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Titre : Bulletin de la Société d'archéologie et de statistique de la Drôme
Auteur : Société d'archéologie, d'histoire et de géographie de la Drôme. Auteur du texte
Éditeur : au secrétariat de la société (Valence)
Date d'édition : 1909
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34478919w
Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34478919w/date
Type : texte
Type : publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 30692
Description : 1909
Description : 1909 (T43).
Description : Collection numérique : Fonds régional : Rhône-Alpes
Droits : Consultable en ligne
Droits : Public domain
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4870079
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2008
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REVUE TRIMESTRIELLE
BULLETIN DE
LA SOCIÉTÉ 'i LA SOCIETE DÉPARTEMENTALE^
D'ARCHEOLOGIE
DE STATISTIQUE
DE LA DROME
ANNÉE igog (JANVIER)
168= LIVRAISON
VALENCE
AU SECRÉTARIAT DE LA SOCIÉTÉ, RUE FARNERIE, 31
IMPRIMERIE DE JULES CÉAS ET FILS
TABLE .DES MATIÈRES de la 168° Livraison
1. TABLEAU DES MEMBRES DE LA Société 5 2. EUGÈNE VILLARD, par Henry VASCHALDE 11 1 3. LE TRAMWAY DE VALENCE A PONT-EN-ROYANS, par A. LACROIX 25 4. TOPONYMIE DF, LA DRÔME. DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE DES COMMUNES, PEUPLES ANCIENS, FLEUVES, RIVIÈRES, MONTAGNES DU DÉPARTEMENT DE LA DRÔME, par M. A. Béretta 33 3 5. HISTOIRE DE SAINT-PAUL-TROIS-CHATEAUX, par M. l'abbé Fillet 65 6. LA POPULATION DES TAILLABILITÉS DU Dauphiné EN 1698, par R. V. C. 63 7. L'IsÈRE A Beaumont-Monteux. par Monsieur l'abbé FROMENT 79 8. Délibérations CONSULAIRES DU COMTÉ D'ALBON (DE 1708 A 1743), par Prosper VALLERNAUD 90 9. ESPENEL, par M. A. Lacroix 105 10. SÉANCE DU 26 octobre 1908, par M. A. LACROIX. 107 11. CHRONIQUE, par M. A.Lacroix 108 12. BIBLIOGRAPHIE, par M. A. Lacroix 110 v- -.s.
«La Société laisse à chaque auteur l'entière responsabilité des opinions qu'il émet. »
Nota. Les cotisations sont exclusivement recouvrées par les soins du CRÉDIT Lyonnais, chargé de présenter les quittances.
En cas de changement d'adresse, prière d'en informer de suite, le Trésorier, M. Etienne MELLIER, Villa des Lierres, à Valence-sur-Rhône.
SOCIÉTÉ DÉPARTEMENTALE
D'ARCHÉOLOGIE ET DE STATISTIQUE DE LzA TitROME
TOME QUARANTE-TROISIÈME
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TABLEAU DES MEMBRES
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Présidents d'honneur
M le Préfet de la Drôme.
Mgr l'Evêque de Valence.
M. le chanoine Ulysse CHEVALIER, membre correspondant de l'Institut, à Romans.
Membres du Bureau
M. BRUN-DURAND, membre non résidant du Comité des travaux historiques, Président, à Crest.
M. Nugues (Alphonse), à Romans ) (
M. BELLET (Charles), à Tain n > Vice-Présidents M. Emblard (Léon), à Valence..
M. LACROIX (André), Archiviste-départemental, Secrétaire, à Valence.
M Colomb ("Victor). Sea étaire- Adjoint, à Valence. M Mellier (Etienne), Trésorier, à Valence.
M. Tracol, Trésorier -Adjoint, à Valence.
Membres titulaires
MESSIEURS,
Arces (le marquis D') au château du Breutl, par Maltat (Saône et Loire).
BABOIN (Aimé), industriel, à Saint-Vallier.
BARBIER, avocat, à Valence.
Baume-Dupuy-Montbrun (Marquis de la), à Montélimar. BELLIER DU CHARMEIL, ancien magistrat, avocat, à Valence. BÉRANGER (Rodolphe), homme de lettres, à Pierrelatte. BERGER (Félix), Ingénieur des Arts et Manufactures, à Crest. Bernon (J. de), docteur en droit, rue des Saints-Pères, 3, à Paris.
BOZZINI (Antoine), industriel, à Tournon.
Boijcod (Auguste), à Saint-Vallier.
Bouffier (Amédée DE), à Livron.
CÉAS (Jules), imprimeur à Valence.
CHABRILLAN (Marquis DE), au château de Saint-Vallier. CHARRILLAN (le comte Aymar DE), à Tugny, par Rethel, (Ardennes).
Chatenier, directeur honoraire d'Ecole supérieure, Villa Genevraie, à Miribel, par Crépol.
CHEVALIER (le chanoine Jules), ancien professeur au grand séminaire, à Romans.
CLERC (Alphonse), Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, à Valence
CLERC (Louis), Vice-Président du Tribunal civil, à Valence. Du PORT-Roux, à Romans.
FAURE-BIGUET, conseiller à la Cour de cassation, rue de Babylone, 4, à Paris.
FAURE-BIGUET (Gabriel), général en retraite, à Valence. FAURE, ancien président du Tribunal, à Valence.
FA VIER, pharmacien de ire classe, à Pierrelatte.
Fière (Louis), directeur d'Assurances, à Romans.
FLORANS (le marquis DE), à la Roque-d'Anthéron (Bouches-duRhône).
FONTGALLAND (Anatole DE), à Die.
FORQUET DE DORNE, conseiller honoraire à la Cour de cassation, à Angers.
FRAPPA, industriel, inspecteur de l'Ecole pratique, à Romans. FROMENT (l'abbé), curé de Beaumont-Monteux.
Fournilr (Albert), industriel, à Tain.
GAILLARD, avoué, à Valence.
GAILLARD-BANCEL (DE), député, à Allex.
GALLE, agent-voyer en chef des Hautes-Alpes, à Gap. GALLIER (Humbert DE), rue Jouffroy, 84, à Paris.
GAMBERT (Louis), propriétaire, à Tain.
GIRARDON, avocat, à Divajeu (Drômc).
GONSSOLLIN, fondé de pouvoir au Crédit Lyonnais, à Lavald'Aix, par Brignoud (Isère).
Hoffet (Henri), administrateur des Chantiers de la Buire, Lyon, Place Puvis-de-Chavanne, 2.
MALHERBE (de), colonel d'artillerie en retraite, à Valence. MAURIN (Alcide), docteur en médecine, à Crest.
MAZET (le chanoine), à Valence.
MAZET (Paul), vice-président de la Chambre de commerce, à Valence.
MEAUDRE (Lodoïs), ancien magistrat, Avenue Kléber, 7, à Paris. MESSIÉ, avocat, à Montélimar.
MONIER DE LA Sizeranne (le comte), à Beausemblant (Drôme), ou rue Pierre Charron, 67, à Paris.
MONTEYNARD (le comte DE), à Montelier.
MONTGOLFIER, notaire, à Tournon.
MONTLUISANT (de), chef de bataillon breveté au 58' d'infanterie, à Avignon.
Morin (Henri), 12, rue Weber, à Paris (xvi').
Mossant (Casimir), industriel, à Bourg-de-Péage. PASSAS (Auguste), négociant, à Tain.
PROMPSAL (Emile), à Charpey.
RAGNAU (Monseigneur Hugues DE) chanoine, à Valence. REBOUL DE LA Juillière, ancien auditeur au Conseil d'Etat, au château de Vaire, par Roche-les-Beaupié (Doubs). REY, architecte, à Valence.
REY (Edouard), propriétaire, à Tain.
REYNAUD, Conseiller d'Etat, maire de Die, rue Miromesnil, 66, à Paris.
Roux, conservateur des Eaux et Forêts. en retraite, à Valence. SAYN (Gustave), géologue, à Montvendre.
SOUBEYRAN DE SAINT-PRIX, juge d'instruction, Boulevard Saint-Michel, 87, à Paris.
Tézier (Auguste), horticulteur, à Valence.
TOURNAIRE (Jean], docteur en médecine, à Tain.
TOURNIER, directeur du Crédit Lyonnais, à Valence. VALLENTIN DU CHEYLARD (Roger), à Montélimar.
VALLERNAUD (Prosper), négociant, à Saint-Vallier. VALLON (Antonin), industriel, à Bourg-de-Péage. VILLARD (Marius), architecte-voyer de la ville. en retraite, à Valence.
VINAY (Louis), architecte, à Romans.
Vincent (Henri), propriétaire, à Saint-Paul-trois-Chàteaux. Membres correspondants
MESSIEURS,
AiiTANfc. (le comte D'), au prieuré d'Ardènes, à Mane (BassesAlpes)-.
BAUME-PLUVINEL (Mlle la marquise DE LA). rue de la Baume. 7, à Paris.
BELMONT, à Lyon.
BENOIT d'Entrevaux, au château d'Entrevaux, à la Boissonade, près Privas.
BERNARD, conseiller à la Cour d'appel, à Grenoble. BERTHIN (Eolde), à Beaurepaire (Isère).
BERTRAND (l'abbé Isidore), 3, Plan Duché, à Montpellier (Hérault).
Béthoux (l'abbé), à la Salle-en-Beaumont, par la Mure (Isère). BEYLIÉ (jules DE), ancien magistrat, rue Villars, 10, à Grenoble BLANCHET (Augustin), manufacturier, à Rives.
BLANCHET (Victor), à la papeterie, à Rives.
BOISSIEUX (Maurice DE), rue Vaubecour, 12, à Lyon. BouRG (Gontran du), à Montdragon (Vaucluse), ou à Châteaudouble.
Brosset-IIeckel (Edward), rue St-Joseph, 4, à Lyon.
CHAMPAVIER (Maurice), 14, quai Charenton, à Charenton (Seine).
CHENAVAS. député, conseiller général de l'Isère, à St-Etiennede-St-Geoirs (Isère).
CHOIN (DE), élève officier à la Station des haras de Le Pin (Orne).
COLAS DE LA NOUE, ancien magistrat, rue du Quinconce, à Angers (Maine-et-Loire).
Devès (Abel), chef de bataillon au 22e de Ligne, au Camp de Sathonay.
Dupré-Latour, ancien magistrat, avocat, rue Saint-Simon, 2, à Paris, et rue Pérollerie à Valence.
FAURE (Maurice), sénateur de la Drôme, rue du Val-deGrâce, 9 bis, à Paris, Ve.
FLACHAIRE DE ROUSTAN (Marcel), rue de Jarente, 4, à Lyon. FUZIER (Louis), à Lavoulte.
GAP (Lucien), sous-bibliothécaire au Musée Calvet, à Avignon (Vaucluse).
Gauduel, ancien greffier à la Cour de Grenoble, place des Tilleuls, 10, à Grenoble.
GRÉA (Dom), supérieur des chanoines réguliers, à Andora Stazione, près Vintimille (Italie).
GRÉGOIRE (Félix), publiciste, rue Christine, 1, à Paris, vie. GUILLAUME (le chanoine), archiviste des Ilautes-Alpes, à Gap. GUILLEMIN (Paul), inspecteur de la navigation et des ports de la Seine, rue St-Cloud, 46, à Billancourt.
JOUFFRAY (A ), colonel commandant le 28e d'artillerie à Vannes (Morbihan).
Juigné DE LASSIGNY (DE), place Bellecour, 1, à Lyon, ou aux Arcs (Var).
LABRÉLY (R.), au Bourg-Saint-Andéol (Ardèche).
LAGIER (l'abbé), curé de Saint-Antoine (Isère)
LAURÈS, président de la Société archéologique de Béziers. Le SOURD (Auguste), archiviste-paléographe, 187, boulevard St-Germain, à Paris, et à Vals-les-Bains 'Ardèche). MANTEYER (Georges d-.), au château de Manteyer, près Gap, par la Roche-des-Arnauds (Hautes-Alpes).
Masimbert, avocat, rue Bayard, à Grenoble.
MIRIBEL (comte DE), à Villard-Bonnot (Isère).
MONTCLAR (le marquis DE), ministre plénipotentiaire de ire classe en retraite, au château d'Allemagne (Basses-Alpes). Montalivet (Georges DE), avenue Montaigne, 53, Paris (vin').MONTRAVEL (le vicomte DE), à Thueyts (Ardèche).
Monts (le comte DE), au château d'Armanais, à Balbin, près la Côte-Saint-André.
MOREL (Louis), à Chazay-d'Azergues (Rhône).
PARISOT DE LA BotssE (Jules de), à Montpellier et à Etoile. PERROSSIER (Ernest), colonel en retraite, rue Peyras, 14, à Toulouse.
PERROT, chef de division en retraite de la préfecture de l'Isère, place des Tilleuls, 3, à Grenoble.
PONCINS (le comte DE), à Feurs (Loire).
REYNAUD (Horace) avocat, ancien magistrat rue Victor Hugo, 61, à Lyon.
RoMAN (Joseph), avocat, rue de Valserre, 1, à Gap. SOLLIER (Léon), docteur-médecin, Boulevard de la République, à Vienne.
TERREBASSE (de), à Ville-sous-Anjou (Isère).
TEYSSIER DE SAVY, à Haute-Jarrie, près Vizille (Isère). THOMÉ, ancien notaire, rue Victor-Hugo, 38, à Lyon. TOUR-DU-PIN-CHAMBLY (marquis DE LA), Lieutenant-colonel, au château d'Arrency par Festieu (Aisne).
Tour-du-Vili.ard (marquis DE LA), à la Calmette (Gard). VACHEZ, secrétaire de l'Académie de Lyon, place St-Jean, 2, à Lyon.
VASCHALDE directeur de l'établissement de Vals-les-Bains (Ardèche).
VELLOT (A.), avocat, à Grenoble.
Communes! abonnées
ANNONAY (Bibliothèque). Aouste. – Bourg-de-Péage. –CREST. GRENOBLE. Montélimar. ROMANS. VALENCE (Bibliothèques).
ARCHIVES DÉPARTEMENTALES DE l'Isère.
Eugène VlIikARD
Eugène Villard, auteur de la fondation qui porte son nom au Conseil général de l'Ardèche, naquit à Vallon le 2 mars 1812. A 1 âge de onze ans, il fut envoyé au collège d'Aubenas; c'est là que, de 1823 à 1827, il fit, avec beaucoup de succès, ses premières études En 1828, il entra au collège royal de Dijon et y remporta le prix d'excellence de la classe de rhétorique. Bachelier à dixsept ans, il fut envoyé à Paris pour y étudier le droit. En 1840, il succéda à son père, qui avait exercé pendant trente années la profession de notaire à Vallon. En 1847, des raisons de santé l'obligèrent à résigner ses fonctions.
Le 23 juillet 18q8, le gouvernement de Cavaignac, sur la désignation des représentants de l'Ardèche, nomma Eugène Villard, sous-préfet de Largentière, il succédait à M. Lacombe, nommé commissaire le 12 a mars 1848.
Ajoutons, pour être exact, que notre honorable compatriote n'avait absolument rien demandé et qu'il n'avait même pas été consulté.
Eugène Villard apprit sa nomination par les journaux. A la fin de 1850, il donna sa démission, toujours pour raisons de santé et fut remplacé par M. Nau de Beauregard.
A cette date, il se retira de la mêlée des hommes et des choses et renonça complètement aux carrières dites libérales. En se retirant de la vie publique, il emporta avec lui l'estime et l'admiration de tous ses compatriotes.
Fixé dans son pays natal, amoureux des bois et du silence, des rochers et des flots, en face de la nature, il occupa ses loisirs à la composition d'ouvrages qui méritent une place d'honneur dans toutes les bibliothèques de l'Ardèche.
Eugène Villard a publié
i" Idéalisme et réalité. Paris, 1840
2° La physiologie du suicide. Alais, 1842
3° Questions notariales. Alais, 1843
40 Alba Augusta Helviorum. Alais, 1846
50 De la situation des intérêts agricoles dans l'arrondissement de Largentière. Nîmes, 1852
6° Clotilde de Vallon-Chalys, histoire du temps de Charles VII. Paris, Hachette, 1858;
7e Impressions morales el religieuses. Paris, Douniol, i86j.
8° Au bord de l'Ardèche. Paris, Douniol, 1868. 90 Olivier de Serres et son œuvre. Paris, Douniol, 1872. /o° Les Vallonnaises. Paris, 1876.
L'avant-dernier ouvrage est un des plus importants du bagage littéraire d'Eugène Villard, non pas au point de vue matériel mais au point de vue moral. En écrivant ce livre, l'auteur a fait une bonne action, un acte éminemment patriotique.
Quelques biographes ont accusé Olivier de Serres d'avoir été l'instigateur des massacres commis à Ville-
Eugène VILLARD
neuve-de-Berg, le 2 mars 1573, par une bande de calvinistes. Voici comment Eugène Villard relève et détruit cette accusation
« Un fait qui n'a jamais était contesté se dresse *à l'encontre de cette terrible accusation. On rapporte que, au commencement des troubles religieux qui agitaient le Bas-Vivarais, les consuls de Villeneuve-de-Berg confièrent au seigneur du Pradel les vases et les ornements sacrés de l'église catholique. Cette marque d'estime et de haute confiance suffirait pour faire justice des imputations dirigées contre lui. Tout d'ailleurs, dans le caractère, les habitudes et les écrits du célèbre agronome, proteste et plaide en sa faveur. S'il est vrai que le style c'est l'homme, ou Olivier de Serres n'a pas commis le crime dont on l'accuse, ou il n'est pas l'auteur du Théâtie d'agi {culture. Pour quiconque a lu attentivement cet ouvrage, l'alternative n'a rien de forcé. Il nous semble impossible que le fanatisme religieux, la cruauté des instincts, les passions haineuses, l'esprit de vengeance, qui seuls pourraient expliquer la participation d'Olivier de Serres aux actes exécrables dont on a chargé sa mémoire, se dissimulent au point de ne laisser aucune trace dans une composition de si longue haleine.
« Entre les fureurs attribuées au chef de parti et les sentiments exprimés par l'écrivain, il y a desaccord complet, on peut dire incompatiblité absolue. Chaque fois qu'Olivier rappelle le souvenir des séditions et des discordes civiles, on sent transpirer sous sa plume la débonnaireté de l'homme pacifique en même temps que la tristesse du patriote et le regret des événements auxquels il s'est trouvé mêlé. Ecoutons-le lui-même
« Outre ceste considération générale, une autre parti ticulière m'a fait entreprendre ce labeur. Mon incli« nation, et l'estat de mes affaires m'ont retenu aux « champs, en ma maison, et fait passer une bonne partie « de mes meilleurs ans, durant les guerres civiles de ce « royaume, cultivant ma terre par mes serviteurs, « comme le temps l'a peu porter. En quoy Dieu m'a « bény par sa saincte grace, que m'ayant conservé « parmy tant de calamitez, dont j'ai senty ma bonne « part, je me suis tellement comporté parmy les diver« ses humeurs de ma patrie, que ma maison ayant esté « plus logis de paix que de guerre, quand les occasions « s'en sont présentées, j'ai rapporté ce tesmoignage de « mes voisins, qu'en me conservant avec eux, je me « suis principalement addonné chez moy, à faire mon « mesnage. Durant ce misérable temps-là à quoy eusse« je peu mieux employer mon esprit qu'a rechercher ce « qui est de mon humeur ? Soit donc que la paix nous « donnast quelque relasche, soit que la guerre par « diverses recheutes, m'imposast la nécessité de garder « ma maison et les calamitez publiques me fissent « chercher quelques remèdes contre l'ennuy, trompant « le temps, j'ay trouvé un singulier contentement après « la doctrine salutaire de mon âme, en la lecture des « livres de l'agriculture, à laquelle j'ay de surcroist « adjousté le jugement de ma propre expérience (i). » « On croirait lire le préambule d'une de ces admirables études philosophiques que Cicéron composait dans sa maison de campagne de Pouzzoles, en regard du golfe de Naples, lorsque, meurtri des heurts de la (i) Théâtre d'Agriculture. Préface.
chose publique, il y venait resséréner son âme dans la contemplation de l'immuable et du divin. C est la même sincérité d'accent, la même émotion, la même dignité dans la résignation; la consonnance est frappante et le rapprochement s'impose à 1 esprit du lecteur. « Maintenant nous le declarons en toute conscience, les tâches de sang qu'un concours de circonstances fatales a fait rejaillir sur Olivier de Serres n existent pas à nos yeux. En l'absence de preuves formelles, l'impossibilité morale sur laquelle nous fondons notre jugement, ne laisse aucune place a l'incertitude de notre esprit. Si nous nous trompons, Dieu nous pardonnera. L'erreur est toujours regrettable, sans doute, mais combien plus lorsqu'elle condamne que lorsqu'elle absout » (i).
En lisant ces lignes, on ne peut s'empêcher de reconnaître que c'est un honnête homme qui les a écrites. nous avons raison de dire qu'en publiant Ohviei de Serres et son œuvi-e, Eugène Villard a fait une bonne action.
Les Vallonnaises publiées en 1876, sont nées sous ce beau ciel d'azur du Vivarais qui fait deviner les ciels de l'Orient, aux reflets d'or de ce soleil qui empourpre à son coucher les cimes lozériennes, à l'heure où le crépuscule jette sur la colline du Chastellas le manteau constellé de la nuit.
Tout est tranquille dans le vallon peu à peu les (1) Olivier de Serres et son ceuvie, page 5.
bruits s'éteignent. Sur le sentier pierreux et tout parfumé de lavande qui serpente le long du coteau, tinte la clochette d un troupeau attardé, le troupeau du Vietix bei gei peut-être. C'est, répondant à l'écho, l'aboiement plaintit d'un chien de ferme. la ferme de Marcel. et la-bas, au loin, derrière les collines, aux flancs couverts d'yeuses, gronde harmonieusement Y Ardèche, aux eaux vertes la rivière aimée du poète.
Ardèche que de fois vers ce desert austère, Que de fois tu m'as vu, promeneur solitaire, Loin des foules porter mes pas silencieux, Et rêver, le cœur plein, au murmure de l'onde Qui berce, confondus dans la coupe profonde, L'ombre des bois, l'azur des cieux
Que de fois tu m'as vu gravir de cime en cime, Mes deux pieds sur le roc et mon front sur l'abîme, Tes remparts couronnés de sombres chênes verts, Tandis que, subissant l'attraction du vide, Mon regard éperdu cherchait ton flot rapide, Au fond des gouffres entr'ouverts
Dans ces ravissements qui tiennent du délire, Que de fois tu m'as dit « II faut prendre ta lyre Chante, chante, mon fils, puisque tu sais aimer » La lyre n'a pour moi que des cordes muettes J'ai le don de rêver comme font les poètes, Je n'ai pas le don de rimer.
Près de toi )'ai vu fuir bien des jours, et mon âme, Que l'idéal commande et l'infini réclame, S'est déprise de vivre entre hier et demain Des fragiles espoirs j'ai sevré ma pensée, Et la Foi, dissipant l'illusion lassée,
Du ciel m'a montré le chemin.
Je ne quitterai point tes chères solitudes Que sert-il, sur le tard, de changer d'habitudes 1 Où trouverais-je ailleurs des horizons plus beaux ? Il est un coin fleuri de l'humble cimetière Qui me garde, parmi des touffes de bruyère, Une place entre deux tombeaux.
Eugène Villard savait ciseler et enluminer la langue poetique, il peignait et sculptait en très beaux vers. Sa description du Pont-d' Aie vous saisit d'admiration c'est un tableau aux lignes grandioses, aux formes majestueuses comme les peignait le Poussin.
Devant cette arche énorme et sa double colline, Dont la masse imposante et sauvage domine Un val qui s'arrondit en forme de croissant Et l'Ardèche aux flots bleus qui fuit en gémissant, L'esprit, se reportant aux époques antiques, Entrevoit de Babel les immenses portiques, Entasse sur leur front mille étages géants, Qui s'abreuvent d'azur par leurs arceaux béants, Et, prolongeant sans fin la sublime spirale, Fait au morne édifice une couronne astrale.
On a comparé Victor-Hugo à un torrent écumant, à une cataracte splendide et mugissante Lamartine, à un fleuve majestueux et limpide Alfred de Musset, à une source fantastique et capricieuse. Nous ne comparerons Eugène Villard a aucun poète il n'a imité personne, ni les réalistes, ni les ciseleurs de style, ni les lyriques emportés par les changeants caprices de leur fantaisie. Il tâche d'exprimer sa pensée avec toute la clarté, la force, l'élégance dont il est capable, sans ce préoccuper de faire partie d'une école plutôt que d'une autre. On ne trouve pas, dans les Vallonnaises, de minutieux effets de style, des essais tentés pour ajouter une nouvelle corde à la lyre poétique on y trouve un poète ému, toujours naturel, laissant parler simplement son âme, ne cherchant pas l'effet, ne s'efforçant pas de montrer son art.
La mort du Vieux berger est une touchante élégie pleine d'idéalisme et de réalité.
2e SÉRIE. XLIIIe VOLUME. I ÇOÇ. 2
Le râle Bruissait dans sa gorge. Au pied du lit le chien Se rendormit, et dans cette ombre sépulcrale, Hors ce râle lugubre, on n'entendit plus rien. La nuit passa. Du jour la lueur blanchissante, Par un étroit chassis ouvrant sur l'Orient,
Eclaira le réduit et l'aurore naissante
Fit un nimbe d'opale au vieux pâtre expirant. Quelques heures plus tard, un passant d'aventure Entendit sous ce toit des brebis qui bêlaient, Réclamant de concert l'ordinaire pâture.
Les hurlements d'un chien a leur voix se mêlaient. Il leva le loquet de l'huis, et la chaumière,
S'éclairant tout à coup, laissa voir au passant. Immobile et raidi dans un flot de lumière,
Le corps du vieux berger sur la paille gisant. Un de ses bras pendait. Du pied de cette couche S'élevait par instant comme un sanglot humain C'était le pauvre chien, qui, gémissant, farouche. Veillait sur le cadavre et lui léchait la main.
Nous avons dit que dans les Vallonnaiscs on ne trouvait pas des effets tentés pour ajouter une nouvelle corde à la lyre poétique, mais l'auteur y fait rendre parfois aux anciennes des sons inattendus. Nous ne connaissons rien de plus beau, de plus majestueux, que ce chant débordant de lyrisme (Exultatio). Ecoutons le poète chantant cet « hymne de flamme » à l'Harmonie
Lorsque j'entends vibrer sur le clavier sonore
Les notes qu'une main savante fait éclore,
Promptes à s'envoler comme un essaim joyeux,
Je me demande si ce ne sont pas des âmes
De poètes, d'enfants, d'artistes et de femmes
Qui prennent la route des cieux.
Ah c'est que l'harmonie est de source divine, Et que, se rappelant sa sublime origine,
Elle prend à devoir de nous montrer le ciel Et c'est que, même au sein des voluptés profanes, Elle étend sur nos fronts ses ailes diaphanes, Et nous adresse son appel.
à l'heure où la tombe Ouvre à l'homme son sein et que le corps y tombe, L'esprit s'envole au ciel comme un rayon de feu, Et libre, dominant l'immensité des ondes,
D'harmonie et d'amour boit désormais les ondes A leur source éternelle Dieu.
Les autres pièces les plus remarquables des Vallonnaises sont les Esquisses rivales, études de moeurs vivaraises du xixe siècle c'est une série de beaux tableaux champêtres et d'intérieur, tels qu'aimaient à les peindre Boucher, Greuze et Gérard Dow. L'Essaim perdu, idylle sur les abeilles de Bidon et d'Orgnac dont le miel vaut assurément celui du mont Hymette. Jacinthou, mendiant que le burin de Callot aurait peut-être moins bien réussi. Les Bugadièies, gracieuse esquisse des lavandières du Vivarais « tableau de Corot tout baigné de fraîcheur et de lumière, tout emperlé de rosée. »
Par les extraits que nous venons de donner, nous croyons avoir démontré que notre savant compatriote était un vrai poète.
Ce qu'il y avait d'admirable chez lui, c'était sa modestie, il ne se croyait pas poète. A nos félicitations
sur ses Vallonnaises dont il venait de nous faire hommage, il nous répondit, le 9 février 1877 « Alerci de « la sympathie qui vous porte a faire figurer mon nom « parmi ceux des poètes de l'Ardèche Le recueil des « Vallonnaises qui me vaut cet honneur n'est qu'un « essai dont je ne me dissimule point la faiblesse. « L'imagina'tion, le sentiment, la passion. sont les qua« lités natives du poète, mais elles ne suffisent pas « pour produire une œuvre durable il faut y joindre « le talent de la versification, lequel ne s'acquiert que « par un long et patient labeur. C'est affaire de métier « on doit s'y appliquer de bonne heure si on veut en « connaître les secrets. Au surplus, quel écrivain, cher« chant à traduire dans le langage articulé, les impres<( sions produites au fond de l'âme par le feu des « passions ou le spectacle des scènes de la nature, n'a « pas constaté l'impuissance irrémédiable de sa plume? « Cette observation m'a inspiré un sonnet composé « avant mes Vallonnaises, sonnet qui a le mérite d'ex« primer une vérité d'expérience. Je le transcris a la « suite de cette lettre, il est absolument inédit. »
Quand, de son aile d'or, sous un ciel radieux, La Muse, dans son vol, effleure le poète,
Il tressaille. et, soudain, le voila qui s'apprête A moduler un chant dans la langue des Dieux. Mais l'image enchantée, apparue à ses yeux, Sublime vision dont il est l'interprète,
Dans le terne miroir des mots qui la reflète A perdu sa splendeur et n'a plus rien des cieux, Dès qu'elle prend un corps, poète, ta pensée, Par le contact du verbe est aussitôt glacée A ton rêve idéal toute parole ment.
Ce que dit la Muse est incommunicable.
Et, pour le révéler, ô misère ineffable La plus savante lyre est un vam instrument.
Eugène Villard est mort le 12 janvier 1882, aux lieux mêmes où il avait vécu, dans ce Vallon où il était né aux premières années du siècle.
Le mourant ne connut pas la terreur de la mort et ce fut avec un sourire qu'il vit s'approcher cette heure désirée, qui, en le délivrant du fardeau de la vie, devait le réunir à tout ce qu'il avait aimé sur cette terre, et le rapprocher de Dieu, son espoir et sa foi.
Nous avons fait connaître les travaux littéraires d'Eugène Villard. Tour à tour romancier, poète, moraliste, il lui eût suffi d'un peu d'ambition pour devenir un écrivain célèbre et compter parmi les marquants du temps. Insensible aux séductions de la célébrité, cette amante orgueilleuse qui lui avait fait espérer, cependant, ses plus douces faveurs, il ne voulut jamais quitter ce coin chéri du Vivarais qu'il aimait en poète, où sa vie s'écoulait unie et calme, entourée et comme ouatée de douces et profondes amitiés. Sous ce ciel pur et bleu comme le ciel de l'Attique au murmure de cette Ardèche, aux flots rapides, il s'enivrait de toutes les harmonies de la nature, se pénétrant de la poésie de ces magnifiques paysages au milieu desquels il avait grandi. Toutes les émotions de la vie, il les avait ressenties là ses morts toujours aimés y reposaient près de lui, et son cœur n'avait jamais voulu briser ces liens sacrés qui unissent si étroitement la tombe à la vie.
Eugène Villard, dont nous donnons le portrait, était
de grande taille, sec et maigre, l'aspect souffrant, une tête austère et émaciée; mais la gravité un peu hautaine de sa physionomie savait se fondre et s'adoucir dans un sourire plein d'un charme doux et mélancolique. Charme est bien le mot Eugène Villard était un charmeur et près de lui on se sentait enveloppé et comme pénétré par son affectueuse bonté, par la caresse de son regard d'une tristesse douce, par la profonde indulgence qui s'échappait de ce grand cœur, indulgent et bon aux faibles et aux souffrants comme tous les cœurs qui ont connu les faiblesses et les souffrances de la vie. En 1868, nous avions été assez heureux pour le voir accueillir avec faveur nos premières publications, il s'en était suivi des relations respectueuses de notre côté, affectueusement cordiales du sien.
Nous possédons plus de vingt-cinq lettres d'Eugène Villard, pleines de trop flatteuses félicitations. En nous remerciant de l'envoi de trois de nos brochures, le 10 mai 1875, il terminait sa lettre ainsi: « Je m'incline « devant la devise que vous avez adoptée L'homme ne « vit pas seulement de pain. Elle n'est point chez vous « une enseigne platonique, un frontispice de parade, « vous l'avez tirée du plus beau livre qui soit au monde; « je vous en félicite, vous ne pouviez mieux choisir. »
Avant de mourir Eugène Villard a voulu donner un
témoignage de son amour pour le Vivarais en le dotant d'une fondation destinée à encourager les travaux scientifiques et littéraires relatifs à notre région.
Voici l'extrait du testament olographe, du 7 octobre 1879, de M. Marie-François-Eugène Villard, propriétairerentier, ancien sous-préfet, domicilié à Vallon d Je donne et lègue au département de l'Ardèche une somme de douze mille francs, laquelle sera placée en rente sur l'Etat français et dont les arrérages accumulés de deux ans en deux ans serviront à fonder un prix qui sera décerné à l'auteur né ou domicilié dans l'Ardèche, du meilleur ouvrage scientifique ou littéraire paru dans la dernière période biennale. La préférence sera donnée aux publications spécialement consacrées à notre chère Ardèche ou ayant pour elle un intérêt particulier. Celles dans lesquelles il serait porté atteinte à la morale et aux principes religieux et sociaux devront être rigoureusement rejetés. Le prix pourra, par exception, être partagé, soit ex eequo, soit inégalement entre deux écrivains, pourvu toujours qu'ils soient nés ou domiciliés dans l'Ardèche. C'est au Conseil général du département qu'il appartiendra d'exécuter ces dispositions. Il n'aura pas besoin pour cela d'étendre le cercle de ses attributions et de s'ériger en académie; soit qu'il s'inspire du sentiment général, soit qu'il se fonde sur des appréciations individuelles. il lui suffira de rendre ses décisions sans être tenu à en déduire les motifs. » Le legs Villard fut accepté par délibération du Conseil général, en date du 3 avril 1883.
Le premier prix, depuis la fondation, fut décerné en 188$ pour une carte géographique de l'Ardèche de i à 120,000, à M. Astier, maître adjoint à l'école normale d'instituteurs de Privas et M. à Vivier, instituteur, à Saint-Bauzile.
La décision du Conseil général n'a pas paru répondre
aux intentions de M. Villard qui était un lettré. Par son testament il voulait encourager et récompenser des œuvres littéraires, des œuvres d'histoire, des publications devant profiter à la gloire de notre département, susciter les travaux de nos chroniqueurs et de nos historiens. Tandis qu'on en a fait une prime et une gratification à donner à un employé des ponts et chaussées ou des chemins vicinaux, ayant en mains les minutes depuis longtemps sans doute établies et à jour, de notre carte départementale et qui n'a plus qu'à en opérer la réduction à l'échelle indiquée.
La Revue historique dit Vivarais, fondée en 1893 par M. d'Albigny avec le concours d'un groupe d'écrivains ardéchois, forme aujourd'hui une collection de dix beaux volumes illustrés contenant une foule de documents. tous plus intéressants les uns que les autres. Nous serions d'avis que ces dix volumes et la table générale fussent présentés au Conseil général pour le prix Villard. Messieurs les Conseillers généraux sont en général assez lettrés et surtout patriotes pour encourager cette intéressante publication ardéchoise, en lui donnant une année ce prix. Ce n'est pas une question de boutique ni de religion parmi les collaborateurs de la Revue, il y a un certain nombre d'écrivains protestants. Ce serait un prix impersonnel, un encouragement pour la publication de documents inédits et de gravures rares concernant notre cher Vivarais.
HENRY VASCHALDE
Le Tramway
DE
Valence à Pont-en-Royans
I. LES MARTINS ET LA FORÊT DELPHINALE
De Valence aux Martins, où la ligne de Crest abandonne celle du Royans, la même voie dessert l'une et l'autre, et si l'antiquité historique n'apparaît pas dans cette petite étendue de territoire, il offre cependant quelques souvenirs intéressants à rappeler. En effet, le plateau sur lequel est bâti le petit séminaire n'est pas seulement un site des plus pittoresques, il est aussi à cause des cours d'eau souterrains qui sourdent à ses pieds, un véritable trésor pour l'industrie et pour l'horticulture. Les Romains avaient fort bien compris l'importance de cette situation puisqu'ils y avaient bâti une galerie. Le moyen âge l'utilisa à son tour pour les arrosages, pour le jeu des moulins à farine et pour la défense de la ville elle-même. On a donc cru à tort que les seigneurs de Faventines avaient concouru à cette triple amélioration, car les Bressac reçurent des évêques de Valence vers 1650 seulement le fief de ce nom.
A l'est et non loin du petit séminaire, commençait la
forêt de Chabeuil, autrefois propriété des Dauphins, des rois de France, leurs héritiers, et des princes de Monaco. Là, des cultivateurs laborieux défrichèrent peu à peu les parcelles obtenues des uns et des autres et y bâtirent des maisons. On y trouve aussi les religieux de Saint-Ruf et les chevaliers de Malte. Ces derniers, après la croisade de 1099, avaient reçu, comme les Templiers, la mission de défendre la Terre-Sainte et de protéger les pèlerins. Ils établirent à cet effet, le long des routes principales, de distance en distance, des asiles hospitaliers. L'Abbaye, sur le territoire de Valence et de Chabeuil, en forma un, la Ruelle et les Rosiers deux autres. Vendu à la Révolution, ce premier domaine comprenait 58 hectares environ et s'affermait 683 livres, en 1749. Les Berthet et les Martins, établis dans le même quartier, ont laissé leurs noms à deux haltes des lignes soeurs du Royans et de Crest; les premiers ne sont pas connus historiquement; mais les seconds eurent pour prédécesseurs les Merez, vers le xvne siècle, et ceux-ci remontent, au témoignage de Chorier, à la prise de Damiette (4 juin 1240).
Leur château bâti au sommet de la montagne de Crussol fait face au village de Toulaud et domine les vestiges romains et féodaux des Fonts, entre ce village et SaintPéray.
On attribue à la Trésorerie, mais sans aucune explication, une origine ecclésiastique; toutefois ses possesseurs connus ne remontent pas au-delà du xvne siècle. Pierre Tastevin, notaire à Charpey, prit ensuite le nom de Tastevin-Serment et celui de Serment tout court.
Son fils, Honoré, devenu lieutenant en la connétablie de France, sorte de magistrature militaire, acquit ainsi la noblesse et s'unit, en 1639, avec Gérarde Giraud, fille d'un notaire de Paris. Les jeunes époux vinrent habiter Charpey
et ensuite Valence. Or, parmi leurs enfants figurent 10 Louise-Anastasie Serment, auteur de quelques poésies oubliées, amie de Mademoiselle de Seudéry et de Quinault elle fut surnommée la philosophe, et l'on a cependant des preuves de sa foi catholique (1) 2° Jean-Annet, capitaine au régiment de Tournaisis, marié avec Jeanne de Galbert de Ronchol des Fonds, qui lui donna Louis-Honoré de Serment, ingénieur en chef à Mont-Dauphin et château de Queyras, né en 1687 et décédé vers 1729 Après lui parurent à la Trésorerie les Le Clerc de Ladevèze, originaires du Languedoc et seigneurs de Beaufort-sur-Gervanne, demeurant à Valence à la fin du xvme siècle, puisque ArmandTancrède, l'un d'eux, y naquit en 1769 et que l'infortuné François-Hector d'Albert de Rioms y contractait mariage avec Thérèse-Françoise de Ladevèze en 1761.
Les haltes des Bérards et des Freydier ne révélant rien d'historique nous entrons à Chabeuil.
II. CHABEUIL ET LES BERENGER
Cette ville bâtie sur le versant méridional et au pied d'un côteau de sable, dut abriter ses premiers habitants en des excavations ou grottes exposées au soleil et voisines de forêts giboyeuses et de la Véore, affluent du Rhône. Pareille station convenait à merveille aux chasseurs et pêcheurs des âges de pierre, de bronze et même de fer. M. de Coston, qui a savamment discuté les noms de lieu du département, adopte cette opinion et si l'on admet la forme Caveola, excavation, en basse latinité, au lieu de Caveolum
(1) Voir Bulletin de la Société, tome VI, 324-27.
pour Cabeolum et Chabeolum, on a l'explication normale de ce nom et même de celui des Cavares, habitants primitifs de la région. Il convient donc de rejeter l'identité avec Chabeuil 1° de la capitale prétendue des Calbici ou Chalbici 2° avec Cerebelliaca. mutatio ou étape sur la route de Milan à Vienne et Lyon, retrouvée à Serrebel, Servile ou Serbelle entre Upie, la Rochette et Ourches, appelée aussi Volpilière au moyen âge.
Comme le mot Chalbici ou Calbici signifie cavaliers dans une charte de 1320 analysée dans l'Inventaire des Dauphins (1) et que les dictionnaires celto-bretons appellent Cabellec l'alouette, oiseau qui remplit le ciel de sa complainte monotone pendant tout l'été dans la plaine de Chabeuil, on peut choisir. Quant à Chalons Cabillonum, la distance et la philologie exigent son élimination. Ces remarques n'invalident en rien la tradition du passage des Romains dans une contrée où le voisinage de Valence et de Crest a dû les appeler souvent. Toutefois, aucune inscription ni aucun texte d'auteur ancien ne mentionnent Chabeuil.
Après la chute de l'empire romain, les invasions des Burgondes, des Francs et des autres peuples du Nord et de l'Orient n'ont laissé là aucune preuve connue de leur existence. Le souvenir de Boson lui-même, élu roi à Mantaille en 879, a fort peu dépassé Vienne et Saint-Donat. Mais déjà, sous son règne et celui de ses successeurs, les grandes familles gallo-romaines avaient obtenu, sous les titres de barons et de comtes, la confiance et la soumission des habitants du Viennois et du Valentinois aussi quand Rodolphe 111, dit le Fainéant, disparut, la féodalité déjà puissante s'empara du pouvoir et le conserva pendant de (1) M. le chanoine Chevalier, n* 1474.
longs siècles. L'histoire écrite de Chabeuil ouvre à cette époque les premières pages de son livre avec la famille des princes du Royans. Cette iamille et celles des barons de Cléneux, des comtes d'Alboil, des comtes de Valentinois et des seigneurs de Châteauiieui-d'ibère, sortaient des environs de Romans ou de Valence. Elles s'allièrent entre elles et se défendirent en environnant leurs villes et villages de tours et de châteaux forts. Le clergé, de son côte, qui sut mériter les faveurs populaires choisit ses évêques dans ces maisons puissantes et ils devinrent bientôt les suzerains principaux avec les comtes.
Chabeuil a eu déjà pour historien un jeune professeur de son collège, qui a seul cultive avec talent notre histoire locale après Jules Ollivier. Né en 1813, a Saint-Jean-enRoyans et décédé à Serves, en 1891, Joseph-Abel Vincent a fait connaître en style excellent le passé de plus de 50 communes de la Draine, à l'aide de quelques auteurs seulement, car alors les archives departementales n'avaient pas encore ouvert leurs dossiers et leurs chartes. Depuis quelques années, l'érudition réalisant de notables progrès a projeté des rayons de lumière sur une foule de points ignorés naguères. De là nécessité de reprendre sommairement le travail de 1847 (1).
Les seigneurs de Peyrins, dans le Viennois, avant et après la fondation de Romans par Saint-Barnard, archevêque de Vienne, de 810 à 842, dominaient un vaste territoire sur l'une et l'autre rive de l'Isère. Les Geilin ou Geilon occupaient Valence et ses environs et les comtes d'Albon régnaient sur la Valloire. Tous ces chefs militaires et civils
(1) Notice historique sur la ville de Ghabeuil, tirage à part du Bulletm de la SocIété de Statistique et des Arts utiles de la Drome. Valence.
cherchaient à étendre leur domination et du haut de leurs remparts regardaient avec envie la part de leurs voisins de là des guerres de là des forteresses et des remparts, d'un côté et des serments de fidélité, de l'autre, pour attacher les vassaux à leurs seigneurs. Ceux de Chabeuil appartenaient à la famille des Lambert François qui ont eu pour tige vers 960, Ismidon, prince de Royans. Il prit part à la première croisade et laissa ses biens à Reynaud, son fils, établi comme lui à Peyrins. Celui-ci s'allia avec les habitants de la ville naissante de Romans (1158). François qui lui succéda, voyant sa fortune en péril, vendit au chapitre de Samt-Barnard une part de son héritage et Raymonde, sa fille unique, porta le reste en dot à Raymond de Bérenger, devenu de la sorte le chef de toute sa lignée, qui prit son nom de baptême et forma les branches des de Sassenage, de Morges, de Chabeuil et de Flandènes. Guy ou Guidelin, fils de Raymond Bérenger, paraît avoir été le père ou le frère de Gontard, qui a laisse son nom à une partie du coteau dominant le chef-lieu de son ancienne seigneurie. 11 avait épousé une fille de la maison de Poitiers, alors maîtres du Valentinois comme successeurs des Geilon ou Geilin, et ennemis des évêques de Valence. Sur son refus de rendre hommage pour le Cope et la Volpilière, deux domaines ou hameaux du voisinage, à Humbert de Mirabel ou de Miribel, successeur d'Odon, le prelat recourut à son collégue du Puy et aux seigneurs de Crussol et de Tournon pour obliger le vassal rebelle à se soumettre aux lois féodales. Gontard de son côté appela à son aide Flotte Osasèche, seigneur de Flandènes et frère de Raymond Bérenger, prince de Royans, Artaud de Roussillon, Aimar de Bressieux et Durand. Leurs troupes se réunirent à celles du prélat et le P. Colombi, au xvu" siècle et le jeune professeur de 1847 ont profité de cette campagne pour dramatiser leur récit et imiter les historiens latins. « Les soldats de
« Gontard, écrit l'abbé Vincent, soutinrent vivement le a premier choc mais bientôt, cédant au nombre, ils pliè« rent, se débandèrent, puis coururent se réfugier dans « Chabeuil. Les troupes épiscopales, animées par le succès, « se mirent à leur poursuite et pénétrèrent avec eux dans « la ville. Gontard voyant que tout était désespéré, se « battit comme un héros et fit des prodiges de valeur. Ses « troupes, électrisées par son exemple, l'entourèrent et le « défendirent vaillamment », mais ne purent le sauver; il fut fait prisonnier et traîné à Valence à la suite du vainqueur. Après quelque temps de captivité, le Dauphin et le comte de Montfort, chef de la croisade contre les Albigeois, intervinrent en sa faveur et l'évêque lui rendit sa liberté et ses terres.
11 semble, d'après le discours du prélat, prononcé à cette occasion, que le nom du Dauphin pourrait atténuer la faute de Gontard, car au témoignage de l'inventaire manuscrit de la Chambre des Comptes, dû à Marcetlier, le dauphin André avait donné le château de Chabeuil à Gontard et celui-ci, le 3 novembre 1206, lui en avait rendu hommage. Comment expliquer alors la campagne militaire de l'évêque de Valence ? D'autre part, l'accusation portée contre Gontard d'avoir établi un péage sur ses terres et rançonné Allemand Dupuy, seigneur de Montbrun, transportant ses meubles de Peyrins dans les Baronnies, n'est pas solidement établie, puisqu'il y avait alors près de Roaix, de Vaison et de Montbrun des familles Dupuy. Il semblerait donc que le prélat valentinois s'en prit à Gontard dans sa propre ville pour punir son refus d'hommage et que ce dernier ne tarda pas à se soumettre. Effectivement ses deux fils ne conservèrent aucun ressentiment contre leur suzerain, puisque Albert, l'un d'eux, se fit chanoine à SaintApollinaire et en fut élu prévôt. Quant à Lambert, devenu co-seigneur de Pisançon, il vendit ses droits au Dauphin.
D'où il suit que, grâce aux chartes de Saint-Barnard de Romans et de l'abbaye de Léoncel, les premiers seigneurs de Chabeuil sont aujourd'hui connus et que leurs noms et les dates approximatives de leurs faits et gestes méritent d'être conservés, les voici
Ismidon prince de Royans vers 940; François Lambert, vers 1086, Raynaud, vers 1138, François, vers 1174, dont la fille appelée Raymonde épousa Raymond de Bérenger. Raymond de Bérenger, vers 1200, Guy ou Guidelin, vers 1174; Gontard, vers 1194; Albert et Lambert, vers 1236. Malgré l'abandon de leur seigneurie les Chabeuil conservèrent leur nom et Louise, en 1330, épousait Gédéon de Vesc, d'une ancienne famille des environs de Dieulefit.
(à suivre)
A. LACROIX.
TOPONYMIE DE LA DROME
DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE
DES COMMUNES, PEUPLES ANCIENS, FLEUVES, RIVIERES, MONTAGNES
DU DÉPARTEMENT DE LA DROME
(Suite. Voir les 161* à 167* livraisons)
Cette partie du Dauphiné que Pline qualifie de « ager Allobrogum », « le champ ou la plaine des Allobroges », a conservé jusqu'à nos jours la même désignation sous le nom de « la plaine dauphinoise » elle englobe la région du Nord et de l'Est des arrondissements de Vienne et de la Tour-du-Pin elle se divise en régions connues sous les noms modernes de terres froides, région humide, sujette aux brouillards; elle s'étend sur tout ou parties des cantons de Virieu, du GrandLemps, de Saint-Geoire, de Pont-de-Beauvoisin, de la Tourdu-Pin et de Bourgoin.
Les Terres-Basses comprennent les plaines de Lyon ainsi nommées de la grande ville tout près de laquelle finit le territoire en plaine s'étendant au Nord-est du Rhône; la Bièvre est une plaine commandée au Nord par les terres froides longue de 3o kilomètres, large de 4 à 10, elle est inclinée de l'Est à l'Ouest où elle porte le nom de plaine de la Côte-SaintAndré.
La Valloire qui prolonge la Bièvre s'étend de celle-ci a la plaine du Rhône; longue de 20 kilomètres, large de 4 à 7, 2e SÉRIE. XLIII* VOLUME '9~9- 3
(humide comme la Bièvre), elle est aussi fertile que la Bièvre l'est peu les eaux qui lui viennent souterrainement de cette dernière plaine jaillissent par de belles sources.
Le plateau de Chambaran partage l'Isère de la Drôme, s'étend dans des parages où ce massif a un sommet de 787 mètres, Chambaran même a une altitude de 755 mètres ce plateau où se termine la plaine dauphinoise, Vager Allobrogum de Pline, est boisé de chênes, de hêtres, de charmes et de châtaigniers (physionomie de l'Isère, géographie).
Remarquons que ni dans ce texte, ni dans aucune partie de l'œuvre de Pline, on ne découvre trace « de la plaine trian« gulaire appelée Isle de Gaule, correspondant d la partie « basse du Dauphiné et située entre l'Isère et le Rhône » cette fantaisie descriptive que nous lisons dans Lentheric n'est qu'un sophisme d'auteur.
Au confluent de l'Isère et du Rhône, dans ce vague triangle, de maigres chesnaies, des taillis anemiques, des fourrés ajourés, des dentelures de conglomérats, melange de sable et de cailloux roulés et peu fertile, dessinent leur nervure sur un sol rougeâtre. Depuis le voyage de Polybe cet aspect et cette infécondité ont peu varié.
Si Pline est muet sur l'emplacement de l'Isle de Gaule (produit de l'imagination), sur sa position au confluent de l'Is'ar et du Rhône, sur sa fertilité inconnue même de nos jours, il nous a légué, par contre, un témoignage qui, par l'autorité du savant agronome, fortifie la claire vision que le voyageur grec nous a transmise de la vie et de la fertilité de Vile.
Après nous avoir appris que l'Ile était très peuplée, Polybe avec sa documentation précise ajoute « elle est aussi fertile en blé, (xt-royopoç. Ces clartés de détails nous ont été affirmées tour à tour par Strabon et Pline.
Strabon place dans l'Ile qu'il a visitée cinq villes, dont trois
florissantes, riches et populeuses Avenio, Arausio, AeriaCarpenthoracte; la réalité du terme « très peuplée » est ici nettement attestée.
Pline arrive dans la Narbonnaise presque contemporainement à Strabon, nous trace le tableau des produits agricoles cultivés dans la région et écrit avec son expérience agromane: « sed (siligo) et trans Alpes in Allobrogum tantum Memino« rumque agro pertinax. » C'est-à-dire le siligo (le froment « celtique si réputé) ne se maintient au delà des Alpes que dans « la plaineides Allobroges et des Meminiens ».
Nous avons vu où commençait et tinissait la plaine des Allobroges avec le terme « in agro Méminorum », cette notation prend la place d'une indication précieuse. Cet « ager » des Méminiens tribu montagnarde du peuple Cavare, avec Carpenthoracte (Carpentras_) comme oppidum princeps, se déroule dans la plaine au pied du Ventoux, s'allonge au-delà de l'Ouvèze et se soude au vaste terrain plat et fertile du territoire de l'Ile de Polybe, la campagne d'Orange et d'Avignon irriguee, entrecoupée de rivieres, de ruisseaux et de torrents. Nous avons le droit de prétendre que par l'examen des textes primitifs des auteurs grecs et latins, par la traduction exacte et l'analyse judicieuse des récits des mêmes auteurs, par l'interrogation des archives, par l'exploration des terrains, l'Ile de Polybe, avec son cadre fluvial, sa population dense, sajfertilité en froment, était aujourd'hui retrouvée sans qu'aucun doute, aussi obstiné soit-il, puisse revivre. Notons encore « que sur la Sorgue et à 22 kilomètres «d'Avignon, à l'Est, est bâtie une ville dénommée l'Isle, dont « l'appellation première etait « lnsulœ » cette agglomération « était connue déjà en 576 quand une division des Lombards, « sous la conduite d'Amor, vint camper en ces lieux; on est « obligé de convenir que l'Isle fut de bonne heure un bourg « considérable par les proportions de son église, dont une « seule partie, le choeur, survit à la construction primitive. » Jules Courtet. Dictionnaire des Communes de Vaucluse.
L'Ile de Polybe avec son contour arrosé par trois fleuves, embrasse la partie nord du Delta décrit par le voyageur grec; nous jetterons un regard sur sa configuration nous en étudierons la potamographie, la direction de son cadre, l'harmonie de ses détails identiquement égale à la narration depuis si longtemps controversee la fin de cette étude, dépouillée de toute conception artificielle, nous conduira à asseoir une solution qui se dérobait sans cesse et à rattacher à l'histoire de nos régions les lieux où Polybe avait vu Vile et le Delta justement célèbres par sa formation technique qui se cachait soigneusement.
Le Delta de Polybe.- La première partie de l'énigme historique que nous a legué Polybe est dévoilée; son mystère est éclairci l'Ile et le Fleuve mystérieux ont reconquis leur situation topographique primitive, celle que le géographe grec leur avait determinée ce n'est que le premier cercle du problème le sphinx grec, Polybe, met le pied dans un deuxième cercle qu'il dépeint en ces termes « Cette région est, d'autre « part, semblable tant par son étendue, que par sa figure à cette « contrée que l'on appelle en Egypte, le DELTA ces deux régions « toute/bis sont orientées d'une Jaçon difféi ente, en ce sens qu'en « Egypte, la mer s'étend sui un côté et que le coui s des fleuves a enseirent les deux autres; mais ici un des côtés du DELTA est « fermé par un fond de montagnes d'accès et de pénétration diffi« elles et piesque, diiai-je, inaccessibles ».
Cette description si concise en sa clarté n'a pas cesse jusqu'à ce jour de troubler et d'inquiéter nos savants, liés à pénétrer les lignes du dessin tracé par le narrateur grec. Un siècle plus tard Tite-Live est venu, à son tour, compliquer l'apparente obscurité du texte; l'historien latin a ajouté cette simple formule accoluntpropè(Insulœ) Allobroges, » Chalieu nous enseigne à ce propos « que ni le pays entre l'Isère et le Rhône,
« ni celui qui est entre le même fleuve, ne peuvent être « appelés une île rigoureusement parlant (et moins encore « un Delta) ».
Suggestionnés par cette affirmation de Tite-Live, dégagés du servilisme doctrinal auquel obeissent les modernes, les historiens et les critiques de l'époque de la Renaissance ont voulu concilier et la difficulté de choisir un terrain approprié, et leur volonté de ne pas substituer leur conception au récit latin ils ont jeté les yeux et arrêté leur choix sur le territoire renfermé par le Rhône et la Saône dans leur thèse l'Arar (la Saône) est le fleuve recherché.
