidive d'une faute qu'il veut oublier, ensuite à cause de leur fille, Jeanne. C'est celle-ci, claire enfant, ignorante des laideurs du « monde», que ce monde va se charger de broyer. Ignorante, oui, et cependant, pour avoir surpris des gênes, des lambeaux de phrases, elle sait le désaccord qui sépare ses parents, et la mystérieuse intuition des jeunes âmes lui a fait deviner la tristesse qu'on lui cachait. Mais bah! Elle est gaie quand même. Tout s'arrange, sa mère l'emmène à Paris, sous couleur d'obtenir à Rousselot un poste de magistrat; en réalité pour renouer avec son ancien amant les relations rompues. Et Jeanne chante... Elle a un camarade d'enfance qui deviendra sans doute son mari. N'est-ce pas logique, dans l'ordre? Vraiment la vie est bonne et belle, qui dispose ainsi les choses pour le bonheur de tous !... Or, ce n'est nullement cela qui se produit, non, rien de cela. Voici qu'Edmond Morin, l'ami d'enfance, ne veut pas du tout se marier avec elle, et qu'au contraire Stellanville, le cynique boulevardier, amateur de fruit vert et de cotillons courts, s'est enflammé auprès de l'adolescente. Cet homme a fait un rêve, épouser Jeanne, la fille de sa propre maîtresse. Il s'en ouvre à Mme Rousselot : riche, galant, épris, il a tout pour rendre heureuse l'enfant. Usé ? Bah, le temps lui laissera bien quelques années de répit. Et c'est le bien-être, l'aisance assurée, grâce à cette union, pour la famille Rousselot. Alors la mère, par un patient travail, convainc tour à tour son mari et Jeanne de la nécessité du mariage avec Stellanville... Ah, la meule de la vie, cette terrible abatteuse d'illusions et d'espoirs! Comme elle écrase le coeur jeune, confiant de l'enfant, et l'honnête rigidité de l'avocat!

Ecoutez-le gémir, celui-ci, sur son impuissante lâcheté.

— Bon Dieu ! Que la vie est dure... Ah ! la société qui vous broie comme une meule !...

— Que c'est commode d'être honnête quand on est riche ! Vivre avec le mépris des gens et de soimême!...

— Voilà l'hypocrisie installée dans notre maison... Nous avons honte tous trois de ce que nous faisons!

Oui; ils ont honte, et pourtant, désespérés, douloureux, ils consentent, et le rideau se baisse sur cette tragédie, plus cruelle encore d'être intime, et de synthétiser sous le masque moderne les plus antiques déchirements de conscience.

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LE MONDE ARTISTE

Mirages, drame en cinq actes, fut joué en 1893. Antoine, qui avait créé dans la Meule le rôle de Rousselot, y tint celui de Paul Hamelin. Paul Hamelin, c'est le rêve mis en face de la réalité, concrétisée sous les traits de Louis Naltier. Un symbole très haut, très vaste, domine toute la pièce. Paul Hamelin est un écrivain, un poète, épris du seul vol intérieur de ses pensées, fasciné par l'unique phare de son idéal. Son ami Nattier, financier, brasseur d'affaires, c'est au contraire l'action, la lutte ardente et remuante pour la vie. Qui donc vaincra? Ni l'un ni l'autre. Tous deux succombent. Paul, après avoir tenté de s'étourdir, de se galvaniser au contact de ses contemporains, en fréquentant bals, soirées et « salons où l'on cause », — oh ! cet acte où Georges Lecomte, le fouet en main, fait sauter sous nos yeux tous les pantins modernes d'une soirée dansante ! — Paul meurt brûlé de sa fièvre, tué par ce cerveau même d'où il prétendait tirer toute sa vie. Louis, volé par des associés, se voit ruiné, réduit à la fuite. Ils ont eu tous deux leurs mirages... Dénouement pessimiste, à l'Ibsen? Pas tant qu'on le croirait. Car, malgré la loyauté de l'auteur et l'impartialité qui règne à travers le drame, comme un parti-pris d'équilibrer la déroute du rêve pur à la défaite du réel absolu, Georges Lecomte n'a pu dissimuler sa sympathie pour Nattier, pour l'homme vivant — malheureux, oui, mais enfin vivant ! L'éloquence de certaines pages le prouve. Mirages pour mirages, qui sait si l'on n'acquiert pas plus de gloire en poursuivant ceux qui vous forcent à lutter, à rivaliser, à vous efforcer dans une continuelle émulation, au lieu d'abdiquer, de professer un fatalisme solitaire, et de cultiver dans une égoïste tour d'ivoire l'orchidée rare dont nul ne respirera le parfum?

Une très belle scène du deuxième acte met en présence les deux chevaliers de ce double idéal.

PAUL. — Lutter ? A quoi bon?

Louis. — Oh! je sais bien, tu fais profession de dédaigner l'action, l'effort. Qu'importe, n'est-ce pas, l'humaniié et la vie ? Ce qu'il y a de bon, c'est le rêve, c'est l'enfouissement égoïste et dédaigneux dans sa personnalité... Prendre part aux débats de l'existence, fi donc ! Abstenons-nous. Entassons à plaisir du deuil dans notre âme pour qu'elle puisse ensuite mieux crier sa douleur! Vivons passif et renfermé.

Et plus loin :

— Tu as tort d'éviter, par parti-pris, tout ce qui ressemble à un contact avec l'humanité. L'action ne mérite pas tous tes dédains. Si elle réserve des déboires, c'est par elle seulement qu'on peut avoir des bonheurs complets. Elle nécessite de l'intelligence, de la volonté, des qualités de santé et d'équilibre que beaucoup de gens n'ont plus aujourd'hui, ou que, à dessein, ils laissent s'oblitérer... C'est ton cas... Je ne veux pourtant pas me donner en exemple, mais je ne suis pas plus bète qu'un autre... pas plus qu'un autre fermé aux idées et à l'art, et je trouve que le combat vital, avec l'acceptation pure et simple de la condition humaine, est un but suffisant à notre énergie. Cela aussi a sa poésie et sa grandeur,

Et une réplique résume nettement la pensée de l' écrivain :

— L'action, que je représente, puisque tu l'as dit, a cela de bon : c'est qu'elle veille!

Cette conclusion, en l'honneur de la vie et du labeur de chaque jour, conclusion à demi-voilée, implicite, il me plaît de la dégager de la pièce, et tout dans l'oeuvre de Georges Lecomte m'y autorise. Si, en effet, l'écrivain de la Meule et de Mirages a cédé, depuis, le pas au romancier et au critique, c'est toujours l'amour passionné de l'humanité profonde et diverse qui éclate chez Georges Lecomte. Il aime la vie, il la peint tantôt subtilement, tantôt par touches vigoureuses, mais sans jamais la renier, avec une belle santé de lutteur toujours prêt. Professeur d'énergie, on peut l'être aussi par la plume, n'en déplaise à M. Roosevelt, qui l'est lui, par le riffle. A condition cependant que le théâtre sache garder, comme dans les deux pièces que je viens d'analyser trop brièvement, une haute tenue littéraire. Sans cela, nous tombons dans le sport épileptique ; et l'art dramatique, au lieu d'être digne de la scène française, ne mérite que les honneurs d'une salle de boxe !

MARCEL ROLAND.

La Semaine Théâtrale

Théâtre Sarah Bernhardt. — La Dame de Montsoreau, drame en cinq actes et dix tableaux, précédé d'un prologue d'Alexandre Dumas et Auguste Maquet. (Première représentation à ce théâtre le mercredi 15 mars.)

Porte-Saint-Martin. — Hécube, drame en trois actes d'Euripide, traduction intégrale, en vers, de MM. Silvain et Ernest Jaubert. (Première représentation le samedi 18 mars.)

Nouveau Théâtre d'Art. — Les Pies, comédie en trois actes d'Ignasi Iglesias, traduite du catalan par M. G. Billotte ; Perlot, un acte en vers de M Gabriel Nigond. (Premières représentations le mardi 21 mars.)

La Dame de Montsoreau, que vient de reprendre le Théâtre Sarah Bernhardt, est l'un des derniers (1860) et l'un des plus beaux drames de la célèbre collaboration

Alexandre Dumas et Auguste Maquet. Oh ! la bonne. soirée! Il nous a semblé qu'il courait comme un rayon de joie sur la figure des spectateurs émerveillés, et comme reverdis par cette oeuvre charmante, pleine de souplesse et de vigueur, étincelante de jeunesse et d'amour. Et quelle émouvante variété de personnages! Le chevaleresque Bussy et le lâche duc d Anjou, l'énigmatique Henri III et l'ambitieux duc de Guise, le fou Chicot et le moine Gorenflot, Diane de Meridor, la belle des contes de fée, à la chevelure dorée, aux yeux noirs remplis de larmes et la sémillante comtesse de Saint-Luc, à la bouche pleine de sourires ! Les aventures, les enlèvements, l'amour ardent et passionné dans la petite maison de la rue des Tournelles, les intrigues mortelles des cours, et les émotions de la place publique, les conspirations et les duels, tous ces éléments

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LE MONDE ARTISTE

romanesques s'amalgament aux souvenirs réels de nos annales dans un art si consommé qu'on se demande où commence la légende, où finit la réalité...

Pourquoi la foule ne se porterait-elle pas aujourd'hui, comme autrefois, à ce drame qui a des envergures d'épopée ? Les chefs-d'oeuvre ne vieillissent pas, et la Dame de Monsoreau — mais oui ! — est bien près d'en être un, dans son genre... Comment ne pas se passionner pour Chicot, ce frère de d'Artagnan, héros toujours de belle humeur, créé par deux auteurs dramatiques de génie, habiles à tenir le spectateur en haleine ? Type de bravoure et de gaieté, de noblesse et de dévouement, Chicot n'estil pas l'expression la plus vraie du Français ? Il en a la rapidité d'action, la finesse de sentiment, le courage toujours gai. Dans bien des années, lorsque tant de choses auront passé, lorsque les gloires factices seront mortes, et évanouies les réputations d'emprunt, quelques-unes de ces merveilleuses figures créées par Dumas et Maquet vivront encore, croyez-moi, de cette vie qu'on appelle l'immortalité.

Après Mélingue — mais qui donc a vu Mélingue?

— après Lafontaine, après Duquesne, après Coquelid, M. de Max assumait la lourde tâche de repréde toute autre manière que ses prédécesseurs. Estil dans le vrai? Je n'en jurerais pas... Toujours est-il qu'il nous y a profondément intéressé. M. Damorès fait, à côté de lui, un Bussy plein de vaillance, et M. Guidé un Henri III tout à fait remarquable. M. Chameroy a déchaîné le rire sous la robe de Gorenflot. El Mme Marie Louise Derval a obtenu un vif succès de jolie femme et de comédienne en Diane de Méridor.

Des dix-huit tragédies d'Euripide, Hécube est-elle la meilleure? On nous permettra de ne pas trancher ici la question. La pièce présente un sujet double. On s'intéresse tout d'abord au sort de Polyxène que les Grecs vont immoler sur le tombeau d'Achille. Puis la seconde partie de la pièce a pour objet la vengeance d'Hécube sur le roi de Thrace, Polymnestor. La malheureuse reine apprend que son fils Polydore a été assassiné par Polymnestor, à qui Priam l'avait confié. Alors elle attire dans un piège le roi de Thrace et lui crève les yeux. — Le défaut capital de l'oeuvre, c'est que l'action manque d'unité, ou, si l'on veut, que le poète n'a pas serré suffisamment le lien qui en unit les deux parties. Mais le pathétique y abonde, et jamais peut-être Euripide ne fut plus éloquent. La douleur d Hécube, ses supplications auprès d'Ulysse pour sauver sa fille et l'héroïque résignation de Polyxène ne sont-elles pas des beautés de premier ordre ?

