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Titre : Tendresses impériales / Napoléon Bonaparte ; avec une lettre-préface [à Maurice Barrès] par Abel Gri

Auteur : Napoléon Ier (1769-1821 ; empereur des Français). Auteur du texte

Éditeur : E. Sansot (Paris)

Date d'édition : 1913

Contributeur : Gri, Abel. Préfacier

Sujet : France -- 1804-1814 (Empire)

Notice d'ensemble : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34030108k

Type : monographie imprimée

Langue : français

Format : 1 vol. (156 p.) ; in-18

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Description : Collection : Nouvelle bibliothèque de variétés littéraires

Description : Contient une table des matières

Description : Avec mode texte

Description : Correspondance

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k5426446r

Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-LB44-1896

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 03/09/2008

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I.I..RAIRIK HOWARD SANSOT. KDITKUK

EXTRAIT DU CATALOGVK

PAUL ADAM

La Victoire de la Vie. . . i fr

Le Taureau de Milhra. . . i a

Le Nouveau Catéchisme . . t »

AGRIPPA D'AUHIGXA OEuvre» poétiques choisies. 3 So

MAURICE BARRES

tic l'Académie rianc?i\c

Quelques Cadences i ;i

Alsace-Lorraine i u

Les Lézardes sur la Maison i »

ALFRE-? . CAPUS

de l'A< adt-uue Française

La Vie. L'Amour, L'Argent i »

RICCIOTVO CANUDO L'Homme 3 So

MAURICE DONNAY

île l'Académie Fiwnçai'.e

Le Coeur cl la Tête i »

EMILE FAGIIET

de l'Académie Française Les Dix Commandements, dix vel. a r ii'

. PAUL FLAT Figures el Questions de ce lemps. ......" i 5o

PAUL HERVIEI

de l'Académie Fraoçkiie

La Chasse au réel ..... i u

ROBERT RANDAU

Les Colons 3 So

Les Explorateurs 3 5o

LeCommandantetlesFoulbé 3 So

Les Algérianistes. .... 3 Sa

Celui qui s'endurcit. .... 3 So

MARTIN-MAMV Les Nouveaux Païens. ... 3 So

P£LADAN La Dernière Leçon de

Léonard de Vinci ... in

L'Androgyne i u

MARCEL PRÉVOST

de l'Académie Française

Moralités Féminines cl

Françaises i u

EDGAR POE Les Lunettes et plusieurs

autres contes inédits. . . 3 u Marginalia, traduites par

VICTOR OHBAN i 5o

EDMOND PILON Portraits Français, » vol. à 3 So Dans les Jardins cl dans les

Villes î So

JACQUES REDOUL So'js le Chêne Celtique 3 So

CHARLES REGISMANSET Le Bienfaiteur de U Ville. 3 So

OiiiMjje couronné par l'Académie française,

MARC SAUNIER La Légende des Symboles, j 5o Au-delà du Capricorne . . 3 So

LAURENT TAILHADE .Le Troupeau d'Aristéc. . . i u

ALPHONSE SÉCHÉ Les Caractères de la Poésie

contemporaine 3 So

CAMILLE LE SENNE

et GUILLOT DE SAIX Lope de Vega : L'Etoile de Séville, étude el version. S » Outrage couronné par l'Académie Française

PHILÉAS LEDESOUE

La République Poitugaise. 3 5o

RENÉI; VIVIEN

Dans un Coin dt Violetteu. 3 »

Le Vent des Vaisseaux. . . 3 u

Haillons 3 u

Imp. E. Durand, i?, lue Séguier, Paris


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TENDRESSES; IMPÉRIALES


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IL A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE

25 EXEMPLAIRES NUMÉROTÉS SUR HOLLANDE

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Que diriez-vous d'une série qui grouperait les rêcitt envoyés du théâtre de leurs exploits à leurs maîtresses par nos héros et qui nous les ferait voir dans l'instant où l'amour agit sur eux comme un ferment d'héroïsme? IAS lettres du jeune général en chef de l'armée d'Italie ouvriraient celte collection.

(MAUIUCB DAMIÊS.)

(Préface dès « Lettres du lieutenant-colonel Moll ».)


,LETTRE-PRÉFACE

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Voir réunies, en une page d'héroïsme et de passion, les lettres d'amour du jeune général en chef de l'armée d'Italie, c'est une idée qui vous fut chère et que voici réalisée.

En y joignant le < Dialogue sur l'Amour » qu'écrivit le jeune lieutenant d'artillerie et les billets fiévreux que l'Empereur fit parvenir à Marie Walewska, nous ajoutons les clartés et les ombres qui feront mieux valoir la figure du héros.

Il n'est pas jusqu'à cet dpre énoncé des articles du Code qui, comme la gravure sévère de quelque eau-forte, ne puisse fixer dans notre cerveau la pensée austère du Maître.

Nous ne dirons pas l'histoire dî ses amours. Si nous les savons multiples, nous avons retenu qu'elles ne l'obsédèrent pas. Sans les considérer comme une tare, il pensait justement qu'elles


0 TENDRESSES lUrÉMAlES

étaient un mal inévitable à l'homme sans foyer, et que, pour cette raison, mieux valait les taire et les cacher.

C'est encore l'aimer que de ne pas attacher d'importance aux actes de sa vie qu'il estimait négligeables.

Aussi, sa tendresse pour Marie Walewsha n'aura-t-elle que l'agrément d'une faiblesse s'entourant de romantisme.

Elle aura le charme troublant d'une page de littérature où l'amour dispute Vôtre aimé à la curiosité des foules et à la raillerie des pamphlétaires. Malgré ses moments de véritable grandeur et malgré l'inaltérable souvenir qu'il lui garda, l'aventure polonaise ne restera qu'une aventure, sans doute plus longue, plus relevée parmi les autres, mais dont on n'a pas à chercher les conséquences, parce qu'elle ne pouvait pas en avoir dans la pensée et par la volonté du héros.

L'idée du rétablissement d'un royaume par l'intervention de l'amour ne sera qu'une chimère conçue par l'héroïne et narrée avec volupté par les écrivains épris de son histoire.

L'ascension au trône d'une concubine n'est qu'une autre folie de ceux qui s'ingénièrent à voir un passionné chez Napoléon.

Il eût été plus vrai de dire que par Napoléon


LBTTRE-PRÉPACI A MAURICE BARRÉS 7

l'amour n'est ni recherché, ni surtout glorifié. Il est combattu. L'Empereur ne l'accepte que dans le mariage, sans l'y croire nécessaire. Pour lui, le mariage est un devoir social. C'est un acte légitime que nous devons accomplir, que le souverain doit imposer à ses sujets et à l'accomplissement duquel il prêtera son encouragement. C'est un moyen de fonder une famille, une nation, une dynastie. Si fragiles que soient des unions que, seule, la volonté explique, il les veut définitives. Si le divorce est inscrit dans ses lois, ce n'est qu'entouré de mille entraves qui le rendent difficile à appliquer et d'aspect si redoutable que la plupart des solliciteurs s'en détournent. Il croit qu'il n'est rien de durable que ce qu'a bâti la volonté tenace. Il sait que les énergies sont rares et que la foule, quoique mobile, est soumise, parce que craintive. La rigueur de ses lois forcera son peuple à la vertu. Aussi l'amour n'apparaît à ses yeux que comme un libertinage. H le voit sous son aspect physique, et de suite il entrevoit les déchéances où conduisent les passions. Économe de l'énergie de son peuple comme de la sienne, il utilise même les circonstances quotidiennes pour bannir de son entourage l'idée de l'amour et l'habituer à des pensées plus austères. La perte d'une amante provoque-t-elle un suicide parmi ses

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8 TENDRESSES IMPÉRIALES

troupes, de suite il fait lire une proclamation dans laquelle il est dit qu' « un soldat doit vaincre la douleur et la mélancolie de ses passions ». L'histoire ne dit pas quelle femme fnl cause de ce drame. Maîtresse ou épouse, la proclamation eût été la même. Dans sa pensée, l'homme se doit d une tâche plus sévère que celle d'aimer. L'amour est l'affaire dés femmes, dont il exige la fidélité. Non pas qu'en soi il donne une grande importance à l'adultère. Il le dit t commun » et c'est une « affaire de canapé ». Mais s'il le comprend, il ne l'excuse pas et les moeurs qu'imposera son exemple contribueront à en diminuer les causes. Il veut les épouses respectées. Il écarte d'elles les galants, supprimant ainsi toutes excuses à leur faute. Si malgré tant de soins la trahison n'a pu être évitée, il se gardera bien de l'ébruiter, d'user môme de l'autorité de ses lois. Il sait qu'un malheur conjugal ne doit pas s'avouer,

Ceci explique le ton enjoué de ses lettres'à Joséphine, où les rares menaces sont plutôt des avis de discrétion. Alors il écrit : « Ne te fie pas, et je te conseille de te bien garder la nuit, car une de ces prochaines tu entendras grand bruit, i

Aussi sa correspondance est-elle d'une lecture passionnante et triste.


LETTnE-pnÉFACE A MAURICE BAMIÈS 9

Bonaparte, à vingt-six ans (1), se marie avec Joséphine, dgée de quelques années de plus que lui (2). Elle est veuve. Elle est créole. Elle a passé sa vie dans l'oisiveté. Celle du jeune Bonaparte s'est passée dans l'étude et dans les combats. Il ne sait des femmes et de l'amour que ce qu'il en a observé avec une^amère justesse. Mais que peut l'observation d'un jeune homme quand, pour la combattre, on a le visage, la grdee de séduction et l'expérience de Joséphine.

Pour conquérir une place, une fortune, un droit aux honneurs, elle usa de la seule arme qui était en son pouvoir. Une prescience lui disait que tout cela, ce jeune homme timide avec elle, mais énergique avec les événements, saurait le lui offrir.

Et il en fut ainsi.

Dès le soir du mariage, c'est, de la rue Chantereine, le hdlif départ vers la gloire. Et bientôt les nouvelles parviennent, apportant chacune l'annonce d'un triomphe, d'un pas vers l'empire dont elle rêve peut-être dans son imagination orientale, mais certainement l'assurance d'un peu plus de cet argent dont elle se montrera si prodigue.

(1) Né en 1769.

(2) Née à la Martinique en 1703. Elle avait 33 ans.


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10 TENDRESSES IMPÉRIALES

Pendant qu'il écrit ces fiévreux billets le soir, sous la tente, parmi l'éparpillement des caries et des rapports, lorsque dorment ses soldats harassés,Joséphine, oublieuse des promesses récentes, se laisse aller à l'ardeur de son tempérament. Bonaparte en reçoit la nouvelle en Egypte. De suite il songe au divorce. Ce qu'il y a de brutal et d'orgueilleux dans son caractère lui présente ce moyen prompt de sauver son honneur.

Mais bientôt il fait un lent et puissant effort sur lui-même, s'appliquant à discuter, à peser la gravité et les conséquences de la rupture.

Il commande un corps d'expédition. Il a décidé d'atteindre le pouvoir à son retour en France. Des ennemis l'entourent. Ira-t-il prêter le flanc aux railleries en faisant connaître à tous ce qui n'est su que de quelques-uns? Ainsi les années passent. Il grandit dans sa puissance. En Italie, il est trop tard déjà poxir exiger celte réparation. La blessure est plus ancienne aussi. Jl la pourra supporter. Les efforts faits pour reconquérir Joséphine sont restés vains. Il eût fallu qu'il demeurât près d'elle à la distraire, d la choyer. Mais son destin l'appelait aux armées.

La certitude de toute maternité impossible chez l'Impératrice, seule, le détermina à la rupture. Encore ne put-il l'accepter définitive. Il


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LETTRE'PRÉFACB A MAURICE BARRÉS 11

sentit le besoin de la savoir proche de lui et heureuse par ses soins.

Perpétuel combat entre l'amour et la destinée, voilà toute la vie de Napoléon avec Joséphine.

Maintenant que nous connaissons les idées de l'Empereur sur l'amour et le mariage, on peut demeurer surpris de voir sa conduite.

Quand on songe qu'il avoua ses maîtresses à Joséphine, lui présenta M™ Walewska, et que l'ayant répudiée il ne voulut cesser de la voir, quelle extraordinaire complexité de caractère ne découvre-t-on pas en luit

Deux causes expliquent cette conduite : l'éducation littéraire de Bonaparte et le rôle d'initiatrice de Joséphine.

Napoléon dans sa rudesse garde un fond de rêverie qui combat sans cesse son positivisme natif. Cela il le doit d sa jeunesse isolée, malheureuse même, dépourvue de caresses et de cet argent avec lequel s'achètent tes illusions de celles-ci. Il a vu de* femmes, sans doute, mais leurs rangs si supérieurs au sien l'ont forcé d n'être que tendre et « troubadour» auprès d'elles. Ce furent les idylles de Valence. De celles qui se donnent, il connaît seulement les filles vénales comme celle interrogée un soir de fièvre sous les galeries du Palais-Royal.

La lecture de Rousseau l'exalta. Il a rêvé une


12 TENDISSES IMPÉRIALES

jl/me de Warens. Il croit la découvrir dans celle créole s'offrant à lui, prestigieuse, entourée des souvenirs de son Orient natal II l'aime d'autant plus qu'il n'osait espérer lui plaire.

De son côté, Joséphine trouva de l'agrément d séduire ce jeune homme qu'elle savait chaste. Pour cette voluptueuse c'était une conquête bien tentante. Ce que furent leur fièvre, nous le devinons. Dans leur hâte de possession, ils ne surent attendre leur mariage.

Tout ce qu'une femme dont l'amour est la seule pensée peut mettre de science, de raffinement, de recherche dans l'étreinte, il est certain que Joséphine le révéla d Bonaparte étonné et ravi. Pour elle il fut un jouet. Elle le trouva même « drôle » et par ce plaisir qu'elle donnait contre toute attente elle le posséda. De lui avoir fait connaître un amour qu'il imaginait seulement dans les romans, Bonaparte lui en fut toute sa vie reconnaissant. Ce conquérant l'aime parce qu'elle l'a vaincu, qu'elle l'a su tenir, lassé, près d'elle et cependant heureux.

Aussi il aura pour elle des empressements de petit-mailre, de délicates attentions, des pardons même. Elle peut tout faire : le tromper, se vendre et s'endetter. Qu'importe l 11 sait qu'il trouvera en elle un superbe instrument de plaisir plus vibrant et plus riche que tous les autres.


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LETTRE-PRÉFACE A MAURICE BARRÉS 13

.AM# Aettr«s de réflexion, dans les nuits aux camps, sa pensée s'applique à comprendre Joséphine. Il évoque les amants d qui elle se donne avec la même fougue qu'à lui-même. Si, dans son instinct de mdle, il est jaloux, sa fierté d'homme ne se révolte pa3. // sait qu'il n'a qu'à reparaître pour les lui faire oublier tous. Sa gloire, sa richesse lui ajoutent un prestige dont il connait la force. « Ce qu'on aime en nous c'est notre bonheur », pense-t-il. Il se dit aussi qu'une femme dont les sens sont si prompts ne pourra jamais commander à l'esprit d'un homme. Pas plus qu'elle ne se souvient de lui absent, il ne redoute de subir son action quand il l'a quittée. Cela le séduit d'avoir une femme ne songeant qu'à le distraire sans penser à le commander. Enfin c'est surtout parce qu'elle fut l'initiatrice qu'il ne l'oublie jamais. Elle peut vieillir et avec l'dge voir s'éteindre la possibilité des étreintes. Qu'importe I Elle l'a fait vibrer avant toutes les autres. S'il n'hésite pas même à lui avouer ses infortunes galantes, c'est qu'il est certain de trouver sur son sein un mol oreiller pour sa peine et dans ses mains, qui eurent tant de luxurieuses caresses, une dernière étreinte pour apaiser son coeur. Il sait qu'elle l'aidera d dénouer d'aventureuses liaisons, trouvant dans cette compromission l'agrément de se voir rechercher encore.


44 TENDRESSES IMPÉRIALES

Vu de la sorte, le caractère de Napoléon apparaît sans êtrangeté. Il s'est imposé, oi\ son esprit le conduisait à n'avoir d'autre maître que lui et à laisser la femme en marge de sa pensée.

Une conception de la vie entièrement consacrée à la réalisation ferme d'un grand projet oblige à ne considérer les autres sentiments que comme des plaisirs et à faire que ceux qui les éveillent en nous ne puissent devenir rien autre que des amuseurs.

L'esprit pourra s'ingénier à concevoir une vie calme où les droits de la famille et ceux du devoir seront justement équilibrés-, il semble qu'une loi conduise les êtres supérieurs à ne pas s'y arrêter. Ce calme, ce repos familial, dans les minutes de découragement ils regretteront parfois dene l'avoir pas, mais ne s'attarderont pas à cette mélancolie. Immenses dans leurs besoins, ceux dont Napoléon a dit qu'ils « étaient des météores destinés à brûler pour éclairer la terre » seront toujours conduits à s'éprendre de ce qui sera énervant comme le sont la lutte et les courtisanes, si l'on veut entendre par courtisanes non les filles simplement vénales, mais celles qui trouvent à se donner une satisfaction aussi vive que le guerrier d vaincre. Pour les courtisanes et pour le conquérant, l'or et le butin de l'amant et du vaincu sont les conséquences naturelles, mais

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LETTRE-PRÉFACE A MAURICE BARRÉS 15

négligeables d'une action puissante. Offrandes et rançons seront vile dissipées, et de tant de fortunes et de conquêtes Une restera pour l'éternité que l'immense souvenir de leur agitation.

