190 NAPOLÉON LE PETIT.
main et de verser des flots de sang. Cela est défendu. Par qui? me répéterez-vous, vous qui ne voyez devant vous personne qui vous défende rien. Patience. Vous le saurez tout à l'heure.
Quoi! — ici vous vous révoltez, et je le comprends, — lorsqu'on a d'un côté son intérêt, son ambition, sa fortune, son plaisir, un beau palais à conserver faubourg Saint-Honoré, et de l'autre côté les jérémiades et les criailleries des femmes auxquelles on prend leurs fils, des familles auxquelles on arrache leurs pères, des enfants auxquels on ôte leur pain, du peuple auquel on confisque sa liberté, de la société à laquelle on retire son point d'appui, les lois; quoi! lorsque ces criailleries sont d'un côté et l'intérêt de l'autre, il ne serait pas permis de dédaigner ces vacarmes, de laisser « vociférer» tous ces gens-là, de marcher sur l'obstacle, et d'aller tout naturellement là où l'on voit sa fortune, son plaisir et le beau palais du faubourg Saint-Honoré! Voilà qui est fort ! Quoi ! il faudrait se préoccuper de ce que, il y a trois ou quatre ans, on ne sait plus quand, on ne sait plus où, un jour de décembre, qu'il faisait très-froid, qu'il pleuvait, qu'on avait besoin de quitter une chambre d'auberge pour se loger mieux, on a prononcé, on ne sait plus à propos de quoi, dans une salle mal éclairée, devant huit ou neuf cents imbéciles qui vous ont cru, ces huit lettres : Je le jure! Quoi! quand on médite « un grand acte » il faudrait passer son temps à s'interroger sur ce qui pourra résulter du parti qu'on prend ! se faire un souci de ce que celui-ci sera mangé de vermine dans les casemates, de ce que celui-là pourrira dans les pontons, de ce que cet autre crèvera à Cayenne, de ce que cet autre aura été tué à coups de