Telle a été, sans doute, l'opinion de M. Silvain, puisque, dans le but d'offrir à sa femme, Mme Louise Silvain, un rôle qui valût sa remarquable création d'Electre, il s'est attelé, de concert avec un vrai lettré, M. Ernest Jaubert, à la traduction intégrale de la célèbre pièce d'Euripide, et en a offert la primeur à un public d'amis et d'invités — entre autres, tous ses camarades de la Comédie-Française

— qui ont réservé à sa noble tentative le plus chaleureux accueil.

Nous ne sourions assez louer les excellents traducteurs, qui ont rendu la pièce d'Euripide

en une langue claire et ferme, en vers solides et sonores. Pourquoi la pièce « essayée » à la PorteSaint-Martin, ne serait-elle pas jouée sur un autre théâtre — inutile de vous dire lequel — où elle retrouverait tout naturellement les interprètes qui l'ont fait applaudir en une triomphante matinée ? C'est, tout d'abord, Mme Silvain, qui porte sans défaillir l'effroyable rôle d'Hécube; puis Mlle Géniat, si touchante Polyxène; M. Leitner, très ingénieux Ulysse; et Ravet, superbe Agamemnon, et Alexandre, merveilleux « récitant ». Et Mlle Bovy, victime inanimée du terrible Polymestor. Et... « le monstre » lui-même, M. Silvain, qui donne à l'infâme et infortuné roi de Thrace un saisissant relief, à la fois comique et tragique... Tout, jusqu'à la discrète musique de M. Laurent Léon, chef d'orchestre habile autant que modeste, tout nous semble prêt pour la « grande maison ».

Le Nouveau-Théâtre d'Art a d'autant plus de mérite à nous donner de « l'inédit », qu'en ses matinées du samedi M. Antoine ne laisse pas de lui faire une sérieuse concurrence : quel puissant attrait n'est-ce point, pour de jeunes auteurs, d'être joués à l'Odéon!

Au Palais-Royal, où nous convoquaient les braves sociétaires dudit Nouveau-Théâtre d'Art, nous avons eu cette semaine l'intéressante primeur d'une oeuvre très joliment observée, belle et forte en sa simplicité parfois un peu naïve, d'Ignasi Iglesias, traduite du catalan par M. Georges Billotte.

Les Pies pourraient avoir un sous-titre qui serait l'Amour de l'argent... Un barbier de village, nommé Pélerin, a, suivant la coutume du pays, fait l'acquisition d'un billet de loterie, sur lequel il a cédé à ses clients autant de « participations » qu'ils en ont désirées. Et il faut voir les rêves d'avenir de ces pauvres gens, supposant que le lendemain du jour où ils auront gagné le gros lot — car ils comptent bien le gagner — ils pourront ne plus travailler. Le fossoyeur rêve d'une maison peinte en rouge au haut de la colline, et le brave Pélerin lui-même — car celui-ci est un grand coeur — songe à tous ceux qu'il pourra obliger quand il sera riche...

Sa femme Thérèse n'est pas de cet avis, et lui reproche vivement, de ne savoir rien garder pour lui ; que voulez-vous! elle aime l'argent! Il en est. de même de son fils aîné, poussé par sa jeune femme, qui aime aussi l'argent. Et voilà la discorde semée dans la famille ! Dans tout le village même, où l'on se méfie du barbier et où, le jour du règlement, on se jette avidement sur les écus que s'arrachent ceux-là mêmes qui n'ont aucun droit à la bienheureuse participation.

Cette pièce curieuse, très adroitement mise en scène, a été jouée dans le mouvement qui lui convenait. Et nous n'avons que des éloges à adresser à MM. Louis Bourny et Menaud, à Mmes Gabrielle Fleury et Irma Perrot, qui furent, entre autres, les très remarquables et pittoresques interprètes de l'oeuvre d'Iglesias.

Le spectacle se terminait agréablement par un acte sentimental, un peu « distribution de prix », Perlot, écrit en vers, et aussi en argot, par le poète Gabriel Nigond — l'auteur de 1812 applaudi chez M. Gémier — et que firent très gentiment valoir

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LE MONDE ARTISTE

M. Louis Bourny, déjà nommé, et Mlle Marcelle Derville.

Derville.

EDMOND STOULLIG.

CONCERTS

Pendant qu'au Concert Colonne se donnait dimanche, une troisième et dernière audition de la Messe en ré, renforcée du Concerto en sol majeur de Beethoven,

très correctement interprète par M. Frédéric Lamond, M.. Camille Chevillard faisait, aux Concerts Lamoureux, une heureuse incursion dans le domaine de notre si riche folklore national. Dans le Moissonneur, M. Raoul Charbonnel a su fournir au musicien, M. Francis Casadesus, un ingénieux prétexte pour ressusciter les vieux airs limousins, les chansons paysannes et les danses telles que bourrées, branles ou varsovielles. M, Francis Casadesus a su les orchestrer avec la couleur et le pittoresque qu'il fallait, tout en y intercalant des préludes ou des mélodrames de sa composition, dans une note très poétique et avec des sonorités joliment recherchées, grâce à l'emploi d'instruments anciens et de la harpeluth Pleyel qui, pour la première fois, apparaissait dans un orchestre moderne. Et nous citerons au nombre des intéressantes pages de cette symphonie dramatique, la charmante Berceuse, dont M. Francis Casadesus a même conservé le patois, l'air du « Rossignol " et « J'y bâtirais un pont » dont les thèmes ravissants sont d'une saveur toute locale. Mme Marie Buisson et M. Teissié furent les solistes applaudis. Et les. choeurs de l'Ecole de chant de M. d'Estournelles de Constant prêtaient à cette exécution si vigoureusement dirigée par M. Chevillard, le plus précieux des concours.

M. Sechiari continue à faire florès à la salle Marigny, où, l'an prochain, il doublera le nombre de ses concerts. Le programme de sa dernière séance s'illustrait d'une nouveauté : un original Poème lyrique de M. Wassilenko. Nous y avons applaudi, en outre, le pittoresque Ramuntcho de M. Gabriel Pierné, Mlle Maggie Teye, toute charmante dans l'air de Louise et dans de curieuses mélodies de M. Debussy; puis, M. Risler qui a magnifiquement interprété le concerto de Mozart en ut mineur. Peu à peu, M. Sechiari prend une bonne place au nombre de nos grands concerts dominicaux. E. S.

MEMENTO DES CONCERTS

Salle Erard. — Concerts d'avril 1911. — Le 1er,

Mlle Dehelly (Piano) (9 h.) ; le 2, Mme Berges (Matinée d'élèves (1 h. 1/2) ; le 3, M. Eustraliou (Piano) (9 h.) ; le 5, M. Foerster (Piano) (9 h.) ; le 6, M. E. Risler (Piano) (9 1/2 h.); le 7, M. Galston (Piano) (9 h.) ; le 8, M. Ricardo Vinès (Piano) (9 h.); le 9, Mme Chéné (Matinée d'élèves) (1 h. 1/2) ; le 10, Mme Hiard Kuehn (Piano) (9 h.) ; le 11. M. Galston (Piano) (9 h.) ; le 12, Mme Chené (Audition d'élèves) (9 h.); le 13, M. Baron (Chant) (9 h.); le 24, Mlle Bianca Leven (Chant) (9 h.) ; le 25, Mlle Valabrègue (Piano) (9 h.) ; le 26, M. Braud (Audition d'élèves) (9 h.) le 27, Mlle Dehelly (Piano) (9 h.); le 28, Mlle Caffaret (Piano) (9 h.) ; le 29, M. Philipp (Audition d'élèves) (9 h ) ; le 30, M. Riera (Matinée d'élèves) (1 h. 1/2).

A dater du 15 avril, l'Administration du « Monde Artiste Illustré » réoccuper, ses anciens bureaux, 48, rue Cambon; Toutes les correspondances concernant la rédaction continueront, comme par le passé, à être envoyées, 2, rue Saint-Didier.

PROVINCE

Nice. — Les représentations se suivent toutes intéressantes et tontes brillantes. Après Fortunio, que Mme Kousnielzoff a chanté et joué en très grande artiste et dont la délicieuse musique a été longuement applaudie, nous avons eu les représentations de Tiefland, l'oeuvre forte et vigoureuse de M. d'Albert, qui jusqu'à présent n'avait été joué qu'en Allemagne. Tiefland, avec son accent tragique a beaucoup impressionné le public de l'Opéra. Cette oeuvre sombre comme une eau forte a été admirablement mise en scène par M. Vilefrank.

Le hall du Casino Municipal a regorgé de monde au concert de Charité organisé pour les pauvres de la ville de Nice. Citons, parmi les artistes, Mme Catalan dont le succès fut très vif et le ténor Devriès, couvert de bravos et Mme Kousnietzoff, la grande cantatrice russe qui avait spontanément offert son gracieux concours et dont l'admirable voix a excité l'enthousiasme de l'elégante assistance.

L'Olympia a représenté au milieu des bravos la première adaptation en langue française de la Princesse Dollars, une opérette de Léo Fall fort connue en Allemagne. Le livret français de la Princesse Dollars est de MM. Willy et Raph et il est plein de verve et de gaieté.

Pau. — Palais d'Hiver. — La direction eut l'heureuse inspiration de reprendre vendredi Rip, le charmant ouvrage de Planquette qu'un publie nombreux et choisi accueillit avec une réelle satisfaction. Rip, c'était notre beau baryton Castrix. Jamais encore de toute sa saison, pourtant si brillante, le sympathique et vaillant artiste ne remporta un triomphe plus complet et plus mérité. Je le dis hautement, il est impossible — lisez bien impossible — de rendre cette incarnation de façon plus parfaite. M. Castrix interpréta son rôle très personnellement, et avec ce souci infini de l'achevé qui fait de lui un grand artiste dans toute l'acception du mot. Il fut longuement ovationné;, ce n'a été qu'un juste hommage rendu à son rare talent. Mlle Martens, Kate pleine de fantaisie ; Mlle Ristoret, agréable Nelly; M. Simon, excellent Nick Wedder ; M. Potié, amusant Ischabod; M. Cormerai, parfait Berrick, furent les partenaires applaudis de notre baryton étoile. Je signalerai le ballet «. l'Ours et les Bûcherons », au septième tableau, dansé à la perfection par notre gracieux corps de ballet. Félicitations à la prima gamba, Mlle Lapoutge, et compliments particuliers à Mlle Rosa Fournier, du premier quadrille, une ballerine qui va devenir sous peu une étoile.

GÉOVA.

Rouen. — Théâtre-Français. — Grâce à l'activité et à l'intelligente initiative artistique de M. Stréliski, Rouen a la primeur des grands succès parisiens. Nous étions conviés cette fois à entendre le Vieil Homme, de M. de Porto-Riche.

Cette pièce ne date que de janvier, et les critiques d'alors sont encore dans la mémoire de tous. Bornons182

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LE MONDE ARTISTE

nous à parier de l'interprétation qui fut de tout point remarquable.

Mlle Melcy, la bénéficiaire de cette soirée, s'est particulièrement distinguée dans le rôle de Thérèse, jouant avec une intensité d'émotion vraie, et exprimant avec justesse les sentiments qui l'agitent. Sous les traits du jeune amoureux Augustin, Mme Stréliski a su rendre avec un soin infini, les nuances les plus subtiles de ce rôle qu'elle détaille délicieusement. Mlle Faucheux est une avenante Mme Allain, coquette et séduisante à souhait. C'est un rôle écrasant que celui de Michel, M. Saint-Germain s'y montre supérieur, sa merveilleuse science de diction et la connaissance profonde de son métier l'ont servi admirablement.

M. Marchal (Chevassieux) et Mlle Gauthier (Catherine) complétaient heureusement cette interprétation hors ligne.

Théâtre des Arts. — Une représentation de Werther était donnée au bénéfice de M. Mathieu, chef d'orchestre, le même soir que la première du Vieil Homme au Théâtre-Français.

Il nous revient que le distingué chef d'orchestre fut l'objet de flatteuses manifestations ; Mme Stréletski qui chantait Charlotte remporta un très joli succès, son tempérament dramatique et la belle sonorité de sa voix ont été très appréciés.