Napoléon cherchant la femme qui l'aimera pour lui-même et n'aimera que lui, l'artiste demandant celle qui le comprendra et lui construira un foyer, obéissent à une loi de contraste de notre esprit. En donnant Joséphine à Napoléon et d'ardentes maitresses aux chastes artistes, les lois surnaturelles semblent avoir voulu surchauffer les sens de ces héros pour mieux libérer leurs esprits en leur présentant de la femme une idée physique et irrespectueuse d laquelle ils ne sauraient s'attacher sans déchoir.

Abel GRI.



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TENDRESSES IMPÉRIALES



LETTRES DU GÉNÉRAL EN CHEF

DE L'ARMÉE D'ITALIE

LETTRE I A Joséphine, à Milan.

Marmirolo, le 39 messidor, 6 heures du soir (11 juillet 1790).

Je reçois ta lettre, mon adorable amie; elle a rempli mon coeur de joie. Je te suis obligé de la peine que tu as prise de me donner de tes nouvelles; ta santé doit être meilleure aujourd'hui; je suis sûr que tu es guérie. Je t'engage fort à monter à cheval, cela ne peut pas manquer de te faire du bien.

Depuis que je t'ai quittée, j'ai toujours été triste. Mon bonheur est d'être près de toi. Sans cesse je repasse dans ma mémoire tes baisers, tes larmes, ton aimable jalousie, et les charmes de l'incomparable Joséphine allument sans cesse une flamme vive et brûlante dans mon coeur et


20 TENDRESSES IMPÉRIALES

dans mes sens. Quand, libre de toute inquiétude, de toute affaire, pourrai-je passer tous mes instants près de toi, n'avoir qu'à t'aimer, et ne penser qu'au bonheur do te le dire et de te le prouver? Je t'enverrai ion cheval; mais j'espère que tu pourras me rejoindre. Je croyais t'aimer ii y a quelques jours; mais, depuis que je t'ai vue, je sens que je t'aime mille fois plus encore. Depuis que je te connais, je t'adore tous les jours davantage : cela prouve combien la maxime de La tlruyère, que l'amour vient tout d'un coup, est tousse. Tout, dans la nature, a un cours et différents degrés d'accroissement. Ahl je t'en prie, laisse-moi voir quelques-uns de tes défauts ; sois moins belle, moins gracieuse, moins tendre, moins bonne surtout; surtout ne sois jamais jalouse, ne pleure jamais; tes larmes m'ôtent la raison, brûlent mon sang. Crois bien qu'il n'est plus en mon pouvoir d'avoir une pensée qui ne soit pas à toi, et une idée qui ne te soit pas soumise.

Hepose-toi bien. Rétablis vite ta santé. Viens me rejoindre ; et, au moins, qu'avant de mourir, nous puissions dire: « Nous fûmes tant de jours heureux II »

Millions de baisers, et mémo à Fortuné (1), en dépit de sa méchanceté.

BONAPARTE.. (1) iMit clileu do Joséphine.


LETTRES DU GÉNÉRAL EN CHEF DE L'ARMÉE D'ITALIE 21

LETTRE 11 A Joséphine, à Milan.

Marmirolo, le 1.1 messidor, 3 heures après-midi (18 juillet 1700).

J'ai passé toute la nuit sous les armes. J'aurais eu Mantouo par un coup hardi et heureux ; mais les eaux du lac ont promptemenl baissé, de sorte que ma colonne qui était embarquée n'a pu arriver. Co soir, je recommence d'une autre manière, mais cela ne donnera pas des résultats aussi satisfaisants.

Je reçois une lettre d'Eugène, que je t'envoie. Je te prie d'écrire de ma part à ces aimables enfants et de leur envoyer quelques bijoux. Assure-les bien que je les aime comme mes enfants, Co qui est à loi ou à moi se confond tellement dans mon coeur, qu'il n'y a aucune différence.

Jo suis fort inquiet de savoir comment tu to portes, ce que lu fais. J'ai clé dans le village de Virgile, sur les bords du lac, au clair argentin do la lune, et pus un instant sans songer à Joséphine 1

L'ennemi a fait le 28 une sortie générale; il nous a tué ou blessé deux cents hommes, il en a perdu cinq cents en rentrant avec précipitation.


23 TIMDRESSES IMPÉRIALES

Je me porte bien. Je suis tout à Joséphine, et je n'ai do plaisir ni de bonheur que dans sa société.

Trois régiments napolitains sont arrivés à Brescia; ils se sont séparés de l'armée autrichienne, en conséquence de la convention que j'ai conclue avec M. Pignatelli.

J'ai perdu ma tabatière; je te prie de m'en choisir une un peu plate, et d'y faire écrire quelque chose dessus, avec tes cheveux.

Mille baisers aussi brûlants que tu es froide. Amour sans bornes et fidélité à toute épreuve. Avant que Joseph (i) parte, je désire lui parler.

BONAPARTE.

(1) Frère atne de Napoléon, devenu roi d'Espagne.


LETTRES OU GÉNÉRAL EN CHEF DB t/ABHÉE D'iTAUE 23

LETTRE III A Joséphine, à Milan,

Marmirolo, \« IhcrmiJor an IV (I» juillet 17W).

Il y a deux jours que jo suis sans lettres de toi. Voilà trente fois aujourd'hui que je me suis fait cette observation, tu sens que cela est bien triste; tu ne peux pas douter cependant de la tendre et unique sollicitude que tu m'inspires.

Nous avons attaqué hier Mantoue, Nous l'avons chauffée avec deux batteries n boulets rouges et des mortiers. Toute la nuit cette misérable ville a brûlé. Ce spectacle était horrible et imposant. Nous nous sommes emparés do plusieurs ouvrages extérieurs, nous ouvrons la tranchée cette nuit. Je vais partir pour Castiglione demain avec le quartier général, et jo compte y coucher.

J'ai reçu un courrier de Paris. Il y avait deux lettres pour toi; jo les ai lues. Cependant, bien que cette action me paraisse toute simple et que tu m'en aies donné la permission l'autre jour, jo crains que cela ne te fâche, et cela m'afflige bien. J'aurais voulu les recacheter: fil co serait une horreur. Si je suis coupable, je te demande grâce; je te jure que ce n'est pas par jalou :e; non, certes, j'ai de mon adorable amie une trop grande

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21 TENDRESSES IMPÉMALES

opinion pour cola. Jo voudrais quo tu me donnasses permission entière do liro tes lettres; avec cela il n'y aurait plus de remords ni de crainte.

Achille arrive en courrier do Milan; pas do lettres do mon adorable amie! Adieu, mon unique bien. Quand pourras-tu venir me rejoindre? Jo viendrai te prendre moi-même à Milan.

Mille baisers aussi brûlants que mon coeur, aussi purs que toi.

Je fais appeler le courrier ; il me dit qu'il est passé chez toi, et que tu lui as dit quo lu n'avais rien à lui ordonner. Fi ! méchante, laide, cruelle, tyranne, petit joli monstre I Tu te ris de mes menaces, de mes sottises; ah! si je pouvais, tu sais bien, t'enfermer dans mon coeur, je t'y mettrais en prison.

Apprends-moi que tu es gaie, bien portante et bien tendre.

BONAPARTE.

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LETTRES PU GÉNÉRAL EN CIIEr DK 1,'AtlMÉE K'iTALIK 25

LETTRE IV A Joséphine, & Milan.

Caslijlione, le 3 thermidor an IV, 8 heures du matin (il juillet 17%).

J'espôro qu'en arrivant co soir jo recevrai une de tes lettres. Tu sais, ma chère Joséphine, lo plaisir qu'elles nie font, et je suis sûr que tu te plais à les écrire. Je partirai cette nuit pour Peschicra,

Peschicra, les montagnes do pour Vérone

et do là j'irai à Mantouo et peut-être à Milan, recevoir un baiser, puisquo tu m'assures qu'ils ne sont pas glacés; j'espôro que tu seras parfaitement rétablie alors, et que lu pourras m'accompagner à mon quartier général pour no plus me quitter. N'es-lu pas l'âme de ma vie et le sentiment de mon coeur?

Tes protégés sont un peu vifs, ils sentent l'ardent. Combien je leur suis obligé de faire en eux quelque chose qui te soit agréable. Ils se rendront à Milan. Il faut en tout un peu de patience.

Adieu, belle et bonne, toute non pareille, toute divine ; mille baisers amoureux.

BONAPARTE.

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20 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE V A Joséphine, & Milan.

Castiglione, le 4 thermidor an IV (îi juillet 1790).

Les besoins de l'armée exigent ma présence dans ces environs; il est impossible que je puisse m'éloigner jusqu'à venir à Milan; il me faudrait cinq à six jours et il peut arriver pendant ce temps-là des mouvements où ma présence pourrait être urgente ici.

Tu m'assures que ta santé est bonne ; je to prie en conséquence de venir à Brescia. J'envoie à l'heure même Murât pour t'y préparer un logement dans la ville, comme tu le désires.

Je crois que tu feras bien d'aller coucher le 6 à Cassano, en partant fort tard de Milan, et de venir le 7 à Brescia, où le plus tendre des amants t'attend. Je suis désespéré que tu puisses croire, ma bonne amie, que mon coeur puisse s'ouvrir à d'autres qu'à toi; il t'appartient par droit de conquête et cette conquête sera solide, et éternelle. Je ne sais pourquoi tu me parles de M™e Te..., dont je me. soucie fort peu, ainsi que des femmes de Brescia. Quant à tes lettres qu'il te fâche que j'ouvre, celle-ci sera la dernière ; ta lettre n'était pas arrivée.

Adieu, ma tendre amie, donne-moi souvent de


s

LETTRES DU OENÊRAI. EN CUBF DB L'AIUIEB D'iTALIB 27

tes nouvelles. Viens promptement mo joindre et sois heureuse et sans inquiétude; tout va bien, et mon coeur est à toi pour la vie.

Aio soin de rendre à l'adjudant général Miollis la boite de médailles qu'il m'écrit l'avoir remise. Los hommes sont si mauvaise langue et si méchants qu'il faut se mettre en règle sur tout.

Santé, amour et prompte arrivée h Brescia.

J'ai à Milan une voiture à la fois de ville et de campagne ; tu te serviras de celle-là pour venir. Porte avec toi ton argenterie et une partie des v objets qui te sont nécessaires. Voyage a petites journées et pendant le frais, afin de ne pas te fatiguer. La troupe ne met que trois jours pour se rendre à Brescia. 11 y a, en poste, pour quatorze heures do chemin. Je t'invite à coucher le 6 à Cassano; je viendrai à ta rencontre le 7, le plus loin possible.

Adieu, ma Joséphine. Mille tendres baisers.

BONAPARTE.


28 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE VI A Joséphine, à Milan.

Urescla, le 13 fructidor «n IV (10 août 1796).

J'arrive, mon adoréo amie, ma première pensée est de l'écrire. Ta santé et ton imago ne sont pas sorties un instant de ma mémoire pendant toute la route. Je ne serai tranquille que lorsque j'aurai reçu des lettres de toi. J'en attends avec impatience. Il n'est pas possiblo que tu le peignes mon inquiétude. Je t'ai laissée triste, chagrine et demi-malade. Si l'amour le plus profond et le plus tendre pouvait te rendre heureuse, tu devrais l'être... Je suis accablé d'affaires.

Adieu, ma douce Joséphine; aime-moi, portetoi bien et pense souvent, souvent à moi.

BONAPARTE.


LETTRES DU GÉNÉRAL EN CHEF DE L'ARMËB D'ITALIE 20

LETTRE VII A Joséphine, à Milan.

flrescb, le 14 fructidor an IV (31 août).

Je pars a l'instant pour Vérone. J'avais espéré recevoir une lettre do toi ; cela me met dans une inquiétude nflreuso. Tu étais un peu malade lors de mon départ; je t'en prie, ne me laisse pas dans une pareille inquiétude. Tu m'avais promis plus d'exactitude; ta langue était cependant bien d'accord alors avec ton coeur... Toi, à qui la nature a donné douceur, aménité et tout ce qui plait, comment peux-tu oublier celui qui t'aime avec tant de chaleur? Trois jours sans lettres do toi; je t'ai cependant écrit plusieurs fois. L'absence est horrible, les nuits sont longues, ennuyeuses et fades; la journée est monotone.

Aujourd'hui, seul avec les pensées, les travaux, les écritures, les hommes et leurs fastueux projets, je n'ai pas même un billet de toi que je puisse presser contre mon coeur.

Le quartier général est parti; je pars clans une heure. J'ai reçu celte nuit un exprès de Paris ; il n'y avait pour toi que la lettre ci-jointe qui te fera plaisir.

Pense à moi, vis pour moi, sois souvent avec ton bien-aimé et crois qu'il n'est pour lui qu'un


30 TENDRESSES IMPÉRIALES t

seul malheur qui l'eflraio, ce serait de n'ôtre plus aimé de sa Joséphine. Mille baisers bien doux, bien tendres, bien exclusifs.

Fais partir do suite M. Mondas pour Vérone; je le placerai. Il faut qu'il soit arrivé avant le 48.

BONAPARTE.

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LETTIISS DU OÊNÊIUL EN CIIEf 08 l/AllMiB D'iTAMB 31

LETTRE VIII A Joséphine, & Milan,

Ah, le 17 fructidor an IV (3 septembre 1796).

Nous sommes en pleine campagne, mon adorable amie ; nous avons culbuté les postes ennemis; nous leur avons pris huit ou dix chevaux avec un pareil nombre de cavaliers. La troupe est très gaie et bien disposée. J'espère que nous ferons de bonnes affaires et que nous entrerons dans Trente le 19.

Point do lettres de toi ; cela m'inquiète vraiment ; l'on m'assure cependant que tu te portes bien et que même tu as été te promener au lac de Côme. J'attends tous les jours et avec impatience lo courrier où tu m'apprendras de tes nouvelles; tu sais combien elles me sont chères. Je ne vis pas loin do toi ; le bonheur de la vie est près de ma douce Joséphine. Pense à moi! Écris-moi souvent, bien souvent; c'est le seul remède à l'absence; elle est cruelle, mais sera, j'espère, momentanée.

BONAPARTE.


32 TKNDHISSES IMPÉRIALES

LETTRE IX A Joséphine, à Milan,

Montebcllo, le 24 fructidor »n IV, à midi (10 septembre 1796).

L'ennemi a perdu, ma chero amio, dix-huit mille hommes prisonniers; le reste est tué ou blessé. "Wurmser, avec uuo colonne de quinze cents chevaux et cinq mille hommes d'infanterie, n'a plus d'autre ressource que de so jeter dans Mantoue.

Jamais nous n'avons eu de succès aussi constants et aussi grands. L'Italie, le Frioul, le Tyrol sont assurés à la République. Il faut que l'empereur crée une seconde armée; artillerie, équipages de pont, bagages, tout est pris.

Sous peu de jours nous nous verrons; c'est la plus douce récompense do mes fatigues et do mes peines.

Mille baisers ardents et bien amoureux.

BONAPARTE.


LETTRES PU GÉNÉRAL EN CHÏF DE L'ARMÉE D'ITALIE 33

. LETTRE X A Joséphine, à Milan.

HOMO, le 20 fructidor an IV, & 10 heures du matin (12 septembre liOC).

Je suis ici, ma chère Joséphine, depuis deux jours, mal couché, mal nourri et bien contrarié d'être loin do toi.

Wurmser est cerné; il n avec lui trois mille hommes de cavalerie et cinq mille hommes d'infanterie. Il est à Porto-Lcgagno ; il cherche à se retirer a Mantoue; mais cela lui devient désormais impossible. Des l'instant que celte affaire sera terminée, je serai dans tes bras.

Je t'embrasse un million do fois.

BONAPAHTE.


31 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE XI A Joséphine, à Milan.

Vérone, premier jour complémentaire an IV (le 11 septembre 1796).

Je t'écris, ma bonne amio, bien souvent, et toi peu. Tu es une méchante et une laido, bien laide, autant que tu es légère. Cela est perfide, tromper un pauvre mari, un tendre amant 1 Doitil perdre ses droits parce qu'il est loin, chargé de besogne, de fatigue et do peine? Sans sa Joséphine, sans l'assurance de son amour, que lui reste-t-il sur la terre? Qu'y ferait-il?

Nous avons eu hier une affaire très sanglante ; l'ennemi a perdu beaucoup de monde et a été complètement battu. Nous lui avons pris le faubourg de Mantoue.

Adieu, adorable Joséphine ; une de ces nuits, les portes s'ouvriront avec fracas : comme un jaloux, et me voilà dans tes bras.

Mille baisers amoureux,

BONAPARTE.


IETTHES DU GÉNÉRAL EN CHEF DE L'ARMEE D'iTAMB 35

LETTRE XII A Joséphine, à Milan,

Modï'iie, le S3 vendémiaire an V, 19 heures du soir . (17 octobre 1196).

