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Titre : Le Gaulois : littéraire et politique

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1912-02-05

Contributeur : Pène, Henri de (1830-1888). Directeur de publication

Contributeur : Tarbé des Sablons, Edmond Joseph Louis (1838-1900). Directeur de publication

Contributeur : Meyer, Arthur (1844-1924). Directeur de publication

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32779904b

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32779904b/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 94503

Description : 05 février 1912

Description : 1912/02/05 (Numéro 12532).

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Description : Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine commune

Description : Collection numérique : La Commune de Paris

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k535328r

Source : Bibliothèque nationale de France

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 10/03/2008

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L'Entente

wglo^asse

La presse allemande regarde d'un œil mauvais et commente avec humeur la visite de la Réputation anglaise à Saint-Pétersbourg. Cette (visite n'a cependant rien d'insolite ce n'est Qu'une politesse rendue. Il y a quatre ans, une députation de la Douma était venue apporter à Londres les compliments et les sympathies de la Russie. Cette initiative était plutôt une nouveauté, car les Anglais et les Russes ne s'étaient guère rencontrés que*pour se combattre. Mais les temps étaient changés les intérêts s'étaient déplacés, et les sentiments avaient suivi ce mouvement de conversion. Le roi Edouard VU, qui vivait encore à ce moment, avait compris Que le rapprochement de la Russie et de l'An-,gleterre était une nécessité de défense comjnune contre le, débordement du pangermanisme la visite de la. députation russe était la Consécration de ces nouveaux rapports. Les Anglais ont mis quatre ans à' rendre leur politesse aux Russes. C'est manquer peut-être un peu d'empressement. Mais il faut tenir tcompte des épreuves par lesquelles ils viennent Me passer la mort du roi Edouard, le renoutellement de la Chambre, la guerre contre la Chambre des lords, la dissolution des Commumeset les élections nouvelles. L'Angleterre, qui lut, pendant des siècles, le peuple le mieux équilibré du monde, connaît à son tour les prodromes des révolutions. Son ministère radical lui donne la fièvre, au lieu de «la rassurer, et des couches profondes du morfde du travail montent des revendications et dis menaces qui mettent en péril la paix sociale. L'ancienne Angleterre Old England ignorait généra- lement ce genre de soucis. Sa politique était tout extérieure elle surveillait d'un œil impérieux et jaloux la vie des autres nations, sans sentir le besoin de se replier sur elle. Cette quiétude hautaine a disparu. Elle connaît Comme nous les conflits sociaux, les coalitions ouvrières et les grèves. Elle s'en inquiète à bon droit, mais sans se désintéresser de sa condition extérieure. La visite de la députation anglaise correspond à ce souci. Comme elle n'a rien d'officiel, il est difficile d'en tirer des conséquences certaines. Les journaux russes lui font un accueil chaleureux et cordial, et quelques-uns, emportés par leur contentement, expriment le vœu que le rapprochement anglo-russe soit scellé par une alliance en forme. La presse allemande sourit de cette lintempéranee et prétend que la diplomatie crusse n'obéira jamais à de pareils conseils. Mais elle n'en constate pas moins, avec un étonnement mêlé d'effroi, la sincérité et la puissance de ce mouvement. La Gazette de Cologne, notamment, confesse que « l'opinion publique en Russie a subi une transformation \incroyable. et est très fortement prévenue en faveur de l'Angleterre ». Elle peut s'en inquiéter à bon droit mais elle a tort de s'en étonner. Cette évolution du sentiment populaire est une réaction logique et nécessaire contre le péril germanique. C'est un phénomène qu'on a vu se 'reproduire dans tous les pays et dans tous les jtempg, chaque fois qu'une nation, devenue trop puissante, a rompu l'équilibre des forces et meinacé la vie et la liberté des autres.

C'est cette nécessité qui a déterminé, il y a !Vingt ans, l'alliance franco-russe. Les mêmes raisons qui nous ont conduits à cette alliance agissent aujourd'hui sur la conscience anglaise, depuis que l'Angleterre s'est aperçue que l'Allemagne, qui était déjà sa concurrente Économique, devenait à grands pas sa concurrente navale et s'armait avec fureur pour lui 'disputer bientôt l'hégémonie de la mer. Quelques esprits attardés s'obstinent à ne pas croire à la possibilité de ce rapprochement. L'hostilité séculaire des deux Etats leur apparaît comme une barrière infranchissable. Il est exact qu'il exista longtemps un antagonisme irréductible entre les deux gouvernements et les deux nafiions. Mais comme il était sans fondement, il Çtait nécessairement sans avenir. Si on l'examine en ses causes apparentes, on n'y trouve qu'une longue accumulation de rancunes légendaires, sensiblement pareilles à celles qui ont si longtemps brouillé l'âme française et l'âme anglaise mais on n'y pourrait trouver june opposition d'intérêts, et tout est là. Rien ne divise la Russie et l'Angleterre, rien que des prétentions, des préjugés, des antipa- Ithies irraisonnées, c'est-à-dire des éléments !extra-politiques ou antipolitiques, autant dire' des vapeurs qui doivent nécessairement se dissiper avec le temps. L'empire des tsars est déjà beaucoup trop vaste pour que la Russie songe, pomme on l'a trop longtemps cru en Angleterre, à envahir l'Inde ou à lui disputer le Thibet, qui est,' d'ailleurs, inexploitable. Et, d'autre part, la pénétration pacifique ou violente de la Chine par l'action russe est une chimère dont le commerce anglais n'a pas à s'inquiéter. En Europe, les causes de conflit qui les mettaient jadis aux prises se sont dissipées, grâce taux directions nouvelles de leur politique extérieure. L'Angleterre ne ferait plus la guerre de Crimée pour la question d'Orient, et la Russie ne la provoquerait pas. Aussi bien voit-on aujourd'hui même les deux gouvernements régler le plus fraternellement du monde un partage d'intérêts en Perse, et ce partage n'est que le prélude d'ententes futures qu'indique et commande la solidarité de leur antagonisme contre l'expansion allemande en Asie comme en Europe.