Le succès fut également complet pour M. Pascual (Werther), et M. Sainprey (Albert). C. S.

Toulouse. — Obéissant à un scrupule de sa conscience artistique, inspiré par le plus délicat des sentiments paternels, M. Omer Guiraud se prive de la grande joie d'annoncer à nos lecteurs le succès remporté au concert par M. Georges Guiraud.

M. G. Guiraud, continuant les fortes traditions de science musicale et de probité artistique puisées à l'école de son père, a su conquérir parmi les organistes un renom de bon aloi, en même temps qu'il se révélait compositeur de talent.

La Société des Concerts avait déjà fait entendre ses Chants de fête. La nouvelle oeuvre qu'elle vient de donner a montré combien le talent de M. Georges Guiraud s'était consolidé et affermi. Don Ramiro est un épisode romantique en trois scènes, poème d'Alfred Mortier, d'après H. Heisse.

M. Georges Guiraud a su tirer le meilleur parti des situations que lui offrait le poème. C'est d'abord la nuit de Grenade, traversée par la plainte de l'amant délaissé, que traduit si bien le thème confié à la clarinette-basse, thème qui reparaîtra plusieurs fois dans le cours de l'oeuvre : puis le dialogue des amants. La fête populaire est un tableau vivant et coloré, où s'esquissent les danses joyeuses et les acclamations enthousiastes des assistants, dominées par la grande voix de l'orgue, qui impose son Te Deum triomphal.

Avec le bal et la procession funèbre, nous touchons au sommet de l'oeuvre. Une phrase en neuf-huit, au rythme enveloppant et berceur, accompagne les déclarations d'amour des époux : calme trompeur, bientôt troublé par le rappel du thème de don Ramiron, et le thème d'amour, déformé et sarcastique, rythmera la valse éperdue où s'est entraînée dona Clara. Et le thème d'amour se mêlera encore aux accents désolés du Libera me domine, comme pour unir dans une même désolation les deux sentiments l'amante éperdue.

La partition de M. Georges Guiraud est fort intéressante; la facture est claire; aucune recherche de complications inutiles ; mais aussi émotion discrète et juste, servie par une science polyphonique et orchestrale profonde.

Mme Bérat, MM. Caidan et Ansaldi ont paré Don Ramiro de la beauté de leurs voix et de l'autorité de leur talent de chanteurs lyaiques. Le public les a associes, avec les choeurs et l'orchestre, supérieurement

dirigés par M. Crocé-Spinelli, au succès de l'oeuvre et de l'auteur, qui a été longuement acclamé.

M. A.

ETRANGER

Anvers. — Opéra Flamand. — Spectacles annoncés : Samedi 18, Princesse d'Auberge; dimanche 19, Tannhaüser et De Vrouwkens van Brugge; mardi 21, Vaisseau Fantôme ; jeudi 23, Fiancée à la mer, le délicieux ouvrage de Jan Blockx; samedi 25, Rozemarijntje; dimanche 28, Prinses Zonneschijn et Christ'l; jeudi 30, clôture.

Rozemarijntje, la jolie oeuvre de Verhulst nous revient cette saison avec une interprétation nouvelle. M. Bol, notre premier ténor, incarne le rôle de Jorick. Mlle Cuypers chante Tilda et M. Génard remplace M. Dirickx. Désormais, avant de contracter un engagegement avec un artiste, la direction lui fera passer audition en public. Ainsi les habitués eux-mêmes ratifieront le choix de la direction.

Aux Variétés. — Le Luthier de Crémone et Petite Peste, la siprituelle comédie de Romain Coolus, le Gendre de M. Poirier, les Marionnettes, de P. Wolff, le Divorce de Mlle Beulemans.

Nous croyons savoir que pour les représentations du Divorce de Mlle Beulemans, tout comme pour la troupe des paysans bavarois, le tarif des places subira une légère modification sur les prix actuels. Le tarif d'été sera appliqué à ces soirées.

Aux nouveaux-Concerts. — Jamais le publie des Nouveaux-Concerts n'a été à un régal violonistique comme celui qui lui fut offert par Fritz Kreisler. Ce virtuose réalise bien tout ce qu'on peut désirer d'un virtuose; une technique qui se joue des plus grandes difficultés; la beauté du son le style pur sans sécheresse, le sentiment profond sans affectation. Le Concerto de Brahms, extrêmement difficile et pas toujours favorable à l'instrument, fut enlevé avec une maestria telle que toute la salle éclata en applaudissements. Mais l'enthousiasme arriva à son comble, quand le virtuose fit entendre les morceaux de musique ancienne des Couperin, Pugnani, von Ditteredorf et Tartini. Les ovations n'en finirent point avant que Kreisler eût accordé à ses admirateurs un morceau supplémentaire. Rarement on vit un enthousiasme pareil.

Un autre élément de succès, et non le moindre, fut la présence au pupitre de M. Karl Panzner, capellmeister de la ville de Düsseldorf. M. Panzner est un des meilleurs chefs qui se soient produits à Anvers. Sa direction est d'une admirable netteté, fortement rythmée, avec des « rubati » d'une expression intense. Au surplus, cet excellent capellmeister met dans son interprétation une ampleur remarquable qui enlève les plus froids.

Enfin, deux des artistes de notre Opéra Anversois, Mms Berthe César et M. Lafond, sont engagés par M. Albert Carré, à l'Opéra-Comique de Paris.

A. M.

Düsseldorf. — Théâtre Municipal. — Une opérette sans choeur, sans ballet, dont le premier acte est entièrement joué par des hommes et qui remporte quand même un grand succès, — cela prouve bien pour la valeur de l'oeuvre. Notre sympathique et talentueux chef d'orchestre, Bruno Hartl, peut être fier de l'accueil que son premier ouvrage a obtenu, non seulement à Vienne, où l'on marche vers la centaine, mais aussi à Düsseldorf, où la première de son opérette, la Première Femme, a eu gain de cause. Viktor Léon, le librettiste, a trouvé quelque chose d'original. Le premier acte se déroule dans le Club des nobles. Le comte

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LE MONDE ARTISTE

Dyllenau vient de perdre toute sa fortune contre le comte Wikkingen. Ce dernier veut donner la revanche. Il met en jeu deux de ses châteaux. Si le comte Dyllenau perd encore cette foi—ci, il devra épouser dans, trois mois la première femme, entre seize et cinquante ans, non mariée, qu'il rencontrera au sortir du club. Le pari est accepté et le malheureux Dyllenau a encore la guigne !

Mais voici qu'en quittant le club, la première femme, qui répond aux conditions posées, est justement la fiancée de Wikkingen. Son amie, qui l'accompagne, est la fiancée de Dyllenau, seulement elle arrive deuxième. Donc Dyllenau est forcé de demander la main de Melitta, fille du baron Feldherg. Et le malheureux Wikkingen doit, en homme d'honneur, favoriser cette union. Mais comme il y a un bon Dieu pour les amoureux, le fils de Feldberg, qui assistait au jeu et, à titre d'invité, n'est pas lié par le serment de ne rien dire, comme les membres du club, dévoile à la princesse

Philomena, la soeur de Clémentine, fiancée à Dyllenau, l'histoire du pari. Comme le baron Feldberg avait acheté du notaire de Wikkingen un des deux châteaux, que ce dernier avait mis en jeu, avant que le pari eut lieu, il y a maldonne et le pari ne compte pas. Donc, les deux couples peuvent changer de dames et tout est pour le mieux.

La Première Femme est plutôt une comédie musicale qu'une opérette, mais elle a le charme d'une musique attrayante, vive et parfois spirituelle. Il y a la chansonvalse « Malheureux au jeu, heureux en amour », le duo des « Jeunes filles », le duo de Melitta-Klemi « Je suis amoureuse », le charmant duo « Chat et souris », qui n'ont pas manqué leur effet et dont plusieurs furent bissés à la première. N'oublions pas la « Marche " du deux, qui est pleine d'entrain.

L'orchestration trahit la main du maître. Quant à la représentation, on ne pouvait désirer mieux. Le compositeur était au pupitre et lançait sa Première Femme

d'une main sûre. Le régisseur Leffler avait bien fait les choses : très chic, ce club. Les interprètes concouraient à assurer un grand succès à l'operette de leur collègue. Melitta, c'était Mme Fi öh ich-För-ter, qui arbore la june-culotte au deuxième acte et a chanté à ravir; Mlle Bartram n'a pas le don de se mouvoir avec légèrete, mais elle chantait bien le rôle de Clémentine ; une petite diable-au-corps est Else Segall, la princesse Philomena, vive et bien en verve ; Mario Sieg a obtenu un succès de caricature juive, mais les calembours que Léon lui fait dire sont quelque peu usagés et manquent de sel. Ces lourdeurs ne prennent plus. Du côté hommes, le comte Dyllenau, Wikkingen, le baron Feldberg et Erni trouvaient de bons interprètes en Julius Barré, Gustav Waschow, Ernst Bedau et Eugen Albert; tandis qu'un type, qui va toujours en culotte courte (probablement parce qu'il n'en a pas d'antres) était la part de Wirth, qui se tirait très bien de ce rôle assez superflu dans cette opérette. En somme, succès sur toute la ligne. Bruno Hartl fut rappelé après les deux derniers actes et couronné de lauriers. Nous le félicitons cordialement du succès de sa Première Femme, qui est

acceptée par une vingtaine de théâtres allemands et ne ferait pas mauvaise figure Paris non plus.

MATTHIEU HOEFNAGELS.

Monte-Carlo. —La seconde représentation de Déjanire a obtenu un succès triomphal; l'auteur, acclamé, a dû paraître deux fois sur la scène. En raison du grand succès de l'ouvrage, l'administration se voit dans l'obligation de modifier l'ordre de ses spectacles et de donner une quatrième représentation de Dejanire au lieu des trois prévues.

LE TOUR DU MONDE THÉÂTRAL EN UNE SEMAINE

Berlin. — La première représentation de Maïa de M. Leoncavallo a reçu un assez froid accueil. La critique est assez sévère pour le maître Italien. Les représentations du Second Faust se poursuivent avec succès au Deutsches Theater. Je signale de nouveau cette très curieuse entreprise, ce spectacle très ingénieusement

AMÉRIQUE

(Cliché de The Theatre.)

LES ENFANTS DE l'Oiseau Bleu.

New-York est le pays des terrasses ; et, comme les Américains sont ingénieux, ils ont installé sur celle qui couronne le V Theater un jardin où peuvent se réer les petits interprètes de l'oeuvre de Mauriceeterlinck. On voit par cette photographie que ces jeunes acteurs apprécient cette innovation.

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LE MONDE ARTISTE

ANGLETERRE

(Cliché de The Theatre.)

M. E. R. BENSON DANS Richard III.

M, Benson, le célèbre directeur du Shakespeare Memorial Theater, est aussi un des acteurs les plus appréciés

d'Angleterre.

Les meilleurs interprètes anglais du grand Will se sont formés à ses côtés.

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LE MONDE ARTISTE

réglé, car c'est la première foie que cette partie de l'oeuvre de Goethe est mise au théâtre. Je dis bien Goethe, G-O-E T-H-E, — les typographes du Monde Artiste ayant eu l'extraordinaire fantaisie d'attribuer ce Second Faust à un certain Grelha qu'ils sont évidemment les seuls à connaître.

Budapest. — Sire, de M. Henri Lavedan, a été donné avec le plus grand succès. Cette oeuvre, tout à fait délicieuse, est excellemment jouée par M. Rakosi et M. Oury.

La Haye. — Le syndicat des grands éditeurs néerlandais, appuyé par toutes les Associations artistiques et littéraires de la Hollande, demande à la Chambre des députés d'adhérer à la Convention de Berne. Les PaysBas seraient sur le point de faire parti des nations où le droit d'auteur est protégé par la loi. Nous en doutons encore pour notre part.