J'ai été avant-hier toute la journée en campagne. J'ai gardé hier le lit. La fièvre et un violent mal do tète, tout cela m'a empêché d'écrire à mon adorable amie; mais j'ai reçu ses lettres; je les ai pressées contre mon coeur et mes lèvres, et la douleur de l'absence, cent milles d'éloignement, ont disparu. Dans ce moment je t'ai vue près do moi, non capricieuse et fâchée, mais douce, tendre, avec cette onction do bonté qui est exclusivement le partage de ma Joséphine. C'était un rôve; juge si cela m'a guéri de la fièvre. Tes lettres sont froides comme cinquante ans, elles ressemblent à quinze ans de mariage. On y voit l'amitié et les sentiments de cet hiver de la vie. Fi! Joséphine!... C'est bien méchant, bien mauvais, bien traître à vous. Que vous restet-il pour nie rendre bien à plaindre? No plus m'aimer? El»! c'est déjà fait. Me haïr? Eh bien! je le souhaite, tout avilit hors la haine; mais l'indifférence au pouls de marbre, à l'oeil fixe, à la démarche monotone!...

3


30 ÏENDRESSES IMPÉRIALES

Mille, mille baisers bien tendres, comme mon coeur.

Je me porte un peu mieux, je pars demain. Les Anglais évacuent la Méditerranée. La Corse est à nous. Bonne nouvelle pour la France et pour l'armée.

BONAPARTE.


LETTRES DU GÉNÉRAL EN CHEF DE L'ARMÉE D'ITALIE 37

LETTRE XIII A Joséphine, à Milan.

Vérone, le 19 brumaire an V (9 novembre 1790).

Je suis arrivé depuis avant-hier à Vérone, ma bonne amie. Quoique fatigué, je suis bien portant, bien affairé et je t'aime toujours à la passion. Je monte à cheval.

Je t'embrasse mille fois.

BONAPARTE.


38 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE XIV A Joséphine, à Milan.

Vérone, le 3 frimaire an V (13 novembre 1796).

Je ne t'aime plus du tout; au contraire, je te déteste. Tu es une vilaine, bien gauche, bien bête, bien cendrillon. Tu ne m'écris pas du tout, tu n'aimes pas ton mari ; tu sais le plaisir que tes lettres lui font, et tu ne lui écris pas six lignes jetées au hasard.

Que faites-vous donc toute la journée, madame? Quelle affaire si importante vous ôte le temps d'écrire à votre bien bon amant? Quelle affection étouffe et met de côté l'amour, le tendre et constant amour que vous lui avez promis? Quel peut être ce merveilleux, ce nouvel amant qui absorbe tous YOS instants, tyrannise vos journées et vous empêche de vous occuper de votre mari? Joséphine, prenez-y garde, une belle nuit les portes enfoncées et me voilà.

En vérité, je suis inquiet, ma bonne amie, de ne pas recevoir de tes nouvelles ; écris-moi vite quatre pages et de ces aimables choses qui rem* plissent mon coeur de sentiment et do plaisir.

J'espère qu'avant peu je te serrerai dans mes bras, et je te couvrirai d'un million de baisers brûlants comme sous l'équateur.

BONAPARTE.


LETTRES DU GÉNÉRAL EN CHEF DE L'ARMÉE D'ITALIE 39

LETTRE XV A Joséphine, à Milan.

Vérone, le 4 frimaire an V (il novembre 1796).

J'espère bientôt, ma douce amie, être dans tes

bras. Je t'aime à la fureur. J'écris à Paris par ce

courrier. Tout .va bien. Wurmser a été battu

• hier sous Mantoue. Il ne manque à ton mari que

l'amour de Joséphine pour être heureux.

BONAPARTE.


40 TENDRESSES IMPÊMALES

LETTRE XVI A Joséphine, à Gênes.

Milan, le 1 frimaire an Y, a trois heures après-midi (27 novembre 17'JC).

J'arrive à Milan, je me précipite dans ton appartement, j'ai tout quitté pour te voir, te presser dan3 mes bras;... lu n'y étais pas : tu cours les villes avec des fêtes; tu t'éloignes de moi lorsque j'arrive, tu ne le soucies plus de ton cher Napoléon. Un caprice te l'a fait aimer, l'inconstance te le rend indifférent.

Accoutumé aux dangers, je sais le remède aux ennuis et aux maux de la vie. Le malheur que j'éprouve est incalculable ; j'avais droit de n'y pas compter.

Je serai ici jusqu'au 9 dans la journée. No te dérange pas ; cours les plaisirs ; le bonheur est fait pour toi. Le monde entier est trop heureux s'il peut te plaire, et ton mari seul est bien, bien malheureux.

BONAPARTE.


LETTRES DU OÊNÉfUL EN CHEF DE L'ARMÉE D'ITALIE 11

LETTRE XVII A Joséphine, à Qènes.

Mil.m, le 8 frimaire an Y, 8 heures du soir (28 novembre 179C).

Je reçois le courrier que Berthier avait expédié à Gênes. Tu n'as pas ou le temps de m'écrire, je le sens facilement. Environnée de plaisirs et de jeux, tu aurais tort de me faire le moindre sacrifice.

Berthier a bien voulu me montrer la lettre que tu lui as écrite. Mon intention n'est pas quo tu déranges rien à tes calculs, ni aux parties de plaisir qui te sont offertes; jo n'en vaux pas la peine et le bonheur ou le malheur d'un homme que tu n'aimes pas n'a pas le droit d'intéresser.

Pour moi, t'aimer seule, te rendre heureuse, ne rien faire qui puisse te contrarier, voila le destin et le but de ma vie.

Sois heureuse, no me reproche rien, ne t'intéresse pas à la félicité d'un homme qui ne vit que de ta vie, ne jouit quo de tes plaisirs et de ton bonheur. Quand j'exige de toi un bonheur pareil au mien, j'ai tort : pourquoi vouloir que la dentelle pèse autant que l'or? Quand je te sacrifie tous mes désirs, toutes mes pensées, tous les instants de ma vie, j'obéis à l'ascendant que tes


42 TENDRESSES IMPÉRIALES

charmes, ton caractère et toute ta personne ont su prendre sur mon malheureux coeur. J'ai tort, si la nature ne m'a pas donné les attraits pour te captiver; mais ce que je mérite de la part de Joséphine ce sont des égards, de l'estime, car je l'aime à la fureur et uniquement.

Adieu, femme adorable; adieu, ma Joséphine. Puisse le sort concentrer dans mon coeur tous les chagrins et toutes les peines, mais qu'il donne à ma Joséphine des jours prospères et heureux. Qui le mérita plus qu'elle ? Quand il sera constaté qu'elle ne peut plus aimer, je renfermerai ma douleur profonde, et je me contenterai de pouvoir lui être utile et bon à quelque chose.

Je rouvre ma lettre pour te donner un baiser... Ah ! Joséphine I... Joséphine 1...

BONAPARTE.


LETTRES DU GÊNÊIUL EN CHEF DE L'AHMÉB D'ITALIE 43

LETTRE XVIII A Joséphine, à Bologne.

Le 28 pluviôse an V (16 février 1797).

Tu es triste, tu es malade, tu ne m'écris plus, tu veux t'en aller à Paris. N'aimerais-tu plus ton ami? Cette idée me rend malheureux. Ma douce amie, la vie est pour moi insupportable depuis que je suis instruit de ta tristesse.

Je m'empresse de t'envoyer Moscati, afin qu'il puisse te soigner. Ma santé est un peu faible; mon rhume dure toujours. Je te prie de te ménager, de m'aimer autant que je t'aime, et de m'écrire tous les jours. Mon inquiétude est sans égale.

J'ai dit à Moscati de t'accompagner & Ancône, si tu veux y venir. Je t'écrirai là pour te faire savoir où je suis.

Peut-être ferai-je la paix avec le Pape et seraije bientôt près de toi ; c'est la voeu le plus ardent de mon âme.

Je te donne cent baisers. Crois que rien n'égale mon amour, si ce n'est mon inquiétude. Écris* moi tous les jours toi-même. Adieu, très chère amie.

BONAPARTE.

3.


M TENDRESSES IMPÊIUÀLES

LETTRE XIX A Joséphine, à Bologne.

Tolentino, t" vcnWse an V (13 tëvrier 1707).

La paix avec Rome vient d'être signée. Bologne, Ferrare, la Romagne sont cédées à la République. Le Pape nous donne 30 millions dans peu de temps et des objets d'art.

Je pars demain matin pour Ancône, et, de là, pour Rimini, Ravenue et Bologne. Si ta santé te le permet, viens à Rimini ou Ravennej mais ménage-toi, je t'en conjure.

Pas un mot de ta main, bon Dieul qu'ai-je donc fait? Ne penser qu'à toi, n'aimer que Joséphine, ne vivre que pour ma femme, ne jouir que du bonheur de mon amie, cela doit-il me mériter de sa part un traitement si rigoureux? Mon amie, je t'en conjure, pense souvent à moi et écris-moi tous les jours. Tu es malade ou tu ne m'aimes pasl Crois-tu donc que mon coeur soit de marbre? Et mes peines t'intéressent-elles si peu? Tu me connaîtrais bien mal! Je ne le puis croire. Toi, à qui la nature a donné l'esprit, la douceur et la beauté, toi qui seule pouvais régner dans mon coeur, toi qui sais trop, sans doute, l'empire absolu que tu as sur moi 1

Écris-moi, pense à moi et aime-moi.

Pour la vie tout à toi,

BONAPARTE.


LETTRES DE BONAPARTE

PREMIER CONSUL

LETTRE XX A Joséphlno, à Paris.

I.c 20 flonhl an VIII (10 mai 1800)}

Je pars dans l'instant pour aller coucher à Saint-Maurice. Je n'ai point reçu de lettres de toi, cela n'est pas bien; je t'ai écrit tous les courriers.

Eugène doit arriver après-demain. Je suis un peu enrhumé, mais cela ne sera rien.

Mille choses tendres fi toi, ma bonne petite Joséphine, et à tout ce qui t'appartient.

BONAPARTE.

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46 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE XXI A Joséphine, à Plombières.

Taris, le «7 an X (1801).

Il fait si mauvais temps ici que je suis resté à Paris. Malmaison, sans toi, est trop triste. La fête a été belle, elle m'a un peu fatigué. Le vésicatoire que l'on m'a mis au bras me fait toujours souffrir beaucoup.

J'ai reçu pour toi, de Londres, des plantes que j'ai envoyées à ton jardinier. S'il fait aussi mauvais à Plombières qu'ici, tu souffriras beaucoup des eaux.

Mille choses aimables à maman et à Ilortense.

BONAPARTE.


LETTRES DE BONAPARTE, PREMIER CONSUL . 47

LETTRE XXII A Joséphine, à Plombières.

Malmaison, 30 prairial an XI (19 juin 1803).

Je n'ai pas encore reçu do tes nouvelles ; je pense cependant que tu as déjà dû commencer à prendre les eaux. Nous sommes ici un peu tristes, quoique l'aimable fille fasse les honneurs do la maison à merveille. Je me sens depuis deux jours légèrement tourmenté de ma douleur. Le gros Eugène est arrivé hier au soir, il se porte à merveille.

Je t'aime comme le premier jour, parce que tu es bonne et aimable par-dessus tout.

Hortense m'a dit qu'elle t'écrivait souvent.

Mille choses aimables, et un baiser d'amour. Tout à toi..

BONAPARTE.


48 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE XXIII A Joséphine, à Plombières.

Malmaison, 4 messidor an XI (Î3 juin 1803).

J'ai reçu ta lettre, ma bonne petite Joséphine. Je vois avec peine que tu as souffert de la route ; mais quelques jours de repos te feront du bien. Je suis assez bien portant. J'ai été hier à la chasse à Marly et je m'y suis blessé très légèrement à un doigt en tirant un sanglier.

Hortense se porte assez bien. Ton gros fils a été un peu malade, mais il va mieux. Je crois que ce soir ces dames jouent le Barbier de Sêville. Le temps est très beau. Je te prie de croire que rien n'est plus vrai que le3 sentiments que j'ai pour ma petite Joséphine.

Tout à toi.

BONAPARTE.


LETTRES DS BONAPARTE, PREMIER CONSUL 49

LETTRE XXIV A Joséphine, à Plombières.

Malmaison, le 3 messidor an XI (27 juin 1803).

Ta lettre, bonne petite femme, m'a appris que tu étais incommodée. Corvisart m'a dit que c'était un bon signe, que les bains te feraient l'effet désiré et qu'ils te mettraient dans un bon état. Cependant, savoir que tu es souffrante est une peine sensible pour mon coeur.

J'ai été voir hier la manufacture de Sèvres et Saint-Cloud.

Mille choses aimables pour tous.

Pour la vie.

BONAPAHTE.


50 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE XXV A Joséphine, à Plombières.

Malmaisoo, 13 messidor m XI (t" juillet 1803).

J'ai reçu ta lettre du 10 messidor. Tu no me parles pas de ta santé ni de l'effet des bains. Je vois que tu comptes être de retour dans huit jours ; cela fait grand plaisir à ton ami qui s'ennuie d'être seul!...

Tu dois avoir vu le général Ney qui part pour Plombières : il se mariera à son retour.

Hortense a joué hier Rosine dans le Barbier de Séville avec son intelligence ordinaire.

Je te prie de croire que je l'aime et suis fort impatient de te revoir. Tout est triste ici sans toi.

BONAPARTE.


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LETTRES DE NAPOLKON

EMPEnKUR

LETTRE XXVI A l'Impératrice, i Alx-la-Chspolle.

Boulogne, le 15 thermidor an XII (3 août 1804).

Mon amie, j'espère apprendre bientôt que les eaux t'ont fait beaucoup de bien. Jo suis peiné de toujes les contrariétés que tu as éprouvées. Je désire que tu m'écrives souvent. Ma santé est très bonne, quoique un peu fatiguée. Je serai sous peu de jours à Dunkerque, d'où je t'écrirai.

Eugène est parti pour Blois.

Je te couvre de baisers.

NAPOLÉON.


62 TENPHESSES IMI'ËRMLES

LETTRE XXVII A l'Impératrice, à Atx-la-OhapoHe.

Calais, 18 thermidor an XII (0 août 1804).

Mon amie, je suis à Calais depuis minuit ; je pense en partir ce soir pour Dunkerque. Je suis content de co quo je vois et assez bien de santé. Je désire quo les eaux te fassent autant de bien que m'en font le mouvement, la vue dos camps et la mer.

Eugène est parti pour Blois. Hortense se porte bien. Louis est à Plombières.

Je désire beaucoup to voir. Tu es toujours né« cessaire à mon bonheur. Mille choses aimables chez toi.

NAPOLÉON.

Il


LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEtlEUn 53

LETTRE XXVIII A Joséphine, à Strasbourg.

Louisbourg, 13 vendémiaire aa XIV (S octolre IKOô).

Je pars à l'instant pour continuer ma marcha. Tu seras, mon amie, cinq ou six jours sans avoir de mes nouvelles; ne t'en inquiète pas, cela tient aux opérations qui vont avoir lieu. Tout va bien, et comme je le pouvais espérer.

J'ai assisté ici à uno noce du fils do l'électeur avec une nièce du roi de Prusse. Jo désire donner une corbeille de trente-six mille à quarante mille francs à la jeune princesse. Fais-la fairo et envoie-la par un de mes chambellans à la nouvelle mariée, lorsque ces chambellans viendront me rejoindre. Il faut que ce soit fait surle-champ.

Adieu, mon amie, je t'aimo et t'embrasse.

NAPOLÉON.


51 TENDtlESSKS IMPÉnULES

LETTRE XXIX A l'Impératrice, à Strasbourg.

Augsbourg, le 1" brumaire an XIV (23 octobre 1805).

Les deux dernières nuits m'ont bien reposé, et je vais partir demain pour Munich. Je mande M. Talleyrand et M. Maret près de moi ; je les verrai peu et je vais me rendre sur l'Inn pour attaquer l'Autriche au sein de ses États héréditaires. J'aurais bien désiré te voir, mais ne compte pas que je t'appelle, à moins qu'il n'y ait un armistice ou des quartiers d'hiver.

Adieu, mon amie, mille baisers. Mes compliments à ces dames.

NAPOLÉON.


LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 55

LETTRE XXX A l'Impératrice, à Strasbourg.

Munich, le dimanche 5 brumaire in XIV (27 octobre ISOÔ).

J'ai reçu par Lemarois ta lettre. J'ai vu avec peine quo tu t'étais trop inquiétée. L'on m'a donné des détails qui m'ont prouvé toute la tendresso que tu me portes; mais il faut plus de force et do confiance. J'avais d'ailleurs prévenu que je serais six jours sans ('écrire.

J'attends demain l'électeur. A midi je pars pour confirmer mon mouvement sur l'Inn. Ma santé est assez bonne. 11 ne faut pas penser à passer le Rhin avant quinze ou vingt jours. Il faut être gaie, t'amuser, et espérer qu'avant la fin du mois nous nous verrons.

Je m'avance contre l'armée russe. Dans quelques jours j'aurai passé l'Inn.

Adieu, ma bonne amie, mille choses aimables â Hortense, à Eugène et aux deux Napoléon.

Garde la corbeille quelque temps encore.

J'ai donné hier aux dames de celto cour un concert. Le maitre de chapelle est un homme de mérite.

J'ai chassé à une faisanderie de l'électeur : tu vois que je ne suis pas si fatigué.

M. de Talleyrand est arrivé.

NAPOLÉON.


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66 TKNDHESSE8 ISIPÉIVIAIES

LETIRE XXXI A l'Impératrice, à Strasbourg.

Hajg, le il, A 10 heures du soir, brumaire in XIV (3 novembre 1805).

