Psychanalyse et psychopathologie de l'enfant :
rester psychanalyste
Serge LEBOVICI
Les psychiatres d'enfants tendent à abandonner l'étude psychopathologique des troubles pour lesquels ils sont consultés ; ils se contentent de les objectiver et de les comparer en les classant selon les méthodes préconisées par la classification américaine dite DSM III : celle-ci vise à définir les troubles par des critères comportementaux, donc « objectifs ».
Les troubles ainsi décrits ne feraient l'objet d'aucune approche théorique. En fait cette assertion est exacte, si l'on veut dire que ces critères ne couvrent aucune approche nosographique. Mais leur utilisation dispense aussi de toute considération psychopathologique.
Historiquement, l'essor du DSM III et de ses révisions, encore en cours, correspond au recul des perspectives dites psycho-dynamiques aux Etats-Unis. L'accent mis au contraire sur des données génétiques et biologisantes du développement, de la psychologie expérimentale et des recherches neurobiologiques tend à condamner toute recherche clinique. L'idéal des recherches viserait alors à relier tous les comportements observés à un état spécifique du système nerveux, suivant une perspective modulaire du fonctionnement mental (J. Fodor, 1979).
Ce mouvement à prétentions étiologiques s'est beaucoup appuyé sur la définition de soi-disant entités morbides comme les « troubles de l'attention » (Attention déficit disorders) 1. Lorsque le trouble a été repéré, il faut des échelles pour l'objectiver et en étudier l'intensité. En ce qui concerne l'enfant qu'il est alors pratique1.
pratique1. ADD. Il est d'ailleurs remarquable qu'on ne puisse plus lire un travail sans être encombré de sigles qui veulent dénommer des troubles ou une échelle pour les étudier.
Rev. franç. Psychanal, 2/1992