Londres. — M. Fuller Maitland, le célèbre critique musical du Times, prend sa retraite. Il est né en 1856 et il est l'auteur de deux ouvrages importants, les Grands Musiciens et les Maîtres de la Musique Allemande. — Quand l'empereur d'Allemagne rendra visite aux Souverains Anglais, dans le courant du mois de mai, le Drury Lane représentera Money, de Lytton, avec pour interprètes, trois directeurs de théâtre, MM. Herbert Tree, Charles Wyndham et John Hare, anoblis tous trois par le Roi d'Angleterre.

Madrid. — La jupe-culotte donne lieu à des incidents violents que l'on comprendra, en se rappelant que les moeurs espagnoles ont obligé de tous temps les dames à cacher leurs pieds aux yeux du profane. La foule s'est donc ouvertement déclarée contre la culotte féminine, et les quelques femmes qui ont porté le nouveau costume ont dû, devant les menaces et les quolibets des badauds, se faire escorter par la police. A Valence, à Bilbao et à Saint-Sébastien, on a voulu lapider les audacieuses. A Madrid, une chanteuse française, une danseuse célèbre (La Cresantema) et la marquise de Mos n'ont échappé aux sévices de la foule, à la sortie des théâtres, qu'après des charges vigoureuses faites par plus de cinquante agents.— Au Théâtre Espagnol, on a exécuté avec succès un drame lyrique en trois parties, Alma Remota d'un jeune compositeur, M. Jésus Aroca.

Milan. — MM. Mascagni et Sonzogno gagnent leur procès contre l'impresario Leibler. Cet imprepario est condamné, pour n'avoir pas représenté Isabeau à NewYork, à verser à titre de dommages et intérêts la somme de 100.000 francs à l'éditeur Sonzogno et le Maestro Mascagni est autorisé à garder la somme de 60.000 francs qui lui avait été versée comme acompte.

Pesth.— Théâtre national hongrois : première représentation du Portrait de Foldes, comédie en trois actes d'une phénoménale ingénuité et qui cependant a été fort applaudie.

Rome. — Les fêtes du Cinquantenaire Italien sont commencées. Le Costanzi a inauguré la saison lyrique organisée pur le Comité, avec Macbeth, admirablement interprété par Batistini et la Gagliardi. Deuxième spectacle, Dom Pasquale avec la Storchio, De Luca, Carpi et Kaschmann.

A dater du 15 avril, l'Administration du « Monde Artiste Illustré » rèoccupera ses anciens bureaux, 48, rue Cambon. Toutes les correspondances concernant la rédaction continueront, comme par le passé, à être envoyées, 2, rue Saint-Didier.

NOTES ET INFORMATIONS

LES SPECTACLES DE PARIS.

Les droits d'auteur reviennent à l'ordre du jour. Des efforts sont tentés en Hollande, et l'on s'inquiète de savoir quels résultats vont donner nos récents traités avec les républiques sud-américaines. Les écrivains

écrivains tiraient pas, avant que des législations ne fussent intervenues, de bien grands profits de leurs oeuvres. On cite pourtant Boileau, qui laissa une forlune de trois cent mille francs, ou Voltaire qui se fit quelque trois cent cinquante mille francs de rente. Mais la littérature n'était pas la source directe de telles sommes : Boileau ne s'enrichit que par les donations de Mécènes qu'il savait flatter et Voltaire s'entendit à merveille à spéculer et à faire le commerce du « bois d'ébéne », qu'aujourd'hui nous appelons : traite des noirs. Quant à Molière, si ses pièces lui rapportaient en moyenne cinquante mille francs, c'est surtout parce qu'il était à la fois auteur, acteur et directeur.

Ce n'est qu'au dix-neuvième siècle que les droits d'auteurs arrivent à de gros chiffres : Walter Scott gagne 200.000 francs avec ses romans; Dumas, la même somme avec les seuls Mousquetaires et MouteChristo; le Juif Errant rapporte 100.000 francs à Eugène Suë et les Mystères de Paris, 160.000 ; l'Histoire de la Révolution, 200.000 francs à Thiers. Par un curieux retour du temps, ceux des écrivains qui tâlent du commerce s'y ruinent, comme Balzac.

On sait à quels chiffres les droits de certains littérateurs d'aujourd'hui ont atteint. Conan-Doyle a reçu jusqu'à 3 fr. 50 par mot et M. Roosevelt 5 francs. Au théâtre, nous avons vu, chez nous, des auteurs en vogue, qui sont en même temps, chose admirable, des hommes de théâtre du meilleur talent, gagner jusqu'à quarante mille francs par mois.

Hélas! que les débutants ne soient pas hypnotisés par ces chiffres : beaucoup s'y croient appelés, mais il y a bien peu d'élus.

HUMPERDINCK TRAVAILLE.

L'auteur de la partition délicieuse, Hansel et Gretel, et de ce conte d'enfant tout à fait

charmant, Les fils du Roi, n'abandonnera plus désormais le théâtre, nous sommes heureux d'en donner la nouvelle. Ses premières oeuvres, la Belle au bois dormant et le Mariage forcé, l'avaient un peu découragé. Le succès qu'il vient d'obtenir en Amérique, et qu'il obtiendra très certainement en Europe avec sa dernière partition, l'a engagé à faire une nouvelle pièce avec Rosner. Rosner est un librettiste de grande valeur qui a su conserver le très original caractère du poème rêvé par Humperdinck, — un caractère fait de mysticisme, de gaieté et de tragique.

A noire correspondant, qui demandait à Humper186

Humper186


LE MONDE ARTISTE

dinck quelques renseignements sur le « style » de sa nouvelle musique, le compositeur a répondu avec un grand éclat de rire : « Le style? Il n'y a pas de style. On travaille le mieux qu'on peut. »

LE BOULEVARD, FOYER DE LA LITTÉRATURE.

M. Humblot lui donne ce nom et regrette

sa disparition. C'est qu'en effet, il disparaît,

ce boulevard qui était la réunion de tout ce qui écrit, de tout ce qui pense, ce boulevard des Italiens illustré par Tortoni, la Maison Dorée et le Café Anglais.

Il disparaît. Il a disparu. Ce qui achève sa destruction, c'est la démolition de ce petit théâtre des Nouveautés qui n'existera plus le premier juillet prochain. Déjà Tortoni et la Maison Dorée ne sont plus; et il est bien changé ce Cefé Anglais où retentissait la joie bruyante du duc de Grammont-Caderousse, du comte Tolstoï, lequel, à cette époque, ne laissait pas prévoir qu'il deviendrait un jour le grand auteur de la Russie, et du prince de Galles devenu plus tard le roi Edouard VII. Le Boulevard... Dans ce coin de Paris se croisent toutes les célébrités des lettres et des arts : Nestor Roquelan, le Parisien par excellence, l'homme d'esprit aux traits redoutables, le père Dupin, collaborateur de Scribe — le père Dupin s'achemine vers ses cent ans, et il rappelle encore le temps où il chassait au fusil le lapin dans la rue de Laval. Puis, voici que descend de cheval un beau jeune homme à la tête de Christ, c'est Catulle Mendès qui vient de publier ses premiers vers. D'un élégant tilbury descend un dandy à la mise impeccable, c'est Ladvocat, le célèbre éditeur romantique, il serre toutes les mains, on l'entoure, on le flatte, il est puissant et généreux... Mais on pourrait citer cinquante, cent noms connus, illustres même, qui fréquentent alors Tortoni. Chaque groupe y a sa lable et son président, mais si l'on est divisé à Tortoni, il suffit de traverser le boulevard pour trouver un terrain neutre : c'est la Librairie Nouvelle, la célèbre Librairie Nouvelle qui, durant le Second Empire, jouit d'une réputation mondiale. Son gérant Achille, est là : Achille est toujours là, il a tout lu, il sait tout. Auteurs, artistes, peintres, sculpteurs, journalistes, financiers, gens du monde, et gens du demi-monde, viennent dans cette Librairie Nouvelle dépenser chaque jour plus d'esprit qu'il n'en eût fallu pour faire un livre. Achille, redouté et aimé de tous ceux qui le connaissent, vit encore, plus savant que jamais, dans la librairie de la rue Lafitte qui lui appartient maintenant, non loin de l'emplacement qu'occupait celle à laquelle son nom restera attaché comme celui du libraire le plus justement célèbre du boulevard.

Tout cela bientôt ne sera plus, non plus que ce boulevard du Temple où Bonvalet, le café Turc et le Concert du Géant réunissaient aussi tout ce qui a un nom dans toutes les branches artistiques.

Et M. Humblot, en nous retraçant ce joli tableau, nous rappelle que Marie Duplessis, l'héroïne de la Dame aux Camélias, s'en allait, à celte époque lointaine, mourir boulevard de la Madeleine, qui alors « était déjà la campagne » pour les Parisiens.

LE DROIT D'AUTEUR. Après la République Argentine, l'Uruguay et le Paraguay vont adopter le texte

d'une loi sur la Propriété littéraire et artistique. Pour l'Uruguay, ce texte est actuellement soumis au Sénat. Mais il n'est pas bien satisfaisant, ce texte qui ne protègera que les oeuvres qui seront écrites et publiées dans le pays, et celles de provenance étrangère à condition que « leurs auteurs soient citoyens de la république ».

A ce propos, M. Ed. Sauvel, l'éminent secrétaire général du Syndicat pour la protection de la Propriété intellectuelle, rappelle l'argument si souvent invoqué à l'encontre de toute mesure de protection des oeuvres françaises dans les Républiques latines de l'Amérique du Sud. On ne saurait trop insister sur cet argument, qui représente ces Républiques comme incapables de produire aucune oeuvre littéraire susceptible d'être reproduite en France, et, par conséquent, comme n'ayant aucun intérêt à nous accorder une réciprocité dont seuls nous profiterions. Le moment serait vraiment mal venu pour formuler de nouveau cet argument, alors que, à Paris, le Théâtre de l'OEuvre joue le Malazarte de l'écrivain brésilien Aranha; alors que les Débats publient la traduction du roman de l'auteur argentin Bunge : Des larmes et du sang; alors que l'Echo de Paris publie le Vieil orfèvre du brésilien Coelho Netto; enfin, alors que la maison Plon et Nourrit édite, de Aranha, te roman intitulé Canahan.

Toujours à ce propos, M. Ed. Sauvel fait cette remarque très importante, et que, pour notre part, nous ne saurions trop souligner, que si le décret de 1852 protège, sans qu'il soit besoin de convention, les auteurs étrangers dans notre pays, ce décret ne vise pas le droit de représentation. Sur ce point, tout au moins, ceux qui comptent sur le décret de 1852 pour être protégés en France, sans nous rien accorder, pourraient fort bien être déçus.

Nous connaissons trop la formule : « La France protège le droit de ceux-là même qui le méconnaissent. » Elle est élégante, certes. Malheureusement, en l'espèce, elle devient un encouragement au pillage, une prime à la piraterie. En attendant l'abrogation d'un décret que nos pouvoirs publics auront grand'raison de supprimer bientôt, il n'y a aucune raison d'en étendre l'esprit à une branche de l'art où le législateur nous a laissé la possibilité de nous défendre.

UN NOUVEAU DRAME DE FULDA. Bien que l'opérette sévisse beaucoup à Vienne et que les partitions de Léo Fall

succèdent sans interruption a celles d' Oscar Strauss, d'Eysler et de Winterberg, la capitale de l'Autriche s'occupe néanmoins de littérature dramatique. Le Deutsches Theater vient de donner, avec un beau succès, une nouvelle oeuvre d'un des plus célèbres auteurs autrichiens, Ludwig Fulda. Ce drame, intitulé Serviteur et Maître, met en scène un problème assez curieux : l'impossibilité pour deux individus de vivre à côté l'un de l'autre sans que l'un des deux ait la suprématie.