Antoine de Chovet publia à Paris, en 1607, une traduction française de Tite-Live, il a ecrit « Annibal arriva à une Ile « où la Saône et le Rhône ayant pris leur cours de divers « endroits des Alpes et circui grande espacede pays, se réunissent en un. Ce lieu qui est embrassé de ces deux rivières « s'appelle l'Isle. Les Allobroges demeurent près de là. Chorier dans son Histoire du Dauphiné (1661. t. I), écrit que « d'après l'opinion de quelques auteurs, Annibal aurait « conduit ses troupes à travers la Bresse (l'Ain moderne), pour « entrer en Italie par Aoste et Ivrée il cite entr'autres auteurs Samuel Guichenon qui, en 1640, fut historiographe de France et émit cette opinion dans son histoire de la souveraineté des Dombes, (Lyon 1659); mais Chorier s'insurge contre cette thèse et nous livre une analyse, très documentée, du récit des auteurs anciens, grecs et latins qui ont légué à la postérité la narration du passage du Rhône par Annibal et son armée, et sa marche à travers la Narbonnaise jusqu'aux Alpes. Il fait précéder son récit de quelques paradoxes, où il défend l'invraisemblance de sa comparaison « Tout le Dau« phiné est un triangle, écrit-il, dont la base et assise sur le « Rhône, et cette partie de laquelle nous parlons, le confluent « du Rhône et de l'Isère en est un qui, au contraire, a la « sienne vers les Alpes. Cela est conforme à la description « qu'en fait Polybe. Ainsi la comparaison que ce même Grec
« en fait avec l'Ile d'Egypte que les grecs ont nommée Delta « et les Egyptiens Ptusyris, est assei justifiée (?) joint qu'il n'y a o pas apparence de se persuader que les Iles, à qui ce nom a été a donné par les Grecs aient eu parfaitement la figure de cette « lettre. Il suffit que ceux qui le leur ont imposé les premiers se « le soient imaginés et que leur pensée ait été appuyée sur quelque e vraisemblance, la postérité n'a pas eu le droit de combattre leur « imagination, ajoutez-y que même la liberté des Grecs a été « si grande en l'imposition des noms, qu'ils ont donné celui <̃ de Delta à des choses infiniment éloignées de la figztre de cette o lettre, »
Chorier étend ensuite son sujet et sème le doute qui l'étreint, il continue en ce sens: « Cette partie du Dauphiné qui est au deçà de l'Isère, vers le septentrion, reçoit de la rencontre des eaux de cette rivière et de celles du Rhosne, la figure du A grec (?). C'est infalliblement l'îsle où entra Annibal, comme dit Polybe, après qu'il eut passé le Rhosne. Mais les plus savants n'ont pas laissé cette venté {)) sans dispute. Nul des anciens n'a parlé de cette Isle, après Polybe qui vivait au siècle des Scipions, excepté Tite-Live, qui vivait feus le règne de Tibère de sorte qu'elle semble fuir devant ceux qui la cherchent, comme l'on dit de quelques-unes de l'Océan Atlantique.
« Ces deux historiens, et Plutarque avec eux, nous apprennent qu'Annibal ayant pénétré jusque au pays des Volces, qui habitoient le long du Rhosne dans le Languedoc, y passa ce fleuve avec ses éléphants et toute son armée. C'est un commun sentiment que ce fut où est maintenant Beaucaire, ou certes à Roquemaure; quatre jours après, il arriva au lieu qu'en ce temps-là les Gaulois appelaient l'Isle comme disent Polybe et Tite-Live? S'y estant rafraischy, il ne continua pas son chemin en dioite ligne, mais il tourna à main gauche vers les Tricastins, d'où il entra dans le pays des Tricoriens par les extrémités de celuy des Voconces. Tellement qu'après cela, ayant passé la Durance, il gagna le sommet des Alpes. D'icy il montra à ses soldats les plaines d'Italie aux environs du Pô voilà
comme ces autheurs parlent de ce passage et voicy comme ils en auraient parlé s'ils avaient écrit en ce temps-ci et en notre langue Annibal, ayant passé le Rhosne rencontra, audessus de l'Isère, qu'il traversa, ce pays que les Gaulois appelaient l'Isle (?), parce que les Alpes et ces deux rivières l'enferment. Rebroussant, comme il n'estait pas fort éloigné du Rhosne, il tourna vers Nyons et vers la cité des Tricastins. « Cette marche d'Annibal, montre clairement que cette Isle est cette partie du Dauphine dont le Viennois est la principale. Les qualitez que lui donnent Polybe et Tite-Live y paraissent avantageusement. Mais je ravirais à Philippe Cluvier une louange qui luy est due, si je n'avouais qu'il s'est aperçu le premier de cette vérité, et que le premier il l'a publiée. « Néanmoins, de bons esprits opposent leurs sentiments à celuy de ce grand géographe. Les uns veulent que cette Isle soit seulement le lieu où depuis la ville de Lyon a esté bastie entre le Rhosne et la Saône.
« Mais il faut qu'ils tombent d'accord qu'Annibal n'a passé le Rhosne qu'une fois en sa marche. Ils ne peuvent non plus nier que ce n'ait esté dans le pays des Volces, puisque TiteLive et Plutarque le tesmoignent. Or, les Volces sont les peuples de Languedoc opposez aux Salyens, qui, estant divisez en Arecomiques et en Tectofages, habitaient cette étendue de terre où sont Tolose, Nismes, Usez, Beaucaire et ['quelques autres villes. Ayant donc passé le Rhosne auprès de Beaucaire, si Lyon estait cette Isle, il n'aurait pu éviter de le repasser encore pour y entrer Et s'ils adjoûtentfoyà ces deux auteurs, qui écrivent que sortant de cette Isle il prit sa marche vers les Tricastins, les Voconces et les Tricoriens, ils advoüeront encore qu'il le repassa une troisième fois pour venir retrouver ces peuples dans le bas Dauphiné. Quelle inconsideration ne lui aurait-ce pas esté, n'ayant point de moment qui ne luy deu est, ptécieux, de perdre ainsi et son temps et ses soldats. N'aurait-il pas esté blâmable de traverser si souvent, et sans nécessité, un fleuve qu'il avait eu plus de peine à vaincre dans
le pays des VOLCES que les Volces MESMES. » Cette très judicieuse dissertation est extraite du lIe volume de son Histoire du Dauphiné, page 12 et 13.
Dans ces lignes, il lui a semblé plus net de couper court à cette interprétation en adoptant le Dauphine comme le domaine de l'Ile et du Delta décrits par Polybe, et de garantir à sa province le caractère d'authenticité du récit par le greffage d'une forme grecque truquée en Scoras ou Isaras. Depuis ce jour, tous les auteurs, y compris l'abbé Chalieu, ont accepté cette théorie géographique où sévit le besoin de se rattacher à une solution quelconque tous ont refusé de se dessaisir de ce lourd héritage, sans s'apercevoir qu'ils embrassaient une impossibilité topographique, avec la prétention d'affirmer l'état de possession de l'Ile et du Delta de Polybe, par le confluent de l'Isère et du Rhône; nous n'avons fait qu'assister au renchérissement de cette prétention.
Le Delta Egyptien. Sa description. Comme élément documentaire et comme terme de comparaison, il sera plus aisé de prendre conscience de la réalité par la description du Delta Egyptien Strabon dans le livre XVII, chapitre (l'Egypte) de sa Géographie, nous en a transmis un levé de plan effectué sur le terrain même le texte grec dit: « Le Nil, « descendu en droite ligne des confins de l'Ethiopie court vers « le Nord jusqu'en cette région dénommée Delta, où le fleuve « comme s'il était coupé par un abîme, comme le dit Platon « (dans Timœon), forme en ce même lieu la figure d'un « triangle. Les côtés du triangle sont deux branches du Nil, « se dirigeant l'une et l'autre vers la mer; l'une, celle de droite, « coule jusqu'à Peluse l'autre, celle de gauche, passe entre « Canope et Héracléon mais sa base est maritime et se déploie « entre les bouches de Peluse et d'Heiacléon.
« De cette façon l'Ile est entourée par les deux branches « du Nil et par la mer elle est appelée DELTA parce que son « tracé représente la figure de la lettre A.
« Le terrain, situé à la pointe du triangle, est désigné sous « cette même appellation, c'est là, en effet, le commencement de la forme A et la ville, qui est bâtie en ce lieu, est de « même appelée Delta.
« Nous avons déjà parlé des deux branches du Nil, l'une « dite la Pélusiaque et l'autre la Canopique ou Héracléo« tique; mais, entre ces deux portes du fleuve, s'ouvrent aussi « cinq autres issues de rivières, qui, en vérité, méritent une « mention mais entre celles-ci, il existe un certain nombre « de branches, de cours d'eau plus ténus.
« Détachés des branches premières et divisés çà et là à « travers Vile (le Delta), ces bras ont formé quantité de ruis« seaux et d'îles, de telle façon que le Delta est de toute part « navigable à travers les autres branches, de nombreux « canaux creusés peuvent être parcourus avec tant de sécurité a que les indigènes se servent d'esquifs en terre cuite »
Cette description sera complète en disant que les cinq branches du Delta qui sont dignes d'être citées s'appellent celles de gauche, après la bouche Canopique, la bouche Bolbitine, Sébénnitique et la Phatnique; celle-ci est la troisième en grandeur après les deux principales qui encerclent le Delta à droite avant la bouche Pélusiaque, on trouve la bouche Mendésienne et ensuite la Tanitique.
A la clarté de ce dessin des régions tenues par le Delta égyptien, des notions précises de documentation s'éveillent et fournissent des directions facilitant la recherche d'un delta semblable que Polybe a vu en nos contrées.
Où est le Delta de Polybe? Aucun effort d'initiative dans cette recherche n'a jamais été tenté; les soins d'allier la réalité topographique aux nécessités du texte n'ont pas eu la force d'arrêter ou de retenir les critiques et les historiens dans leur méthode d'investigation tous, abandonnés au courant commun, n'ont pas eu la témérité de frayer une voie nouvelle, la seule vraie.
Parmi les documents cartographiques que nous avons eus sous les yeux, trois doivent être cités parce qu'ils sont en relation étroite avec notre sujet ils nous intéressent à un double titre; par le tracé de leurs contours, ils représentent les limites des nations ou clans celtiques qui nous occupent, et par les reliefs des terrains, nous en divisent la planimétrie. Ce premier document est la carte qui figure sous le numéro IV à la suite du volume de la Géographie de Strabon, (texte grec avec traduction latine, Firmin Didot, Paris i853), elle a comme titre « Galliœ figura secundum Strabonem » c'est-à-dire « Carte de la Gaule d'après Strabon » la Narbonnaise y est dessinée avec la place et l'appellation de chaque nation Gauloise; les Allobroges tiennent toute la partie du Nord sur cette vaste étendue (celle occupée par les Allobroges) deux fleuves seuls sont mentionnés, le Rhône (Rhodanus) et l'Isère (Isara); au confluent de ces deux fleuves, l'on ne découvre l'indice d'aucun fleuveou rivière.
Le deuxième document est du aux travaux d'Antonin Macé, professeur d'histoire à la Faculté des Lettres de Grenoble il a été publié en 1 86 sous le titre de « Mémoire sur la Géographie du Dauphiné ') l'auteur complète son étude par une carte à grande échelle sous la désignation de « Carte du Dauphiné et de la Savoie avant et pendant la domination romaine ». Au confluent du Rhône et de l'Isère, l'auteur
inscrit très sérieusement la notation « DELTA DE POLYBE » et sur une surface d'environ 4o kilomètres carrés, on aperçoit deux lignes désignant sans doute deux rivières, l'une porte le nom de l'Herbasse (?) et l'autre ligne, celui de la Galaure (?). Qu'il nous soit permis de poser cette simple question est-il possible, après la lecture de la description de Polybe, comparant le Delta où avaient campé Annibal et son armée, à celui du Nil, semblable, dit-il, par son étendue, sa fertilité, sa population dense et surtout après la definition topographique de ce Delta décrit parStrabon, est-il possible, disonsnous, de voir un lettré, un professeur d'histoire, à qui la topographie de notre région était connue, ne pas prendre conscience que deux minuscules ruisselets, dent le filet d'eau se cache en des sinuosités serpentant à travers d'épais taillis, ruisselets ignobiles, ne constituaient pas les agents d'un delta classique ?
Le troisième document est la carte du Dauphiné, par Mercator, publiée en i585 et reproduite par Bouguereau en r593; cette carte, dont la topologie est minutieusement gravée, ne nous montre au confluent de l'Isère et du Rhône, ni même dans la région qui s'étend jusqu'à la Saône, aucun signe d'un ruisseau ou d'une rivière digne d'être indiqué. Ajoutons, à titre de mention, que la carte du service vicinal dressée par le Ministère de l'Intérieur ne comporte, dans tout le triangle formé par la jonction de l'Isère et du Rhône, que le tracé d'un seul ruisseau se jetant dans l'Isère, l'Herbasse (?). Il est facile par l'examen de cette cartographie de montrer devant quelle erreur couraient les critiques ou les savants (?) qui étaient parvenus à créer un courant d'adaptation topographique fausse, basée sur des convictions mal étayées venant après l'affirmation des textes grecs et latins, cette cartographie corrige définitivement cette fiction proclamée, propagée, enseignée contre toute vérité, que Polybe avait vu et placé son Delta dans la contrée où se réunissent l'Isère et le Rhône.
Mais Polybe et Strabon n'ont pas été le jouet d'un mirage et n'ont pas été suggestionnés par une illusion de leur vision; ce Delta, doté de fleuves, d'émissaires d'écoulements, à la fertilité proclamée, existe, mais, comme, l'écrit Chorier « les sçavans n'ont pas laissé cette vérité sans dispute » nous avons la conviction de mettre fin à cette dispute séculaire et d'enseigner la vérité en retrouvant cette Isle et ce Delta égarés.
Le vrai Delta de Polybe son emplacement. Nous devons croire que les auteurs qui, après Chorier, ont poursuivi ce but chimerique de s'associer à un non sens et d'imposer une conception topographique difficile à soutenir, ignoraient le récit que l'écrivain Dauphinois nous a laissé. « Nul des anciens, écrit Chorier, n'a parle de cette Isle, après « Polybe qui vivait au siècle des Scipions, excepté Tite-Live « qui vivait sous le règne de Tibère. de sorte qu'elle semble « fuir devant ceux qui la cherchent. » Or, il convient de se souvenir que Tite-Live a écrit l'histoire de la seconde guerre punique d'après Polybe, et que l'historien grec est l'auteur original de l'historien latin.
Chorier continue son récit en ces termes « Ces deux his« toriens et Plutarqueavec eux nous apprennent qu'Annibal, « ayant penétre jusque au pays des Volces, qui habitaient le « long du Rhône dans le Languedoc, y passa ce fleuve avec « ses éléphants et toute son armée. C'est un commun senti« ment que ce fut où est maintenant Beaucaire. Quatre jours « après, il arriva au lieu qu'en ce temps-là les Gaulois appe« laient l'Isle, comme disent Polybe et Tite-Live, s'y estant « rafraischy, il ne continua pas son chemin en droite ligne, « mais il tourna à main gauche vers les Tricastins, d'où il « entra dans le pays des Tricoriens par les extrémités de « celui des Voconciens. » C'est la narration même de TiteLive.
L'historien latin a écrit cette phrase: Hannibal, jam in ~o/carMM! pervenerat ag~M~, gentis fa/ï'~tT. Co/M~t autem circa M~ra~~Me ripam Rhodani. profectus adversâ r~<! Rhodani mediterranea G<e<!f, texte qui signifie « Annibal « était dejà arrivé dans le pays des Volces, nation puissan« te. Ils sont établis sur l'une et l'autre rive du Rhône. f parti de la rive gauche du Rhône, il gagna les terres en a plaine de la Gaule, Le passage du Rhône effectue, Annibal trouva à sa droite les Salyens et s'engagea dans le territoire des Cavares.
Le Delta chez les Cavares. Sa topographie classique. Ses sept branches. Strabon avec sa clarté méthodique, nous a dépeint la figure topographique de la région habitée par les Cavares: e Les Salyens, écrit Strabon, (livre ~F, Cycle II, Gallia Narbonensis). habitent la con« trée comprise entre les Alpes et le Rhône et s'etendent jus< qu'aux rives de la Durance.
« Après la traversee de la Durance en face de Cavaillon '< toute la région est occupée par les Cavares jusqu'aux con« fluents de l'Eygues (Isaros) et du Rhône.
« Dans ces mêmes lieux où coule la Durance, les Salyens « tiennent la plaine et s'etendent dans la partie montagneuse « qui la domine. Au-dessus des Cavares habitent les Voconces, les Iconiens, les Tricoriens et les Médules.
« Entre la Durance et l'Eygues coulent d'autres fleuves « qui descendent Aussi des Alpes et se jettent dans le Rhône. « Deux, parmi ces fleuves, baignent la ville des Cavares« Vares (Bédarrides), d'où réunis dans un cours commun ils « se joignent au Rhône.
« Une TROISIEME rivière est Soulgas (la Sorgue) qui aux a environs de la ville d'Oundalon (Sorgue) mêle ses eaux au « Rhône.
« Au milieu de ce territoire sont bâties les villes de Avenion « (Avignon), Arausion (Orange) et Aëria (Carpentras). « Toute cette contrée ne présente que des plaines et de gras « paturages; toutefois sur le parcours de Aéria (Carpentras), « à Dourion (Malaucène) on franchit des déniés étroits et « boisés.
Ainsi, dans cette région à la plaine fertile, fermée à l'Orient par une ceinture de monts, véritable barrière naturelle, derniers rameaux des Alpes, Strabon mentionne la Durance, l'Eygues (Isaros), le Rhône, la Sorgue-Velleron, l'Ouvèze, ~OM~H:o~], la Sorgue (Soulgas), soit six fleuves et six villes c'est-à-dire « Oundalon (Sorgue]. la <reM{ des Cavares-Vares « (Bedarrides), Avignon, Orange, Aeria-Carpentras et Dou« rion-Malaucène.
Rapprochons ce schéma du récit de Polybe, soit que l'on adopte la version du sentiment commun que le passage du Rhône par Annibal s'effectua en face de Beaucaire, soit que l'on incline à accepter l'opinion de Faugas de Saint-Fons, « qui suit avec une scrupuleuse attention, écrit-il, Polybe à la « main, l'armée Carthaginoise depuis son passage du Rhône au-dessous d'Avignon, opinion citee par Delacroix (i), nous devons en conclure que le district des Cavares tut traversé dans toute sa longueur, de la Durance à l'Eygues, par l'armée d'Annibal..
Polybe écrit « Cette région (de la Durance à r/e) est « semblable d'ailleurs, tant par son étendue que par sa forme « (topographique) à cette contrée que l'on appelle en Egypte, « le Delta ces deux régions en diffèrent sur ce point qu'en « Egypte la mer s'étend sur la face la plus longue, tandis « qu'ici le cours des deux fleuves (la Durance et le 7%OK~ (t) DELACROIX. Statistique de la Drôme, 1817.
l'enserre en même temps celle-ci est fermée par une bar« rière de montagnes d'accès et de pénétration difficiles. Cette partie du Delta parcourue, l'Isle (N~ot) s'ouvre à la marche d'Annibal une île véritable avec son caractère topographique reçoit l'armée punique, ses éléphants, ses impedimenta les deux narrateurs, le grec et le latin, affirment l'authenticité de la forme du lieu, mais l'abbé Chalieu éprouve l'embarras d'écrire « qu'il ne faut pas prendre le mot Insula, dans son sens strict » Polybe dit « l'appellation d'lle lui est attribuée à cause de M/brwe et Tite-Live, à son tour repète « ad Irsulam pervenit, » « il arriva dans l'Ile. Nous avons démontré ci-dessus l'exactitude de cette définition. C'est le quatrième jour après la traversée du Rhône, traversée mouvementée, pleine de perils, de difficultes de tout ordre à surmonter, racontée par Tite-Live, que le chef punique « parvint dans cette He, ainsi nommée par ses habi« tants à cause de sa figure, district très peuplé, fertile en blé, « formant une figure en pointe par le confluent de l'Eygues (Isaros) et du Rhône et fermée au sommet de son triangle « par le Ventoux. »
L'Isle (NoTof) comprend toute la partie nord du Delta et forme corps avec lui nous avons exposé, en cette partie de notre étude, avec les garanties de leur origine, la description du Delta Egyptien tirée de la Géographie de Strabon, relaté la topographie du district Cavare le véritable Delta vu par Polybe, légué par le même géographe Grec, démontre l'état de possession de son titre historique de « N)]To< x « l'Isie », attribué au territoire du confluent où l'Eygues s'unit au Rhône, et enfin sans aucun renchérissement d'affirmation nous avons substitué la verité à l'erreur par le récit même de Polybe; ces trois textes, qui appartiennent au domaine historique, constituent un groupe d'éléments affirmatifs et indiscutables,
Cette série de documents nous démontre « que cette fertile région des Cavares, resserrée entre la Durance au Sud, le « Rhône à l'Occident, l'Eygues (Isaros) au Septentrion, bar« rée à l'Orient par l'immense développement du Ventoux et « de ses rameaux qui se rattachent aux monts de Vaucluse « et aux montagnes de Luberon au Sud-est, possédaient aux « temps celtiques une valeur stratégique, des cités riches et « en grand nombre, une population agricole et pastorale, « très dense eu égard à l'époque ses ressources de toute « nature avaient été mises en valeur et accrues par l'acti« vite commerciale des Phocéens route directe jd'acces « en Italie, passage de toutes les invasions accourues du « Nord ou de l'Occident, le territoire des Cavares, arrosé « par les sept branches de son De~eMjc, comparable à « celui du Nil, avait été, des les temps historiques, la proie
a des convoitises de tous les envahisseurs ') (i) Vingt siècles après ce tableau, aux lignes dessinées par le géographe grec Strabon, Lenthéric, à son tour, dans son ouvrage « Le Rhône nous parle avec quelques détails, ditil, de cette terre privilégiée du Comtat Venaissin, l'ancien district des Cavares et, sous sa plume élégante, nous conduit à travers ces campagnes fertiles, protégées par les hautes murailles dentelées et escarpées des montagnes, qui ferment son horizon au levant.
Lentheric écrit (le Rhône) tt" volume, pages to/).et suivantes]
e On dit la « Huerta n de Valence; on pourrait aussi bien dire la Huerta o de Vaucluse. La plaine qui cotoie le Rhône et qui s'étend jusqu'à la montagne de Vaucluse, est en (t) Les Cités Mystérieuses de Strabon. Bulletin d~ <f!~OCtCfed'~lt'c/ico<o~!e de la Drôme.
effet, un véritable jardin. Z~/crwe'e, entre le grand fleuve, la Durance et la rivière de l'Ouvèze, qui baigne les murs de l'antique Fa<~OK, traversée par~/a Sorgue et ses ramifications, sillonnée par un nombre considérable de canaux et de filioles dont les chutes motrices actionnent une série presque ininterrompue d'usines et de moulins, cette plaine privilégiée, tour à tour échauffée par le Soleil de la Provence, rafraîchie, colmatée, nourrie par des eaux d'arrosage et des eaux industrielles, est devenue une sorte de terre promise. La Banlieue d'Avignon, en particulier, est une oasis d'une fertilité, d'une fraîcheur, d'une richesse incomparables. La Sorgue, ou mieux les Sorgues, car la rivière se divise en une foule de bras, divaguaient autrejois dans cette plaine. Tout est transformé aujourd'hui mais les désignations locales nous ont conservé le souvenir de la physionomie paludéenne de la région. La belle église romano-byzantine du Thor, castrum de Thoro, porte le nom de Notre-Dame-du-Lac L'ancien petit bourg de Saint-Laurent s'appelait, dans le principe, « LES ILES ». T~M/tT, et n'était, jusqu'au neuvième siècle, qu'une agglomération de cabanes de pêcheurs construites sur pilotis, un peu partout au hasard, dans la plaine noyée par les eaux stagnantes de la Sorgue. Le marécage a été désséché, la plaine assainie et rendue à la culture, et la jolie petite ville de l'Isle-sur-Sorgues, traversée par les canaux des Sorgues » ou des « Sorguettes apparaît comme une ville en quelque sorte amphibie, toute ruisselante de l'écume de ses moulins et de ses usines, aux grandes roues clapotantes elle est, depuis plus de quatre cents ans, une des plus riches et des plus industrielles du Comtat.
« Un peu au-dessus de l'Isle, tous les bras de la Sorgue se réunissent en un fleuve. La vallée se resserre entre deux rangs de collines pierreuses, sur lesquelles s'étagent les vignes et les oliviers de Provence. A dix kilomètres plus en amont, la route fait un coude brusque, et la vallée s'élargit. Le paysage devient alors grandiose. La Sorgues bouillonne dans son lit 2" SÉRIE. XUU" VOLUME. tÇOO.
comme un gave pyrénéen. Ce n'est plus un torrent, c'est presque une chute d'eau, un enchevêtrement de « rapides x et de cascades, qui s'entrecroisent, et dont les nots se brisent contre d'énormes f~c~e~ écroulés des falaises /a/era/es. La vallée se ferme tout à coup. C'est bien comme son nom l'indique la « vallée close », Vaucluse, vallis clusa Une MMf~!7/~ s'élève ci pic, sur M;!e Actii/eM) de 200 M;e~M,~(tn~t<ëe de contre/b~s :Mt)CCt;M!&/M, c~M!Mt!/ !<t:e so;<e de c:)~i~; une chambre aux parois calcaires et dénudées, dont la crête superieure, dentelée et déchirée, se decoupe en creneaux sur le ciel. Cà et là contre l'énorme muraille, un trou beant, un nid d'aigle, un pin suspendu entre ciel et terre, cramponné par ses racines aux flancs du rocher
La topographie classique du Delta. Ses sept fleuves. Si toute la cartographie est muette sur l'existence d'une île et d'un delta au confluent de l'Isère et du Rhône, île et delta hypothetiques en ce lieu, si quelques géographes y montrent le cours d'un minuscule ruisselet l'Herbasse, par contre, la cartographie, aussi bien celle établie à l'aide des textes grecs et latins, que celle de l'époque de la Renaissance et des temps modernes, est unanime à tracer et à placer dans l'ancien district Cavare, aujourd'hui le département de Vaucluse, un veritable Delta, pourvu des eléments caracteristiques qui ont rendu fameux le Delta Egyptien, le prototype de cette forme et figure topographiques. Nous invitons les savants à consulter la carte qui accompagne le volume de la Géographie de Strabon (carte supra), ils y remarqueront dessiné l'exact et véridique Delta de Polybe, situé dans le district Cavare le fond du Delta est fermé par un front de montagnes, prolongement des Alpes, d'où les rivières, descendues des hauteurs, coulent dans la
vaste plaine et vont se mêler au Rhône; ce grandiose Delta, enserré par la Durance, l'Eygues et le Rhône, forme en son ensemble une île véritable sur ce même territoire, la carte indique écrites les appellations de six cités, celles désignées par Strabon.
De même dans la carte tracée par Antoine Macé à l'appui de son memoire s~ la Geo~a/)/<; ~M/3aM~AtMe~<S6~), l'observateur y releve grave le schéma du Delta l'Eygues au Nord, le Rhône à l'Occident, la Durance au Sud au milieu, quatre autres rivières traversent la plaine et courent s'unir aux deux artères principales, la Durance et le Rhône. La carte de Mercator, )585, nous fournit la même réalité documentaire, mais, ou l'attention est surtout retenue, c'est par l'aspect des lignes marquant la figuration de l'emplacement du territoire occupé par le département de Vaucluse; l'affirmation du Delta devient si patente qu'aucune autre démonstration ne saurait prevaloir.
Les sept branches. La dernière démonstration, celle qui détient l'expression de l'enseignement à saisir, est la présence des sept fleuves ou rivières, dignes de mention, arrosant ou délimitant le Delta, en allant du Sud au Nord <° La Durance, descendue des Hautes-Alpes;
2" Le Coulon, son affluent, descendu des Basses-Alpes. 3° ( Les deux Sorgues (Soulgas), la .Sor~t<M de Velleron et 4° celle de /e, émissaires de la fontaine de Vaucluse. 5° L'OMf~e (Ouasion), descendue du versant Ouest de la montagne de la C/awo!<se.
6° L'Aygues ou Eygues (Isaros en Grec et Icarus en latin), rivière descendue d'une altitude de 1,000 mètres d'un contre fort des Alpes du Gapençats.
7° Le Rhône, le grand fleuve, descendu des montagnes du Valais en Suisse.
« Après ces deux grands torrents (la Durance et l'Eygues), « une foule de petites rivières se pressent dans un espace très « serré ces petits <o)ren<s ne M!e?t~er~:eM~ sans doute pas « l'honneur d'être nommés, s'il n'était essentiel de les signaler, « à cause du mal qu'ils font à l'envi dans une partie du dépar.« tement.
« L'Auzon më)!<e f~'ê/te ~ts<:M~ue parmi toutes les rivieres, « parce que très !at'eM:ett< cesse-<-e//e ~'avo:f de l'eau même « dans les plus longues sécher esses et ce dans les plus fortes « chaleurs.
« La Nesque prend sa source derrière le Ventoux, reçoit « quelques ruisseaux et diverses eaux qui s'échappent des « flancs de la vallee du Sault; elle en sort au midi près de « Monieux, après en avoir arrose les prairies, et se jettedans « dans un des bras de la So?g~es.
« Parmi les diverses sources, après celle de Vaucluse, deux « méritent particulièrement d'être distinguées; la première, « la plus digne de remarque par la quantité d'eau qu'elle n fournit, est la source de Fayolles, qu'on rencontre sur le « flanc nord du Ventoux, la deuxième est celle du Groseau, « près de Malaucène; les plus grandes chaleurs, et les plus « longues sécheresses n'en font point diminuer la quantité « les eaux du Groseau arrosent la ville de Malaucène, et vont « se jeter ensuite dans l'Ouvèze. (Ma~tM!e faz~M, supra cita) ». Comparons cet extrait descriptif avec la fin de la définition du Delta Egyptien, tirée de la Géographie de Strabon, nous y lisons: « Nous avons déjà parlé des deux branches du Nil, « mais, entre ces deux portes du fleuve, s'ouvrent aussi cinq < autres issues de rivières qui, en vérité, méritent une
a mention entre celles-ci coule un certain nombre de cours « d'eau plus ténus ces branches ténues ont formé nombre « de ruisseaux et d'tles n.
L'hydraulique du Delta Egyptien d'après le récit de Strabon, et celle du Delta des Cafa~es (Comtat Venaissin), dépeinte par Lenthéric et Pazzis, ont des points de -ressemblance si rigoureusement exacts, que les mêmes termes d'exposition des lieuxs'allient à un même enseignement de l'affirmation produitepar Polybe; < que cette région (le Delta Ca~atr~ est « o!'a:e:<?s, semblable, tant par ~o~ étendue que par sa fotme « topographique, à cette contrée que l'on appelle en Egypte, le « De/ »-
La sincérité du texte de Tite-Live. Après une attente de dix-huit siècles, attente quelque peu longue- on l'avouera, la correction de cette prétendue erreur de texte attribuée à Tite-Live, par la phrase fameuse « Cùm jam Alpes « peteret, non rectâ regione iter instituit, sed ad laevam in « Tricastinos flexit, inde per extremam oram Vocontiorum, e agri tetendit in Fricorios. ad Druentiam flumen per« venit », erreur qui paraissait un souci auquel obeissaient les critiques, les historiens et les savants de tout ordre et de tout pays, se réduit à une simple formule d'exactitude dans le récit et dans la topographie.
L'amas de thèses, hypothèses, dissertations, où chaque e auteur a adopté le Dauphiné comme le domaine de l'île et du Delta de Polybe, et de l'Ile de Tite-Live, ne les a pas préservés chacun garantissant l'authenticité de cette conception de caresser une impossibilité et d'accepter le poids d'un lourd héritage l'interpretation fidèle du texte de l'historien latin se lit en ces phrases.
« Annibal était déjà arrivé sur le territoire des Volques, « nation puissante. Ceux-ci occupent l'une et l'autre rive du « Rhône; parti de la rive gauche du Rhône, il gagna la « région en plaine de la Gaule. Au quatrième jour de campe« ment, il mit le pied dans l'T~e où l'Eygues (IcARusen latin, « IsApos en grec) et le fleuve le Rhône, descendus de points « opposés des Alpes, réunissent leurs eaux après avoir « entouré une petite partie de la contrée l'appellation d'Ile « est donnée aux plaines entre les deux fleuves; les Allobroges habitent à proximité.
« Comme bientôt il se dirigeait vers les Alpes, il ne prit « pas la route en droite ligne, mais il s'achemina à main « gauche chez les Tricastins de là il passa par l'extrémité « de la frontière des Voconces, arriva chez les Tricoriens « et enfin parvint sur la rive du fleuve la Durance ». Et dans cette région du Delta Cavare, fertile en blé, comme l'enseigne aussi Pline, Annibal puisa et renouvela ses provisions de toute nature, blés, armes, vêtements, comme nous l'apprend Polybe son armée ravitaillée par les ressources prises sur la région du Delta, le général punique la conduisit vers les Alpes, n'ayant jamais vu le confluent de l'Isère et du Rhône, territoire caillouteux, vaste bande inculte, privée de toute agglomération humaine en l'an af<? avant l'ère chrétienne. Grâce aux témoignages de l'histoire, malgré la distance des temps, le spectacle de cette grande épopée évolue sous nos yeux; il est bon de nous arrêter un instant, et de relever un argument qui apporte une clarté nouvelle le voyageur parti de la rive gauche au point du passage du Rhône, audessous d'Avignon, qui veut se rendre dans la partie de l'lle voisine des Tricastins, aura à parcourir une distance d'environ
68 kilomètres. L'abbé Chalieu écrit « Annibal avait une '< armée nombreuse, forte au moins de quatre-vingt mille « hommes en infanterie, en cavalerie et il menait un assez « grand nombre d'éléphants. Ajoutez-y des équipages, des « provisions de guerre et même de bouche. /'a7Mtëe était o&ee ~'afa!:cer avec /))'eMM<!OM dans un pays ~M'e//e ne con« Ka!'Mat!< pas et où sa seuleybrct; et son e~sew~/e ~OM'M:'eM< la « faire respecter ».
Avec de telles précautions une armée engagée dans un pays marécageux, sillonné de multiples cours d'eau, et alourdie par ses impedimenta, chemine lentement la marche de quatre jours mise à traverser la contrée du Delta avant d'atteindre la vaste plaine de l'Ile, située à plus de 60 kilomètres au nord s'explique sans peine.
Ainsi par l'étude, la recherche et le choix des enseignements de l'histoire, par l'exploration des lieux, nous sommes convaincu d'avoir dissipé le mystère primitif qui cachait l'7/e et le Delta de Polybe à des sophismes d'érudition alambiquée, nous avons opposé le réveil de la précise et véridique narration de Tite-Live.
(A contmue~ A. BÉRETTA,
Inspecteur de i'Ass:s<ance pubhqMe de la Drowe.
HISTOIRE DU DIOCÈSE DE
SA~I-PAUlt-It!OtS-G~IEm
(SutTE.–Voirtes]63àt67*iivraisons)
Toutefois, avant de retracer ce que nous savons de cette prodigieuse transformation, du moins en ce qui regarde Augusta rr~x~orM/M, il faut dire quelques mots des croyances, des rites religieux et des moeurs qui régnaient dans cette ville.
A Augusta Tr/c~/MruM, comme dans tant d'autres villes de la Gaule, deux systèmes de croyances, deux religions et deux cultes se trouvaient en présence. D'un côté se trouvait encore l'antique religion druidique, avec ses croyances et son culte de l'autre, c'était le polythéisme de la Grèce et de Rome, introduit dans le midi de la Gaule par la conquête romaine. Le dogme fondamental du druidisme était une sorte de panthéisme. La nature entière est Dieu et manifeste Dieu par tous ses phénomènes. C'est la divinité qui parle dans la foudre, dans la tempête, dans le bruissement des feuilles, dans le murmure du ruisseau. De cette doctrine découlait, comme conséquence, le dogme de l'éternité de la matière et de l'esprit,
parties essentiellement inséparables de l'Etre suprême, aussi unique qu'universel. Le monde est aussi indestructible dans sa substance que varié et changeant dans ses formes. L'âme humaine, à sa séparation du corps, va régir d'autres organes dans une autre sphère pour elle, la mort n'est que le milieu d'une longue vie. Au terme de ses transmigrations, elle trouve un monde heureux, sans se dépouiller de ses goûts ni de ses habitudes. De là ces affaires d'intérêt dont le Gaulois renvoie l'arrangement après la mort de là ces prêts d'argent remboursables au-delà de la tombe de là ces lettres jetées dans les flammes pour transmettre au pays des âmes les nouvelles des parents et amis encore de ce bas monde de là la coutume, aussi barbare qu'invétérée chez le Gaulois, au décès d'un personnage de distinction, d'égorger un certain nombre de ses esclaves et de ses clients, de les brûter ou enterrer à ses côtés, avec son cheval de bataille, ses armes et ses parures, afin que le défunt paraisse dans l'autre vie sans déchoir de son rang.
Cette foi ferme à l'immortalité rendait les Gaulois prodigues de leur vie, les faisait courir sur le fer dans les batailles avec une indifférence complète elle les faisait se précipiter sur le bûcher de ceux qu'ils pleuraient, afin de les rejoindre sans retard dans l'autre monde. Mais, combinée avec la croyance à la métempsycose, elle introduisit ou, du moins, multiplia les sacrifices on croyait que la vie d'un homme pouvait servir à racheter celle d'un autre dont la transmigration était imminente, et qu'on l'obtenait des dieux immortels par ces sacrifices. Les victimes étaient mises en croix, tuées à coups de flèches, ou brûlées dans des idoles
d'osier. Elles étaient prises parmi les prisonniers de guerre ou les criminels, quelquefois même parmi les innocents.
Quant à l'extérieur du culte, ses traits caractéristiques sont l'absence de temple, l'exclusion des formes artistiques dans ses monuments, et sa préférence pour les pierres non taillées. comme celles que nous avons signalées chez nos Tricastins.
Cependant la notion trop générale du dieu-nature fit place, avec le temps, chez les Gaulois, à un dieu personnel, ayant un nom et une existence propres, souffrant qu'on lui érigeât des statues et même des temples. I) s'appela Teutatè8, Heus ou Hésus, Bel ou Belen, Taranis ou T'a;raHf!, etc, selon les qualités ou actions qu'on voulait surtout rappeler ou honorer en lui. On en vint même à déifier chacun des attributs et des actes de l'Etre universel, tous les principaux phénomènes de la nature, et la plupart des êtres. Toutes ces divinités eurent leur culte. De la, à côté des dieux adorés par l'universalité des Gaulois, les divinités topiques mentionnées dans les inscriptions antiques et invoquées par des peuplades plus ou moins considérables.
Les ministres de ces divinités étaient les druides, constituant une forte et puissante hiérarchte, distincte de l'aristocratie guerrière et de la masse du peuple. Des prêtresses étaient aniliées aussi à l'ordre des druides, sans en partager les hautes prérogatives. Magiciennes ou prophétesses, elles avaient une existence et un rôle à part, et acquéraient souvent sur le peuple un véritable ascendant. Le souvenir de leur vie errante en des lieux solitaires s'est conservé jusqu'à nos jours dans la
mémoire des peuples. De là ces grottes aux fées, ces grottes des vierges, qu'on montre un peu partout, notamment la Bau/M~ des Fées, partiellement détruite en ces derniers temps, près de la fontaine de Tourne. à Bourg-Saint-Andéol, non loin de la cité tricastine. Telles étaient certainement dans leurs traits généraux les croyances et la religion des Tricastins, quand la conquête romaine les arrêta dans leur expansion. Rome, en vue d'unifier le monde soumis à ses lois, imposa à la fois sa langue et sa religion. Le druidisme sans disparaître, fut supplanté dans les cérémonies extérieures de son culte. Le culte et les noms des dieux de Rome remplacèrent le culte et les noms des dieux indigènes. Des temples s'élevèrent en leur honneur dans toutes les villes de la Gaule et dans les centres de population romaine qui s'étaient formés aux abords des grandes voies.
Dès lors, Augusta Tricastinorum était toute désignée pour recevoir les dieux de l'Empire. Aussi y avons-nous déjà remarqué le culte de Jupiter et celui de Rome et Auguste, lesquels, le second au moins, y avaient un temple et des ministres.
Nous ne redirons pas ici ce que nous avons eu l'occasion de dire plus haut sur ce sujet mais nous serions par trop incomplet si nous bornions là nos indications sur le culte païen de la contrée qui nous occupe.
En effet, l'empereur Auguste, en introduisant dans la Gaule les dieux de Rome, au nombre desquels il n'oublia pas de se mettre lui-même, était loin de satisfaire le besoin qui restait d'idéal et d'élevé dans les sentiments du peuple vaincu. H ne fit que montrer
combien l'homme s'égare quand il fait de la religion une affaire de fantaisie, d'orgueil et d'intérêt, un moyen pour le souverain de dominer le peuple. Les autres empereurs réussirent encore moins à calmer cette soif de surnaturel que toute âme attentive et réfléchie sent au-dedans d'elle-même. Aussi, les esprits, repoussant intérieurement ce qu'il y avait de si matériel, par conséquent d'absurde, dans les dieux et le culte de la religion officielle, se portèrent avec ardeur vers les pratiques occultes et les mystères de l'Orient. Par là s'explique le développement que prirent dans nos contrées, au !t" et n)" siècles, les cultes de Mythra, d'Isis, de Cybèle, etc.
Le dieu persant Mythra fut adoré à la Bâfie-Montsaléon, à Vaison, dans la partie de Bergoïata qui répond aujourd'hui à Bourg-Saint-Andéol, par conséquent, tout près d'~H~a Tn'M~orH/M. La déesse égyptienne Isis est mentionnée dans l'inscription d'un petit autel qu'on voit encore dans la ville de Die. Cybèle, mère des dieux, dont le culte, originaire de la Galatie, s'était répandu dans la Grèce et dans l'Italie, fut longtemps honorée dans nos contrées. En t8~, on lui offrit un taurobole, dont la mémoire nous a été conservée par l'inscription d'un autel en pierre trouvé à Tain au xvt' siècle. Elle fut spécialement honorée à Die. En 2~, un taurobole lui fut offert dans cette ville, pour la conservation des empereur et César Philippes Augustes et d'Otacila Severa Augusta. mère de César et des Camps. Parmi les prêtres présents figuraient Lucius Dagidius Marius, pontife perpétuel de la cité de Valence, Junius Titus, quimdecemvir d'Orange, Castricius Zosimion, de la cité d'Alba, et Blatius Paternus, de la cité
des Voconces, et d'autres dont les noms et le domicile ne sont pas indiqués. Peut-être la cité tricastine étaitelle représentée par quelqu'un de ces derniers. En tout cas, nous serions étonné que celle-ci ne participât en rien au culte des dieux orientaux pratiqué par les cités voisines.
Mais tout ce culte mythologique, presque autant que le paganisme grec et romain, restait impuissant à satisfaire le besoin qu'un peuple a de vérité et de règle sûre dans la conduite. L'emprunt fait par nos contrées aux religions asiatiques aboutit à une nouvelle forme d'erreur, à de nouveaux désordres La confusion morale ne régna que plus dans les esprits. Le spectacle offert alors par la Gaule fut celui de toutes les opinions, de toutes les erreurs, de toutes les superstitions. Le dualisme oriental se superposait au panthéisme druidique, les rêveries grecques et romaines au fétichisme gaulois.
Est-il besoin de rappeler l'affreux état dans lequel étaient les mœurs sociales ? L'amour effréné du luxe et du bien-être, des plaisirs et de la bonne chère, naturel au paganisme, s'était emparé des peuples vaincus et avait consommé leur soumission. Les monuments trouvés à Augusta Tr/c~M~or~/H, en nous disant le luxe qui y a régné, témoignent de la double sujétion dans laquelle tinrent sa population la force romaine et l'esprit de lubricité. Avec cela le peuple gémissait sous le poids d'impôts de plus en plus accablants de là un mécontentement qui gagnait le corps entier de la société et le poussait à l'anarchie l'anarchie conduisait à l'indiscipline, l'indiscipline à la faiblesse et à l'impuissance, l'impuissance à la dissolution au dedans. Celle-ci
attirait l'invasion des ennemis qui au dehors guettaient leur proie avec une avidité proportionnée à l'importance de l'appât. De là l'effondrement de la puissance romaine dans nos contrées, et l'invasion de ces multitudes de barbares vomies par le Nord et qui allaient s'implanter dans la Gaule entière.
Et puis, tout cela était une préparation naturelle à l'extention du royaume de Dieu. Les temps fixés pour le règne de Jésus-Christ étaient accomplis. Les bienfaits de l'Evangile allaient d'autant mieux se manifester dans leur grandeur, que l'abîme où gisait la société avait été plus profond. Au christianisme donc, qui allait l'en tirer, les Tricastins et bien d'autres devaient tout accueil, et après l'accueil, la reconnaissance. Mais la cité tricastine allait devoir reconnaissance au christianisme à un titre spécial, puisque il lui apportait, avec le bienfait incomparable de la régénération et du salut, les honneurs et avantages d'une capitale chrétienne. En effet. Augusta 7Y/ca.0/'MM, après avoir été un centre particulier d'évangélisation, allait devenir un centre épiscopal, le siège d'un évêché. Quand, par qui, et comment furent réalisés pour elle ces heureux événements, c'est ce qu'il s'agit de dire dans le chapitre suivant.
(à suivre) ABBÉ FILLET
LA POPULATION
DE&
Taillabilites du Dauphiné
AJPHÈS 1755 ET AVAN T 17S2
[SutTE.–Voir les i~'àiôy'tivratsons)
Le territoire de Châteauneuf-de-Chabre aurait compté 50o personnes en 1534 (<). Vers le même temps, Ribiers aurait compris 200 maisons environ (i;6c)) (2). Avant 1706, Chaillol. Montorcier et La Villette auraient formé trois communautés (3). Les trois villages du Villard, de Pennes et de La Loubtère, démembrés de Saint-Maurice, furent acquis par Guillaume Pérouse, de François Gras de Montorcier (!$4~). Ils formèrent la communauté de Guiliaume-Pérouse, du nom de leur acquéreur (~).
Abriès et Aiguilles plaidèrent longtemps l'une contre l'autre, au sujet d'une gtande étendue de terrain et pour déterminer (t) ALLARD, NotIce historique sur Châteauneuf-de-Chabre, p. 4.. Cf. aussi le Memoti-e de Bellon contre M. de Prunières (1786) p. t8. (2) MouBRE..E~M! /)Mt. sur ~;<o'~ (Hautes-Alpes), p. 23. Les indications données par cet auteur au sujet du terme feu sont inexactes. H a oublié de mentionner la naissance en ce lieu d'Edouard de Laplane.
(3) ALLEMAND, Monographie du mandement de C/M;o/, etc., p. 11. (4) Jt~Moirc pour Jacques Bellon, etc.. coMfte M. d'~ne~He St-Jean de~'rMM!~reï, etc., p. 18.
l'emplacement du rocher &/a):cA~o)os!ts visé en ~87 ()). On pourrait citer une foule de cas analogues, sans influence sensible d'ailleurs sur la population (2).
Les quatre communes du Dévotuy comprenaient 2,238 individus en tSfy. La diminution de ce nombre par rapport au précédent recensement était de 2t habitants. Elle portait surtout sur Agni&res, tandis que le total des habitants de Saint-Etienne avait augmenté; on trouvait. en effet, dans ce lieu des familles composées de 6 à 7 enfants, même de to à f2 (~).
Aspres-lès-Corps comptait 70 habitants environ à la date de t/Sô (4).
M. l'abbé Allemand a supposé à Veynes, d'après les anciens cadastres, une population de t,~8o âmes en );8o et de 1,700 en )6~o (5). Saint-Auban-d'Oze aurait eu 240 habitants en t7'4(6).
Le volumineux Recueil des réponses faites par les commuMat<<M de l'élection de Gap au jMM/!0)tf)a:?6 envoyé par la commission :M<~Më~M!'re des Etats du O.tM~'AtMe vient d'être pubité (7). Sa lecture permet de consigner diverses remarques. L'Epine faisant partie de l'élection de MontéHmar était enclavée dans l'élection de Gap. Les causes de cette anomalie sont bien difficiles à déterminer de nos jours. !t est fort possible que L'Epine dépendit au moyen âge d'un fief des
(i) Un mot de réponse pour la commune d'Abriès contre la commune d'Aiguilles, s. d mais paru en ;833.
(2) COLLIN. Notice sur la décadence du canton de Saint-Etienne-enD~otMt, etc
(3) Ibidem, passim.
(~) Reponse pour les consuls et communauté d'~t~prM-pr~-Co)'pï, etc. Précis pour la communauté d'Aspres, etc.
(5) Monographie de Veynes, p. t5.
(6) Monographie de La Val d'O~e, première partie, p. t8. (y) Paris, ;tM~f!merte nationale, tgo8, XVII et 6og pages.
Baronnies et cette mouvance se perpétua après l'annexion de cette région au Dauphiné. Le terme habitant est usité de nouveau avec le sens de chef de famille. Les membres d'un ménage sont arbttrés à à [6, à 5, à 6, à un peu plus de 6. La majeure partie de ces évaluations ne doit pas être prise au pied de la lettre. Ainsi on attribue à Réotier 95 hommes et 405 femmes ou enfants. La confirmation des privilèges fiscaux de Bréziers et de Rochebrune eut lieu en tyt;, et l'exemption de la taille existai encore en ty8ç. Deux sentences arbitrales de 14~2 et de 17~9 ont maintenu la réunion de ces deux villages en une communauté unique. Clausonne n'avait ni péréquaire ni cadastre et pour acquitter le montant de la capttatio'), les habitants faisaient entre eux une collecte à due proportion (t).
Les communautés d'Embrun, de Saint-André et de SaintSauveur étaient réunies en une seule à une époque reculée. Elles constituèrent, toujours d'après le mémoire, une taillabuité unique et cette situation étatt la même en 1780. Ces données ne sont pas tout à fait exactes. L'Etat de <7o6 consacra la séparation en trois taiiïabthtés. Cette division ne fut peut-étte pas maintenue au cours du xvm' siècle. Théus et Remollon n'avaient pas de linutes connues, la division du territoire unique en deux communautés n'ayant pas été parachevée.
La 27" livraison du Guide ptttoresque du voyageur en Nattée parue après le ~[ jutDet 1~4 et probablement au mois de janvier )8~ décrit parmi les communes du département de l'Isère, qu'elle étudie spécialement, celle des Souchons sise dans l'arrondissement de Grenoble (2). Pilot ne la cite pas dans sa S~/n/t~Me parue en 1846. Crozet mentionne les Souchons entre Saint-Pierre-de-Méarotz et La Salle (3). (i)/ p. VI, 6~,86, 98, to6, < t8,t:8, i~5, 16~, ;g5, 358-9 et 375-6. (2) P..6.
(3) Description, etc canton de Corps, carte.
2' SÉRIE. XUIf~ VOLUME. )QOO. 5
Ftssont et Vitu nous apprennent qu'un relai de poste se trouvait aux Souchons, faisant partie de la commune de la Salle en f8;6 (t). Le hameau des Souchons n'a jamais été élevé au rang des communes.
Le nom de La Tronche a été substitué à celui de St-Ferjus pendant la Terreur. Mais quoique l'on ait retrouvé la dénomination de La Tronche seulement en t~oS (2~, ce village avait antérieurement une importance relative. Un mémoire judiciaiie rappelle l'hôte de La Tronche en )y~(), la communauté de La Tronche, la communauté de St-Ferjus et les officiers de La Tronche, le consul de La Tronche. A l'époque présumée (1741) de la rédaction de ce document, La Tronche était donc une communauté indépendante de St-Ferjus (~]. Pilot ne la décrit pas à la date de <7;o. C'est là le résultat d'une erreur ou bien l'existence de cette communauté fut de courte durée. Quoiqu'il en sott,I'E<a<~M <~M du Dauphmé de <7;7 mentionne umquement Montfteury, Corenc et SaintFerjus. La Tronche est passée sous silence.
L'érudtt M. Vellein a publié les évaluations de Bouchu au sujet de Maubec, de St-Alban et des Eparres. Le nombre de ).o~o habitants attribué à ce dernier lieu serait insuffisant et devrait être porté à 2,0~0 (~). Le même auteur relate d'autre part les confusions commises par Guy Allard et par MM. Gaspard et Piollat (5) au sujet de la commune de t'tte d'Abeau dénommée t'tte d'Artas durant le moyen-âge et la période moderne. Ces deux derniers auteurs ont relevé un certain
(t) Guide, etc., du voyageur dans le dept. de <Y~)' etc., p. 286. Ouvrage à la fois peu commun et peu connu.
(2) LE BORGNE. Notes ~Mr la Tronche près Grenuble, p. t3. Cf. SEsTfER. Le tramway de Grenoble à Chapareillan, etc p. 24. (3) ~1 Nosseigneurs du parlement, SMp~/te At<Mt~~tKCM< Charles Masseron, etc., passim.
(~) Le ~~)'~u;Mt de Maubec au xvii* siècle, p. 5.
(5) Recherches historiques sur les communes du c~nfO)) de St-Jeande-Bournay en D~Mp/nM~.
nombre de données relatives à la population de Saint-Jeande-Bournay de ~02 à l'an IX (i).
Crozet considère la commune de Pontcharra comme ayant été formée par les deux anciennes communautés de Grignon et de Villard-Benoît (2). Cette dernière avait été créée en t70o. Le 26 octobre suivant, Pontchara fut institué en réunissant StMaxtmin et Grignon, Avallon et Villard-Benoît. A leur tour Avalon, Grignon et St-Maximin furent constitués (<8o<). Pontcharra et Grignon furent joints en '8~1 St-.Maximin et Avalon subirent le même sort l'année suivante (<8~2) (3). Moutaret avait vu le jour à son tour ('790). La formation de Pontcharra a été plus laborieuse que ne l'indique Crozet.
Le village de Gonteaumes dépendant de la communauté de St-Théoffrey a été incendié totalement à trois reprises au xvm" siècle [728, 17~0, t788. La petite ville de Chorges (Hautes-Alpes) fut de même dévastée par un incendie en <78; (4). Plus tard une catastrophe de cette nature frappa Villard-St-Christophe, dont toutes les maisons furent détruites (~ octobre 18~2). Un secours de 6.;oo francs fut donné par l'Etat et une somme de 500 francs fut allouée aux blessés, sur l'intervention d'Augustin Périer, pair de France (5). Les événements de cette nature se sont multipliés trop fréquemment dans notre région au xixe siècle; leur énumération serait fastidteuse. ti suffit de mentionner quelques-uns de ceux les plus tristement célébres et de rappeller qu'à leur suite le chiffre de la population a toujours diminué.
St-Maurice et Lalley correspondent à deux communautés encore indépendantes en 1~2~ comme de nos jours (6). (<) Ibrd. p. 264-5.
(2) DMcr<~t;OM, etc., canton de Goncelin, p. 9.
(3) PiLOT.~t~ t. IV, passim.
(~) Nouvelle m<!m~re d'éterndre les incendies. St-Théoffrey est devenu St-Chaffrey.
(5) Lettre du ministre des travaux publics adressée à ce dermer (Ma Bibliothèque).
(6) Le MM;rc de /d co~~Kne St-Maurrce-Lalley contre Madame Dupuy de St- FtMCCttf.
Vulson et Collet auraient formé avant le xvn' siècle deux villages assez importants ()).
Un ouvrage récent donne la population du canton d'Allevard uniquement pourles années <ço) et f0o6. Les testes cités par l'auteur prouvent que même en '700 les habitants de la communauté de la Bât!e-d'Arvi)tard étaient épars dans l'ensemble du mandement d'Allevard (2). Les indications fournies un peu plus haut à ce sujet peuvent être ainsi complétées. La communauté de la Manche d'Entremont était dénommée aussi Manche Dctphmate. mais celle de Chai trousse était appellée Manche de Cornillon. L'ordonnance du 25 mars t8i8 téunit en une seule commune St Pierre-de-Chartreuse, Entremont et Chartrousse [~).
Le territoire de la ville de Grenoble s'est accru à diverses époques et dans un avenir prochatn des faits de même nature se produiront. Une loi du 5 août 1844 avait modifié la délimitation du chef-lieu du département de l'Isère et de Seyssins. L'extension de Grenoble jusqu'au Drac ne tarda pas ensuite à êhe effectuée au détriment des trois communes de Seyssins, Fontaine et St-Martin-le-Vmoux ()862) (4). Cette ville ayant alors 28,000 habitants vit sa population augmenter tout d'un coup de ),8oo âmes environ (;). H y a lieu de tenir compte de ces faits pour comparer le nombre des habitants de ces trois communes avec celui qu'elles possédaient autrefois. Les /'Ya~e~ ~ruer~ de la statistique de /s~e donnent un
(1) Lettres à f-MCte ~ur le canton de Mens, p. 93.
(2)Btn.AZ,Et)~4~fMr<<,p.t~.o,265,2g6,etc.
(3) Les sections de la ~faMC/te d'Entremont et de la ~M~nc/ie de Cornillon contre l'Etat (1853). On pourra lire dans ce mémoire (p. 40-3) des déta))s intéressants sur la foret de Saou (Drôme).
(4.) Cf. Reponse des habitants de Fontaine à la demande tendant au d<mem~remcnideic!<r (etr;totrc/brmM~ar la commune de Prcuot/e. Les autres mémoires concernant cette question sont aussi bien rédiges que celui-ci.
(5) fotf les habitants des territoires dont l'annexion est demandée ~w la municipalité de Grenoble.
grand nombre de renseignements sur la population (t). On peut y lire notamment le relevé des naissances, des décès et des mariages à Grenoble pour la période de 1768 à 1800. Un mémoire rédigé à l'Intendance de Grenoble en 1787 a évalué la population totale du Dauphiné à 670,000 âmes (2). Un ouvrage trop peu consulté aujourd'hui, De ~i~t~M~a~'OM des finances de la France, par Necker, fixait ce chiffre à 664,600 habitants (3). Mais il y a lieu d'enlever de ce nombre la population de la principauté d'Orange et d'y ajouter celles des terres adjacentes à la Provence et du canton de Barci)[onnette. !) est donc peu aisé d'obtenir des points de comparaison exacts, étant donné la superficie actuelle des départements des Hautes-Alpes, de la Drôme et de t'Isère. Au commencement duxtx'siécte, les services de la préfecture de l'Isère avaient donné à l'ancien Dauphiné 784,960 âmes. Cette évaluation est exagérée très certainement.