Je suis en grande marche ; le temps est très froid, la terre couverte d'un pied de neigo. Cela est un peu rude. Il ne manque heureusement pas de bois ; nous sommes ici toujours dans les forêts. Je ino porte assez bien. Mc3 affaires vont d'une manière satisfaisante; mes ennemis doivent avoir plus de soucis que moi.

Je désire avoir de tes nouvelles et apprendre que tu es sans inquiétude.

Adieu, mon amie, je vais me coucher.

NAPOLÉON.

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LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 57

LETTRE XXXII A l'Impératrice, à Strasbourg.

Mardi, 14 brumaire an XIV (S novembre 1605).

Je suis a Lintz. Le temps est beau. Nous sommes n vingt-huit lieues do Vienne. Les Russes no tiennent pas ; ils sont en grande retraite. La maison d'Autriche est fort embarrassée ; à Vienne, on évacue tous les bagages de la cour. 11 est probable quo d'ici à cinq ou six jours il y aura du nouveau, je désire bien te revoir. Ma santé est bonne.

Je t'embrasse.

NAPOLÉON.


58 TENDRESSES IMPERIALES

LETTRE XXXIII A l'Impératrice, à Strasbourg.

Le 84 Irumaire, à 9 heures du soir, »n XIV (15 novembre 1805).

Je suis à Vienne depuis deux jours, ma bonne amie, un peu fatigué. Je n'ai pas encore vu la ville de jour; je l'ai parcourue la nuit. Demain je reçois les notables et les corps. Presque toutes mes troupes sont au delà du Danube, à la poursuite des Russes.

Adieu, ma Joséphine ; du moment que cela sera possible, je te ferai venir. Mille choses aimables pour toi.

NArOLÊON.


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LETTRES PE NAPOLÉON, EMPEREUR 69

LETTRE XXXIV A l'Impératrice, à Strasbourg.

Vienne, 85 brumaire an XIV (18 novembre 1805).

J'écris à M. d'Harvillo pour que tu partes et que tu te rendes à Bade, de là à Stuttgard et de là à Munich. Tu donneras, à Stuttgard, la corbeille à la princesse Paul. Il suffit qu'il y ait pour quinze mille à vingt mille francs ; le restant sera pour faire des présents, à Munich, aux filles de î'électrice de Bavière. Tout ce que tu as su pour Mme de Serrent est définitivement arrangé. Porte de quoi faire des présents aux dames et aux officiers qui seront de service près de toi. Sois honnête, mais reçois tous les hommages : l'on te doit tout et tu ne dois rien que par honnêteté. L'électrice de Wurtemberg est fille du roi d'Angleterre, c'est une bonne femme, tu dois bien la traiter, mais cependant sans alïectation.

Je serai bien aise de te voir du moment que mes affaires me le permettront. Je pars pour mon avant-garde. Il fait un temps affreux, il neige beaucoup; du reste, toutes mes affaires vont bien.

Adieu, ma bonne amie.

NAPOLÉON.

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60 TENDISSES IMPÉRIALES

LETTRE XXXV A l'Impératrice, à Munich.

Austerlit», 14 frimaire »n XIV (4 décembre 1605).

J'ai conclu une trêve. Les Russes s'en vont. La bataille d'Austerlitz est la plus belle de toutes celles que j'ai données : quarante-cinq drapeaux, plus de cent cinquante pièces de canon, les étendards de la garde de Russie, vingt généraux, trente mille prisonniers, plus de vingt mille tués ; spectacle horrible I

L'empereur Alexandre est au désespoir et s'en va en Russie. J'ai vu hier à mon bivouac l'empereur d'Allemagne ; nous causâmes deux heures ; nous sommes convenus de faire vite la paix.

J,e temps n'est pas encore très mauvais. Voilà enfin le repos rendu au continent, il faut espérer qu'il va l'être au monde : les Anglais ne sauraient nous faire front.

Je verrai avec bien du plaisir le moment qui me rapprochera de toi.

Il court un petit mal d'yeux qui dure deux jours, je n'en ai pas encore été atteint.

Adieu, ma bonne amie, je me porte assez bien et suis fort désireux de t'embrasser.

NAPOLÉON.

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LETTRES DB NAPOLÉON, EMPEREUR Cl

LETTRE XXXVI A l'Impératrice, k Munich.

Schonbrunn, le Î9 frimaire an XIV (50 décembre 1805).

Je reçois la lettre du 25. J'apprends avec peine que tu es soutirante ; ce n'est pas là une bonne disposition pour faire cent lieues dans celte saison. Je ne sais ce que je ferai : je dépends des événements ; je n'ai pas de volonté ; j'attends tout do leur issue. Reste à Munich, amuse-toi; ce n'est pas difficile, lorsqu'on a tant de personnes aimables et dans un si beau pays. Je suis, moi, assez occupé. Dans quolques jours je serai décidé.

Adieu, mon amie ; mille choses aimantes et tendres.

NAPOLÉON.


Ci TENDRESSES IMCEMALES

LETTRE XXXVII A l'Impératrice, à Mayenco.

Cérs, le 13, i 8 heures du matin, 1806.

Je suis aujourd'hui à Géra, ma bonne amie; mes affaires vont fort bien et tout comme je pouvais l'espérer. Avec l'aide de Dieu, en peu de jours cela aura pris un caractère bien terrible, je crois, pour le pauvre roi de Prusse, que je plains personnellement, parce qu'il est bon. La reine est à Erfurt avec le roi. Si elle veut voir une bataille, elle aura ce cruel plaisir. Je me porte à merveille; j'ai déjà engraissé depuis mon départ ; cependant je fais, de ma personne, vingt et vingt-cinq lieues par jour, a cheval, en voiture, de toutes les manières. Je me couche à huit heures et suis levé à minuit; je songe quelquefois que tu n'es pas encore couchée.

Tout à toi, NAPOLÉON.


LETTRES DE lUrOLÉON, EMPEllEUn C3

LETTRE XXXVIII A l'Impératrice, à Mayence.

1" novembre, 8 heures du matin, 1800.

Talloyrand arrive et mo dit, mon amie, que tu ne fais que pleurer. Que veux-tu donc ? Tu as ta fille, tes petits-enfants, et de bonnes nouvelles; voilà bien des moyens d'être contente et heureuse.

Le temps est ici superbe; il n'a pas encore tombé de toute la campagne uno seule goutte d'eau. Je me porte fort bien, et tout va au mieux.

Adieu, mon amie; j'ai reçu une lettre de M. Napoléon ; je ne crois pas qu'elle soit de lui, mais d'Horlense.

Mille choses à tout le monde.

NAPOLÉON.


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<54 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE XXXIX A l'Impératrice, à Mayence.

Le 0 novembre, à 9 heures du soir, 1806.

J'ai reçu ta lettre où tu me parais fâchée du mal que je dis des femmes ; il est vrai que je hais les femmes intrigantes au delà de tout. Je suis accoutumé à des femmes bonnes, douces et conciliantes ; ce sont celles que j'aime. Si elles m'ont gâté, ce n'est pas ma faute, mais la tienne. Au reste, tu verras que j'ai été fort bon pour une qui s'est montrée sensible et bonne, Mrae d'Hatzfeld. Lorsque je lui montrai la lettre de son mari, elle me dit en sanglotant, avec une profonde sensibilité, et naïvement : Ah t c'est bien là son teri' titre/ Lorsqu'elle lisait, son accent allait à l'unie; elle me fit peine. Je lui dis : Eh bien I madame, jetez cette lettre au feu, je ne serai ptus assez puissant pour faire punir votre mari. Elle brûla la lettre et me parut bien heureuse. Son mari est depuis fort tranquille : deux heures plus tard, il était perdu. Tu vois donc que j'aime les femmes bonnes, naïves et douces ; mais c'est que celleslà seules te ressemblent.

Adieu, mon amie, je me porte bien.

NAPOLÉON.


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LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR G5

LETTRE XL A l'Impératrice, A Mayence.

Le 16 novembre 160C.

Je reçois ta lettre du 11 novembre. Je vois avec satisfaction que mes sentiments te font plaisir. Tu as tort de penser qu'ils puissent être flattés ; je t'ai parlé de toi comme je le vois. Je suis affligé de penser que tu t'ennuies à Mayence. Si le voyage n'était pas si long, lu pourrais venir jusqu'ici, car ii n'y a plus d'ennemis, ou il est au delà de la Vislule, c'est-à-dire à plus de cent vingt lieues d'ici. J'attendrai ce que tu en penses. Je serai bien aise aussi do voir M. Napoléon.

Adieu, ma bonne amie.

Tout à toi,

NAPOLÉON.

J'ai ici encore trop d'affaires pour que je puisse retourner à Paris.


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66 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE XLI A l'Impératrice, à May en ce.

Le 32 novembre, 1 10 heures du soir, 1806.

Je reçois ta lettre. Je suis fâché de te voir triste ; tu n'as cependant que des raisons d'être gaie. Tu as tort de montrer tant de bonté à des gens qui s'en montrent indignes. Mm<> L... est Une sotte, si bête que tu devrais la connaître et ne lui prêter aucune attention. Sois contente, heureuse de mon amitié, de tout ce que tu m'inspires. Je me déciderai dans quelques jours à t'appeler ici ou à t'envoyer â Paris.

Adieu, mon amie ; tu peux actuellement aller, si tu veux, à. Darmstadt, & Francfort ; cela te dissipera.

Mille choses à Hortense.

NAPOLÉON.


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LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 67

LETTRE XLII A l'Impératrice, à Mayence.

Poscn, le 2 décembre 1806.

C'est aujourd'hui l'anniversaire d'Austerlitz. J'ai été à un bal de la ville. Il pleut. Je me porte bien. Je t'aime et te désire. Mes troupes sont à Varsovie. Il n'a pas encore fait froid. Toutes ces Polonaises sont Françaises; mais il n'y a qu'une femme pour moi. La connailrais-tu? Je te ferais bien son portrait, mais il faudrait trop le flatter pour que tu te reconnusses ; cependant, à dire vrai, mon coeur n'auruit que de bonnes choses à en dire. Ces nuils-ci sont longues, tout seul.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


68 TENDRESSKS IMPÉRIALES

LETTRE XLIII A l'Impératrice, à Mayence.

Le 3 décembre, i midi, 1800.

Je reçois ta lettre du 20 novembre, j'y vois deux choses : tu me dis que je ne lis pas tes lettres; cela est mal pensé. Je te sais mauvais gré d'une si mauvaise opinion. Tu me dis que ce pourrait être par quelque rêve de la nuit et tu ajoutes que lu n'es pas jalouse. Je me suis aperçu depuis longtemps que les gens colères soutiennent toujours qu'ils ne sont pas colères, que ceux qui ont peur disent souvent qu'ils n'ont pas peur ; tu es donc convaincue de jalousie : j'en suis enchante I Du reste, tu as tort ; je ne pense à rien moins et dans les déserts de la Pologue l'on songe peu aux belles... J'ai eu hier un bal de la noblesse de la province d'assez belles femmes, assez riches, assez mal mises, quoique à la mode de Paris.

Adieu, mon amie ; je me porte bien.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


LETTRES DE NAPOLÉON, KMPEHEUR 69

LETTRE XLIV A l'Impératrice, à Mayenco.

t'oscn, le 3 décembre! & 6 heures du soir.

Je reçois ta lettre du 27 novembre, où je voi3 que ta petite tête s'est montée. Je me suis souvenu de ce vers :

Désir do femme est un feu qui dévore.

Il faut cependant te calmer. Je t'ai écrit que j'étais en Pologne, que lorsque les quartiers d'hiver seraient assis, tu pourrais venir ; it faut donc attendro quelques jours. Plus on est grand et moins on doit avoir do volonté ; l'on dépend des événements et des circonstances. Tu peux aller à Francfort et à Darrnstadt. J'espère sous peu de temps t'appeler ; mais il faut que les événements le veuillent. La chaleur de ta lettre me fait voir que vous autres jolies femmes vous ne connaissez pas de barrières; ce que vous voulez doit être; mais moi, je me déclare le plus esclave des hommes : mon maître n'a pas d'entrailles, et ce mattre c'est la nature des choses.

Adieu, mon amie; porte-toi bien. Lapersonno dont j'ai voulu te parler est Mmo L... dont tout


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70 TENDRESSES IMPÉRIALES

le monde dit bien du mal : l'on m'assure qu'elle était plus Prussienne que Française. Je ne le crois pas ; mais je la crois une sotte qui ne dit que des bêtises.

NAPOLÉON.


LETTRES DK NAPOLÉON, EMPEREUR 71

LETTRE XLV A l'Impératrice, k Mayence.

Le 10 décembre, 1 5 heures du soir, 1806.

Un officier m'apporte un tapis de ta part; il est un peu court et étroit; je ne t'en remercie pas moins. Je me porte assez bien. Le temps est fort variable. Mes affaires vont assez bien. Je l'aime et te désire beaucoup.

Adieu, mon amie; je t'écrirai de venir avec au moins autant de plaisir que tu voudras.

Tout à toi,

NAPOLÉON.

Un baiser à Hortense, à Stéphanie et à Napoléon.


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72 TENDRESSES IMPÉMALES

LETTRE XLVI A l'Impératrice, à Mayence.

Pultusk, le 31 décembre 1806.

J'ai bien ri en recevant tes dernières lettres. Tu te fais des belles de la Pologne une idée qu'elles ne méritent pas. J'ai eu deux ou trois jours do plaisir d'entendre Paër et deux chanteuses qui m'ont fait de très bonne musique. J'ai reçu la lettre dans une mauvaise grange, ayant do la boue, du vent et de la paille pour tout lit. Je serai demain à Varsovie. Je crois que tout est fini pour cette année. L'armée va entrer en quartiers d'hiver. Je hausse les épaules de la bêtise de Mm« de L... ; tu devrais cependant te fâcher et lui conseiller de n'être pas si sotte. Cela perco dans le public et indigne bien des gens.

Quant à moi, je méprise l'ingratitude comme le plus vilain défaut du coeur. Je sais qu'au lieu do te consoler ils t'ont fait de la peine.

Adieu, mon amie; je me porte bien. Je no pense pas quo lu doives aller à Gasscl ; cela n'est pas convenable. Tu peux aller à Darmstadt.

NAPOLÉON.


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LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 73

LETTRE XLVII A l'Impératrice, à Mayence.

Varsovie, le 3 janvier 1807.

J'ai reçu ta lettre, mon amie. Ta douleur me touche; mais il faut bien se soumettre aux événements. Il y a trop de pays à travei-ser depuis Mayence jusqu'à Varsovie; il faut donc que les événements me permettent de me rendre à Berlin pour que je t'écrive d'y venir. Cependant l'ennemi battu s'éloigne, mais j'ai bien des choses à régler ici. Je serais assez d'opinion que tu retournasses à Paris, où tu es nécessaire. Renvoie ces dames qui ont leurs affaires; tu gagneras d'être débarrassée do gens qui ont dû bien te fatiguer.

Je me porte bien; il fait mauvais. Je t'aime de coeur.

NAPOLÉON.


74 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE XLVIII A l'Impératrice, à Mayence.

Varsovie, 7 janvier 1807.

Mon amie, je suis touché de tout ce que tu me dis; mais la saison froide, les chemins très mauvais, peu sûrs, je ne puis donc consentir à t'oxposer à tant de fatigues et de dangers. Rentre à Paris pour y passer l'hiver. Va aux Tuileries, reçois et fais la même vie que tu as l'habitude de mener quand j'y suis ; c'est là ma volonté. Peutêtre ne tarderai-je pas à t'y rejoindre, mais il est indispensable que tu renonces à faire trois cents lieues dans cette saison, à travers des pays ennemis, et sur les derrières de l'armée. Crois qu'il m'en coûte plus qu'à toi de retarder de quelques semaines le bonheur de te voir, mais ainsi l'ordonnent les événements et le bien des affaires.

Adieu, ma bonne amie; sois gaie et montre du caractère.

NAPOLÉON.


LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 75

LETTRE XLIX A l'Impératrice, à Mayence.

Varsovie, le 8 janvier 1807.

Ma bonne amie, je reçois ta lettre du 27 avec celles de M. Napoléon et d'Hortense qui y étaient jointes. Je t'avais priée de rentrer a Paris. La saison trop mauvaise, les chemins peu sûrs et détestables, les espaces trop considérables pour que je permette que tu viennes jusqu'ici où mes affaires me retiennent. Il te faudrait au moins un mois pour arriver. Tu y arriveras malade ; il faudrait peut-ôlre repartir alors ; ce serait donc folie. Ton séjour à Mayence est trop triste; Paris te réclame ; vas-y, c'est mon désir. Je suis plus contrarié que toi ; j'eusse aimé à partager les longues nuits de cette saison avec toi, mais il faut obéir aux circonstances.

Adieu, mon amie.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


76 TENDRESSES 1MPÉMALÏ3

LETTRE L A l'Impératrice, à Mayenco.

Varsovie, le 11 janvier 1807.

J'ai reçu ta lettre du 27, où je vois que tu étais un peu inquiète sur les événements militaires. Tout est fini, comme je te l'ai mandé à ma satisfaction, mes affaires vont bien. L'éloignement est trop considérable pour que je permette que, dans cette saison, tu viennes si loin. Je me porte fort bien, un peu ennuyé quelquefois de la longueur des nuits.

Je vois ici, jusqu'à cette heure, assez peu de monde.

Adieu, mon amie ; je désire que tu sois gaie et que tu donnes un peu de vie à la capitale. Je voudrais fort y être.