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LE MONDE ARTISTE

Dans le drame de Fulda un souverain, idole de de son peuple et de sa femme, vivant dans le sentiment de l'omnipotence, voit croître à ses côtés la popularité de son premier ministre. La reine rend plus vive la haine du roi qui exile son fidèle serviteur. Pour éprouver davantage la fidélité de celui dont il se méfie, le roi dit à son ministre qu'il aime sa femme et lui demande de la lui céder. La fidélité du vassal ne peut pas aller jusque-là et le ministre fait appel à la grandeur d'âme du souverain. Le roi cède, pour se montrer supérieur au vassal, mais finalement ne pouvant supporter l'abnégation et le loyalisme dont son serviteur ne cesse de lui donner des preuves, le souverain se lue. Dénouement un peu inattendu, mais les caractères sont si superbement dessinés, et l'action est si logique que le succès a été considérable.

Notons que les productions françaises sont la source principale à laquelle puisent les directeurs de théâtre viennois. Ces directeurs font bien quelques emprunts à la dramaturgie du Nord, mais ils ne font connaître à leur public aucune des oeuvres de l'art moderne italien, qui ne sont pourtant pas sans valeur. La critique viennoise a fait quelques rapprochements intéressants entre l'art poétique de Fulda et celui de Jean Richepin dans Par le Glaive et dans Vers la joie.

GIBOULÉES DE MARS.

Il y a eu ce mois-ci beaucoup d'électricité, de tempêtes et de bourrasque dans le

théâtre, nous voulons dire dans les théâtres de France, d'Italie et d'ailleurs. Au Municipal de Plaisance, les soirées ont été orngeuses au delà de ce qu'on peut s'imaginer, et semblent, dans ce domaine, avoir atteint un record.

Les abonnés ne voulaient pas qu'on leur donnât Wally en abonnement. Protestations sonores, silflets et huées au premier acte. Le directeur parait et annonce aux abonnés qu'il leur donnera une représentation d'Aïda. Au deuxième acte, le public s'aperçoit qu'un rôle secondaire est tenu par une choriste Nouveaux sifflets, nouvelles huées. Le régisseur annonce qu'on va faire quelques coupures. La salle est debout et proteste. Le directeur reparaît et promet aux abonnés de faire comprendre dans l'abonnement toute la semaine de carnaval. Les abonnés sont satisfaits. Mais ceux qui ont payé leur place, qui n'ont rien entendu des deux premiers actes, et à qui la promesse du directeur ne donne aucune satisfaction, commencent un boucan terrible. Sur la scène tombent des fruits trop mûrs, de la menue monnaie et, finalement une chaise, Etre silflés, passe encore; être assommés, non. Les artistes disparaissent comme par enchantement et le chef de la police vient annoncer que la representation est suspendue.

La colère des spectateurs n'est pas calmée. Ils ont payé, ils veulent qu'on leur rende leur argent. Nouveau tapage dans les corridors et jusque dans les vestibules. Enfin, vers la fin de la nuit, l'argent fut rendu aux spectateurs tenaces qui n'avaient pas quitté le théâtre.

Mon Dieu, que la carrière de directeur de théâtre devient difficile !

UN DIAMANT FATAL.

Mary Johe, une artiste célèbre en Amérique, est morte à San Francisco pendant

qu'elle chantait une romance dans un concert.

Cette nouvelle est brève et ne dit rien aux lecteurs, et il y a pourtant là un germe de roman. Le nom de Mary Augusta Johe est tout au long dans l'almanach Gotha. Américaine, celle qui le portait s'était mariée en 1894 avec Lord Francis Pelham Clinto Hope, frère du duc de Newcastle. Son mari était millionnaire, et parmi les joyaux qu'il avait hérités de sa mère, il y avait un diamant célèbre. Ce fut ce diamant qui porta malheur à lui-même et à sa femme. Tous ceux qui s'en étaient parés étaient morts tragiquement. Un jour Hope tomba de cheval et demeura intirme, puis il perdit l'énorme fortune que lui avait laissée ses parents et fit faillite. Enfin, il épousa la belle Mary et ce fut le pire de ses malheurs. Après sept années de mariage,il dut divorcer car il surprit sa femme avec le colonel Strong. Alors il vendit le diamant, et la fortune sembla renaître pour lui. Il épousa une Italienne fort riche.

Cependant mis ress Hope, qui avait toujours cette pierre de mauvais augure demeura sous son influence nefaste. De misere en misère, elle devint «artiste de variété », comme on dit en Amérique, il y a quelques jours, elle est morte d'apoplexie en chantant une romance qui commençait mélancoliquement par ces mots :

Je suis lasse de souffrir. Je veux mourir.

UNE BELLE RÉSOLUTION. C'est un ténor qui vient de la prendre. Il a décidé de se faire journaliste. Ce changement

changement profession divulgue tout un état d âme. Le ténor n'est pas content des critiques que la presse lui a un peu trop prodiguees dans sa propre patrie, et il a décidé de quitter la scène, et de faire partie de la rédaction du Noticiero Universel.

Espérons que le directeur du Noticiero Universal chargera ce ténor de la partie politique de son journal: un chanteur, cela doit évidemment trouver la note juste. Maintenant, attendons la nouvelle d'un journaliste qui veuille devenir ténor. Cela rétablira l'équilibre.

Pour les mémoires de notre temps, donnons le nom du ténor; il s'appelle Vignas. Il a débuté en 1888 et il a été un valeureux interprète de Lohengrin.

LA SOCIÉTÉ ITALIENNE DES AUTEURS. Le bilan de celte Société est une preuve éloquente du mouvement théâtral moderne

en Italie. Les recettes ont atteint, dans le dernier exercice, la somme de 631.507 francs, au lieu de 563.521 francs encaissés l'année précédente. Il y a eu une augmentation de 67.986 francs, malgré les conséquences du fameux pacte d'alliance que beaucoup redoutaient pour les intérêts des auteurs italiens.

La ville la plus productive pour les auteurs a été Milan: 107.830 francs; puis Rome: 65.164 francs; Turin: 50.280 francs; Gènes: 34.229; Florence: 30.128 fr.; Naples: 22.250; Bologne: 15.303 francs; Venise: 15.170 francs ; Bergame, Brescia, Crémone,

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LE MONDE ARTISTE

Ferrare, Livourne, Palerme, Parme viennent ensuite, avec des chiffres qui varient entre trois et cinq mille francs.

A l'étranger, spécialement dans l'Amérique latine qui, jusqu'à présent, n'était gouvernée par aucune loi sur le droit d'auteur, les résultats sont à considérer. Buenos-Ayres, de 10.000, est monté à 26.000 francs et Rio-de-Janeiro de 772 à 6.700 francs,

PIERRE DUCRÉ.

COURRIER DE LA SEMAINE

LA SEMAINE. On pouvait craindre que décidément le Roi s'amuse avait perdu toute chance d'être

représenté au Théâtre-Français. Mais M. Gustave Simon a eu, dans l'après-midi de lundi, une entrevue avec M. Jules Claretie, et c'est au cours de cette entrevue toute amicale que les choses se sont arrangées. C'est Mlle Géniat qui jouera le rôle de Blanche. De son côté, M. Sylvain est revenu sur sa décision, et jouera Triboulet. Il ne sera doublé par M. Leitner que lorsqu'il quittera Paris, au mois de mai, pour aller donner quelques représentations d'Hécube en Algérie. Les répétitions du Roi s'amuse commencent et l'on espère passer entre le 20 et le 23 avril.

Une saison d'opérette autrichienne sera donnée, du 2 juin au 2 juillet prochain, au Théâtre Réjane, par la troupe du théâtre An der Wien Cette troupe, avant de venir à Paris, s'arrêtera très probablement à Bruxelles, où elle donnera quelques représentations. Parmi les oeuvres qui seront jouées sur la scène de la rue Blanche, citons notamment Amour Tzigane et Risette, que Franz Lehar et Léo Fall dirigeront euxmêmes à l'orchestre. Une oeuvre de Strauss figurera également au programme de cette courte saison estivale.

Sous la présidence de M. Jean Richepin, il s'est formé une Société, « Les Poètes », dont le but est d'aider à la représentation d''oeuvres poétiques de jeunes auteurs, ou de petits chefs-d'oeuvre oubliés. Cette semaine a eu lieu, au Théâtre des Arts, une fort intéressante matinée organisée par cette Société. M. Auguste Dorchain, théoricien érudit et poète charmant, a parlé de la poésie au dix-huitième siècle, qui fut légère, satirique ou galante. Mmes Lherbay et Berthe Bovy, M. Georges Baillet et M. Emile Albert lurent, aux applaudissements d'un public sympathique et élégant, des poèmes du dix-huitième siècle; Mme Mathieu et M. Rousseau, de l'Opéra, se firent applaudir au cours d'un intermède de musique. Puis, on écouta une comédie enun acte, en vers, de Mme Lucienne Gaulard, Frivoline, dont l'idée ingénieuse, autant que la forme spirituelle et aimable, enchantèrent les spectateurs.

Demain soir, au Théâtre Molière, on donnera la première de la Princesse Rouge, une oeuvre nouvelle du délicat écrivain et de l'auteur averti qu'est M. Théodore Henry. C'est une conséquence de l'encombrement

dramatique. Sans aucun doute, les lettrés et le public suivront M. Théodore Henry dans ce théâtre un peu excentrique. Mais il est mélancolique de voir de tels dramaturges joués aussi loin.

DANS LES THÉÂTRES SUBVENTIONNÉS

OPÉRA. — Voici les dates auxquelles seront données les représentations, de la Tétralogie que MM. Messager et Broussan organisent pour le mois de juin.

Premier Cycle: Samedi 10 juin, l'Or du Rhin ; dimanche 11 juin, la Valkyrie; mardi 13 juin, Siegfried; jeudi 15 juin, le Crépuscule des dieux. Orchestre dirigé par M. Arthur Nikisch.

Deuxième Cycle : Samedi 17 juin, dimanche 18 juin, mardi 20 juin et jeudi 22 juin, orchestre dirige par M. A. Messager.

Troisième Cycle, : Samedi 24 juin, dimanche 25, mardi 27 et jeudi 29 juin, orchestre dirigé par M. Félix Mottl.

Principaux artistes qui doivent prendre part à ces représentations: Ténors: MM. Van Dyck, Franz, Dalmorès, Swolfs, Fabert, Nausen. Barytons: MM. Noté, Duclos, Dangès, Roselly, Teissié. Basses : MM. Delmas, Gresse, Journet, Marvini, Cerdan, Delpouget. SopraniMlles Louise Grandjean, Demougeot, Le Senne, Bourdon, Panis Gall, Caro-Lucas, Campredon, Laute-Brun, Dubois-Langer. Mezzo-soprani : Mlles Lapeyrette, Charny, Mati, Goulancourt, Lejeune, Daumas, DurandServières.

On ne peut louer que pour un cycle.

M. André Messager ayant pris la résolution de ne plus diriger l'orchestre de l'Opéra, il y a lieu de modifier les indications relatives aux maîtres qui doivent conduire les représentation de la Tetralogie. C'est M. Felix Mottl qui dirigera le premier cycle, M. Nikisch qui dirigera le troisième cycle, et le deuxième sera conduit par un maître avec lequel les directeurs de l'Opéra sont actuellement en pourparlers.

OPÉRA-COMIQUE. — La Jota, de M. Raoul Laparra, dont la première aura lieu prochainement, sera interprétée par Mmes Marguerite Carré, Tissier, Robur, Jurand, de Poumayrac, Duvernay, Peltier, Cocyte, Villette, Carrière, Pitschaleki, la petite Bréval, MM. Salignac, Vieuille, Vaurs, Azéma, Mario, de Poumayrac, Payan, Gilles, Cazeneuve, Donval, Andal, Dupré, Mesmaeckr, Guillamat, Belhomme, Bonafé, Pasquier Brun, Coulomb, Laure.

TRIANON-LYRIQUE. — M. Félix Lagrange donnera, le mercredi 29 mars, la première représentation de l' Accordée, de Village, nouvel opéra comique en un acte, de MM. Paul Sieck et H. de Chennevières, musique de M. Paul Steek; les principaux rôles ont été' confiés à Mlle Saint-Germier, à MM. Jouvin, Bellet et Aristide. Cet acte formera spectacle avec Lalla-Roukh, de Félicien David, interprété par Mmes Jane Morlet, Saint-Germier, MM. Tarquini d'Or et Vincent.