Berriat-Saint-Prix, l'auteur des Fra~-M~ts ofn~s, a attribué une moyenne de six individus aux familles en t;20 (4). Necker considérait le rapport des naissances à la population totale comme étant égal à la proportion de i à 2; 3/4. En se livrant à dtvers calculs le rédacteur de ces Fr~Me~M fait ressortir, sans s'en douter, l'insuffisance de cet élément pour une durée même minime. Necker estimait que les décès sont à la population totale comme t est à 29 3/5, modifiant légèrement le rapprochement ordinaire de t à ~o. Cette ba~e est encore moins sûre que celle tirée des naissances. Les calculs effectués d'après le rapport des mariages à la population (ta !t~ t/~ selon Necker à t2t d'après Moheau) offrent des probabilités bien moins certaines.
(i) P. 35 à 56.
~2) /t;d., p. 42.
(3) Tableaux. p. 286-7.
(4) Fragmens, etc., pp. 47-5t. Cf. aussi une étude de Berriat-StPrix, parue dans le t. VII des Annales de Statistique française et etrangère (<8o3).
Non seulement le territoire de Grenoble a été plusieurs fois agrandi aux dépens de quelques communes limithrophes, mais encore elle a cédé une section à Echirolles ft8~) (t), de telle sorte qu'il est bien difficile aujourd'hui de déterminer l'étendue précise de Grenoble au moyen-âge.
Comme exemple de répartition des tailles, on peut citer le procès-verbal suivant. Le !t janvier [700 à 9 heures du matin, par devant Benoît Bonnet, notaire et châtelain de la communauté de Saint-Pierre de Chartreuse, en résidence au cheflieu de la paroisse de Chartreuse, comparut Barthélemy Sestier, consul de la communauté, désireux de faire péréquer ou répartir le lançon de la taille royale, daté du 25 octobre 1708. Il comprenait 260 livres sols 10 deniers en première ligne, 2 livres pour le droit de quittance, 4 livres pour le droit de sceau, 3 livres 10 deniers pour la suppression des offices d'inspecteur des bâtiments, créés par l'édit de janvier )70t. Le consul requit d'autre part t° l'imposition de livres 8 sols 6 deniers relative à la suppression des offices d'inspecteur-contrôleur aux entrées des eaux-de-vie, vin et autres boissons suivant l'ordonnance de l'intendant du 21 janvier 1708; 2° l'imposition de fi livres i sols 2 deniers concernant l'abonnemenr des offices de contrôleurs des greffes des hôtels-de-ville conformément à l'ordonnance du 25 janvier t7o8 3° l'imposition de toi livres 5 deniers pour la part de la communauté dans l'ustensile des troupes destinées à passer l'hiver dans les places frontières du royaume, conformément à l'ordonnance du 5 décembre 1708 4° l'imposition du droit de recette de ces sommes à raisons de i sol par livre. Le consul Sestier avait fait assigner Etienne Brenand syndic des forains, Ennemond Goudoz et Claude Sestier péréquateurs locaux.
La totalité de l'évaluation des biens de la communauté était (t) DfMerj~oM et défense du t<MM;< ttt«n<C!~< de cotttttMHe de 5<artfH-<e-V<noH~, p. 20.
de 31 livres. Pour la confection du rôle, on compta donc par proportion avec la dépense à répartir. la livre pour livres 5 sols, le sol pour ;5 sots deniers, le denier pour t sol 3 deniers. Le châtelain, le greffier, le syndic des forains et l'un des péréquateurs surent seuls signer. Saint-Pierre de Chartreuse n'avait pas toujours été cotisé aux tailles. Aussi fut-il déclaré que la péréquation avait lieu pour obéir aux ordres du roi « sauf à faire des humbles remontrance (sic) « pour estre déchargés de la tai))abit)té suivant qu'il a toujours « esté pratiqué. A quoy la présente péréquation ne pourra « nuyre ny préjudicier » Cette mention rappellait un souvenir lointain.
La base cadastrale concernant la Grande Chartreuse « Les seigneurs de la Grande Chartreuse a s'élevait à 10 sols i deniers. La taxe fut égale à <o sols multipliés par f; sols 3 deniers et à [0 deniers multiphès par i sol 3 deniers. Le total est de [60 sols 60 deniers ou 8 livres 5 sols. C'est là précisément la somme tirée hors Itgne
Les dépenses supplémentaires furent t" une somme non indiquée pour le droit de vérification des rôles revenant aux élus; 2° ) livre 16 sols revenant au châtelain pour la vacation concernant l'élection du consul ~° i livre ta sols destinés au greffier pour le « labeur et le papier de cette assemblée 40 5 livres 8 sols pour le châtelain à raison des trois jours consacrés à la détermination des cotes; 5° 3 livres 12 sols, coût de la rédaction du procès-verbal par le greffier; 6° 4 livres <o sols, valeur de l'indemnité du syndic des forains 7° 9livres, coût de la vacation de chacun des péréquateurs 8° livres octroyées au consul o" livre t6 sols, prix de l'assignation donnée par le sergent; )0° livres pour la location d'une chambre, le feu et la chandel!e ) )° 4 livres, prix des deux expéditions du rôle faites par le greffier; t2° 5 livres pour la dépense du voyage à effectuer à Grenoble dans le but de faire vérifier le rôle par les élus ) ~° le coût non relaté du papier timbré (original et 2 expéditions) 14° i livre 4 sols relatifs à
la publication du lançon; ;;° 22 livres que le consul retiendra, comme frais de recette, à raison d'un sol par livre (t). Le calcul et l'imposition de toutes ces sommes étaient fort compliqués.
Divers mémoires judiciaires rappellent le comté et les comtes d'Entremont et mentionnent la dépendance de la communanté de Saint-Pierre-de-Chartreuse de ce comté assez étendu à un moment (2). Devenue la propriété d'une « dame d'Entremont » dont les biens étaient criblés de dettes (3), cette terre fut vendue à la Grande Chartreuse, le 17 décembre 1604. La dénomination de bellue (beluca seu ybeM~ a fini par devenir un nom propre. Il est porté encore dans les départements de l'Isère et des Hautes-Alpes. Un contre-amiral de la marine française s'appelle même Bellue, sans que pour cette raison sa famille soit originaire du Dauphiné. L'un des barbiers de Humbert II était Jean de Bellue (~).
Le mandement de Pariset renfermait dans ses cinq paroisses 248 feux ou familles en '~o. A la même époque on compta 872 feux dans celui d'Allevard. Pilot, après avoir multiplié par quatre le nombre des feux de chaque paroisse en a déduit la population correspondante (5). Le chiffre quatre est absolument arbitraire. D'autre part, les nobles et les mendiants n'entraient pas en ligne de compte, comme on l'a déjà vu au sujet du Buis. Les calculs dus à cet écrivain laborieux manquent à tous égards de base certaine. Enfin le territoire de
())Ms(ma bibliothèque)
(2) ~e~otre pour l'Etat contre la commune de St-Pierre-de-Chartreuse, section de la Af<!M<e-De/p/t!M<c et de Chartrousse, (3) Selon ne RIVOIRE DE LA BATtE, la mai.un Je Montbel, en possession des seigneuries d'Entremont et de Do)omieu s'est éteinte en t65o dans les familles de Bon et de Coligny (Armorial, etc., p. 427). (4.) PILOT DE THORBY, Les maisons-fortes du D~Mp/ttK~, 2* série, P. 4.2.
(5) Ancien mandement de Pariset, p. 27-8. – Allevard et son man<<ew<?tt<,p.tt7-8.
ces paroisses ne correspondit peut-être pas d'une façon précise à celui des communautés. Les cinq paroisses du mandement de Pariset mentionnées en t~9 étaient depuis longtemps réduites à 2, Pariset et Seyssins, lorsque Guy Allard rédigea son dictionnaire. Pilot a eu soin d'ailleurs de relater la diminution constante de la population de ce territoire depuis le xiv" siècle.
Les procès-verbaux de l'élection des syndics et consuls pourraient en principe donner des indications sur la population des lieux où elles avaient lieu Les chefs de famille étaient en effet tous convoqués. Malheureusement les électeurs faisaient preuve de peu de zèle (t).
Roybon doit son existence à Humbert dauphin (<2Ç4). Son nom fut pendant un certain temps Villeneuve de Roybon (2). Malgré les privilèges dont elle fut comblée, il semble qu'elle fut soumise à la taille de très bonne heure
L'Etat de t~oô indique une communauté et une taiHabihté uniques pour Peno) et Marcilloles. Guy Allard avait signalé l'existence des deux paroisses, tout en admettant une seule taillabilité. Antérieurement, la communauté comprenait Penol, Marcilloles et Sardieu (1667). Au xv. siècle au contraire les terres d'Ornacieux. de Balbin et de Sardieu formaient trois paroisses, tout en constituant une communauté unique. Ornacieux a donné naissance aux trois communes actuelles, Ornacieux, Balbin et Sardieu (~).
Le nombre des feux d'une taillabilité varia fort souvent au xvn° et au xvm" siècles. Guy Allard attribue à St-André-
(t)LACROtX.~t-~t!Ce«ft!,p.!3.
(2) GUY ÂLLARD DtCf. etc., t. ït, p. 518. BERRUYER, NotIce /t. sur Roybon. ~~)MO:re pour la commune de Roybon dans la demande du transfert du chef-lieu de canton.
(3) Mémoire pour M. le Marquis de Marcieu, etc., contre les communes de La Terrasse et du Touvet, p. '2. Notes pour Ay. le Marquis de MarctCM et consorts.
en-Royans 7 feux )/~2, sans distinguer les fonds am'anchis. Vingt-deux ans plus tard, nous trouvons 4 feux !/3 et t/~8, y compris 2/3 t/8 pour les fonds affranchis. Cette communauté fut taxée à foc) écus, 35 sols, obole, pite et demi-pite en <~8~ avec indication, que chaque feu payerait 14 écus, Il sols. Les calculs prouvent que le nombre des feux imposés était supérieur à 7 et encore ne s'agtt-d que des fonds soumis à la taille royale. En s'adressant au châtelain de Saint-André, les « Gens des comptes de Dauphiné eurent soin de laisser dans la formule imprimée la mention de l'exemption de cette taille en faveur des << nobles noblement vivans et des clercs « ctéricatement vivans ». Cette somme devait être versée à Grenoble entre les mains de Pierre de Chaponay, receveur des Etats. Dans la somme totale de l'imposition figuraient 2,00 écus pour l'entretien de la garde de M. de Maugiron et 2,000 écus accordés au même par les Etats du Dauphiné afin de reconnaître « ses bons offices et continuelles peines s (;). L'Etat de 706 avait fixé le nombre des feux des fonds de l'élection de Grenoble à 77; feux t/~70 et t/it;2. Cette évaluation fut modifiée dans la suite. L'arrêt du Conseil du 9 février )720 révoqua purement et simplement les affranchissements résultant des édits et des déclarations royales. Les lançons concernant Saint-Jean-le-Vieux, Revel, SamtMury-Monteymond et la Combe-de-Lancey pour l'année <76~ donnent tous au contraire le pied de 770 feux 2/3 !/2~ 1/96 )/~ç2 1/576 et !/[;~2. Cette même indication se retrouve sensiblement en [772 sur le lançon deBrié-et-Angonnes 770 feux 2/3 t/2~ 1/96 (2). Prenons d'autre pan la taxe de Samt-Jeanle-Vieux, par exemple. On lui attribua en 17o6 i feu 2/3 et )/48. Or, le lançon de !7Ô~ fixe la contribution de cette taillab)titéà7Ç) livres 5 sols en spécihant que le feu était imposé à raison de ~68 livres j8 sols. La première évaluation corres(;] Placard (ma btbtiothèque).
(s) Divers imprimés m'appartenant.
pond à t~Sy sols. Si l'on ajoute à 9;~ sots valeur de la seconde les 2/3 de 954, on obtient <,5oo sols, somme supérieure à t,;8y. Par conséquent la base fiscale de St-Jean-le-Vieux était comptée pour t feu et un peu moms de 2/ tandis qu'on l'avait arbitrée à un nombre un peu plus élevé en f/oo. Ces calculs pourraient être multiplies à l'infini pour ainsi dire. Les auteurs ayant écrit des ouvrages ou des brochures sur le Dauphiné ont parfois négligé totalement d'étudier les questions relatives à la population, quoique leurs foncions leur eussent permis de donner des renseignements puisés aux meilleures sources. Les Souvenus du baron d'Haussez rentrent t dans la catégorie des publications peu utiles. Ce mémoire peu connu est dû à un ancien préfet de l'Isère ()820-<82/).] (t). Les fonctions exercées par ce dernier l'avaient mis à même de fournir des indications importantes relatives à la statistique. Le titre de son livre est trompeur l'auteur a surtout étudié la topographie.
Par une lettre datée de Genève du 2 janvier !83;, le baron d'Haussez autorisa les éditeurs de l'~4/)?MMc/: de b cou? ?oya/e de Grenoble à réimprimer ses Souvenirs sous la seule condition de n'apporter aucune altération au texte. La réimpression parut dans l'/l/MaxacA de i838 seulement, avec pagination spéciale, continuée dans la table des matières et dans les Notes des e<<eMrs ajoutées aux SoM~Mtr~ (t~y p en tout). Les lithographies ne furent pas reproduites et le Ra/)0t < ~!<t les avantages et les )?t0~'ets d'exécution a!'MM canal de navigation entre Vt'zt//f et Grenoble, etc., a été supprimé.
De nombreuses contestations s'élevèrent à diverses époques entre les communes situées sur la rive gauche du Rhône et celles emplacées sur la rive droite de ce fleuve. Généralement ces dernières ont obtenu gain de cause et acquis la possession d'îles et même de certaines parcelles situées en face d'elles. ft)~OU)~eK<r~pourïo-f)r~ à la statistique du département de l'Isère, Bordeaux, .LiMf/r~ue, '828, tn-8", )66 p Cette édmon est rare.
La population des taillabilités, puis des communes correspondantes a pu subir des modifications de ce chef; il importerait de vérifier ces particularités (t).
Les habitants des deux rives du Guiers formaient la communauté unique du Pont-de-Beauvoisin. Un traité conclu en t ~6 abandonna au Dauphiné )a portion située sur la rive gauche (2).
Montrevel comptait seulement 3o habitants ou chefs de famille, à la date de '7. Jusqu'en '604, la communauté n'eut pas de consul ni de syndic annuels. Des commis étaient députés chaque année pour la péréquation et pour l'exaction de la taille (3). Doissin fut érigé en commune à la date de t8~6. mais il avait été transformé en communauté durant un certain temps au xvm° siècle.
L'Almanach de la cour royale de Grenoble et annuaire du département de l'Isère pour l'année ~6 renferme in fine la A~o)?!e~c/a<t;re dans fort/re a//)Aa~e/Me des hameaux ou sections des communes ~a~s le ~e/)~r<e'e)!< de /se)'e avec pagination spéciale. [1 est utile de rappeler ce fait aux chercheurs, car les travaux relatifs à la topographie sont hérissés de dimcuttés particulières. L'At:nM:rf de l'année )8~; contient de son côté un 7~6/eaM des communes du département de l'Isère, c/asMe'!p.!ra~ro~Mg/t!eM< e</)ar cantons, avec leur population, leur distance judiciaire, en mesures Më~tes e~rttnëes en
(;) Pour la commune de Des~<ttM-C/)<!rp;'eMjr contre la commune de V~M/-r-cn-t~e/)n. – four la commune de t~M~-en-t~e/tn contre la commune de DM!;t)p-CA~)'u, etc. On y lira les prétentions de Minbel (Atn). Votr aussi Note pour la commune de Vaulx, etc. (2) PERRIN, Libertés et franchaes de la ville du Pont-d~-Be~Mfût~tn, etc., p. 4. CHAPELLE, Le Pont-de-Beauvoisin, p. 22.
(3) ~Mf pour M. le comte de Vrrieu, Mf~neM)' de Pt<p~)-M demandeur contre les consuls et communauté de Montrevel et Doyssin, de/end~M''s(t7yg). Selon ce mémoire, Dotsstn était une communauté en 1629 et avait été une taillabilité en i5o2, comme Bonis d'ailleurs, dont l'Importance est minime de nos jours.
kilomètres, des chefs-lieux de canton, d'arrondissement et du cfe/)afr<eyM~t!<, le rang clérical de la cowmM~e oit ~a<0!Me et la nomenclature de leurs sections ou hameaux. Ce tableau est fort intéressant quelques exemplaires ont été détachés de l'annuaire et reliés à part à cause de leur pagination particulière.
Les taillabilités comprises en t6ç8 dans le mandement de la Buissière étaient La Buissière, Barraux, Bellechambre, La Flachère, St-Marcel, Ste-Marie-d'Alloix, St-Vmcent-de-Mercuze. L'Etat de t~oô maintint cette situation et qualifia ces villages du titre de communauté et de tautabdité. C'est par erreur que St-Marcel a été considéré comme ayant été investi de l'indépendance municipale après <750. Cette observation s'applique à deux autres lieux du même mandement SainteMane-du-Mont et le Montalieu ou Montalieu. Ces deux hameaux n'ont pas été compris par Pilot dans la liste des communautés existant en <7')0; le ptermer était constitué en paroisse. Or, ils ngurent dans un document officiel du t7 août 1788 ~tj. Pilot ne les mentionne pas parmi les communes supprimées en t/<)o, mais u appelle celle de la Flachère, la Flachère-et-Montaheu et attribue à Samte-Marie-du-Mont t la situation de hameau ('794,) (2). Aucun doute cependant n'est possible au sujet de la qualité attribuée en 1788 à ce dernier lieu et à Montalieu. D'ailleurs dans l'énumération figurant sur le texte invoqué aucun ordre n'est suivi SainteMane-du-Mont est citée entre Sainte-Marie-d'Alloix et SaintVincent-de-Mercuze; le Montalieu suit la Flachère. La communaute de Montrevel comprenait 2,~00 habitants en 1780 et environ 4 feux (~). Cette taxation était conforme a celle de t7o6.
(t) De<t&cr~t!OK des Trois Ordres du mandement de la ~M<Mtere, s. 1. n. d. (i788).
(2) Stat. générale du dépt. de l'Isère, t. IV, p. 26-8, 43.
(3) LAGiER, Les anciens mandements de' t~trte;~ Chabons, Montrevel, etc., p. 89.
Le beau volume constoé par M. Dussert à ia ~~re renferme quelques indications relatives à la population. Cette petite ville aurait compté 8 à ooo habitants en '~67, 500 en !~o3, ~t~ en f~.6o (ressort de la châtetieniei La Mayrie n'aurait été plus habitée que par une seule famille à la date de tyoo (;). Ce dernier renseignement n'est peut-être pas très exact, car si Bouchu n'a pas évalué la population de ce village à cause de sa réunion à la Mure au point de vue de la taillabilité, Il n'en est pas moins vrai que l'Etat de [706 la maintint au rang des communautés, tandis que Vulson disparaissait. M. Delachenal a critiqué le nombre (ooo) donné par Pilot au sujet de la population de Crémieu ('750), car le dénombrement de [768 avait permis de trouver 2,178 âmes (2). Cette observation est certainement fondée.
On peut citer encore la communauté de St-Vallier comme exemple des modifications apportées à ]a taxe des feux. Le pied de 8 feux fut abaissé à son égard à 6 feux (t639) à cause de la reprise de quelques fonds par les communautés voisines puis à 5 feux t/2 (1649) il fut ensuite relevé à un peu plus de 6 feux (1706) (3).
(A ~:f7e.; R. V. C.
(t) Essai sur la Mure, etc., p. :t2, 326. On peut lire à la page 628, un extrait de la statistique due à Pdot (tySo).
(2) /V;st. de Cremieu, p. 320.
(3) CAISE, Hist. de .St-V~!fr, etc., p. 86-7 et <62.
LISERE A
BEAUMONT=MONTEUX
La Société des Grands-Travaux de Marseille est sur le point de réaliser une oeuvre constdérabte et d'y sacrifier tout d'abord une douzaine de millions. Il s'agit d'établir sur l'Isère à ~oo mètres en amont du pont de Châteauneuf que traverse la route de Valence a Samt-Donat, un barrage de 7 mètres 10 au-dessus de l'étiage et de creuser un canal réunissant par une ligne droite de 2,[oo mètres, les deux extrémités du croissant formé vers le pont par le fleuve, et amsi amener ses eaux à l'usine qui sera construite à l'entrée Est du village de Beaumont-Monteux, pour la production d'énergie électrique. Les travaux préparatoires sont complètement achevés, plans et devis, sondages dans le lit du fleuve et sur la rive droite, achat de terrain. La Société n'attend plus que l'autorisation de l'Etat pour dresser ses puissantes machines et une armée d'ouvriers contre le fleuve jusqu'à présent sauvage et indompté, le vaincre, le dépouiller de cette indépendance dont il a trop abusé et le forcer a réparer par les services qu'il rendra désormais les calamités qu'il à causées dans le passé.
Elle serait longue et désolante la liste de ses méfaits. Nous allons rappeler les principaux.
L Le Pont de la Déesse (:)
Ainsi appelé parce que Cybèle avait un temple tout près de là, c'est l'explication donnée par M. Delacroix. Sinon un temple, du moins un taurobole, découvert en tySô et portant l'inscription que Jules Ollivier cite et traduit ainsi u Le « Dentrophore de Valence a fait ce taurobole à ses frais, en « l'honneur de la mère des dieux, la grande déesse de l'Ida Tronçon de l'ancienne route d'Arles à Lyon, le chemin actuel de la Vimogne sépare la commune de BeaumontMonteux de celle de Pont-de-l'Isère. Les Romains l'avaient construite dès la conquête de notre pays et appelée Via DomtUa, en l'honneur de leur général, Domitius Aenobarbus, vainqueur des Allobroges, nos pères, en l'année 12~ avant J.-C. Dans la suite elle fut nommée, à cause de son importance, la Grande voie, Viamagna, Vimagne. Elle passait aux Robins, à une demi-lieue du bourg de Châteauneuf-d'Isère, au couchant, traversait le fleuve sur le Pont de la Déesse et réduisait ainsi a dix kdomètres la distance de Valence à Beaumont-Monteux.
Ce pont résista vaillamment pendant treize cents ans aux injures du temps et a la fureur du flots dévastateurs. Les chartes de Vernaison le mentionnent comme utilisé pour l'exploitation des métairies qui avaient été données aux religieuses cisterciennes par Genest (Gumisius), seigneur de Châteauneuf-d'tsère, mort en t)o3.
Fut-il emporté en '2)0, en même temps que celui de Romans et ceux de Grenoble, lorsque cette dernière ville fut submergée et furieusement dévastée par une crue de Q m. ~o? t Aucun texte ne permet de fixer une date certaine.
(;) ~tahstt~Mc du dép. de la Drôme, 2' éd., p. 458. ~M!ï Aistor. ~U)' Valence, p. t5~. BRUN-DuttAND, Dict. top. de la DrOtt)~.
Nous savons seulement qu'au siècle suivant, faute de pont, on passait t'fsère sur un bac pour arriver au port de la Roche « sis en la Vimogne c. Et ce port de la Roche qu'on aurait pu aussi bien appeler port de Beaumont-Monteux, puisqu'i! se trouvait sur la limite des deux mandements, ne doit pas être confondu avec les autres ports de la Roche. IL Lac, gour, marais, îles
H ne reste plus rien aujourd'hui de tous ces accidents de terrain signalés dans les anciens actes; tellement l'Isère, inconstante et caplcteuse, a modifié la géographie de ses rives. A la voir aujourd'hui dans un lit tantôt profondément encaissé, tantôt démesurément large, on s'explique moins facilement ses dévastations. Autrefois coulant à pleins bords dans un espace restreint, impatiente de s'affranchir de cette gêne, elle profitai), des forces que lui apportaient les crues extraordinaires pour renverser tous les obstacles, prendre un peu et souvent trop de hberté, s'écartant parfois jusqu'a ;oo mètres de son ht pour en choisir un nouveau. Le quartier du Marais rappelle par son nom ce qu'il a été, et prouve par son aspect qu'il ne l'est plus aujourd'hui. Il en est de même de t Ue de Monteux, au-dessus du bac remplacé par le pont suspendu. Elle existait encore en ;72i et avant de disparaître légua son nom au quartier voisin, baigné par l'Isère au levant et au couchant seulement, et qui méritera bientôt ce titre lorsque les eaux du canal projeté arroseront son côté nord-ouest. De même le lac merveilleux formé jusqu'au barrage par le refoulement des eaux remplacera avantageusement le lac de Monteux aux proportions minuscules, connu uniquement par la mention faite au parcellaire du xvt* siècle.
Tandis que i'He de Monteux disparaissait, emportée tout 2' SÉRik.. X)HI'' VOLUME. fÇOO. 6
à la fois ou par miettes (!es détails manquent], il se forma au bas du village par suite du retrait des eaux et de leur rejet sur la rive gauche, quelques îlots d'une étendue de sept sétérées, dont le consul voulut, en 17~6, légaliser la possession en faveur de la commune en la soumettant à l'impôt, possession éphémère l'Isère ne donnant qu'à regret et reprenant bientôt son méchant cadeau de sable et de cailloux dès que défriché et verdoyant il provoquait ses insatiables convoitises. Il y avait aussi l'île de Sillard qui dispatut comme ses petites sœurs; une inondation les avait foirnées, une inondation les déforma c'était leur destinée sur ce théâtre de bouleversements et de vicissitudes. Située entre le château de la Roche et l'hôpital de Montées (commanderie de Monteux) » elle fut scindée en deux potions inégales par les eaux et forma ainsi le petit S)Hard, du côté de Monteux et le grand Sillard sur la Roche et qui devinrent ensuite des marais, puis des paturages. Ce sont aujourd'hui des terres labourables et des ramières.
Ht. La eommanderie de Monteux (i) Elles sont ignorées les circonstances de sa fondation par les Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem, plus connus sous le nom moderne de Chevaliers de Malte.
La maison de Monteux comprenait outre la chapelle qui servit d'église paroissiale jusqu'à sa ruine, à la fin de t8o6, l'hôpital ou la commanderie, séparée de la grange par le jardin et la terre limités au nord par l'église et le cimetière, au midi par l'Isère. Au xn~ siècle la communauté fut assez nombreuse, si l'on en juge par les dignités et les emplois. (<) C<tt-<. des /7(M~<ff!<<cr~, p. ?o – ArchIves de la .Dronie Com. de A/OHffu.f. – Bullet. d'~rc/t., !)!. p. 6t.
Dans un acte du ~4 décembre 1203 apparaissent comme témoins )° le commandeur « Pierre' Brus, le maistre de Montez » 2° son écuyer Praez 3° l'oblat Selvo de Oérieu 4° le portier Rigaud. Et dans un acte de 12)7 5° le chapelain P. et 6° dans un autre de i fo~ le ceHérier Bernard. Au siècle suivant, un des religieux de la Commanderie allait faire le service paroissial dans l'église rurale de Saint-Jean à la Roche-de-Glun.
Puis l'Isère dévasta la maison et mit ainsi les Hospitaliers dans la nécesstté de se retirer à Vienne. Dès <;40 Frère François d'Agaud était commandeur de Saint-Romain en Galles, près Vienne, et de Monteux. Cette dénomination révèle le changement qui venait de s'opérer. La commanderie de Monteux avait perdu et son importance et sa personnalité, elle n'était plus qu'une petite annexe, une simple dépendance de Saint-Romain.
L'inventaire dressé en )6o6 par Claudç Michel, notaire à Romans, à la requête de frère Jean de Lemps, commandeur de Saint-Romain et de Monteux, constate que les Hospitaliers sont propriétaires au Perrou de neuf sétérées avec les masures du couvent et que de la grange il ne reste qu'un chazal. Le parcellaire de 164~ réduit l'estime à six sétérées, par suite d'un nouveau brigandage, et enfin en !yyç il ne restait plus qu'une bande de deux à trois mètres, servant à augmenter la largeur du chemin qui passait au bas du Perrou et conduisait à la porte de l'église s'ouvrant sur l'Isère.
!V. Notre-Dame de Marnaud
Nos voisins n'étaient pas mieux traités. Le fleuve sévissant tantôt à droite, tantôt à gauche, infligeait les plus cruelles surprises à ceux qui longtemps épargnés, se croyaient à l'abri de ses rigueurs. Les délibérations consulaires ont très souvent
pour objet les dégradations si fréquentes causées par les eaux. En '6;), les habitants de Châteauneuf se plaignent de ce que, en moins de 4o ans, l'Isère a ravagé et rendu absolument incultes plus de ;oo sétérées des meilleures terres, « chaque sétérées étant de ~oo pas '<. La pire catastrophe fut celle de Marnaud.
Située près des Robins, sur les bords de la rivière, l'ancienne église de Notre-Dame de Marnaud appartenait aux chanoines du Bourg-lès-Valence, à qui le pape Cétestin III en avait confirmé la possession le 3 avril t02. Vint un jour où l'église et ses alentours s'effondrèrent dans le gouffre creusé par les eaux envahissantes et devinrent le Gour de Marnaud, puis le marais, d'une étendue de 52 sétérées, enfin un paturage dont une partie défrichée produisait du blé dès l'année )6~). Un mémoire de tsç8 constate pour la Roche-de-Glun la perte de 2~0 sétérées à Charmagnieu depuis !2 a ); ans, de 200 au Gour, causée par t'tsère tivalisant avec le Rhône qui de son côté avait détruit -;oo sétérées de vignes ou prés aux Brottaux, et autant aux RoUez et aux Roches.
V. L'inondation de <778
Vers 1750, l'Isère laissa en paix ses riverains de Châteauneuf et concentra tous ses efforts sur l'ancien village de Beaumont-Monteux dont elle semblait avoir juré la ruine. Jusque-là elle s'était bornée à des attaques isolées, intermittentes, dont les résultats sont consignés au parcellaire en marge de certains articles qui portent une simple note tristement expressive déchargé (de l'impôt), ruiné. emporté par la rivière. Après ces escarmouches l'attaque devint générale, la lutte sans trêve ni merci. Après avoir successivement enlevé les îles, le chemin de hallage, les prés, les jardins, les cours, elle envahit les maisons et ce fut alors une catastrophe pareille
à celle dont le village de Félines fut victime, il y a un an. Elle emporte en t~) les maisons d'Etienne Boffard et JeanAntoine Prost en 177~, celles de Nicolas Reynaud et de Jean Guillermond, en t~ celles de Jean Rostaing et de Gaspard Mmbel. L'inondation de <778 détruisit le pont de Sillart à la Roche-de-Glun, amena une crue de cinq mètres quarante à Grenoble, de six mètres onze à Romans, compléta t* oeuvre de destruction par la ruine de quinze autres maisons avec leurs dépendances celles de Joseph Darnaud, Jacques Barre, maréchal, Claude Duc, Jean Rodet, Jacques Rivoire, Antoine Chapuis, Jean Didier, Louis Brun, Pierre Guibert, Laurent Miribel, Pierre Vilherme, Claude Sonnier, Antoine Savel, et celle de sa femme. Les quatre dernieres restèrent debout, mais dépouillées de tout, mobiliers, outils, récottes. Les eaux n'avaient laissé que les murs largement lézardés et minés, absolument irréparables, et c'est tout ce qui restait du vieux village. La plupart des victimes reconstruisirent leur maison « au faubourg x c'est-à-dire au nouveau village, qui prit ainsi une importance inespérée; les autres s'établirent plus loin au centre de leurs terres.
A la vue de telles ruines, Il est permis de se demander si les habitants furent abandonnés à leur infortune. Non certes, et ce serait injuste de le prétendre. Le seul cahier des délibérations consulaires conservé à la mairie montre avec quelle bienveillance l'intendant de la province accueillait les réclamations et accordait dégrèvements et secours.
La sécheresse et les inondations, les orages et les gelées, le déficit de la récolte de grains, et même simplement de celle des amandes provoquent successivement des demandes et motivent des répartitions.
Il fut accorde aux habitants de Monteux 250 livres, soit environ mille francs d'aujourd'hui, en <74.2, en considération des dommages causés par la grêle et le débordement de l'Isère; en <744, 5oo livres à cause de la grêle du 4 juillet; 284 livres en <746 pour réparer les dégats de la grêle en cette
année; 300 livres en ~78 pour la grêle encore. L'année suivante, le consul demande que le produit de la taille royale soit entièrement employé à réparer le pont de l'Herbasse.
V!. Les travaux de défense
L'ingénieur en chef des Ponts et chaussées, M. de la Tour, avait dressé un projet pour assurer la protection des terrains menacés. Les deux tiers de la dépense étaient à la charge de la province et l'autre tiers à la charge des habitants de Beaumont-Monteux. Mais le projet resta lettre morte par suite du retard apporté par eux à voter leur contribution aux frais, espérant peut-être que l'intendant finirait par se charger de tout ou bien que l'Isère satisfaite de ses dernières conquêtes ne réclamerait plus rien à ses riverains, ou bien encore, que la dépense serait excessive et inutile. Excessive, car ce serait payer trop cher les terrains qui étaient encore menacés que d'entreprendre une digue pour les protéger. Inutile, car on ne gagnait rien à lutter contre )'tsère, elle rendait vains tous les efforts et tous les sacrifices, elle triomphait de tous les obstacles. Les religieuses de Vernaison s'y étaient ruinées, et en <68t) chargées d'une dette de 20,000 livres, à la suite des travaux destinés à protéger et aménager leurs prairies, elles se trouvaient réduites à offrir leurs terres en paiement à leurs créanciers. A l'autre extrémité de Châteauneuf, M de Genas, après des dépenses considérables, faisait appel aux habitants pour l'aider à terminer ses digues, mais inuulement, car ils avaient assez à faire ailleurs.
Pourtant après le désastre de !7?8, les habitants comprirent leur erreur et pour la réparer, s'adressèrent aux « Messieurs de Malte », bienfaiteurs habituels du pays, et qui, notamment en 1732 avaient contribué pour la somme de fooy livres, au service religieux de la paroisse, aux réparations de l'église et
à l'ameublement de la sacristie. Ils prièrent le commandeur de Saint-Romain et de Monteux de compatir à leur infortune en se chargeant du tiers des dépenses nécessaires. D'ailleurs ses intérêts étaient en jeu, puisqu'en qualité de patron de la cure, de prieur de l'église, il avait le devoir de veiller à sa conservation avec autant de soin qu'il en avait mis jusque-là pour son entretien et son embellissement. Le commandeur consentit à tout et fort de cette promesse, le consul en fit part à l'intendant qui ordonna à l'ingénieur en chef, Marnillod, de commencer immédiatement les travaux. Leur résultat fut de retarder pour vingt-cinq ans la ruine de l'église paroissiale. VII. L'église de Saint'Jean
Solidement bâtie au sommet du vieux village, sur la crête du « Perrou perron naturel dominant la vallée, l'église défiait les attaques de l'ennemi. Ne pouvant l'emporter de vive force comme les alentours, l'Isère en fit le siège avec une obstination digne d'une meilleure cause. Même lorsqu'elle paraissait calme et inoffensive, elle n'interrompait pas son travail destructeur, rongeant sournoisement, minant peu à peu ce terrain de sable et de gravier où elle avait beau jeu. De temps en temps un éboulement révélatt son travail et marquait ses-progrès.
Aux fêtes de Noël t8o;, les habitants deBeaumont-Monteux, privés de curé depuis les mauvais jours de la Révolution, étaient heureux d'avoir enfin un pasteur dans la personne de M. Lafond joie bientôt assombrie par la nécessité d'abandonner, à l'automne suivant, l'église qui suspendue sur un abîme sans cesse élargi et rendu plus dangereux par l'action dissolvante des eaux, y sombra peu de temps après. Le service religieux se fit provisoirement dans la maison de M. Musselon et ce provisoire dura treize ans, jusqu'à l'achèvement de la nouvelle église en f8ïo.
A la suite de l'ancienne église se trouvaient quelques maisons notamment les maisons Brune et Guillermond protégées jusque-là par leur situation elles subirent le même sort. VH!. Inondations de t856 et 1863.
La France entière fut dans la consternation et le deuil à la vue ou au récit des malheurs causés par le terrible fléau. L'Isère ne pouvait refuser sa coopération dès qu'il s'agissait d'une œuvre néfaste. Les dévastations recommencèrent En 18~6 le débit ordinaire de l'Isère, qui est de o;o litres par seconde, monta à 29,ooo. La rivière causa de grands dégats surtout à Châteauneuf. Abandonnant son lit principal qui achevait de rogner Beanmont-Monteux, elle s'établit sur la rive gauche, sur la lône de Châteauneuf qu'elle élargit en conséquence. Comme compensation, Beaumont eut sa lône maintenant desséchée et transformée en jardin et oseraies. En [863, l'Isère se jeta furieusement sur le quartier des Près, à l'extrémité du Perrou, qui avait jusque-là supporté ses plus redoutables assauts et qui n'ayant pu protéger son domaine n'étan plus capable de défendre celui des autres. Le fleuve devint si menaçant que M. Vnherme, maire, se hâta de demander du secours à Valence, t2; artilleurs furent envoyés immédiatement. Déjà une partte des terrains était dévastée. Pour sauver le reste tout fut sacrifié peupliers, saules, mûriers, arbres à fruits, haies vives, coupés, jetés à l'eau, réunis solidement, couvert de fagots, de rochets, de sacs remplis de gravier, afin d'amortir t'tmpétuo&ité du courant. Quand cette barrière improvisée fut terminée, le fleuve, se jouant encore une fois des efforts humains, la démolit en un instant et emporta les verdoyants débris comme un trophée de sa nouvelle victoire.
Heureusement les eaux baissèrent et bientôt tout danger
disparut. Mais ces dernières )eçons ne furent pas perdues. On s'occupa activement de remplacer la digue éphémère par une digue en blocs extraits des carrières de Châteauneuf Dès lors dans l'impossibthté de ronger ses tives, l'tsète employa son activité à creuser son lit. Elle aurait dû commencer par la et nous épargner amsi tant d'heures d'angoisse et d'épouvante, tant de pet tes irréparables.
Et maintenant, sans rancune au souvenir des mauvais jours, les habitants de Beaumont-Monteux attendent avec Impatience le jour où le fleuve, l'implacable ennemi d'autrefois, dompté enfin par le génie de l'homme, qui bon gré mal gré coopère aux mystérieux desseins de la Providence, deviendra un voisin aimable, mieux encore un serviteur docile, infatigable, travaillant lui aussi, et à sa mamère, a t'agrément, à la prospérité du pays.
Emile FROMENT,
C:~ë de Bej!M"!OM/oH<eti~
LES
Délibérations Consulaires
DU
COMTÉ D'ALBON
de tyoS à t?~
On sait que les comtes d'Albon, ancêtres des Dauphins de Viennois, eurent un château-fort à Saint-Romain et que le premier d'entre eux, au dire de Chorier, parut à l'assemblée de Varenne, en 889, sous Louis l'aveugle, fils de Doson. Le même personnage s'intitule comte en 9)0 et fonde la dynastie des princes dauphins, souverains de la province. Des ruines, connues sous le nom de Tour d'Albon, existent encore et leur emplacement ne pouvait être mieux choisi pour surveiller et protéger les belles plaines de la Valloire et de la vallée du Rhône.
Après les Dauphins, les rois de France possédèrent le comté d'Albon de 1339 à la Révolution et le cédèrent souvent à des engagistes de haute noblesse. C'est pour cela que la commune a ses archives dans les dépôts de Paris et de Grenoble et que son administration municipale e~-t restée si peu connue. La mairie actuelle possède seulement l'ancien état civil tenu par le clergé. Or, en touillant les vieilles archives d'un ami complaisant, nous avons eu la bonne fortune de découvrir une volumineuse liasse de délibérations consulaires, de 1708 à 1743. Il y avait plus de
cinquante ans qu'elles étaient reléguées au grenier, dans un tonneau défoncé, à la merci des rats.
Il fallait une sélection, car beaucoup n'ont qu'un intérêt relatif à la perception de la taille nous les avons laissées de côté. D'autres n'ont qu'un intérêt secondaire, nous nous contentons d'en faire un extrait succinct. Mais, par contre, quelques-unes ont un véritable intérêt historique local et nous en sommes sûr, elles intéresseront non seulement les habitants du comté d'Albon et leurs voisins mais beaucoup de lecteurs amis de l'histoire ()). En lisant ces délibérations on verra, qu'autrefois comme aujourd'hui, tout n'était pas exempt de reproches dans nos campagnes les malheurs des temps passés feront oublier les ennuis des temps présents. On y trouvera les noms des anciennes familles de la région et ceux les propriétaires des anciens châteaux, maisons fortes et grosses fermes de cette époque. Le comté d'Albon était formé de six paroisses savoir Anneyron, Saint-Rambert, Andancette, Saint-Romain, Saint-Martin et Saint-Philibert. 11 était divisé en huit sections qui étaient Fondevitle, Anneyron, Saint-Philibert, Saint-Rambert, Saint-Romain, Albon, Saint-Martin et Andancette.
Actuellement le comté d'Albon forme quatre communes Albon, Andancette, Saint-Rambert et Anneyron qui s'est adjoint Mantaille, le 6 mai 1809. A cette époque généralement, pour ne pas dire toujours, les troupes qui de Lyon allaient à Valence; arrivées à Roussillon se divisaient en deux parties. Celles à pied passaient par Albon, riche en céréales celles à cheval par Moras, pays de prairies et par conséquent de fourrage elles se rejoignaient à Romans pour traverser l'Isère (2). L'inverse se produisait au retour. (t) Ces dernières ont été transcrites textuellement.
(2) Le premier pont sur l'Isère à la Roche-de-Glun n'a été construit qu'en l'année 1769. Jusqu'à cette époque il n'y avait qu'un bac, aussi les troupes passaient par Romans.
Charles Assalin sieur de Montarsin était capitaine, châtelain royal et maire perpétuel du comté d'Albon (1), de t698 à 1717, et avait pour lieutenants
1° Alphonse Assalin, sieur de Lagardette, écuyer. 2° Just Assalin, sieur de Lagardette, aussi écuyer. Pierre Baborier, marchand à Andancette, fut nommé « Châtelain commis par un arrêt des élus de Romans du 7 décembre 1717, le comté d'Albon n'ayant pas de châtelain royal; il occupa cette charge jusqu'au 24 juillet t7)9.
Monsieur Charles-Hector Robert, bourgeois d'Anneyron, fut nommé capitaine châtelain royal par arrêt de la souveraine cour du parlement de Dauphiné du 26 juillet 1719 et fut installé dans cette fonction le 10 août suivant par sieur François Baboin, consul moderne (2) de la communauté. Les plus anciennes délibérations découvertes dans le tonneau sont du mois de décembre t708. Sous la présidence d'Alphonse Assalin de Lagardette, lieutenant du capitaine châtelain royal, assisté du consul moderne de la communauté, sieur François Baboin, on nomme, à tour de rôle dans chacune des huit sections, une personne capable et solvable pour faire la recette des tailles, le tout sans haine, faveur, ni suppôts quelconques.
Le comté d'Albon étant très important, le consul ne
(t) Le capitaine châtelain royal était le représentant de l'autorité royale, il présidait les assemblées consulaires Comme maire, il jouissait d'une faible juridiction en vertu de la charge qu'il avait achetée.
(2) Le consul moderne était nommé, pour une année, par les plus notables de la communauté, mais tous les ans on pouvait renouveler son mandat si on était satisfait de sa gestion. Il traitait toute les affaires concernant sa communauté et réunissait les plus aisés quand il le jugeait utile, il percevait aussi la taille.
pouvait suS&re à tout et se faisait adjoindre, pour la recette, une personne dans chaque section.
« Du 16e mars 1709 au lieu de Saint-Roman d'Albon sur les huit heures du matin, par devant nous, Alphonse Assalin de Lagardette, lieutenant de M. le maire châtelain royal de la comté escrivant le secrétaire-greffier.
« A comparu sieur François Sadm, habitant de ce lieu, lequel nous a remontré qu'ayant este chargé de la fourniture de l'estape (1) des troupes qui passent à Saint-Roman d'Albon pour l'année dernière mil sept cent huit. Il aurait esté oblige de continuer ladite fourniture par les ordonnances de l'intendant jusqu'au quinzième du présent, comme avant son ordonnanc due 25 février dernier, laquelle fourniture il a continué. Et comme le terme par icelles est expiré dès le jour d'hier, il nous a déclaré qu'il ne peut plus faire ladite fourniture attendu qu'on ne lui paye plus les avances qu'il a faites pour les fournitures. Ce qui le met hors d'estat de pouvoir acheter des denrées n'en n'ayant pas par devers luy et même il ne s'en trouve pas dans le lieu et voysinage que fort rarement et à un prix excessif.
« C'est pourquoi il nous requiert et sieur François Baboin, consul moderne de la communauté, de vouloir donner ordres et se pourvoir pour faire faire ladite fourniture, nous ayant fait la présente déclaration pour luy servir à ce que de raison et dont il nous requiert acte et s'est soussigné.
e SADIN »
« Duquel comparant le sieur Sadin nous a requis acte que nous luy avons octroyé pour valoir et servir à ce que de raison. Et en conséquence nous avons ordonné qu'à la dili-
(1) L'estape était l'endroit où les troupes s'arrêtent pour se ravitailler et coucher.
gence dudit consul il sera convoqué assemblée par devant nous des habttans de ladite communauté au 19* du conrant, à l'heure accoutumée pour délibérer sur le comparant dudit Sadin et nous nous sommes soussignés.
« LAGARDETTE, FLEURY, grefRer »
« Du mardi t9" mars mil sept cent neuf, au lieu de SaintRoman d'Albon, dans la chambre de la communauté, à l'heure de midy, devant nous, Alphonse Assalin, sieur de Lagardette, lieutenant de M. le capitaine châtelain royal et maire de la comté d'Albon, a comparu sieur François Baboin, consul moderne de la communauté, lequel nous a remontre qu'ensuite de notre ordonnance du 16 du courant. il a fait assemblée des principaux habitants de la communauté, pour délibérer sur le comparant fait par devant nous par sieur François Sadin, le 16' jour du courant, et requis qu'il soit fait lecture d'iceluy aux comparants sous nommés et de tout acte, et a signé.
« BABOIN, consul
« Sont comparus Messire Barthélemy Vierou-Fontaine M° Nicolas Gauttier, notaire Claude Genthon sieurs Nicolas Goudard Claude Morel Charles Routton Pierre Sauvageon Claude Barbier Estienne Couturier Pierre Brunet, Mathieu Dalissieu François Crozat principaux habitans de la communauté, auxquels ayant esté fait lecture par nostre greffier du comparant dudit consul et de celui du sieur Sadin, et ayant sur le tout deument conféré ensemble, ils ont unanimement délibéré tant à leurs noms que des autres habitans de la communauté absens, qu'il soit incessamment envoyé un exprès à M. l'intendant de cette province pour l'informer de ce que dessus, et de l'impossibilité où serait les habitans de la communauté de fournir la subsistance aux troupes qui passent journellement dans la communauté, attendu qu'il n'ont pas de grains
pour leur subsistance particulière. Supliant Sa Grandeur de vouloir pourvoir à ladite fourniture et ont signé les sachant escrire, et nous ont requis acte que nous leur avons octroyé et nous nous sommes soussigné avec notre greffier.
Lagardette Vierou Gauttier Genthon
Ch. Routton Barrier Morel Brunet
Goudard Crozat COUTURIER Dalissieu
BABOIN, consul Fleury, greffier. »
L'exprès envoyé à Grenoble remit la requête de la communauté à l'Intendant du Dauphine. Ce dernier donna verbalement l'ordre à sieur Donix, un des fournisseurs généraux, de faire la fourniture, mais comme les vivres étaient rares et chers, il ne fit rien. La communauté fut obligée elle-même de faire la fourniture.
Le premier avril 1709, nouvelle plainte de la communauté, qui, par une nouvelle délibération, décida d'envoyer encore un messager à Grenoble et choisit sieur François Baboin, consul, pour porter les plaintes de sa communauté. « Le lundy 1er avril 1709, le sieur Baboin représente aux habitans assemblés, qu'il exerce sa charge de consul depuis environ huit années à la prière et sollicitation des habitans et que ses affaires ne lui permettent plus d'exercer les fonctions de ladite charge de consul, désirant s'en descharger et rendre compte de son administration. C'est pourquoy il requiert les habitans assemblés de vouloir procéder tout présentement à la nomination d'un nouveau consul capable et solvable pour exercer ladite charge. Autrement et à défaut de ce proteste de se pourvoir ainsy et comme il verra.
« En procédant à la nomination du consul premier, la pluralité des voyx estant tombée sur Nicolas Goudard, nous
lieutenant du mayre et châtelain, l'avons désigné consul. Lequel a promis et promet exercer ladite charge en bon père de famille, procurer l'avancement de la communauté et non son dépérissement, et a obligé pour ce fait tous et un chacun ses biens et sa propre personne, et s'est ledit Goudard soussigné avec nous et les sachant escrire et le sindicq des forains et notre greffier.
« GOUDARD, consul Baboin BABORIER CROZAT RAMEL, sindicq; Routton Couturier
Ch. Routton F. Fay Chatillon Vibut
LAGARDETTE, lieut. FLEURY, greffier.
« Et restant assemblés lesdits déhbérans prient le sieur Sadin de continuer la fourniture et que dans les maisons où il y aura du grain on luy en fera donner pour ayder à la fourniture et ce pour éviter un désordre dans la communauté et la désertion des habitans, ce qui arriverait faute de ladite fourniture ».
« Du 14e apvril 1709 à l'heure de midy au lieu de SaintRoman d'Albon dans la chambre de la communauté devant nous, Just Assalin de Lagardette, écuyer, lieutenant de M. le capitaine châtelain royal et maire perpétuel du Comté d'Albon).
« A comparu sieur Nicolas Goudard, consul moderne de la communauté d'Albon, lequel nous a remontré qu'il lui fut signifié un acte ce jourd'hui par Me Dupuy, notaire, à la requête du sieur Delisle de Villeneuve, employé dans les affaires du Roy en cette province, fesant pour et au nom de M. Philibert Estienne, seigneur Daugny, chargé de la procuration du sieur Louis Desduc, adjudicataire des estapes de cette province, au sujet de la fourniture de l'estape de Saint-Roman-d'Albon, par lequel on luy représente que les officiers de la communauté ont fait refus de donner
leurs soins pour luy ayder à trouver les grains nécessaires pour faire ladite fourniture à quel prix que ce soit, et qu'il en ait offert le prix comptant. Et que sans ce il luy est impossible ou du moins aux parfournisseurs (1) généraux de faire fournir. Requiert pour plus ample déduct qu'il soit fait lecture aux assemblés sous nommés dudit acte et qu'il a fait assembler à ce sujet pour qu'ils ayent à en délibérer. « Qoudaud, consul »
« Sur quoy sont comparus M. Barthelémy ViérouFontaine Me Nicolas Gauthier, notaire sieurs Charles Routton, Claude Morel, Jean Routton, sieurs François Baboin, François Fay, Mathieu Dalissieu, Estienne Couturier, Dominique Béraud, Charles Pérouze »,
« Lesquels ayant ouy lecture du remontré dudit consul et de l'acte y énoncé, et sur le tout duement conféré, ensemble, ont unanimement délibéré et conclu, tant en leurs noms que des abscents, que ledit sieur Delisle, de Villeneuve, expose coutre la vérité par son acte, de dire que les officiers et habitans de ladite communauté ne se sont donnés aucun mouvemeut pour luy procurer des grains ny qu'on luy aye fait refus de luy en vendre à quel prix que ce soit. puisqu'il ne peut pas ignorer non plus que sieur François Sadin, que la communauté a fait fournir des bleds et de l'avoine pour ladite fourniture depuis le quinzième de mars dernier, audit sieur Sadin, comme il n'oserait le désavouer, dont il doit le prix. De même qu'audit sieur Delisle depuis mercredi dernier qu'il est en ce pays luy ayant même esté livré ce jourd'hui quinze sestiers froment, offrant de luy en
(1) Les parfournisseurs généraux étaient ceux qui, dans chaque province, soumissionnaient pour faire les fournitures aux troupes, à toutes les étapes; et les estapiers étaient leurs employés chargés d'assurer les fournitures aux différentes étapes.
2e SÉRIE. XLIIIe VOLUME. IÇJOÇ). J
fournir une plus grande quantité pour ladite fourniture en la payant argent comptant et de gré à gré, de même que celuy qui a esté cy-devant livré.
« Pour l'avoine on a fourni toute celle qui s'est trouvée dans ladite communauté, et on offre s'il en sait, de luy faire ouvrir les greniers et de la luy faire livrer aussi argent comptant en suivant les prix du plus prochain marché. « Pour ce qui est du distributeur ou parfournisseur pour ladite estape qu'ils doivent de lui produire, c'est à messieurs les estapiers généraux à le mettre et s'ils n'en trouvent pas des commis pour ladite distribution sommant ledit sieur Delisle et en sa personne lesdits sieurs estapiers généraux de continuer au moyen desdits offres de faire faire ladite fourniture. A deffaut de ce ils protes Lent contr'eux de tout ce qui pourrait arriver et de tout ce qu'ils peuvent et doivent protester, et pour toute réponse à l'acte du sieur Delisle. Plus, requièrent que la présente délibération luy soit signifiée par le secrétaire-greffier ou son substitut. « Nous lieutenant susdit avons donné acte de tout ce que dessus et nous nous sommes soussigné avec notre consul et lesdits délibérans sachant escrire et notre greffier. « VIEROU Gauttier Dalissieu F. Baboin
F. Fay CotiTuniER Ch. Routton Morel
Routton; ASSALIN DE LAGARDETTE, lieutenant;
CROZAT, substitut du greffier.
« A esté signifié audit sieur Delisle par Crozat, substitut, et en présence de Combet Barthélemy, chirurgien dudit lieu de Saint-Roman et de George Vibut, babitan d'Anneyron, le quatorzième avril mil sept cent neuf.
« Combet VIBUT; CROZAT, sub' du greffier »
« Du cinquième may mil sept cent neuf à l'heure de midy au lieu de Saint-Roman d'Albon dans la chambre de la
communauté, par devant nous Alphonse Assalin, sieur de Lagardette, lieutenant du capitaine châtelain royal et maire perpétuel du comté d'Albon.
« A comparu sieur Nicolas Goudard, consul moderne dudit comté, lequel nous a dit qu'il a fait convoquer à ce jour, lien et heure assemblée des principaux habitans de la communauté devant nous pour délibérer sur la nécessité indispensable qu'il y a de pourvoir au soulagement des pauvres de-la communauté qui sont en très grand nombre et qui infailliblement mourront de faim, si on ny met quelqu'ordre. Leur exibant un arrest rendu par le parlement le 16 mars dernier à ce sujet, ensuite duquel plusieurs lieux de la province ont fait des rôles pour le soulagement des pauvres, duquel arrest il requiert qu'il soit fait lecture à eux assemblés et a signé.
« GOUDARD, consul. »
« Auquel lieu sont comparu sieur Charles-Hector Robert, Me Nicolas Gauttier, sieur Pierre Baborier, Me Barthelémy Viérou, sieur François Baboin, sieur François Sadin, Claude Vermillière, Hypolite Charignon, Claude Ronat, Fleury Ronat, François Fay, Charles Pérouze, Alphonse Crozat, Estienne Couturier.
« Lesquels après avoir ouy lecture dudit remontré et dudit arrest ont tous unanimement délibéré qu'il faut que les plus principaux habitans de chaque paroisse fassent un estat des pauvres de la paroisse, et en apprès un estat de ceux qui pourront donner quelque chose pour les soulager et les prix de la remise auxdits principaux, lesquels l'ayant remis on fera acheter quelques bled qu'on fera moudre et convertir en pain qu'on donnera aux pauvres chacun en sa paroisse suivant leurs comptes et au cas qu'on ne puisse rien recevoir (1) on agira pour l'exécution dudit arrest
(1) Les délibérants savaient bien qu'on peut demander au peuple son sang, sa liberté et sa vie mais jamais sa bourse.
comme on fera dans les bourgs et autres communautés voisines.
« De plus lesdits assemblés ont délibéré que sur l'ordonnance qui a esté envoyée à ladite communauté par le seigneur conseiller Barrin en exécution de l'arrest de nos seigneurs du parlement du neufvième apvril dernier au subjet de la vente des bled qui peuvent être en cette communauté qu'il y a la plus grande partie des habitans de ladite communauté qui ont fait leur déclaration devant nous de la quantité des grains qu'ils ont laquelle quantité n'est pas suffisante pour sollager les habitans de la communauté à qui il manque du bled pour leur nourriture ou pour la fourniture de l'estape qui est établie audit Saint-Roman, laquelle ladite communauté l'afournie depuis plus d'un mois et demi. Et sur ce qu'elle vient d'être advisée que le subdélégué du seigneur commissaire au département de Vienne est venu en cette communauté et a rendu une ordonnance qui porte injonction à divers habitans qui ont quelques grains de les porter au marché de Vienne pour y estre vendus. Comme cela ferait un grand préjudice aux pauvres habitans ou pour la fourniture de l'estape, il faut incessament en donner notice au seigneur Barrin. et pour cet esfait on prie le sieur Robert de se transporter à Beaurepaire où il est, pour y recepvoir ses ordres, pour ensuite se pourvoir à Mgr le Président de Gramond, à Grenoble, et le suplier suivant qu'il avait ci-devant fait par sa lettre escripte au seigneur conseiller de Brissac, qui estait commissaire pour la visite des bled de cette communauté, de vouloir ordonner que les bled qui y sont y resteront pour la subsistance des pauvres et pour la fourniture de l'estape. Et à cest effet on lui donnera l'estat de la quantité des bled qui sont en la communauté. Pour cest esffaict on y enverra une personne exprès et le consul luy donnera argent pour fournir au frais de son voyage, lequel il prendra de ceux qui sont entre ses mains des sommes qu'on avait imposé
l'année dernière suivant sa permission. Promettant avoir le tout agréé et ont signé les sachant escripre avec nous, ledit consul et notre greffier.