C'est le fait d'une diplomatie prévoyante et !bien inspirée que de procéder à ces arrangements. Mais s'ils gardent un caractère purement diplomatique, ils ne servent a rien. L'objet essentiel des rapprochements, des ententes, des alliances et autres combinaisons qui signifient la même chose, sous des noms différents, c'est la prévision d'une action commune en cas de guerre offensive ou défensive. On ne vise généralement que la défensive, parce que la défensive est seule avouable. Mais il est toujours facile de se faire déclarer la guerre, lorsqu'on le veut Bismarck l'a prouvé avec éclat' contre l'Autriche et contre nous. Donc, si ces combinaisons ont la guerre pour objet, il devrait s'ensuivre que la préparation à la guerre accompagne l'oeuvre de la diplomatie Depuis quelque temps, on s'est mis chez nous. à réparer tant bien que mal les effets de l'incurie et de la dévastation dont notre défense militaire et navale avait si longtemps et si profondément souffert. Mais il faudrait que l'Angleterre et la Russie fissent le même effort, et il n'apparaît pas qu'il en soit ainsi. En Angleterre, les hommes les plus considérables, les uns militaires, les autres civils, tels que lord Roberts, le plus glorieux soldat de l'armée anglaise, et lord Roseberry, ont réclamé avec éclat l'organisation d'un système militaire qui mît l'Angleterre en possession d'une force égale à ses besoins. Lord Charles Beresford a dénoncé avec la même insistance les défauts et les besoins de la marine. Ces avertissements, tombés de si haut, n'ont pas laissé d'émouvoir l'opinion publique chez nos voisins. Mais cette émotion n'a £oïnt: pénétré dans les consens du ¡ou.

pour le nôtre, le pouvoir en Angleterre est, comme chez nous, aux mains des-radicaux, qu'on appelle là-bas de « petits Anglais » Unie Englanders, ce qu'on pourrait aussi bien traduire par Anglais diminués. Le radical est partout un mauvais serviteur de l'Etat, parce qu'il est d'esprit médiocre et que les spéculations de parti priment toujours chez lui les grands intérêts de la patrie. Il est beaucoup plus enclin à détruire qu'à édifier ou à fortifier, parce qu'il tient la démolition pour l'œuvre même du progrès. Il a été,chez nous un terrible démolisseur de l'armée, et s'il ne continue pas sa besogne dévastatrice, c'est qu'il a constaté dans la conscience nationale une résistance avec laquelle il est obligé de compter. Le radical anglais a les mêmes inclinations. Il n'a pas eu à démolir l'armée nationale, parce quelle existe à peine mais il résiste par une immobilité stupide à l'effort de ceux qui prédisent les dangers prochains, la guerre imminente et voudraient que l'Angleterre eût l'armée qu'il lui faut pour faire face à ces épreuves.

La Russie, Dieu merci, n'est pas enlisée dans les mêmes routines. Elle, compris la leçon formidable de ses récents désastres. Cette guerre malheureuse lui a révélé des vices d'organisation et d'administration, une négligence, une incurie, une corruption, un manque de surveillance, un défaut de préparation, des lacunes dans l'éducation et dans la science du commandement qui diminuèrent de moitié la puissance effective de ses armées. Elle travaille maintenant à réparer ces imperfections. Seulement elle -y -procède avec trop* de lenteur, C'est la méthode intensive qu'il faudrait appliquer à l'organisation militaire, car les événements n'attendent pas. La Russie s'en aperçut, il y a trois ans, lorsque l'Autriche mit la main sur l'Herzégovine et la Bosnie. La Russie n'était pas prête, et M. d'ÎErenthal ne l'ignorait pas. L'était-elle davantage, l'été dernier, lorsqu'on a senti passer sur l'Europe un souffle de guerre ? Oui, sans doute, mais elle n'était pas au point. Et c'est là précisément le défaut qu'il faudrait combler.

L'entente anglo-franco-russe est une combinaison excellente mais il lui manque une âme unique qui l'anime. Bismarck fut ainsi jadis l'âme directrice et souveraine de la triplice. C'est cette impulsion maîtresse qu'il faudrait à la triple entente qui lui fait face. Malheureusement, notre époque est particulièrement pauvre de génie. On fouillerait de long en large la France, l'Angleterre et la Russie sans y trouver la monnaie d'un homme d'Etat. C'est un malheur et un danger.

Jules Delafosse

Ce ui se passe LA POLITIQUE

GOUJATERIES PRÉFECTORALES

Enfin, le gouvernement nous restitue la vraie tradition républicaine, que M. Poincaré, M. Millerand, M. Klotz, d'autres ministres encore, semblaient vouloir négliger.

Au fonds je ne le regrette pas, car il fne'ïaî- lait faire-un certain effort pour louer les hommes d'Etat que le 'Parlement accepte et qu'il défend.

Je m'y -résignais, cependant, car je suis avant tout un homme juste, mais je pensais bien que cela ne durerait pas plus que de raison. Comme on devait s'y attendre, c'est M. Steeg, naguère à l'instruction publique, actuellement à l'intérieur, qui interrompt la série de nos illusions.

