L'ANE MORT.
..liée à l'église, la mère... t'auras des dentelles longues comme ça... moi, j'aurai... les mains dans mes poches,., et Henriette, not'fille, elle aura...
MARTHE.
Des petits enfants que j'élèverai dans l'amour du prochain et la crainte du bon Dieu.
BERNARD.
Et que j'emmènerai à la chasse... Tiens, il me semble que j'y suis déjà.
MARTHE, un peu rêveuse. Ahl oui, oui... tout cela c'est un beau rêve.
BERNARD.
Un rêve!... c'est-il un rêve que nous avons une fille jeune, jolie... et bien élevée? C'est il un rêve que Malhurin, le plus riche meunier du pays, en tient pour notre fille? [Marthe vient s'asseoir en face de Bernard. ■ C'est-il un rêve, ces dix-sept cent vingt écus de bénéfice qui dansant là, devant moi, en ayant l'air de m'agacer... les fripons? Dis, d,s, c'est-il un rêve?... (Un frappe à la porte du fond.)
MARTHE.
On a frappé. [Elle se lève pour aller ouvrir.)
BERNARD.
Attends, que je serre le magot... on ne sait pas à qui on peut avoir à causer, d'autant plus qu'en remontant le petit bois, j'ai vu la maréchaussée tout en désarroi... Attends, attends!,.. (// serre l'argent dans «ne armoire. Marthe va ouvrir.)
SCENE II.
LES MÊMES, PICHERIC, en paysan.
PICHERIC.
Pardon, excuse la compagnie; c'est-il ici que demeure Pierre Bernard, marchand de graines?
MARTHE.
C'est ici.
PICHERIC.
Alors, v'ià mon affaire. (Apart.) Il n'y est pas.
MARTHE.
Qu'est-ce que vous demandez?
PICHEHIC.
Ce que je demande?... ce que... (A part.) C'est pas toi, va. (Haut.) Voilà... je m'appelle Christophe, je suis revendeur, et je voudrais .. [A pari.) Où diable peut-il être? [Haut.) Je voudrais voir vos échantillons.
BERNARD.
C'est facile.
PICHEMC.
Et si ca me séduit, marché conclu: je suis tout rond, et
VtVUS !
BERNARD, riant. Mais pas mal, comme vous voyez.
P1CHERIC.
Alors, ça va marcher tout seul; montrez-moi les échantillons. (Marthe a repris son rouet, Bernard va chercher des casiers.) Je suis sûr pourtant d'avoir vu Robert rôder autour de cette maison... Que diable vicnl-il faire ici? HENRIETTE sort de sa chambre par Vescalier et apporte d sa mère ' une pile de serviettes. Tiens, mère, le linge est bien en ordre, à présent.
PICHERIC, à pari. Oh ! la jolie fille!... je commence a comprendre!...
MARTHE.
Comment! tout cal.,, oh! t'as trop travaillé, enfant... il n'y a pas de bon sens.
HENRIETTE, aperceront Picheric. Un étranger!... (Elle remonte à la fenêtre.)
BERNARD, redesce< dant. Voilà du froment qui est gms cl ferme qu'il y en a plein la main... de l'avoine qu'on pourrait en charger son fusil... du seigle d'une fièrc venue... du...
PICHEHIC, regardant toujours Henriette. Oui, oui, c'est d'une ai-sez belle venue! mais m'est avis que ce n'est pas là vot' plus bel échantillon.
BERNARD.
Excusez-moi.,, mais si.
PICHERIC.
Eh bien!... et celui-là, donc!... (Ilmontre Henriette.)
BERNARD.
Ma fille I
PICHERIC
Ah! c'est vot' fille! je vous en fais mon compliment, c'est (bien cultivé.
HENRIETTE, à la fenêtre, à part. Je ne l'ai pas vu depuis ce matin.
BFRNARD.
N'est-ce pas qu'elle est jolie, not' fille? PICHERIC, à part. Je crois bien! que trop, pour ce fou de Robert
'BERNARD.
Nous allons la marier après la récolte, PICHERIC, à part. La marier!... est-ce que?... (Haut.) Avec qui?
BERNARD.
Avec qui?.., avec un gars, donc! PICHERIC Du pays?
BERNARD.
Tiens!... c'te farce !... avecMathurinle meunier} un fameux parti.
PICHERIC.
Avec Mathurin!... (A part.) Ah! je respiré...
BERNARD.
je parie qu'elle attend son amoureux.
MARTHE, qui n'a pas quit'é sa fille des yeux, â pàtt. Henriette est toujours bien triste. (Tonnerre.)
PICHEHIC.
Oh! oh! on dirait que nous allons avoir de l'orage,
MARTHE.
Ferme la fenêtre, Henrietie, et viens t'asseoit près de moi. (Henriette ferme la fenêtre et vient s'asseoir. A part.) Comme elle est pâle! (Haut.) Tu ne souffles pas, mon enfant?
HENRIETTE.
Non, ma mère.
BERNARD.
Eh benl qu'est-ce que vous dites de mes grains?
PICHERIC.
Qu'ils sont superbes, et que nous nous reverrons pouiiW miner l'achat. H*
BERNARD.
A votre aise. (Il serre ses échantillons. Nuit au fond.)
PKHEHIC, à part. Oh 1 je connais Robert... il ne renoncera pas facilement à une pareille conquête... Allons, allons, je sais maintenant tout ce que je voulais savoir.
BERNARD, qui est remonté. Tiens! v'ià Mathurin.
HENRIETTE, se levant, à part. Mathurin!
BERNARD.
Il arrive à temps pour ne pas être trempé jusqu'aux os. (A Pi'Jieric.) Vous devriez attemire un brin... monsieur Christophe.
PICHERIC.
Merci! merci! j'aime la pluie.
BERNARD.
Eh bien! vous y avez la main. [La pluie tombe.) SCENE III.
LES MÊMES, M \TI1URIN. [Porte du fond.) MATHURIN, il cache derrière lui un bouquet. Ronsoir, père Bernard... bonsoir, mère Marthe. (Il Vem brasse.)
MARTHE et BERNARD.
Ronsoir, mon garçon.
MATHURIN.
ftlamzelle Henriette!
HENRIETTE.
Monsieur Malhurin!
PICHERIC, qui a observé, à part. Ce n'est pas celui-là qu'elle attendait... (Haut.) A bientôt monsieur Bernard.
TERNARD.
Quand vous voudrez...
PICHERIC, à part, en sortant.
Ah! mademoiselle Bernard, si vous venez vous medre eD travers de mes projets, tant pis pour vous, je vous en averlis.(/( se trouveen face de Mathurin qui le regarde ; il lui rit aunez et sort.)