Tout à toi,

NAPOLÉON.

J'espère que la reine est allée à La Haye avec M. Napoléon.


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LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 77

LETTRE LI A l'Impératrice, à Mayence.

Le 16 janvier 1807.

Ma bonne amie, j'ai reçu ta lettre du 5 janvier; tout ce que tu me dis de ta douleur me peine. Pourquoi des larmes, du chagrin? N'as-tif donc plus de courage? Je te verrai bientôt; ne doute jamais de mes sentiments et, si tu veux m'ètre plus chère encore, montre du caractère et de la force d'âme. Je suis •humilie de penser que ma femme puisse se méfier de mes destinées.

Adieu, mon amie; je t'aime, je désire te voir et veux te savoir contente et heureuse.

NAPOLÉON.


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78 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LU A l'Impératrice, à Mayence.

Varsovie, le 18 janvier 1807.

Je crains que tu n'aies bien du chagrin de notre séparation qui doit encore se prolonger de quelques semaines et de ton retour à Paris. J'exige que tu aies plus de force. L'on me dit que tu pleures toujours : fil que cela est laid!»Ta lettre du 7 janvier me fait de la peine. Sois digne de moi et prends plus de caractère. Fais à Paris la représentation convenable et surtout sois contente.

Je me porte très bien et je l'aime beaucoup; mais, si tu pleures toujours, je te croirai sans courage et sans caractère; je n'aime pas les lâches, une impératrice doit avoir du coeur.

NArOLÊON.

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LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 79

LETTRE LUI A l'Impératrice, à Mayenco.

Varsovie, le 19 janvier 1807.

Mon amie, je reçois la lettre ; j'ai ri de ta peur du feu. Je suis désespéré du ton de tes lettres et de ce qui me revient. Je te défends de pleurer, d'être chagrine et inquiète ; je veux que lu sois gaie, aimable et heureuse.

NAPOLÉON,


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80 TENDRESSES IXPÉMALES

LETTRE LIV A l'Impératrice, à Mayenco.

Le S3 janvier 1807.

Jo reçois ta lettre du 15 janvier. Il est impossible que je permette à des femmes un voyage comme celui-ci : mauvais chemins, chemins peu sûrs et fangeux. Retourne à Paris, sois-y gaie, contente; peut-être y serai-je aussi bientôt. J'ai ri de ce que tu me dis que tu as pris un mari pour être avec lui; je pensais, dans mon ignorance, que la femme était faite pour le mari, le mari pour la patrie, la famille et la gloire; pardon de mon ignorance, l'on apprend toujours avec nos belles dames.

Adieu, mon amie; crois qu'il m'en coûte de ne pas te faire venir; dis-toi : c'est une preuve combien je lui suis précieuse.

NAPOLÉON.


LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 81

LETTRE LV A l'Impératrice, à Paris.

Le 20, 1 midi, 1807.

Ma bonne amie, j'ai reçu ta lettre ; je vois avec peine comme tu t'affliges. Le pont de Maycnce ne rapproche ni n'éloigne les distances qui nous séparent. Rentre donc à Paris. Jo semis fâché et inquiet de te savoir si malheureuse et si isolée à Mayence. Tu comprends que je ne dois, que je ne puis consulter que mon coeur, jo serais avec toi ou toi avec moi ; car lu serais bien injuste si tu doutais do mon amour et de tous mes sentiments.

NAPOLÉON.


82 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LVI A l'Impératrice, à Paris.

Wittcmberg, le l" février, à midi, 1807.

Ta lettre du 11, de Mayence, m'a fait rire. Je suis aujourd'hui à quarante lieues de Varsovie; le temps est froid mais beau.

Adieu, mon amie; sois heureuse, aie du caractère.

NAPOLÉON.


LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUA 83

LETTRE LVII A l'Impératrice, à Paris.

Mon amie, ta lettre du 20 janvier m'a fait de la peine; elle est trop triste. Voilà le mal de ne pas être un peu dévote I Tu me dis que ton bonheur fait ta gloire, cela n'est pas généreux ; il faut dire : le bonheur des autres fait ma gloire, cela n'est pas conjugal; il faut dire : le bonheur de mon mari fait ma gloire, cela n'est pas maternel ; il faudrait dire : le bonheur de mes enfants fait ma gloire; or, comme les peuples, ton mari, tes enfants ne peuvent être heureux qu'avec un peu de gloire, il ne faut pas tant en faire fi 1 Joséphine, votre coeur est excellent et votre raison faible ; vous sentez à merveille, mais vous raisonnez moins bien.

Voilà assez de querelle ; je veux que tu sois gaie, contente de ton sort, et que tu obéisses, non en grondant et en pleurant, mais de gaité de coeur et avec un peu de bonheur.

Adieu, mon amie ; je pars cette nuit pour parcourir mes avant-postes.

NAPOLÉON.


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8i TENDRBSSES IMPÉRIALES

LETTRE LVIII A l'Impératrice, à Paris.

Ejlau, 3 heures du malin, 9 février 1807.

Mon amie, il y a eu hier une grande bataille ; la victoire m'est restée, mais j'ai perdu bien du monde; la perte de l'ennemi, qui est plus considérable encore, ne me console pas. Enfin, je t'écri3 ces deux lignes moi-même, quoique je sois bien fatigué, pour te dire que je suis bien portant et que je t'aime.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


LETTRES D8 NAPOLÉON, EMPEREUR 85

LETTRE LIX A l'Impératrice, & Paris.

EJIJU, le 9 limer, k 6 heures du soir, 1807.

Je t'écris un mot, mon omio, afin que tu ne sois pas inquiète. L'ennemi a perdu la bataille, quarante pièces de canon, dix drapeaux, douze mille prisonniers ; il a horriblement souffert. J'ai perdu du monde : seize mille tués, trois mille ou quatre mille blessés.

Ton cousin Tascher se porte bien; je l'ai appelé près de moi avec le titre d'officier d'ordonnance.

Corbineau a été tué d'un obu9 ; je m'étais singulièrement attaché a cet officier qui avait beaucoup de mérite; cela me fait de la peine. Ma garde à cheval s'est couverte de gloire. D'Allemagne est blessé dangereusement.

Adieu, mon amie.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


86 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LX A l'Impératrice, à Paris.

Ejlau, le il février, à 3heures du matin, 1807.

Je t'écris un mot, mon amie; tu dois avoir été bien inquiète. J'ai battu l'ennemi dans une mémorable journée, mais qui m'a coûté bien des braves. Le mauvais temps qu'il fait me force à prendre mes cantonnements.

Ne te désole pas, je te prie ; tout cela finira bientôt et le bonheur de te voir me fera promptement oublier mes fatigues. Au reste, je n'ai jamais été si bien portant.

Le petit Tascher, du 4« de ligne, s'est bien comporté; il a eu une rude épreuve. Je l'ai appelé près de moi, je l'ai fait officier d'ordonnance; ainsi, voilà ses peines finies. Ce jeune homme m'intéresse.

Adieu, ma bonne amie; mille baisers.

NAPOLÉON.


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LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 87

LETTRE LXI A l'Impératrice, & Paris.

Eylau, le 14 février 1807.

Mon amie, je suis toujours à Eylau. Ce pays est couvert de morts et de blessés. Ce n'est pas la belle partie de la guerre ; l'on souffre et l'âme est oppressée de voir tant de victimes. Je me porte bien. J'ai fait ce que je voulais et j'ai repoussé l'ennemi en faisant échouer ses projets.

Tu dois être inquiète, et cette pensée m'afflige. Toutefois, tranquillise-toi, mon amie, et sois gaie.

Tout à toi,

NAPOLÉON.

Dis à Caroline et à Pauline que le grand-duc et le prince se portent très bien.

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88 TENDRESSES ISIPÉBIALES

LETTRE LXII A l'Impératrice, à Paris.

Ltebsladt, le 21, 1 2 heures du matin, 1807.

Je reçois ta lettre du 4 février; j'y vois avec plaisir que ta santé est bonne. Paris achèvera de te rendre la gaieté et le repos, le retour à tes habitudes, la santé.

Je me porte à merveille. Ce temps et le pays sont mauvais. Mes affaires vont assez bien ; il dégèle et gèle dans vingt-quatre heures : l'on ne peut voir un hiver aussi bizarre.

Adieu, mon amie; je t'aime, je pense à toi et désire te savoir contente, gaie et heureuse.

Tout à toi, NAPOLÉON.


LlTTfUES DR NAPOLÉON, XMPEREUR 89

LETTRE LXIII A l'Impératrice, à Paris.

Oïtcrotte, 1c 2 mars 1807.

Mon amie, il y a deux ou trois jours quo je ne t'ai écrit; je me le reproche; je connais tes inquiétudes. Je mo porto fort bien; mes affaires sont bonnes. Je suis dans un mauvais village, où je passerai encore bien du temps : cela ne vaut pas la grande ville. Je te le répète, je ne me suis jamais si bien porté; tu me trouveras fort engraissé.

Il fait ici un temps de printemps; la neige fond, les rivières dégèlent, cela me fait plaisir.

J'ai ordonné ce que tu désires pour Malmaison; sois gaie ctheureuso, c'est ma volonté,

Adieu, mon amie ; je t'embrasse de coeur.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


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90 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LXIV A l'Impératrice, à Paris.

Le 27, à 7 heures du soir, 1807.

Mon amie, ta lettre me fait de la peine. Tu ne dois pas mourir; tu te portes bien, et tu ne peux avoir aucun sujet raisonnable de chagrin.

Je pense que tu dois aller au mois de mai à Saint-Cloud; mais il faut rester tout le mois d'avril à Paris.

Ma santé est bonne. Mes affaires vont bien.

Tu ne dois pas penser à voyager cet été; tout cela n'est pas possible ; tu ne dois pas courir les auberges et les camps. Je désire, autant que toi, te voir, et même vivre tranquille.

Je sais faire autre chose que la guerre, mais le devoir passe avant tout. Toute ma vie, j'ai tout sacrifié, tranquillité, intérêt, bonheur, à ma destinée.

Adieu, mon amie. Vois peu cette Mm« de P..., c'est une femme de mauvaise société; cela est trop commun et trop vil.

NAPOLÉON.

J'ai eu lieu de'me plaindre de M. T..., je l'ai envoyé dans sa terre, en Bourgogne; je ne veux plus en entendre parler.


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LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 01

LETTRE LXV A l'Impératrice, à Paris.

Le 10 mai 1807.

Je reçois ta lettre. Je ne sais ce que lu me dis des dames en correspondance avec moi. Je n'aime que ma petite Joséphine, bonne, boudeuse et capricieuse, qui sait faire une querelle avec grâce, comme tout ce qu'elle fait; car elle est toujours aimable, hors cependant quand elle est jalouse : alors elle devient toute diablesse. Mais revenons à ces dames. Si je devais m'occuper de quelqu'une d'entre elles, je t'assure que je voudrais qu'elles fussent de jolis boutons de rose. Celles dont tu parles sont-elles dans ce cas?

Je désire que tu ne dînes jamais qu'avec des personnes qui ont dîné avec moi; que ta liste soit la même pour tes cercles, que tu n'admettes jamais à Malmaison, dans ton intimité, des ambassadeurs et des étrangers. Si tu faisais différemment, tu me déplairais; enfin ne te laisse pas circonvenir par des personnes que je ne connais pas et qui ne viendraient pas chez toi si j'y étais.

Adieu, mon amie.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


92 TENDRESSES lUPÉMALES

LETTRE LXYI A l'Impératrice, à Saint-Cloud.

Fiicdland, le 15 juin 1807.

Mon amio, je no l'écris qu'un mot, car jo suis bien fatigué ; voilà bien des jours que je bivouaque. Mes enfants ont dignement célébré l'anniversaire de la bataille de Marengo.

La bataille do Friedland sera aussi célèbre et est aussi glorieuse pour mon peuple. Toute l'armée russe est en déroute, quatre-vingts pièces de canon, trente mille hommes pris ou tués ; vingtcinq généraux russes tués, blessés ou pris; la garde russe écrasée : c'est une digne soeur de Marengo, Austcrlitz, Iéna. Le bulletin te dira le reste. Ma perte n'est pas considérable ; j'ai manoeuvré l'ennemi avec succès.

Sois sans inquiétude et contente.

Adieu, mon amie; je monte à cheval.

NAPOLÉON.

L'on peut donner cette nouvelle comme une notice, si elle est arrivée avant le bulletin. On peut aussi tirer le canon, Cambacérès fera la notice.


LSTTRES [>B NAPOLÉON, ISMPEUEUn 03

LETTRE LXVII A l'Impératrice, à Saint-Oloud.

Le 6 juillet 1807.

J'ai reçu ta lettre du 25 juin. J'ai vu avec peine que tu étais égoïste et quo les succès de mes armes seraient pour toi sans attraits.

La belle reine de Prusso doit venir diner avec moi aujourd'hui.

Je me porte bien et désire beaucoup te revoir, quand le destin l'aura marqué. Cependant, il est possiblo quo cela no tarde pas.

Adieu, mon amie; mille choses aimables.

NArOLÉON.

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01 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LXYIII A l'Impératrice, à Saint-Oloud.

Le 7 juillet 1801.

Mon amie, la reine de Prusse a dîné hier avec moi. J'ai eu à me défendre de ce qu'elle voulait m'obliger à faire encore quelques concessions à son mari; mais j'ai été galant, et me suis tenu à ma politique. Elle est fort aimable. J'irai te donner des détails qu'il nie serait impossible de te donner sans être bien long. Quand tu liras cette lettre, la paix avec la Prusse et la Russie sera conclue et Jérôme reconnu roi de Westphalie, avec trois millions de population. Ces nouvelles pour toi seule.

Adieu, mon amie; je t'aime et veux te 6avoir contente et gaie.

NAPOLÉON.


IETT1\ES DE KAPOLÉON, EMPEREUn 05

LETTRE LXIX A l'Impératrice, & Salnt-Oloud.

Le 18, à midi, 1807.

Mon amie, jo suis arrivé hier à cinq heures du soir à Dresde, fort bien portant, quoique je sois resté cent heures en voiture, sans sortir. Je suis ici chez le roi de Saxe, dont je suis fort content. Je suis donc rapproché do toi de plus de moitié du chemin.

Il se peut qu'une de ces belles nuits je tombe à Saint-Cloud comme un jaloux; je t'en préviens.

Adieu, mon amie; j'aurai grand plaisir à te voir.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


00 TSMllRESSES IMPÉMALES

LETTRE LXX A l'Impératrice, à Paris.

Le 9 janvier 1809.'

Moustache m'apporte une lettre de toi du 31 décembre. Je vois, mon amie, que tu es triste et que tu as l'inquiétude très noire. L'Autriche ne me fera pas la guerre. Si elle me la fait, j'ai cent cinquante mille hommes en Allemagne, et autant sur le Rhin, et quatre cent mille Allemands pour lui répondre. La Russie ne se séparera pas de moi. On est fou à Paris; tout marche bien.

Je serai à Paris aussitôt que je le croirai utile. Je te conseille de prendre garde aux revenants; un beau jour, à deux heures du malin...

Mais adieu, mon amie; je me porte bien, et suis tout à toi.

NAPOLÉON.


LETTRES DE NAPOLÉON, EMPEREUR 07

LETTRE LXXI A l'Impératrice, a Plombières.

le 19 juin, i midi, 1809.

Je reçois ta lettre, où tu m'annonces ton départ pour Plombières. Je vois ce voyage avec plaisir, parce que j'espère qu'il te fera du bien.

Eugène est en Hongrie, et se porte bien. Ma santé est fort bonne, et l'armée en bon état.

Je suis bien aise de savoir le grand-duc de Berg avec toi.

Adieu, mon amie; tu connais mes sentiments pour Joséphine; ils.sôn.tinvariables.

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V" ■-. ,. . /NAPOLÉON.


08 TENDRESSES IVIÊnULES

LETTRE LXXII A 1'Impératrioo, à Paris.

Schoenbrunn, le 21 aoûl 1809.

J'ai reçu ta lettre du 11 août, de Plombières; j'y vois que tu seras arrivée le 18 à Paris ou à Malmaison. Tu auras été malade de la chaleur, qui est bien grande ici. Malmaison doit être bien sec et brûlé par ce temps-là.

Ma santé est bonno. Je suis cependant un peu enrhumé de la chaleur.

Adieu, mon amie.

NAPOLÉON.


LETTPE3 DB NArOltON, EMrEI\EVn 09

LETTRE LXXI1I A l'Impératrice, & Malmatson.

Le 31 août 1809.

Je n'ai pas reçu do lettres de toi depuis plusieurs jours; les plaisirs de Malmaison, les belles serres, les beaux jardins, font oublier les absents; c'est la règle, dit-on, chez vous autres. Tout le monde ne parle que de ta bonne santé; tout cela m'est fort sujet à caution.

Je vais demain faire une absence de deux jours en Hongrie avec Eugène. Ma santé est bonne.

Adieu, mon amie.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


100 TENDRISSBS IMPÉRIALES

LETTRE LXXIV A l'Impératrice, & Malmaison,

Kems, te 9 septembre 1809.

Mon amie, je suis ici depuis hier à deux heures du malin; j'y suis pour voir mes troupes. Ma santé n'a jamais été meilleure. Je sais que tu es bien portante.

Je serai à Paris au moment où personne ne m'attendra plus.

Tout va ici fort bien, et à ma satisfaction.

Adieu, mon amie.

NAPOLÉON.