AUTRES SCÈNES

CHATELET. — Grande saison de Paris : M. Gabriel Astruc nous promet une série de spectacles d'une incomparable saveur artistique. Tout d'abord, au début de mai, auront lieu les quatre festivals Beethoven, sous les auspices de la Société des amis de la musique. L'orchestre Colonne, dirigé par le maître Félix Weingariner jouera les Neuf Symphonies. Emile Sauer et Georges Enesco interpréteront les concertos de piano et de violon. Pour finir, la Neuvième Symphonie, par 1.000 exécutants.

Vers le 20 mai, viendra le Saint-Sébastien tant attendu

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LE MONDE ARTISTE

de M. Gabriele d'Annunzio, qui sera présenté dans cinq prodigieux décors du peintre russe Léon Bakst.

Enfin l'annuelle « saison russes, qui depuis cinq printemps provoque un mouvement d'enthousiasme si soutenu, figurera au début de juin dans huit soirées de ballet auxquelles prendront part Nijinsky, Fokine, Mmes Karsavina, Sophie Feodorowa et 80 admirables danseuses.

On nous annonce pour terminer ce programme une dernière manifestation sur laquelle nous serons prochainement renseignés.

La saison du Châtelet de cette année n'a, on le voit, rien à envier à celles qui l'ont précédée.

— Nous n'avons pas encore Lucrèce Borgia à la Comédie-Française, mais nous l'applaudirons au Châtelet le 8 avril prochain. Après les autorisations aimablement données par M. Gustave Simon, l'exécuteur testamentaire de Victor Hugo et de Maurice Bernard, auquel, par traité, appartient l'ouvrage, M. Jules Claretie vient de permettre aux artistes de la ComédieFrançaise de jouer une seule fois Lucrèce Borgia sur la scène du Châtelet, au profit de la caisse de retraites des ce Prévoyants du théâtres. En tête de la distribution figureront MM. Albert Lambert fils, Raphaël Duflos et Mlle Madeleine Roch.

NOUVEAU THÉÂTRE D'ART. — M. Bourny, directeur de la scène du Nouveau Théâtre d'Art, vient de recevoir de M. Iglésias, le célèbre écrivain catalan, la dépêche suivante, à l'issue de la représentation des Pies : « Je vous salue et vous félicite avec gratitude, vous, artiste insigne, et tous vos dignes camarades, dans l'interprétation de mon ouvrage. Je salue aussi cordialement cette noble France. —IGLESIAS. »

PORTE-SAINT-MARTIN. — La tragédie d'Euripide., traduite par MM. Silvain, de la Comédie-Française, et Ernest Jaubert, sera, sur la demande de M. Jean Coquelin, donnée à nouveau en représentation publique, au bénéfice de l'Association des artistes dramatiques. Cette seconde et dernière représentation extraordinaire aura lieu le samedi Ier avril prochain, à 2 h. 1/2, avec MM. Silvain, Leitner, Ravet, Alexandre; Mmes Louise Silvain, Géniat, Berthe Bovy, Jane Even, de la Comédie-Française, et Yvonne Ducos.

La partie musicale sera dirigée par M. Laurent Léon, chef d'orchestre de la Comédie-Française, auteur de la partition. La location est ouverte dès aujourd'hui à la Porte-Saint-Martin, aux prix ordinaires du théâtre.

THÉÂTRE SARAH-BERNHARDT. — Saison Russe : Le plan de cette brillante manifestation artistique est d'ores et déjà arrêté. Il y aura trois séries d'abonnement (mardis, jeudis µet samedis, à partir du 1er mai), de six spectacles chacun, pour lesquels on peut dès maintenant s'inscrire au Théâtre Sarah-Bernhardt.

Les représentations auront lieu alternativement en français et en russe, grâce au concours de l'incomparable troupe que voici.

Soprani : Mmes Waïda Korolewicz, Tcherkasskaïa, Aurore Marcia, Van Brandt, Markovitch, Odette Carlyle, Marie Boyer, Alice Baron, princesse Baratoff, M. Rozanne. Mezzo-soprani et contralti : Mmes Jeanne Czaplinska, Makharova, Alice Raveau, Cécile Thévenet. Clara Schultz. Ténors : MM. Dimitri Smirnow, Rousselière, Léon David, Bolchakow, Andreiew et d'Arial. Barytons : MM. Baklanow, Jean Bourbon, Seveilhac, Tartakow, Zalewsky. Basses : MM. Adam Didur, Nivette, Philippow, Mariachess, Paty, Dulière. Ballet : M. Ivan Klinstine, maître de ballet; Mmes Sedowa, Piliz, Gorchkowa, Tchoumakova, M. Leghat.

VARIÉTÉS. — C'est une reprise de la Vie parisienne qui succedera au Bois sacré. Pour cette reprise, M. Samuel vient d'engager Mlle Juliette Méaly, qui incarnera

incarnera gantière. M. Max Dearly remplacera, dans-le rôle de l'amiral suisse, Baron, de légendaire mémoire. Enfin, Albert Brasseur fera également une rentrée sensationnelle dans l'oeuvre d'Offenbach.

NOUVELLES DIVERSES

CHEZ LES AUTEURS.

La Commission a procédé à l'élection de ses deux agents directeurs, selon les nouveaux statuts votés par l'Assemblée générale extraordinaire du 6 mars, Elle a d'abord nommé M. Alfred Bloch, qui garde ainsi ses anciennes fonctions modifiées d'agent général. Puis, en remplacement du regretté Robert Gangnat, elle a nommé comme agent directeur M. Ballot. La Commission avait encore à nommer un titulaire au poste créé de caissier principal; elle a porté son choix sur M. Chosson, qui était Candidat indifferemment à ce poste ou à celui d'agent directeur. Elle a également confirmé M. Vigneron, son dévoué contrôleur général, dans les fonctions qu'il occupait déjà. Enfin, elle a nommé membre du Conseil judiciaire de la Société M. Doyen, expert-comptable, qui vient de lui fournir les chiffres officiels sur lesquels M. Arlhur Bernède a pu baser le remarquable rapport lu par lui à l'Assemblée générale.

Le répertoire de Scribe allant tomber prochainement dans le domaine public, la Commission, suivant une jurisprudence et une règle absolues, a décidé qu'elle continuerait à payer aux héritiers de Scribe la totalité de leurs droits d'auteur, protestant ainsi contre une loi qui fait de la propriété littéraire une propriété fictive et illusoire. Elle en use d'ailleurs toujours ainsi avec les Héritiers de ceux de ses membres dont les oeuvres sont tombées dans le domaine public.

La deuxième Chambre hollandaise ayant voté le projet de loi, déposé par le gouvernement et comportant l'adhésion des Pays-Bas à la Convention de Berne, révisée à Berlin sur la propriété littéraire, la Commisdon émet le voeu et l'espoir que ce vote soit ratifié le plus prochainement possible par le gouvernement hollandais, pour que la loi nouvelle puisse recevoir rapidement son application.

— Chez Mme Valli, belle audition d'oeuvres vocales et instrumentales de L. Filliaux-Tiger, interprétées par l'auteur fort applaudi, Mlle Lily Laskine, acclamée et bissée dans Source capricieuse, Mlle Coye, Mme QuéroyGagé, MM. Eugène Borrel et F. Gervais, R. Quétin, artistes hors pair.

Au TRAVAIL.

— M. Massenet a terminé Roma, sur un livret tiré par M. Henri Cain de Rome vaincue, de Parodi ; il travaille à Panyne sur un livret de MM. Couyba et Spitzmüller et à Amadis, sur un livret de M. Jules Claretie.

— M. Gabriel Fauré travaille à Pênélope, sur un livret de M. René Fauchois ; M. Widor termine Nerto, sur un livret de M. Léna, d'après Mistral : M. Gustave Charpentier a achevé Lucien ; M. Reynaldo Hahn compose un ballet, le Dieu bleu, pour les fêtes du couronnement du roi d'Angleterre, et achève Nausicaa ; M. Henry Février a trois ouvrages sur le chantier : Carmosine, sur un livret de M. Cain, d'après Musset, Gismonda, d'après Victorien Sardou, et la Nave, avec M. d'Annunzio; M. Gabriel Dupont a terminé la Farce du cuvier et entreprend une Clytemnestra.

— M. Xavier Leroux met en musique Grand-Muguet, tiré du roman de Catulle Mendès ; M. Ernest Moret termine Lorenzaccio ; M. Max d'one a terminé le Retour, en deux actes, et Jean, en quatre actes : . Edmond Malherbe achève Madame Pierre et aussi

1.90


LE MONDE ARTISTE

l'Emeute. M. Gaston Salvayre achève d'orchestrer le drame lyrique que les directeurs de l'Opéra ont reçu, sur un livret de Alfred Aderer, sous le titre provisoire: Onesta.

— SOCIÉTÉ DES ARTISTES FRANÇAIS. — Composition du Jury de Peinture pour le Salon de 1911 :

M. Gabriel Ferrier, membre de l'Institut, président. MM. Jean-Paul Laurens, membre de l'Institut et Antoine Guillemet, vice-présidents.

MM. Etcheverry, Foreau, Gorguet, Saint-Germier : secrétaires.

MM. B. Adan, J. Bail, Bordes, Comerre, V. Gilbert, Gosselin, B. Laurent, D. Maillart , Henri Martin, Maxence, Aimé Morot, membre de l'Institut, Petitjean, E. Renard, Tattegrain, membres.

Luc LESTRANGE.

CONCERT MONDAIN

— Le jeudi, 23e de mars, Mlle de Margaillan a donné au Théâtre des Salons Malakoff une matinée précieuse et spirituelle. Programme très intelligent, très sagacement pénétré, et exprimé avec mille tons.

Mlle de Margaillan dirige très habilement, au 101, avenue de Villiers, avec un sens français parfait, un cours artistique connu et fréquenté du fin Paris. On le vit bien. Car ce qu'elle offrit, jeudi dernier ce fut une matinée très ancienne France. Je ne dis point que la nouvelle n'y parut pas sans avantage.

Mlle Cordier (Cleauthis, donnant réplique à un Strabon) fut celle qui se montra la première. Regnard ! Quelle idée d'envoyer une telle interprète à Argos. C'est bien loin, et en ville bien vieille! Et qu'on m'excuse, chez les Grecs, mais je préfère que Mlle C... soit Française et qu'elle le reste, car elle l'est exquisement. Et si sa grâce l'est tant, c'est que sa voix a une diction simple, claire, naturelle, pourtant pleine d'art. Je veux nommer tout le monde. Mais que cela devient difficile quand tout le monde fut parfait !

Il y eut Mlle Lucej Méran, dont le geste est soigné et sérieux; Mlle Olga Rollmann, par qui je voudrais faire dire des vers; Mlle Jane Doyen, « comment le dire » ce qu'elle sait faire! On vit et on entendit encore Mlles Georgette Rosenwald, Valentine Lévy, Marcelle Slberberg. Et ni M. J. Richepin, ni Coppée — malgré le Léthé — ni M. A. Rivoire, ni M. R. de Bouvières n'oublieront le concours de ces artistes s'ils sont galants. Et vertuchou ! comment ne pas l'être!

Cette première corbeille ne me fait pas oublier Mlle Suzanne Courroux,— diseuse blonde bien incapable de la noirceur dont son nom l'accuse; — Mlle Yette Daren, toute d'esprit et de mutinerie, près de Mlle Marthe Rollmann.

Mais j'eus un faible, comme tout Paris, pour les cheveux poudrés au cours de cette matinée. Et si la Muse de Musset, Mlle Blanche Portret, émouvante muse blanche d'octobre, et portrait qui fit si bien de l'honneur à Marivaux, je vous le jure, dans le Jeu de l'Amour et du Hasard, ne s'imposait pas au souvenir; si Mlle P. Hannaux n'était pas venue sur la scène; si Mlle Silberberg, déjà nommée, mais pas assez, ne contraignait pas à se dire que ce n'est pas les petits vases qui contiennent le moins d'essence et les épices les plus banales, on ne songerait plus qu'aux marquises, on ne parlerait plus que des marquises.