« LAGARDETTE, lieutenant; Viérou BABORIER;
Baboin COUTURIER CHARIGNON F. Fay
Crozat Pascal Goudard, consul ROBERT;
Gauttier; FLEURY, greffier.
« A l'instant les sieurs déhbérans ayant réfléchi qu'il est d'une nécessité indispensable, pour éviter que les pauvres meurent de faim faute de trouver du pain à acheter, d'ordonner à quelques personnes dans deux ou trois coins de la communauté de faire du pain pour le distribuer aux pauvres, le payant jusqu'à ce qu'on puisse soulager les pauvres par d'autres moyens.
« Plus nomment pour faire ledit pain et fournitures pour Anneyron, honnête Pierre Sauvageon, hostelier dudit lieu pour Saint-Roman, honnête François Fay, aussi hostelier de St-Roman, et pour Andancette Noël Bruyère, auxquels il sera distribué du bled en payant à proportion de ce qu'ils distriburont. Et que faute par eux de faire le pain et distribution qu'il leur est deffendu de faire ni vendre aucun pain ni vin dans leur cabaret et lequel pain ils ne pourront distribuer qu'aux habitans de ladite communauté et à ceux qui en auront besoin. Et le prix dudit pain sera fixé par Monsieur le capitaine châtelain royal suivant le prix de l'achat du bled.
« De laquelle délibération nous avons octroyé acte pour servir à ce que de raison et en cas de refus par lesdits sus-nommés de faire le pain et la distribution d'iceluy, nous avons fait inhibition et défence de vendre du pain et vin dans leur cabaret à peine de trois livres d'amende en faveur des pauvres. Et nous nous sommes soussignés avec les sachant escrire. »
Comme il fallait de suite des fonds pour acheter du blé pour nourrir les malheureux, la communauté délibéra le 21 mai de nommer un syndic des pauvres et le charger de poursuivre les nommés Payen et Thivolle fermiers de la communauté qui n'ont pas payé leur ferme de l'année 1708 savoir six sétiers de blé moitié seigle et moitié froment. Le sieur Goudard, consul, a été chargé de faire les poursuites.
Le trente mai, la communauté nomme deux personnes dans chaque paroisse qui seront chargées de faire un état des pauvres de leur paroisse d'un commun accord avec le curé.
Ceux d'Anneyron nomment Hector Robert et Nicolas Gauttier.
Ceux de Saint-Martin François Crozat et Pierre Pascal. Ceux de Saint-Philibert Hyacinthe Fleury et Christophe Charignon.
Ceux de Saint-Rambert: Pierre Viérou et Etienne Micou. Ceux d'Andancette Barthélémy Viérou et Pierre Baborier. Ceux de Saint-Roman François Baboin et François Sadin.
PROSPER VALLERNAUD.
(A suivre)
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Station de Cerebelliaca
M. Brun-Durand, à la séance du 26 octobre 1908, à lu sur la question posée dans le Bulletin par l'auteur du tramway de Valence à Crest, d'intéressantes observations de M. Albert Faure-Biguet, conseiller à la cour de cassation, l'un de nos plus anciens et plus sympathiques membres de la Société, propriétaire de la maison de campagne des Vallons sur Vaunaveys nous sommes heureux de les reproduire
« L'opinion courante, dit-il, plaçait jusqu'ici la mutatio Cerebelliaca sur la voie romaine des Alpes, entre Augusta et Valence, soit à Eurre, soit à Montoison mais Longnon, dans sa grande carte de la Gaule romaine, qui est un chefd'œuvre, fait faire un coude brusque à la voie dont il s'agit, un peu après Augusta, pour la faire passer à Vaunaveys et de là se diriger sur Upie, où il place la mystérieuse Cerebelliaca. Or, je crois qu'il a raison, car à un kilomètre du hameau de la Besantie, sur la Rnchette, il y a un quartier qui est encore counu sous le nom de Sainte-Cer6e*Me, et Serville qui de Cerebelliaca me paraissent, étymologiquement parlant, bien proches parents. D'autre part, de nombreux vestiges romains se trouvent dans ce même quartier ou dans ses environs immédiats et à un kilomètre encore de la Resantie, mais sur le territoire d'Upie, dans un vieux domaine appelé la Grande-Terre, où on découvrit il y a 7 à 8 ans, en fouillant le sol, une mosalque romaine que le propriétaire se proposa d'abord de faire encastrer dans le glacis de sa cuisine. Malheureusement il n'en fit rien, et cette mosalque étant par suite restée exposée aux intempéries et aux atteintes des enfants, il n'en reste plus que des fragments informes.
« On m'a signalé en outre l'existence ou du moins le souvenir d'autres restes anciens dans le même quartier, mais je n'ai pas eu le temps d'aller les vérifier sur place, avant mon départ. Et il ajoute Ces détails m'ont été donnés pendant les assez fréquents voyages en tramway que j'ai eu l'occasion de faire à Valence les semaines passées. »
Le Monument ALLMER
Le 19 novembre 1908, une réunion d'archéologues, de savants et d'amis inaugurait à Vienne le monument élevé par souscription à Auguste Allmer. L'éminent épigraphiste. né à Paris en 1815, le 8 juillet, et décédé au commencement de 1900 (I), consacra sa vie à l'étude de l'histoire romaine et nous révéla ainsi les secrets des inscriptions laissées en France par les conquérants venus des bords du Tibre. Quelques prédécesseurs avaient abordé déjà le même sujet; il compléta et vérifia leurs travaux.
D'employé au ministère des finances, il devint percepteur en Bretagne et ensuite à Estrablin près de Vienne. C'est là qu'il connut l'ancien libraire Girard, et M. de Terrebasse, l'un de nos plus savants historiens dauphinois. Le premier l'accompagna dans ses courses et le second collabora à ses six volumes des Inscriptions de Vienne. Dessinateur habile et écrivain de talent, M. Allmer nous a laissé d'importantes révélations sur tout le midi. Tels sont ses titres à l'honneur de figurer sur une place de la capitale de l'ancienne province Viennoise.
Son monument, en marbre de Carrare, est d'une sculpture simple et gracieuse et porte pour inscription
Auguste ALLMER
Viennenses et amici
MDCCCXV MDCCCC
M. le commandant Espéraudieu, qui a remplacé M. Allmer à la direction de sa Revue épigraphique, a remis à M. Brenier, maire de Vienne, le monument consacré au souvenir du savant archéologue dont la ville de Vienne et la France on droit d'être fières.
(1) Voir le Bulletin de la Société, t. XXXIV, 1" livraison, p. 182.
ESPENEL
La commune d'Espenel, de 1,437 hectares d'étendue, présente au voyageur qui va en chemin de fer de Livron à Briançon, un village bâti en rond sur le versant nord d'une montagne adjacente au groupe colossal de Chastel-Arnaud et de la Dent de Saillans. Il domine le cours de la Drôme jusqu'à cette ville et le défilé des Etroits, vestibule de la gracieuse vallée de Vercheny.
D'après les anciennes formes de son nom, Espenel indiquerait un sol peu fertile sauf en épines, d'une culture difficile et presque pelé, où les inondations causées par les pluies ont emporté arbres et récoltes. Vers 1630, il passait pour inculte dans 9 parts sur io. La population, de 211 habitants aujourd'hui, d'un bourg loin de la route de Die à Valence, reconnaissait pour seigneurs les Grammont de Montclar et de Vachères, les Piégros et les Darbon, et pour décimateurs les Bénédictins de Saint-Chaffre et plus tard, les chanoines de Saint-Sauveur de Crest, auxquels elle payait en totalité 8o setiers de redevances en grains. L'absence d'industrie et de commerce la privait d'autres ressources que celles de l'agriculture.
Dénuée de biens domaniaux et patrimoniaux, elle prélevait sur ses impôts annuels seuls les frais d'entretien de sa fontaine, de ses maisons communales, les
gages de ses gardes et instituteurs, et les dépenses des logements de troupes autrefois très fréquents. Depuis quelques années la condition économique de la commune s'est améliorée avec la création d'une station de chemin de fer et l'amour du travail et de l'économie de ses habitants.
Actuellement, Espenel est un pays de chasse et d'agriculture; mais autrefois, à cause de sa position stratégique, il était convoité à la fois par les évêques de Valence et par les comtes de Valentinois, souvent en guerre jusqu'en 1350. Ainsi, en 1277. Amédée de Roussillon s'en empara pour couper le passage aux troupes de son adversaire qui reprit la place bientôt après et fut condamné à la rendre par de grands personnages choisis pour arbitres de leur différend. Pendant les guerres du xvic siècle et la période dite du Désert, il y eut là évidemment des logements militaires fréquents et des sujets de plaintes multiples.
Rien d'antique dans la commune, sauf les ruines d'un ancien édifice, dit Saint-Pierre. sur les confins d'Espenel et de Vercheny, d'un aspect fort vieux, mais sur lequel on manque de renseignements légendaires et historiques.
A. LACROIX.
SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1908
PRÉSIDENCE DE AI. BRUN-I)URAND
Lecture est donnée d'une lettre de M. Albert Faure-Biguet, conseiller à la cour de cassation, relative à la station ou étape de Cerebelliaca sur la route de Milan à Vienne. Elle est publiée dans cette livraison.
Le secrétaire montre ensuite un arrêt imprimé du conseil d'Etat relatif aux excès commis en Dauphiné et à Espenel notamment, par les troupes de passage au xvue siècle, et d'anciens calendriers en placard, imprimés à Lyon, de 1651 t à 1686, conservés par M. Prompsal, ancien notaire, notre dévoué confrère. Comparés à ceux de 1909, ces calendriers prouvent les progrès immenses accomplis de nos jours dans ce genre de publication. Les portraits de personnages illustres en gravure sur bois sont mal dessinés et sans valeur et les signes du zodiaque aussi, comme du reste, le papier, le texte et les vers appropriés aux mois ou aux saisons
Dans les imprimés communiqués avec les calendriers se trouvent t° Une ordonnance du duc de Lesdiguières, lieutenant général en Dauphiné, imprimée à Grenoble, défendant toute insulte aux réformés de Châteaudouble, qui, privés de leur temple, allaient prier dans ceux de Romans, Beaumont et la Baume-Cornillane (6 juin 1673). Elle a été copiée et conservée dans les pièces de la commune
2" Un arrêt du parlement de Grenoble condamnant à la détention perpétuelle dans un couvent de Grenoble, Madame Judith de Pontcharra, veuve de César de Rigot de Montjoux, et Sambuc, à une amende et à la ruine de sa maison pour fait de religion (23 juin 1645) >
3° Une lettre du roi imprimée, adressée au gouverneur de Montpellier relative aux élections consulaires de cette ville. Après quelques observations d'intérêt secondaire la séance est levée.
A. LACROIX.
CHRONIQUE
Les membres du bureau de la Société se font un devoir d'offrir à tous leurs confrères leurs voeux d'un bonheur complet pendant l'année nouvelle et de les remercier de leur dévouement sympathique à l'oeuvre commune.
OuVRAGtS REÇUS DU MINISTÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE Roiezanta. Recueil tnmesttiel fondé en 1873 par Gaston Meyer et Paul Paris. Octobre 1908, tome XXXVII, n° '48. Mettensia. Mémoires et documents publiés par la Société nationale des Antiguair es de Fiance. Fascicule 3, 1908. COMITÉ DES TRAVAUX HISTORIQUES ET SCIENTIFIQUES Bulletin historique et phllologique, année 1907, n0' i et 2, 3 et 4, 2 volumes.
Bulletin archéologique. Année 190S, première livraison. Dans la liste qu'il publie des membres non résidants du Comité sont nommés
Messieurs Brun-Durand (Justin), à Crest; Chevalier (le chanoine Ulysse), correspondant de l'Institut, à Romans; Roman (Joseph), au château de Picomtal (Hautes-Alpes).
Dans la liste des correspondants honoraires du ministère Messieurs Maignien, bibliothécaire de la ville de Grenoble Vaschalde (Henry), à Vals-les Bains; Lacroix, archiviste départemental de la Drôme.
Correspondants actuels du ministere
Messieurs Beylié (de), membre de la Société de statistique
des sciences naturelles et des arts industriels de l'Isère, à Grenoble Guillaume (l'abbé archiviste du département des Hautes-Alpes.
La même livraison publie un rapport d'après les notes et les dessins de M. Baussan, architecte au Bourg-Saint-Andéol, sur les antiquités de Leyris (Ardèche), près Lagorce, s gnalant des objets en général de peu d'importance fragments de vases rouges ornés, deux lampes de terre, des ustensiles de bronze, deux clefs de fer, des vases de verre, une grande amphore, une monnaie de bronze de Nnnausus et une de Trajan, etc.
Sociétés savantes
La Société littéraire de Lyon publie les noms et la liste des ouvrages de ses membres d'honneur, membres honoraires, membres émérites. membres titulaires et membres correspondants. Parmi les membres honoraires figurent Messieurs Maurice de Boissieu et Brosset-Heckel, et parmi les membres correspondants M. Jules de Lubac, Mademoiselle Adèle Souchier et Messieurs Chevalier (l'abbé Ulysse), de Romans, Morel (Louis-Barthélemy), Brun-Durand et Lacroix, archiviste. Le Bulletin de la Société d'études des Hautes-Alpes, signale quelques découvertes d'antiquités à Izon, commune voisine d'Eygalayes, où, en décembre 1872 et janvier 1873, des éboulements de terrains entraînèrent dans le nf du val deux maisons et des prairies.
En 1903, M. Maigre et M. Paul Plat, en 1908 ont trouvé dans ce lieu de petits vases samiens, une bouteille en verre, deux petits lacrymatoires et un grand vase aussi en verre à goulot très large, qui fut brisé en le sortant. Des sépultures et des ossements rencontrés au même endroit semblent devoir y exiget de nouvelles fouilles.
A. Lacroix.
BIBLIOGRAPHIE
Les Mémoires de l'Académie de Vaucluse, publiés récemment, rendent compte du beau livre de M. Maurice Faure, intitulé Pour la terre natale et nous sommes heureux de nous associer aux éloges donnés à l'auteur par nos voisins bienveillants. Après avoir constaté la valeur littéraire des discours et des articles d'encyclopédies composant le volume, une courte citation en révèle l'idée principale. « Le patriotisme, dit Mon« sieur Maurice Faure, n'est pas uniquement une entité « morale, une conception abstraite, une expression géogra« phique ou historique. Il est la représentation en quelque « sorte matérielle et visible du pays même avec ses caractères a particuliers, ses plaines, ses fleuve, ses rivages, avec les « aspects multiples et variés de son sol, tels qu'ils ont été u formés et transmis par la lente succession des siècles ». Sous l'inspiration des idées généreuses de l'auteur, il a pu célébrer avec enthousiasme le Dauphiné Drômois, les magnanarelles, les paysages de France, la comtesse de Die, Louis Gallet, Henri Sibourg, les Félibres provençaux, les villes de Romans, Saillans et Crest, sans oublier les orateurs et les écrivains ses amis.
Ce qui l'émeut surtout, c'est le beau, c'est l'art, c'est le dévouement et le génie, et s'il a heureusement coopéré à la vulgarisation des sites et des monuments, il a voulu surtout conserver intactes les beautés de la nature et les chefs-d oeuvre des grands artistes, toujours menacés de destruction par les calculs égoïstes de l'ignorance et les brutalités de la barbarie. Son livre n'est pas seulement un hommage au patriotisme
il est aussi un encouragement pour tous ceux qui, à son exemple, travaillent à faire connaître et aimer la terre natale. Jean-Jacques Rousseau, par Louis Ducros, dans les Annales des facultés des lettres d'Aix (janvier et juin 1908). L'auteur pleinement convaincu de l'insuffisance des études antérieures sur l'écrivain genevois, et de l'évidente partialité de ses biographes, a repris dans tous ses détails l'histoire de sa vie, et l'a expliquée, combattue ou justifiée, en foutnissant tous les moyens de contrôle, recueillis avec soin.
Ce travail sérieux d'un critique habile mérite d'être lu et médité, non seulement par les admirateurs de Jean-Jacques, mais encore par ses adversaires et par les indifférents. Les recherches innombrables de M. Ducros dispenseront de recourir aux ouvrages mêmes du philosophe et mettront suffisamment en rehefses erreurs et ses fautes. Partant, le travail nouveau de M. Ducros est un acte de courage et d'impartialité véritable. Il mérite ainsi toutes nos félicitations.
Oppède au moyen-âge et ses institutions, par Lucien Gap, instituteur public, (Valence, Imprimerie Valentinoise, 1907, brochure in-8°, 5 pages.
Cette petite commune de Vaucluse, arrondissement d'Apt, est connue depuis 1044; mais les maîtres de sa seigneurie, ses habitants et son organisation municipale, judiciaire, militaire et religieuse, tout comme ses institutions charitables, scolaires et financières n'avaient pas eu d'historien Oppède aura désormais le sien et cela grâces aux recherches laborieuses de M. Lucien Gap.
Le même auteur a aussi publié une brochure sur Reforciat d'Agoult et Rodrigue de Luna, capitaines généraux du Venaissin pour le pape Benoit XIII et sur leur rôle à Oppède et dans le Comtat (Paris, 1908, H. Champion, brochure in-8", 20 p.). Ce mémoire, qui a obtenu le second prix avec médaille d'argent au Concours historique du 26 mai 1907 de l'Académie de Vaucluse. est plein d'intérêt. Il s'y trouve de nombreux
renseignements sur les troubles du Comtat et du grand schisme d'Occident, sur les grandes compagnies et sur celle de Raymond de Turenne.
Bibliographie locale, par Charles Bellet, Privas, 1907, Laurent, brochure in-8°, 89 pages.
La ville de Tain a trouvé là un ouvrage intéressant où sont rappelés douze de ses enfants les plus illustres, dont voici la liste
« L'ordre alphabétique indique les deux abbés Blanc, l'un « prédicateur estimé, l'autre philosophe et linguiste Made« moiselle Netty du Boys, âme très élevée, auteur d'un vrai « chef-d'œuvre consacré au maître imcomparable que fut « Monseigneur Dupanloup son frère M. Paul du Boys, « ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées, auteur de savant « travaux techniques l'abbé Chalieu, archéologue et érudit le Père Fleury-Ternal. jésuite, historien et prédicateur « Anatole de Galher, littérateur, historien et critique de « valeur Humbert de Gallier, voyageur et publiciste le « sénateur Monier de la Sizeranne, orateur et poète, homme « politique passionnément dévoué à son pays et d'une scrupu« leuse honnêteté, ce qui est si rare aujourd'hui son fils ( M. le comte Fernand de la Sizeranne, ancien député de la « Drôme, bibliophile et numismate Enfin, MM. Maurice et « Robert de la Sizeranne, petit-fils du sénateur le premier, « véritable apôtre des aveugles auquels il a donné sa vie, « créant pour eux toute une littérature spéciale; le second, « critique d'art exercé, esprit très fin et collaborateur autorisé « de la Revue des Deux Mondes ».
Nous saluons la naissance de la Revue du Dauphiné et du
Vivalais et lui souhaitons une longue carrière. A. Lacroix.
Le Secrétaire-Gérant A. LACROIX.
Le Tramway
DE
Valence à Pont-en-Royans
(SUITE. Voir la 168e livraison)
III. CHABEUIL ET LES DAUPHINS
Avant de faire connaissance avec ces nouveaux seigneurs, il convient de signaler l'existence d'un ancien document d'apparence authentique dont un paléographe habile a bien voulu nous adresser une transcription exacte. Il a été écrit en latin sur parchemin, au xue siècle et muni d'un sceau en cire jaune aujourd'hui brisé, sur lequel se voit encore les lettres 0 L 0 (de Cabeolo). Comme il infirme les détails déjà donnés, il mérite un examen sérieux; en voici l'analyse: Martin Jarret, écuyer de Châteaudouble, reconnaît tenir de Lambert de Chabeuil, à l'exemple de ses prédécesseurs, en fief ancien, noble et franc, les redevances et le territoire de Charpenet, entre les chemins de Châteaudouble et de Combovin, près de la Véore, comprenant 120 sétérées de bois, 200 de terres, 5 de pré, 20 fosserées de vigne, avec maison, grange, puits et jardins contigus. Ce domaine figure sur la carte de Cassini, et M. le chanoine Magnat, curé de Châteaudouble, lui donne pour possesseurs, de l'an 900 à 1370 la famille Jarret, d'abord, puis Lionette de Montelier qui hérita d'elle vers 1370, et épousa Claude
Chabert, fils du seigneur d'Upie, dont la postérité s'établit à Châteaudouble Etoile et Ohanos Ourson En 1518, Benoîte de Chabert entra dans la maison de Beaumont d'Autichamp et Charlotte, sa fille, porta le fief aux de Fay, du Vivarais, et ceux-ci aux Bron de la Liègue, du Forez, qui le vendirent en 161 1, à Pierre de la Baume, conseiller au parlement de Grenoble, originaire de Vaunaveys-lès-Crest, installé vers 1638. M le marquis de Pisançon l'acheta, en 1783, et à la Révolution la famille Charrin, de Peyrus, lui succéda, et le transmit à un négociant de Lyon, originaire d'Alixan, propriétaire actuel.
Ces détails sur un fief secondaire n'auraient pas dû faire oublier l'histoire de la seigneurie elle-même mais la date de l'inféodation de Charpenet, vers 900, confirmé en 1105, ne permettait pas de laisser accréditer deux erreurs à la fois, au témoignage des cartulaires de Saint-Barnard de Romans et de Léoncel. En effet, Martin Jarret n'a pas, à cette date, pu rendre hommage à Lambert de Chabeuil et s'engager à défendre son château, s'il était assiégé, puisque Lambert François, seigneur du Royannais et de Peyrins, auteur de la branche de Chabeuil, arrivait presque seulement de la première croisade (t096 à 1099) où il avait suivi son frère utérin Adhémar, évêque du Puy et légat du pape, à cette expédition, et qu'en 1114, Gontard, son fils et Raynaud-François, en 1132 et 1138, probablement son petitfils, habitaient les environs de Romans quand fut célébré le mariage de Raymonde François fille de François de Royans, avec Raymond de Bérenger, et qu'il amena à Chabeuil le nouveau seigneur, qui en prit le nom. Il semble inutile d'ajouter que vers l'an 900, le régime féodal établit en Dauphiné après 1032, l'emploi des noms propres, des sceaux et des armoiries qui n'existaient pas encore. A la vérité, une charte de Léoncel, de 1194, cite un Martin Garrez (pour Jarret) et un Lambert de Chabeuil d'autre part, l'histoire sommaire des Dauphins prouve que les
possesseurs de Charpenet, en 1308 et 1331, se reconnaissaient obligés à défendre le château, le seigneur et les habitants de Chabeuil, en cas de siège. Ajoutons qu'il y avait certainement de grandes familles dans le pays depuis les Romains, les Gallo-Romains, les Francs et les Burgondes. comme les comtes d'Albon, les comtes de Valentinois, les seigneurs de Clérieux, ceux de Châteauneuf-d'Isère et d'autres aussi. Mais, d'où a pu venir l'idée à une maison éteinte, en 1370, qui ne joua jamais un rôle de quelque importance en Dauphiné, de recourir à l'emploi de fausses dates comme on fait les Adhémar ? Après examen attentif de la question, on doit reconnaître exacte la transcription de l'acte de 1105 et en même temps l'omission par le premier écrivain d'une lettre ou deux dans la date originale, ainsi présentée M C quinto. Malheureusement, la charte ne renferme aucune indication chronologique et aucun nom de témoins connus, sauf celui d'André de Montelier et, en outre, la maison de Charpenet a été reconstruite au xvie siècle. En résumé, si les Jarret ont reconnu leur obligation, comme vassaux dévoués, de défendre le château de leur suzerain, il faudrait au moins prouver qu'en 1105 ce château existait déjà. et cette preuve loin d'avoir été fournie est en contradiction avec les travaux récents de l'érudition. Par conséquent, cette disgression sur l'histoire d'un fief, au lieu de celle de la seigneurie elle-même, ne saurait être excusable si la critique historique ne l'avait exigée aussi allons-nous saluer maintenant l'arrivée à Chabeuil des comtes d'Albon, successeurs des Bérenger de Royans. La belle plaine de la Valloire et le coteau de Moras à la vallée du Rhône, qu'il encadre, présente encore les restes d'une tour plus d'à moitié démolie, près de laquelle les auteurs ont placé le berceau des souverains de la province. La situation se prêtait à merveille à l'installation d'un chef militaire ou civil. D'autes les font venir des environs de Grenoble ou de Romans, et, en somme, leur origine est
demeurée fort obscure. Divisés en trois races, ils s'appellent tous Gui ou Guigues et, pour les distinguer il a fallu donner à l'un le surnom de vieux (1060), à un autre Guigues celui de le gras (1128), à un troisième ou quatrième celui de dauphin, vers 1142. L'existence des premiers n'est guère attestée que par des donations privées ou par des empiètements sur les terres ecclésiastiques. Toutefois, de riches alliances agrandirent aussi leurs états, comme la dot de Marie de Claustral comprenant leGapençaiseti'Embrunais, qui restèrent'au pouvoir de Guigues-André, après la répudiation qu'il fit de cette princesse généreuse.
La deuxième race commença en 1184 avec la dauphine Béatrix, femme d'Hugues, duc de Bourgogne, et finit vers 1307, avec Anne, épouse d'Humbert de la Tour-du-Pin. Un de leurs descendants, en 1339, réunit le Dauphiné à la France. Déjà, sous la deuxième race, Guigues-André avait noué des relations avec la famille de Chabeuil, en donnant à Lambert et Albert, à titre de fief rendable, une partie de Pisançon, lorsque Gontard, leur père, à la suite de difficultés avec l'évêque de Valence, avait recherché la protection delphinale et rendu hommage, en 1206, au bienfaiteur de sa famille.
Comme la ville de Romans, fondée vers 940, avait rapidement prospéré, les Clérieu, les Dauphins, les Poitiers et les Lambert-François s'efforcèrent d'y entrer et de se rendre maîtres du château de Pisançon, sur la rive gauche de l'Isère presque en face de la ville convoitée. A la suite de difficultés survenues entre l'archevêque de Vienne et le chapitre de Saint-Barnard, dont il était l'abbé, les parties confièrent la solution du conflit à Humbcrt de la Tour, mari d'Anne, héritière des dauphins. Pendant l'examen de l'affaire, le seigneur de Chabeuil, héritier de ceux de Peyrins, et Silvion de Clérieu, moururent et Pisançon échut aux Poitiers et aux Dauphins d'où vinrent la parerie poitevine et la parerie delphinale. D'aucuns prétendent qu'Humbert
de la Tour profita de la condition d'arbitre pour devenir propriétaire mais d'autres auteurs affirment qu'il acheta les droits d'Eynard de Châteauneuf-d'Isère, neveu du défunt, d'Alix de Chabeuil et d'une autre héritière de Lambert de Chabeuil ce qui est beaucoup plus honorable.
Le dauphin Guigues, le 3 novembre 1206, ayant reçu l'hommage de Gontard de Chabeuil pour son château Arbert et Lambert, ses neveux, remplirent le même devoir en 1247 et en 1256, époques où la bannière delphinale flotta sur les murs de la ville et sur le château dont les nouveaux seigneurs avaient rendu les clefs. On trouve aussi peu de temps après la mention d'un emprunt de 2,000 livres à Aimar de Poitiers par la dauphine Anne, épouse d'Humbert Ier de la Tour et du même château en garantie de la somme, ce qui dura peu, car le dauphin après sa libération était allé mourir à la Chartreuse du Val de Sainte-Marie de Bouvante, sous l'habit de chartreux. Jean Il, son fils, envoyé tout jeune à la cour de Philippe-le-Bel se fit remarquer par son courage et aussi par son esprit de justice et de modération, qui lui concilièrent l'affection de ses sujets et la confiance de tous ses voisins. « Ce prince, dit Jules Ollivier, qui aurait si bien mérité le surnom de justicier, mourut en 1318, à l'âge de 38 ans, regretté de ses peuples dont il avait fait le bonheur » (1).
La population de Chabeuil lui doit une véritable reconnaissance pour ses bienfaits et notamment pour l'exemption de tout impôt, ce qui n'a guère existé depuis lors. Une brochure imprimée à Tournon, en 1606, par Claude Michel et Thomas Soubron contient les « privilèges immunités, franchises et libertés des habitants de Chabeuil, accordées le 10 janvier 1314, par Jean, dauphin de Viennois, comte d'Albon et seigneur de la Tour, confirmées par Louis XI, Charles VIII, Henri 111 et Henri IV.
(1) Album du Dauphiné T. IV, page 99.
Voici l'analyse de ce document, reproduit en entier par M. l'abbé Vincent, et dont les archives de la Drôme possèdent une copie déjà ancienne
I. Les habitants sont exempts de toute taille, exaction, corvée, quête et charroi de paille et de foin. L'inscription lapidaire d'Etoile, en 1248, prouve l'importance de cette dernière faveur.
II. Les biens et héritages des personnes décédées sans testament appartiendront à leur plus proche parent et s'ils ont fait testament ou codicille, aucun officier delphinal ne pourra 'en empêcher les dispositions, ni percevoir aucun droit à ce sujet.
III. Tout marchand de vin et d'huile qui emploiera faux poids ou fausses mesures paiera 7 sols d'amende et 30 sols si les poids et mesures sont étrangers au pays. IV. L'amende pour violation de la foi conjugale sera de 30 sols.
V. Les habitants sont tenus de venir à ses propres chevauchées (courses à cheval) et non à d'autres, et cela à leurs frais, les huit premier jour et aux sien?, après ce délai. VI. Ils sont dispensés d'assister aux états ou assemblées publiques du dauphin ou d'un autre et d'y contribuer. VII. Tous les biens du mandement, tenus du dauphin ou d'un autre sous une cense annuelle ou le plaid à merci, à chaque changement de seigneur ou de possesseur, resteront soumis à la même cense annuelle ou au plaid équivalent à une double cense en cas de vente le treizième denier seulement lui sera payé par l'acquéreur.
VIII. Tous les biens du mandement peuvent être vendus sans le consentement du dauphin ou la permission de son châtelain, en payant au dauphin ou aux autres seigneurs directs le treizième denier seulement et l'investiture suivra ce paiement sans retard.
IX. Les fiefs et arrière-fief ou biens francs et libres conservent leurs privilèges.
X. L'amende infligée au débiteur qui lie paie pas au terme fixé (droit de clame) devant le juge, ne dépassera pas 2 sols par livre jusqu'à 30 sols et ne sera exigée qu'après satisfaction donnée au plaignant.
XI. Sont exempts de péage, de gabelle et leyde, tous les habitants de Chabeuil qui transportent ou font transporter toutes choses dans le mandement.
XII. Tout habitant qui voudra quitter la ville ou le mandement sera gardé, conduit et protégé, lui et ses biens par le dauphin pendant trois jours et trois nuits.
XIII. Nul habitant qui sera prêt à se présenter devant la cour du dauphin ne pourra pour aucun contrat être chassé de sa maison, ni arrêté pour aucun délit, à moins qu'il ne puisse être reçu à titre de caution ou de garant.
XIV. Les habitants devront se servir des poids et mesures actuellement en usage pour la vente du blé, du vin et de l'huile.
XV. Le dauphin se trouvant à Chabeuil ne pourra recevoir ou faire prendre du blé, du vin, des poules, poulets, chapons et autres denrées si ce n'est au prix comptant et courant et ses officiers aussi.
XVI. Le châtelain, le véhier ou leurs subalternes ne pourront imposer une amende dépassant 3 sols et demi pour un délit et pour une seule fois.
XVII. Il ne pourra être exigé que 5 sols pour une saisie. XVIII. Le ban-vin ou monopole de la vente du vin attribué au dauphin durera seulement de la Toussaint à Noèl. XIX. Les habitants qui avaient promis de donner cent livres des biens du vingtain et de la clôture du lieu en seront exonérés.
XX. Les habitants qui sont dans le château et le mandement ainsi que leurs biens sont placés sous la sauvegarde du dauphin.
XXI. Aucun juge ou châtelain ne sera reconnu tel qu'après avoir prêté serment de garder, observer et maintenir
les libertés et franchises accordées et le dauphin jure luimême de les observer et ordonne à ses baillis, juges, chàtelains et autres officiers de les maintenir s'ils veulent mériter son amitié.
Que tous les ennemis du moyen âge comparent cette charte avec la législation actuelle et reconnaissent les principes d'humanité, de justice et de bienveillance qui animaient les dauphins.
Si l'organisation municipale réclamée au xii° siècle ne s'y trouve pas indiquée, elle ne tardera pas à s'introduire à Chabeuil et la situation économique et politique de la commune nous en révèlera les méfaits et les avantages dans l'exposé des faits tiré de ses archives (t).
(1) Les sources consultées, jusqu'ici sont l'Allodialité en Dauphiné, par M. de Pisançon l'ouvrage de M. P.-E. Giraud sur Romans, texte et preuves en cinq vol., in-8* le Cartulaire de Léoncel, publié par M. Ulysse Chevalier, correspondant de l'Institut; le Bulletin de la Société d'Archéologie, les notes de M. le chanoine Magnat, la Notice de M. l'abbé Vincent, sur Chabeuil, l'Album du Dauphiné.
(à suivre)
A. LACROIX.
TOPONYMIE DE LA DROME
DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE
DES COMMUNES, PEUPLES ANCIENS, FLEUVES, RIVIÈRES, MONTAGNES
DU DÉPARTEMENT DE LA DROME
(SUITE. Voir les 162* à 167° livraisons)
Les peuples celtiques du Dauphiné. Les Mimènes. Les Meminiens ou mieux les Mimènes aux termes du type de leur étymologie formaient la fraction montagnarde de la confédération Cavare ils tenaient en Vaucluse la pittoresque vallée de Sault et les parties basses des montagnes de Lure qui relient le massif du Ventoux aux Alpes dans la plaine, leur Ager se soudait au territoire plat et fertile occupé par les Cavares-Vares, qui eux composaient la fraction agricole de la confédération.
Cet Ager des Meminiens était célèbre aux temps GalloRomains Pline, le naturaliste, dans le tableau des produits agricoles cultivés dans la province romaine, nous apprend « que le siligo, le froment gaulois si réputé ne se maintenait « au-delà des Alpes que dans la plaine des Allobroges et « des Meminiens » cet Ager faisait corps avec le domaine du Néaoj (l'île) de Polybe, l'Insula de Tite-Live; la fertilité en blé de cette plaine permit à Annibal d'y ravitailler son armée en provisions de bouche et aussi en vêtements lanigérés en usage chez ces montagnards. Le cantonnement des Mimènes se prolongeait dans la Drome; une section de
l'arrondissement de Nyons, au-dessous de l'Eygues, englo"bant une partie du canton de ce nom et quelques communes de la partie nord du canton de Buis-lès-Baronnies. Mais sans usurper la gloire historique descendue chez les Tricastins, témoins du passage d'Annibal, de ses éléphants et de son armée les Mimènes, ce petit clan gaulois ont conquis d'autres titres que la fertilité en blé, titres qui l'ont sorti des limbes de l'oubli.
Pendant des siècles, des critiques, des historiens, des archéologues, se sont passionnés, séduits par la recherche du pic élevé où sitait orgueilleuse l'énigmatique Aëria, la cité gallo-romaine que Strabon, d'après d'Artémidore, a placée dans cette région fertile, où il l'a distinguée au sommet du triangle, dont les cotés à la base voyaient se dresser Avenio (Avignon) et Arausio (Orange) cette figure tripolite n'avait pas éclairé la curiosité des chercheurs tous, pourtant, se sont arrêtés à cette conclusion qu'ils ne devaient pas dépasser le territoire des Cavares-Mimènes sans négliger l'art des combinaisons topographiques.
Nous avons démontré dans les pages de ce Bulletin (i), à l'aide des textes des auteurs latins si souvent cités, que le témoignage de Pline, invoqué comme la preuve de l'existence de cet oppidum mythique, n'existe pas historiquement; le naturaliste latin nous a transmis dans sa mention des « oppida latina » de la province romaine le nom d'une cité qu'il appelle Anatilia-Area.
L'abbe d'Expilly, le savant géographe, auteur du « Dictionnaire de la Gaule 0 écrit « ce qu'il y a de certain, c'est que « les Anatilii étaient établis près des bouches du fleuve le « Rhône et qu'ils étaient voisins des Désuviates. Du reste «la plupart des auteurs se conformant au sentiment de « Pline et de Ptolemée ont placé les Anatilii à la rive droite « du Rhône dans la partie méridionale du diocèse. Nous (1) Les Citès mystérieuses de Strabon.
« avons dit ailleurs que les Anatilii étaient placés près des « embouchures du fleuve et que vraisemblablement ils « s'étendaient dans la Camargue, c'est-à-dire qu'ils occupaient la plus granJe partie des pays qui forment aujourd'hui le diocèse d'Arles ».
De quelque bonne volonté que l'on soit doué, il serait difficile de nier la valeur du texte de Pline et d'élargir la signification des mots en les défigurant le vocable latin Area, nom féminin, exprime l'idée d'un sol uni, d'une plaine, d'une place publique et confondre ce mot avec l'adjectif féminin Aeria, qui, lui, qualifie un lieu haut, élevé, aérien serait le fait d'esprits égarés en de vaines subtilités. Le chef-lieu des Anatiliens était Anatalia-Area, que les géographes et historiens croient retrouver dans le bourg moderne de Saint-Gilles lGard).
L'histoire nous a laissé un enseignement qui a sa valeur; elle nous apprend qu'entre l'époque du voyage, accompli par Strabon à travers la Narbonnaise dans les premières années de notre ère et celle où Pline parcourut la même région environ 65 ans après Strabon, les annales n'ont enregistre ni destructions, ni anéantissements de villes en ces lieux les cités vues et décrites par Strabon subsistaient au temps de Pline, qui les énumère à son tour, c'est-à-dire Avenio (Avignon),Arausio fOrange) et Aeria-Carpenthoracte. Les Mimènes étaient un clan montagnard et leur oppidum princeps était assis sur une dentelure du Ventoux, embrassant et dominant la plaine Cavare; la graphie onomastique de cet oppidum s'harmonise avec le décor étendu à ses pieds le type primitif Carpenthoracte est composé, en réalité, de deux termes celtiques kar et pen et d'un vocable grec latinisé thorax or, ces deux termes celtiques signifient exactement Kar, ville, Pen, cime d'un lieu dominant, sommet, pointe aérienne; c'est-à-dire « une ville bâtie sur la cime d'un lieu élevé »,
c'est à la lettre la traduction du texte chez Strabon, nous indiquant, d'après Artémidore, qu'Aeria tirait son nom de son assiette topographique sur une cime élevée.
La decomposition de sa graphie primitive accentue encore la rigueur documentaire de ses origines celtiques et proclame l'identification historique des deux appellations attachées à la même cité.
Les Voconces. Les Voconces, dénommés par les Grecs Ovo/.ovtïoi et Vocontii par les latins, étaient le peuple le plus puissant après les Allobroges; ils ont gardé sous leur forme historique un caractère documentaire précis et non dénué d'intérêt au regard du critique.
Chaque fois que l'on interroge les fastes du Dauphiné, il importe de consulter et de citer Chorier (suprà), avec la pensée de saisir, par l'analyse des arguments didactiques, les conceptions historiques des savants de son temps. Chorier partageait l'opinion des auteurs latins de l'époque impériale, qui incorporaient à la nation des Allobroques tous les petits peuples gaulois parqués du nord au sud et de l'ouest à l'est entre le Rhône, les Alpes, les Salyens et le cours entier de l'Isère. L'historien dauphinois s'y rallie dans les termes suivants « quelque différence que l'on « puisse remarquer entre les Allobroges et les Cavares, ils « n'étaient qu'une nation et un même peuple. En effet, les « Voconces et les Cavares n'ont été connus des nations « étrangères que sous le nom général d'Allobroges. « Comme les Ségalauniens et les Vulgientes dépendaient « des Cavares; les Tricastins, les Tricoriens et les Mimènes « dépendaient des Voconces, les Voconces et les Cavares « des Allobroges et n'en étaient qu'une partie.
« Quelque exact que soit Strabon, il ne fait pas d'expresse « mention des Cavares et ce que les autres écrivains leur « attribuent, il l'attribue aux seuls Allobroges.
« D'avantage, quoique Tite-Live, lorsqu'il décrit la mar« che d'Annibal à travers les Gaules, nomme les Tricastins, « les Voconces et les Tricoriens et dit qu'Annibal passa « dans leur pays, Polybe ne parle nullement d'eux mais « seulement des Allobroges.
« Peut-on désirer de meilleure preuve de cette vérité que « les Cavares, les Voconces et les Allobroges vivaient sous « le même genre de politique et de gouvernement. » Chorier semble en ces lignes jeter le discrédit sur le récit de Strabon, qu'il compare à la narration de Polybe; or, le caractère documentaire de la description de la Gaule Narbonnaise et des Alpes, léguée par Strabon, condamne les formules de Chorier l'état de sincérité, de vérité, la topographie exacte sortent indiscutables des pages écrites par le voyageur grec chaque peuple Gaulois, dans la Narbonnaise, est enfermé dans un cadre descriptif particulier, nettement délimité, sans confusion avec ses voisins; l'erreur initiale qui a égaré tous les auteurs, repose sur le jeu d'avoir porté le territoire occupé par les Cavares jusqu'à l'Isère, tandis qu'il s'arrêtait sur les bords de l'Eygues, la rivière Isaros.
« Les Cavares, dit le texte grec, tiennent toute la région « qui s'étend des bords de la Durance jusqu'aux confluents « de l'Isaros (l'Eygues) avec le Rhône.
« Au-dessus des Cavares habitent les Voconces, les Tricoriens, les Iconiens et les Médules ».
Le cantonnement des Voconces. Les Voconces, nation de « droit italique au dire de Strabon, étaient cantonnés dans une périphérie ainsi délimitée au sud-ouest les Cavares et les Tricastins au sud-est les Médules à l'occident, les Ségalauniens; au nord et à l'orient les Iconiens et les
Médules; ces derniers contournaient le territoire des Voconces jusqu'à Embrun; la région tenue par les Voconces avait la figure d'un parallélogramme dont la base etait assise de Vaison au Buech en amont de Laragne et les deux côtés allaient joindre une ligne parallèle à la Drome, qui courait de Crest à Luc-en-Diois, descendait le cours de la Drome et atteignait le Buech au mont Seleucus (La BâtieMontsaléon) leur contrée etait fermée au nord par ces deux petits clans appelés les Tricoriens et les Vertacomicores (un seul et même clan) véritables enclaves et prolongement des vallées du Vercors; vers l'est ils voisinaient avec les Iconiens, ces deux peuples étaient en quelque sorte fusionnés avec les Voconces.
a Des deux voies romaines, qui des Pyrenées conduisaient « en Italie, l'une suivait le littoral méditerranéen à travers « la contrée des Salyens et des Massaliotes jusque en Ligu« rie et aux confins d'Italie; le Var servait de limite entre la « Gaule narbonnaise et l'Italie. Une deuxième voie traçait « son passage sur le territoire des Voconces et le domaine du « roi Cottius; ces deux voies avaient un parcours commun « de Nîmes jusqu'à Beaucaire et Tarascon de ce point, « cette deuxième voie atteignait, par la traversée de la « Durance et par Cavaillon, jusqu'aux frontières sud des « Voconces; de là elle se dirigeait jusqu'aux autres limites « des Voconces, celles de l'Orient, côtoyant les terres du « roi Cottius et aboutissait à la cité d'Ebrodunum. « Cette voie toutefois, dit Strabon (Li., IV, cap. 1) Gallia « Narbonensis), qui s'achemine vers les Alpes par la traver« sée du pays des Vconces est la plus directe et la plus « courte à parcourir ».
Les Voconces étaient placés sous le régime du droit italique (jus italicum) le territoire italien était seul capable de propriété quiritaire (ex jure quiritium). Ce droit était un
privilège accordé par les empereurs à certaines cités de provinces et à certains groupes de colonies; il avait, comme premier résultat. de conférer l'immunitas, c'est-à-dire l'assimilation du sol provincial (ager provincialis) au sol italique et de le rendre ainsi capable de propriété quiritaire et par suite de l'exonérer de l'impôt foncier (tributum soli) il exonérait aussi les individus de l'impôt direct (tributum capitis), soit sur la personne, soit sur les biens. Pline complète l'action des bienfaits de ce régime en nous apprenant que les Voconces étaient également les alliés de Rome, « Vocontiorum, civitatis fœderatœ, duo capita » les Voconces, nation alliée, avaient deux capitales, Vasio (Vaison), et Lucus-Augusti (Luc-en-Diois) Chorier ajoute à cette mention une réflexion curieuse « Le pays des « Voconces, écrit-il, fut au commmencement entre les « alliés des Romains; les gens les plus heureux et les plus « honorés étaient ceux qui avaient encore le bien d'être « Citoyens romains par la loi de leurs traités (fcedera) les « Voconces étaient de ce nombre ».
Pline, d'autre part, nous a laissé sous forme de faits divers deux jolis traits des moeurs du temps; le naturaliste, en faisant mention de deux personnages appartenant auxVoconces, personnages auxquels il donne la qualité de Chevaliers romains, nous raconte leur mode de vivre et leur fin « Le premier, dit-il, est celui que l'empereur Claude fit « mourir pour avoir été surpris, ayant sur soi un œuf de « serpent; l'autre, Julius Viator, se rendit remarquable à « la postérité pour avoir pu s'accoutumer dès la plus grande « jeunesse à ne point boire de peur de tomber dans l'hydro« pisie, dont il avait été menacé.
« Ayant fait passer cette coutume en nature, il parvint à « une extrême vieillesse (Chorier, tome Ier, page 1 56). En plus de leurs deux capitales, Vaison, oppidum princeps du sud, et Lucus-Augusti, Luc-en-Diois, oppidum nobile du
nord, les Voconces comptaient également dix-neuf oppida ignobilia, c'est-à-dire des bourgs peu dignes de mention on peut sans témérité classer au nombre de ces dix-neuf oppida, deux agglomérations à désignation latine, Dea Vocontiorum (Die) et Augusta Vocontiorum (Aouste) deux mansiones, relais militaires et gîtes d'étapes, Cerebelliaca (Upie), Darentiaca (Saillans); une autre particularité est à signaler; sur le territoire de ce peuple gaulois, un certain nombre de communes ont conservé, sans altération, leur nom primitif, ce sont Boule, Bezodun, Barnave (Bar-aven), Gigors, Gervanne (Beaufort-sur-Gervanne), Menglon, Omblèze, Suze, Aix (en celtique Aiss), Savel, etc. appellations dont l'origine celtique sera expliquée dans notre tableau étymologique.
« Les Voconces, écrit Delacroix, se divisaient en deux districts (remarquons que cet auteur réunit en un même territoire les Voconces et les Vertacomicores). Le premier et le plus considérable était formé, dit-il, outre des Vertacomicores, des communes d'Omblèze, Plan-de-Baix, Gigors, Beaufort, Suze, Cobonne, Montclar, Crest, Aoste, Mirabelet-Blacons, dans le canton de Crest (nord) et de celles de Piégros, de Saou et de Soyans dans le canton de Crest (sud) des cantons de Dieulefit, de Bourdeaux, de Saillans, de Die, de Chdtillon, de Luc et de la Motte-Chalancon, il s'étendait encore vers la Bâtie-Monsaléon, sur la limite des Hautes-Alpes.
« Luc en fut d'abord la capitale, mais Die lui ravit cet avantage lorsque, sous Auguste, elle devint une colonie importante.
« Le second district comprenait le canton de Nyons; dans le canton du Buis, les communes de Beauvoisin, Bénivai, Ollon, Mérindol, Propiac, Mollans, Pierrelongue, la Penne et le Buis, et dans le département de Vaucluse, les cantons de Valréas, Vaison et Malaucène.
« Vaison en fut le chef-lieu Pomponius Mêla lui donne
rang parmi les villes les plus opulentes de la Gaule Narbonnaise.
« Les restes de l'arrondissement de Nyons se partageaient entre les Mimènes, qui habitaient les communes dépendantes autrefois du diocèse de Sisteron et les Médualles ou Médulles (Delacroix, Antiquités de la Drôme, 181 7).
Les Médulles. Leur territoire. La fin d'un problème historique. Puisque nous avons assumé la tâche de combler l'écart entre la vérité et l'erreur et de mettre un frein à la pérennité des efforts vains de certains savants enlisés dans leurs méthodes surannées de recherches historiques, nous devons poursuivre notre voie et élucider chaque problème quand il barre notre route.
La question du domaine occupé par les Médulles a suscité de longues et vives controverses au milieu des opinions diverses émises sur ce sujet, une seule a été retenue au congrès scientifique de Grenoble (1857) (1) et a rallié les suffrages des savants congressistes; prenant comme base de leurs affirmations les ruines magnifiques du château-fort de Miolans, dominant la vallée de l'Isère au-dessus de SaintPierre d'Albigny, appelé Castrum Medullum et Castrum Medullionis, la commission du congrès s'est rangée à l'avis soutenu par d'Anville et par l'abbé Grillet dans son Dictionnaire de la Savoie; les chartes du moyen âge leur ont paru concluantes.
« En conséquence, la Commission a pensé que les Médulles « touchaient aux Allobroges près de la ville actuelle de « Montmeillan et occupaient une partie de la Savoie propre (1) Congrès sientifique – 24' section tenu à Grenoble en septembre 1857.
2* SÉRIE. XLIIl" VOLUME. I9O9. 9
« et la basse et moyenne Maurienne, au moins jusqu'à Saint« Michel et probablement jusqu'à Thermignon (canton de « Lanslebourg, arrondissement de St-Jean-de-Maurienne), « confinant ainsi vers le nord-est aux Centrons, et au • sud-ouest aux Allobroges » (A. Macé, Géographie du Dauphiné et de la Savoie. Grenoble, i863).
Chorier avait tendance à croire que, sous deux appellations qui se liaient au type primitif, existaient deux clans à domaine distinct, il écrit « Les Médualles qui diffèrent « des Médyles sont ceux de Mévouillon. Selon quelques« uns, Miolan et selon d'autres, Mont-Meillan est dans le « territoire des Médyles ».
D'autre part, V. Walchenaer, dans son « Histoire des Gaules », chapitre deuxième, assigne aux Médulles la Maurienne jusqu'au Mont-Cenis comme champ de leuis possessions Muller et Dubner, les traducteurs latin, Je la géographie de Strabon, inclinent à accepter cette interprétation.
Or, sans jeter le discrédit sur ces auteurs et ces savants, il convient de déclarer que ces notions quelque peu vagues, ces témoignages parasitaires cachés sous des formules à l'aspect de vérité, sont le contraire de la réalité; ce ne sont que des contingences erronées et des hérésies topographiques. Strabon a répondu à ces affirmations par une description où il a dépensé, vis-à-vis du territoire occupé par les Médulles, une précision de détails géographiques, une clarté dans l'exposé topographique, a enserré leur domaine dans des limites si nettement tracées, que la lecture et l'analyse de son récit écartent et détruisent toute explication adverse. Strabon a écrit
« Après les Voconces, viennent les Iconiens, les Trico« riens et après ceux-ci les Médulles. Ils occupent des cimes très elevées, dont l'altitude par la voie la plus droite est « évaluée, dit-on, à cent stades et autant en arrière dans « leur descente sur les confins de l'Italie ».
« Sur ces sommets, dans quelques cavités, on rencontre « un grand lac et deux sources surgissant à peu de distance « de l'une à l'autre de l'une d'elles sort en bas, la Durance « qui descend se précipiter vers le Rhône à -travers des « régions arides et brûlées et en haut, la Doire ripaire, (la « Doria riperia) qui, à travers le pays des Salasses, se verse « dans la Gaule cisalpine et court se mêler au Pô ». « De l'autre source, loin de ces mêmes lieux, prend « naissance ruisseau plus faible le Pô lui-même, n abondant et rapide dans sa course, il s'enfle dans sa « descente, mais devient plus tranquille (Les Alpes, liv. IV, cap. VI).
Or, que voyons-nous en ces sommets; la Doire ripaire, un des affluents de la rive gauche du Pô, sortir du mont Genèvre, dans les Alpes Cottiennes, se verser en Italie, passer à Suse, Rivoli et Turin, les anciens l'appelaient la Doria minor; au-dessous, la Durance, torrent fougueux et dévastateur, surgir du même plateau et se précipiter en Gaule à travers les vallées jusqu'à sa chute au Rhône.
De la deuxième source, au loin de la première et audessous, naît le Pô lui-même, au mont Viso à une altitude de 3.845 mètres, descend en Piémont, arrose Turin et se jette dans l'Adriatique.
Le territoire possédé par les Médulles montait jusqu'à ces sommets élevés des Alpes Cottiennes, dont deux des trois points culminants, le pic du Viso au sud et le mont Genèvre au nord, fermaient la limite supérieure de leur domaine. En aval de Briançon (Brigiani), la vallée de la Durance conduit aux cols de Gimont, de Bousson, et de Chabaud la Durance de là s'encaisse dans des gorges profondes et pittoresques, elle reçoit la Gyronde, plus en aval le torrent de Biaysse; enfin au pied des rochers qui couronnent la place de MontDauphin, la Durance reçoit le Guil, qui descend directement en France du mont Viso le Pô, qui du même sommet se précipite en Italie, semble n'être qu'un déversoir de ce même torrent à l'Est.
Dans ce vaste triangle montagneux, le sommet, au-dessous de Mont-Dauphin, est un confluent où s'unissent la Durance, venue en ligne droite du mont Genèvre au nord et le Guil, descendu du mont Viso à l'Orient les Médulles y voyaient la fin de leur habitat fermée par les hauts murs des Alpes Cottiennes, ce clan gaulois était renfermé dans ce périmètre que l'on a assigné à tort aux Caturiges.
Puisque nous connaissons maintenant, par le tableau topographique tracé par Strabon, les arêtes septentrionales où finissait leur territoire, force nous est de rétablir l'équilibre rompu au profit de ce petit peuple gaulois et de fixer le point de la région où commençait au midi le domaine des Médulles. Le géographe Grec achève sa description par deux lignes qui délimitent la zone principale qui retenait les Médulles au midi en ces lignes, il est dit « Ynepsivrai S'U « Me<?oi/Ao( fiaù.ltix rnî <7U(tëo)i{ ?ou Iaapoç 7rpoç tov Pot?avov », qui s'exprime ainsi « Les Médulles habitent PRINCIPALEMENT « au-dessus du confluent de Vlsaros (l'Eygues) dans sa « direction vers le Rhône o.
Rien ne peut être aussi affirmatif et aussi concluant; or, en face de ce texte, tous les interprétateurs, selon l'expression d'un critique, se sont égarés et quelques-uns même ont perdu la voie.
Citons l'annotation bien suggestive qui commente ce passage dans la traduction française de Strabon, par La Porte du Theil (livre IV, tome II, page 91, note 6). Strabon, note le traducteur, à moins qu'il n'ait écrit l*ixl<TT« au lieu de {«Mora, se sert ici d'une expression amphibologique qui pourrait ainsi signifier Les Médulli « occupent surtout le pays situé au-dessus de la jonction du « Rhône et de l'Isère.
• Quoi qu'il soit, ajoute-t-il, j'ai préféré avec d'Anville « le premier sens comme le plus conforme à la position « géographique de ce peuple avec cette traduction Les « Médulli sont fort au-dessus de la jonction du Rhône et a de l'Isère.
Ainsi, rien n'est plus facile que d'équilibrer sa conception et un texte; un mot vous embarrasse-t-il? Sa signification vous gêne-t-elle? On ne supprime pas le mot malencontreux ce serait trop brutal et antilogique, on se borne a le faire disparaître et à le remplacer par un nouveau terme adéquat à la définition que l'on a projeté d'en tirer.
Strabon a écrit exactement « Les Médulles occupent « SURTOUT la région située au-dessus de la jonction de l'Isa« ros (l'Eygues) dans sa course au Rhône » et alors on remplace |ft«>laT«, qui signifie « principalement, en grande partie », par le vocable ptoàtn*, qui, lui, plus docile, exprime l'idée d'éloignement, même d'un éloignement à grande distance (x<jxiuT« se traduit en réalité par « très éloigné n. Après de La Porte du Theil, reculons de deux siècles et consultons le voyage si pittoresque que nous a tracé Aymar du Rivail dans son récit en langue latine.
En voyageur avisé, qui a visité étape par étape, ville par ville, région par région, toute la contrée si clairement topographiée par Strabon, Aymar du Rivail n'hésite jamais à traiter le géographe grec d'ignorant. Quand la prétendue obscurité du récit lui décèle un obstacle, il supprime l'obstacle et il substitue nettement au texte sa description toute particulière relevée sur place même.
Cette marqueterie de peuples est figurée sur un damier dont les cases ne s'encadrent pas avec la conception qu'en a résolue Aymar du Rivail et il le notifie à Strabon. « Post Vocontios et Medullos (Aymar du Rivail, p. 1 36 « (de Allobrogibus), texte latin, Vienne, 1844), sunt Sigorii « quos Strabo locorum ignorantià, Tricorios ac Siconios « et Iconios vocat, et male eos cum Medullis mixet, nam « Medulli citra Segorios habitant, et teste ipso Strabone, « libro quarto. Ex quo Strabonis error in horum popu« lorum nomine deprehenditur.
« Après les Voconces et les Médulles sont les Sigoriens « que Strabon, par son ignorance des lieux, appelle des « Tricoriens, des Siconiens et des Iconiens, et mélange « ceux-ci à tort avec les Médulles, car les Médulles habitent « au-delà des Sigoriens, au témoignage même de Strabon « exposé dans son livre IV.