LETTRES PB NAPOLÉON, EMPEttEim 10!

LETTRE LXXV

A l'Impératrice, à Malmaison.

Le 33 septembre 1809.

J'ai reçu ta lettre du 10, je vois que tu te portes bien. La maison de la vieille fille no vaut que cent vingt mille francs; ils n'en trouveront jamais plus. Cependant, je te laisse maitresso de faire ce que tu voudras, puisque cela t'amuse, mais, une fois achetée, ne fais pas démolir pour y faire quelques rochers.

Adieu, mon amie.

NAPOLÉON.


102 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LXXVI A l'Impératrice, à Mal maison.

Le 55 septembre 1S09.

J'ai reçu ta lettre. Ne te fie pas, et je te conseille de te bien garder la nuit; car une des prochaines, tu entendras grand bruit.

Ma santé est bonne; je ne sais ce que l'on débite; je ne me suis jamais mieux porté depuis bien des années : Corvisart ne m'était point utile.

Adieu, mon amie ; tout va ici fort bien.

Tout à toi,

NAPOLÉON.


LETTRES DR NAPOLÉON. EMPEnEUH 103

LETTRE LXXYII A l'Impératrlco, À Malmaison.

Nymphonbourg, pris Munich, le 21 octobre 1805.

Jo suis ici depuis hier bien portant; je ne partirai pas encore demain. Je m'arrêterai un jour à Stuttgard. Tu seras prévenue- vingt-quatre heures d'avance do mon arrivée à Fontainebleau. Je mo fais une- féto de te revoir, et j'attends ce moment avec impatience.

Je t'embrasse.

Tout à loi,

NAPOLÉON.


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LETTRES DE NAPOLÉON A JOSÉPHINE

APRÈS LK DlYOnCE

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LETTRE LXXVIII A rimpératrico, à Malmaison,

8 heures du soir, décembre 1809.

Mon amie, je t'ai trouvée aujourd'hui plus faible que tu ne devais être. Tu as montré du courage, il faut que tu en trouves pour te soutenir; il faut no pas le laisser aller à une funeste mélancolie, il faut te trouver contente, et surtout soigner ta santé, qui m'est si précieuse. Si tu m'es attachée et si tu m'aimes, tu dois te comporter avec force et te juger heureuse. Tu ne peux pas mettre en doute ma constante et tendre amitié, et tu connaîtrais bien mal tous les sentiments que je te porte si tu supposais que je puis ôtro heureux si tu n'es pas heureuse, et content, si tu ne te tranquillises.

Adieu, mon amie, dors bien; songe que je le veux.

NAPOLÉON.


106 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LXXIX A l'Impératrioe, A Malmaison.

1 heures du soir.

Je reçois ta lettre, mon amie. Savary me dit que tu pleures toujours; cela n'est pas bien. J'espère que tu auras pu te promener aujourd'hui. Je t'ai envoyé de ma chasse. Je viendrai te voir lorsque tu me diras que tu es raisonnable et que ton courage prend le dessus.

Demain, toute la journée, j'ai les ministres.

Adieu, mon amie; je suis triste aussi aujourd'hui; j'ai besoin de te savoir satisfaite et d'apprendre que tu prends de l'aplomb.

Dors bien.

NAPOLÉON.


LETTRES DE NAPOLÉON A JOSÉPHINE APRÈS LE DIVORCE 107

LETTRE LXXX A l'Impératrice, à Malmaison.

Jeudi, à midi, 1809.

Je voulais venir te voir aujourd'hui, mon amie; mais je suis très occupé et un peu indisposé. Jo vais cependant aller au conseil. Je te prie de me dire comment tu te portes.

Ce temps est bien humide et pas du tout sain.

NAPOLÉON.


108 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LXXXI A l'Impératrice, à Malmatson.

Vendredi, à 8 hcu«s,i8iO.

Je voulais venir te voir aujourd'hui, mais je ne le puis; ce sera, j'espère, pour demain, Il y a bien longtemps que tu m'as donné de tes nouvelles.

J'ai appris avec plaisir que tu t'étais promenée dans ton jardin pendant ces froids.

Adieu, mon amie; porte-loi bien, et ne doute jamais de mes sentiments.

NAPOLÉON.


LETTnES DE NAPOLÉON A JOSÉPHINE APRÈS LE DIVORCE 109

LETTRE LXXXII A l'Impératrice, à Malmaison.

Dimanche, à 8 heures du soir, 1810.

J'ai été bien content de t'avoir vue hier; je sen9 combien ta société a de charmes pour moi. J'ai travaillé aujourd'hui avec Estève. J'ui accordé cent mille francs pour 1810, pour l'extraordinaire de Malmaison. Tu peux donc faire planter tant que tu voudras; tu distribueras cette somme comme tu l'entendras. J'ai chargé Estève de te remettre deux cent mille francs aussitôt que le contrat de la maison Julien sera fait. J'ai ordonné que l'on paierait ta parure de rubis, laquelle sera évaluée par l'intendance, car je ne veux pas de volerics de bijoutiers. Ainsi, voilà quatre cent mille francs que cela me coûte.

J'ai ordonné que l'on tint le million que la liste civile te doit, pour 1810, à la disposition de ton homme d'affaires, pour payer tes dettes.

Tu dois trouver dans l'armoire de Malmaison cinq cent mille à six cent mille francs; tu peux les prendre pour faire ton argenterie et ton linge.

J'ai ordonné qu'on te fit un très beau service de porcelaine ; l'on prendra tes ordres pour qull soit très beau.

NAPOLÉON.


110 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LXXXIIl A l'Impératrice, à Malmaison.

Mercredi, C heures du soir, 1810.

Mon amie, je ne vois pas d'inconvénient que tu reçoives le roi de Wurtemberg quand tu voudras. Le roi et la reine de Bavière doivent aller te voir après-demain.

Je désire fort aller à Malmaison : mais il faut que tu sois forte et tranquille : le page de ce malin dit qu'il t'a vue pleurer.

Je vais diner tout seul.

Adieu, mon amie; ne doute jamais de mes sentiments pour toi; tu serais injuste et mauvaise.

NAPOLÊOiN.


LETTRES DE NAPOLÉON A JOSÉPHINE APRÈS LE DIVORCE 111

LETTRE LXXXIV A l'Impératrice, i Malmaison.

Samedi, à 1 heure après-midi, 1810.

Mon amie, j'ai vu hier Eugène qui m'a dit que tu recevrais les rois. J'ai été au concert jusqu'à huit heures; je n'ai diné, tout seul, qu'à cette heure-là.

Je désire bien te voir. Si je ne viens pas aujourd'hui, je viendrai après la messe.

Adieu, mon amie ; j'espère te trouver sage et bien portante. Ce temps-là doit bien te peser.

NAPOLÉON.


112 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LXXXV A l'Impératrice, à Malmaison.

Trianon, le 11 Janvier 1810.

Mon amie, d'Audenarde, que je t'ai envoyé ce malin, me dit que tu n'as plus de courage depuis que tu es à Malmaison. Ce lieu est cependant tout plein de nos sentiments, qui ne peuvent et ne doivent jamais changer, du moins de mon côte.

J'ai bien envie de te voir, mais il faut que je sois sûr que tu es forte, et non faible; je le suis aussi un peu, et cela me fait un mal affreux.

Adieu, Joséphine ; bonne nuit. Si tu doutais de moi, tu serais bien ingrate.

NAPOLÉON.


LETTRES DE NAPOLÉON A 70SÊPHINE APRÈS LE DIVORCE 113

LETTRE LXXXVI A l'Impératrice, à M*lmaison.

30 janvier 1810.

Mon amie, je reçois ta lettre. J'espère que la promenade que tu as faite aujourd'hui, pour montrer ta serre, t'aura fait du bien.

Je te saurai avec plaisir à l'Elysée, et fort heureux de te voir plus souvent; car lu sais combien je t'aime.

NAPOLÉON.


114 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LXXXVII A l'Impératrice, à Malmaison.

Mardi, à midi, 1810.

J'apprends que tu t'affliges, cela n'est pas bien. Tu es sans confiance en moi, et tous les bruits que l'on répand te frappent; ce n'est pas me connaître, Joséphine. Je t'en veux, et si je n'apprends que tu es gaie et contente, j'irai te gronder bien fort.

Adieu, mon amie.

NAPOLÉON.


LETTRES DE NAPOLEON A JOSÉPHINE APRÈS LE DIVORCE 115

LETTRE LXXXVIII A l'Impératrice, à Malmaison.

Samedi, à C heures du soir, 1810.

J'ai dit à Eugène que tu aimais plutôt à écouter les bavards d'une grande ville que ce que je te disais; qu'il ne faut pas permettre que l'on te fasse des contes en l'air pour t'affliger.

J'ai fait transporter tes effets à l'Elysée. Tu viendras incessamment à Paris ; mais sois tranquille et contente, et aie confiance entière en moi.

NAPOLÉON.


liO TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE LXXXIX A l'Impératrice, à l'Élysée-Napoléon.

Vendredi, 6 heures du soir, 1810.

Savary me remet, en arrivant, ta lettre; je vois avec peine que tu es triste ; je suis bien aise que tu ne te sois pas aperçue du feu.

J'ai eu beau temps à Rambouillet.

Hortensè m'a dit que tu avais eu le projet de venir diner chez Bessières et de retourner coucher à Paris. Je suis fâché que tu n'aies pas pu exécuter ton projet.

Adieu, mon amie ; sois gaie, songe que c'est le moyen de me plaire.

NAPOLÉON.


LETTRES DK NAPOLEON A JOSÊPHWB APRÈS LE DIVORCB 117

LETTRE XC • A l'Impératrice, à l'Élysée-Napoléon.

19 février 1810.

Mon amie, j'ai reçu ta lettre. Je désire te voir; mais les réflexions que tu me Tais peuvent être vraies. Il y a peut-être quelque inconvénient à nous trouver sous le même toit pendant là première année. Cependant la campagne de Bessiêres est trop loin pour pouvoir revenir; d'un autre côté, je suis un peu enrhumé et je ne suis pas sûr d'y aller.

Adieu, mon amie.

NAPOLÉON.


US TENDRESSES IMPÊniALES

LETTRE XCI A l'Impératrice, Â Malmaison.

Le 14 mars 18(0. .

Mon amie, j'espère que tu auras été contente de ce que j'ai fait pour Navarre. Tu y auras tu un nouveau témoignage du désir que j'ai de t'ôtre agréable.

Fais prendre possession de Navarre; tu pourras y aller le 25 mars passer le mois d'avril.

Adieu, mon amie.

NAPOLÉON.


LETTRES SE NAPOLÉON A JOSÉPHINE APRÈS LE DlVOllCB ilO

LETTRE XCÏI De l'Impératrice Joséphine à l'Empereur Napoléon.

Navarre, la 19 avril 1810.

Sire,

Je reçois, par mon fils, l'assurance que Votre Majesté consent à mon retour à Malmaison, et qu'elle veut bien m'accorder les avances que je lui ai demandées pour rendre habitable le château de Navarre.

Cette double faveur, Sire, dissipe en grande partie les inquiétudes et même les craintes que le long silence de Votre Majesté m'avait inspirées. J'avais peur d'être entièrement bannie de son souvenir : je vois que je ne le suis pas. Je suis donc aujourd'hui moins malheureuse, et même aussi heureuse qu'il m'est désormais possible de l'être.

J'irai à la fin du mois à Malmaison, puisque Votre Majesté n'y voit aucun obstacle. Mais, je dois vous le dire, Sire, je n'aurais pas si tôt profité de la liberté que Votre Majesté me laisse à cet égard, si la maison do Navarre n'exigeait pas, pour ma santé, et pour celle des personnes de ma maison, des réparations qui sont urgentes. Mon projet est de demeurer à Malmaison fort


120 TENDRESSES IMPÉRIALES

peu de temps; je m'en éloignerai bientôt pour aller aux eaux. Mais, pendant que je serai & Malmaison, Votre Majesté peut être sûre que j'y vivrai comme si j'étais à mille lieues do Paris. J'ai fait un grand sacrifice, Sire, et chaque jour je sen3 davantage toute son étendue. Cependant, ce sacrifice sera ce qu'il doit être, il sera entier de ma part. Votre Majesté ne sera troublée, dans son bonheur, par aucune expression de mes regrets.

Je ferai sans cesse des voeux pour que Votre Majesté soit heureuse, peut-être môme en ferai-je pour la revoir; que Votre Majesté en soit convaincue, je respecterai toujours sa nouvelle situation, je la respecterai en silence ; confiante dans les sentiments qu'elle me portait autrefois, je n'en provoquerai aucune preuve nouvelle ; j'attendrai tout de sa justice et de son coeur.

Je me borne à lui demander une grâce, c'est qu'elle daigne chercher elle-même un moyen de convaincre quelquefois, et moi-même et ceux qui m'entourent, que j'ai toujours une petite place dans son souvenir et une grande place dans son estime et dans son amitié. Ce moyen, quel qu'il soit, adoucira mes peines, sans pouvoir, ce me semble, compromettre, ce qui m'importe avant tout, le bonheur de Votre Majesté.

JOSÉPHINE.


LETTRES DE NAPOLÉON A JOSÉPHINE APRÈS LE DIVOUCE 121

LETTRE XCIII

Réponse de » Empereur Napoléon A l'Impératrico Joséphino, a Navarre.

Complîgne, le 21 avril 1810.

Mon amie, jo reçois ta lettre du 10 avril; elle est d'un mauvais style. Je suis toujours le même ; mes pareijs ne changent jamais. Je ne sais ce qu'Eugène a pu te dire. Je ne t'ai pas écrit, parce que tu ne l'as pas fait, et que j'ai désiré tout ce qui peut t'etre agréable.

Je vois avec plaisir que tu ailles à Malmaison, et quo tu sois contente; moi, je le serai de recevoir de tes nouvelles et de te donner des miennes. Je n'en di3 pas davantage jusqu'à ce que tu aies comparé celte lettre à la tienno ; et, après cela, jo te laisse juge qui est meilleur et plus ami de toi ou de moi.

Adicii, mon amie ; porte-toi bien et sois juste pour toi et pour moi.

NAPOLÉON.


iii TENDHESSES IMPÉRIALES

LETTRE XCIV Réponse de l'Impératrice «Joséphine.

Mille, mille tendres remerciements de ne m'avoir pas oubliée. Mon fils vient de m'apporter ta lettre. Avec quelle ardeur je l'ai lue, et cependant j'y ai mis bien du temps; car il n'y a pas un mot qui ne m'ait fait pleurer, mais ces larmes étaient bien douces I J'ai retrouvé mon coeur tout entier, et tel qu'il sera toujours : il y a des sentiments qui sont la vie même et qui ne peuvent finir qu'avec elle.

Je serais au désespoir que ma lettre du 19 t'eût déplu; je ne m'en rappelle pas entièrement les expressions, mais je sais quel sentiment bien pénible l'avait dictée, c'était le chagrin de n'avoir pas de tes nouvelles.

Je t'avais écrit à mon départ de Malmaison; et, depuis, combien de fois j'aurais voulu t'écrirel Mais je sentais les raisons de ton silence, et je craignais d'être importune par une lettre.. La tienne a été un baume pour moi. Sois heureux, sois-le autant que tu le mérites; c'est mon coeur qui te parle. Tu viens aussi de me donner ma part de bonheur, et une part bien vivement sentie : rien


LETTRES DE NAPOLÉON A JOSÉPHINE APRÈS LE DIVORCE 123

ne peut valoir pour moi une marque de ton souvenir.

Adieu, mon ami ; je to remercie aussi tendrement que je t'aimerai toujours.

JOSÉPHINE.


124 ' TENDRESSES IWPjifUALES

LETTRE XCV A l'Impératrice Joséphine, à Navarre

Compiègne, le 28 avril 1910.

Mon amie, je reçois deux lettres do toi. J'écris à Eugène. J'ai ordonné que l'on fit le mariage de Tascher avec la princesse de la Loyer).

J'irai demain à Anvers voir ma Hotte et ordonner des travaux. Je serai de retour le 15 mai...

Eugène me dit que tu veux aller aux eaux, ne te gène en rien. N'écoute pas les bavardages de Paris; ils sont oisifs et bien loin de connaître le véritable état des choses. Mes sentiments pour toi ne changent pas et je désire beaucoup te savoir heureuse et contente.

NAPOLÉON.


LETTRES PE NAPOLÉON A JOSÉPHINE APRÈS LE DIVORCE 123

LETTRE XCVI A l'Impératrice Eugénie, a Malmaison.

Mon amie, jo reçois ta lettre Eugène te donnera des nouvelles do mon voyagé et do l'Impératrice. J'approuve fort que tu ailles aux eaux. J'espère qu'elles te feront du bien.

Je désire bien te voir. Si tu es à Malmaison à la fin du mois, je viendrai te voir.

Ma santé est fort bonne; il me manque de to savoir contente et bien portante Fais-moi connaître le nom quo tu voudrais porter en route.

Ne doute jamais de toute la vérité de mes sentiments pour toi ; ils dureront autant que moi ; tu serais fort injuste si tu en doutais.

NAPOLÉON.

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120 TENDRESSES IMPÉRIALES

LETTRE XCVII

A l'Impératrice Joséphine, aux eaux d'Alx, en Savoio.

Rambouillet, le 8 juillet 1810.