En s'installant dans le fauteuil de M. Caillaux, M. Steeg. pensé, sans doute, qu'il ne fa1lait rien changer à la façon d'administrer de ses prédécesseurs et qu'il convenait de laisser les préfets discréditer l'administration, comme ils en ont l'habitude, et au besoin se discréditer eux-mêmes.

C'est ainsi que le préfet d'un département catholique privait récemment du salaire qui le faisait vivre l'aumônier nonagénaire de la prison de ville.

Il est vrai que cette décision serait au dire du préfet simplement provisoire dès que l'aumônier sera mort, on rétablira le crédit sans lequel il ne peut subsister.

Aujourd'hui, c'est le préfet de Meurthe-etMoselle qui se recommande à la bienveillance de son ministre par une décision dont nos lecteurs apprécieront la délicatesse et le goût. Le maire de Nancy avait prié son député, le commandant Driant, de présider la distribution des prix des cours municipaux d'adultes, Sur quoi, le préfet se fâche tout rouge, hérisse ses plumes et fait défense au maire de donner suite à son invitation.

Le commandant Driant est cependant un républicain sans doute, il se distingue des autres en honorant son parti, et je reconnais que le préfet de Meurthe-et-Moselle est en droit de considérer sa parfaite correction, la droiture et l'honorabilité de son caractère comme une critique, peut-être même une injure, à l'égard des officiels de son groupe mais ce sont là des choses que l'on ne doit pas avouer, surtout quand on représente le gouvernement. Le préfet, s'il avait été mieux avisé, eût félicité le maire de Nancy du choix qu'il avait fait de M. Driant pour présider sa distribution 1 des prix.

M. Driant, eût-il dit, est un bon républicain sans doute, nous ne sommes pas de la même école et nos idées ne ressemblent guère aux siennes, mais la république est un régime de liberté, comme nul ne l'ignore chacun a le droit de la servir selon ses goûts et son tempérament et puisque nous nous inclinons devant M. Jaurès et que nous fraternisons avec M. Thalamas, nous devons nous accommoder de M Driant, qui est, à la fois, plus libéral et plus modéré.

En parlant ainsi, ou tout au moins dans ce sens, le préfet de Meurthe-et-Moselle se fût grandement honoré il eût en tous cas donné un exemple de tolérance républicaine auquel tous les partis même le sien eussent applr.ufh.

Il a préféré ce que ses amis appellent la manière forte. Je le regrette pour son ministre et pour lui-même, mais, entre nous, je n'en suis pas fâché. L. Desmoulins. ÉCHOS' DE PARTOUT LA 'CONDAMNATION DE Mgr DUCHESNE

Dans les milieux religieux autorisés, on se montre quelque peu sceptique sur l'authenticité du mémoire justificatif attribué à Mgr Duchesne par le journal anticlérical l'Italia, qui le publie, avec, veut-on nous faire croire, l'approbation du Saint-Père C'est un peu, nous diton, comme si l'archevêque de Paris autorisait un de ses curés à présenter sa défense sur un point doctrinal dans la Lanterne Il est raconté, notamment, dans ce mémoire, que l'Histoire ancienne de V Eglise aurait été approuvée et bénie par Pie X, avant qu'elle fût condamnée par les Congrégations de la Consistoriale et de l'Index

Certains commentateurs dudit « mémoire » usent de cette assertion gratuite pour tenter d'opposer Pie X aux Congrégations de la Consistoriale et de l'Index. Ils en tirent cette conséquence pour le moins étrange, en réponse évidemment aux déclarations que nous faisait avant-hier une éminente personnalité de l'archevêché, qu' et exagérer l'autorité « limitée » de la Congrégation de c'est diminuer

dans. une, proportion égale celle du Pape tj*i~ même Cette affirmation est tellement paradoxale que nous ne la discuterons pas. Quoi qu'on veuille, l'autorité morale et doctrinale des décisions, de l'Index est aussi haute qu'incontestable. L'immense retentissement qu'a eu la condamnation de Mgr Du'chesne n'en estelle pas la meilleure preuve?

Ajoutons que, comme nous le faisions prévoir avant-hier, la soumission du prélat est imminente.

C'est sur l'emplacement choisi par Alexandre Dumas fils lui-même, que- sera érigée, place Malesherbes, la statue de son grand-père,. le général Dumas.

Voilà quinze ans que le héros de BrixCn attend cet hommage posthume. La plupart des membres du comité du monument ont disparu et parmi eux, le général Février, Victorien Sardou, Alexandre'Duirias fils. Le don de l'actuel ministre de la guerre permettra d'aboutir à une prompte solution et l'été prochain les Parisiens pourront contempler sur la même place la mâle physionomie du vaillant soldat se dressant au milieu des deux autres Dumas. La maquette du monument est terminée. Elle est due au statuaire Alexandre Moncel. On sait que le' général Dumas était mulâtre ceci nous rappelle un mot de Dumas fils à une jeune femme. Voire père, monsieur Alexandre Dumas, fit-elle, était créole ?.

Oui, madame. '̃ Et votre grand-père ? i Madame, il était nègre Et il à continué à l'être toute sa vie. v. Les centenaires sont rares, croit-on généra- lement or le hasard a fait tomber entre nos mains une publication allemande qui nous' donne à cet* égard un démenti curieux. L'Office impérial d'hygiène de Berlin, vient, en effet, de. publier le relevé du nombre des centenairesvivants en Europe, et, fait bizarre, le pays où l'on compte le plus de personnes ayant atteint l'âge de cent ans est la Bulgarie. On y compte, en effet, le chiffre extraordinaire de 3,883 centenaires après vient la Roumanie, avec 1,074 la Serbie, 573 l'Espagne, 410 la France, 213 l'Italie, 197 l'Autriche-Hongrie, 113 l'Angleterre, 92 la Russie, 89 l'Allemagne, 7G la Norvège, 23 la Suède, 16 la Belgique, 5 le Danemark, 2, et la Suisse, 0.