Et Aymar du Rivait tourmenté par cette idée « la fixation de l'établissement réel des Médulles », ne se préoccupe plus du récit de Strabon; de sa propre autorité, par voie de déduction, par l'étude sur place des détails topographiques, des souvenirs historiques, il impose, dans un discret chapitre consacré aux Médulles, à ses contemporains incrédules, son jugement sur la portion du territoire détenue autrefois par ce peuple.
« Medulli (p. i32, lib. supra), Ultra extremam Vocon« tiorum regionem est Medullio oppidum (Mévouillon-lès« Baronnies) sub excelso monte ad pedem ex omne latere « planitiem habente et non longe a Ventoso-Monte distat. « Et nostrâ adhuc aetate Medullio ipsius regionis est « caput ».
« Et quia illius regionis olim principatum tenebat, ab eo « oppido tanquam insigniori, omnes incolœ adjacentes « Medulli, ut in aliis contingit, dicebantur et ultimam « Bochii partem attingebant ».
« Et non omittam quod Strabo Medullos, locorum igno« rantid, îmerdùm Meduallos, aliquando Medillos, libro « quarto, corrupte appelat, et regionem ipsam peragrantes, « istud clare dignoscunt »,
La traduction de ce passage s'exprime ainsi
« Au-delà de la limite extrême de la région des Voconces, se dresse l'oppidum de Mévouillon, assis sous une haute montagne bornée de tout côté par une vaste plaine, Mévouillon est situé non loin du mont Ventoux ».
« Et à notre époque encore, Mévouillon est la capitale de « cette région.
« Et du fait qu'autrefois il occupait le premier rang, du nom de cet oppidum d'autant plus illustre à ce titre, tous les habitants des territoires adjacents, ainsi que ceux qui y continent, s'appelaient les Médulles ils s'étendaient jusqu'à l'extrémité du cours du Buesch A.
« Et, je n'omettrai pas de dire que Strabon, par son ignorance des lieux, appelle ce peuple par corruption les Médulles, tantôt les Meduales, tantôt les Médilles; les voyageurs traversant cette même région distinguent clairement ainsi l'oppidum de Mévouillon ».
Cette audace bien grande a soulevé les objections de la critique moderne; Aymar du Rivail a été accusé, à son tour, d'avoir altéré le texte grec.
Les écrits ont également leurs destins et l'ironie des contrastes jaillit ici d'une singulière façon Aymar du Rivail rejette Strabon, qui pêche trop « par son ignorance des lieux », dit-il il oppose à la description du géographe de l'antiquité la sienne propre, appuyée par le tableau du panorama de la région « principale » tenue par les Médulles. Or, il en résulte ceci, c'est que l'auteur dauphinois a suivi pas à pas, sans s'en douter, le texte de Strabon et nous a fourni une deuxième édition, plus large, plus agrémentée, plus historique aussi, de ce qu'avait vu et décrit Strabon dans la partie citée ci-dessus.
Le moment est venu de nous expliquer tous les commentateurs, traducteurs, critiques modernes ont commis une erreur capitale due à la contusion inévitable, on doit le croire, faite par tous entre la rivière I'Isaros qui n'ctait et n'est autre que la rivière l'Eygues et I'Isar qui était et est l' I sere.
Ces deux appellations ont chacune une origine celtique; la premiere rivière, l'Eygues, était designée aux temps où Strabon parcourait la contrée par le vocable « Isaros » que le géographe nous a transmis dans sa pureté; la rivière
l'Isère portait le nom « d'Isar venu jusqu'à nous sans altération par la même voie.
De tous les ouvrages, mémoires, commentaires, que nous avons consultés, nous avons eu la surprise d'en saisir trois. dans ce nombre qui était légion, où la réalité et la conformité avec le récit de Strabon ressortaient exactes. Nous citerons la relation du voyage d'Aymar du Rivail (xvie siècle), en second lieu la notice historique de Delacroix (édition de 1817), et entin une courte notice historique insérée dans l'annuaire de la Drome, 1904 (David et Délaye). (Extrait des Cités mystérieuses de Strabon. Bulletin de la Société d'archéologie de la Drôme, 1905-1906). Le domaine des Médulles. Par la lecture et l'analyse de la description armée de détails topographiques écrits par Strabon, il devient facile de reconstituer les limites de la région où se mouvaient les Médulles et d'en peindre les contours.
Leur habitat principal embrassait la region resserrée entre le cours de l'Eygues au nord et les ramifications du mont Ventoux au midi; ce sont aujourd'hui le canton de Buis-lesBaronnies, sauf une fraction de territoire attribuée aux Mimènes et aux Voconces, et celui de Séderon qui compte parmi ses communes Mévouillon, dénommée tour à tour Medullium, Medullio, Medillio; les ruines orgueilleuses d'un château fort, perchées sur la crête d'un roc accessible seulement du côté de l'ouest, évoquent aux yeux du touriste l'emplacement où gitait l'oppidum princeps des Médulles. De cette région, leurs possessions s'allongeaient au nordest, englobaient une fraction du terrain compris entre le Buesch limite des Voconces au nord-est et la Durance, couvraient les terres à droite et à gauche de la vallée de la Durance jusqu'à sa source au mont Genèvre, se développaient dans les vallées latérales du Guil à droite et du Drac à gauche et renfermaient dans leur périphérie les arrondissements de Gap, d'Embrun et de Briançon en un mot
ils occupaient la contrée entre l'Eygues, le Buesch, la Durance jusqu'à sa source, et les Alpes cottiennes. La thèse soutenue jusqu'a ce jour que les Medulles étaient connus comme les habitants de toute la vallée de la Maurienne arrosée par l'Arc et de cette partie de la haute vallée de l'Isère où s'élevait le châte.iu-fort de Miolan remarquable par l'avantage de sa situation, est complètement infirmée par le texte même de Strabon. De même, le territoire accordé aux Caturiges, auxquels on donne de ce côté gaulois des Alpes, Embrun (Eborudunum), comme capitale, doit être reporté plus au nord et aux lieux mêmes qui étaient assignés aux Médulles.
Les Ségalauniens. Ce petit peuple détenait un territoire qui ourlait la rive gauche du Rhône leur domaine avait la forme d'un fuseau terrien dont la pointe sud s'enclavait chez les Tricastins et la pointe nord se plongeait dans les flots de l'Isère, limite des Allobroges. Nul n'ignore que les commentateurs et les historiens, embarrassés par le souci d'adapter le texte de Strabon à la délimitation du territoire des Cavares, que ces mêmes commentateurs ont étendu jusqu'à l'Isère, tandis qu'en réalité il finissait sur les bords de l'Eygues, troublés d'ailleurs par la présence d'une malencontreuse virgule, mal placée dans les éditions de Pline, nous ont montré par une fiction cartographique combien mal étayé était leur enseignement. Antonin Macé (supra citat.) a tenté de concilier ces contradictions dans un essai de justification achromatique, il écrit « En effet, Strabon « n'indique dans cette longue etendue de i3o kilomètres de « la Durance à l'Isère, qu'un seul peuple (?) appelé les Cava« res, tandis que Pline et Ptolémée y indiquent d'autres « peuples, les Tricastins dont parle également Tite-Live, et les Ségalauniens ou Ségovellaunes. Y a-t-il contra-
« diction ? Je ne l'ai pas pensé; j'ai cru que le nom de « Cavare indiquait tout à la fois un peuple et une confédé« ration, qu'il était en même temps un nom spécifique et un « nom générique et que dès lors, Pline et Ptolémée peuvent « avoir raison de distinguer les Ségalaunes, qui occupaient « la partie septentrionale de cette longue bande de territoire, « des Cavares qui en occupaient la partie méridionale, sans « que Strabon ait tort de les avoir compris sous une dési« gnation générale (sic). », d'où il ressort qu'une fois embarqué dans le paradoxe, il devient difficile d'en sortir. Le même auteur ajoute « II a même paru probable aux « membres de la commission (Congrès scientifique de « Grenoble, 1857), que les rochers de Donzère, entre « Montélimar et Pierrelatte, étaient la limite entre les Cava« res au midi et les Ségalauniens au nord ». L'auteur a oublie les Tricastins qui les limitaient au midi et s'étendaient jusqu'au Rhône.
Une fois encore, nous devons reprendre ici le court texte de Strabon « Après la traversée de la Durance, dit le « géographe grec, en face de Cavaillon, toute la région « au-dessus est occupée par les Cavares jusqu'aux confluents « de l'Eygues (Isaros) et du Rhône. Au dessus des Cavares « habitent les Voconces, 'les Iconiens, les Tricoriens et les « Médulles ». Les Cavares ne dépassaient pas les rives de l'Eygues.
« Les Ségalauniens sont un des peuples de cette contree des Gaules dont les auteurs ont parlé le moins et le plus tard. Ptolémée n'est pas cependant le premier qui en ait fait mention. Pline en dit un mot dans le dénombrement qu'il fait des peuples et des villes de la Gaule narbonnaise, il les appelle Segovellauni Valentia segovellaunorum, Hist. nat., 1. 3, c. 4. Ce nom, plus celtique que l'autre, était apparemment leur vrai nom, dont Pline devait être mieux informé que Ptolémée. d'Anville croit que le mot Segalauni vient par contraction de celui de Segovellauni, cela
s'entend. Dans le Dictionnaire encyclopédique, on substitue le mot de construction à celui de contraction, et on ne sait ce que cela veut dire.
« Les Ségalauniens ou Ségovellauniens ne sont nommés dans aucun autre géographe, soit grec, soit latin. Peutêtre est-il question d'eux dans une lettre de Plancus à Cicéron, dans laquelle de Valois propose de lire fralres Segalauni au lieu de fratres Segaviani correction bien simple et très heureuse, que semblent exiger le sens de la lettre et le lieu d'où elle est écrite.
« Un point mal placé dans le passage de Pline, a induit en erreur quelques érudits, et leur a persuadé que Valence était une ville des Cavares, ou au moins bâtie sur leur territoire; voici ce passage, pont, tué comme on le trouve dans plusieurs éditions Arausio Secundanorum, in agro Cavarum, Valentia. Il doit l'être de la manière suivante Arausio Secundanorum in agro Cavarum, Valentia le mot Segovellaunorum qui suit, ne laisse lieu à aucun doute. « Valentia, « dit à ce sujet d'Anville, n'est point du territoire des « Cavares, dont elle est séparée par les terres des Tricastini « et des Vocontii ». Des premiers, oui des seconds, non. En remontant du midi au nord, nous trouvons les Cavares les Tricastins, les Ségalauniens. Les Vocontiens ne sont point sur cette ligne.
« Par suite du faux emplacement que Ptolémée assigne aux Tricastins, il met les Cavares immédiatement au-dessus des Ségalauniens; « Postea sub Segalaunis, Cavari, ibid ). Autre erreur à corriger dans ce géographe les Tricastins séparaient ces deux peuples. Les quatre villes suivantes, Vienna-Allobrogum, Valentia-Segovellaunorum, AugustaTricastinorum, Avenio-Cavarum, déterminent indubitablement la position successive des quatre peuples, dont elles étaient les capitales sur la rive gauche du Rhône, depuis sa jonction avec la Saône jusqu'à la Durance. « Les Ségalauniens ne figurent dans aucune guerre, ni dans
celle que les Allobroges entreprirent pour établir Teutomale dans ses états, ni dans celle que les mêmes Allobroges eurent à soutenir, et soutinrent mal pour leur propre défense. Il paraît cependant bien probable qu'ils furent entraînés dans ces deux guerres par leurs voisins, et qu'ils furent battus avec eux sur les bords de la Sorgue et sur ceux de l'Isère. « Deux voies militaires traversaient leur pays, et venaient se réunir à Valence; aussi cette ville n'est-elle oubliée dans aucun des itinéraires. C'est de Valence qu'on comptait les milles indiqués par les colonnes placées sur les routes, tant qu'on marchait sur le sol du peuple, dont cette ville était la capitale ». (Chalieu, Mémoires sur diverses antiquités de la Drôme).
Ce petit peuple semble avoir été doté de deux appellations, Segalauni et Segovellauni l'abbé Chalieu croit « que ce « dernier nom est plus celtique que l'autre et était apparem« ment leur vrai nom dont Pline devait être mieux informé « que Ptolémée. Cette déclaration est exacte, mais la graphie réelle de leur dénomination exprimée par l'étymologie est « Seg-avel-launi » comme nous le démontrerons à la suite de ce chapitre où chaque peuple du Dauphiné revivra sous son idiome ethnique, avec son origine et sa toponymie légitimes, n'écarte pas l'appellation de Segal-launi. Les Ségalauniens étaient enfermés entre les Allobroges au nord, les Voconces à l'orient, les Tricastins au sud, et le cours du Rhône à l'ouest Delacroix assigne à leur district les cantons de Bourg-de-Péage, de Chabeuil, de Valence, de Loriol, de Marsanne, la ville de Montélimar et les communes de son canton situées au nord du Jabron et quelques communes des cantons de Crest'nord et Crest-sud.
(A continuer) A. BÉREÏTA,
inspecteur de l'Assistance publique de ta Drôme.
LA POPULATION
DES
Taillabilités du Dauphiné
APRÈS 1755 ET AVANT 1762
(Suite. – Voir les 154" à 168' livraisons)
Une partie des tailles du Dauphiné avait été aliénée par Louis XIV au cours des années 1658, 1693, 1694 et 1695, pour parer aux besoins urgents des finances. Les auteurs modernes ont connu une partie de ces mesures, mais ils ont ignoré la révocation de tous ces affranchissements par la déclaration du 15 mars 1698, avec droit au remboursement des finances versées par les propriétaires des fonds affranchis. Le roi dut revenir sur sa décision, faute de fonds disponibles, par la déclaration du 24 mai 1702. Les exemptés, selon l'expression en usage, furent rétablis dans leurs privilèges, par la restitution intégrale des sommes touchées par eux à titre d'à-compte et en fournissant le tiers en sus du total de leur finance. Le prix de ces exemptions fut ainsi porté au denier seize à l'égard des affranchis de la dernière guerre. Quant à ceux de l'année 1658, la même somme supplémentaire leur fut demandée, quoique leur finance ait été plus forte que celle des derniers, à raison de la longue jouissance de l'exemption des tailles royales, puis des tailles négociales et de toutes les impositions ordinaires et extraordinaires, conformément aux clauses des contrats d'affranchissement.
Le Dauphiné se trouva ainsi déchargé d'une somme de t 12,000 livres qui devait y être imposée durant trois ans. Les augmentations de la finance étaient soumises au paiement de deux sols par livre. L'intendant Bouchu était chargé de la liquidation de ces remboursements et tenu de poursuivre « jusque à sa perfection la révision des feux, destinée à établir l'égalité entre tous les taillables. Le j" août 1702, Jean-Guy Basset, premier président au bureau des finances et chambre du domaine du Dauphiné, rendit une ordonnance conforme, en l'absence de Bouchu.
Ces nouvelles mesures furent mises à exécution tout de suite. Les diverses décisions ou formalités furent imprimées et suivies de la formule de leur signification aux intéressés parles huissiers. Pierre Rochette, huissier sergent royal, reçu au greffe du présidial de Valence, somma dès le 27 juin 1702, Louis Vinay, marchand à Bourg-lès-Valence, de verser entre les mains de Pays, receveur des tailles en l'élection de Valence: i° la somme de 327 livres 12 sols 3 deniers, déjà reçue par lui pendant les années 1698, 1699 et 1700(1); 20 celle de 29 livres 4 sols 4 deniers, valeur de l'augmentation de la finance le concernant. Ces sommes devaient être payées moitié dans un mois, moitié dans deux mois à dater du 27 juin (2). Les imprimés de cette nature sont devenus rares. Leur format est in-folio (3). Le lieu d'impression n'est pas indiqué. La mention relative à l'immatriculation de l'huissier ayant été remplie à la main, il est à présumer que ces documents sont sortis des presses de Grenoble.
L'arrêt du 9 février 1720 révoquant les affranchissements (1) La mention de l'année 1701, imprimée, a été barrée. Quelques contribuables avaient reçu des à-comptes en 1701.
(s) Ma bibliothèque.
(3) Au même document est joint un avis de 1783 relatif au paiement des impôts de Vinay, avocat à Valence, et considéré comme étant une personne aisée. J'ignore s'il existait un lien de parenté quelconque entre ce dernier et Martin Vinay, le héros.
avait eu des précédents). Dans tous les cas, il s'appliquait aux affranchissements concédés apiès 1708. Après la déclaration du 24 mai 1702, de nouveaux affranchissements furent accordés ils furent supprimés à leur tour par l'édit du mois de septembre 1706.
Enfin, au mois de juin 1708, un édit royal rétablit les offices de la milice bourgeoise et les affranchissements de taille. Les rôles furent dressés promptement. Celui qui concernait la généralité de Grenoble est daté du 4 septembre Les significations nécessaires se prolongèrent jusqu'au milieu de l'année 1709 (1).
Dans le même ordre d'idées, certaines impositions furent réparties entre les trois ordres, vers la même époque. Le rôle concernant la suppression des offices d'inspecteur-jaugeur des boissons fut fixé à l'égard de la communauté de SaintBonnet-de-Montrigaud (2) par ordonnance de l'intendant du 20 mars I7î3, à la somme de 59 15 s., à percevoir sur les trois ordres. Les frais de péréquation et de vérification furent arbitrés à 18 livres; ceux de la recette furent fixés à raison de 4 deniers par livre. En conséquence, 79 livres t sol furent imposés sur les nobles et sur les roturiers, le clergé ne possédant aucun bien dans le ressort de cette communauté. L' « estime » des biens s'élevant à 32 livres 14 sols 9 deniers, le sol d'estime fut évalué à 2 sols 6 deniers et « l'entier d'industrie » à 3 sols, soit à 1/5 en plus.
Au nombre des ouvrages anciens, que l'on ne consulte pas assez souvent aujourd'hui, se trouve le Dictionnaire Géographique, etc., dû à l'abbé Expilly. Les parties de ce volumineux ouvrage relatives au Dauphiné, sont très complètes le t VII (1) Ma bibliothèque.
(2) Archives du chateau de St-Bonnet. Cette communauté fut séparée de celle de Montrigaud en 1660. (Arch. dép. de la Drôme, C, 52 1), ), La paroisse de Charaix et les territoires de Champagnier et de Chambaudtère furent enlevés plus tard à Montngaud en 1688. (Ibid., C, 6+6/4).
n'a malheureusement pas paru. Toutes les indications qu'il renferme ne doivent évidemment pas être suivies au pied de la lettre. Ainsi à Arvieu, il renvoie à Harvieu. Dans tous les cas, les six premiers volumes ont paru respectivement de 1 762 à l'année 1770. Ils contiennent le plus ordinairement pour le Dauphiné la situation exacte des feux au point de vue de la taillabilité malheureusement ces données sont empruntées ordinairement à YElat de 1706. On y trouve d'autre part assez fréquemment l'état religieux, l'état judiciaire et l'état politique, Prenons, par exemple, les Abrets dépendant de l'élection de Vienne. Guy Allard attribue à ce lieu en 1684, 3 feux 3/4 et t/96. L'Etat de 1706 mentionne simplement 1/2 feu 1/24 et 1/96 et 3 feux 1/96 d'autre part. Expilly révele l'existence en 1762 de 1° 1/2 feu 1/24 et 1/96 pour les fonds nobles ou exempts des tailles, mais taxés pour les cas de droit 20 3 feux et 1/96 pour les fonds taillables et ceux affranchis des tailles, imposés lors de la répartition des cas de droit (1). L'identité de cette évaluation est manifeste. L'utilité de l'œuvre d'Expilly est encore plus étendue à l'égard des communautés et des taillabilités créées après 1706. Le docte abbé nous apprend ainsi qu'Agnin (Agnen selon lui), séparé d'Anjou comme on l'a vu, comptait 3 feux et un quart.
L'Etat de 1706 citait dans le ressort de l'élection de Vienne, Arcisses et Vignieu. Arcisses avait disparu avant 1750, sans que l'on connaisse sa destinée. D'après Expilly, Arcisses et Vignieu avaient été réunis en une communauté unique quoique les deux taillabilités aient été maintenues. Ces diverses bases n'avaient pas été modifiées.
Parfois l'appellation vulgaire, devenue de nos jours le nom légal, est indiquée au lieu du nom officiel. Aspres dans l'élection de Gap est dans ce cas Aspres-les-Vaines pour Aspreslez-Veynes. Ces détails offrent de l'intérêt.
Auberives, sise dans l'élection de Vienne, est désignée de
(1) Dict. etc., t. 1, p. 3.
cette façon Auberive et Chessieu. Cheyssieu est actuettement une commune indépendante. Au xvm'' siècle, ce nom figurait dans la dénomination usuelle, comme un témoignage de t'tmportance relative obtenue au moyen âge, ou bien comme une preuve de son accroissement.
Ces quelques notes sont suffisantes pour donner une idée exacte de l'importance de ce dictionnaire, quoique d'une manière générale l'évaluation des feux soit conforme à celle de de t~oô (f). Expilly a Sxé à t2o6 le nombre des paroisses du Dauphiné et à 5 celles de la principauté d'Orange, sans compter celles relevant au point de vue civit du Comtat-Venaissin, de la Provence, du Piémont, de la Savoie, du Bugey, du Lyonnais, du Forez, du Vivarais.- i,oio communautés se trouvaient dans le ressort de notre province, soit
Election de Gap [2~
RecettedeBriançon(:*) to
Election de Grenoble 2~
– MontéHmar 2~
– Romans 102
– Valence 80
– Vienne t<)6
Total t,oto(~)
Le total exact est t,o)t.
L'Etat de [706 en comprenait au contraire, d'après mes calculs
~7
'9
253
234
102
8o
tç6
(IJ Des feux étaient dits dans certaines régions, < feux allumans » ou feux de registre par rapport aux feux fictifs de cadastre ou de compois. La valeur des premiers variait de 5 personnes à 20 personnes. Les seconds étaient subdivisés en too bellugues ou btuettes et la bellugue en quarts (EXPILLY. Op. c., t. I, p. ?72-3)
~) Les fonds taillables du fief de Champronet étaient réunis de ce chef à Villard-Saint-Pancrace.
(3) Dans la transcription de l'Etat de '706, Expilly, a omis diverses communautés telles que Sainte-Colombe.
2° SÉR!E. XLIII* VOLUME. t~OÇ. 10
Election de Gap t20
Recette de Briançon 22yMmpris!tSCMmm))tMetdMSt)ii7i3. Election de Grenoble 2~
Une grande partie des modifications, apportées aux communautés après 1706, a été indiquée au cours de ce mémoire. Expilly a évalué la population du mandement des Avenières à 2,400 personnes. D'une manière générale, il donne les nombres suivants dans le tome Il, paru en tyôz)
Cette nouvelle source d'information ne devait pas être négligée dans un travail d'ensemble. « Nous ne comptons en « Dauphtné, dit l'auteur, que ~6-).,5~8 habitants. M. de « Vauban (après M. de Bouchu, intendant de cette province en « t6o8) faisoit la population de la généralité dont il s'agit, « p)us forte de 79,007 personnes de sorte que, selon cet habile homme, elle se montoit à 543,585 personnes. Les « mémoires sur lesquels nous avons rédigé cet article, sont « beaucoup plus récents. Il serott bien singulier, que depuis (.) P. 5g4.
Montélimar. 2~7
Romans <o~
Valence 80
Vienne 194
Total: ggo
Election de Gap 49,769
Recette de Briançon. '7,207
Election de Grenoble <io,7~8
Montélimar. 82,627
Romans 59,999
Valence 43,783
Vienne 91,445
Total: 4Ô4,;78(t).
o soixante ans ou environ, la population eût perdu en Daue phiné, tandis qu'elle a gagné dans presque toutes les autres « provinces du royaume. Il y a plus, c'est que d'après des « recherches très exactes que nous avons faites dans plusieurs « paroisses de cette province, nous avons trouvé que le nom« bre d'habitants y étoit augmenté d'un 1/6 ou environ, (ainsi « que nous le prouvons à l'article du Comté-Venaissin, par « le dénombrement du diocèse de Vaison). On peut donc « inférer de là que les mémoires fournis par M. de Bouchu ne sont point exacts à tous égards. Il est vrai que depuis cette « époque, l'étendue du Dauphiné a été diminuée par la cession « de plusieurs vallées du Briançonnois, qm fut faite au roi de «Sardaigne, par la paix d'Utrecht en 71 mais cette diminu« tion n'emporte certainement point le nombre de 80,000 habi« tants (t). »
Malgré les assertions d'Expilly, la population du Comtat-
Venaissin a toujours eu une densité supérieure à celle du Dauphiné à cause de la richesse du pays notamment. La diminution, d'autre part, du nombre des habitants de cette dernière province durant la première moitié du xvm" siècle, est hors de doute.
Notre auteur se plaint de n'avoir pas pu distinguer les paroisses des communauté. A quelles difficultés ne se serait-il pas heurté, si on lui avait communiqué uniquement les listes des taillabilités? Quoiqu'il en soit, à la fin du tome Ht se trouvent des relevés des mariages, des naissances et des décès concernant certaines provinces. Le Dauphiné n'y figure malheureusement pas. Toutefois, Expilly attribue à cette province ~0,407 familles, soit « à 9 personnes pour deux familles » $82,~26 habitants. Cette moyenne donne une fois de plus un résultat arbitraire (2) et beaucoup trop supérieur à celui indiqué au tome II.
(') P. 59~-5
(2) T. HI, p. 1:3.
La bibliothèque de Lyon possède un « Af~M~e sur la /~o)'Mce de DaM/)/i:'Më du format in-f" f)). C'est encore une copie du manuscrit de Bouchu. Au fo 7~, on trouve les indications déjà vues relatives à l'emploi du tel me communauté, etc. On peut lire ensuite le prélude du relevé du nombre des communautés et des personnes qui composent chaque étection ?. Ce manuscrit est le plus imparfait de tous ceux qu'il m'a été possible de consulter il est inférieur même à celui appartenant à la bibliothèque de Valence. I) attribue à l'élection de Grenoble )~t communautés au lieu de t7~ et t;çt2 habitants au lieu de t2;,ot2. On y voit de même que t'étection de Vienne aurait compris to6 communautés au lieu de t~t, celle de Montétimar t 3o et non 230, celle de Gap < et non 2~. la recette de Briançon 2t et non 22. )t est superflu de consacrer une plus longue note à ce document.
Une circonstance a mis en ma possession un autre exemp)aire de l'étude de Bouchu. L'écriture en est superbe. 11 est intitulé M~KOtfe de la ~fOf:MCe du Da:<~A:tte dressé par « M. Bo:<cAM, année f6()<~ (2). La comparaison du texte avec celui de mon premier exemplaire produirait un mince profit. Le relevé des différences relatives à la population est seul intéressant.
ÉLECTION DE GRENOBLE
Aspres 35o Quaix. 532 Bernin 5!2 a Saint-MaifiminttGriInfornas (les) '86 gnon 029 Miribel ',2~.2 St-Michet 38o Monestier-du-Percy 280 Séchitienne. !40 Montbonnot 7~ Terrasse (la). 608 (l)N-.29!.
(2) Il comprend 200 folios numérotés, plus le folio non numérota de la table.
Aubessagno et le Champ ont été omis. Herculais figure avec 360, Lavaldens avec 300. Vaulnaveys-le-Bas avec 460 N-D de Mésageest comptée pour to6 et St-Pierre-de-Mésage pour 4~2. A la taillabilité « Forains de Ratier, mandement de la Mure est ajoutée la mention de « Ratiers et Nantes ». La Fare suit les Delphinaux de la Fare.
Amb)agnieu 244 ChâteauviUain. ',956 Hautefort 202 Heyrieux. 928 Leyrieu 236 Meyrieu. 2~.8
Lemps figure avec 840 habitants.
Atbencf)') 668 Beausemblant 348 Blanieu 1,2~ Chantesse ;68
Ct'épo) et Dionay sont cités avec ;:8 et 176. La RocheMontferrier aurait dû être appelée, la Roche-de-Montferrier. La Roche était, en effet, un simple lieu du mandement de Montferrier (t).
Charpey 1,180 St-André 532 Châteaudouble t,t8o St-Romans 656 Ctérieux. <,o)2 z Sône(ta). 368 Mercurol. 52-). Veaune )8~.
(i)Ms.MabibhothÈque
ÉLECTION
DE VIENNE
Pressins. 38~ St-Hilaire 604. St-Romain 232 Salagnon 2t6 6 Septême. 1,46o Vercieu 236
ÉLECTION
DE ROMANS
Romans. 5,g~5 Roybon. ).26o
St-Uze et Bertus 236 Triors 2f6 6
ÉLECTION DE VALENCE
AgnieHes' )~6 Hommes de la Roche-Montclus tgx Agnières 3o8 Montmaur 568 Aspres 608 Orres (les) 656 Bâtie-vieit)e()a) t~2 Sauze()a) )o6 Il y a intérêt à rappeler l'évaluation distincte Sigottier Sigottier au Commandeur, 2;o. Cette mention diffère de celles déjà relevées, car le nombre 2;o est supérieur à celui déjà connu 240, et d'autre part aucune indication ne suivait Sigottier. La réunion des deux taillabilités devait être très récente. en <6o8.
La discussion de ces variantes aboutirait à des résultats msigmfiants. )) aura suffi de les signaler.
H a été question à diverses reprises des subdélégations du Dauphmé au xvn~ siècle. Voici la liste officielle de celles existant en '740' Grenoble, le Pont-de-Beauvoisin, Bourgoin, Vienne. St-Marcellin, Romans, Valence, Crest, Montélimar, le Buis, Orange, Vizille, Bourg-d'Oisans. Briançon, Embrun, Gap ( i). Celle du Bourg d'Oisans ne tarda pas à être supprimée. [)) ~CMe)! p;MS;?)o-s m~MOt'r~ cottMrtt~ttt les Mt~)tt</<tcfMt-fx de la <<Mpc)-~ e< des ~e's de la ~roffee D<!Mph<ne etc. (Ms: ma btbtfoth~que).
Atençon. 32 Bésignan 2~.0 Comps 56 Espeluche ~2~ Garde (la) t,)t6 6 Miscon !5o
Teyssières est mentionnée avec 208 habitants.
Bardonneche. 3,'72 z Savoulx 3~ Valcluson 2,336
(A suivre) R. V. C.
ELECTION DE MONTÉLIMAR
ÉLECTION DE GAP
Recette de Briançon
Nyons Redortier Romeyer. St-Andéot St-Marcet Vesc
',904 284.
220
2t6
2/2
644
DéHbérations Consulaires
DU
COMTÉ D'ALBON
de 1708 à 1743
(SuiTE. – Voir la 168. livraison)
Les difHcuItés existent toujours pour faire les fournitures aux troupes, les denrées sont de plus en plus rares aussi les habitants délibèrent, le dimanche neuvième jour du mois de juin 1709, de faire un rôle d'impôt sur les plus aisés de la communauté pour rembourser le sieur Sadin de ses avances. Ils le prient de continuer encore les fournitures, car les troupes qui vont arriver ne trouvant point d'estape se logeront à leur discreption dans la communauté, ce qu'il faut éviter.
« Du dimanche dernier jour du mois de juin 1709 après midy, au lieu de Saint-Roman d'Alhon, dans la chambre où l'on a coutume de tenir assemblée, par devant nous Alphonse Assalin de Lagardette, lieutenant de M. le capitaine châtelain royal et maire de la Comté d'Albon, escrivant le secrétaire soussigné.
« A comparu sieur Nicolas Goudard, consul moderne de la communauté d'Albon, lequel nous a dit et remontré avoir fait assigner tous les habitans de la communauté,
messieurs les esclésiastiques et nobles possédant biens dans la communauté, pour comparoir à ce présent jour, lieu et heure par devant nous, pour venir délibérer sur plusieurs urgentes allait-es.
« Et comme il y a une partie des plus notables de la communauté qui sont icy présents, il nous requiert, ordonner qu'ils ayent à délibérer tout particulièrement sur les remontrés qui leur seront ci-après faits. Et du tout acte et ce pour les présents avec et pour les défaillants et s'est soussigné.
« GouDARD,consul.
« Auquel lieu sont comparu sieurs Charles-Hector Robert, Pierre Baborier, Barthélémy Viérou-Fontaine, François Baboin, Mathieu Dalissieu, Estienne Couturier, Christophe Charignon, François Fay, Pierre Pascal, Charles Pérouze, Claude Vermillière.
« Lesquels assemblés ledit consul remontre qu'il a plu au roy pour le soulagement des pauvres habitans de la province de Dauphiné, par arrest du conseil du premier may dernier, d'ordonner un prest de mille minots (!) de sel, dont le prix sera imposé F année prochaine 1710 sur les trois ordres de cette province.
« En conséquence de quoi, Mgr l'intendant a procédé à la répartition des mille minots sel, et par son estat de distribution ta communauté y est comprise pour trois minots et demi lesquels doivent estre délivrés par les recepveurs du grenier à sel le plus voisin dudit Albon. Et que par l'ordonnance de Mgr l'intendant du 7° du présent mois, envoyée à la communauté, il est porté qu'il soit procédé à la nomination de deux personnes au moins
(t) M)not. ancienne mesure, van.ibie suivant les pays, et qui était la moitié d'une émine ou le quart du sétier. Le sétier à Albon était environ de cent titres.
avec le curé pour faire un rôle des pauvres qui n'ont pas de quoi acheter du sel, pour ensuite leur estre distribué de huit en huit jours jusqu'à la fin du mois de juillet prochain, par ceux qui seront nommés, et qu'on nomera pour icelle une personne pour aller retirer le sel, comme appert de ladite ordonnance.
« Lesquels surnommes assemblés, après avoir conféré ensemble et avoir oui lecture de ladite ordonnance ont dict et délibéré qu'il faut que le sieur Goudard, consul, s'en aille à Saint-Vallier où est le grenier à sel le plus proche d'Albon et retire du sieur Antoine Besson. conseiller du roy, recepveur audit grenier à sel(t), les trois minots et demi sel, et en fasse un reçu audit sieur Besson et luy remette l'ordonnance qui porte qu'il est le plus voisin des recepveurs de la communauté et délivrera les trois minots et demi de sel avec un extrait de la présente délibération.
Et pour faire l'estat des pauvres de la communauté ils noment pour la paroisse de Saint-Roman, les sieurs Baboin et Dalissieu pour la paroisse d'Anneyron, les sieurs Robert et Gauttier pour la paroisse de Saint-Martin, les sieurs François Crozat et Fleury Ronat pour la paroisse de Saint-Philibert, le sieur Christophe Charignon; pour la paroisse d'Andancette, le sieur Pierre Baborier et pour la paroisse de Saint-Rambert, le sieur Estienne Micou, le tout en présence de leur curé.
« Et ledit estat estant fait, on distribuera le sel à chacune des paroisses à proportion des pauvres qu'il y aura, le tout sans faveur et aux plus pauvres suivant ladite ordonnance (2).
(1) Sous Louis XIV les offices de juges, régisseurs, receveurs et employés de tout grade dans les gabelles ou perception de l'impôt sur le sel étaient vendus.
(2) Avant 1789, le Dauphiné faisait partie des provinces que l'on appelait Pays de pe~<e gabelle. La consommation obligée du sel
« De plus ledit consul remontre que la communauté ne peut plus faire aucune fourniture pour l'estape aux troupes qui passent audit Saint-Roman, attendu qu'on ne peut recepvoir aucun argent des parfournisseurs généraux des estapes de cette province, quelle diligence qu'on aye peu faire et d'ailleurs le sieur Sadin, le dernier estapier, a fait déclaration qu'il ne pouvait plus se mêler de faire la distribution de la fourniture. Que pour ainsy il est tout nécessaire de donner quelques ordres à faire faire la fourniture aux fins d'éviter un désordre à ladite communauté par le passage des troupes.
« Sur lequel remontré lesdits assemblés ont deslibéré que pour éviter un désordre à la communauté que le passage des troupes y pourrait causer, il faut escrire de faire un emprunt sur les ayzés de la communauté et s'ils ne veulent payer suivant icelluy, se pourvoir à Mgr l'intendant pour les y contraindre. Et que de cet argent on en achète des danrées pour fournir à ladite estape. Et qu'à ses fins le sieur Baboin et le sieur Baborier feront lesdits achapts et le sieur Baboin fera faire la distribution.
était de 6't0,ooo quintaux au moins, au prix de 33 livres 10 sous par quintal, et où la distribution moyenne était de 11 livres 3/4 pesant par tête.
Les fermiers percevaient pour cet impôt environ trente-huit millions, dont sept au plus revenaient à l'Etat.
Dans l'ancienne monarchie l'impôt sur le sel était arbitraire, parce que l'on taxait la population à tant par tête, qu'elle devait prendre tous les trois mois, et presque toujours en quantité supérieure aux besoins des malheureux contribuables aussi nul impôt n'était plus vexatoire et plus odieux que la gabelle.
Quand l'Assemblée constituante supprima la gabelle (loi du 10 mai 1790), il y avait deux cent vingt quatre greniers à sel, formant dix-sept directions générales.
L'impôt sur le sel fait aujourd'hui partie des impositions indirectes, dont la perception fut organisee par Napoléon I" en 1806. Ce fut alors, comme aujourd'hui, un impôt de consommation. Actuellement l'impôt sur le sel est de M fr. 70 c. par cent kilogs.
« Et quant à la fourniture de la viande, honête Dominique Béraud, boucher, habitant à St-Roman, estant icy présent, s'est chargé de faire icelle à raison de onze livres (!) le quintal, poids de marc ~2), laquelle luy sera payée de l'argent qu'on exigera a mesure de la distribution, même par avance s'il en est nécessaire, ainsi que lesdits assemblés promettent au nom de la communauté.
« Et pour le pain, on le fera faire au même taux que l'estapier le faisait faire ci-devant à M. Fay, hostelier de Saint-Roman appromettant de faire payer toute peine et fourniture audit consul et autres qui vacqueront à son bien (3).
« Et du tout nous avons octroyé droit et nous nous sommes soussigné avec le consu] et les sachant escrire desdits assemblés.
« LAGARDETTE, lieutenant; VIEROU; RoBERT;
BABOR)ER; HABOtN; CoUTURIEH;DAL[SSIEU;
PASCAL CHARIGNON GOUDARD, consul
CROZAT )) (4).
(1) La livre monnaie ou livre tournois valait environ 1 fr., elle se divisait en 20 sous, le sou ou sol, en 4 liards et en 12 deniers. (2) Poids de marc, ainsi appelé parce qu'il était usité dans les marchés, d'où son nom, équivalant à 8 onces de 30 grammes, moi.tié de la livre de Paris, ou 0 kilog 244 grammes 75 miligrammes. Il fallait environ 16 onces pour une livre-poids et cent livres pour un quintal.
(3) A sa prospérité.
(4) Après les delibérations que l'on vient de lire, nous ferons observer que la récolte du blé et de toutes les céréales avait été bien minime, en 1708, non seulement dans la communauté d'Albon mais dans tout le Dauphiné. L'hiver de 1709 avait été très rude ~t très long on l'appela le grand htuer. Dans les forêts les arbres éclataient par suite du gel, le Rhône était complètement pris à plusieurs endroits. Joignez à cela le passage continuel des troupes par suite des guerres, et on se rendra facilement compte de
Du premier septembre 1709, au lieu de Saiut-Roman d'Albon, dans la chambre de la communauté, à l'heure de midy, par devant nous Alphonse Assalin de Lagardette, soussigné, lieutenant de Monsieur le capitaine châtelain, conseiller, maire perpétuel de la Comté et en présence du grenier soussigné.
u A comparu sieur Nicolas Goudard, consul moderne de la communauté, lequel nous a dit et remontré qu'il a fait advertit les plus notables de la communauté pour comparoir par devant nous à ce dit jour, lieu et heure, pour venir délibérer sur une urgente affaire de la communauté. Auquel lieu sont comparu M. Barthélemy ViérouFontaine, sieurs Pierre Baborier, François Sadin, Mathieu Dalissieu, François Fay, Charles Pérouze, Estienne Couturier, Me Nicolas Gauttier, et sieur François Crozat. « A laquelle assemblée ledit consul remontre que la communauté cettant pourvue à Mgr l'intendant sur l'abondonnement de la fourniture pour l'estape qui estait faite a ladite communauté par MM. les parfournisseurs généraux des estapes de cette province, laquelle estant fournie par le sieur Sadin, ci-devant estapier en cette communauté jusques au dernier juin dernier, au moyen des prêt et avance que la communauté lui a faite, Et depuis ce temps jusques à présent ladite communauté a esté obligée de faire
la misère qui régnait en Dauphiné, et surtout aux lieux d'étape, comme Albon.
Nous ferons aussi remarquer que les impôts que vote la communauté pour subvenir aux passages des troupes, sont toujours supportés par les plus aises des notables et roturiers. Les nobles et le clergé en sont toujours exonérés c'est que, à cette époque encore, ces derniers étaient exempts du logement et de la réquiMtion pour les troupes, tmpôt toujours lourd et écrasant, dans les années de disette, pour la communauté chargée de faire la fourniture d< l'étape.
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la fourniture. Et comme elle ne pouvait plus estre en estat de la faire, elle a demandé à Mgr l'Intendant des aides par les communautés voisines audit Saint-Roman, pour luy aider à faire icelles fournitures.
Ensuite de quoi Mgr l'Intendant aurait donné ordre à M. Chaiéat, conseiller du roy, maire perpétue} de la ville de Romans, de donner des aides pour la fourniture. Ensuite de quoi ledit sieur Chaléat aurait réparti à la communauté pour aider à subvenir à la fourniture La communauté de Saint-VaHier pour 8 charges de vin mesure de Saint-Vallier (1).
La communanté de Laveyron pour 3 charges de vin mesure de Saint-Vallier.
La communauté de Beausemblant pour 8 quintaux orge ou avoine, poids de marc et 2 charges vin.
La baronnie de Serves pour 8 quintaux orge ou avoine et 2 charges vin.
Lacommuaautéde Saint-Uze. pour 6 quintaux orge ou avoine. – Sabon 8 –
Fay 3
– Mollard 2 –
– Ponsas – 2 –
– Mantaille 10 –
et 1 charge de vin.
– Larnage 6 ~uhcx orge ou avoine. et 1 charge de vin.
– Champagne. pour 6
– Chantemerie. – 20 quintaux foin. – la Motte-de-Galaure 20 –
– Mureils 10 –
« Et aurait donné des ordres avec enjonction aux dites communautés de fournir le contenu en icelles le lendemain (1) A St-VaUier la charge de vin était environ de cent litres.
de ladite signification des ordonnances en date du dernier du mois d'août passé, lesquelles ont esté remises au dit sieur Fontaine qui serait allé exprès à Romans pour les retirer.
« Et, comme il est de l'intérêt de la communauté de faire signifier incessamment les dites ordonnances aux communautés, il est nécessaire de nommer une personne pour faire la rentrée des aydes et la distribution d'icelles aux troupes lorsqu'elles arriveront à la communauté. « Et de représenter que par les dites ordonnances on n'a donné aucun ayde pour la fourniture de la viande qu'il faudra aux troupes qui arriveront audit lieu par estapes que par ainsi ladite communauté sera obligée de faire ladite fourniture, ensemble de quelques sommes qu'on est obligé de payer pour les oSciers absents. Ainsi il est nécessaire de faire un fonds pour subvenir à cette fourniture. « Tous lesquels sus-nommés, ensemble après avoir, ouy lecture desdites remontrances, ont nouvellement délibéré et conclu qu'ils nomment et députent le sieur François Baboin pour faire la rentrée des denrées, vin et fourrage donnés en ayde à la communauté et pour en faire la distribution aux troupes. Il donnera son taux et règlement auquel il sera payé pour sa peine même somme que la communauté de Moras donne à son consul. Et pour cest esfet il distribuera l'orge et l'avoine à sieur François Fay pour en faire du pain, lequel estant ci-présent a promis de le faire et distribuer aux troupes suivant les billets qui lui seront expédiés et ce aux mêmes conditions que les bollangers qui font semblable pain et distribution à la communauté de Moras la font, et c'est obligé de la faire.
« Et quant à la fourniture de la viande ledit sieur Baboin la donne à faire au sieur Dominique Béraud, boucher de Saint-Roman, aux mêmes conditions qu'on estait ci-devant. Et pour subvenir au payement de ceste fourniture, il sera fait un rôle d'emprunt sur les plus aysés de la communauté.
« Ainsi estre conclu et délibéré devant nous et se sont tous les sachant escrire signés avec nous et notre greffier. a LAGARDETTE, lieutenant VlÉROU BABO-
HIER; GAUTTIER; DALISSIEU SADIN COUTU-
RIER CROZAT; F. FAY BABOIN. »
Le 17 novembre 1709 la communauté reçoit l'ordre de fournir de suite à la ville de Romans vingt quintaux orge, poids de marc, qui lui seront remboursés sur la capitation de l'année 1710.
Le Dimanche 8 décembre 1709 la communauté envoie à Grenoble le sieur Baboin pour aller trouver le sieur Fontaine fils et s'entendre avec lui pour porter un placet à Mgr l'intendant le suppliant humblement d'accorder quelques secours à la communauté, car elle ne peut plus faire la fourniture de l'étape et qu'une partie des habitants va déserter, ce qui sera une cause de désordres au passage des troupes.
Le lundi 16 décembre 1709, la communauté reçoit l'ordre de loger ès-quartier, pendant trois mois, un capitaine et deux cavaliers du régiment de Ragecourt.
On fournira au capitaine le simple logement qui est le couvert chez l'habitant, le lit garni, place au feu et à la chandelle sans qu'il puisse rien exiger ni recevoir de plus que ses rations de fourrage, ainsi composées par jour 15 livres de foin et 5 livres de paille, ou 18 livres de foin sans paille, le tout poids de marc et les deux tiers d'un boisseau d'avoine mesure de Paris ()). Aux cavaliers, par
(1) Boisseau, ancienne mesure valant 12 litres et demi à Albon. Le boisseau de Paris valait 13 litres.
jour pour les chevaux, une ration comme ci-devant, etpour les hommes une ration de pain d'une livre et demie, poids de marc, et deux sols par jour pour la petite ustensile (1), ou une demi-livre de viande et un sol, et payable de 10 en 10 jours par avance.
La communauté sera remboursée de cette fourniture sur le pied de 13 sols pour chaque ration des chevaux d'officiers, et de 19 sols pour chaque ration des cavaliers, en fourrage et en pain et y compris les deux sols d'indemnité. « Du i9°"' jour du mois d'avril année 1711, au lieu de St-Roman-d'Albon et dans la chambre de la communauté par devant nous Alphonse Assalin, sieur de Lagardette, conseiller, maire perpétuel de la communauté.
« A comparu sieur Nicolas Goudard, consul moderne de la communauté lequel nous a dit et remontré, qu'il a fait comparoir les habitants par devant nous pour procéder à la nomination d'un nouveau consul pour la communauté, attendu qu'il y a plus d'un an qu'il a été nommé. « Auquel lieu sont comparu Me Barthélémy Viérou-Fontaine, notaire royal, sieurs Pierre Baborier, Jacques Ramet, syndic des forains, Pierre Brunet, Pierre Pascal, Estienne Couturier, Christophe Crozat, Joseph Bonzel, Charles Girard, François Fay, Pierre Guignard, Guillaume Ronat, André Conte, Pierre Berton, François Flacher, Jean Chotan, Pierre Viérou, Mathieu Dalissieu, Jean Goubertier, François Baboin, Claude Crozat, Vidal Rosier,
« Tous lesquels assemblés ont délibéré et procédé à la nomination requise. Et ayant recueilli les voix des habitants sus-assemblés, il s'est trouvé que le sieur Estienne Couturier a le plus de voix que nul autre. C'est pourquoi (1) Les 2 sols par jour, pour la pehte usiens~e, était l'indemnité dua pour le remplacement des ustensiles de cuisine que t'oo devait fournir aux soldats quand ils étaient logés chez l'habitant.
icelui estant ici présent nous lui avons enjoint d'accepter ladite charge. Lequel à l'instant accepte et promet d'exercer et procurer le bien de la communauté en bon père de famille et rendre compte de son maniement et pour cet effet à passé les obligations requises. »
« CouTURJER VfKROU GoUDARD, Consul
RAMAT, SyndfC; BRUNET; BABOHIEH CROZAT;
BABOtN; DALICIEUX; LAGARDETTE, lieutenant, »
Du dimanche 20°" jour du mois de décembre )7)1 aprèsmidi, par devant nous Alphonse Assalin, sieur de Lagardette, conseiller, maire perpétuel de la communauté. « A comparu sieur Estienue Couturier, consul moderne de la communauté d'Albon, lequel nous a dit et remontré, qu'il y a une année qu'il aurait été nommé consul; et comme il ne peut plus exercer ladite charge, Il a fait réunir les principaux habitants pour nommer une autre personne pour consul pour l'année prochaine.
« A quoi sont comparus, Me Barthélémy Viérou-Fontaine, sieurs Pierre Baborier, Christophe Charignon Nicolas Goudard, François Baboin, Pierre Brunet, André Conte. Charles Girard, Henry Sallier, François Fay, Joseph Bonzel, Pierre Guignard, Christophe Crozat.
« Tous lesquels sus-nommés assemblés, après avoir ouy le remontré du consul, ont conclu et délibéré que, attendu les grandes affaires qu'il y a à la communauté, soit par le passage des troupes qui logent par estape, soit pour autre chose, qu'il est impossible qu'une personne puisse suffire pour subvenir à tout. Et que ainsi il est à propos de nommer un consul pour faire les logements des troupes et à qui on remettra les affaires qui regardent les estapes et un autre consul pour agir aux autres affaires, non concernant les estapes.
« Et procédant aux nominations susdites, il appert que le 2** SÉRtE. XUU" VOLUME. tQOÇ. tt I
sieur Pierre Brunet a eu le plus de voix comme consul pour faire les logements de< troupes qui passeront à St-Homan par estape. Et le sieur François Baboin a eu le plus de voix comme consul pour toutes les autres affaires.
« A l'instant à comparu le sieur Brunet lequel a dit qu'il ne peut accepter ladite charge. C'est pourquoi nous maire, l'avons renvoyé par devant Messieurs les électeurs de cette élection pour dire ses causes et refus. Et à ces fins, à la diligence du sieur Couturier il y sera assigné dans la huitaine, protestant de tout ce que la communauté pourrait souffrir à cet égard et lendits Brunet et Couturier se sont soussignés.
« CouTuniEn, consul, BnuNET.
« De même à l'instant a comparu le sieur François Babbin qui a été nommé consul pour toutes les autres affaires qui ne regardent pas le passage des troupes lequel a dit qu'il accepte ladite charge et promet d'exercer icelles en bon père de famille et s'est soussigné.
« BABOIN.
« Ainsi conclu et délibéré audit lieu, par devant nous maire, et nous nous sommes soussigné ;avec les sachant escrire et le consul
« COUTURIER, consul LA6ARDETTE CnOZAT
BABORfER CHARfGNON F. FAY GoUDARD
Vmnou BABON, substitut du grenier.
« Du 3'"° jour du mois d'apvril )7t2, au lieu de St-Romand'Albon et dans la chambre de la communauté par devant nous Alphonse Assaliu, sieur do Lagardette, conseiller, maire de la comté, escrivant le greffier.
« A comparu sieur François Baboin, consul moderne, lequel nous a dit et remontré avoir fait advertir les principaux hahitans pour dëtibérer sur plusieurs urgentes affaires. « Auquel lieu sont comparus sieurs Pierre Baborier,
Barthélémy Vtérou P~ontaine Jean Chtitillon Claude Crozat, François Flassier, Joseph Bonzel, Pierre Sauvajon, Fleu''y Ronat, Louis Robin, Antoine Sadin, Mathieu Daltssieu, François Fay, Claude Girard, Guillaume Ronat. « Auxquels sus-nommés assemblés le sieur Baboin à remontré que par assemblée du 20 décembre dernier il fut nommé consul pour agir aux affaires concernant la communauté et pour faire le logement et autres fonctions concernant l'estape des troupes, on avait nommé sieur Pierre Brunet lequel ne voulut accepter ladite charge. Ce qui aurait obligé de le renvoyer devant les électeurs, où l'on est en estât de le poursuivre mais comme on prévoit un procès il en a voulu aviser la communauté, déclarant ne pouvoir faire les logements de l'estape et les autres affaires de la communauté, requérant en être deslibéré.
« BAROIN, consul. »
« Lesquels assemblés ont conclu et délibéré, que pour éviter un procès et tous différends, il faut prier sieur François Crozat, praticien du lieu de St-Martm, de vouloir faire lesdits logements et autres fonctions concernant les estapes jusqu'au premier janvier prochain et que en cette considération, attendu les travaux et peines qu'il se donnera à vaquer à ladite fonction il faut lui donner trente livres, de laquelle somme il lui sera donné un mandat sur ceux qui ont d'argent en mains de la communauté.
« Et lequel sieur Crozat étant ici présent accepte ladite charge et promet de faire les fonctions et autres concernant les estapes moyennant qu'on lui paye les trente livres et qu'on lui fournisse le papier pour faire les billets et extraits de route ce qui a esté promis par les assemblés tant en leur nom que pour les absents, et c'est ledit sieur Crozat soussigné avec les sachant escrire.
« CROZAT, consul BABORIER BABOIN CHA-
TILLON ViEROU F. FAY LAGARDETTE.
« A l'instant lesdits assemblés ont délibéré que attendu le passage des troupes qui passent à St-Roman-d'Albon par estapes, où il faut que la communauté leur fournisse des charrettes pour voiturer leurs équipages à Vienne ou à Romans ou pour les soldats malades ou invalides. Et attendu le grand nombre de charrettes qu'il faut fournir aux troupes cela fédtme (t) les prix des mulets et chevaux de marcher souvantes fois (2), ce qui les ruine et détruit entièrement leur bétail et leur ôte les moyens de cultiver leurs fonds.
« Et que pour les soulager il faut se pourvoir à Mgr l'Intendant et lui donner requête le suppliant de bien vouloir donner des ordres aux communautés voisines de leur aider, qui sont la communauté de Beausemblant, celles de Mantaille, de Saint-Uze, Dertheu et Monbreton et à ses fins il faut envoyer incessamment un homme exprès à Grenoble pour présenter ladite requête attendu qu'on leur a donné avis qu'il y aurait un grand passage de troupes. Et pour cet effet les consuls agiront incessamment et seront remboursés de leurs fournitures et du tout nous avons requis acte. « LAGARDETTE ')
Le 5 février 1713 le sieur François Crozat, praticien du lieu de St-Martin, nommé consul pour faire le logement des troupes jusqu'au premier janvier dernier, déclare qu'il ne peut plus exercer cette fonction.
Les principaux habitais réunis nomment le sieur Antoine Dupuy, également praticien à St-Martin, pour exercer la même charge, jusqu'au premier janvier prochain. On lui donnera la même somme de trente livres, ce qu'il accepte.
(1) Vieux mot employé pour réduire, amoindrir. (2) fréquemment.
Le dimanche 3 juillet 1713, le sieur François Baboin, consul remontre aux habitants assemblés.
t° Qu'il est mort subitement une pauvre femme, étrangère et inconnue, au domaine de la Fouillouze, appartenant à Madame d'fzeran, laissant un enfant de deux ans, entre les mains du fermier Joseph Micou, qui ne peut le nourrir. 2° Qu'il faut se pourvoir à Mgr l'Intendant de la province, et le supplier d'accorder quelques soulagements à la communauté qui a beaucoup souffert de la grèle tombée ces jours-ci, ayant emporté une grande partie des blés, vignes et autres grains et renversé beaucoup d'arbres.
Les habitants décident
i° De donner l'enfant au nommé Benoît Belle qui offre de le nourrir pendant une année au prix de 3 livres 8 sols par mois.
2° De dresser de suite un état des dommages occasionnés par la grèle, le faire attester par MM. les curés de la communauté et se pourvoir ensuite à Mgr l'Intendant et le prier d'accorder quelques secours.
« Le 3 janvier 1713, par devant nous Alphonse Assalin, écuyer, sieur de Lagardette maire perpétuel du comté d'Albon, escrivant le frère du greffier.
« A comparu sieur François Sadin, pour et au nom de sieur François Sadin, bourgeois de St-Roman-d'Albon, son père lequel nous a représenté qu')l a esté étably pour faire la quête pour les pauvres esclaves, les fêtes et dimanches dans toute l'étendue de la paroisse de St-Koman-d'Albon, par frère Jean-Baptiste Castélan. ministre du couvent de la Très-Sainte-Trinité, du lieu de la Motte et procureur général des esclaves en la province du Dauphiné. Et lequel sieur Sadin nous a requis de vouloir enregistrer les lettrespatentes, reçues par nostre grenier, contenant sa commission pour luy servir à ce que de raison, et s'est le sieur Sadin fils signé pour son père.
« SADIN.
« Ensuite du comparant cy-dessus nommé, avons procédé à l'enregistement requis par le sieur Sadin ainsy que s'ensuit.
'< Extrait du conseil pt'tuë du Roy. Entre frère Louis Petit, ministre gênerai de l'ordre de la Ste-Trinitë, demandeur en requête du 27 janvier 1637 et deffendeur d'une part. Et les provincial, commandeurs et religieux de l'ordre de Notre-Dame de la Mercy et Rédemption des captifs, fonde en ce royaume, dén'endeurs en ladite requête du 27 janvier )<)37, et demandeurs en requête verbale contenue en l'appointement du règlement du 6 juin )637, d'autre part; sans que les qualités puissent nuire ny préjudicier aux parties.