On éprouve beaucoup de plaisir à retrouver au milieu d'elles Mlles Courroux et Portret, celle-ci populaire d'art très pur, — j'en complimente la nature — Mlle Daren, dont on peut dire que Molière ne vit jamais pour son Dépit meilleure soubrette, et Mlle Lévy.

Reste Mlle Bertha Bohnon, Mademoiselle, gardez vos deux mouches, votre perruque poudrée et votre jeu, tout le monde de jeudi vous en prie. Vous êtes la fleur

de votre panier. Jouez et rejouez-nous angéliquement la fausse Agnès. Si Marivaux vous revoyait en Lisette du Jeu de l''Amour, je crois qu'il eu marivaudrait outre sa tombe, mieux qu'il ne dut jamais le faire, en cette vie.

Un dernier applaudissement à l'amoureux des « Deux Pierrots » et je clos sans pleurer comme eux.

Ho! j'allais oublier les hommes! Ces messieurs d'ailleurs ont pratiqué la perfection la plus louable dans la galanterie même. A ce point qu'ils se sont oubliés, effacés derrière leurs commères. Mlle de Margaillan est, en vérité, très puissante pour obtenir un tel miracle. Qu'il fut sage et d'à propos. « Et je regrette d'avoir à dire à ses personnages si discrets : " Eh bien vraiment on vous oublie! » Mais puisqu'ils l'ont voulu euxmêmes! B. DE PRÉSILLY.

LA VIE LITTERAIRE

BIBLIOGRAPHIE

La maison Adolph Furstner de Berlin vient de publier une série de Romances de l'éminent compositeur Richard Strauss, parmi lesquelles nous citerons : A l'Hiver (Winterweihe), Douce Vision (Freundliche vision), Si tu m'aimais (Wenn...); les Sept Cachets (Die Sieben Siegel); les Sept Buveurs (Von den sieben zechbrudern) ; et enfin Florilège (Madchendblumen).

La traduction française des cinq premières romances a été faite, avec beaucoup d'adresse, par M. Louis Schneider, qui a su respecter les accents et les rythmes expressifs du compositeur. La traduction française de Florilège est de Jean Marnold. Florilège comprend quatre poésies : Bluets, Coquelicots, Lierre, Nénuphar, — traduites librement, mais avec beaucoup de charme et de clarté à la fois.

Dans les publications de la maison Adolph Furstner, nous n'aurons garde d'oublier la Valse pour piano du Rosenkavalier, qui est certainement destinée à devenir populaire.

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LE MONDE ARTISTE

— Déjanire, tragédie lyrique en quatre actes, poème de Louis Gallet et C. Saint-Saëns, musique de C. Saint-Saëns. La partition pour chant et piano, réduite par l'auteur, a paru chez MM. A. Durand et fils, éditeurs, 4, place de la Madeleine.

Déjanire vient d'être représentée à l'Opéra de Monte-Carlo avec un beau succès,, que notre correspondant a constaté d'ailleurs la semaine dernière.

EMILE ROCHARD. — toute la femme en cent rondels (coeur, corps, atours, frivolités). Un vol. in-18. Paris, Alphonse Lemerre, éditeur, 1911. C'est un recueil de poète et de lettré et en même temps un volume bien curieux. Dans les cent rondels que M. Rochard a si joliment tournés, il y a de tout : des portraits, des tableaux, des grains de philosophie, des traits d'observation; et l'on pourrait dire de l'auteur, ce que l'on a dit de Charles d'Orléans, oui, certes, qu'il est sensible aux beautés de la nature, qu'il chante, qu'il dépeint le « renouveau » avec une fraîcheur de coloris, avec une délicatesse de touche fort rares. Nous savions que M. Emile Rochard, le très habile directeur du théâtre du Châtelet et de l'Ambigu Comique, était un poète et qu'il avait publié des vers aimables au début de sa carrière, mais —nous l'avouons — nous avons été agréablement surpris en trouvant dans ses rondels de la maîtrise, le sentiment de l'harmonie, l'enchaînement gracieux des, rimes, et la gentillesse du verbe. Nombre de ses petits poèmes font penser aux rondeaux célèbres, Les Fourriers d'été sont venus et le Temps a laissé son manteau; ou encore, ce petit modèle d anthologie :

Rafraichissez le chastel de mon Coeur D'aucuns vivres de joyeuse plaisance, Car Faux Dangier, avecq' son alliance, L'a assiégé en sa Tour de Douleur.

M. Emile Rochard manie le rondel avec aisance, il l'aiguise avec finesse, il le tourne en madrigal élégant ou en couplet gaillard. Agréables tableaux, caustiques ou mélancoliques, ingénieux ou voluptueux, tracés avec une espièglerie qui rapproche l'auteur de nos vieux poètes français, on y retrouve l'esprit de notre nation, avec les ressources du langage contemporain.. Et surtout que l'on ne parle pas du « genre » ,qui, semble devenu secondaire; ce genre-là, ne l'oublions pas, a été longtemps la substance même de notre poésie. P. M.

COURRIER LITTÉRAIRE

— Mardi soir, au restaurant Grüber, on a fêté le ruban rouge de, Raoul Gineste. Organisé par notre excellent confrère Adrien Frissant, ce banquet a été des plus réussi: deux cents écrivains s'étaient groupés autour de l'auteur du Nègre et de la Seconde vie du docteur Albin. Un concert fort brillant a terminé la soirée, avant lequel on entendit un discours charmant de Jeanne Landre et de fort beaux vers de Roux-Servine.

— Mardi soir également, eut lieu au Palais-d'Orsay le dîner des Critiques littéraires. L'élite de nos bibliographes était présente ; on a vivement applaudi un discours, spirituel au possible, du nouveau président

M. Paul Reboux. Au concert qui suivit, d'excellentes, artistes prirent part, et Mme Baret entre autres fut charmante et « divine » à son ordinaire.

— M. Romain Coolus, l'auteur applaudi de tant de comédies à succès, vient de demander à notre excellent collaborateur Reuefer de vouloir bien illustrer les Bleus de l'Amour, qui vont bientôt,paraître en librairie chez Fayard.

— De Berthold, vient de paraître : L'Orage, une charmante paquette in-12, qui sera la saynèta la plus amusante de l'année. Tous les amateurs voudront la représenter et tous les salons la verront interpréter. Il faut se hâter d'apprendre, de dire et de jouer ces vers qu'anime une joyeuse verve.

— M. A. Jeanroy publie une thèse importante sur Carducci, l'homme et le poète. On sait que des éloges hyperholiques saluèrent le poète italien à la fin de sa carrière et provoquèrent de « systématiques éreintements ». M. Jeanroy affirme qu'il s'est tenu à égale distance de l' « éreintement » et de l'hyperbole.

C'est ainsi qu'il a cru devoir laver Carducci de l'accusation de plagiat et intituler cependant un chapitre de son livre : Carducci, « imitateur » de Victor Hugo...

BENOIST DE MAILLET.

GRAND THÉÂTRE DE GAND

(BELGIQUE)

Le collège des Bourgmestre et Echevins recevra jusqu'au 6 avril prochain les propositions pour l'exploitation du Grand Théâtre pendant la saison 1911-1912 et éventuellement pendant les deux suivantes.

A titre d'indication, le cahier des charges, qui a subi de notables modifications, sera envoyé aux intéressés qui en feront la demande.

Le gérant : A. MARETHEUX.

Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette.

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LE MONDE ARTISTE

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Le rayon de FARDS pour la ville et le théâtre le plus grand et le mieux assorti se trouve à la PARFUMERIE DES GALERIES SAINT-MARTIN, 11 et 13, boulevard Saint-Martin,maison unique en son genre à Paris. (Tél. 212-11). Catalogue franco.

COURRIER DE LA MODE

Les voilages de robes comme de corsages sont plus à la mode que jamais.

Ces Voilages remplacent alors la tunique qui se retrouve un peu sur tous les costumes féminins de ce printemps.

Quelques grands couturiers essaient de remplacer le

bas de jupe par une sorte de culotte à la hussarde.

Mais je dOute que cette mode, un peu osée... et pas

jolie, prenne aisement. J'ajouterai même que j'espère

- qu'elle est mort-née.

Les tailles continuent à se porter très courtes, et les jupes sont, pour les robes d'apparat, plutôt courtes qne rasant terre.

Le bouton se multiplie sur les robes comme sur les vêtements. Quant aux manches, elles ne dépassent guère le coude.

Voilà les grandes lignes de la mode printanière.

N'oublions pas non plus de dire que c'est le moment, alors que les jours grandissent, de ne pas sortir sans mettre sur son visage un nuage de poudre de riz. La fleur de pêche est, en pareil cas, tout à fait recommandable; parfumée aux essences de fleurs exotiques, elle est à la fois rafraîchissante et adhérente à la peau. On la trouve à la Parfumerie Exotique, 35, rue du 4-Septembre; qu'elle soit blanche, rosée, naturelle ou bise, la boîte coûte, 3 fr. 50 ou 4 francs pour la recevoir franco par la poste.

BERTHE DE PRÉSILLY.

Conseil: — Plus de névralgies à redouter... Et pas d'obligation non plus pour cela de garder ses cheveux gris ou blancs. La poudre Capillus leur rend à tous, et à sec, leur nuance primitive. Pour tous renseignements complémentaires, s'adresser à la Parfumerie Ninon, 31, rue du 4-Septembre.

B. DE P.

MOUVEMENT ARTISTIQUE

Médaillon.

Né à Grenoble le 17 août, 1883, M. Morin avait six ans lorsqu'il suivit en Amérique son père, chef d'orchestre à Hollywood. Puis il revint faire des études classiques, à Grenoble. : Fini ce temps d'épreuves le « petit Morin » retourne en Amérique et gratte du violoncelle avec fureur. Un M. Grimson, violoniste, s'intéresse à son jeu: « Mon petit, lui dit-il, allez voir Hekking. » Mais Anton Hekking habite Berlin ! Morin n'en dort plus et part sans regarder en arrière. L'accueil du Maître ne fut pas encourageant pour un pèlerin venu de si loin. « Vous avez une oreille très délicate et très sensible... mais vous ne savez rien. « Et les leçons de Hekking coûtaient vingt-cinq francs, trois fois par semaine! Les économies du petit musicien étaient un peu courtes. Mais Hekking et Morin se prirent l'un pour l'autre d'affection. Quand Hekking s'embarqua pour l'Amérique, Morin le suivit. Et quand il retourna à Berlin, comme Morin allait être contraint de rester en arrière, Hekking remmena son compagnon et voulut lui continuer ses leçons, jusqu'à ce qu'il n'eût plus rien à apprendre, sans vouloir d'autre paiement que sa reconnaissance.

En 1908, M. Henri Morin entre pour un an, entre deux séjours à la Schola, à la grande école des chefs d'orchestre de Leipzig. Nikisch l'admet à ses répétitions privées du Gewandhaus. Tout le secret du maniement de l'orchestre, M. Morin le doit à Nikisch, merveilleux éducateur. Quand il le quitte, c'est pour courir chez le Dr Hugo Kiemann, le plus grand théoricien actuel de la musique.

A l'école de tels maîtres, M. Morin est devenu, en pleine jeunesse, un des chefs d'orchestre les plus intéressants de l'époque, un de ceux sur lesquels on peut fonder les plus grandes espérances. Il vient d'obtenir à Nantes les plus légitimes succès. Paris ne saurait tarder à lui offrir aussi de justes ovations.