Mon amie, j'ai reçu ta letlre du 3 juillet. Tu auras vu Eugène, et sa présence t'aura fait du bien. J'ai appris avec plaisir que les eaux te sont bonnes. Le roi de Hollande vient d'abdiquer la couronne, en laissant la régence, selon la Constitution, à la reine. Il a quitté Amsterdam et laissé le grand-duc de Berg.

J'ai réuni la Hollande à la France ; mais cet acte a cela d'heureux qu'il émancipe la reine, et cette infortunée fille va venir à Paris avec son fils, le grand-duc de Berg; cela la rendra parfaitement heureuse.

Ma santé est bonne. Je suis venu ici pour chasser quelques jours. Je te verrai avec plaisir cet automne. Ne doute jamais de mon amitié. Je ne change jamais. Porte-toi bien, sois gaie et crois à la vérité de mes sentiments.

NAPOLÉON.


LETTRES PE NAPOLEON A JOSÉPHINE APRÈS LE DIVORCE 127

LETTRE XCV1II A l'Impératrice Joséphine, i Navarre.

Fontainebleau, le 14 novembre 1810.

Mon amie, j'ai reçu ta lettre. Ilortense m'a parlé de toi. Je vois avec plaisir quo tu es contente. J'espère quo lu no t'ennuies pas trop à Navarre.

Ma santé est fort bonne. L'Impératrice avance heureusement dans sa grossesse. Je ferai les différentes choses quo tu me demandes pour ta maison. Soigne bien ta santé, sois contente et no doute jamais de mes sentiments pour toi.

NAPOLÉON.


128 TENDBKSSES IMPERIALE?

LETTRE XC1X A l'Impératrice Joséphine, a Navarre.

Je reçois ta lettre. Je ne vois pas d'inconvénient au mariage do M 1» 0 do Mackau avec Wat« tier, si cela lui convient ; ce général est un fort brave homme. Je me porte bien. J'espère avoir un garçon ; je te le ferai savoir aussitôt.

Adieu, mon amie. Je suis bien aiso que M""» d'Arberg t'ait dit des choses qui to fassent plaisir. Quand tu me verras, tu me trouveras avec les mêmes sentiments pour toi.

NAPOLÉON.


LETTRES DE KAPOLÉON A JOSÉPHINE APRÈS M DIVORCE 139

LETTRE C A l'Impératrice Joséphine, & Malmaison.

Trlanon, 25 août 18)3.

J'ai reçu ta lettre. Je vois avec plaisir que tu es en bonne santé. Je suis pour quelques jours a Trianon. Je compte aller à Compiôgne. Ma santé est fort bonne.

Mets de l'ordre dans tes affaires ; ne dépense que un million cinq cent mille Iran es et mets de côté tous les ans autant; cela fera une réserve de quinze millions en dix ans pour tes petitsenfants : il est doux de pouvoir leur donner quelque chose et de leur être utile. Au lieu de cela, l'on me dit que tu as des dettes, cela serait bien vilain. Occupe-toi do tes nflaire3" et ne donne pas à qui en veut prendre. Si tu me veux plaire, fais que je sache que tu as un gros trésor. Juge combien j'aurais mauvaise opinion de toi si je te savais endettée avec trois millions de revenu.

Adieu, mon amie, porte-toi bien..

NAPOLÉON.

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ISO TENDRESSES IMPÉRIALE»

LETTRE CI A l'Impératrloe Joséphine, & Malmaison.

Vendredi, 8 heures du malin, 1813.

J'envoie savoir comment tu te portes, car Hortense m'a dit que tu étais au lit hier. J'ai été fâché contre toi pour tes dettes} je ne veux pas que tu en aies ; au contraire, j'espère que tu mettras un million de côté tous les ans, pour donner à tes petites-filles lorsqu'elles se marieront.

Toutefois, ne doute jamais de mon amitié pour toi et ne te fais aucun chagrin là-dessus.

Adieu, mon amie; annonce-moi que tu es bien portante. On dit que tu engraisses comme une bonne fermière de Normandie.

NAPOLÉON.


APPENDICES



APPENDICES

DIALOGUE SUR L'AMOUR

Ce texte, rédigé par Bonaparte, en 1791, lors de son séjour à Valence, tï l'Age de vingt-deux ans, demeura inconnu pendant cent et trois ans.

Cet éorit d'un style sec et sans unité trace vigoureusement la conception que Napoléon devait avoir toute sa vie de la femme.

Le sort de ce manuscrit /ut mouvementé.

A sa chute, Napoléon l'envoya â Fesch(l) enfermé jiarmi d'autres dans un des carions de son cabinet. Fesch n'en prit jamais connaissance. A la mort de celui-ci, en 1839, son grand vicaire, l'abbé Lyonnet, à qui le carton revint, en vendit le contenu à Libri(2),

(1) Oncle de Napoléon I", ni à Ajacdo, archevêque de Lyon et grand aumônier de l'Empire.

(2) Collectionneur équivoque qui volait ce qu'il ne pouvait acquérir.


434 TENDRESSES IMPÉRIALE!

gui le revendit â des amateurs, entre autres à lord Ashbumham, dont le fils, en 1884, le céda, pour une somme de 675,000 francs, à la bibliothèque MédicoLaurentienne de Florence, oit il fut copié par MM. Frédéric Masson et Guido Biagi qui, en 1895, le publièrent sous le titre de « Napoléon inconnu ».


DIALOGUE SUR L'AMOUR

DES MAKIS (1). — Comment, monsieur, qu'est-ce que 1 àraourf Eh quoil n'êtes-vous donc pas composé comme les autres hommes?

BONAPAIVTE. — Je ne vous demande pas la définition de l'amour. Je fus jadis amoureux et il m'en est resté assez de souvenir pour que je n'aie pas besoin de ces définitions métaphysiques qui ne font jamais qu'embrouiller les choses; je vous dis plus que de nier son existence. Je le crois nuisible à la société, au bonheur individuel des hommes, enfin je crois que l'amour fait plus de mal... et que ce serait un bienfait d'une divinité protectrice que de nous en défaire et d'en délivrer le monde.

DES MAZIS. — Quoi 1 l'amour nuisible à la société, lui qui vivifie la nature entière, source de toute production, de tout bonheur. Point d'amour, monsieur, autant vaudrait-il anéantir notre existence.

DoNArABTE. — Vous vous échauffez. La passion vous transporte. Reconnaissez, je vous en prie, votre ami. Ne

(1) Alexandre Dci Mails Avait été, à l'Ecole militaire de Pari», l'instructeur d'Infanterio de Uomi|<arte. Tous deux s'étalent liés d'un* étroite amitié qui se resserra au cours de communes garnisons. Emigré tout lt Terreur, Dct Mails ne rentra en France que tous lo consulat. Napoléon le nomma administrateur mobilier dé la couronne, ofikicr civil de at maison et chambellan. A la chute de l'empereur, Dos Mails servit Us Uourboni. '

S.


130 TENDRESSES IMPÉRIALES

me regardez pas avec indignation et répondez pourquoi» depuis que cette passion vous domine, ne vous vois-je plus dans vos sociétés ordinaires? Que sont devenues vos occupations? Pourquoi négligez-vous vos parents, vos amis? Vos journées entières sont sacrifiées à une promenade monotone et solitaire jusqu'à ce que l'heure vous permette de voir votre Adélaïde.

DES MAZIS. — Eh I que m'importe à moi, monsieur, vos occupations, vos sociétés? A quoi aboutit une science indigeste? Qu'ai-jc à faire de ce qui s'est passé il y a mille ans ? Quelle influence puis-je avoir sur le cours des astres? Que m'importe lo minutieux détail des discussions puériles des hommes?... Je me suis occupé de cela sans doute. Qu'avais-je de mieux à faire? Il fallait bien par quelque moyen me soustraire à l'ennui qui me menaçait; mais croyez-moi, je sentais au milieu de mon cabinet le vide de mon coeur. Parfois mon esprit était satisfait, mais mes sentiments 1 0 Dieu I je n'ai fait que végéter tant que je n'eus pas aimé. Actuellement, au contraire, quand l'amour m'arrache au sommeil, je ne dis plus : « Pourquoi le soleil luit-il aujourd'hui pour moi? » Non I le premier rayon de lumière me présente ma chèro Adélaïde en habit du matin. Je la vois penser à moi, me sourire. Hier au soir elle me serrait la main, elle soupirait, nos regards se rencontraient. Comme ils exprimaient nos sentiments I Je contemple un portrait qui me ravit l'âme. Cent fois je le remets pour le reprendre aussitôt. Cetto promenade, monsieur, que TOUS appelez monotone, chl non, la vaste étendue du globe ne contient pas plus de variété. D'abord, mon esprit repasse les choses qu'elle m'a dites ; je relis le billet qu'elle m'a écrit ; je pense a celui qui doit peindre toute l'étendue de mon amour. Je le refais cent fol*.


DIALOGUE SUR L'AMOim 137

Mon imagination s'élève ; je vois bientôt mes feux cou» ronnés ; je regrette tantôt de ne pas avoir une fortune immense à lui sacrifier. Ici môme, je voudrais avoir une couronne. Concevez le charme de la proposer à ses parents, la joie que cela lui causerait. Tout ce qui approche d'elle est sacré à mes yeux. Une autre fois je penserai aux préparatifs des noces qui doivent bientôt nous unir, jusqu'aux présents que je dois lui faire. Mon coeur se dilate à imaginer quelque chose qui puisse l'obliger, lui prouver mon amour.Voyez-vous le château où nous devons passer nos jours, les sombres bosquets, les riantes prairies, les délicieux parterres? Rien ne m'affecte que le plaisir d'être tous les jours à côté d'elle. Mais bientôt elle doit me donner des gages de notre amour... Mais vous riez I En vérité, je vous déteste.

BONAPAHTE. — Jo ris des grandes occupations qui captivent votre âme et plus encore du feu avec lequel vous me les communiquez. Quelle maladie étrange s'est emparée de vous? Je sens que la raison que vous appelez A votre secours ne fera aucun effet et, dans le délire où vous êtes, vous ferez plus que de fermer l'oreille à sa voix, vous la mépriserez. Souvenez-vous que vous n'êtes pas de sang-froid et que mon amitié fut toujours le juge qui vous rappela à vos désirs. Souvenez-vous que je m'en suis toujours rendu digne. J'aurais besoin de répéter ici les obligations que vous me devez et les marques qui vous sont connues do mes sentiments, car, moi* même je ne serais pas à l'abri de vos invectives dans les accès de votre délire. Car votre état est pareil A celui d'un malade qui ne voit quo la chimère qu'il poursuit et sans connaître la maladie qui la produit, ni la santé qu'il a perdue. Je n'agiterai donc pas si vos plaisirs sont dignes de l'homme ou mémo si c'en sont. Je veux croire


-138 TENDRESSES IMPÉRIALES

que ce sexe, roi du monde par sa force, son industrie, son esprit et toutes ses autres facultés naturelles, trouve sa suprême félicité à languir dans les chaînes d'une molle passion et sous les lois d'un être plus faible d'entendement comme de corps. Je veux croire, comme vous le dites, que le souvenir de votre Adélaïde, son image, sa conversation puissent vous dédommager des agréments de vos occupations, de vos sociétés ; mais n'est-il pas vrai que vous désirez toujours la fin de cet état et que votre insatiable imagination voudrait obtenir ce que la vertu d'Adélaïde ne peut vous accorder. Ma froide tranquillité, je le vois, n'est pas propre à peindre le pesant fardeau qui tourmente l'existence d'un amant dans le moindre échec qui lui survient. Qu'Adélaïde s'absente pour quinze jours seulement, que devenez-vous ? Si un autre s'efforce à cet objet, que vous croyez vous appartenir, que d'inquiétude I Si une mère alarmée trouve mauvaises de trop fréquentes visites qui font parler un public méchant, enfin, monsieur, que sais-je, cent petites autres choses qui frappent fortement un amant vous agitent. Souvent, les nuits se passent sans sommeil, les repas sans manger. La terre n'a point d'endroit pour contenir votre inquiétude extrême. Votre sang bouillonne, vous marchez à grands pas, le regard égaré. Pauvre chevalier, est-ce là le bonheur ? Je ne doute pas que si, aujourd'hui, dans l'extase que vous a occasionnée un serrement de main, vous ne trouviez cet état la suprême félicité, je ne doute pas, dis-je, que, demain, dans une humeur contraire, vous ne trouviez votre faiblesse insupportable. Mais, chevalier, voilà votre position. S'il fallait défendre la patrie attaquée, que feriezvous? S'il fallaitI... Mais à quoi étes-vous bonf Conflera-t-on le bonheur de vos semblables à un enfant


DIALOGUE SUR L'AMOUR „ 139

qui pleure sans cesse, qui s'alarme ou se réjouit au seul mouvement d'une autre personne ? Conilera-t-on le secret da l'État i celui qui n'a point de volonté?

Dis MAZIS. — Toujours des grands mots vides de sens I Que fait à moi votre État, ses secrets ? En vérité, vous êtes inconcevable aujourd'hui. Vous n'avez jamais raisonné si pitoyablement.

BONAPARTE. — Ah! chevalier, quo vous importent l'État, vos concitoyens, la société? Voilà les suites d'un coeur relâché, abandonné à la volupté. Point do force, point de vertu dans votre sentier. Vous n'ambitionniez que de faire le bien et aujourd'hui ce bien môme vous est indifférent, Quel est donc ce sentiment dépravé qui A pris la place de votre amour pour la vertu? Vous ne désirez que de vivre ignoré à l'ombre de vos peupliers. Profonde philosophie! Ahl chevalier, quo je déteste cette passion qui a produit une si grande métamorphose. Vous ne songez pas que vous tirez vers l'égoïsme et tout YOUS est indifférent : opinion des hommes, estime de vos amis, amour de vos parents. Tout est captivé au tyran fort de votre faiblesse. Un coup d'oeil, un serrement de main, un baiser, chevalier et que vous importent alors la peine de la patrie, la mauvaise opinion de vos amis; un attouchement corporel... mais je ne veux pas vous irriter. Je le veux croire ; l'amour a des plaisirs incomparables, des peines encore plus grandes peut-être, mais n'importe, considérons seulement l'intluencc qu'il a dans l'état de société. Il est vrai, chevalier, que, dans l'état des choses, notre Ame, née indépendante, a besoin d'être formée, dégradée. Si vous voulez, par les institutions, que dès la naissance l'attention que tous les législateurs ont donnée à l'éducation... que nous sommet nés pour être heureux, que c'est la loi suprême que la

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140 TENDRESSES IMPÉRIALES

nature a gravée au fond de nous mêmes. Il est vrai que c'est la base qui nous a été donnée pour servir de règle à notre conduite. Chacun, né juge de ce qui peut lui convenir, a donc le droit de disposer de son corps comme de ses affections, mais cet état d'indépendance est vraiment opposé à l'état de servitude où la société nous a mis.

En changeant d'état il a donc fallu changer d'humeur. Il a donc fallu substituer au cri de notre sentiment celui des préjugés. Voilà la base de toutes les institutions sociales. Il a fallu prendre l'homme dès son origine pour en faire, s'il se peut, une autre créature. Croyez-vous, sans ce changement, que tant d'hommes souffriraient d'être avilis par un petit nombre de grands seigneurs et que des palais somptueux seraient respectés par des hommes qui manquent de pain? La force est la loi des animaux ; la conviction est celle des hommes. On convint, soit pour repousser les attaques des bêtes plus fortes, soit pour ne pas être exposé à se battre & chaque instant, l'on convint, dis-je, de lois des propriétés et chacun fut assuré au uom de tous de la propriété de son champ.

Cette convention n'existait qu'entre un petit nombre d'homm°,s. Il fallut donc des magistrats, soit pour repousser les attaques des peuplades voisines, soit pour , faire exécuter la convention reçue.

Ces magistrats sentirent le charme du commandement, mais les plus alertes du peuple s'y opposèrent. Ils furent gagnés et ainsi associés aux projets des ambitieux. Le peuple fut subjugué. Vous voyez l'inégalité s'introduire à grands pas; vous voyez se former la classe régnante et la classe gouvernée. La religion vint consoler les malheureux qui se trouvaient dépouillés de


DIALOGUE SUIt L'AMOUIt 111

toute propriété. Elle vint les enchaîner pour toujours. Ce ne fut plus par les cris de la conscience que l'homme devait se conduire. Non 1 L'on craignit qu'un sentiment que l'on faisait tout au monde pour étouffer ne reprit le dessus.

11 y eut donc un Dieu. Ce Dieu conduisait le monde. Tout se faisait par acte de sa volonté. Il avait donné des lois écrites... et l'empire des prêtres commença, empire qui probablement ne finira jamais.