« Le roi en son conseil, faisant droit sur ladite instance, sans s'arrêter à l'opposition desdits demandeurs et arrest du 11 septembre 1610, a ordonné et ordonne que lesdites lettres patentes du 28 mars 1639 et arrest dudit conseil du 23 juillet dudit an, seront exécutés selon leur forme et teneur. « Et pour oster à l'avenir toutes difficultés et contestations entre lesdites parties, Sa Majesté a permis et permet, tant au religieux de la Trinité, dits Maturins, qu'aux religieux de Notre-Dame de la Mercy, de faire conjointement leurs questes dans l'étendue de la ville et faubourgs de Paris. Et à cet effet seront tenus tous les curés et marguilliers des paroisses de délivrer à chacun d'eux par moitié ce qui aura esté aumône par les particuliers pour le rachat des captifs, dont les curés et marguilliers tiendront un registre et seront tenus de faire signer en iceux lesdits religieux lorsqu'ils remettront les deniers entre leurs mains. « Et pour les autres provinces de son royaume Sa Majesté a ordonné quès provinces de l'Isle de France, Gastinois, Orléanais, Beauce, Perche, le Maine, Anjou, Picardie, Normandie, Champagne, Dauphiné, Bourgogne, Nivernois, Lyonnais, Porest, Baujolais, Poitou, Tourraine, Berry, Bourbonnais, Auvergne, Limousin, la Marche, Périgord et
Ageiiois, les religieux de la 'Hinité feront seuls les questes à l'exclusion des religieux de la Mercy.
Comme pareillement ès provinces de Bretagne, Languedoc, Guyenne, Angoumois, pays d'Aunix et Saintonge. Quercy, Béarn et Provence, les religieux de la Mercy feront seuls les questes à l'exclusion des religieux de la Trinité. « Et seront les deniers employés par les religieux à l'effet de la Rédemption des captifs seulement, sans que les uns et les autres en puissent divertir aucune chose, sous quelque prétexte que ce soit et que les deniers seront employés au rachat des chrétiens captifs, français par préférence à tous autres le tout à peine d'estre contrevenants déchus de la faculté portée par le présent arrest et d'estre procédé à l'encontre d'eux extraordinairement.
« Et seront tenus lesdits religieux, tant de la Trinité que de la Mercy, rendre compte au conseil de Sa Majesté de trois en trois ans, de la recette et employ des deniers, le tout aux peines cy-dessus portées.
« Et sera mandé à tous archevêques et évêques, gouverneurs des provinces et officiers de Sa Majesté et tous autres de tenir la main à l'exécution du présent arrest. Et sur le surplus a mis et met les parties hors de cour et de procès, sans dépens.
Fait au conseil privé du Roy, tenu à Paris le 6me jour du mois d'aoust i638. Collationné et signé Carré. « Lettres patentes du roy, en faveur de la redemption des chrétiens esclaves.
« Louis par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre à nos amez et féaux archevesques et évesques, abbés, abbesses, prieurs, prieuresses, doyens des chapitres, curés, vicaires, chapellins, fabriquers, marguilliers, recteurs et autres gens d'église. Et àtousprévosts, capitaines, gens des cités, villes, châteaux, forteresses, ponts, ports, passages, juridictions et détroits, gens d'armes et à tous nos just[ciers, officiers et sujets, amis et bienveillants de nous et de notre royaume ou à leurs lieutenants salut.
Les très humbles remontrances que le père général de l'ordre de la Trinité et rédemptions des chrétiens esclaves nous a faites, que la haine des Turcs et des barbares contre le nom chrétien, s'augmente de jour à autre et leur inhumanité et cruauté contre les pauvres captifs pour les faire renoncer à la religion catholique, apostolique et romaine. Et qu'étant le père générât et les religieux de son ordre, obligés par leur institut de travailler A procurer la délivrance des esclaves, ils auraient à ces fins obtenu diverses bulles du Saint Père le Pape pour exciter la charité des fidèles à contribuer à ce pieux dessein.
« Nos prédécesseurs, et particulièrement les rois François et Henry le grand, notre très-honoré seigneur et père leur avatent aussi octroyé plusieurs lettres patentes, portant permission de mettre des troncs dans toutes les églises de notre obéissance, et d'y faire des questes les dimanches et testes et en temps des moissons et'vendanges, en toutes les villes, bourgs, villages et paroisses de porte en porte, pour la délivrance des esclaves.
« Et en faveur de ceux qui vaqueraient à cet emploi, exemption de toutes gardes et séquestrations de biens meubles et immeubles, tutelles, curatelles, et logement de gens de guerres, tant à pied qu'à cheval.
« Nos Cours souveraines auraient aussy témoigné leur zèle par divers arrests qu'elles auraient rendu ensuite et confirmation dudit dessein.
« Mais maintenant le tout est inutile auxdits religieux, parce qu'ils ne trouvent plus personne qui veuille accepter ledit emploi d'autant que nous n'avons point confirmé lesdtts privilèges, ce qui empêche qu'ils ne peuvent pas secourir n'y déhvrer les captifs des mains des Turcs et des barbares, comme ils feraient s'il nous plaisait d'approuver, de confirmer et autoriser les dits privilèges nous requérant sur ce, leur vouloir octroyer nos grâces en lettres convenables. « A ces causes désirant favoriser une si sainte intention
et avancer de tout notre pouvoir les œuvres qui regardent la gloire de Dieu et l'honneur de son nom, et principalement la rédemption des chrétiens captifs, nous exhortons, mandons et commandons à tous préiats, archevesques, évesques, abés et autres gens d'église, de bailler ou faire bailler et délivrer par leurs vicaires ou commis, au père général, ou ses procureurs les lettres et mandements nécessaires, tant pour faire publier par leur diocèse les indulgences concédées à ceux qui donneront de leur bien pour la rédemption, que aussy pour quester, recepvoir et amasser tes aumosnes et charités, que nos bons sujets donneront pour une si sainte et si louable œuvre.
« Enjoignons et commandons aussi à tous nos sujets, alliés et bienveillants, que le père général, les religieux et procureurs, porteurs de ces présentes ou vidimus d'icelles, dument coll~tionné par un de nos amez et féaux conseillers secrétaires de nostre maison et couronne de France, auquel voulons pleine foi estre ajoutée comme au propre original vous souffriez et laissez aller, venir, passer et repasser par nostre royaume et quand besoin sera, remontrer et représenter les nécessités des pauvres captifs, établir des confréries, requérir, prendre et recevoir les charités des fidèles chrétiens sans leur faire ou donner, n'y souffrir leur estre fait, ny donner en leurs personnes, familles, chevaux, or ou argent et autres biens, aucun trouble ny empêchement en quelque manière que ce soit.
a Et sy en faisant ledit exercice, aucun d'eux était empêché enjoignons très expressément à tous officiers de justice et à chacun dans sa juridiction de procéder diligemment à la délivrance, tant de leur personne que de leurs chevaux, or, argent et autres choses saisies et en tout leur donner ayde, secours et assistance. Et en tant que de besoin, par ses présentes, nous les aurons pris et mis, prenons et mettons leurs personnes, biens, chevaux et autres choses, en notre protection et sauvegarde voulons que les
infracteurs, transgresseurs de ces présentes soit exemplairement punis.
« Voulons en outre que dans nostre royaume et terres de nostre obéissance il y ait des personne commises à faire des questes en églises, les dimanches et festes et en temps de moissons et vendanges, de porte en porte pour colliger et amasser les chantés des gens de bien, lesquelles seront employés à la rédemption de nos pauvres sujets esclaves, de préférence à tous autres.
« Et ceux qui seront employés et commis à cet exercice. pendant le temps de leur commission, les avons exemptés et déchargés, exemptons et déchargeons par ces présentes, que nous avons voulu signer de notre propre main, de toutes gardes et séquestrations de Liens meubles et immeubles, tutelle et curatelle et logement des gens de guerre tant à pied qu'à cheval.
« Inhibons et défendons a tous huissiers, sergents et autres qu'il appartiendra de les y commettre à peine de nullité de saisie et de suspension de leurs charges. « Comme aussi inhibons et défendons à tous gens de guerre, tant à pied qu'à cheval, de loger chez les personnes qui seront ainsi commises. Et en cas de contravention, les contrevenants seront assignés par devant nous et nostre conseil, pour voir déclarer lesdites peines et plus grandes et autrement procéder comme de raison, car tel est nostre plaisir, nonobstant arrest, privilège, lettres, constitutions quelconques et défences à ce contraire, auxquels nous avons dérogé et dérogeons par ces présentes.
« Donné à St-Germain-en-Laye, le 5°°° jour de janvier l'an de grâce 1M3, et de nostre règne le trente-troisième, signé Louis et plus bas par le roy, DsLOMÉNtE.
« Louis, par la grâce de Dieu, roy do France et de Navarre, dauphin de Viennois, comte de Valentinois et Dicis, au premier nostre huissier ou sergent requis, suivant le decret de nostre cour de Parlement du Dauphiné, mis au
bas de la requeste ci sous nostre contre scel jointe, présentée par frère Jean-Baptiste Castelan, procureur général des esclaves de la province de Dauphiné, religieux de l'ordre de la Trinité et rédemption des chrétiens esclaves, du couvent de la Motte par lequel décret, t'arrest du conseil et les lettres patentes dont il s'agit seront exécutés selon leur forme et teneur.
« Et en conséquence a maintenu le suppliant, à la forme des lettres patentes et arrest du conseil, en la possession et jouissance de quester et faire quester dans toutes les paroisses de la province, même de faire mettre et poser des troncs dans toutes les églises de la province, avec inhibitions et défences aux religieux de l'ordre de la Mercy de quester dans la province ou faire que&ter à tous autres qu'il appartiendra, même de troubler le suppliant en ledite possession, à peine de cinq-cent livres d'amende et d'en estre informé par devant le premier gradué ou sergent requis non suspect, lequel est à ces fins commis.
« Et en cas d'opposition, mandons à toi dit huissier, assigner les opposants pour comparoir à Grenoble par devant notre cour pour procéder sur leur opposition, la maintenu cependant tenant. Et fera toi huissier pour l'exécution des présentes tous exploits requis et nécessaires, de ce faire te donnons pouvoirs.
« Donné à Grenoble en parlement le 2 décembre l'an de grâce 1712, et de notre règne le 70'°'. Par la cour, signé Anglancier. Contrôlé une livre.
Contrôlé et collationné sept sols, et scellé le 3 décembre 17)2, signé Robert.
« Commission pour faire la queste. Nous frère JeanBaptiste Castelan, docteur en sainte théologie, ministre du couvent de la Très-Sainte-Trinitë, du lieu de la Motte, et procureur général des esclaves en la province de Dauphiné, avons establi François Sadin, du lieu de St-Roman-d'Albon, pour faire la queste pour les pauvres esclaves, les festes et
dimanches, en temps de moissons et vendanges dans toute l'étendue de la paroisse deSaint-Roma.n-d'Albon, diocèse de Vienne.
« Et afin que pendant le temps de sa commission, il puisse jouir des privilèges et exemptions exprimés dans les lettres patentes du roy nous luy en avons donné copie signée de notre main et mis le sceau de nostre office, à condition qu'il reçoive charitablement les religieux qui iront faire la recette.
Fait à la Motte, ce )" juillet 1715.
F. B. CASTELAN (1)
Le 15 mars 1716, le consul François Baboin réunit les notables habitants, pour [es avertir que les fournisseurs des estapes ne font plus les fournitures aux troupes qui passent à St-Roman. Les habitants sont contraints de la faire sans aucun payement et venant d'être avisés qu'il va passer des compagnies de Suisses et n'étant plus en état de leur fournir les vivres, ils préfèrent abandonner leurs maisons et déserter.
Les notables habitants décident de demander des fonds à l'Intendant ou à son subdélégué, et de les remettre au consul pour faire la fourniture. Et en attendant il faut faire un emprunt en argent et en denrées lequel sera remboursé, soit par les fonds que l'on retirera des fournisseurs, soit par la communauté.
(1) Les religieux Trinitaires ordre fondé en 1H)8, pour le rachat des chrétiens esclaves chez les Musulmans, appelés aussi Mathurins, du nom d'un couvent bâti a Paris, sur l'emplacement d'une chapelle dédiée à St-Mathurin. Leur règle était très sévère. Les pères de la Mercy, ordre religieux et militaire fondé à Harcelonne en 1223, et établi en France en 1235, également pour le rachat des esclaves.
Ces deux ordres furent abolis en 1790.
PROSPER VALLERNAUD.
(A sut~re~.
ANNIBAL EN GAULE ET EN ITALIE
Dans le passage d'Annibal en Gaule, des Pyrénées aux rives du Pô en Italie, trois points principaux sur lesquels de nombreux historiens n'étaient pas d'accord restaient à élucider.
Ces trois points étaient
1° L'endroit ou Annibal avait franchi le Rhône 2° L'île où il s'était arrêté pour faire reposer son armée de soixante mille hommes et ses trente-sept éléphants, la ravitailler et charger sur des mulets des provisions pour la route qui restait encore à faire jusqu'aux Alpes 3° Le chemin qu'il avait dû suivre pour traverser les Alpes, et descendre chez les Taurini.
Le second point vient d'être magistralement résolu, et d'une façon irréfutable, par M. Béretta dans le n" 168 du Bulletin de la Société départementale d'archéologie de la Drôme.
M. Béretta établit clairement que la fameuse île que les historiens plaçaient au confluent de l'Isère et du Rhône, est le Delta Cavare
Cette solution entraine la détermination de l'endroit où le passage du Rhône s'est effectué, cet endroit ne peut être qu'en dessus d'Arles, entre cette ville et Beaucaire. Maintenant on comprend le récit de Tite-Live qui fait tourner Annibal à gauche du côté des Tricastins en sortant de l'île pour reprendre son chemin le long du Rhône. Si l'île s'était trouvée entre l'Isère et le Rhône, c eût été une absurdité, car ayant le Rhône à sa gauche il se serait jeté dans le fleuve lui-même, tandis que s'étant enfoncé dans le
Delta Cavare jusqu'à Pernes ou l'Isle-sur-Sorgues, il était forcé!nent obligé d'obliquer a gauche pour sortir de l'île, et reprendre sa route près du Rhône jusqu'à Valence ou la rive gauche de l'Isère. Il est vrai que Tite-Live parle des Allobroges qui sont non loin de là, mais à cette époque certains historiens mettaient les Allobroges immédiatement après les Cavares, et les limites de ces différents peuples étaient mal déterminées.
Entre les Cavares et les Allobroges se trouvaient les Tricastins et les Ségalauniens, ces derniers tributaires des Allobroges, les Voconces étaient à l'est, Die, Luc, Vaison. Je n'entre pas dans d'autres détails, M. Héretta en donne suffisamment, et il est parfaitement d'accord avec Polybe et Tite-Live.
Le troisième point, le passage des Alpes, avait été déjà, après de pénibles recherches sur les lieux mêmes, éclairci par le colonel Perrin. C'est le col de Clapier.
En arrivant au sommet des Alpes, après des combats terribles contre les Allobroges et les Médulles, dans des défilés et des gorges ardues, où il avait perdu plus de la moitié de son armée, Annibal pour remonter le moral de ses troupes désemparées leur montre en Italie les rives du Pô et le chemin de Rome or, d'un seul point dans toute la chaîne des Alpes se voit ce panorama magnifique, c'est du col de Clapier à côté du Mont-Cenis. La question de l'endroit du passage n'est donc plus à discuter.
Voici donc les trois points résolus et ce n'est pas trop tôt, car depuis Polybe et Tite-Live beaucoup d'historiens (le capitaine Colin excepté) se sont évertués à placer l'ile entre Lyon et Vienne, et pour cela ils se livraient à un travail savant mais non dénué d'imagination en commentant à leur point de vue les textes de Polybe et de Tite-Live. j Annibal était un génie militaire de premier ordre c'est incontestable en menant de Carthagène a Turin, une armée de cinquante à soixante mille hommes, il a fait
preuve d'une énergie physique et morale extraordinaire, et s'il n'avait commis deux fautes graves, il aurait conduit en Italie cinquante mille carthaginois, qui avec l'aide des Insubres auraient pris Rome et anéanti l'Empire Romain. Il a d'abord traversé les Alpes trop tard, à l'entrée de l'hiver, ensuite et surtout il ne s'était pas ménagé avant le passage de ces hautes montagnes, un accord avec les Allobroges et les Médulles ennemis des Romains.
Il le pouvait ayant épousé par politique une Gauloise de Castulon, ville des Orétani de ce peuple gaulois qui avait vaincu Amilcar-Barca il avait aussi de bons rapports avec les Insubres, et il venait d'avoir la chance, de mettre sur le trône, dans l'île mystérieuse, un petit roi Ligure ou Celte appelé Brancus, qui était en compétition avec son frère, et qui en reconnaissance lui rendit de grands services en donnant à son armée des vivres et des vêtements, et en l'accompagnant au delà du Delta ,Cavare, de concert avec le roi gaulois Magil, venu à sa rencontre après le passage du Rhône.
Annibal perdit trente mille hommes, de la traversée du Rhône à son entrée en Italie, et si après Cannes il avait eu une armée carthaginoise assez nombreuse il aurait marché sur Rome, ce qu'il n'osa pas faire avec les quinze mille Carthaginois qui lui restaient et qui était noyés dans des troupes gauloises, se battant il est vrai admirablement, mais n'ayant ni la discipline ni les armes des vieilles troupes carthaginoises composées d'Ibères et d'Africains. Si après Cannes Annibal n'a pas pris Rome, c'est donc qu'il ne le pouvait plus à cause de l'infériorité de son armée carthaginoise et la fameuse apostrophe de son lieutenant lui disant « Annibal tu sais vaincre, mais tu ne sais pas profiter de la victoire o pourrait bien être imméritée. MARQUIS DE LA BAUME DU PuY-MON[)HUN.
Monlélimar, 18janvier ~909.
L'ILE-ËVE
Il existait jadis au Bourg-Iès-Valence un domaine appelé l'Ile-Eve, par opposition sans doute à celui de l'Ue-Adam dont le Bulletin a parlé dans le temps (1). ïl comprenait des bâtiments, une grange, sept hommes de pré, un jardin et un verger d'une contenance totale de trois sétérées, aux Alissières, appelé Jardin-Paulin dans la suite et appartenait, en 1675, à noble Antoine de Marville, conseiller et professeur du roi en l'Université de Valence et en 1539 à un nommé Carrière. Afin de mieux préciser sa situation, il faut ajouter que ce domaine touchait à un pré de l'hôpital de St-Jean, alors propriétaire du moulin de St-Pierre, du côté nord, une terre et un pré, et une terre au midi, de Charles Calvin, conseiller et avocat du roi, en la sénéchaussée et siège présidial de Valence, possesseur des bâtiments, grange, près, jardin de Chony, occupés par la cartoucherie de Valence actuellement.
Le même de Marville avait aussi construit en 1673, un colombier avec la permission de l'abbé du Hourg-lèsValence, sous la promesse de lui payer annuellement une paire de pigeons, le jour de St-Apollinaire, à cause des dommages causés par les pigeons aux récoltes des cultivateurs. La coutume des lieux réglait les conditions de ce genre d'industrie agricole, et les parlements intervenaient aussi parfois.
Chorier dit ce professeur originaire de Paris et fait l'éloge de son savoir. Il mérita d'être anobli pour les services qu'il rendit a la province et à la science du droit. Le Dictionnaire de notre président donne la biographie de ce professeur.
Jadis les roturiers ne pouvaient avoir de colombiers et un auteur dit, sans rire, que les pigeons étaient de cet avis. (1) Tome XXXVII.
A. LACROIX.
U~E PAGE D~ISTOI~E t)E hR P~O~CE
en 1628.
Après la mort de Lesdiguières, arrivée à Valence le 21 septembre 162(), la province eut à subi une période de vexations dont un arrêt du conseil d'Etat, inprimé, du 15 novembre 1G27 nous a laissé l'affligeant récit
Svr ce qui a esté remonstré au Roy estant en son conseil par le Procureur Syndic des trois Estats de Dauphiné, et les consuls des villes de ladite Prouince, qu'encores que ledit Pays soit le plus foible dé ce Royaume, consistant la pluspart en des montaignes inaccessibles et incultes, en des marests inutils, forests, ou lendes du tout ingrates et infructueuses, et en des villes presque inhabitées toutefois que ladite Prouince a esté grandement surchargé en cette dernière occasion par le passage, séjour et dissipation des gens de guerre conduits pour le secours du Duc de Mantoue, qui ont vescu si licencieusement, quelque ordre que l'on y ait peu apporter, qu'ils ont exercé toutes sortes de vols, rançonnements, pilleries, violements, brusiements de villages entiers, et tous les autres actes d'hostilité qui se peuuent imaginer, mais encores ils ont esté contrains de fournir aux frais de la leuée de sept mille hommes de pied, et sept compagnies de caualerie, outre le régiment du 2~ SÉRIE. XHI)'' VOLUME. IÇOÇ t2
sieur Comte de Sault {1), pour l'entretenement desquels ils ont reçus diuers ordres depuis vn an, qui reuiennent à des sommes excessiues pour feu, encore que les Chefs u'ayeut pas eflectivement la dixième partie de leur nombre, que leurs taxes soient excessiues,et le taut des viures fait à si bas prix, que les soldats reçoiuent double payement et bien que la misère du peuple leur soit assez coguuë, néanmoins ils ne laissent pas d'exécuter lesdits ordres par les voyes militaires, emprisonnent les laboureurs, et saisissent le bétail du labourage, leurs ostent par ce l'espérance de recueillir des fruicts pour fournir ausdites leuées et contributions et pour comble de mal'heur ils ont receus les garnisons desdits gens de guerre, qui ont esté dispersez dans les villes, et quelquescommunautez de ladite Prouince, auec nouuel ordre de subuenir à l'entretenement d'iceux De sorte que opprimez sous ces violences, exactions et concussions, ils ne peuuent subsister plus longuement, s'il n'y est pourueu par sad. Majesté. C'est pourquoy lesdits Procureurs et Syndics ont recours à sad. Majesté, pour la supplier très-humblement d'arrester le cours de semblables violences, et leuées sans sa permission, et préuenir leur ruine entière inévitable.
Vev l'ordonnance du sieur Maréchal de Créquy (2), pour l'entretenement des troupes qui sont dans ladite Prouince de Dauphiné, du 11 Ianuier dernier, montant à 17 livres 6 sols 9 deniers pour feu Autre Ordonnance du 13 Feurier, ensuivant de 5 livres 15 sols 4 deniers pour feu autre du
(1) De Sault, François de Bonne de Créquy, comte de Sault puis duc de Lesdi~uière, était fils de Charles de Crépuy et de MadeteiftedeBonne.
(2) Charles de Créquy, sire de Canaples, prince de Poix, etc., avait épousé successivement 1° Madeleine de Bonne, title de Lesdiguière et de Claudine de Bérenger et 2' Françoise de Bonne, tllie du même François et de Marie Vignon.
18 Mars de 12 livres 15 sols autre du 6 Auril de 7 livres pour feu autre Ordonnance du 2 May, portant mandement de nourrir lesdits gens de guerre, outre le payemet qu'ils ont esté contrains de leur faire en argent autre Ordonnance du 28 May de 11,682 livres 14 sols sur chacune des villes de ladite Prouince, qui reuient à 300 livres pour feu; autre du 30 Aoust de la somme de 4,682 livres, 10 sols, sur la ville de Vienne pour l'entretenement des gardes dudit sieur Maréchal, revenant à 112 livres, 11 sols pour feu; autre du 1 Septembre addressante aux Consuls de Grenoble, de payer 8 sols par iour à chacun des soldats du régiment du sieur Comte de Sault autre du 5 dudit mois, de la somme de 21,607 livres 10 sols, sur la ville de Vienne autre Ordonnance du 7 dudit mois de la somme de 9,167 livres d'vne part, et 2,782 livres, 10 sols d'autre, sur chacune des villes reuenans à 300 livres pour feu autre du dernier Septembre de 53 livres pour feu; autre Ordonnance dudit sieur de Créquy, du 1 Octobre pour la leuée de la creuë de ses Carabins; autre du 20 Auril dernier, pour l'entretenement du régiment d'Aiguebonne, reuenant à 40 livres pour feu. Procès-verbaux et informations du 15 Septebre et autres iours suiuans, justificatiues du bas taux des viures que les communautez leur ont fournis les excès larrecins et pilleries exercées par la compagnie de Plainuille, et violences commises contre~les communautez qui ont esté contraintes de leur passer les quittances et descharges qu'ils ont désiré arrêt du Conseil du 19 Aoust dernier, portant défense ausdits supplians de payer aucune chose, sinon en vertu des Lettres Patentes de sa Majesté Requeste présentée par les Consuls des villes, bourgs et villages des garnisons de ladite Prouince audit sieur Mareschal de Créquy, auec son Ordonnance au bas d'icelle du 3 Septèbre dernier, portant injonction aux Capitaines de faire l'aduance pour vn mois de la solde desdits gens de guerre, au r'embourcement de laquelle lesdites commu-
nautez seront contraintes. Les Lettres de prouision de la charge de Lieutenant général pour sa Majesté en Dauphiné, expédiées en faueur du feu sieur Connestable de Lesdiguières, vérifiées en la Cour de Parlement de Grenoble, du 3 Nouembre 1598, contenant le pouuoir, jurisdiction et cognoissance à luy attribuée des délicts, excès et violences qui se commettent en ladite Prouince par lesdits gens de guerre Procès-verbal de la Cour de Parlement de Grenoble du 14 Aoust 1628, contenant les remonstrances dudit sieur Mareschal de Créquy, et les délibérations dudit Parlement sur le faict des informations et procédures des Commissaires par elle députez, tant pour raison des exactions commises par les Secrétaire dudit sieur de Créquy, et vn nommé Garagnol, que violences, pilleries, rançonnements, excès, violements et rauages desdits gens de guerre. Arrest de Parlement de Dauphiné, du 26 Septembre dernier, portant défenses à toutes personnes de poursuiure le payement des sommes de deniers qui ont esté imposées sur ledit Pays sans permission de sa Majesté, auec injonction à tous luges Royaux d'informer des larrecins, concussions et violence exercées à la leuée desdites impositions, et des excès et pilleries desdits gens de guerre. mesmes sur le changement des routtes qui leur ont esté données Ordonnance dudit sieur de Créquy du dernier Septembre, portant que les ordres qu'il a ci-deuant faits pour la leuée, et entretenement desdites troupes seront exécutez, et les refusans contrains d'y obéyr par les voyes ordinaires et accoustnmées, pour les affaires de sa Majesté, nonobstant les inhibitions à ce contraires, auec défenses à toutes personnes qui n'auront commission de luy, de procéder, tant contre les exécuteurs desdits ordres, que contre les soldats, pour ce qui concerne leurs charges et le fait de la guerre circonstances et dépendances et en cas de contrauention, mandement aux Capitaines de prester mainforte à l'exécution desdits ordres, mesmes aux Preuosts
des Mareschaux et leurs Lieutenans, de faire le procès aux coulpables, et informer des violences, exactions et concussions extraordinaires qui auront esté commisses parlesdits gens de guerre et porteurs desdits ordres. Autre arrest dudit. Parlement de Dauphiné du 5 Octobre dernier, par lequel est ordonné que celuy du 26 Septembre sera exécuté selon sa forme et teneur, et le procès fait et parfait aux contreuenans par les commissaires à ce députez jusques à sentence deninitiue, ou de torture exclusivement auec injonction aux Ballifs, Viceneschaux, luges Royaux et ordinaires, Preuots des Mareschaux, leurs Lieutenans et Chastelains des lieux, de mettre à exécution les mandements desdits Commissaires, à peine de suspension de leur charges, et à tous Gouuerneurs, Consuls et habitants des villes, bourgs et villages, de prester ayde, faueur et assistance ausdits Officiers autre Ordonnance dudit sieur Mareschal de Créquy, du 10 dudit mois d'Octobre, portant que celle du dernier Septembre précédent sera exécutée selon sa forme et teneur auec défenses aux Gouuerneurs des villes et forterresses, Viballifs, Vineschaux, et autres luges, Preuost des Mareschaux, ses Lieutenans, Chastelains, Consuls, et habitans des villes et villages, et à toutes autres personnes de quelque qualité et condition quelles soient, d'y contreuenir, et injonction ausdits Gouuerneurs, Maistre de Camps et Capitaines, tant de cheua!, que de pied, de prester main-forte et assistance aux porteurs et exécuteurs desdites Ordonnances, et ordres y mentionnez. Tout considéré.
Le Roy estant en son Conseil, ayant esgard aux requestes du Procureur Syndics des trois Estats du Dauphiné, et Consuls des villes et communautez de ladite Prouince, a sursis et sursoit la leuée des impositions qui ont esté ordonnées par ledit &ieur Mareschal de Créquy, Lieutenant général pour sa Majesté en ladite Prouince, ensemble le payement des sommes prétendues par les Capitaines pour
aduances par eux faites pour la solde et cntretenement des troupes audit Pays, jusques à ce qu'autrement il en ait esté ordonné par sa Majesté, après que le procès-verbal desdites leuées et de l'employ des deniers aura esté dressé et enuoyé audit Conseil par les sieurs Fauier, Conseiller audit Conseil, et de Verthamon, Conseiller audit Conseil, et M ° des requestes ordinaire de son Hostel, que sadite Majesté a commis, pour conjointement, ou l'vn en l'absence de l'autre, auec l'un des Trésoriers de France de ladite Prouince, dresser procès-verbal des leuées qui ont esté faites en icelles sans Lettres Patentes de sa Majesté depuis le premier iour du mois d'Aoust de l'année dernière ausquels Commissaires sa Majesté enjoint d'y procéder incessamment, et de receuoir les plaintes respectueusement faites, tant par les Officiers de sa Majesté, Procureur Syndic, Consuls et communautez de ladite Prouince, que par les Capitaines et soldats estant en icelle, et autres personnes généralement quelconques.
HISTOIRE DU DIOCÈSE DE
SAUtT-Prn-IROS-C~TEaUX
(SutTE.–Voir!est63à)68')ivraisons)
CHAPITRE V
ETABLISSEMENT DU CHRISTIANISME A ~M~U~/d; Tr/C~X~O/'H~. FONDATION DE SON ÉVÊCHÉ. SES PREMIERS ÉVÊQUES SAINT SuLPfCE, SAINT EUSÈBE, SAINT TORQUAT.
Malgré les importants travaux qui ont été faits sur l'origine des églises de France, la question qui nous occupe est restée jusqu'à ce jour l'objet d'un débat, souvent très vif. que nous n'osons espérer de voir bientôt finir.
Parmi les critiques et les historiens, les uns font remonter aux Apôtres ou à leurs premiers disciples la fondation de la plupart de nos églises et évêchés. Les autres, au contraire, ont soutenu que la lumière de l'Evangile ne pénétra dans nos provinces que vers le milieu du troisième siècle.
Sans nous attarder à rapporter ici toutes les raisons
qu'on a fait valoir des deux côtés en faveur de l'une et de l'autre de ces opinions, nous devons du moins, pour répondre de notre mieux à l'attente du lecteur, toucher à celles qui intéressent Saint-Paut-trois-Châteaux. Mais, pour ne pas nous perdre dans un examen inextricable, il faut d'abord distinguer l'existence des chrétiens en Gaule, et même la prédication de la foi dans ce pays, ou encore l'institution de certaines chrétientés, de la fondation des évêchés, surtout d'évêchés stationnaires.
Cela posé, il est certain que l'Evangile fut annoncé de bonne heure dans la Gaule. Déjà dès le premier siècle de notre ère, la Transalpine renfermait bon nombre de chrétiens isolés que le passage des légions ou les relations de commerce y avait amenés des autres parties de l'empire. Déjà alors, elle comptait plusieurs églises fondées par les disciples et les envoyés directs des apôtres. On a trouvé en Provence des épitaphes chrétiennes du siècle ou des premières années du n" (tL Il est certain, d'autre part, que le Tricastin, situé sur la rive gauche du Rhône et traversé par la grande voie romaine d'Agrippa, si fréquentée par les légions et les commerçants, entendit dès le premier siècle prononcer le nom de Jésus-Christ. Comment n'eût-il eu dès lors la visite d'aucun de ces ouvriers qui, envoyés par les apôtres, avec le titre d'évêques des M//o/ allaient devant eux partout où l'esprit de Dieu les conduisait, portant aux peuples les bienfaits de la foi ? Qui pourrait croire que saint Pierre et saint Paul,
(<) Les Mt'cofA~gM c/n'f~e'~ de la Gaule, par Edm. Le Blant (1886 vol. in-fol.), pp. '57-9 et pl. LIX, fig. t. /(/H~cr~, to mai t8g3'
occupés à Rome de la propagation de l'Evangile, aient oublié de le faire annoncer aux Gaulois, nation aussi illustre que voisine ? Et cependant, il est certain que chez nous les commencements du christianisme furent lents et pénibles. En beaucoup de nos localités un premier groupe de fidèles disparut devant la persécution ou sous le glaive du martyre. Il fallut de nouveaux apôtres pour y apporter de nouveau la foi et le service du vrai dieu. Dès lors, les évêques, plutôt régionnaires que stationnaires, passaient souvent d'un lieu à un autre. Ils s'inquiétaient d'autant moins d'indiquer leur résidence que cette indication eût pu devenir pour les païens un moyen de les surprendre, eux et leurs fidèles chrétiens.
Avec cela, comment s'étonner qu'il y ait dans l'histoire un silence absolu sur plusieurs de nos anciens pasteurs, des vides dans les catalogues qui nous ont transmis leurs noms Est-il plus étonnant que certains évoques, figurant à la fois sur les catalogues de plusieurs diocèses, soient honorés par plusieurs peuples différents
Mais enfin l'histoire ne s'écrit guère avec de simples possibilités. Les probabilités elles-mêmes ne doivent pas y occuper une trop grande place. H y faut surtout des faits positifs, connus sommairement ou dans leurs détails. Or, les faits de ce genre, en ce qui touche à l'église dont nous voulons écrire les annales, ne nous sont connus, même sommairement, qu'à partir de la seconde moitié du n' siècle. Ils se rattachent à la diffusion merveilleuse du christianisme, qui eut lieu à cette époque et qui trouva son couronnement dans la liberté accordée, quelques années plus tard, à l'Eglise
par l'empereur Constantin. Ils sont les résultats d'un événement bien connu dans l'histoire ecclésiastique de notre région.
Cet événement est la mission de t'évéque Pothin et du prêtre Irénée, envoyés successivement de Smyrne par saint Polycarpe pour constituer et gouverner l'église de Lyon. Pothin et Irénée étaient deux grecs asiatiques. Le premier, né vers l'an 8~, était disciple et compagnon des premiers apôtres. H fut évêque de Lyon depuis l'an t~o jusqu'au 2 juin < jour où il reçut la couronne du martyre. Irénée était venu s'associer à ses travaux vers l'an t~8. M fut son successeur dans la charge épiscopale, et Dieu le réserva de plus pour des combats d'un autre genre. H soutint, contre l'erreur, ces longues et savantes luttes qui l'ont fait surnommer la hâche de l'hérésie, l'avide <~o/on~H/' de toutes les doclrines, le conservateur de la tradition c/ir~n~ë. Telle fut la confiance de ses contemporains dans l'étendue de ses lumières, dans la pureté de sa doctrine, que, du fond même de l'Asie, évêques et fidèles le consultaient dans leurs doutes et leurs dimcuités. Toutes ses décisions étaient accueillies comme des oracles. Chacun de ses ouvrages était salué dans l'Eglise comme l'annonce d'un triomphe assuré pour la vérité. On conçoit que sous un tel guide la communauté chrétienne de Lyon ait pris rapidement son essor, qu'elle soit devenue pour les contrées voisines une pépinière d'apôtres, un foyer lumineux d'où la flamme évangélique se répandit bientôt dans toutes les directions. En effet, cette précieuse inftuence, favorisée par l'importance de la cité et par l'étendue de ses relations commerciales, se fit puissamment sentir. On voit l'illus-
tre Irénée vivement préoccupé chs moyens d'étendre la foi au loin, de hâter la conversion des peuples galloromains. La moisson était abondante, et les ouvriers manquaient. !) s'appliqua à en former. Il fonda cette célèbre école de Lyon, si féconde en docteurs et en ministres de l'Evangile.
Mais en attendant, Irénée dut tourner ses vues et ses espérances du côté de l'Orient. fit appel à l'ardent prosélytisme des églises d'Asie. Il écrivit à ce sujet à l'évêque de Smyrne. La demande d'Irénée fut favorablement accueillie. Vers t66, cinquième année du règne de Marc-Aurèle, une seconde mission partait de Smyrne, apportant à nos contrées encore païennes, avec le Hambeau de l'Evangile, le bienfait de la véritable civilisation. Elle était composée des prêtres Andoche et Bénigne, du diacre Thyrse et du sousdiacre Andéol, tous disciples de saint Polycarpe, évêque de Smyrne, comme saint Pothin et Irénée lui-même. Cette mission est rapportée par saint Jérôme, Eusèbe, Adon, Usuard, Notker, et d'autres. Elle est mentionnée dans d'anciens bréviaires des églises de Lyon, de Dijon, d'Autun, de Langres, de Vienne, de Paris, etc., et dans le Martyrologe romain. De nos jours encore, la liturgie de l'antique église de Smyrne en garde précieusement le souvenir.
Parti de Smyrne, le vaisseau qui portait les nouveaux missionnaires vint prendre terre à Marseille, d'où ils se rendirent directement à Lyon. On ne sait s'ils y prolongèrent longtemps leur séjour, soit pour aider l'évêque dans son ministère, soit pour achever de se former à l'école du célèbre docteur. Ce qui paraît plus certain, c'est qu'ils avaient quitté Lyon déjà depuis longtemps,
lorsqu'éclata la terrible persécution qui couvrit cette Eglise de sang et de ruines. Sans songer à se séparer, Bénigne, Andoche, et le diacre Thyrse, prirent leur route au nord, et allèrent jeter les fondements de t'Egtiseéduenne (!). D'après les actes de ces saints apôtres, étant prêts à partir pour cette destination, ils allaient même mener le sous-diacre Andéol avec eux, quand un ange vint les avertir qu'il fallait diriger Andéol sur Carpentras, pour y prêcher l'Evangile. « Cette ville, ajoutent les actes, renfermait alors une population considérable, mélange de diverses nations mais aujourd'hui (c'est-à-dire à l'époque où furent rédigés ces actes) on n'y voit que de grandes ruines et quelques traces de ses vieilles fondations (2) ». Andéol, prenant donc une direction contraire, descendit le cours du Rhône, pour évangéliser Carpentras, le Tricastin, l'Helvie (aujourd'hui le Vivarais), et d'autres régions situées sur les deux rives du fleuve.
Quelques mots résument l'histoire de la prédication de saint Andéol. Pendant plusieurs années, il parcourut nos contrées, annonçant Jésus-Christ, catéchisant et baptisant les peuples, au milieu de privations, de fatigues, de périls, et de travaux incroyables. Ce n'est pas seulement Carpentras qui fut évangélisé par le saint apôtre il semble même que ce but, qui était d'abord capital dans son œuvre apostolique, n'ait jamais été atteint, puisque les actes nous disent qu'il se disposait à pousser jusqu'à cette ville, lorsqu'il fut surpris par la persécution et couronné par le martyre. Mais le (t) Bénigne fut martyrisé à Dijon vers l'an 179; Andoche et Thyrse le furent à Sauheu, près d'Autun, avant l'année 2iy.
(2) Voir Pièces ;t<!r~<tMï, n' 3.
Tricastin avait déjà été le théâtre de son zèle. En effet, comme le dit avec raison M. Auguste Paradis, « par l'empressement des populations à venir l'entendre )) te jour même de son arrivée, « par la rapidité avec laquelle se formèrent les rassemblements, il est facile de conjecturer que l'apôtre était déjà connu, qu'il avait déjà évangélisé ces pays, qu'il y avait des prosélytes, qu'il avait pu les informer de son passage. En un mot, quoique les actes ne mentionnent que cette dernière prédication et les détails de ces derniers jours de la vie du saint, il ressort de l'ensemble du contexte, de la sympathie des peuples, de l'intervention de Tullie, etc., et des traditions établies à Carpentras, à Camaret, à Orgon, etc., qu'Andéol ne faisait pas sa première apparition en ce pays ». Ce judicieux auteur assure même que « saint Andéol, pendant quarante ans, a évangélisé les bords du Rhône et de ses affluents, le Gier, la Drôme, l'Ardèche, la Durance, etc. ». Quoi qu'il en soit des détails de son œuvre sainte, un édit contre les chrétiens avait été lancé par l'empereur Septime Sévère, quand celui-ci trouva Andéol prêchant vers les confins du Tricastin et de l'Helvie, à Bergoïata, sur la rive gauche du Rhône. Mais, avant de poursuivre le récit si attachant des derniers travaux et des suprêmes luttes de l'apôtre, il importe de prendre une connaissance exacte des lieux qui en furent le théâtre.
Sous le nom de Bergoiata ou Bergo,'ates (t), on dési(') On lit ~cr~oMfM dans les actes de saint Andéo); B~rg-o~Mf~, et ~rg'o~fM, dans le cartulaire de la dotauon de la cathédrale de Viviers; Burg-Mi~ dans un dtpiôme de Charles-le-Chauve de 877; J3«r~< dans la charte de fondation du prieuré de Saint-Ruf en tuo
gnait alors, tout à la fois, un municipe très populeux, situé en partie dans le Tricastin et en partie dans l'Helvie, et le district ou territoire qui en dépendait ~y~'c/H~ B/r~Aj/ Il y avait là une ville galloromaine composée de deux agglomérations bien distinctes, séparées par le fleuve, mais portant le même nom et régies par la même administration urbaine. Ainsi il y avait le Bergoiata de la rive gauche et le Bergoiata de la rive droite, qu'on distinguait par ces mots Haut ou Bas, Ber~-oM/~ Bgrgo/a~ supenor, Ber~o/a~ /noy-. Les limites du district embrassaient, avec le territoire actuel de la commune de Bourg-SaintAndéol, toute la partie de la plaine qui lui fait face de l'autre côté du Rhône. Nous retrouvons des indices de cette circonscription sur la carte de Cassini, qui, quoique à tort, attribue à l'ancien diocèse de Viviers cette longue et étroite bande de territoire de la rive gauche, qui est comprise entre l'embouchure de la rivière de Berre et la pointe extrême de t'îte SaintMarcel, appelée autrefois l'île Formigère (insula For/H'ca/ C'est ce que M. Rouchier a fort bien remarqué (i).
La position respective de ces deux parties de la ville de Bergoiata est facile à déterminer. Le cartulaire de la dotation de l'église de Viviers contient un document du vn° siècle qui nous renseigne de la manière la plus précise sur ce point. H nous apprend qu'Alcime, et son épouse Macédonia, sœur de saint Aule, offrirent en don à saint Vincent, pour la dotation de la cathédrale de Viviers, leur villa de Cousignac (2), avec toutes ses
(f)~i;fo;)'e.M~'t~r<!t'p.i83.
(2) Notre-Dame-de-Cousignac, paroisse supprimée, près et au nord de Bourg-Saint-Andéol.
appartenances, depuis la rivière de Berre (i) jusqu'au ruisseau d'Oson, la moitié du domaine de Bel (2), et une île du Rhône appelée l'Argentière, qui est située dans le Tricastin, vers le haut Bergoïata (3). Cassini, dans sa carte, indique où étaient Cousignac, la Berre et Avec ce texte, on voit que le Haut-Bergoïata éta;t bâti sur la rive gauche du fleuve, et un peu avancé au nord-est par rapport à la ville de la rive droite. De là son nom de Bergoïata supérieur. Entre les deux, du sein des flots, s'élevait l'île d'Argentière, qu'un diplôme de Charles-le-Chauve nous représente tendant pour ainsi dire la main, d'un côté, au Bergoïata le haut, et de l'autre, au bourg de la rive droite, qui commençait alors à échanger son vieux nom celtique contre celui de Saint-Andéo! ~/ujr/a ~a~c/M/H ~dëo/M~. Pour la facilité des communications, chaque ville avait son port sur le Rhône, dont Charles-le-Chauve confirma en 8~ la possession à t'évéque de Viviers (~). L'"ne et l'autre étaient traversées par une voie romaine. Sur la rive gauche du fleuve passait la grande voie Domitienne restaurée par Agrippa, à laquelle se rattachait le HautBergoïata sur la rive droite passait la route de Lyon à Narbonne, laquelle desservait le Bas-Bergo'hta. Mais, quand même les documents que nous venons d'interroger ne nous auraient rien appris sur ces deux centres de population, il sunirait, pour établir leur (i) Ad ~y~r!'< Rtvière de Berre, dont l'embouchure est en face de Cousignac, de l'autre côté du Rhône.
(2) Domaine de Bel, situé sur la rive gauche du fleuve. (3) L'ite d'ArgenUère et Bergofata-te-Haut. – Voir un extrait de la dotation de l'église de Viviers, aux Pièces justificat., n* g. (4) Voir fi~cc~~Mf~~t., n' 20
importance relative vers la fin du n° siècle, de faire attention aux débris de monuments antiques qui en restent à Bourg-Saint-Andéol et dans la plaine située de l'autre côté du Rhône.
Sur la rive gauche, si on se contente de jeter un coup d'oeil rapide, on n'apercevra aucun vestige sérieux de la ville ancienne. Les guérets et la verdure ont eu le temps de recouvrir ce qui reste de ses ruines. Mais qu'on fouille le sol jusqu'à une certaine profondeur, et aussitôt apparaît une quantité de substructions. On exhume des mosaïques, des sarcophages, des armes, des inscriptions, des tronçons de colonne, etc !t y a trente à quarante ans, la surface elle-même de la terre était jonchée de débris antiques, de morceaux de tuiles ou de briques, de poteries, de marbres de toute espèce, blanc, noir, jaune, cipolin, brèche rose, brèche violette, vert antique, réduits en fragments. Aujourd'hui, c'està peine si on y ramasse quelques fragments de tuile. Tout a été peu à peu enlevé, porté et broyé comme remblai sur les chemins voisins. Voilà comment ont disparu ces témoins naguère irrécusables de lointaines splendeurs.
Des deux agglomérations, celle de la rive gauche paraît avoir été d'abord la plus considérable. Elle avait sur le Rhône un port commode et sûr. Elle était munie d'entrepôts spacieux. Centre de l'activité, du commerce et de l'industrie, cité des travailleurs et du petit peuple elle semble avoir eu les prédilections d'Andéol, qui en avait fait sa résidence, le siège de sa prédication. L'autre, au contraire, plus éloignée du tumulte et du mouvement, dut être le séjour préféré des riches et des prêtres voués au culte de jupiter, de Mars et de Mithra.
Nous dirons plus loin dans quelles circonstances la première perdit son importance au profit de la seconde et finit par disparaître.
En attendant, était donc à Bergoïata-te-Haut, celui du Tricastin, qu'Andéol était descendu en arrivant C'est là qu'il prêchait l'Evangile avec un succès aussi consolant que merveilleux. Sur ces entrefaites, l'empereur Septime Sévère, traversait les Gautes. 11 se rendait en Bretagne, où il allait soumettre les tribus sauvages de la Catédonie. On sait qu'il devait mourir à York le 4 février n t.
Or, en se dirigeant sur Valence, il vint à Bergoïata-le-Haut et y campa avec une partie de ses troupes ()). Mais, au moment de l'arrivée de ce prince, il y avait en ce'Heu un concours extraordinaire de peuple. La foule se pressait autour d'un personnage qui discourait en publie. Tout entière sous le charme de cette parole apostolique, elle jetait à peine un regard distrait sur le spectacle imposant des légions romaines marchant, enseignes déployées, sous les ordres de l'empereur. Piqué dans sa curiosité et peut-être aussi dans son orgueil, Sévère demanda la cause du rassemblement Terrible fut la colère de César, en apprenant que l'orateur qui attirait ainsi l'attention et les sympathies du peuple, n'était autre qu'un chef de chrétiens, propageant en plein jour la doctrine du crucifié. Sur le champ il ordonna qu'on se saisit d'Andéol et qu'on l'amenât devant lui.
Ses ordres sont exécutés. Un tribunal est dressé. Tout auprès sont étalés tes instruments ordinaires de
()) Voir aux f)~cM;tM<ca<,n''?.
2° <Én!E. XL)t[* VCHtME. – '9'9-
la torture. Au milieu de ce terrible appareil, Sévère siège en personne. Lui-mème d'un ton de menace interroge Andéol sur son pays, son nom, l'objet de sa mission. « L'Orient est ma patrie, répond l'apôtre, je suis venu de Smyrne, envoyé avec d'autres, qui sont mes pères et mes maîtres par l'évêque de cette ville, pour prêcher la parole de Dieu aux gentils et annoncer l'arrivée de Jésus-Christ notre Dieu et Seigneur à ceux qui l'ignorent. Quant à mon nom, si vous voulez le savoir, je m'appelle Andéol. Tu es donc venu. s'écrie le tyran, pour deshonorer nos dieux et fouler aux pieds les édits des empereurs Songes-tu bien à la sévérité des châtiments qui t'attendent, toi et les malheureux que tu séduis r o.
Prenant ensuite un air et un ton de douceur affectée, l'empereur exhorte Andéol à abandonner ses idées chimériques et à ne pas exposer sa personne à la rigueur des tourments. Qu'il abandonne une secte impie et offre de l'encens aux dieux, il pourra vivre heureux et jouir d'un doux repos. On le gratifiera de l'une des fonctions les plus honorables du palais. On le comblera de distinctions et de richesses, que lui assure la munificence impériale.
« Prête donc l'oreille à mes conseils, ajoute l'empereur, laisse ta cette religion que tu professes, laquelle a été.inventée par un certain Christ que j'ignore et qui a été crucifié, dit-on, en la prêchant Maudis ce Christ, et rends hommage aux dIeux immortels. « Je n'adore qu'un Dieu, réplique Andéol, le Dieu unique et véritable, qui a créé le ciel et la terre. Pour vos stupides divinités, César, je les méprise. Ce ne sont que des idoles sourdes est muettes, fabriquées par la main des hommes, et que le démon vous persuade d'adorer D.
Irrité de la hardiesse de ce langage, l'empereur ordonne qu'Andéol soit livré à la torture. Alors se renouvelle une des scènes accoutumées de la sanglante tragédie à laquelle le monde païen assistait depuis la naissance du christianisme. Le signal du supplice est donné. Andéol est couché à terre. Ses mains et ses pieds sont liés à des cordes qu'on détend ensuite avec de violentes secousses au moyen d'arcs et de poulies. Au milieu de cette affreuse tension, qui rend tous les nerfs "du corps humain semblables aux cordes d'un instrument de musique, le saint confesseur est rudement battu de verges armées de piquants et de pointes de fer. Puis, on lui déchire la chair avec des ongles rougies au feu. Puis, ce corps sanglant et meurtri est attachée à une roue élevée au-dessus d'un brasier dans lequel on verse l'huile à flots pour activer l'ardeur des flammes.
Du haut de cette roue embrasée, comme sur un lit de repos, Andéol, tranquille et le visage radieux, levait les yeux au ciel et priait. « Soyez béni, mon Dieu, disait-il. Je vous rends grâce, Seigneur Jésus, qui m'accordez de souffrir pour votre nom. Ne m'abandonnez pas dans ce suprême combat. Faites, au contraire, qu'y persévérant avec une constance inébranlable, je mérite de me présenter devant votre Majesté avec la palme du vainqueur ». On l'entendit aussi faire .cette touchante invocation « 0 saint Polycarpe, mon bienheureux maître, vous l'ami du Christ, qui brillez au ciel comme une pierre précieuse, priez pour votre serviteur afin qu'il soit muni de patience et de courage, et que vous puissiez triompher avec joie de votre doctrine et de ma victoire dans le Seigneur ».
En effet, le courage du saint martyr semblait renaître à mesure qu'on multipliait les tourments. Les bourreaux étaient lassés la fureur de Sévère, désespérée, mais non vaincue l'empereur voulant réserver Andéol à de nouveaux supplices pour le lendemain, il ordonna qu'on le conduisît en prison. Alors Céricius, tribun d'une des légions de l'armée, proposa à Sévère de renfermer le chrétien dans un caveau du temple dédié au dieu Mars sur l'autre rive du Rhône. Amener ainsi, chargé de chaînes, l'ennemi des dieux jusque dans ce sanctuaire était une sorte de réparation qui toucherait le cœur des immortels et les rendrait propices. Le superstitieux césar applaudit à cette idée. Du reste, le fleuve est une barrière à interposer entre l'apôtre, dont l'influence est à redouter, et ce peuple trop sympathique pour Andéol. Celui-ci est donc enfermé dans le caveau souterrain dit temple de Mars, à Bergoïata-le-Bas.
Or, vers le milieu de la nuit, les gardes d'Andéol voient tout-à-coup des rayons de lumière briller à travers les portes de sa prison. Tout l'intérieur du caveau en est illuminé. Puis des voix d'une ravissante douceur se font entendre. Un colloque mystérieux s'établit entre Andéol et d'invisibles personnages. Ils parlent des combats du martyr et de la gloire qui l'attend. & Bon courage, frère chéri, disent ces voix, demain vous recevrez la couronne du martyre. Parcourez jusqu'au bout la sanglante carrière. Le Christ lui-même vous recevra en triomphe, décoré de la palme du martyre dans la gloire du paradis ».
Andéol, de son côté, exprime à ses célestes visiteurs la joie qui inonde son âme. Il les remercie du baume
qu'ils ont répandu sur ses souffrances, et les prie pour que l'exemple de sa patience dans la lutte suprême achève la conversion des gentils à la foi. Un concert d'une délicieuse harmonie succède à ces discours. Les voix semblent monter dans les airs, s'affaiblir graduellement et se perdre dans le lointain. Le silence et l'obscurité se font de nouveau dans la prison. La vision céleste a disparu mais, lorsqu'on vient, par l'ordre de Sévère, tirer l'apôtre de la prison, toutes les plaies qui, la veille, couvraient son corps sont cicatrisées et entièrement guéries. Andéol semble avoir recouvré les forces et l'énergie de sa jeunesse.
Le farouche empereur, ayant appris de l'un des gardes les détails de la vision nocturne, jura, par le 'dieu Mars et par ses victoires, qu'il saurait empêcher le magicien de séduire plus longtemps les peuples et de ruiner la puissance de ses dieux. 11 se hâta de prononcer la sentence de mort, et ordonna qu'elle fût exécutée en sa présence. A l'instant, on prit le saint apôtre et on l'embarqua pour le reporter à Bergoïatale-Haut, où un soldat, armé d'une épée de bois très dur, lui partagea la tête en forme de croix. Ainsi consomma son martyre, le i°r mai de l'an 208, selon l'opinion la plus commune, le bienheureux sous-diacre Andéol. Sévère, dont le fanatisme trouvait encore à s'exercer jusque sur les membres inanimés du saint martyr, fit lier le corps avec une chaîne de fer à laquelle était suspendue une énorme pierre, et jeter le tout dans le Rhône. 11 fallait qu'ensevelis sous les flots, les rentes vénéiés d'Andéol échappassent aux honneurs que leur réservait la piété des fidèles. Mais Dieu veille sur les ossements de ses saints La providence éclata à l'égard
de ceux de notre saint Apôtre. Avant de quitter sa prison, Andéol avait demandé au Seigneur de reposer, après sa mort, dans le lieu où la gloire de Dieu et de ses anges l'avait visité. Dieu, pour exaucer son fidèle serviteur, se plut à multiplier les prodiges.
La lourde chaîne enroulée autour du corps mutilé d'Andéol devait par son poids l'entraîner au fond du fleuve. Elle se rompit d'elle-même et disparut seule sous les eaux. Le saint corps, soutenu et dirigé par un bras invisible, prit sa route à travers les flots rapides, coupant le courant du fleuve en ligne droite. Arrivé au bord, il fut soulevé par une vague et porté à une distance d'environ deux toises sur le rivage. Depuis cinq jours, il était là exposé au injures de l'air, sans montrer la moindre trace de corruption, protégé par une vertu mystérieuse qui commandait le respect aux bêtes et aux oiseaux de proie. Chaque nuit, assurait-on, des chants et des sons, harmonieux et doux comme ceux d'une mélodie céleste, s'étaient fait entendre, et l'on avait vu briller une lumière qui entourait le saint corps d'une auréole éclatante. Le bruit de ces merveilles vint aux oreilles d'une dame riche et noble, nommée Tullie. Elle se rendait le même jour à une villa qu'elle possédait aux environs de Bergoïta et qu'elle était en train d'embellir. En suivant la voie publique, elle trouva une foule d'hommes que la nouveauté du spectacle avait attirés et qui était debout autour du corps. Elle fit arrêter son char et apprit des spectateurs les détails que nous venons de rapporter. Etant chrétienne, elle résolut de donner une sépulture honorable aux restes du saint martyr, mais elle n'osa confier à personne l'exécution de son dessein. Elle vint ellemême, accompagnée de ses esclaves les plus sûrs, et pro'
fitant de l'obscurité de la nuit, elle enleva le corps et le déposa dans un sarcophage païen qu'elle fit enterrer, au même endroit, à une grande profondeur, afin de soustraire la précieuse dépouille à la fureur des persécuteurs. Les reliques de saint Andéol ayant demeuré ainsi cachées, quand la paix de l'Eglise fut assurée par Constantin, les fidèles voulurent du moins perpétuer par de pieux monuments le souvenir des scènes que nous venons de décrire. Sur les ruines du temple de Mars, au-dessus de la crypte souterraine où Andéol avait été enfermé, ils bâtirent une église dédiée à saint Polycarpe. Sur le lieu même du martyre, ils dressèrent un tronçon de colonne antique, et ce monument si simple a traversé les siècles, connu jusqu'en ces derniers temps sous le nom de SaintPilon. Chaque année, au jour de la fête de Saint-Andéol on voyait accourir des populations entières qui venaient raviver leur foi au contact de cette terre arrosée du sang du saint Apôtre.