N'est-ce pas vraiment extraordinaire, cette longévité dans ce tout petit pays qui ne compte pas plus de quatre millions et demi d'habitants ? Faut-il en conclure que c'est en Bulgarie que s'établira cette fameuse race de surhommes prédite par Nietzsche pour l'humanité future ? NOTES D'UN VIEUX GARÇON

TOUS PONCEPILATE!

Si j'étais accuse d'avoir volé les tours de Notre-Dame, je commencerais par prendre la fuite. La phrase n'est pas de moi, mais je la prends à mon compte. Oui, je prendrais la fuite, et comme un zèbre.

Avez-vous, me direz-vous, une si médiocre confiance dans la justice de votre pays? Je ne dis pas cela tout à fait. Je reconnais que nos magistrats, quand ils ne doivent point leur avancement à la seule politique, sont instruits, qu'ils connaissent leur métier, qu'ils s'efforcent de juger le plus équitablement possible: Oui, je reconnais :tout cela. Ou plutôt je le» reconnaissais..Mais, .à présent. je suis troublé, j'ai quelques doutes. Et voilà pourquoi je prendrais courageusement la'fuite si on m'accusait de ce que vous savez.

Mais d'où vient ce trouble? Quelle est la cause de ces doutes? Eh bien voilà. C'est la faute à la blanchisseuse et à son compte. Quelle blanchisseuse? Celle du ministère de la justice. Quant à son compte, vous l'avez lu hier dans le Gaulois. Ce compte s'élève à soixante-seize douzaines de serviettes. Oui, le ministère de la justice donne chaque année à blanchir près de mille essuiemains.

Il est évident, ainsi qu'on le faisait remarquer, que les bureaux de la place Vendôme ne sauraient, à eux seuls, avoir besoin de mille serviettes. Assurément, on en envoie en province. Les cours d'appel, les cours d'as- sises, les tribunaux, et même les justices de paix, en reçoivent sans doute un certain nombre, suivant leur importance. Car, autrement, ce serait du gaspillage. Et l'on sait que le gaspillage est inconnu dans nos administrations. Eh bien, voilà ce qui m'effraye. Voilà ce qui devrait effrayer tous ceux qui sont susceptibles d'avoir affaire à la justice, c'est-à-dire tous les citoyens. Comment! Voilà un pays où tous les magistrats se lavent les mains! Des magistrats qui se lavent les mains, mais c'est à faire frémir! Ce n'est plus de l'impartialité, c'est du je-m'enfichisme Sauve qui peut! ARNOLPHE. Encore une vieille maison de Paris, menacée de disparaître L'immeuble situé au numéro 6 de la rue de Tournon vient d'être vendu par les héritiers de Mme Dallez, et bientôt, sans doute, la pioche du démolisseur s'attaquera à ces mu- railles vénérables qui datent du dix-septième siècle. L'hôtel, de pur style*L5uis XIII, avec sa cour imposante, est bien connu des Parisiens. Il fut construit, vers 1620, sur l'emplacement des vastes jardins du palais de Concini, par la famille de Chantai, alliée à Mme de Sévigné. L'illustrer écrivain en parle dans ses lettres, au sujet d'une visite qu'y" fit le Roi-Soleil. Le mare- chai Lannes, duc de Montebello, l'habitait entre. deux campagnes. Plus tard, le docteur Ricord, médecin de Napoléon III, y donna des fêtes fort courues et fit peindre dans l'escalier d'honneur l'aigle gigantesque qu'on y voit encore. A l'heure actuelle, M. Ribot, Facadémi-, cien-sénateur, y occupe une suite d'appartements aux salons magnifiquement décorés M. Georges Louis, notre ambassadeur en Russie, y possède un pied-à-terre orné de peintures du temps.

Le vaudeville naquit en France. Tout le monde sait cela.

En voici un exemple savoureux qui nous vient d'une toute petite commune perdue dans les Alpes Chateauroux.

Ghateauroux-lës-Alpes possédait une modeste mairie, qui, un beau jour, chuta, de vieillesse. On commença sa reconstruction voici huit arts. Les fonds manquèrent un matin.'Les maçons laissèrent leurs truelles, attendant les capitaux qui se refusèrent à venir. Pour ne point laisser chômer l'état civil, l'instituteur prêta son école au maire et à l'adjoint, et les mariages se célébrèrent sur le pupitre ou le maître apprend l'a b c aux'bambins de la montagne. On pouvait patienter de la sorte. Mais, l'autre jour, une brouille survint entre le maire et l'instituteur. Ce dernier posa les registres de l'état civil devant sa porte et le maire se vit dans l'obligation de les emporter dans sa ferme. Dès lors, il maria dans sa cuisine.

Or, la semaine dernière, une jeune fille de l'endroit, mariée dans cette cuisine, refusa à la sortie de suivre son mari au domicile conjugal, affirmant que son mariage n'était pas valable comme ayant été célébré dans un local sans solennité. Le mari, furieux, vient d'envoyer du papier timbré à sa femme pour l'obliger d'obéir à la loi. On est entêté des deux côtés on plaidera. Curieux procès, en vérité, qui eût fait la joie de Jules Moinaux.