On nous télégraphie que le ténor CARASA remporte une série d'ovations au Théâtre d'Odessa, où il chante alternativement la Tosca, Paillasse, Cavalleria rusticana. C'est à chaque représentation une suite interminable de bis et de rappels qui saluent la superbe voix du bel artiste et son magnifique tempérament dramatique. M. Carasa a dû promettre de chanter Lohengrin et les Huguenots, la semaine prochaine, tant son succès est considérable.

Mlle ZINA BROZIA a fait ses adieux au public madrilène du Théâtre-Royal dans Manon, qu'elle a si brillamment interprétée au cours de la saison d'opéra, ainsi que la Tosca et Roméo et Juliette. A la représentation de « despedida » assistaient la famille royale et une foule d'enthousiastes admirateurs qni saluèrent la charmante cantatrice non seulement de leurs bravos, mais d'une pluie de fleurs


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et d'un lâcher de colombes sur la scène, suivant la gracieuse coutume espagnole.

Détail curieux : une de ces colombes vint, en volant, se poser sur le rebord de la loge royale, devant la reine Victoria. Toute la presse madrilène fait le plus vif éloge du talent et de la beauté de Mlle Zina Brozia et exprime le voeu unanime du public qu'après ses futures campagnes artistiques à Florence — où elle va se rendre — en Russie et à Paris, elle se fasse encore applaudir l'an prochain au Théâtre-Royal.

Une jeune cantatrice, qui débuta à l'Opéra en même temps que la direction de MM. Messager et Brousseau, et dont le succès fut rapide et éclatant, Mlle LAPEYRETTE, vient de signer un nouvel engagement de trois ans à de très brillantes conditions. Elle chantera demain soir dans Samson et Dalila le rôle de Dalila, auquel elle apportera une si personnelle et si artistique interprétation.

— C'est mercredi prochain 29 mars que Mlle Maria Kousnietzoff fera sa rentrée à l'Opéra dans un des rôles où son magnifique talent s'affirma le mieux, celui de Thaïs. La grande cantatrice qui, après une saison triomphale à Saint-Pétersbourg, vient d'obtenir de nouveaux et brillants succès à Nice, aura pour partenaire l'éminent créateur du rôle d'Athanaël, M. Delmas.

MM., Hertz et Jean Coquelin viennent d'engager M. HENRI COLLEN qui fut au Vaudeville et à la Renaissance. Il débutera à la Porte-Saint-Martin, la saison prochaine, dans la reprise de la Femme nue, de M. Henry Bataille.

M. LE BARGY va revenir de sa tournée sur la Côte d'Azur pour aussitôt repartir en Russie. L'éminent sociétaire rayonne, comme on voit, de l'orient au septentrion...

Il va jouer, dans une tournée de quelques jours en Belgique et en Russie, L'Ami des Femmes, avec Mlles Géniat et Faber; M. Le Bargy incarnera de Ryons.

Après une longue convalescence, l'exquise Griet Anastel, si gracieuse, si émue et si poétique qu'avait créée Mlle MARIE LECONTE, dans la Fleur merveilleuse, nous est réapparue, à la Comédie-Française. L'oeuvre pittoresque et légère de M. Miguel Zamacoïs a retrouvé le vif succès qui l'accueillit à la création.

KNABE-ANGELUS

Ce titre « Le meilleur piano du Monde » n'aurait pas pu être pris par le Knabe si cet instrument n'avait pas possédé toutes les qualités qu'un piano doit posséder pour être apprécié par les artistes et les critiques. Inventé en 1895, il est universellement reconnu comme un instrument merveilleux. Les claviers comprennent 88 notes.

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QUATRE CYLINDRES — 30 CHEVAUX

Avis aux automobilistes.

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préparé par A. COLUCCI, et avec l'approbation des professeurs de la Faculté, de médecine de Rome pour combattre l'anémie et ses conséquences, la chlorose, le nervosisme, l'affaiblissement, et pouvant être administré à des adultes et à des enfants. Le flacon : 3 francs; les quatre flacons : 10 francs.

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AVIS AUX AUTOMOBILISTES

Les Huileries de Levallois, depuis leur nouvelle installation dans cet important centre industriel, ont su faire apprécier et primer leur marque ROYAL OIL, huile spécialement préparée pour automobiles et moteurs de toutes marques.

Les résultats obtenus ont été tels que nous recommandons à tout propriétaire soucieux du bon fonctionnement de son Automobile de n'employer que la marque

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LE MONDE ARTISTE

LA VIE FINANCIERE

Les dispositions du marché financier n'ont pas été, cette dernière huitaine, beaucoup plus satisfaisantes que celles de la huitaine précédente. Les nouvelles de l'extérieur ne sont pas toutes également encourageantes et quelques-unes même, en particulier, ne sont pas sans justifier quelques appréhensions.

En ce qui touche par exemple le Mexique, le fait que ces garanties constitutionnelles viennent d'être suspendues pendant six mois, indique bien que l'on se trouve en face d'une situation dont il serait inutile d'essayer de dissimuler la gravité. Le groupe des Fonds et Valeurs directement intéressé n a, d'ailleurs, cessé d'être lourd.

Du Maroc, les nouvelles reçues en dernier lieu ne montrent pas que l'apaisement soit complètement fait; il est évident que, de ce côté, il se passera bien du temps et bien des événements se produiront, avant que le pays soit complètement pacifié.

Nous avons fait, il y a quelques semaines déjà, allusion à un conflit entre la Russie et la Chine, au sujet de la non-observation des clauses de traités anciens; ce conflit n'est pas solutionné encore; mais l'on se plaît à espérer une solution prochaine; en tons cas, il n'y a rien là d'inquiétant, au point de vue international, étant donnés les bons rapports qu'entretient le gouvernement russe avec les grandes puissances européennes.

Mais si réelles que puissent être les préoccupations que suggèrent les circonstances auxquelles nous venons de faire allusion, si la Bourse a été médiocrement tenue, cela est surtout la conséquence des liquidations d'acheteurs en spéculation, liquidations qui ont été accompagnées d'un certain nombre de ventes à découvert que ne pouvaient que provoquer les événements.

Il n'y a pour ainsi dire pas de compartiment qui ne porte la trace de ce revirement de l'orientation. On aurait pu s'attendre à mieux, lorsque l'on considère l'abondance de l'argent, dont le bon marché des reports, en liquidation de quinzaine, a apporté une nouvelle preuve. Les acheteurs jouissant d'un bon crédit, ont pu se faire reporter au taux moyen de 2 1/4 0/0; mais ce taux s'est par la suite tendu, et l'on a dû payer jusqu'à 3 0/0; encore un certain nombre de spéculateurs moins solides se sont-ils vu refuser tout crédit, d'où des liquidations dont il a été tout à l'heure question.

La position de place a paru chargée à la hausse, et l'on pouvait s'y attendre, puisque nous avons assisté pendant de longs mois à un mouvement en avant et que les spéculateurs prennent des positions à la hausse de plus en plus fortes, au fur et à mesure que l'on monte. C' est peu logique, mais c'est constamment ainsi. La coulisse s'est trouvée troublée par la défaillance de l'agent de change Ehrard; on sait, en effet, que la Chambre syndicale a refusé d'intervenir dans le règlement des différences provenant d'opérations faites pour le compte personnel de l'un de ses membres, que les coulissiers intermédiaires avaient eu l'imprudence d'aviser, non à la charge, mais à l'adresse particulière.

Or, le passif de l'agent de change réside surtout dans les différences de cette nature. Cet état de choses a eu pour conséquences, d'une part, la nécessité de déclarer personnellement M. Ehrard en faillite ; d'autre part, la coulisse a dû liquider à tout prix les engagements de son client qu'elle avait prorogés à la liquidation précédente. Comme ces engagements étaient considérables, on conçoit aisément quels inconvénients ont eus, pour un certain nombre de titres, ces liquidations hâtives; la répercussion a été surtout marquée dans le compartiment des mines d'or, sur lesquelles M. Ehrard avait pris des engagements particulièrement importants.

C' est là un événement dont la portée est considérable ; elle n'est pas limitée, en effet, à un trouble passager; mais encore l'évènement a fourni le prétexte à des commentaires complexes qui ne peuvent que jeter un certain discrédit, aussi bien sur la corporation des agents de change que sur les coulissiers.

Dans un autre ordre d'idées, la reprise de la question de l' impôt sur le revenu, l'affirmation qu'il, devra éventuellement frapper tous les revenus, était peu faite pour remettre les capitalistes dans l'état d'esprit nécessaire pour qu'ils puissent se donner sans arrière-pensée aux

affaires. Il faut cependant retenir que, si M. Caillaux maintient dans son principe son système, il se réserve d'accepter, dans le mode du contrôle des revenus, les atténuations qui pourront être conciliables avec l'intérêt fiscal.

En tous cas, la Rente française a perdu plus que le coupon trimestriel récemment détaché, défavorablement influencée, aussi bien par les appréhensions nées des déclarations du ministère des Finances, que par les difficultés qui peuvent surgir au Maroc Les Emprunts coloniaux sont toujours calmes et peu activement traités. L'Extérieure Espagnole n'a pu se maintenir tout à fait au niveau élevé auquel elle avait été récemment poussée. Malgré une opposition très vive et les attaques de M. Urzaïs, les Cortès ont approuvé le projet d'amortissement de la Dette Extérieure, en cinquante annuités. L'amortissement se fera par rachats au-dessous du pair et par tirages au-dessus. Le change reste tendu autour de 8 1/2 0/0.

Les Fonds Portugais témoignent de stabilité, en attendant les élections législatives qui auront lieu vers la fin du mois prochain...

Les Fonds Russes ne sont pas restés complètement indifférents au conflit avec la Chine, au sujet de la pénétration des produits russes en Mongolie. Pour le surplus, la situation économique et financière du pays reste encourageante.

Les Fonds Turcs sont soutenus, mais il est visible que les émissions en cours ou à la veille d'aboutir, de papier ottoman, ont provoqué, depuis quelques semaines, un certain nombre d'arbitrages.

Les Fonds Balkaniques font bonne contenance, sauf peut-être les Bulgares, qui ont enregistré un léger tassement.

Dans le groupe des Fonds Sud-Américains, les Fonds Argentins se maintiennent aux environs de leur niveau antérieur. On signale que le ministère des Finances a obtenu une réduction assez appréciable des dépenses budgétaires. Les Fonds Brésiliens se représentent sans changements réllement appréciables. On a commenté défavorablement l'attitude indécise prise par le Gouvernement dans la question des abus de concessions. Nous avons dit déjà la faiblesse des Fonds Mexicains ; nous n'y insistons donc pas.

Les principaux établissements de crédit portent la trace des liquidations récentes; naturellement, la réaction a été surtout marquée sur les titres qui avaient été antérieurement le plus vigoureusement poussés.

La Banque de France est, comme à l'ordinaire, peu activement traitée; mais l'on continue à croire, dans les milieux qui passent pour généralement bien informés, qu'elle n'a rien à craindre des attaques dont elle est menacée d'être l'objet à la Chambre des députés, avant qu'il soit longtemps.

On dit que la Banque Française pour le commerce et l'industrie vient de conclure un emprunt turc et d'obtenir la concession d'un chemin de fer en Turquie.

Les Banques Algériennes sont calmes dans l'ensemble.

La Banque Ottomane, qui voit lui échapper de nouvelles opérations, n'a pu maintenir ses hauts cours récents.

Les Banques Russes ont été plus délaissées ; il faut souffler un peu avant d'aller plus loin.

Les Chemins de fer Français sont peu favorisés par les débats qui s'agitent autour de l'importante question de la rétroactivité des retraites qui leur imposera de lourdes charges, auxquelles elles ne paraissent pas pouvoir échapper même dans le cas de rachat par l'Etat. Les recettes demeurent, heureusement, assez satisfaisantes.

Les Chemins Espagnols sont en tendances irrégulières ; le change est tendu, comme nous l'avons dit, et les recettes de l'année ne sont pas aussi satisfaisantes que celles de la période correspondante de l'an dernier.

Les négociations se poursuivent pour les Lombards qui sont peu mouvementés et donnent lieu à des échanges absolument restreints.