La mémoire elle-même de ce saint était particulièrement vivante, quand en 858 l'invention de ses reliques vint combler de joie les fidèles de la région. Elle fournit aussi à deux religieux de l'abbaye de St-Germain-desPrès l'occasion de divulguer de plus en plus son nom, sa sainteté et ses miracles. L'un de ces religieux était le célèbre Usuard, auteur du Martyrologe qui porte son nom l'autre s'appelait Aimoin. Ils avaient été députés par leurs communautés pour aller en Espagne chercher le corps de saint Vincent. patron du monastère. En y allant, ils avaient passé à Viviers. Cette église était une des premières en France qui eussent adopté pour titulaire le bienheureux diacre de Saragosse elle possédait de précieux fragments de ses reliques. Les religieux pou-
vaient y trouver des renseignements sur l'objet de leur mission A leur retour d'Espagne, ils passèrent encore par Viviers. Cette fois, ils y arrivèrent au moment où venait d'avoir lieu l'invention de saint Andéol. Usuard et son compagnon voulurent payer un tribut d'hommage au saint martyr. Ils se rendirent à Bergoïata, où le tombeau avait été retrouvé. Après avoir satisfait leur dévotion, ils achevèrent leur course, emportant, comme un précieux trésor, une partie des reliques de saint Andéol qu'ils avaient obtenue de Bernoin évêque de Viviers. La concession faite à ces religieux et à leur abbaye s'explique facilement par la dévotion qu'avaient au saint sous-diacre les religieux de Saint-Germain-desPrés. En effet, l'an 558, sur le conseil de saint Germain évêque de Paris, le roi Childebert fonda dans cette ville, en l'honneur de saint Andéol, une chapelle qui fut soumise à l'abbaye de Saint-Vincent, plus tard de Saint-Germaindes-Prés. Dans la suite, cette chapelle devint une église paroissiale elle prit le titre de Saint-Martin-des-Arcs, mais er. continuant de reconnaître saint Andéol pour son principal patron.
Toutefois, la partie de beaucoup la plus considérable du corps de saint Andéol, ce corps lui-mème dans son ensemble, fut laissé dans le sarcophage qui contenait les saintes reliques depuis six siècles et demi. Mais l'évêque Bernoin, qui avait découvert ce précieux trésor, le fit déposer dans l'église qu'il venait de faire bâtir à Bergoïata-le Bas(i) et qu'il avait dédié à saint Etienne ou simultanément à saint Etienne et à saint Jean. (1) Des actes de saint Andéol et le martyrologe d'Adon appellent ce lieu Gentibus. Dans une longue et savante note Hist. du Vivarais, I, p. 184-6, M Rouchier. nous dit ce qu'il faut penser de cette appellation.
Ce dépôt fut suivi de nombreux miracles et eut pour conséquence une affluence extrêmement considérable de peuple dans la nouvelle église, dès lors appelée du nom de saint Andéol. Ce nom lui-mème fut peu à peu donné à la ville, qui a fini par s'appeler le Bourg-SaintAndéol. Le sarcophage en question existe encore. Il est placé sous le maître autel de l'église dont nous venons de parler et qui sert actuellement d'églibe paroissiale au Bourg.
Mais remontons à l'époque où notre saint confessa si glorieusement la foi en Jésus-Christ.
Au lieu d'être ébranlée par la persécution de Sévère, l'Eglise fondée par le glorieux apôtre puisa dans le sang de celui-ci un surcroît de vie et de fécondité. A peine le calme lui était-il rendu qu'elle vit surgir de zélés continuateurs de l'oeuvre de saint Andéol. On ne peut douter que plusieurs missionnaires, dont les noms ne sont plus écrits qu'au ciel, n'aient été, bientôt après sa glorieuse mort, envoyés à Bergoiata-le-Haut, à Bergoiata-le-Bas, et dans tout le voisinage. C'est sous le successeur même de Sévère, sous le trop célèbre empereur Caracalla, lequel régna de 211 à 217, que nous trouvons à l'œuvre non bien loin de Bergoiata de nouveaux disciples de saint Irénée. Ce sont les bienheureux Félix, Fortunat et Achillée, que l'illustre docteur avait dirigés sur les traces mêmes de saint Andéol, pour achever la conversion des peuples riverains du Rhône et de la ville de Valence en particulier. L'eflort de leur zèle apostolique, les fruits de leur prédication, ne se renfermèrent certainement pas dans l'enceinte de cette ville les -localités environnantes, la
plaine qui s'étend au midi de celle-ci, en ressentirent les effets consolants (i).
Loisque le bienheureux Félix et ses compagnons remportèrent la palme du martyre, vers l'an 212, les communautés chrétiennes de notre région, devenues très nombreuses, étaient sur le point de recevoir une organisation définitive. Pour passer de l'état de simple mission à celui d'église régulière, il fallait qu'elles eussent à leur tête un évêque, premier pasteur du troupeau, qui établirait dans son sein un gouvernement stable et y perpétuerait le sacerdoce. Or, cet évêque, pour la contrée tricastine, vint fixer son siège à Augusta Tricastinorum, chef-lieu de la cité.
Ainsi faisaient les Apôtres et leurs successeurs. C'était dans les principales villes, dans les métropoles et les cités qu'ils fondaient les sièges épiscopaux. Là ils trouvaient un auditoire rassemblé d'avance, ainsi qu'un centre d'action pour propager rapidement leurs doctrines au dehors. En outre, n'y avait-il pas quelque chose de providentiel dans la disposition des chefs de l'Eglise à asseoir ainsi à côté du pouvoir civil le siège de l'autorité religieuse ? Le christianisme s'établissait comme tuteur auprès de la puissance romaine décrépite et chancelante, en attendant que, celle-ci croulant sous les coups des barbares, l'Eglise eût à lui substituer son autorité pour le salut des peuples. (1) Bolland., Act. Sanctor. Maii, I, 35, 755 (3*, 35-6, 2*); cf. VII, 525 (3°, 517) – J. Columbi Opusc. Var, pp 177-8 et 202-3. L'abbé RoucmtR, tlist. du Vivarais, l, pp. 173-99, 351-7, 366, 4735î6, 604-5. – Nadal, Hist. hagtol. du dioc. de Valence, pp. 1 36. B. HAUREAU, Gall. Christ., XVI, col 538-40, 548. Mirabel. SaintAndeol et bon culte, passim PARADIS, dans Bullet. d'hist. eccles des dioc de Valence. 9" année, n° supplém., pp. 1-19; 12* année, n» supplém., pp. 1-21. MAZON, Revue du Vivaran, t. I, pp. 507-18.
Nous ignorons l'année de la fondation du siège d'Augusla Tricastinotuin. Les plus anciens catalogues, tant manuscrits qu'imprimés, de nos prélats tricastins n'en donnent guère, pour les premiers du moins, que des noms sans date et sans détails. Il est, du reste, fort possible qu'ils ne soient pas complets. Mais, tels quels, ils sont notre unique ressource pour ces premiers évèques. Ils constituent la véritable tradition diocésaine du moyen âge, du moins la plus ancienne qui soit arrivée jusqu'à nous. Ils concordent d'ailleurs parfaitement avec ce que nous avons dit de la mission de saint Andéol, de la marche et des progrès de la religion dans notre région. Ils concordent également bien avec toutes les notions sérieuses et tous les documents précis et certains dont nous disposons à partir de l'épiscopat de saint Paul, patron du diocèse. Or, autant que l'absence de date pour les premiers évêques figurant dans ces catalogues ou listes permet de le dire, le siège de l'évèché qui nous occupe aura été fondé vers le milieu du me siècle. Voilà, du reste, l'époque à laquelle au sang versé par saint Andéol une cinquantaine d'années plus tôt, et probablement par d'autres martyrs, dont les noms ne sont écrits qu'au ciel, vint se joindre le sang d'un pontife de la cité même de Vienne. En effet, au milieu du 111e siècle, l'Eglise de Vienne avait pour évêque saint Lupicin. Des historiens de cette Eglise nous disent que ce saint évêque, sans s'effrayer de la tempête soulevée par la persécution de l'empereur Aurélien, se mit en chemin pour visiter sa province en qualité de métropolitain. Ils ajoutent que, comme il était à Augusta des Tricastins, ville de la province des Romains, il fut arrêté~e~h
vertu de l'édit de l'empereur, et eut la tête tranchée le 14 décembre de l'année 277.
L'hagiologe pontifical viennois et deux chroniques de l'Eglise de Vienne, sans dire le motif qui avait conduit Lupicin à la ville de Trois-Châteaux, nous assurent que ce pontife vécut au temps de Valérien, de Gallien et de Claude, qu'il reçut du pape Corneille une lettre qui l'encourageait au martyre, et qu'il eut la tête tranchée pour la foi à Augusta des Tricastins (Augusta Tricastinorum). D'autre part, saint Adon, dans sa Chronique, place Lupicin sur le siège de Vienne à la même époque il dit que sa vie fut illustre. Il ne parle pas de son martyre (1) mais, aux yeux de qui a lu le contexte, cette omission n'infirme pas le surplus de rensei gnements donné par les autres historiens. Du reste, en 1468, Etienne Genevès, évêque de Saint-Paul, trouvait dans les masures de l'ancienne église de NotreDame des Plans, située dans la partie méridionale de son diocèse, des reliques dont la présence en ce lieu tend à confirmer le récit de l'hagiologe et des chroniques anonymes de Vienne. En effet, à côté d'autres reliques, notamment de celles de saint Paul, évêque de Trois-Chàteaux (2), on en trouva de celles de saint Lupicin, évêque, et de ses compagnons martyrs (3), termes qui semblent prouver que saint Lupicin eut des compagnons dans son martyre (4).
(1) Adonis chronxcon, edn. Basileœ, 1 568, p. i3i, U. CHEVALIER. Hagiol. Vienn p. 12; Fundat. sanctce TJienn. ecclesits, p. i5; Chrome. Antiitit. "Vietin. p. 20. Mauplrtuy, Histoire de la sainte Eglise de "Vienne, p. i3. Boyer, Hist. cit., p. 4.
(2) « .Item, ianeti Pauli episcopi Tricastinensis. ».
(3) « ..Item, sancti Lupicini episcopi soctorumque e]us martirum. ». (4) Arch. de la Drôtne, Cartul. de Saint-Paul, B, ff. b4 et 93.
Parlons maintenant des évêques de Trois-Châteaux. Le premier qui ait occupé ce siège épiscopal est saint Sulpice, sanctus Sulpicius episcopus (i). Ce pontife et ses premiers successeurs eurent sans doute un ministère bien laborieux dans ses commencements, et, s'ils firent avancer l'œuvre de Dieu, ce fut avec lenteur à travers les contradictions et des obstacles de tout genre. Augusta Tricaatinorum était une ville de plaisirs et de luxe. Les faveurs d'Auguste et la domination romaine lui avaient donné, avec le développement et la richesse, la facilité des mœurs et les raffinements dans l'art des jouissances. En d'autres termes, cette ville avait tous les vices brillants d'une civilisation corruptrice. elle se les était appropriés par une longue et douce habitude. Quoi d'étonnant, alors qu'elle repoussât l'austère pureté de la morale évangélique ? D'un autre côté, le christianisme, en s'implantant dans la Gaule, s'était trouvé en présence du peuple le plus religieux du monde selon César, le plus susperstitieux selon Pomponius Méla. Il eut à combattre contre le druidisme, qui, quoique proscrit, conservait dans les âmes de profondes racines. Quelle transformation il fallait dans les idées, les sentiments et les habitudes
(t) Nous avons parlé plus haut d'une invasion de l'allemand Chrocus vers le milieu du III' siècle. Sans revenir ici sur ce qui a eté dit d'un renversement d' Augusta T> ica tmotum en cette occasion, nous devons avant d'aller plus loin, fane observer que le Père Boyer qui, dans son Histoire, n'avait pas parlé d'éveque des Tricastins du nom de Juste, en introduit un de ce nom dans ces Additions, d'après des notes de Polycarpe de la Rivière. Il en fait un saint martyr, mort sous les coups de Chrocus, vers 262. Mais nous n'osons l'admettre sur la foi trop douteuse de ces notes. Le lecteur pourra, du reste, voir au n» 17 des Notes et eclaiicissements, l'explication des raisons de cette exclusion.
des masses, pour que l'Eglise triomphante pût planter la croix sur les dolmens Mais la plus forte résistance lui vint de la religion officielle.
Le vieux polythéisme romain, en se greffant sur la superstition gauloise, y avait puisé comme une sève et une vie nouvelle. Aussi luttait-il avec un incroyable acharnement contre l'envahissement des doctrines chrétiennes. Il multipliait les obstacles, surtout les persécutions, en proportion des progrès de la religion de Jésus-Christ. Une preuve de cette lutte désespérée, des suprêmes efforts du paganisme aux abois, pour ressaisir son antique influence sur nos contrées, c'est l'alliance qu'on voit s'établir alors entre la religion officielle et certains cultes étrangers à peine tolérés jusque-là. Il fallait réunir toutes les forces du polythéisme en face d'un menaçant remplacement de l'erreur et du vice par la vérité évangélique et les vertus chrétiennes. Il fallait que le culte du dieu persan Mithra, introduit dans nos contrées pour mettre quelque nouveauté et quelque attrait au milieu des divinités païennes tombant de vétusté et de mépris, allât jusqu'à faire des emprunts aux doctrines et aux cérémonies chrétiennes. Il fallait qu'il copiât de son mieux, du moins dans ce qu'elle a d'extérieur et de facile, cette religion rivale, dont il enviait le victorieux ascendant. Ainsi, on retrouvait parmi ses pratiques une sorte de baptême pour la purification des péchés, une onction d'huile sainte rappelant la confirmation, deux ordres de sacrifices, l'un sanglant, reproduisant ceux de la loi juive, l'autre se bornant à une oblation de pain et de vin qui rappelait l'Eucharistie.
Les docteurs chrétiens signalaient ces imitations aux
fidèles de ce temps. Ils n'étaient pas sans inquiétude devant des ressemblances qui pouvaient amener des rivalités ou plutôt des confusions dangereuses. Mais aussi ne manquaient-ils pas de relever ce que ces imitations avaient de force probante en faveur de la vérité chrétienne et des institutions et remèdes apportés par Jésus-Christ au monde pour sa régénération spirituelle et morale. Il est vraiment intéressant de lire dans Origène, Tertullien, saint Jérôme, Firmicus Maternus, et d'autres auteurs ecclésiastiques des troisième et quatrième siècles, ce qu'ils ont écrit sur ce sujet. Du reste, l'éclat si pur que jetait déjà dans le monde la doctrine évangélique forçait les païens à rougir de leurs doctrines absurdes et de leurs abominables pratiques. La vérité, par sa propre vertu, se dégageait de l'alliage étranger qu'on lui mêlait pour l'obscurcir. Désormais rien ne pouvait arrêter l'élan qui portait les âmes vers le christianisme. Les cruelles persécutions qui mirent comme sur la croix pendant près de trois siècles J'Eglise du divin crucifié ne firent qu'en prouver la divinité et en multiplier les enfants. Elle ne sortit des catacombes que quand l'empire fut chrétien. Dès lors, la victoire de Constantin et l'édit de Milan, proclamant la liberté religieuse, n'eurent plus qu'à assurer le calme profond dont chaque communauté allait profiter pour perfectionner son gouvernement intérieur, purifier les temples païens affectés au culte du vrai Dieu et bâtir des basiliques nouvelles. C'est dans ce travail d'organisation que plusieurs des évêques ÛAugusta Tricastinorutn passèrent les années de leur épiscopat. On ne peut affirmer rien de plus, faute de documents sur cette partie de notre histoire.
Les premiers fidèles écrivaient peu ils veillaient avec plus de soin à transmettre à la postérité chrétienne l'héritage de leurs vertus qu'à rédiger les annales de leur vie, souvent héroïque, et des événements contemporains. Ainsi l'Eglise tricastine a cru avoir assez fait pour la mémoire de ses premiers pontifes en inscrivant leurs noms dans ses diptyques, et en leur décernant, comme une auréole de gloire, le titre de saint, qu'ils méritaient par leurs vertus et leurs travaux.
Tout porte à croire que c'est sur ces dyptiques, qu'a été copiée la plus ancienne des listes de nos prélats, laquelle porte en tête le nom de saint Sulpice, évêque, sans aucune autre indication.
Toutefois, ce souvenir n'est pas le seul que nous ayons de cet évêque. « Sa fête, dit le Père Boyer, est marquée » au 24 décembre « dans l'ancien bréviaire » du diocèse de Saint-Paul et M. le chanoine Chevalier nous apprend aussi que saint Sulpice était honoré le 24 décembre.
Dans le mandement placé en tête du Propre qu'il publia en 1758, Monseigneur de Lambert a mis quelques lignes qu'il y a lieu de traduire ici.
« Outre les saints évêques dont nous venons de parler, il y a, au nombre des saints, neuf pontifes qu'on nous apprend avoir occupé le siège épiscopal de TroisChâteaux. Mais il y en a plusieurs d'entre eux en l'honneur desquels il n'existe aucun office, savoir, les saints Sulpice, Boniface, Maximin, Castorin et Michel, quoique dans l'antique calendrier, de l'Eglise tricastine, au 24 décembre, il soit fait mention de saint Sulpice, évêque, avec ses compagnons. Aussi avons-nous jugé bon d'instituer une fête avec office propre à célébrer
chaque année sous le rit double de seconde classe, le dimanche après l'octave de la fête de la Toussaint, afin que, par l'intercession de ces Saints qui nous ont prêché la parole de Dieu et des autres, quels qu'ils soient, de ce diocèse, nous obtenions plus facilement la conservation et l'augmentation de la foi. Mais pour exciter la piété des fidèles, à tous ceux qui, s'étant confessés, auront communié ce jour-là et prié pour la conservation et l'augmentation de la foi, nous accordons 40 jours de vraie indulgence selon la forme habituelle de l'Eglise. De plus, le même jour, en chaque église paroissiale le Très Saint-Sacrement de l'Eucharistie sera exposé et on bénira solennellement le peuple avec cet adorable Sacrement s.
Effectivement, le Propre imprimé en 1758 contient, pour le jour susdit, un office tout au propre pour le but indiqué, avec une rubrique en prescrivant le transfert au dimanche suivant, dans le cas où le dimanche après l'octave de la Toussaint tomberait le i 1 novembre, jour de saint Martin. Les neufs leçons sont entièrement de l'Ecriture ou de saint Augustin. C'est apparemment le caractère un peu générique de cet office, qui a le plus contribué à priver les saints qui en sont le sujet, d'un office particulier et nominatif dans nos propres de 1853 et de 1885.
Le Père Boyer dit qu' « il y avait autrefois une église bâtie en son honneur (St-Sulpice) dans le palais des évêques qui fut détruit par les calvinistes ». C'est sans doute du luminaire de cette église qu'il est question dans un tarif rédigé vers 1200, où nous trouvons cet article « Chaque année, de la fête de saint Nicolas à la Quinquagésime, tout corroyeur venant au
2' sérii xi m" voiume. – 1909 14
marché de la ville de Trois-Châteaux donne pour une fois six deniers pour le luminaire de Saint-Sulpice, et tout cordonnier quatre deniers pour le même luminaire. Cela s'entend des corroyeurs étrangers comme de ceux de la ville, et le gourou ils payent cela, ils sont quittes de la lollade des cuirs et des souliers (i) ».
Il y avait encore une église de Saint-Sulpice « dans le château de Toronne » ou Théronne, près du village de Clansayes. Un acte de l'an 12o6 nous apprend qu'elle avait été démolie longtemps auparavant, et que Bertrand Hugonis, qui en était chapelain, la fit rebâtir, y fit construire deux autels, et pria Bertrand de Pierrelate, évêque de Saint-Paul, « de consacrer le maîtreautel à l'honneur de saint Sulpice », II nous apprend, en outre, que cet évêque, ne pouvant faire la consécration, s'adressa pour cela à Bertrand de Durfort, évêque de Cavaillon, et que, afin que les chapelains qui posséderaient cette église à l'avenir pussent vivre, il leur donna quatre saumées de pur froment à titre de cense annuelle qu'ils viendraient recevoir en paix dans la maison épiscopale. II leur donna encore la quinzième partie d'une vigne qui relevait de sa seigneurie et que Bertrand Hugonis avait acquise à cette église, ce que Gaucerand, successeur du prélat dans l'évêché de Saint-Paul, approuva, y ajoutant même une cense annuelle de quatre sols viennois qu'il avait « acquise de Giraud de Rac, pour la somme de cinquante sols viennois », et l'affectant au luminaire et aux autres (1) BOYER, Htst. Cit., p. g. U. Chevjlieh, Répert. des sources hist.. bio-bibhogr., col. 2,1 38. – Arch. de la Drôme, Cai'tul. de Saint-Paul, A, f. 179. Officia propria sanctor. eccles. Tricastm. (1758), pp. 5-6 et 61-9.
fournitures de cette église. Enfin, le io avril 1465, l'évêque et divers ecclésiastiques, revenant de SaintRestitut à Saint-Paul, déposèrent la tête de saint Restitut au château appelé aulrefois Torone, dans la chapelle de Saini-Sulpice de ce château, dédiée à l'évêque de TroisChâteaux de ce nom de bonne mémoire, sur l'autel. En 171 l, il ne restait déjà plus aucun vestige de cette église ou chapelle (1).
Après saint Sulpice, l'ancien catalogue de nos prélats, et, d'après Peiresc, l'ancienne Gallia, Chorier, le Père Boyer dans son Histoire, et la nouvelle Gallia, placent un évoque nommé Eusèbe et qualifié de saint. Le Père Boyer note en marge comme époque de son arrivée à l'épiscopat l'année 302, et raconte ainsi sa vie d'après l'ancien bréviaire de Saint- Paill « Eusèbe était français de nation, on ne sçait pas de quelle province ses parents étaient très nobles. Il receut de Dieu par leur organe une bonne âme comme un autre Salomon ils eurent soin de le faire instruire dans la science du salut et des lettres dès ses plus tendres années. Il y fit des progrès extraordinaires dans peu de temps, parce qu'il fuyait avec soin les plaisirs, quoy qu'innocents, de cet âge. La charité qui doit faire le caractère d'un bon pasteur paraissait dans luy avec un éclat singulier, et elle fut le présage et la cause de son élévation au souverain sacerdoce car, un jour qu'il avait écouté les plaintes des pauvres, qu'il les avait consolés dans leurs afflictions et assisté dans leurs besoins, il fut tout d'un coup proclamé évêque par le consentement mutuels du peuple et du clergé.
(1) Bo\eh, Hist. cit., pp. 9, io, i83 et 363.
« Il fut doué d'une rare prudence, et sa vie était si sainte, qu'on ne faisait point de difficulté de le comparer aux Apôtres. Comme eux, il prêcha sans relâche la parole de Dieu, et il eut la consolation et la gloire de porter dans la patrie éternelle au double le talent que le Seigneur luy avait confié. Il fut un prélat digne de l'admiration de Dieu, des anges et des hommes, pour sa piété, pour sa douceur, pour sa tendresse à l'égard de tout le monde, pour ses aumônes, par son éloquence et par son zèle, ce qui faisait qu'on ne pouvait l'entendre dans ses prédications sans être touché. Il fut évêque pendant environ trente-sept ou trente-huit ans. Sa feste se solemnise dans l'église de Saint-Paul-Trois-Châteaux, le 23 du mois de mars (i) ». Le Propre du diocèse de Saint-Paul publié en [627 confirme en ce dernier point les paroles du Père Boyer (2).
Les livres liturgiques de Saint-Paul montrent d'autre part que jusqu'à la Révolution française de 1793 on a fait dans ce diocèse la « fête de saint Eusèbe, évêque de Trois-Châteaux et confesseur », le 25 mars, et le Répertoire de M. Ulysse Chevalier mentionne ainsi le saint prélat « Saint Eusèbe, évêque de Saint-PaulTrois-Châteaux au IV. siècle, honoré le 23 mars. Le Père Boyer a donné dans ses Additions des détails sur un Eusèbe, évêque de Gaule, qu'il identifie avec notre saint Eusèbe. Cette identification l'amène à reporter ce dernier au ve siècle mais, l'identification même nous paraissant impossible, nous ne pouvons (1) Histoire, pp. io-ii. i.
(2) C'est sans doute par inadvertance que le nouveau Galha (t. I, col, 708) dit, à ce sujet, de l'évêque Eusèbe I1, vivant au vi* siècle, ce qui ne peut manifestement convenir qu'à saint Eusèbe.
joindre ces détails postérieurs aux notions biographiques données ci-dessus. Nous ne pouvons donc que laisser notre saint Eusèbe au rang que nous lui avons donné (i), et passer saint Torquat ^on successeur. 11 est vrai que Boyer a cru devoir ajouter, dans ses Additions et avant saint Torquat, trois évêques qu'il appelle Antlsius, saint Maxime et Julien (2); mais les documents qu'il invoque pour cela méritent si peu de créance, que nous n'hésitons pas à laisser ces nouveaux évêques de côté (3). Passons donc de suite à saint Torquat.
L'ancienne liste des prélats tricastins, celle de Peirese, et à sa suite l'ancienne Gallia et Chorier, donnent saint Torquat comme successeur de saint Eusèbe Ier, et le Père Boyer, dans son Histoire, affirme qu'il lui succéda en 338.
Sa fête, dit notre historien, « est marquée dans l'ancien bréviaire de l'église de Saint-Paul, dans les offices propres qu'on a fait imprimer depuis peu, et dans le bréviaire de l'église de Viviers, le 5 1 janvier. Mais tout l'office y est pris du Commun » sauf les antiennes du Magni ficat aux premières et aux secondes vêpres, ainsi que celle du Benedictus, lesquelles, ajoute le Père Boyer, sont en vers hexamètres et de l'ancienne façon », et pourraient se « traduire en vers français ainsi
De toutes les vertus faire un riche collier,
C'est ce que fit Torquat, ce noble chevalier,
Dès qu'il fut élevé sur le trône de gloire,
II ne fit jamais rien qui noircit son histoire,
(1) Voir Notes et écclairciss., n° 18.
(2) Additions, p. 4-7.
(3) Voir Notes et eclairciss., n* ig.
Et, servant de modèle aux états différents,
11 fut la loi du peuple et la gloire des grands.
Avec les affligés il fut plein de tendresse,
Sobre en ses repas, prodigue en ses largesses.
Plus brillant en vertus qu'un soleil lumineux,
11 quitte enfin la terre et s'en va dans les cieux.
Sauf ce que nous aurons a en dire encore dans la biographie de saint Paul, son successeur immédiat, on est réduit à ajouter avec le Père Boyer, au sujet de notre saint Torquat « Le détail de sa sainte vie et de ses miracles nous est caché par la négligence des écrivains, ou plutôt par la malice des hérétiques calvinistes qui enlevèrent son corps du monastère de Cruas, en Vivarais, où il attendoit la résurrection, et qui le jettèrent dans le feu avec tous les papiers de cette abbaye (i) »,
Mais cette hypothèse d'une Vie ou relation des Actes de saint Torquat, laquelle aurait ensuite disparu, n'est pas simplement gratuite. Pareille œuvre a existé, comme le montre le chapitre trois de la Vie de saint Paul, successeur de saint Torquat (2). Le savant éditeur de cette dernière Vie en a fait l'observation mais il termine en disant qu'on ne sait maintenant où prendre cette Vie de saint Torquat (3).
Boyer ajoute que l'on ignore la durée du pontificat de ce saint. « Il y a cepenJant, dit-il, quelque apparence qu'il mourut en 371 ou 372, après y avoir vécu trente-trois ou trente-quatre ans (4) ».
(1; Histoire, pp. 11-12.
(̃2) Voir dans Vita S. Paul, (Pièces justifiait., n' 5, et Analect. Bolland., t. Xt, pp. 344 et 377), les mots rit relatto gestortim narrât. (3) « Non improbabile est haec gesta fuisse vitam quamdam sancti Torquati, quae nunc latet » (Analecta Bolland., t. XI, p. 374, note 7). (4) Additions, p. 12.
(A suivre.) ABBÉ FILLET
La Bibliothèque de Valence
La question du prêt des livres à la bibliothèque de Valence, actuellement à l'étude, a provoqué des recherches, dont voici le résultat
Louis XI avait fondé en 1452, une université dans notre ville et les mérites de ses professeurs. à différentes époques, la rendirent grandement prospère. Une bibliothèque lui fut adjointe dès l'origine et en 1812, elle fut transférée à Grenoble et attribuée à l'école de droit où les livres restèrent sans catalogue et sans emploi jusqu'en 1832. Vers cette date, Valence réclama ses livres et en obtint la restitution. Le 29 juin 1834, le nouvel établissement s'ouvrit au public pour la première fois, et depuis lors, son utilité lui a valu un grand développement. Toutefois, l'absence de catalogue s'opposait à la conservation des livres et aux recherches un peu sérieuses. Vers 1860, sur la proposition de M. Marc-Aurel, conseiller municipal, un ttavail méthodique, mis à la disposition des lecteurs, facilita l'étude des questions utiles. Deux fois, depuis lors, il a fallu îevoir cette œuvre de vulgarisation et les prêts arbitraires menacent à cette heure, d'en ruiner la base et les profits. Deux principes sont en présence le prêt libre et le prêt limité, sous la surveillance d'un comité impartial et éclairé. Le prêt libre se trouve lui même revendiqué à la fois par les membres de l'enseignement et par la population. Comment donner satisfaction aux uns et aux autres ? Là est le problème. Des mémoires imprimés en 1826, constatent les différences d'idées, selon les époques, et la nouveauté de celle qui devait réunir sous une seule et même administration, avec des revenus communs tous les foyers d'enseignement public.
L'Université impériale remonte à 1806 et un décret du Il décembre 1808, lui attribua tous lesbiens et rentes des prytanées français, des universités, académies et collèges non aliénés ou affectés par un décret spécial à un service public Un arrêté préfectoral du 9 août 1809^ mit donc à la disposition de l'Université impériale une petite maison renfermant une bibliothèque et quelques meubles, un bâtiment ou salle d'étude et un petit jardin contigu, près de la place des Clercs, où se trouvaient des jeux de Paume à l'origine.
En 18 12, l'Université de Grenoble manifesta l'intention de vendre les anciens bâtiments de l'Université de notre ville et en réclama les livres, avec invitation de faire connaitre ses droits. Le procès engagé alors se termina par un jugement du 4 août 1826 qui réintégra Valence dans la propriété des bâtiments affectés autrefois aux exercices de l'Université et enjoignit à celle de Grenoble de rendre les meubles et les livres que l'arrêté préfectoral du 29 août 1809 lui avait attribués.
Au moment où la ville va racheter l'immeuble Dumas, pour créer une place, la question en elle-même présente seulement un intérêt historique mais elle prouve aussi les droits de la ville sur la bibliothèque et la persistance des idées absolutistes que l'université actuelle conserve intactes.
Tout à côté des établissements d'instruction publique, il s'est formé une école de bons simaritains, sous le nom de Société savante, qui depuis plus de 42 ans a tenu droit et ferme le drapeau de la libre discussion et de l'étude indépendante de notre histoire locale. Pourquoi cette phalange d'hommes instruits et dévoués serait-elle sacrifiée aujourd'ici au profit d'une seule classe d'emprunteurs, dont le nombre rendra impossible toute lecture à la bibliothèque même.
La question se pose actuellement devant l'opinion publique, pour nous et le public, et nous ne doutons pas de sa justice et de sa bienveillance.
Un bibliophile indépendant.
NÉCROLOGIES
M. Antoine JEAN Louis, VICOMTE de
TARDY DE MONTRAVEL.
Le i e' mars courant, un nombre considérable de parents, d'amis et de compatriotes, rendait les derniers devoirs au regretté défunt. Sa famille avait jadis une demeure à Valence, Grand'Rue, ancienne maison Colomb, où ses armes sculptées se voient encore elle s'établit plus tard à Thueyts (Ardèche), où ses qualités brillantes, sa bienveillance et sa générosité, lui concilièrent l'affection des habitants, comme ses recherches historiques lui valurent l'estime des érudits et des lettrés. Il était membre de plusieurs sociétés savantes de France et d'Italie, et sa mort a causé chez toutes d'unanimes regrets. La semaine 1 eligieuse du diocese de Viviers, du 19 mars, nous annonce que cet homme de foi, de sens et d'honneur, laisse des manuscrits qui sont de véritables trésors d'érudition et d'mestimables matériaux pour les historiens futurs du pays. Nous espérons donc avec elle qu'ils ne seront pas perdus. M. NUGUES (ALPHONSE),
VICE-PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ d'ArCHÉOLOGIE DE LA DROME. Une nouvelle perte nous est annoncée au dernier moment celle d'un ami et d'un confrère dévoué, instruit et bienveillant, musicien habile et dessinateur d'un talent réel. Il avait réuni en album toutes les anciennes maisons de Romans, sa ville
natale, et nous ignorons la destinée de ce travail curieux et vraiment archéologique.
Il publia dans le Bulletin, en 1874 et en 1877, des Notes sur l'église de St-Barnard et, en 1875 une autre note sur les cloches de l'horloge de Jacquemard en t888, une étude sur le trésor de Chatuzange avec dessins, en 1894, un compte rendu de l'ouvrage intitulé les Cathédrales de la iégion en 1899, des notes sur les fêtes publiques à Romans, et en 1900 sur une mosaïque découverte à St-Paul-lès-Romans, malheureusement sans valeur artistique.
Le regretté défunt compte parmi ses ancêtres 1" ClaudePierre Nugues, chef de bataillon de la 32e demi-brigade, tué le 28 juillet 1 799, à Aboukir, a 29 ans 2° Louis-Antoine, d'abord capitaine à l'armée du Rhin, et ensuite commandant de la garde nationale de Romans, né en 1773 et décédé en 1 888 3° SaintCyr, lieutenant-général, pair de France, directeur du personnel au ministère de la guerre, nommé chevalier en 1810, et baron de l'Empire en 181 1, décédé à Vichy, en 1842, sans avoir été marié 40 Saint-Cyr Louis, neveu du précédent, né en 18 19, qui devint général de brigade, commandeur de la Légion d'honneur, chef du ,cabinet du ministre de la guerre en 1878, et commandant du département de Seine-et-Oise et de la place de Versailles de 1870 à 1882, décédé le 29 mai 1900, a Chanos-Curson où sa famille possédait depuis 1760 la maison forte de Bouvier.
Malgré cette honorable parenté militaire, notre cher confrère se livra par goût à l'étude des Beaux-Arts et de l'Archéologie où il était passé maître. Toujours avenant et d'une conversation spirituelle, il était recherché dans les salons où son esprit et son savoir le faisaient remarquer. Sa mort causera un grand vide à Romans et dans la Société d'Archéologie où il jouissait de l'estime et de l'affection de tous. Il était né en 1824; ses funérailles ont eu lieu le 27 du courant et la Société l'ignorait, A. LACROIX.
SÉANCE D U 11 FÉVRIER 1909
PRÉSIDENCE DE MGR BELLET.
Sur la présentation de Messieurs Brun-Durand et Bellet, sont proclamés membres de la Société M. Henri Sonieh LA Boissièhe, de Tournon, comme titulaire et M. LABRELY, du Bourg-St-Andéol, comme correspondant.
Ces réceptions nouvelles, jointes à celles antérieures de MM. Passas, Auguste, négociant à Tain, et de M. Berger, ingénieur des arts et manufactures, à Crest, prouvent que nos aimables voisins du Bourg-St-Andéol, de Tournon, de Tain et de Crest s'intéressent à nos travaux et veulent s'associer à nos efforts incessants de faire connaître et aimer la Drôme et l'Ardèche. Qu'ils soient les bienvenus. Lecture est donnée d'une circulaire de M. le ministre de l'Instruction Publique, concernant le Congrès des sociétés savantes, qui se réunira cette année à Rennes
Des lettres d'excuses de MM. Brun-Durand et Mellier de ne pouvoir assister à la séance à cause du mauvais temps D'une lettre de M. Bizot, conservateur du Musée et de la Bibliothèque de Vienne, relative au compte-rendu de l'inauguration du monument élevé eu l'honneur de M. Auguste Allmer, le savant épigraphiste qui fut notre collaborateur dévoué.
La Société décide qu'une somme de 50 francs sera affectée à cet acte de reconnaissance.
M. Blanchard, professeur de Géographie alpine, à Grenoble, demande l'envoi gratuit du Bulletin de notre Société à l'Institut géographique, récemment fondé par l'Université, mais a cause de l'échange de ce Bulletin avec toutes les sociétés savantes de la même ville, la Société regrette de ne pouvoir à cet heure faire droit à cette demande. D'après une lettre de M. Lucien Gap, notre érudit confrère, l'inscription milliaire, qui se trouvait naguère dans un bois voisin de St-Paul-trois-Chàteaux, n'a pas été acquise par le musée Calvet, d'Avignon, et l'on ignore dans cette ville, ce qu'elle est devenue.
A. LACROIX.
CHRONIQUE
OUVRAGLS REÇUS DU MINISTÈRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE Bulletin histoiique et philologique du comité des travaux histor iques et scientifiques, année 1908, nO' 1 et 2
Testaments de l' offîcialité de Besançon, 726; 50; par Ulysse Robert. Tome Il.
Bulletin du même comité. Section des sciences économiques et sociales. II publie le compte rendu du Congrès des Sociétés savantes de 1907, tenu à Montpellier.
Romania, janvier 1909, 1 vol. in-8°, 179 pp.
Mémoires de la Société royale des antiquaires du Nord, igo-j. Mémoires et documents publiés par la Société d'Histoire et d'Archéologie de Genève. Tome VII, livr. 3™% Ed. Chapinat. Le commerce et l'industrie française à Genève, pendant la domination française. (ijg8-r8ij) Tome XXXI, livre ier, E Demole. Numismatique. Ed. L. Burnet. Essai sur la chronologie en usage dans les chartes du diocèse de Genève au xne siècle, volume in-8".
Une description de Valence remontant à 1650, et conservée à la fois dans les archives de l'évêché et dans celles du chapitre de Bourg-lès-Valence, place le Palais impérial ancien, rue de l'Herberie et nous apprend, qu'il devint la caserne SaintAntoine et plus tard l'Hôtel de ville.
La presse locale rappelle la mort, à Haguenau (Bas-Rhin), le to octobre 1869, du général Corréard (Frédéric), grand officier de la Légion d'Honneur, né à Poyols, le g septembre 178g. Engagé volontaire à 18 ans, il fit les campagnes d'Autriche, de France et d'Espagne, se distingua en Afrique, et commanda la subdivision de l'Isère jusqu'en 1849.
Le souvenir de ce vieux brave mérite d'être conservé dans notre département où les services militaires sont toujours honorés à juste titre.
La Société d'agriculture, sciences et arts d'Angers, nous donne le Cattulaire noir de la cathédrale de cette ville, reconstitué et publié par le chanoine Urseau et la Société archéologique et historique de la Charente, nous fait connaitre à l'aide d'un album de dix photographies, et de quelques planches de détails, et d'un travail consciencieux du R. P. Camille de la Croix, le théâtre gallo-romains des Bouchaud, dans la commune de St-Gibandeaux, à vingt kilomètres d'Angoulême et à deux deRouillac, chef-lieu de canton de la Charente. Dans V (Académie de Vaucluse, M. Joseph Sautel nous expose avec détails curieux, ses recherches sur le Pays de Vaison avant l'histoire. Nous avons reçu le tirage à part de ce travail intéressant où l'auteur a recueilli les renseignements fournis par M. Morel et par le Bulletin de notre société sur le Serre des Huguenots à Mirabel et sur les instruments en bronze et en fer découverts dans le voisinage de Vaison. Grâce à ce travail préliminaire, l'histoire de Vaison, sous les Gaulois et les Romains se trouve heureusement préparée et nous aimons à croire que le succès couronnera l'œuvre de M. Sautel.
Parmi les Sociétés savantes de la région, celle des Etudes provenciales consacre une notice à M. Ferdinand Belin, nommé inspecteur d'Académie à Valence, le 18 octobre 1873, qui passa de là à Nancy, Toulouse, Marseille et Aix c'est là que
s'est terminée sa vaillante carrière d'historien et d'administrateur, le 27 octobre 1908.
Breton d'origine, il fit preuve d'une intelligence clairvoyante et avisée; sa probité scrupuleuse en histoire, apparaissait aussi dans ses actes administratifs « Aucune considération ni de situation, ni de personne, n'était capable de le faire dévier du droit chemin rien au monde n'eût pu l'empêcher de suivre ce qu'il croyait être la vérité et la justice. » Là se trouve l'explication naturelle des sentiments affectueux que cet homme de bien inspirait.
La Société de Statistique de Marseille, dans le TÇepei loi) e de ses travaux en 1906 et 1907, consacre aussi quelques pages émues à la mémoire de M. Paul de Faucher, un de nos anciens collègues et amis, M. Emile Perrier nous rappelle d'abord les œuvres historiques du cher défunt il nous fait connaître ensuite l'homme religieux, bienveillant, charitable, dévoué à toutes les grandes causes, bibliophile de valeur, collectionneur éclairé, et il termine ainsi son éloge « La mémoire de Paul « de Faucher ne périra pas: ce n'est pas uniquement le groupe « austère des érudits qui la gardera fidèlement elle sera chère « a ses concitoyens au milieu desquels il a voulu reposer, à « tout ami fervent de nos traditions, à tout bon provençal », et nous pouvons ajouter « à tout bon Dauphinois et à tout bon Français. »
Dans cet ordre d'idées il convient aussi de rappeler la mémoire du commandant Poize, de Montélimar, qui pendant le sac d'un couvent italien 1796 97, sauva les religieuses de l'insulte, et le couvent du pillage et de l'incendie. Leurs familles offrirent plus tard un million au courageux soldat; il le refusa, et unit de la sorte le désintéressement au courage dont il avait fait preuve, seul au milieu de l'émeute jusqu'à l'arrivée de ses frères d'armes. (Extrait des Mémoires d'une sœur de charité). Conférences littéraires. L'âme française, par l'abbé Hector Reynaud.
L'auteur qui a profondément étudié notre littérature nationale, était parfaitement préparé à soutenir devant un public d'élite une thèse si bien française et il l'a fait avec son talent oratoire si apprécié.
Geschicte der fanzille Marson von Richard Maisson. Frankfurt 1900, un volume in-40, de 89 pages.
La famille de l'auteur ayant quitté la vallée de la Gervanne pour échapper à la persécution religieuse au xvme siècle s'établit en Suisse et en Allemagne, où elle est parvenue à de hautes positions sociales. Ses compatriotes de France seront heureux d'apprendre les détails de son histoire intime et d'applaudir à sa destinée.
A. Lacroix.
I,e Sacrêhire-Gt-rant A. LACUOIX.
Le Tramway
DE
Valence à Pont-en-Royans
(Suite. – Voir la 169e livraison)
IV. LES DAUPHINS DU VIENNOIS ET LES DAUPHINS DE FRANCE. (1)
Guigues VIII, fils de Jean II, n'eut pas le temps de rendre comme son père ses sujets heureux, étant décédé à 24 ans. D'ailleurs ses idées belliqueuses ne lui auraient pas permis de mener une vie tranquille et bienfaisante. Marié avec une fille du roi Philippe-le-Long, cette alliance accrut encore son amour de la gloire des armes. Il prit d'abord une part active à la bataille de Cassel en Flandre et guerroya ensuite plus près de lui avec les comtes de Savoie. Comme il avait assiégé un de leurs châteaux, celui de la Perrière, près de Voiron, et qu'il s'en était trop avancé, il fut blessé mortellement d'un coup de fauconneau, et mourut le 29 juillet 1332. Son frère Humbert II, lui succéda et, malgré tous les efforts du président de Valbonnais pour faire de lui un grand homme, son opinion n'a pas rallié tous les suffrages des historiens. Effectivement, l'acte le plus important de son règne se réduit presque à la vente de (1) Le Bulletin de la Société a donné, en 1866, la liste des uns et des autres, t. I, 297-211.
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ses Etats à Philippe de Valois, roi de France, pour 40,000 écus d'or et une rente annuelle de 10,000 livres. Ses idées de grandeur et l'inconstance de son caractère l'obligèrent à offrir à ses sujets, moyennant finance, la vente de privilèges étendus, alors qu'en pareilles matières on donne à pleines mains au profit de tous. Après une courte expédition en Orient, sous le nom de Croisade, il se trouva à la fin obligé de chercher un autre genre d'existence. Comme il avait perdu son fils unique en bas âge et Marie des Baux son épouse, et qu'il ne pouvait plus compter sur les dignités et les honneurs civils, il opta pour ceux de l'Eglise et devint patriarche d'Alexandrie, archevêque de Reims et évêque de Paris, ce qui ne l'empêcha pas de mourir, en 1354, sous l'habit dominicain. On lui doit le statut ou code delphinal, et la création d'un conseil politique et judiciaire qui dans la suite se transforma en parlement.
Charles de France, fils du duc de Normandie, en qualité d'héritier du Dauphin Humbert II, fut mis en possession de la province le 16 juillet 1350 et de la couronne royale en 1364, sous le nom de Charles V. Il va de soi que l'histoire "de Chabeuil est dès lors unie étroitement à celle du royaume et que les habitants deviennent des Français au lieu de rester simples vassaux d'un seigneur puissant. Jusqu'en 1G43, époque de la cession du duché de Valentinois aux princes de Monaco (1), et de 1643 à la Révolution, Chabeuil eut bien son histoire spéciale, intime, mais elle s'identifia avec l'histoire nationale, à partir notamment de Louis XI, qui habita le Dauphiné pendant dix ans, de 1446 à 1456. Or, à cause de l'absence d'archives locales un peu complètes, l'étude chronologique des événements particuliers
(1) Honoré de Grimaldi, prince de Monaco, reçut du roi LouisXIII en compensation de la perte de ses biens au royaume de Naples le duché pairie de Valentinois en 1642, et du roi Louis XIV, en août 16'i7, l.i aeigneurie de Chabeuil.
d'une ville oblige l'historien à n'aborder que des points spéciaux, importants sans doute, mais un peu généraux, et jusqu'ici moins connus, comme l'agriculture, l'industrie et le commerce, l'administration communale, financière et militaire, sans oublier l'instruction publique, les cultes et la bienfaisance.
I. Agriculture. – Sous les Dauphins, la vie pastorale n'exigeait aucun sacrifice au luxe ou au bien-être le contribuable n'avait à payer que les charges féodales, encore assez modérées vivant au milieu des bois et de ses troupeaux, il avait à se garantir seulement des intempéries et de la faim mais la culture des terres et la construction de maisons sans architecture obviaient à ces deux périls. Rien d'étonnant dès lors que les ordres religieux de Valence et de Léoncel eussent obtenu de bonne heure la permission de conduire leurs troupeaux comme les autres habitants dans les bois et les vastes jachères de la seigneurie. En 1205, Gontard de Chabeuil accordait ce privilège aux Hospitaliers et aux Templiers de Valence, installés à l'Abbaye, à la Ruelle et aux Rosiers les Cisterciens de Léoncel et les chanoines de Saint-Ruf, de Valence, les imitèrent, parce que l'alimentation publique et l'industrie de la tannerie favorisaient surtout la vie des bergers, un peu moins dure que celle des cultivateurs ordinaires. Cependant il y en avait un certain nombre, témoin les censes en grains dues aux Dauphins, seigneurs du lieu, révélées par les archives de l'Isère. Ainsi le compte du châtelain ou représentant du seigneur, en 1313, accuse pour les censes ou redevances des pâturages 79 livres, celles des laboureurs 90 setiers de blé et 17 d'avoine (1) en 1344, les transailles rapportaient 32 setiers de légumes. Il faut aussi mentionner la vigne qui rapportait 17 sommées de vin (2) et 98 livres d'argent pour
(1) La livre valait 20, 22 ou 25 sols, et le setier 7 décalitres La sétérée 34 ares, 29 centiares.
(2) La sommée, charge d'un âne équivalait à 2 setiers.
le ban-vin ou monopole de la vente du vin en gros et en détail attribué au seigneur, de la Toussaint à Noël. Les redevances comprenaient aussi 40 poules, 46 poulets, 27 lapins et une livre de cire, à la charge des tenanciers ou fermiers à long terme du seigneur, qui à ce titre recevait aussi des droits de péage et de leyde, sorte d'octroi, et le prix de la ferme des fours et des moulins, le produit des amendes, des lods dus en cas de vente et des plaids pour mutation de propriétaires. Tous ces revenus féodaux pourraient être aujourd'hui appréciés à leur valeur véritable, sans les autodafés de la Révolution qui ont causé, dans nos archives, des actes de vandalisme désastreux au possible.
L'industrie chez les bergers demeura, avec le commerce, très peu prospère pendant deux ou trois siècles, car les documents conservés indiquent seulement, en 1445, une rue des cuirateries ou tanneries; en 1515, des battoirs ou gauchoirs (foulons) pour les draps, et en 1609 des papetiers nommés Vial et Galley.
Quant au commerce, il fut longtemps entre les mains des Juifs et des Albigeois qui, de 1248 à 1451, achetaient et vendaient toutes sortes de marchandises et prêtaient de l'argent comme banquiers ou changeurs, ce qui de temps à autre les exposait à des vexations diverses et même à des massacres. Il. Administration communale. On a pu remarquer déjà dans les libertés de 1314 un silence absolu sur l'autorité municipale, déjà établie pourtant en beaucoup de localités depuis le mouvement d'émancipation de la fin du xin* siècle. A Chabeuil, les plus anciennes délibérations consulaires datent seulement de 1521, les comptes consulaires de 1439 et pièces justificatives de 1500. Les premiers administrateurs prenaient simplement le nom de syndics ou procureurs, et comme ils avaient une comptabilité sommaire et variable, elle n'a pas été conservée. Au contraire, la gestion des consuls ou conseillers, depuis la création de l'impôt foncier annuel, sous Charles VII et Louis XI, exigea une inter-
vention fréquente des administrateurs avec les habitants en 1428, c'est un envoi de l'argent de la taille à Grenoble en 1439, c'est l'équipement de quatre francs archers et la garde des portes, à cause de la contagion en 1459, c'est la visite des lépreux; en 1476, c'est le vote d'un subside delphinal de 247 florins; en I i92, c'est la toiture en ardoises du clocher de l'église de Saint-Andéol en 1496, c'est la garde du grand portail en 1498, c'est un emprunt aux Juifs de Valence par la communauté en 1500, c'est un procès contre les rats en 1550, c'est le pont sur la Véore (1) chaque année ce sont des charges nouvelles, sans parler des passages de nomades, lombards ou bohémiens, et des troupes allant en Italie ou en revenant sous Charles VIII, Louis XI, François I" et autres souverains en 1573, c'est le siège de la ville où périrent 120 hommes. Au xvn" siècle, le collège est fondé, et à partir de 1602, des représentations dramatiques avec décors, costumes et musiciens. Ainsi en 1602, la pièce intitulée Histoire de Bradamante, coûta 6 sols pour les barbes d'Aymon et de Charlemagne, 10 sols pour dorer la pomme de l'empereur, 5 écus et demi aux acteurs et musiciens. 20 sols aux deux hommes qui gardèrent, pendant la nuit, le théâtre et la tapisserie, total 11 écus 34 sols. Toutes les dépenses d'alors n'allaient pas cependant aux amusements publics, car il y en avaient de très lourdes pour l'armée, pour l'entretien des édifices publics etdes chemins, les gages des maîtres d'école et des professeurs du collège, les voyages, les procès, les intérêts dus aux créanciers, et le tout réuni formait chaque année un budget de quelque importance. Une cause peu connue de dépenses se trouvait aussi dans les changements successifs d'administrateurs que la vente des offices municipaux portait au pouvoir, et même à (1) II avait eté emporté par les eaux et fut reconstruit sous Henri IV, avec le produit d'un impôt sur le bétail de passage, détruit de nouveau pendant le xviir siècle, il fut relevé par M. de I^aui'encin, maire en 1830,
la suppression de ces offices, qu'une imposition suivait naturellement.Une courte énumération des vicissitudes nées de ce régime fiscal en Dauphiné va le faire connaître en mars 1634, les offices héréditaires de secrétaires-greffiers des communautés ouvrirent la voie, ils furent supprimés dans la suite et rétablis en 1690; cette même année furent établis les procureurs du roi chargés d'assister à toutes les assemblées générales et particulières des chefs de famille les maires parurent en 1692, furent supprimés en 1714 et 1717, et rétablis en 1733 et 1772 et pendant la révolution leurs lieutenants, créés en 1702, furent congédiés en 1714 et 1717 et rétablis en 1722 (1); les maires alternatifs et mi-triennaux leur succédèrent de 1706 à 1714. Les communes reçurent en 17331e pouvoir d'élire leurs maires et le perdirent en 1 706 et 1771. De pareilles fluctuations législatives n'altéraient pas seulement la dignité de l'autorité municipale, elles compromirent parfois les finances de Chabeuil et accrurent encore les dettes contractées au xvi" siècle pendant les troubles et les contributions militaires d'alors, au point qu'en 1658, d'après une brochure du temps « elles s'élevaient à cent huitante mille livres et qu'alors depuis huit années, il avait été imposé plus de trois cent mille livre »,ce qui, ajoute l'auteur, devait donner « de la compassion et de l'horreur ». Un mémoire, adressé en 1664 au parlement, faisait monter le passif de la commune à quatre vingt ou cent mille écus (2). Vers 1691, il y eut même une petite émeute et un grand procès suivi d'une condamnation aux galères, pour défendre des administrateurs injustement accusés. Quant aux épreu(1) En 1704, il fut imposé à Chabeuil 652 livres pour la nuance de l'office de lieutenant de maire. (Inventaire de la Drôme, E, 8658). Pour les offices, voir le Code municipal, en 2 vol in-12, imprimé à Grenoble.
(2) Le Bulletin de la Société en 18U7--J8, t. XXXI et XXXII a a fait connaître 1 histoire de la taille à propos de Claude Brosse- Brochure due à Palin, imprimée à Grenoble, chez A. Gales en 1(550, in-32.
ves supportées vaillamment aux xvie etxvn0 siècles, par nos pères, elles rendent un hommage flatteur à leur courage et à leur patriotisme.
III. Administration financière. -Avant 1349, les Dauphins recevaient, par l'entremise de leurs châtelains, d'ordi-'naire gentilshommes, leurs redevances féodales pour cession de terrains à l'origine, pour la ferme des moulins, des fours, du péage, du greffe de la cour de justice, des amendes, des lods et des plaids ou droits pour mutations foncières D'après leurs libertés les habitants ne payaient ni impôts, ni péage, ni leyde cependant Valbonnais nous apprend qu'Humbert II, pour avoir imposé une taille de 6 gros par feu ou famille, à cause de son voyage de Naples, à titre de cas impérial (I), en fit demander pardon en chaque paroisse. On sait que Charles VII ayant prescrit la levée de tailles annuelles et perpétuelles, le Dauphin Louis, son fils, après avoir réorganisé la justice et le service militaire en Dauphiné, s'efforça d'en justifier et d'en régulariser la levée dans la province qu'il gouverna dix ans. Il obtint, en 1449, un don gratuit ou secours de 1500 florins pour un château à construire à Romans; en 1451, un autre de 100 marcs d'argent pour la Dauphine, et en 1452, un autre de 300 écus payables par la noblesse et le tiers état. Or, à ces dates, sur les 1300 familles contribuables, celles-là seules qui avaient plus de 10 francs d'or de revenu étaient comptées et, en 1448, chaque famille ou chaque feu payait seulement 2 florins mais les exemptions, d'abord peu nombreuses, s'accrurent bien vite à mesure que le don gratuit augmentait. Il fallu donc établir des cadastres et une administration complète pour l'établir et le recueillir, étant devenu taille ou impôt foncier régulier ce fut une Chambre des comptes, ce furent des receveurs généraux et particuliers et des tribunaux pour (1) Les cas impériaux au nombre de 4 ou 6 comprenaient la rançon du seigneur, ses voyages à la cour, l'achat d'une seigneurie, le mariage d'une de ses filles, ele
juger les réclamations, comme la Cour des aides de Vienne et les Elections, au nombre de six d'abord et de trois ensuite (Romans, Valence et Montélimar) pour la Drome, et, à la suspension des états de la province, un inten'dant avec des subdélégués, tout en conservant le gouverneur de la province. Les rapports de tous ces nombreux fonctionnaires avec les communautés exigèrent forcément un concours efficace dû au devouement des consuls et des conseillers municipaux. Par conséquent, en réalité, l'administration municipale n'exista guère avant la création de l'impôt foncier. Les cadastres primitifs (compois ou papiers terriers), d'une rédaction à peu près semblable à celle des terriers des seigneurs ou livres de leurs redevances, sont aujourd'hui peu nombreux mais ceux de 1630, après la reconnaissance de la taille, existent encore, d'ordinaire sans aucun plan, dans presque toutes les archives communales. Dès le xve siècle, les fonds ecclésiastiques soumis à une imposition appelée décimes et votée par les assemblées du clergé, et les fonds nobles exempts de la taille, furentldistingués de ceux du tiers état mais, grâce à l'énergie de Claude Brosse, châtelain d'Anjou, l'impôt fut déclaré réel et non personnel en 1634. D'autre part, la capitation en 1690, le dixième du revenu en 1710, converti en vingtième en 1741, atteignirent un peu les deux ordres privilégiés jusqu'à la Révolution, A Chabeuil, les lançons ou totaux officiels de la taille de 1677 à 1789, varièrent de 8,771 livres à 12,408 livres; celui de la capitation de 1760 atteignit 4,568 livres; celui des impositions accessoires et celui du budget communal font défaut; mais le compte consulaire de 1781 accuse 14,700 livres de recettes et 15,399 de dépenses.