Il fut un temps où on se passionnait en France pour les énigmes et les charades, mais ce sport semble tomber en désuétude. En Chine, il n'en est pas de même et c'est le passe-temps favori des habitants du Céleste-Empire. Nous trouvons dans un journal chinois une énigme qui a fait chercher la solution bien longtemps, paraît-il, par ses abonnés et dont la solution n'a raît-il, par ses abonnés. Il faut avouer qu'elle était fort difficile. La voici

Jeune, je suis vert vieux, je suis jaune bien battu, je deviens souple si j'accompagne un ami longtemps, il est pressé de me quitter jeune, on m'honore vieux, on me rejette. Nous laisserons à nos lecteurs le soin de la trouver et si, dans huit jours, nous n'avons pas reçu de solution^ nous .vous la révélerons. Cet te

devinette 'abîmera, beaucoup, de tablature ajoutons qu'il n'y a aucun jeu de mots.Mieux,' meilleur marché.. C'est Au Châtelet" » (Etablissements Allez frères) que chacun a intérêt de s'adresser pour l'outillage de jardin supérieur et garanti les châssis de couche, bacs et caisses à fleurs, brouettes, articles de basse-cour, couveuses, poulaillers, chenils, marquises, roseraies, grilles, chauffage central, chauffage de serres. Le catalogue est intéressant à consulter. Devis économiques envoyés sans frais par les Etablissements Allez 'frères pour toutes ces spécialités.

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NOUVELLES A LA MAIN

Devant les Variétés, un passant glisse, tombe et sa main va'porter'en plein sur un souvenir màlodorant. laissé là par un chien.

11 se relève, furieux.

Faut pas vous fâcher, lui dit un gavroche présent à la scène, vous aussi vous l'avez le bonheur sous la main,

Un Domino

NOTES SOCIALES Je lisais ces jours-ci un réquisitoire indigné de M. Henri Lavedan contre les commerçants qui souillent les murailles de Paris par leurs abominables réclames. J'ai trop souvent exprimé le dégoût que me causent ces débauches de publicité, pour ne pas être heureux de voir mon sentiment traduit avec tant d'esprit, de verve et d'éclat. D'ailleurs, pour peu qu'on écoute les propos du public, on remarque que celui-ci commence à être exaspéré par ces obsédantes horreurs. Nous en avons assez despalissades revêtues d'affiches multicolores, des pignons barbouillés de bleu et de rouge, des colossales pancartes érigées sur les toits, des enseignes lumineuses, de tout ce carnaval sordide et criard qui déshonore les architectures, les perspectives et jusqu'au ciel de Paris. Le remède ? Une loi a été votée qui permet aux préfets de s'opposer à tout affichage dans un périmètre qu'eux-mêmes sont chargés de tracer autour des monuments et des sites classés. J'ignore s'il existe un arrêté préfectoral pris en vertu de cette loi. Dans tous les cas, le préfet de la Seine s'est toujours refusé à user de ce moyen.

Pour ne pas appliquer la loi, on allègue qu'en interdisant l'affichage aux environs des monuments et des sites classés, on obtiendra un bien'mince résultat, et que beaucoup de • quartier-s --resteront abandonnés aux entrepre- neurs de publicité, Sur un plan de Paris, tracez une zone de protection autour de tous les monuments historiques, et vous verrez que les parties les plus anciennes, les plus belles, les plus précieuses de la ville seront ainsi sauvegardées donnez-nous cette première satisfaction nous verrons ensuite ce qu'il faudra faire pour le reste de Paris.

Mais voici l'objection la plus grave restreindre cette sorte de publicité, c'est arrêter, dit-on, « l'essor du commerce », méconnaître les «exigences de la vie m,oderne », les « nécessités du progrès », etc. C'est surtout si l'on veut être franc gêner « l'intéressante industrie » des entrepreneurs de publicité. L'essor du commerce ? Ce qui force les commerçants à mettre sous nos yeux des réclames toujours plus vastes, toujours plus agressives, c'est la concurrence. L'interdiction étant la même pour tous, personne n'en souffrira. Quant à l'industrie menacée, nous connaissons l'argument c'est le même qu'en toute occasion l'on oppose à qui défend l'intérêt public. Il y a quelques semaines, quand le conseil municipal voulut frapper d'une taxe élevée les prospectus distribués sur la voie publique, la Chambre s'y refusa des députés déclarèrent qu'on allait frapper une « intéressante industrie »; Le èùnsôiî. municipal qui, en'cette affaire,* se sentait soutenu par les Parisiens, recourut à un autre procédé un arrêté de police a défendu de jeter des papiers dans la rue. L'arrêté est à peu près obéi, et personne n'a osé protester. Il en ira de même si l'administration se décide à nettoyer les murailles, comme elle a fait des trottoirs de Paris.

Un Désabusé

Bloc- Notes Parisien UNE EXPÉRIENCE TRAGIQUE

Un inventeur

saute de la tour Eiffe

et se tue

C'est seulement lorsqu'ils ont réussi que l'on dit des grands inventeurs qu'ils sont des « fous de génie n. Aussi est-il à craindre que celui qui a trouvé la mort hier dans l'expérience tragique d'un parachute pour aviateur ne recueille que la moitié de ce nom.

Sa fin horrible et inutile n'aura démontré qu'une audace voisine de la démence. Et il apparaîtra à bien des gens qu'il fut victime d'un manque d'équilibre cérébral plus encore que de celui de l'appareil qui devait le descendre doucement du premier étage de la Tour Eiffel et le précipita sur le sol, membres rompus, mort sur le coup. Voici d'ailleurs le récit de l'expérience tragique M. Reichelt, l'inventeur d'un vêtement-parachute pour aviateur, était établi tailleur pour dames au 8 de la rue Gaillon. Ses affaires étaient prospères et sa clientèle, composée surtout d'Autrichiennes de-passage à Paris, ses compatriotes, se plaisait à l'entendre, durant les longs essayages, parler de son invention, le vêtement-parachute, qui, allait donner à tous'tes aviateursla sécurité absolue et mettre ce sport trop souvent mortel à la portée des plus timorés.