Que l'homme donc soit dégradé, triste vérité t Mais que l'état de société no soit légitime, c'est ce dont l'on ne peut disconvenir. La silence des hommes là-dessus est une approbation tacite que rien ne peut démentir. Vous avez vingt ans, monsieur, choisissez : ou renoncez à votre rang, à votre fortune, et quittez un monde que vous détestez, ou, vous inscrivant dans le nombre des citoyens, soumettez-vous à ses lois. Vous jouissez des avantages du contrat, serez-vous infidèle aux autres clauses? Ce ne serait pas vous croire honnête homme que d'en douter. Vous devez donc être attaché à, un lhat qui vous procure tant de bien-être et procurant à la fois de faire un digne usage des avantages qu'il vous a accordés, vous devez rendre heureux le peuple au-dessus duquel vous êtes et faire prospérer la société qui vous a distingué. Pour cela faire, il faut que, guidé toujours par le flambeau de la raison, vous puissiez balancer avec équité les droits des hommes a qui vous vous devez. Pour cela faire, il faut que, prêt A tout entreprondro pour le service de l'État, vous soyez soldat, homme d'affaires, courtisan même si l'intérêt du peuple et de votre nation le demande. Ah I que votre récompense sera douce I Défiez alors les malignes vapeurs de la calomnie, de la jalousie I Défiez hardiment le temps

'v<~'


142 TENDHESSES IMPÉRIALES

mêmel Vos membres décrépits ne seront plus qu'une image imparfaite de ce qu'ils furent jadis et ils attireront cependant le respect de tous ceux qui vous approcheront. L'un racontera dans sa cabane le soulagement que vous lui avez accordé. L'autre, en faisant le récit des complots des méchants, dira : « S'il ne fût venu à mon secours, j'eusse péri du supplice des criminels. » Chevalier, cesse de restreindre cette âme altière et ce coeur jadis si fier à une sphère aussi étroite. Toi, aux genoux d'une femme! Fais plutôt tomber aux tiens les méchants confondus ! Toi, mépriser les peines des hommes ! Sentiment d'honneur, subjugue-le plutôt I Estimé par tes semblables, respecté, aimé par tes vassaux, la mort viendra t'cnlever au milieu des pleurs de ceux qui t'entoureront, après avoir coulé une vie douce, oracle de tes proches et père de tes vassanx.

DES MAZIS. — Je ne vous entends pas. Comment, monsieur, mon amour pourrait-il m'empêcher de suivre le plan que vous venez de tracer? Quelle idée vous étesvous donc faite d'Adélaïde?

Adélaïde, s'il faut pour remplir ces devoirs soulager les malheureux; s'il faut pour être vertueux aimer sa patrie, les hommes, la société, qui plus qu'elle est vertueuse ? Croyez-vous que je faisais le bien avec la froideur de la philosophie? Quand la volonté d'Adélaïde sera le mobile qui jne conduira, lui faire plaisir la récompense... Non, monsieur, vous n'avez jamais été amoureux.

BONAPARTK. — Je plains votre erreur. Quoi, chevalier, vous croyez que l'amour est le chemin de la vertu î 11 vous immétriguo (empldirei; retenir avec du mat-- tic) à chaque pas. Soyez sincère, depuis que cette passion fatale a troublé votre repos, avez-vous envisagé


DIALOGUE SUR L'AMOUR 143

d'autre jouissance que celle de l'amour? Vous ferez donc le bien ou le mal selon les symptômes de votre passion. Mais que dis-je ? Vous et la passion ne font qu'un même être. Tant qu'elle durera vous n'agirez que pour elle et, pjisque vous êtes convenu que les devoirs d'un homme riche consistaient à faire du bien, à arracher de l'indigence les malheureux qui y gémissent, que les devoirs d'un homme de naissance l'obligeaient à se servir du crédit de son nom pour détruire les brigues des méchants, que les devoirs du citoyen consistaient à défendre la patrie et à concourir à sa prospérité, n'avouerez-vous pas que les devoirs d'un bon fils consistent à reconnaître en son père les obligations d'une éducation soignée, à sa mère... Non I chevalier, je me tairais si j'étais obligé de vous prouver de pareilles évidences.

<.--T—



LA FEMME ET LE CODE NAPOLEON

Nous avons recherché dans le Code civil et le Code pénai ceux des articles qui se rapportent â la femme.

Par l'examen de ces articles, on pourra se rendre compte combien Napoléon souhaitait marquer la dépendance de l'épouse A l'époux. Convaincu qu'elle était faible, il la voulait protégée par le mari. Mais en lui accordant cette protection, il exigeait d'elle une absolue soumission A une discipline familiale, que d'ailleurs il souhaitait douce. Enfin, ennemi des désordres conjugaux, il frappa inégalement l'épouse et l'époux, sachant la différence de résultat d'une même faute et pour marquer, scmble-t-il, le caractère grave et éleva de l'épouse, qui, A ses yeux, est surtout la Mère.

>.


CODE CIVIL

LIVRE PREMIER. — TITRE PREMIER Jouissance des drclts civils.

Tout Français a la jouissance ou propriété des droits civils ; mais quelques Français, comme les mineurs, les interdits et les femmes mariées n'ont pas l'exercice de leurs droits.

TITRE 111

Du domicile.

Celui qui est soumis à une personne est domicilié chez elle : ainsi la femme est domiciliée chez son mari.

TITRE V Des droits et des devoirs respectifs des époux.

ART. 213. — Le mari doit protection à sa femme, la femme obéissance à son mari.

ART. 214. — La femme est obligée d'habiter avec lo mari et de le suivre partout ou il juge à propos de résider ; le mari est obligé de la recevoir et de lui fournir tout ce qui est nécessaire pour les besoins de la vie, selon ses facultés et son état.

TITRE VI " Du divorce.

ART. 229. — Le mari pourra demander le divorce pour cause d'adultère de sa femme. ART. 230. — La femme pourra demander le divorce


LA FEMME ET LE CODE NAPOLÉON 147

pour cause d'adultère de son mari loi-squ'i'/ aura tenu ta concubine dans la maison commune.

TITRE VI De la séparation do corps.

ART. 308. — La femme contre laquelle la séparation de corps sera prononcée pour cause d'adultère sera condamnée, par le même jugement et sur la réquisition du ministère public, à la réclusion dans une maison de correction pendant un temps déterminé, qui ne pourra être moindre de trois mois, ni excéder deux années.

ART. 309. — Le mari restera le maître d'arrêter l'effet de cette condamnation en consentant a reprendre sa femme.

TITRE VII De la paternité et do la filiation.

ART. 310. — La recherche de la paternité est iuterdito. ART. 341. — La recherche de la maternité est admise.

TITRE IX Do la puissance paternelle.

ART. 373. — Le père seul exerce celte autorité durant le mariage.

ART. 371. —L'enfant ne peut quitter la maison paternelle sans la permission de son père, si ce n'est pour enrôlement volontaire (i), après l'âge de dix-huit ans révolus.

(1) Il faut observer ectl« restriction. Elle exprime 11 pensée dé Napoléon, mettant la Patrie (les armecs, par con«cq,uent) au-dessus de la famille.


143 TENDRESSES IMPÉRIALES

TITRE X De la tutelle des père et mère.

ART. 389. — Lo père est, durant le mariage, administrateur des biens personnels de ses enfants mineurs.

LIVRE III. — TITRE PREMIER Des successions.

ART. 776. — Les femmes mariées ne peuvent pas valablement accepter une succession sans l'autorisation de leur mari.

TITRE II Des donations entro vifs et des testaments.

ART. 005. — La femme mariée ne pourra donner entre vifs sans l'assistance ou le consentement spécial de son mari.

ART. 931. — La femme mariée ne pourra accepter une donation sans le consentement de son mari.

ART. 1029. — La femme mariée no pourra accepter l'exécution testamentaire qu'avec le consentement de son mari.

CODE PÉNAL

LIVRE III Crimes et délits.

ART. 324. — Dans le cas d'adultère prévu par' l'article 336, le meurtre commis par l'époux sur son épouse


LA FEMME LT LE CODE NAPOLÉON 149

ainsi quo sur lo complice à l'instant oii il les surprend en flagrant délit dans la maison conjugale est excusable.

ART. 330. — L'adultèro do la femme ne pourra être dénoncé quo par lo mari.

ART. 337. — La femme convaincue d'adultère subira la peine do l'emprisonnement pendant trois mois au moins et doux ans au plus. Le mari restera le maure d'arrêter cette condamnation en consentant à reprendre sa femme.

ART. 330. — Le mari qui aura entretenu une concubine dans la maison conjugale et qui aura été convaincu sur la plainte de la femmo sera puni d'une amende de cent francs à deux mille francs.



LETTRES A M"" WALEWSKA

Après la victoire d'Iéna, Napoléon occupa la Pologne et fil dans Varsovie, sa capitale, une entrée glorieuse. Les Polonais, qui avaient vu dans son triomphe l'espoir de leur affranchissement, lui firent un accueil enthousiaste. Les fêles succédèrent aux fêtes. Au cours de l'une d'elles, dans un bal, Najioléon remarqua Marie Walewska. Pour la première fois peut-être depuis qu'il est empereur, il laissa voir son trouble et l'écrivit, bien que dans un billet bref, oit le chef paraît plus que l'amoureux. Ce billet, que Duroc (1) porta, était ainsi conçu :

« Je n'ai vu que vous, je n'ai admiré que vous, je ne « désire que vous. Une réponse bien prompte pour cal« mer l'impatiente ardeur de

« N. »

La signature, qui n'est qu'un paraphe, le style, qui n'est qu'une suite d'exclamations que termine un ordre, tout cela parut une impertinence aux yeux de la jeune Polonaise. Elle refusa l'invitation.

L'Empereur ne se tint pas pour battu. Il a conscience de sa valeur, et si d'autres, plus modestes et surtout moins actifs que lui, répugneraient d l'affir(1)

l'affir(1) aide de camp de l'Empereur et un de ses familiers.

9.


152 TENDRESSES IHrËMALES

mer, il ne craint pas de l'écrire à celle qu'il veut co«- quêrir :

« Vous ai-jo déplu, madame? J'avais cependant le « droit d'espérer le contraire. Me suis-je trompé? Votre « empressement s'est i-alenti, tandis que le mien aug« mente. Vous m'ôtez le repos I Oh ! donnez un peu de « joie, de bonheur à un pauvre coeur tout prêt à vous « adorer. Une réponse est-elle si dilllcilo à obtenir ? « Vous m'en devez deux.

« N. »

A ce billet, où jiaraissait l'ennui de n'avoir pas été accueilli, la craint* d'avoir été trop Irusque et la douleur réelle qu'éprouvait le Maître- à se sentir isolé dans sa gloire, Marie Waleicsfta, plus par respect de ses devoirs d'éjwuse, croyons-nous, que par fierté, ne voulut pas répondre.

Son entourage a beau lui représenter qu'être la maîtresse de l'Empereur, ce n'est pas manquer à l'honneur, et que ce serait peut-être préparer te salut et la grandeur de ta Pologne, Marie Waleicsfia se refuse à ce compromis.

Napoléon insiste une troisième fois. Son billet est plus tendre encore, plus long aussi. Enfin il promet ce que tous les Polonais désirent :

a II y a des moments où trop d'élévation pèse, et « c'est ce que j'éprouve. Comment satisfairo le besoin « d'un coeur (pris qui voudrait s'élancer à vos pieds et a qui se trouve arrêté par le poids de hautes considéra« tions paralysant les plus vifs désira? OhI si vous vou« liez !... Il n'y a que vous seule qui puissiez lever les * obstacles qui nous séparent. Mon ami Duroc vous en K facilitera les moyens.


LETTRES A Moe* WAtEWSKA 153

a Oh I venez I venez ! Tous vos désirs seront remplis. « Votro patrie ma sera plus chèro quand vous aurez « pltiô do mon pauvre ccuur.

« N. »

Le lendemain de la réception de ce billet, lasse des assauts de Napoléon et surtout d'entendre les prières de son entourage, Qui persistait ii voir dans son consentement l'avènement de la Pologne, Marie Walewsha se rendit au château impérial. Ce fut la nuit, entourée de mystère, voilée et en voiture fermée, qu'elle y arriva en compagnie d'un gardien discret.

Napoléon l'attendait. Il était là, debout, dans la salle oit on l'introduisit. Empressé, comme il savait rêtre avec les femmes qu'il aimait, l'Empereur se montra galant. Mais Marie W'aleicsfta, toute surprise encore, ne put que pleurer, se montrer nerveuse et d'une timidité qui pouvait surprendre. Quand, à deux heures du matin, on vint la prendre pour la reconduire ches elle, comme il avait été convenu, Napoléon n'avait obtenu qu'un droit de consolation et sa promesse de revenir le lendemain.

Aussi, dès son réveil, sa femme de chambre lui remit-elle ce mot, qui accompagnait un bouquet et une guirlande de diamants :

« Marie, ma douce Marie, ma première pensée est « pour toi, mon premier désir est do to revoir. Tu re« viendras, n'est-ce pas? Tu me l'as promis. Sinon « l'aigle volerait vers toi. Je te verrai i dîner, l'ami (1) « le dit. Daigne donc accepter ce bouquet : qu'il « devienne un lien mystérieux qui établisse entre nous

(1) Duroc.


154 TINDBESSES IMPERIALES

« un rapport secret au milieu do la foule qui nous envi« ronne. Exposés aux regards de la multitude, nous B pourrons nous entendre. Quand ma main pressera « mon coeur, tu sauras qu'il est tout occupé de toi et. « pour répondre, tu presseras le bouquet ! Aime-moi, « ma gentille Marie, et que ta main ne quitte jamais « ton bouquet.

« N. »

Le soir, elle était au dîner. La conversation s'engagea entre elle et l'Empereur à l'aide de ce bouquet. Puis elle vint au palais. L'habitude prise, elle y revint chaque soir.

Quand Napoléon quitta Varsovie pour Finchenstein, elle le suivit. Dans cette nouvelle résidence, elle mène une vie clottrée, enfermée dans un château morne, où elle ne voit personne. L'Empereur parait aux heures des repas, pris en tête à tête. Le reste du temps, elle l'use à lire, à broder, à voir la parade à travers les persiennes.

De Finchenslein, elle va à Vienne, et de Vienne à Paris, où l'Empereur lui achète un hôtel particulier au 48 de la rue de la Victoire.

De là, elle gagne Schoenbrunn, en 1809, et le château de Waletcice, en 1810, où elle accouche d'un fils (le 4 mai) : le comte Waleicshi.

Puis elle revint à Paris. Mais l'époque des revers commençait. Napoléon, attristé, ne pense plus avec la même gaieté à sa maîtresse. Des soucis l'absorbent. Il songe à mourir. C'est quelques jours avant l'Ile


LETTRIS A MW» WALEWSKl 155

d'Elbe. Ce soir où, vaincu, il a voulu se suicider sans y parvenir, Marie Walewsfta attendra toute une nuit l'amant soucieux que, bien qu'attristée, elle n'ose dé' ranger. Lui ne s$ souviendra plus qu'au matin qu'elle a passé la nuit à l'attendre dans une pièce proche. Et malgré tant de douleur qui l'accable, il trouve pour elle, A défaut d'amour, des mots d'amitié profonde :

« Marie, j'ai reçu votre lettre du 15. Les sentiments « qui vous animent me touchent vivement. Ils sont « dignes de voire belle Ame et de la bonté de votre « coeur. Lorsque vous aurez arrangé vos affaires, si c vous voulez aller aux eaux de Lucques ou de Sise, je « vous verrai avec un grand* et vif intérêt, ainsi que « votre fils, pour qui mes sentiments sont toujours inva« viables. Portez-vous bien, pensez a moi avec plaisir et « ne doutez jamais de moi.

a Le 10 avril. « N. »

Napoléon partit pour Vile d'Elbe. C'est là qu'elle le vint visiter le 1»' septembre 1814. Elle sera près de lui encore en 1815, pendant les Cent Jours.

Enfin, quand ce fut l'exil définitif, l'abdication pour Sainte-Hélène, Marie se crut dégagée de tout serment. Elle épousa Philippe-Antoine, général comte d'Ornano, ancien colonel des dragons de la Oarde, cousin de l'Empereur.


150 TB.1DRKSSES IWPÉMALF.S

De ce mariage elle eut un fils (1), le 9 juin 18i7. Quelques mois après, vers la mi-décembre, elle mourait clans son hôtel de la rue de la Victoire, qu'elle avait quitté lors de sonjnqriage. %

(1) Rodolphe-Auguste d'Ornhw; à^pyH 'i\i Corps législatif tous le Second Empire. Mort lo U octobre 1805, '


TAmjÇJBBS RATIÈRES

V?-' 1 *•* •.•'•7

Lettre-préface à M. Maurice Barrés 1

Lettres du Général en chef de l'armée d'Italie . ... 15

Lettres de Bonaparte, Premier Consul 41

Lettres de Napoléon, Empereur 47

Lettres de Napoléon a Joséphine après le divorce . . 101 APPENDICES :

Dialogue sur l'amour 129

La femme et le Code Napoléon : Code civil 142

Code pénal 141

Lettres à M">« Walcwska 147





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Edouard Scburé, par L. de ROMELF.

Auguste Dorchain, par A.-E. SOREL.

Comtesse M. de Noailles, par René' GILLOUIN-,

Catulle Mendès, par A. BERTRAND.

Satnt-Georges de Bouchelier, par M. Le BLOND.

René Doumic, par E. BEAITILS.

Pierre Loti, par Jean MARIEL.

L'Abbé Loisy, par Alfred DETREZ.

Marcelle Tinayre, par MARTIN-MAMV.

Henry Bataille, par DENÏS-AMIEL.

Paul Dérouléde, par FCORENT-MATTER.

Lucien Descaves, par E. MOSELLV.

René Bazin, par A. de BERSAUCOCRT.

E. Brieux, par Adrien BERTRAND.

Edmond Rostand, par Louis HACGMARD.

Monseigneur Duchesne, par Claude D'HABLOVILLE.

Georges de Porto-Riche, par Claude MARSE.

Paul Hervieu, par Henry MALHERBE.

ORLÉANS. — IMP. ORLÊAXAISE, 68, RUE ROYALE