RÉSIGNATION A LA MORT. 193
RÉSIGNATION A LA MORT.
Voilà une bonne et saine résignation. Je l'ai dit, ce savetier est un sage. Il y a une résignation plus difficile, c'est celle qui fait que nous nous inclinons devant les arrêts du sort. Ils nous paraissent toujours si injustes ! Sur ce point aussi les petits pourraient donner des leçons aux grands. Ils sont naturellement plus résignés, plus capables d'abnégation, d'humilité devant les grandes puissances naturelles qui nous gouvernent, et contre lesquelles il serait bien inutile et bien ridicule de se révolter.
La Fontaine a préféré, pour nous donner cet enseignement, faire parler la plus terrible de ces fatalités inévitables, la Mort. Dans la fable que vous allez lire, elle raille durement l'avidité, l'obstination à vivre d'un centenaire incorrigible. Mais voyez comme La Fontaine est bon. Après avoir fait parler à la Mort son langage, rude et amer, lui à son tour prend la parole pour exprimer les mêmes idées avec plus de douceur, plus de délicatesse persuasive, plus d'élévation aussi, non pas seulement en sage, mais en ami des hommes, en philosophe aimable dont la résignation est souriante, en admirateur des belles morts et des glorieux dévouements, parant, en quelque sorte, la
LA FONTAINE 9