Il est vrai que les expériences faites à l'aide de mannequins, dans la cour de l'immeuble, n'avaient guère été concluantes. Mais l'inventeur attribuait cet insuccès au peu de hauteur du point de chute.

Le vêtement n'a pas le temps de prendre le contact de l'air; mais, si j'avais cinquante ou cent mètres au lieu de vingt-cinq, le résultat serait merveilleux. Je le prouverai un jour, répétait l'inventeur tenace. A force de sollicitations, M. Reichelt obtint l'autorisation d'expérimenter son parachute de la première plateforme de la Tour Eiffel. Bien entendu, pour tout le monde il s'agissait d'une expérience avec mannequin; mais l'in- venteur, sur de lui, rêvait de frapper un grand coup en se substituant au dernier moment au poids mort prévu. A ce propos, enregistrons la protestation-de la Préfecture de police, qui se défend d'avoir autorisé; comme on l'avait dit, ,le malheureux Reichelt à se jeter de la plate-forme de la Tour Eiffel.

« Nous avons eu maintes fois, nous'dit-on au cabinet du préfet, l'occasion de délivrer des autorisations' à des inventeurs pour des essais de parachute; mais il était bien entendu que ces expériences devaient toujours avoir lieu avec des mannequins. Il en avait été de même pour M. Reichelt. Le préfet de police avait pris des mesures d'ordre jour interdire au public la zone autour de îaçiueHe

devait s'opérer la chute du mannequin qui devait servir ¡¡ ,J'expérience, Mais la victime de cet affreux accident ne fut jamais autorisée à risquer sa vie en se lançant dans le vide, même après avoir revêtu un costume spécial. » En compagnie d'un ami et revêtu de son vêtement, M. Reichelt arrivait hier, à huit heures du matin, à la Tour Eiffel. Quelques journalistes sportifs, des photographes et des professionnels de l'aviation prévenus de l'expérience l'attendaient.

Jeune, alerte, de taille élancée, M. Reichelt se prêta volontiers à l'examen des curieux. Il s'était revêtu d'une espèce de^combinaison de couleur brune, un peu plus volumineuse qu'un vêtement ordinaire. La poitrine ressemblait au plastron bombé d'un escrimeur et, sur les épaules, les ailes repliées de l'appareil semblaient de lourdes épaulettes qui ne détruisaient pas l'harmonie. L'aspect de l'ensemble était en résumé élégant et l'inventeur faisait justement remarquer à tous que son vêtement ne gênait pas les mouvements.

Avec un calme absolu et une belle humeur apparente, M. Reichelt donnait des ordres pour que des barrages réservassent libre une place suffisante à la descente de son appareil.

On s'étonna bien un peu de ne pas voir le mannequin annoncé, puis on apprit sans trop d'étonnement que le jeune tailleur entendait expérimenter lui-même et en personne son parachute. L'intérêt de l'expérience redoublait, on crut même au succès. D'ailleurs, en matière d'aviation, n'est-on pas habitué à toutes les audaces, à toutes les surprises?

Là-haut, sur le rebord extérieur de la plate-forme, on aperçut bientôt M. Reicheit, que ses amis aidaient à déplier son appareil. L'opération demanda près d'une minute, qui sembla un siècle.

On fit remarquer justement qu'une semblable opération ne serait pas possible à l'aviateur qu'un accident précipite de l'air vers le sol.

Enfin, tout à coup, l'inventeur s'élance dans l'espace d'un bond qui parait prodigieux. L'appareil est. à demi ouvert et la chute commence assez lente. Mais, instantanément, éllé augmente de vitesse. L'appareHs'est re- plié subitement sur l'homme et une masse s'abat, dans un claquement sourd, sur le sol où elle s'enfonce. Les assistants poussent un cri d'horreur, douloureusement impressionnés par l'issue fatale de cette expérience tragique.

C'est en vain qu'ayant dégagé le malheureux inventeur de son appareil qui l'enveloppe comme un linceul, on tente de le rappeler à la vie; il est mort et il n'y a plus qu'à ramener à son domicile le cadavre de ce malheureux, qui croyait quelques secondes plus tôt tenir enfin la gloire et la fortune.

A quel état d'esprit, à quel sentiment a pu obéir le malheureux tailleur, lorsqu'il se résolut à sa téméraire tentative? Nous ne l'aurions jamais su si le hasard ne nous avait mis, hier soir, en présence d'un ami de M. Reichelt, confident de ses projets.

Voyez-vous, me dit-il, si bizarre que la chose puisse paraître, mon malheureux ami est mort victime de la loi qui ne protège les inventeurs que d'une façon dérisoire. »Sans grandes ressources, malgré le bon état de ses affaires commerciales, il ne pouvait songer à faire breveter son invention pour toutes les parties du monde. » II s'était imposé de lourds sacrifices pour s'assurer la propriété de son vêtement-parachute au moins en France et dans quelques pays voisins. Mais il lui fallait exploiter son invention dans le plus court délai. U.n brevet ne dure que quinze années et plus on approche de la date où il tombe dans le domaine public, plus les commanditaires se trouvent difficilement. Le succès retentissant de sa descente de la Tour Eiffel lui assurait une commandite et c'est pourquoi il s'est trop hâté de tenter l'audacieuse expérience. »

Cette déclaration nous rappelle les déboires qu'eurent à subir tant d'autres inventeurs pauvres. Si tous ne payèrent pas de leur vie la défense de leur invention, beau- coup se virent dépouillés.

