CHANT II
Cependant cet oiseau qui prône les merveilles, Ce monstre composé de bouches et d'oreilles, Qui sans cesse volant de climats en climats, Dit partout ce qu'il sait et ce qu'il ne sait pas. La Renommée enfin, cette prompte courrière, Va d'un mortel effroi glacer la perruquière : Lui dit que son époux, d'un faux zèle conduit, Pour placer un lutrin doit veiller cette nuit. A ce triste récit, tremblante, désolée, Elle accourt l'oeil en feu, la tète échevelée, Et trop sûre d'un mal qu'on pense lui celer :
« Oses-tu bien encor, traître, dissimuler? Dit-elle, et ni la foi que ta main m'a donnée. Ni nos embrassements qu'a suivi l'hyménée, Ni ton épouse enfin toute prête à périr, Ne sauraient donc t'ôter cette ardeur de courir ? Perfide, si du moins à ton devoir fidelle, Tu veillais pour orner quelque tête nouvelle; L'espoir du juste gain consolant ma langueur, Pourrait de ton absence adoucir la longueur. Mais quel zèle indiscret, quelle aveugle entreprise Arme aujourd'hui ton bras en faveur d'une église 1 Où vas-tu, cher époux ? Est-ce que tu me fuis 7 As-tu donc oublié tant de si douces nuits ? Quoi I d'un oeil sans pitié vois-tu couler mes larmes Au nom de nos baisers jadis si pleins de charmes, Si mon coeur, de tout temps facile à tes désirs,