Rappelons, par exemple, que M. Fernand Forest, l'inventeur du moteur 'a' explosion la clef de l'automobilisme et de 'aviation ne put jamais exploiter son invention des rayons tangents; dont -toutes les bicyclettes sont aujourd'hui pourvues. Son moteur à explosion luimême n'entra dans le domaine de la pratique que quatorze ans après qu'il l'eut fait breveter.

Cet exemple, cité entre cent autres aussi connus, démontre combien il serait utile d'assurer aux inventeurs la propriété réelle et effective de leurs découvertes. L'inventeur avec ou sans génie est toujours un fou. utile à la société. C'est donc à la société à le protéger et à le défendre contre tous et contre. lui-même. Tout-Paris

FRANCE ET ITALIE

Un Nouvel

Incident?

LE BOMBARDEMENT D'HODÉIDAH Cette laborieuse guerre italo-turque est décidément un nid à chicanes. Ce n'est plus cette fois dans la Méditerranée, mais dans la mer Rouge, que se place le nouvel incident, sur lequel on ne possède d'ailleurs aucun renseignement officiel, aucun détail précis l'irritabilité excessive d'une partie de l'opinion s'inquiète malheureusement fort peu de ce détail qui a pourtant quelque importance. Dans le cas actuel, son émotion paraît prématurée il s'agit, en effet, du bombardement de Hodeidah par les bateaux italiens que nous avons signalé hier. On a dit que le matériel d'un chemin de fer exploité par une société française aurait été détruit par les obus italiens.

Or, informations prises, voici ce que l'on sait Une société ottomane, constituée avec des capitaux français pour la plus grande part, construit en ce moment un chemin de fer destiné à relier le port d'Hodeidah, situé au sud de la péninsule arabique, en face de la colonie italienne de l'Erythrée, q.vec la ville de Sana, dans le Yémën. Lorsque les Italiens décidèrent de proclamer le blocus de la côte ottomane dans la mer Rouge, ils envoyèrent naturellement des navires devant Hodeidah et invitèrent, le 27 janvier dernier, les agents de la Compagnie à évacuer dans un délai de cinq jours les établissements de cette société, à l'expiration duquel il serait procédé au bombardement, conformément à l'article 2 de la convention de La Haye. Aux termes de l'article 1er de cette convention concernant le bombardement par des forces navales en temps de guerre,il est interdit de bombarder par des forces navales ports, villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus.

Mais l'article 2 comporte les restrictions suivantes

Toutefois ne sont pas compris dans cette inter.diction les ouvrages militaires, établissements militaires ou navals, dépôts d'armes ou de matériel de guerre, ateliers et installations propres à être utilisés pour les besoins de la flotte ou de l'armée ennemie, et les navires de guerre se trouvant dans le port. Le commandant d'une force navale pourra, après sommation avec délai raisonnable, les détruire par le canon, si tout autre moyen est impossible et lorsque les autorités locales n'auront pas procédé à cette destruction dans le délai fixé.

Il n'encourt aucune responsabilité dans ce cas pour les dommages involontaires qui pourraient être. occasionnés par le bombardement. Si des nécessités militaires exigeant une action immédiate ne permettaient, pas d'accorder de délai, il reste entendu que l'interdiction de bombarder la ville non défendue subsiste comme dans le cas énoncé dans l'alinéa premier et que le commandant prendra toutes les dispositions voulues pour qu'il en résulte pour cette ville le moins d'inconvénients possible.

La situation d'Hodeidah rentrait-elle dans les cas prévus par l'article 2 ?

Il est difficile de savoir, jusqu'à plus ample informé, si la ville possédait ou non des ouvrage de défense en revanche, on ne saurait soutenir que le chemin de fer ne répondait pas à la catégorie des « installations propres à être utilisées pour les besoins de l'armée ennemie ». Par le fait même que cette voie ferrée était destinée à mettre en communication la côte avec l'intérieur de la région, il esi certain

qu'elle affectait un caractère stratégique dont l'importance n'est pas niable. Dès lors, les autorités italiennes étaient en droit de là détruire, et notre protestation ne saurait être fondée. Du moins tel est l'argument des légistes.

Ils disent également que la société lésée ne peut demander de réparation qu'au gouvernement ottoman,et cela pour deux raisons:d'abord du fait que l'art. 2 de la convention de La Haye spécifie que le commandant d'une force navale n'encourt aucune responsabilité pour les dommages involontaires occasionnés par le bombardement, ensuite parce que la Compagnie s'étant constituée société ottomane, concessionnaire de travaux sur le territoire ottoman, est obligée de subir les conséquences de l'état de guerre au même titre que toutes les entreprises turques. Les textes sont formels il est néanmoins nécessaire, avant de porter une affirmation fondée sur ce nouvel incident, de connaître exactement les circonstances dans lesquelles il s'est produit. Le gouvernement français a télégraphié a Ohock et à Constantinople pour demander des renseignements, puisque nous n'avons paa de représentant officiel à Hodeidah il a pris également des mesures pour que le premier paquebot des Messageries maritimes en partance pour la mer Rouge recueille à son bord nos compatriotes au service de la HodeidahSana.

En attendant les résultats de l'enquête, il nous paraît à la fois maladroit et dangereux de céder à une indignation qui peut-être ne se justifie pas. L'opinion, sans doute, ne raisonne pas elle s'émeut et c'est naturel du fait qu'il se trouve des nationaux français par- mi les employés de la Compagnie lésée elle s'imagine qu'il y offense nationale et violation du droit des gens parce qu'elle ignore les lois de la guerre et qu'elle méconnaît les droits des belligérants.

N'empêche que ces lois existent, que ces droits sont spécifiés; aussi bien, que les intérêts particuliers qui en pâtissent protestent, on le conçoit mais il appartient, semble-t-il, au pays de montrer plus de circonspection dans son attitude, car il se peut qu'il soit lui-même oblig/ un jour d'invoquer les conventions qu'il -con- teste aujourd'hui, ,1e dis ceci en thèse générale. Pour ce qui concerne les incidents frarico-ità- liens, je pense qu'il importe de prendre d'im. médiates mesures pour mettre fin à ces contestations dont la répétition trop fréquente constitue un danger dont on ne calcule pas suffisamment la gravité. Qu'attend-on pour réunir la commission franco-italienne chargée d'élaborer un règlement provisoire exclusivement applicable aux deux nations, qui déterminera d'une façon nette et précise les droits respectifs du belligérant et du neutre ? Il n'y a plus un'jour à perdre si l'on veut prévenir d'irrépa- rables événements..

René d'Aral •

UN

Précurseur PAR M'06 FERNAND GREGH ̃ La publication de sa correspondance vient de remettre pour quelques jours à la lumière de l'actualité la figure vaporeuse et charmante de Gérard de Nerval. Tel il apparaissait à ses contemporains, tel il revient à la postérité par éclipses. Sans doute, il fut fantasque dans sa Vie et si bien même que la plupart n'en connaissent que d'absurdes et nitovables anecdotes et se le représentent surtout comme une manière de pauvre Alcibiade, qui, au lieu de cou- per la queue de son chien, menait un homard en laisse par les rues et s'en fut, d'excentricités en excentricités, sombrer dans une totale démence.

La vérité est tout autre, et cette correspon- dance rassemblée nous montre un Gérard de Nerval plus semblable à ses livres qu'à sa légende. Il convient de s'en féliciter. Baudelaire aussi a une légende, une mauvaise, légende de haschiclrin, lui qui réprouvait jusqu'à l'emploi du tabac et professait qu'une œuvre doit être l'expression d'un tempérament pur de toute excitation artificielle On sait maintenant à quelles atroces difficultés matérielles l'auteur des Fleurs cdu Mal était en proie Gérard de Nerval connut à peu près les mêmes avec un peu plus de misère encore, et cette différence qu'il fut toujours sans amertume, sinon sans tristesse ses lettres, après ses volumes, en témoignent encore aujourd'hui. Une correspondance réunie comme celle que nous offre M. Jules Marsan, avec un ordre chronologique et des notes, dûment explicatives, est, somme toute, la meilleure ouverture que nous ayons sur une vie. Et même elle nous renseigne en quelque sorte mieux qu'un journal, puisque d'un journal on est toujours enclin à se méfier un peu celui qui le tient n'a-t-il pas, en effet, quelque arrière-pensée de publication ? Tandis qu'une correspondance et surtout une correspondance de cette époque-là, où la rage d'exhumation littéraire qui nous pousse maintenant à diminuer, sous l'apparence de recherches historiques et critiques, les plus grandes mémoires, n'existait pas encore c'est un document 'de premier ordre. Entre les mille aspects d'une âme, un recueil de lettres nous en donne au moins un profil accentué. Celles-ci, comme il sied, nous renseignent .plus sur la vie de Gérard que sur son art, bien qu'il y parle parfois de son avenir et de la tac- tique littéraire que doit suivre un écrivain .avec une lucidité fort éloignée de sa légende. On y voit, dans toutes leurs circonstances intimes, son commerce amical, sa bonté attendrie, son courage sans apprêt et sa piété filiale. Gérard est, comme Musset, un a Enfant du Siècle ». « Pendant les guerres de l'Empire, tandis que, les maris et les frères étaient en Allemagne, les mères inquiètes avaient mis au monde une'gé- nération ardente, pâle, nerveuse. Conçus entre deux batailles, élevés dans les collèges aux roulements des tambours, des milliers d'enfants se regardaient entre eux d'un œil sombre, en essayant leurs muscles chétifs. De temps en temps, leurs pères ensanglantés apparaissaient, les soulevaient sur leurs poitrines chamarrées d'or, puis les posaient à terre et remontaient à cheval. Ce n'est pas que M. Labrunie père fut un guerrier remarquable nulle annale xjè Apporte qu'il eut jamais la poitrine ensanglantée, ni même chamarrée. C'était un simple major de la grande armée, qu'une femme trop amoureuse suivit jusque sous les frimas russes,.ou elle mourut. Vraisemblablement son fils tenait plus d'elle que de ce père, égoïste jusqu'à l'indifférence, et qui, pour ne pas s'embarrasser d'une émotion, laissait, sans l'aller voir, son enfant agoniser chez le docteur Blanche.

Heureusement, des amis plus attentifs que le père entouraient Gérard. Il est touchant de suivre au cours de ce livre la continuité de ses affections. Il inspirait le dévouement et^ la fidélité et il semble bien qu'il ne pouvait en être autrement. On a déjà cité sa lettre à la princesse de Solms: Gérard, avec une grâce émue et un peu enfantine, la prie de réserver pour une pauvre famille à laquelle il vient de donner lui-même tout ce qu'il possédait (un manteau et quarante centimes !) la somme qu'elle devait consacrer à lui acheter un .beau livre rarissime et depuis longtemps convoité. Un tel geste venant de tout autre surprendrait, et semblerait presque une ostentation de char, rite mais cette source de tendresse est natu^ relie chez lui. Pans toutes ces lignes tracées ajj