IV. Administration judiciaire. Les Dauphins nommaient, pour les représenter et gérer leurs finances, un châtelain appartenant souvent à de grandes familles de la province, et un juge qui avait pour supérieur le vibailli de St-Marcellin lequel remplaça le juge majeur du Viennois et du Valentinois.
Or, le greffe de ce tribunal comprenant ( les scellés, la notairie et la scriberie » fut adjugé 2,459 livres en 1529, et cette somme en prouve l'importance, il est vrai qu'à cette date, il prenait le nom de grande cour, dont les usages et les droits, sous le nom de style, furent imprimés à Tournon d'abord, chez Claude Michel, et en 1760 à Grenoble, chez Galles. M. Cyprien Perrossier, notre érudit collègue défunt, a décrit et analysé cette brochure rare dans le Bulletin de la Société, en 1897 (1). Comme tous les procès des habitants de la province, dont les contrats particuliers les avaient soumis à cette cour, appelée Conventions royaux, y venaient, elle avait acquis une importance assez grande pour avoir, en 1789, un président, un lieutenant, un substitut du procureur général, un greffier, un sergent, cinq avocats et cinq ou six notaires ou procureurs.
Il convient d'ajouter cependant que ce tribunal, d'abord siège royal ressortissant au parlement de Grenoble, devint au xvme siècle un siège ducal du ressort de la sénéchaussée de Valence.
V. Administration militaire. Si l'on en croit les chartes de 1 105 et de 1 115, de la famille Jarret de Chàteaudouble, le fort et les remparts de Chabeuil auraient existé dès cette époque, puisque l'un des membres de cette famille s'engagea, en recevant le fief de Charpenet, à défendre le seigneur de la ville dans son château s'il était assiégé. Au cas ou une erreur changerait cette date primitive, il est certain que ce vassal renouvela, en 1331 et en 1334 et même après, son premier engagement, et que Bertrand de Montmeyran, chevalier, eu prit en 1394 uu semblable à celui des Jarret. M. l'abbé Vincent croit aussi que l'évêque de Valence vint, en 1206, assiéger Gontard de Chabeuil dans sa ville. Mais une preuve plus certaine de l'existence de ses murs d'enceinte se tire de l'acte de 1314, contenant les libertés du lieu où il est parlé du vingtain.
(1) Tome XXXI, pages 277 et suivantes.
On voit dans Valbonnais que les villes et les châteaux, sous les Dauphins, étaient gardés par leurs vassaux sous les noms de guet ou garde de la place et d'eschalguet ou garde dans les tours ou galeries le long des murailles, et que le bailli commandait les troupes de son bailliage, sous la direction des maréchaux de l'armée, et les châtelains sous les ordres du bailli. Quant à l'entretien des murs d'enceinte il s'opérait à l'aide du vingtain ou vingtième partie de la récolte des grains et du vin (lj.
Le portail neuf, construit par Chapuis, moyennant 112 z florins en 1401, remonterait à l'invasion dans le Valentinois de Raymond de Turenne, ennemi du pape, de l'évêque de Valence et des Poitiers.
On manque de renseignements sur les guerres antérieures au xvie sièole qui exigèrent le concours des habitants de Chabeuil mais de 1562 à 1599 ils eurent à supporter des contributions sans nombre, des logements, des secours aux voisins, des envois de pionniers et jusqu'à trois sièges en sept ans, car à cette époque la guerre civile transformait la province en champ de bataille et plaçait chaque habitant sur un incessant quivive.
En 1658, de Gordes, lieutenant général en Dauphiné, s'étant emparé d'Etoile, dirigea ses troupes vers Chabeuil, occupés parcelles de Mirabel un des officiers de Montbrun, et s'en rendit maître.
A quelques années de là, en 1573, le même chef vint assiéger de nouveau la ville qui se défendit avec courage. Comme la résistance à ce capitaine habile et courageux ne pouvait durer longtemps, la place fut prise, les maisons livrées au pillage, l'incendie, la démolition de l'église et la ruine de l'ancien hôpital sur la rive droite de la Véore, marquèrent tristement cette seconde campagne. Montbrun fit réparer les brèches et repoussa de Menon et de Chatte-Geys-
(1) Le vingtain, d'après un arrêt du conseil delphinal de 1593, était établi pour la noblesse selon les facultés de chacun, Drôme, B, 3.
sans, qui étaient venus pour tenter d'empêcher ces travaux. De Gordes, au mois d'août, fut plus heureux, il prit Chabeuil d'assaut et y laissa le capitaine Peloux avec cent hommes. Il y eut, paraît-il, quelques rencontres sanglantes, puisque les archives locales mentionnent la sépulture « de cent-vingt « hommes tués le 4 juillet, quand les huguenauds entrèrent « dans la ville et que le lendemain, Mgr de Gordes la reprint « sur eulx », outre une dépense de 7 florins 7 sols pour aller à Crest demander au lieutenant général la conservation des murailles et une compagnie de cent hommes qui garderaient la ville, ce qui fut accordé (1), Une trêve de quelques semaines expira le 25 août et Montbrun recommença la guerre par la prise d'Allex. Il assiégea ensuite Chabeuil où le souvenir de la précédente campagne était resté vivant. Aussi la population se défendit-elle avec courage et résista assez longtemps pour obliger Montbrun à recourir à la trahison il gagna quelques lâches citoyens qui promirent de lui ouvrir les portes. Heureusement le capitaine Bouget, défenseur de la place, découvrit le complot et fit arrêter les traîtres. Chabeuil fut sauvé et Montvendre aussi, où com^mandait d'Allard. Là se bornent les événements militaires de cette année déplorable.
VI. Cultes. Instruction publique. – On ignore l'époque de la construction des églises de St-Jean et de St-Andéol, dont la démolition ne permet plus de constater l'architecture. La première dépendait de l'ordre de Cluny dès 1280 au moins, et fut ruinée au xvie siècle la seconde, dédiée à St-Andéol servit aux fidèles des deux anciennes paroisses jusqu'à la construction de l'éditice actuel. D'après une inscription connue, l'église St-Andéol aurait été rétablie en 1602 par un Soyans (2j dont l'identification n'est pas facile, la seigneurie (1) Inventatre de la Drôme VI, 8 (CC, il).
(2) Le mariage en 1616, d'Anne-Charlotte de Sauvain du Cheylard, avec Hector de La Tour-Montauban lit passer la seigneurie de Soyans à son mari, de la religion réformée tous les deux, mais on
de ce nom ayant appartenu seulement aux Sauvain et aux La Tour-du-Pin.
D'autres inscriptions mentionnées dans la Statistique de la. Drame rappelent, l'une en très beaux caractères gothiques la fondation, en 1604, de deux messes de morts par semaine et d'une chapelle par Jean de La Place, bourgeois de Chabeuil, et l'autre le tombeau d'un clerc de la paroisse dont le nom a disparu.
L'église de St-Andéol nécessita diverses réparations aux frais de la commune en 1573, en 1599 et en 1606. Son clocher, frappé par la foudre en 1606, avait ébranlé tout l'édifice, aussi menaçait-il ruine en 1686.
La population restée fidèle à ces anciennes croyances, une fois la paix rétablie, s'occupa de la création d'un collège et d'un couvent d'Ursulines pour l'instruction des deux sexes. Dès 1519, il y avait des écoles de garçons où les pauvres étaient admis gratuitement, et la rétribution mensuelle de 3 à 5 sols pour les autres. En 1599, Viennot prit le premier le titre de recteur du collège à 5 écus par mois et son successeur, en 1599, ne se qualifia plus que maître d'école ». Comme les Jésuites du collège de Tournon venaient parfois prêcher à Chabeuil et que Jean Reynaud, notaire et procureur à Chabeuil avait, en juillet 1601, légué tous ses biens aux pauvres à la charge d'affecter tous les ans une somme de 120 écus pour fonder un collège tenu par les Doctrinaires d'Avignon, institués par César de Bus, les consuls acquirent une maison sans retard et obtinrent un Doctrinaire pour diriger le nouvel établissement. On trouve dès lors les noms des régents et le montant de trouve cependant à Chabeuil, en 1603 et 1030, une dame de Chonas Marguerite de Bourges, créancière des consuls de Chabeuil d'une somme de 30o écus, comme cessionnaire d un nommé Laforet et cette dame était la mère d'Antoinette de Bourellon, de Mures, qui, en 1597, épousa Charles de La Tour-Gouvernel. C'est tout ce que révèlent les archives communales. CC, 32 et FF, 13.
leurs gages. En 1620, les Jésuites de Tournon s'installèrent au collège et furent remplacés en 1726, par les prêtres du St-Sacrement de Valence. D'après le traité conclu avec eux ils devaient enseigner le latin, de la sixième à la troisième classe, prêcher à la paroisse les jours de fêtes et donner aux consuls 10 setiers de blé pour aumône aux pauvres. Ce collège dura jusqu'à la Révolution et fut rétabli au xixe siècle par MM. Barjon et de Saulces (1).
César de Bus, qui avait secondé la création du collège de Chabeuil, favorisa également celle des Ursulines destinées à instruire les filles en envoyant à Chabeuil Marguerite Vigier, soeur du principal du collège.
De son côté Mme Chosson, née de Maleval, donna 500 liv., une prairie et un jardin pour l'établissement des religieuses et entra dans leur ordre. C'était en 1602 et leur maison, jusqu'alors prospère, fut fermée seulement le 24 décembre 1790. Le culte réformé dut exister à Chabeuil dès 1560 environ et les archives locales renferment, en 1575, des remontrances des habitants à de Gordes, au parlement et aux commis du pays contre l'établissement d'un prêche, à cause de son voisinage avec Valence et Romans (2).
Il resterait à mentionner les mesures prises pour la conservation de la santé publique et pour l'assistance des malheureux mais ces deux questions pourront être examinées avec d'autres dans un dernier article.
(1) Le Bulletm de la Societé a donné l'histoire de cet établissement (T. XXVI, p. 19).
(2) Inventaire sommaire, EE, 4.
(A suivre)
A. LACROIX.
Délibérations Consulaires
COMTÉ D'ALBON
DU
clé L708 Èi 174(3
(Suite. Voir les i68* et 169* livraisons)
« Du 1er may 1716, au lieu de Saint-Rambert d'Albon, par devant nous, Alphonse Assalin, sieur de Lagardette, conseiller, maire de la Comté d'Albon.
« A comparu messire Antoine Granjan, prêtre et curé de Saint-Rambert, disant qu'il a fait appeler tous les habitants de la paroisse possédant biens pour venir deslibérer sur ce que la dime, à luy abandonnée pour sa portion congrue, ne vaut pas, années communes, plus de cent quatre-vingts livres. Et qu'ainsy ils ayent à deslibérer pour l'avenir à faire le surplus jusques à la somme de 300 livres, suivant les ordonnances de &a Majesté. Sy mieux ils n'aiment luy abandonner la dime du bled noir et du chanvre payable à la même quotité que celle des autres grains, et s'est soussigné. « GnANJAN, curé.
« Sur quoi est comparu Me Nicolas Rey, notaire royal, secrétaire-greffier de la communauté de Sablon les autres s'étant retiré à l'exception de Louis Romanet, habitant de Saint-Rambert, d'Antoine Olller, habitant de Coynaud. « Lesquels ont dit que suivant les règles, les habitants
devaient estre assignés en personne pour assister à la présente assemblée; laquelle ils n'estiment pas que nous puissions ordonner autre chose si ce n'est en forme de remontrance, disant que la dime de Saint-Rambert vaut au-delà de 300 livres accordées par les règlements royaux. Et que d'ailleurs les précédents curés se sont toujours contentés de la dite dime dont jouit le sieur Granjan, ce qu'ils n'auraient fait si la dime ne les avait pas valu et le dit Rey s'est soussigné. « Rey. » « Et à l'instant sont comparus Jean Badet, Pierre Arnaud lequel en se retirant a dit que la dime excède en valeur les 300 livres et que si le curé l'arrante moins, c'est sa faute. Jean Chottan et Pierre Bertin adhèrent au-comparant du dit Rey et n'ont signé pour ne savoir.
« A comparu le sieur Granjan, curé, lequel a dit que si les formalités voulues n'ont pas esté faites, c'est la faute du consul, et qu'il n'est pas à propos dans cette assemblée d'examiner si la dime vaut plus ou moins de 300 livres. Sur quoi il demande qu'il puisse se pourvoir par devant qui de droit, et a demandé acte de tout et s'est soussigné. « Ghanjan, curé.
« Nous maire, avons ordonné que Me Granjan se pourvoira par devant qui il avisera pour luy estre fait droit sur ses réquisitions et avons octroyé acte et nous nous sommes soussignés avec le substitut du secrétaire.
o LAGARDETTE FONTAINE, Substitut.
« Le 23 janvier 1718, par devant Pierre Baborier, chfttelain-commis du comté d'Albon, par décret de MM. les élus de l'élection de Romans, du 7 décembre 1717, le consul François Baboin expose aux principaux habitants que la dame Gauzan, rentière au domaine des Eynards, a fait assigner le sieur Sadin, fournisseur, par devant le juge d'Albon, en payement des fournitures qu'elle lui a faites en 1709.
« Le sieur Sadin se serait pourvu auprès de MM. de la Cour du Parlement du Dauphiné pour que la communauté soit condamnée à payer elle-même la dame Gauzan, parce que s'il avait fait la fourniture du 15 mars au 30 juin 1709, c'était à la réquisition de la communauté.
« Le consul ajoute qu'il serait à propos de nommer une personne pour aller à Grenoble consulter un avocat, et que la communauté se fasse représenter aux défenses de l'assignation du 29 décembre 1717.
« Les principaux habitants répondent qu'il est tout à fait ridicule à un homme qui a gagné considérablement d'argent aux fournitures des étapes, de ne pas payer ceux qui lui ont fait des avances. Ensuite ils nomment M. Charles Fontaine, notaire à Andancette, pour aller à Grenoble faire examiner cette affaire par un avocat, et le prier de défendre la communauté.
« Le 17 mai 1718, le sieur Pierre Julien, de Saint-Romain d'Albon, déclare qu'il a été nommé exacteur pour faire la recette du rôle, mais qu'il ne peut, étant illettré, accepter cette charge. Et que d'ailleurs, il est exempt de droit, étant nommé salpétrier et charbonnier pour les poudres de sa Majesté, suivant les ordonnances de son Altesse sérénissime Monseigneur Louis-Auguste de Bourbon, prince souverain des Dombes, duc du Maine et d'Aumale, comte d'Eu, pair de France, commandeur des ordres du roy, grandmaître et capitaine général de l'artillerie en France. Et de plus, il est garde-chasse de Monseigneur le prince de Soubise, seigneur engagiste du comté d'Albon.
« Du dimanche 30 may 1718, sur l'heure de midy, au lieu de Saint-Roman d'Albon et dans la chambre de la communauté, par devant nous, Pierre Baborier, châtelain-commis du comté d'Albon, escripvant le greffier soussigné. « A comparu sieur François Baboin, consul moderne de
la communauté, lequel nous a dit et remontré que ayant reçu une ordonnance du roy, en date du 15 avril dernier, à luy envoyée par M. Albanel, conseiller du roy, subdélégué de Mgr l'intendant, le 21 du présent mois Portant suppression des estapes et logement personnel des gens de guerre dans la Province et Généralité seulement où sa Majesté estait chargée de la dépense des estapes. Aussi un règlement pour la subsistance et logement des troupes en route dans la Généralité.
« Et par sa lettre il marque de luy eu envoyer la réception et de la faire publier à l'issue de la messe.
« Plus, dé luy envoyer un extrait qu'on certifiera véritable du prix du pain, de la viande et du vin sur le pied qui se sont vendus aux trois derniers marchés. Et s'il n'y a pas de marché, ce que les denrées se sont vendues pendant le dernier mois et celui-cy. Le pain et la viande réduits au poids de marc et la pinte de vin à la mesure de Paris. « Plus, de l'informer, si dans le lieu, il s'y récolte suffisamment de denrées et fourrage pour subvenir à la subsistance des troupes et des endroits où les estapiers les tirent lorsqu'ils n'en trouvent pas dans le lieu.
« Plus, s'il y a des bois dans le lieu pour fournir aux troupes, et marquer dans la lettre ce que les bois coûtent le quintal, poids de marc et aussi bien que de la paille. « Plus, de marquer incessamment un endroit non ensemancé le plus près qu'il se pourra et qu'il ne soit pas éloigné de plus de 150 à 200 toises (1), et de la longueur de 120 toises et 80 de large.
a Plus, de chercher deux maisons fixes, pour y caserner dans un seul endroit les recrues qui passeront, et on leur fournira des chambres avec des tables et des bancs et le (1) Autrefois, la toise, unité de longueur, correspondait à près de 2 mètres soit exactement lmlHi).
2' bÉHIE. JtUIl" VOI UME. I909. 16
nombre des cabarets propres à loger les trois quarts des officiers de chaque troupe qui passeront dans le lieu, ou autres maisons pour le logement.
« Et d'envoyer incessamment cette déclaration. « C'est pourquoi il a fait avertir tous les habitants de la communauté, de se trouver en ce présent lieu, jour et heure pour venir deslibérer sur ce que dessus et s'est soussigné. Baroin, Consul.
« Auquel lieu sont comparus sieur François Sadin, Claude Goudard, Estienne Couturier, François Fay, Claude Gabet, Pierre Thomas, Antoine Dupuy.
« Tous lesquels assemblés après avoir ouy lecture de la dite ordonnance qui leur a esté faite par le greffier, ont deslibëré et respondant à la dite demande.
« Primo, sur le premier article, que dans la communauté il n'y a pas de marché, et que les denrées qui s'y sont vendues dans le dernier mois et le présent, le prix en a esté « Pour le froment, mesure de Romans, à environ 30 sols le quartal (1).
« La charge de vin à environ 5 livres 10 sols. La livre de pain, poids de marc, 1 sol 3 deniers. La livre de viande, 2 sols G deniers (2). La pinte de vin, mesure de Paris, 1 sol 3 deniers (3).
« Délibérant sur le 2e article, ils disent qu'on pourrait trouver dans la communauté suffisamment du bled et du vin pour fournir aux troupes. Quant aux foin et avoine, le tout se consomme dans la communauté et les estapiers (1) Le quartal de Romans était de 2t litres.
(2) Ce qui portait le pain à 2 sols 6 deniers le hilog. et la viande à 5 sols le kilog. Seulement il faut tenir compte qu'un sol au commencement du xvin* siècle avait beaucoup plus de valeur que notre sou actuel.
(3) La pinte de Paris était de 9 décilitres.
qui en ont eu besoin, se sont pourvus dans la communauté de Moras, éloignée de deux grandes lieues (1).
« Sur le 3e article, il n'y a pas de bois dans la communauté, les habitants en achètent pour leur usage, dans les communautés de Mantaille et de Fay, éloignées environ d'une lieue. Et qu'on n'est pas en usage de peser le bois, mais de l'acheter à charrettée de 4 mules, qui vaut 4 livres rendue sur les lieux. Quant à la paille, elle se consomme toute dans le pays, excepté celle du dixme, et elle peut valoir 20 sols, poids de marc.
« Sur le 4e article, délibèrent que quand il sera venu un commissaire pour choisir un endroit pour camper les troupes, il en sera trouvé dans la forme de l'article 38 du règlement.
« Sur le 5e article, qu'il leur est impossible de trouver deux maisons fixes pour y caserner, dans un seul endroit, les recrues qui y passeront, attendu qu'il n'y en a aucune qui ne soit habitée.
« Et que dans la communauté il n'y a que sept cabarets, sçavoir deux à Saint-Roman, deux à Saint-Rambert, deux à Anneyron et un à Andancette lesquels n'ont que de très mauvais lits.
« Ainsy deslibéré et se sont signés les bâchant escrire avec nous et nostre greffier.
« GOUDARD Duptjy Sadin Couturier
ri. F aï BABORIER, châtelain-commis Fon-
TAINE, greffier.
Le 26 juin H18, le consul Baboin reçoit une ordonnance de l'intendant d'avoir à fournir aux troupes qui passeront, pendant les mois de juillet et d'août, les denrées nécessaires (1) La lieue terrestre valait 4.444'44 et la lieue de poste 2 000 toises ou un peu moins de 4 kilomètres.
en pain, vin et viande aux prix de la ration de pain de 28 onces, poids de marc, pour un sol 9 deniers la pinte de vin, mesure de Paris, pour un sol 4 deniers la viande composée de bœuf, mouton et veau, poids de marc, deux sols. Il faudra aussi fournir deux maisons propres, avec tables et bancs, pour y loger les recrues, et un champ pour faire camper les troupes.
Les habitants réunis répondent que le sieur Goudart fournira la ration de pain pour 9 liards et la pinte de vin pour 6 liards le sieur Marion fournira la viande pour 2 sols (i deniers. Ils ne trouvent personne pouvant fournir à un prix inférieur.
La communauté cédera le champ Bourdier pour camper les troupes.
Pour loger les recrues, on a trouvé avec beaucoup de difficultés, la maison du sieur Goudard, éloignée du village de Saint-Romain, d'environ 400 pas.
Les 25 août 1718, la communauté doit fournir la paille, le foin, l'avoine, le bois et la chandelle au Régiment de Cavalerie de la reine et à celui du Berry.
Les principaux habitants répondent qu'il est impossible de trouver dans la communauté du foin et de l'avoine, surtout, cette année, à cause de la sécheresse. Il faut prier l'intendant de faire changer l'itinéraire des troupes, car jamais la cavalerie n'est passée par Saint-Romain d'Albon. Le 26 avril 1719, les principaux habitants de la paroisse de Saint-Philibert se plaignent de ce que le sieur Jean Plattier, prêtre, qui desservait leur paroisse en qualité de vicaire, a été contraint de quitter sur de faux rapports. Etant en mi-carême, il faut supplier Mgr l'archevêque de Vienne de leur procurer un prêtre.
a Le 18 may 1719, au lieu de Saint-Romain d'Albon, dans la chambre de la communauté, par devant nous, Pierre Baborier, châtelain-commis.
« A comparu sieur François Baboin, consul moderne, lequel nous a présenté qu'il a esté envoyé à la communauté un arrest de la Cour du Parlement de Grenoble, en date du 28 février dernier, qui enjoint aux châtelain, consul et officiers de la communauté de se transporter dans tous les hameaux qui en dépendent, avec tel nombre de personnes qu'ils trouveront à propos, en telle sorte que force demeure à la justice, pour faire perquisition des chèvres dans toutes les maisons, granges, écuries et autres endroits qui sont soupçonnés d'y avoir des chèvres, pour en faire la confiscation, conformément aux arrests de la Cour lesquels arrests, le consul a fait placarder aux endroits accoutumés. « C'est pourquoi il requiert, afin que rien ne luy soit imputé et que nous ayons à prendre les mesures nécessaires pour l'exécution de cet arrest soussigné.
« BAHoiN, consul. »
« Nous, châtelain-commis, avons donné acte au consul de son comparant et réquisition, et pour y satisfaire, avons ordonné que les sieurs Claude Champelay, François Ardy, Pierre Dumas, Jean Tournillon, Julien Falquet et Blaise Sarrazin, habitans de la paroisse d'Anneyron, Joseph Donzel, Joseph Crozat, Thomas Duprès, et Jean Batazon, habitans de Fondeville. se transporteront avec nous, le consul et autres officiers dans les lieux d'Anneyron, Fondeville, Coynaud et Saint-Rambert pour faire la perquisition et confiscation des chèvres, jeudi prochain 25 du courant. Et les sieurs François Sadin, Estienne Couturier, Nicolas Goudard, Joseph Thomas, hahitans de Saint-Roman, Pierre Pascal, Joseph Girard, habitans de Saint-Martin, Claude Gabet et Guillaume Ronat, habitans du dit-lieu, Christophe Charignon, Antoine Buisson, habitans de Saint-PhiHbert, Jacques Rozier, Joseph Paturel, habitans d'Andancette, se transporteront avec nous pour même fait que dessus, les
vendredi 26 et samedi 27 du courant. Auxquels sus nommés nous avons fait faire lecture de l'arrest et donné à entendre les peines qu'ils encourront en cas de désobéissance. « Ainsi procédé en présence de la plus grande partie des habitants de Saint-Roman d'AIbon, les sachant escrire se sont avec nous soussignés.
« SADI\; CnAIU&NON; ButbSON; CHAMPELEY;
PASCAL F. FAY GOUDARF CoUTURtER
CpozAT; et nous châtelain-commis, BABOR)ER;
FoNTAtNE, grefner.
K Du dixième août t719, Après midy au lieu de SaintRoman d'Albon dans H chambre de la communauté où l'on a accoutumé tenir assemblée, a comparu sieur CharlesHector Robert, bourgeois d'Anneyron, lequel ayant la présence de sieur François Baboin, consul moderne de la communauté, l'a requis de le vouloir mettre en possession de l'office de capitaine châtelain royal de la comté d'AIbon, en exécution de l'arrest de la souveraine Cour de Parlement de Dauphmé, en date du 24 juillet dernier, qui a commis le dit consul pour le mettre en possession. Et lequel arrest le sieur Robert a exhibé au consul.
« A quoy satisfaisant le sieur Baboin, con~nl, après avoir reçu la dite commission avec l'honneur et le respect dû, ayant fait lecture du susdit arrest dans l'assemblée, a mis le sieur Robert en possession de l'office de capitaine châtelain royal de la Comté d'Albon, conformément au dit arrest. « Et ce, en présence de Me Nicolas Gauttier, notaire royal d'Anneyron. Me Barthélémy Viérou-Fontaine. notaire et Pierre Baborier, marchand d'Andancette, sieurs Claude et Nicolas Goudard, Mathieu Dalissieu, Estienne Couturier, Jean Magnat, Joseph Gobertier, François Fay. tous habitans de Saint-Roman, Henri Salore, Pierre Berton, Pierre Perret, au~si de Saint-Roman et se sont les sachant escrire
soussignés avec le consul, le sieur Robert et le greNiercommis.
« BABOIN, consul ROBERT F. FAY GAUT-
TIER GOUDARD MA&NAT COUTURIER
DALISSIEU GoBERTiER FoNTAiNE, greffier-
commis. »
«Le 1er septembre 1719, a comparu par devant nous, Charles-Hector Robert, capitaine châtelain royal de la Comté d'Albon, dans notre maison d'habitation, à Anneyron, M° Nicolas Gauttier, notaire royal du dit lieu et substitut du procureur d'office de la Comté d'Albon, qui a requis qu'il nous plaise de faire visiter les vignes de la paroisse d'Anneyron et fixer les jours qu'on vendangera. « Attendu qu'il a été averti par plusieurs notables habitans, que les années précédentes, bien des particuliers s'étaient avisés de vendanger sans attendre les règlements et même dans des tems que les raisins n'étaient pas mûrs, ce qui avait obligé leurs voisins d'en faire de même malgré eux, étant déctos, ce qui leur avait causé un notable préjudice et a requis acte et s'est soussigné.
« GAUTTIER substitut.
« Nous, capitaine châtelain royal, susdit avons donné acte du comparant et réquisition cy dessus au dit Me Gauttier, substitut du procureur d'office.
« Et en conséquence avons commis sieurs Claude Champelay, François Despierres, François Simon et Jean Baron, tous habitans de la paroisse d'Anneyron, pour faire la visite des vignes et sur le rapport qu'ils nous ont fait que les raisins seront prêts à cueillir dans le vingtième du présent mois, nous avons permis à Coynaud de vendanger le mercredi vingtième de ce mois, le vendredi et samedi suivant aux Matenottes, aux Egolts, à Rapon, à FondeviHe et aux vignes de Saint-Michel, sises sur la paroisse d'Anneyron
les lundi et mardi aussi suivants aux vignobles de Broyé, Saleton, les Allegrets, les Arnagères, les Chargeaux, Orsinas et autres vignes qui sont le long de l'Argentelle y compris le Pommaret et le mercredi suivant aux Plantées et au Turrail.
« Avec défences à toutes personnes de commencer à vendanger aux endroits sus nommés avant les sus dits jours, à peine de confiscation de la vendange et de trois livres d'amendes. Et avons ordonné qu'à l'exécution de notre présente ordonnance, il sera passé outre nonobstant oposition ou appellation quelconque et sans préjudice d'ycelle comme pour fait de police, et qu'elle sera lue, publiée et affichée dimanche prochain, au devant de l'église paroissiale d'Anneyron, à l'issue de la messe ou des vêpres, et nous nous sommes soussignés avec notre greffier-commis. RosERT, capitaine châtelain royal
Fo~TAiNE, grenier-commis. »
Le 15 septembre 17)9, les nommés Pierre Ratel et Jean Dutat, d'Epinouze et André Genthon, de Jarcieu sont condamnés à 3 livres d'amende chacun et à 5 livres 16 sols pour i- les frais, pour avoir vendangé leurs vignes, sises au Turrail, deux jours avant celui fixé par l'ordonnance du capitaine châtelain.
Le 14 janvier )720, le sieur François Baboin, consul depuis plusieurs années, demande à être relevé de cette charge. Les liabitants réunis acceptent et nomment consul Etienne Couturier. Celui-ci représente qu'il a des raisons pour ne pas accepter cette fonction, mais que cependant, si on veut lui adjoindre un autre consul, il acceptera pourvu qu'on leur donne une gratification outre les vacations ordinaires de consuls.
On nomme pour deuxième consul Jean Magnat et ou
décide, outre leurs vacations, de leur donner quarante livres ce qu'ils acceptent tous deux, et ils promettent d'exercer de leur mieux la charge de consul.
Le 16 juin 1720, messire Jean Méret, prêtre et curé de Saint-Romain, demande que l'on nomme un marguillier pour recevoir les revenus et autres droits attribués à la fabrique de l'église qui se trouve sans marguillier, ce qui lui cause un préjudice notable. On nomme le sieur Nicolas Goudard, qui accepte la charge de marguillier de l'église de Saint-Romain.
Le 23 juin )720, Monsieur Reymond Assalin, écuyer, sieur de Montarsin, otïre de fonder une rente annuelle de 3 livres à la fabrique de l'église de Saint-Romain, à condition d'avoir un banc et un droit de sépulture dans l'église, pour lui et ses successeurs, à la même place que ceux de son père. Le curé, le marguillier et les principaux habitants acceptent l'offre.
« Du dimanche 1 octobre 1722, au lieu de Saint-Roman d'Albon, dans la chambre de la communauté, par devant nous, Charles-Hector Robert, capitaine châtelain royal de la Comté.
« Est comparu sieur E&tienne Couturier, consul moderne, lequel nous a représenté avoir fait avertir tous les habitants d'ycelle à comparaître aujourd'hui par devant nous pour délibérer sur ce qu'il a plu à Mgr l'intendant de cette province, d'accorder a la communauté d'Albon, un dégrèvement de 310 livres, applicable savoir
« 10 livres au sieur Fontaine, 8 livres au sieur Reymond, de Montarsin, 5 livres au marquis d'Autichamp, pour les causes contenues eu l'état de distribution plus, 6 livres pour la dépense d'une planche posée sur le ruisseau des Gorges, 10 livres pour le loyer d'un magasin à fourrage pour les troupes et 271 livres en diminution de la taille an
marc la livre. Lesquelles sommes doivent être payées par le receveur de taille en l'élection de Romans l'année présente 1722.
« Et comme la somme de 271 livres accordée en particulier à la communauté ne saurait être répartie sur les cotisés en telle sorte que chacun en profite étant apparant qu'un tiers pour le moins ne pourront pas en être soulagés, ne leur pouvant pas être distribué un seul denier suivant leur cote, le consul requiert que les habitants cy présents ayent à délibérer sur la destination de ce dégrèvement et s'est soussigné.
CouTURiER, consul
« Les habitants ont unanimement conclu et délibéré qu'il plaise à Mgr l'intendant d'imposer en moins la somme de 27) livres sur le rôle de la taille royale pour l'année 1723. « Nous, capitaine châtelain royal avons octroyé acte de la présente délibération pour servir à ce que de raison. a ROBERT, capitaine-châtelain royal
FoNTAi\E, substitut.
« Le 3 may )725, au lieu de Saint-Roman d'Albon et dans la chambre de la communauté, par devant nous, CharlesHector Robert, capitaine-châtelain royal de la Comté d'Albon, écrivant le substitut du greffier.
« A comparu sieur Etienne Couturier, consul moderne, lequel nous a représenté avoir fait avertir tous les habitants à comparaître aujourd'hui, devant nous, pour venir délibérer sur la nommination d'un garde bois et fruits, en conséquence de l'ordonnance de MM. les commissaires départis en cette province pour la conservation des bois en date du dixième janvier dernier.
Auquel lieu sont comparus, Noble Alphonse Assalin, sieur de Lagardette, sieurs François Sadin, François Baboin, Mathieu Dalissieu, Nicolas Goudard, Claude Cham-
pelay, Christophe Charignon, Nicolas Gauttier, François Fay, Jean Magnat, Guillaume Ronat, Christophe Crozat, Antoine Buisson, Claude Gabet, Vidal Rozier, Marc Nivon, Jean Thomas, Jean Thivolle, Jean Pérouze, Jean Beyle, Blaise Vivier, Reymond Rozier, François Thomas, Pierre Métrât, Jean Géry, Pierre Guignard, François Dupuy. « A quoi satisfaisant, les dits noble de Lagardette, sieurs Uauttier, Sadin, Baboin, Datissieux. Goudard, Champelay, Métral, Jean Thomas, Dupuy, tous les autres s'étant retirés sans avoir voulu satisfaire à la dite nomination, disent que les gardes champêtres doivent être entretenus par les Trois Ordres. Ont tou~ unanimement nommés pour gardes champêtres savoir pour les paroisses d'Anneyron et SaintRambert, Jean Géry, auquel sera donné pour ses gages chaque année, la somme de cinquante livres. Et pour les paroisses de Saint-Roman, Saint-Martin, Saint-Phitibert et Andaucette, ils nomment Jean Peyrouze, auquel ils donnent pour ses gages, quarante-cinq livres chaque année. Et outre les gages, les gardes jouirontde l'exemption du logement des gens de guerre. Et qu'on se pourvoira à Mgr l'intendant pour l'imposition des gages et pour en faire la répartition sur les Trois Ordres, attendu que MM. les gens d'Egtise et la noblesse possèdent la plus grande partie des bois et autres fonds (1). Et les gardes commenceront à faire le devoir de leur charge dès a présent, ce que les dits Géry et Peyrouze ci-présents ont accepté et promis de se bien acquitter de leur devoir.
Et se sont les sachant écrire soussignés.
« GAUTTIER LA&ARDETTE GOUDARD BAB01N
(1) Après le relevé des délibérations, nous donnerons les noms et quelques uotes e'cpticatt\cs sur les anciennes familles nobles et sur les Ordres religieux qui possédaient les châteaux, les tiefs et les grosses fermeb du Comté d'Atbon.
SAn)\ DAUSStEUX MAGNAT Cn~MPELAY
MÉTMAL GERY RoHEnT, châtelain royal
Fo'<TA)XE; substitut.)).
« Du dimanche 8 juillet )725, à l'issue de la messe paroissiale d'Anneyron, par devant nous Charles-Hector Robert, capitaine, châtelain royal de la comté d'Albon et dans notre maison, écrivant le substitut du Greffier. Est comparu sieur Etienne Couturier, consul moderne de la communauté, lequel nous a dit avoir fait assigner tous les ecclésiastiques et nobles possédant biens dans la paroisse d'Anneyron, et fait avertir tous les autres habitants possédant bien en la paroisse par affiche de placard suivant l'usage, à comparaître aujourd'hui par devant nous à l'issue de la messe paroissiale qui est celle où l'on lit le prosne, pour venir délibérer sur un acte qui lui a été signifié de la part de messire Joseph Fournan, prêtre et curé d'Anneyron, le 4 mai dernier, dont il requiert qu'il soit fait lecture dans l'assemblée et requiert deffaut contre les absens. Et s'est soussigné sous les protestations telles que de droit.
COUTURIER, consul.
« Auquel lieu sont comparus, sieur Etienne Nivolet, comparaissant pour Madame de Valernod, Me Nicolas Gautier, sieurs François Sadin, Claude Champelay, Jean Gery, Nicolas Gabet, Antoine Barbier, Pierre Métrât, Antoine Blain, Jean Thomas, Antoine Brunet, Louis Sibut, François Ardy, Antoine Gros, François Peyrouze, Jean Gagnaire. « Tous lesquels susnommés assemblés tant en leur nom qu'en celui des absens, après avoir oui lecture de l'acte de Messire Joseph Fournan ont conclu et délibère. En premier lieu sur la demande qu'tl fait de pourvoir au logement du vicaire et sur ce qu'il manque des cierges et de l'huile pour la lampe placée devant le Saint-Sacrement. c fls font remarquer que la chambre qui est au-dessus
du cellier de la cure est réservée aux habitants pour servir de logement à un vicaire si on le trouve à propos, attendu que le surplus du .bâtiment de la cure sera surRsant pour le logement du curé.
« Quant un luminaire les délibérants décident de demander permission à qui de droit pour imposer la somme de quarante livres pour faire un fond pour ledit luminaire, laquelle somme sera remise à sieur Claude Champelay qui a été nommé pour marguillier. ·
« Et de plus ils délibèrent aussi que le sieur Louis Sibut continuera à faire la quette dans l'église avec un plat pour le luminaire et il remettra ce qui lui sera donné au sieur Champelay pour le joindre aux autres fonds et être employé à la fourniture dudit luminaire, ce que lesdits Champelay et Sibut ont accepté.
« Les délibérants disant que ci-devant il ne manquait aucun cierge, et que ce manquement n'est provenu que de la cessation des renages (I) que les anciens curés étaient en usage d'avoir, ce que les delibérants souhaiteraient qui fut retabit pour éviter l'embarras d'imposer des minuties de cette nature, ce que ledit sieur Fournan à présent curé refuse de faire.
Quant aux réparations curiales demandées par le curé, les délibérants ont jugé à propos de les faire. Elles consistent à carreler la cuisine, faire un chassit et un cadre à la fenêtre de la chambre qni est au-dessus de la cuisine et raccommoder le foyer de la cheminée de ladite chambre.
(<) Autrefois à Anneyron, pour la fête patronale, on avait sous la présidence du curé, la coutume d'élire un roi. Ce monarque éphémère parcourait, sur un char, les rues de la localité il a\'att une place de choix à l'église et il devait offrir un certain nombre de cierges. C'est ce que l'on appelait les Renages.
Saint Laurent est le patron de la paroisse d'Anneyron et la fête patronale a lieu, encore, le dimanche qui suit le ta août, jour de la fête de ce saint.
« C'est pourquoi les délibérants ont présentement donné le prix fait des réparations à Louis Sibut qui s'est chargé pour la somme de 66 livres de les faire en bon père de famille. Ils députent le consul pour demander à qui de droit l'imposition des 66 livres avec les 40 livres du luminaire, revenant en total à 106 livres, avec promesse de le relever de toutes charges et de lui payer ses vacations
« Ensuite est comparu le sieur François Sadin, habitant d'Anneyron, lequel* a représenté aux délibérants qu'il possède une maison audit lieu dont les auteurs avaient droit d'avoir un banc dans l'église d'Anneyron, lequel banc a été détruit et comme le sieur Sadin est dans l'intention de le rétablir, il n'a pas voulu l'entreprendre sans le consentement des délibérants et qu'il les prie de lui accorder. Et ensuite il se pourvoira ainsi qu'il avisera à Mgr l'archevêque de Vienne pour en avoir la permission sous une fondation qu'il fera pour le bien de l'église et être ledit banc placé où monsieur le curé le jugera à propos, et s'est soussigné.
SADIN.
« Tous lesquels sus nommés ont consenti agréablement à la demande faite par le sieur Sadin dans son comparant ci-dessus et ce sont les sachant écrire soussignés avec nous et le substitut du gremer.
« GAUTTIER, SADIN, SIBUT, CHAMPELAY,
NIVOLLET, MÉTRAL, GAGNIERE, GERY.
« Nous capitaine châtelain royal avons octroyé acte des dites comparutions, délibérations et acceptations avec deffaut contre les absents.
c ROBERT, capitaine châtelain royal
FONTAINE, substitut.
(à suivre)
PROspER VALLERNAUD.
Le Taurobole de Tain en t840 (Face anterieurf et inscription)
NOTICE
SUR LE
TAUROBOLE DE TAIN
Le taurobole de Tain a souvent attiré l'attention des archéologues et des épigraphistes, aussi a-t-il donné lieu a une assez ample Bibliographie, dont on trouvera la nomenclature à la suite de cette étude.
Ce monument, de l'an )8~ de l'ère chrétienne, est conservé aujourd'hui sur une place publique qui, de son nom, s~appeHe Place du Taurobole. Quand et où fut-il découvert ? Par quelles vicissitudes a-t-il passé pour arriver jusqu'à nous en l'état où nous le voyons actuellement ? Enfin, qu'était-ce qu'un taurobole, en général, le nôtre en particulier ? Ce sont là tout autant de questions que nous allons traiter, après quoi nous donnerons et commenterons le texte de son inscription. 1
Au témoignage de Chorier, le taurobole fut découvert au xv)°sièc)e « dans le territoire de Teing » (i). (t) ~Mh))rc~CKCtt!)f!Mp/t<n< t. I, )66t. p. 2~5.
Tout cela est assez vague. Heureusement que d'autres témoignages permettent de préciser davantage. Le premier auteur qui fasse mention de notre taurobole est Gruter (t~6o-i6x/) qui, dans son Corpus ~cn)o/t'o/!M/?! (') en parle ainsi « Dans le bourg de Tein sur la rive du Rhône, dans la demeure de ['Ermite » (2~. Il donne ensuite le texte de l'inscription, d'après les notes manuscrites de Scaliger (~). Comment ce dernier en avait-il eu connaissance ? Il est probable que ce fut pendant son séjour à Valence. Nous savons, en effet, qu'en )~) i) était à l'Université de cette ville où le célèbre Cujas l'initia à i'étude du droit romain (~). Nous savons de plus que Jean de Monluc. évoque de Valence (i~<), avec lequel Scaliger était en relations suivies, voulut l'emmener en qualité de secrétaire, en Pologne, où ce prélat devait représenter Charles )X à la diète réunie pour l'élection d'un nouveau roi ()). Scaliger avait donc des points d'attache avec nos contrées, et, comme de plus il était un philologue de valeur, toujours à la recherche de textes
(t) Cet ouvrage, qui parut d'abord à Heidelberg en t6o:6o3, eut plusieurs éditions. La meilleure est cette d'Amsterdam, '707, sous ce titre ~n! Gr«~r:! Cor pus ;M~er;~)OMMN) ex reef)U!OMg et cum aotWt!~fCr~<oM!~Mj ~oaMMM G~org'<! Gr~ff), vol. in-fo).
(2) tbid. Tome J. p. xxx, 2 In oppido Tein, ad ripam Rhodani, Jn aed;cu!a Heremite.
(3) Ibld. E ~c~Bt-; ~cAcd~. Il s'agit ici de Joseph-Juste Scaliger, né à Agen en )5~o, et décédé à Leyde en 16og.
(4) NADAL, //<~<o)rcd~ i't/Hifcr~ite de V<!tet)Cf, )86t, p. 78-81. (3) Monluc et Scaliger partirent ensemble (17 août 1572), mais en cours de route ils apprirent le massacre de la Saint-Barthélémy, et Scaliger, qui était protestant, se retira à Genève.
Sur l'ambassade de Monluc en Pologne, on trouvera d'intéressants défaits dans J. CHEVALIER, Essai /))'sro)'~M? !«)' l'Eglise et la n!f de D)e, tome t)t, 1000, p. T!)-:8.
nouveaux et d'inscriptions antiques, il est permis de croire qu'il fut vite au courant de la découverte, récemment faite à Tain, d'un monument ancien avec inscription. Vint-il lui-même l'étudier et la transcrire sur place? Nous l'ignorons, mais le fait est très vraisemblable. En tous cas, il en prit copie, et c'est d'après ses notes, on l'a vu, que Gruter la publia.
Un auteur, assez suspect par ailleurs, et contemporain de Gruter, le célestin Jean Dubois (Joannes a Bosco) (; ~0-1626), mentionne le taurobole comme existant à Tain, dans l'ermitage de Saint Christophe ((). Dans un article sur le taurobole publié dans l'ancienne collection des M~noir~ l'Académie des /~cr~<?/M et Belles L~r~, il est dit que « la pierre sur laquelle est gravée cette inscription fut trouvée, dans le courant du xv)" siècle, sous l'autel de la chapelle de l'Ermitage (2). »
D'autres érudits ont encore publié l'inscription du taurobole (~), mais leur texte est fautif, et, comme on l'a dit justement, « ces copies sont presque toutes inexactes s (~). H faut arriver à l'abbé Chalieu et à Millin pour trouver un texte sûr et fidèlement établi. L'abbé Alexis Chalieu, né à Tain en et décédé en t8o8, était un savant modeste, très versé dans l'histoire grecque et romaine, dont la connaissance (t) Floriacencis vetus 'B;6/fo</tMt!, Lyon, )6o5. 7' ad eremtlm S. CArt~opAor;.
(2) MOREAU DE MAUTOUR, dans .Memotres de l'Académie des Inscrrptions et Belles-Lettres, éd. tn- t. V, p. 2~.
(3) Voir les n" 3, 5 et 6, de la Bibliographie.
(4) Voyage dans les départements du midi de la France, par AubinLouis Mlilin, t. Il, tSoy, p. 74.. L'auteur dit encore « elle a toujours été tra~scnte d'une manière très infidèle e. tbid, p. 72. ï* SÉRIE. XL!))' VOLUME. '90t). ty
approfondie lui permit d'étudier, non sans succès, les monuments anciens et les inscriptions lapidaires (i). Quant à Millin, c'était un archéologue très érudit, et qui a publié des travaux que l'on consulte toujours avec profit.
Millin vint à Tain le 21 mai 180~ (2), et il en repartit le lendemain pour Valence. Il a fatt de son séjour dans le pays et de ses rapports avec l'abbé Chalieu une relation intéressante et très peu connue, ce qui nous décide à la reproduire ici
a Tain est absolument en face de Tournon, sur la rive gauche du Rhône, dans une petite plaine qui s'étend entre les montagnes et le fleuve. M. Chapet (3) nous avait recommandé d'y voir M. Chalieu, ecclésiastique respectable par son âge, son savoir et ses vertus. A cet effet nous traversâmes le Rhône, nous proposant en même temps de transcrire la belle inscription taurobolique qui a été citée par plusieurs auteurs, mais point figurée et toujours mal copiée.
« En y arrivant, nous vîmes sur le rivage une colonne une tablette placée au-dessous contenait ces mots Le /no/:HmeM< ùtH/~us et curieux qui se voyait ici, est à la maison commune.
(<) Cf. BELLET, Not;M sur l'abbe C/i~/teu, savant ~upA;no!X, Valence, ;go6, tn-8°. Extrait du Bu'/ff!H de la Societe d'Archéologie de la Drôme, t. XXXIX, 1905.
(:) Nous l'inférons de ce qu'tl partit de Vienne le 20 mai, jour de la Pentecôte, dit-il, (M<SMpr~, p. 5g), pour être à Tournon et à Tain le lendemain, 21, sans indication d'année. Mais la Pentecôte étant le 2o mai, Pâques avait dû être le t" avril. Or, en <8o~, Pâques tomba précisément le t" avril. C'est donc cette année-là que Millin vint à Tain.
(3) Ancien professeur au collège de Tournon.
« Depuis !/2~, l'autel taurobolique qui est actuellement dans le vestibule de )a maison commune, servait de base à une croix placée au sommet de la colonne qu'on a laissée sur le port de Tain pour indiquer le lieu où était autrefois ce monument.
« Nous allâmes d'abord chercher le respectable abbé Chalieu. Ce vénérable vieillard vit actuellement chez un de ses neveux, simple artisan, à qui i) doit laisser la petite collection de médailles d'or qu'il possède il nous conduisit chez le maire, M. Jourdan, qui conserve dans son jardin la colonne milliaire dont je donne ici la figure. (Suit cette figure, ou plutôt l'inscription). « M. Chalieu nous conduisit ensuite à la maison commune, où, d'après son avis, la belle inscription taurobolique a été convenablement placée. On voit encore les traces du bucrâne qui était autrefois sculpté on distingue aussi celles de la tête de bélier et de l'épée taurobolique qui étaient aux deux côtés. « Cette belle inscription a été trouvée il y a près de deux cents ans, sous l'autel de la chapelle de l'Hermitage, qui a donné son nom à la montagne qui produit de si bon vin. L'hermite qui faisait creuser en cet endroit, la fit placer à la porte de sa demeure, où elle attirait les curieux et lui valait quelques aumônes. En 172~, des voyageurs anglais la firent conduire jusqu'au Rhône pour l'enlever mais le lieutenant du maire de la ville, M. Loche [Deloche], dont nous devons rappeler le nom, s'opposa à leur dessein et la fit placer à Tain près du bac, où elle est restée longtemps elle était exposée aux injures du temps et aux insultes des enfants. M. Chalieu l'a fait placer plus convenablement dans la maison commune a.
Millin donne ensuite le texte de l'inscription, puis il continue:
« Notre projet était d'aller coucher le soir à Valence mais nous avions employé beaucoup de temps à examiner le taurobole. M. Chalieu nous parla d'une belle inscription qui était à i'égiise de Saint-Jean-de-Musol, snr la rive droite du Rhône, à environ une demi-lieue de Tournon nous résolûmes alors de rester à Tain, et d'en partir de très grand matin. Nous traversâmes le Rhône M. le maire, M. Jourdan, son fils, et M. l'abbé Chalieu, nous accompagnèrent le bon vieillard marchait avec une vigueur qui nous étonnait. « Nous revînmes ensuite à Tain. Quoique le bon abbé eût eu du plaisir à s'entretenir avec nous, et qu'il vît bien celui qu'il nous faisait, il ne voulut jamais accepter notre souper, parce que l'Eglise défend aux ecclésiastiques de boire dans les cabarets. Nous eûmes beau lui représenter qu'une auberge est la maison d'un voyageur, qu'elle ne peut être considérée comme un cabaret quand on n'y mange qu'à l'heure des repas, nos efforts furent vains, et nous le quittâmes à regret. Nous nous plaignîmes que ce scrupule nous privât de sa société pendant les courts instants que nous avions à passer à Tain, mais nous ne pûmes nous empêcher de penser que celui qui pousse si loin la rigoureuse observance des devoirs de son état, mérite plus l'estime des hommes que celui qui trouve toujours de vains prétextes pour s'en dispenser.
« Marmontel, dans ses Mémoires, se plaint de la mauvaise foi de l'aubergiste de Tain, qui lui fit payer très cher du mauvais vin prétendu de l'Hermitage (<), qui (;) MARtfoKTEL, A/ftMores, 111, 23o. [Note de Mithn].
croît sur une montagne voisine de la ville. M. Fisch (i) raconte un fait à peu près semblable (2). fi faut qu'il y ait eu dans cette hôtellerie une succession de mauvais génie, car on nous servît un souper détestable et du poisson pourri, quoique nous fussions sur les bords du Rhône on nous dit qu'il était excellent, et nous le payâmes comme tel. Ce petit désagrément ne put nous faire oublier le plaisir que nous avions eu à nous arrêter à Tain et à Tournon » (3).
Tous les renseignements que Millin vient de nous donner sur le taurobole, il les tenait de l'abbé Chalieu. Ce dernier lui avait fait connaître un détail curieux, c'est qu'en t~2~ le taurobole, vendu à des anglais, faillit être emporté par eux, et, sans l'opposition énergique des habitants, il aurait disparu du pays. Cet
(t) FiscH, Bre/c M&er d:c ~c/t?n fror!n~M wn fran~rr., 600 [NotedeMillin].
(2) Je n'ai pu vérifier la chose en ce qui concerne Fisch, dont l'ouvrage est rare. Mais, pour Marmontel, Millin a commis une étrange confusion, et a vu une critique là où Marmontel a fait un bel éloge de a la bonne foi de l'hôtesse ') et de son vin d'Hermitage. J'ai cité ce témoignage dans l'<~0!rc de 7*atn, t. I, p. 407. Il convient de le reproduire ici en réponse à l'assertion erronée de Millin « Sur notre route d'Aix à Lyon, il n'y eut rien de remarquable qu'un trait de bonne foi de l'hôtesse de Tain, village voisin de cette côte de l'Hermitage que ses vins ont rendu célèbre. A ce village pendant qu'on changeait nos chevaux, je dis à l'hôtesse en lui présentant un louis d'or « Madame, si vous avez d'excellent vin d'Hermitage, donnez m'en six bouteilles et payez-vous sur ce louis ». Elle me regarda d'un air satisfait de ma confiance « Du vtn rouge excellent, dit-elle, Je n'en al point mais du blanc j'en ai du meilleur ». Je me fiai à sa parole, et ce vin, dont elle ne prit que cinquante sols la bouteille, ne se trouve nen moins que du nectar ». Si Millin revenait en ce monde, et à Tain, il serait agréablement surpris d'y trouver d'excellents hôtels, bien différents de l'auberge où, en t8o4, on lu) servit a du poisson pourri ».
(3) MILLIN, Ut supra, p. 60-78.
incident se passa au mois de décembre '72~, et. non en t/2~. Nous l'avons rapporté dans l'Histoire de Tain, (page 267) citant à l'appui une délibération consulaire très circonstanciée (t). 11 en résulte qu'au mois de (t) Elle a tout à fait sa place dans une Notice sur le Taurobole. La voici in-extenso, d'après les délibérations consulaires (~trc~tfes communales de 7'~tH, BB. y).
« Du leudy 16* décembre année '7~3, dans la maison consulaire de la ville de Tain par devant nous Jacques Deloche, conseiller du Roy, lieutenant en la mairie de ladite ville, servant de substitut le secrétaire. « A esté représenté par les sieurs Jean Gleyzolle, t" consul et François Pochon, 2'consul, que lundy dernier, i3° du courant, après disnée, ils avaient appris, par le bruit commun, que le P. Arsenne Mayer, hermite en l'hermitage de cette ville, avait vendu a des messieurs Anglais dont on ne sait pas le nom. qui avaient séjourné quelques jours à Tournon, ayant un batteau attaché sur le port, une grosse pierre de chouin ou espèce de marbre, de quatre pieds de hauteur sur deux et demy de diamettre, taillée en carrée, et sur une face d'icelle est une inscription qui fait voir que cette pierre est un Torobaurion, sur laquelle les anciens offraient des sacn~ces aux faux dieux. De laquelle pierre, comme une chose rare et curieuse est fait mention dans l'Histoire du Dauphiné faite par M. Chorier. Et ce fut pour cela que dans l'inventaire qui fut fait des effets dépendant dudtt hermltage, par MM. les officiers de ce lieu, le dixième du mois de juin mil sept cent vingt, ledit P. Arsenne Mayer avec le frère Jean Nicolas en furent charges. En sorte qu'ils n'ont que l'administration et l'usage dudit hermitage et des effets en dépendant, ne pouvant aucunement les alienner.
« Sur ce bruit de vente, ledit Pochon, second consul, fut prie de se transporter audit hermitage pour découvrir la vérité et y étant il aurait trouvé qu'il y avait cinq ou six paysans avec les battelliers de ces Messieurs, qui sortaient ladite pierre de l'endroit où elle était. et l'auraient mibe sur deux roulleaux.
« Ils prièrent encore ledit Pochon de leur ayder, ce qu'il ne voulut faire. Et à quelques pas de là, il trouva le P. Arsenne qui mangeait avec un de ce. Anglais, et l'invitèrent à boire avec eux, ce qu'il ne voulut faire. Et étant revenu, il dit aux notables de cette ville ce qu'il avait vu. Et sur le tard lesdits Anglais seraient venus sur le port, où il y avait plusieurs notables. Et le sieur Besson, l'un d'iceux, demanda auxdits sieurs Anglois, qui étaient au nombre de quatie, s'il venaient dudit hcrmitagc acheter du P. Arsenne, la pierre. A quoi
décembre 172~, l'ermite, le P. Arsène Mayer, sollicité par des voyageurs anglais, s'était décidé à leur vendre le taurobole. Déjà ces derniers se préparaient à le faire charger sur un charriot pour le descendre au port, puis, de là, le transporter dans un bateau amarré àTournon, lorsque la population eut vent de la chose. Les consuls de Tain, Jean Glezolle et Pierre Pochon, l'un d'eux répondit qu'ils n'y avaient pas esté et qu'ils n'y pensoient pas.
« Le lendemain, grand matin, le bruit s'étant de nouveau répandu que lesdits sieurs Anglais, de concert avec le P. Arsenne, avaient fait enlever ladite pierre pendant la nuit, ledit Pochon fut encore prie de se transporter audit hermitage, avec deux sergents de quartier, pour voir ce qui en était; et y étant, il trouva que ladite pierre était chargée sur un charriot, distant d'environ cinquante pas de l'endroit où elle était posée, n'ayant pu aller plus loing, faute de bestiaux apparamment, sans avoir trouvé ni le P. Arsenne, ni aucune autre personne audit hermitage, ni près de ladIte pierre.
« Ledit Pochon laissa les deux sergents de quartier pour garder ladite pierre, et s'en vint dire à MM. les officiers ce qu'il avait vu. « Et pour )hors, nous dit lieutenant de maire, de l'advts des notables, y serions monté avec nos sergents de quartier et autres gens, connaissant l'esprit turbulent et violent dudtt P. Arsenne, et dans la crainte que ces'Messfeurs les Anglais ne nous insultassent. Et y étant, avions trouvé ladite pierre chargée comme sus est dit, sans que ledit P. Arsenne, ni aucune autre personne, parut; et ayant trouvé à propos de faire descendre ladile pierre en -cette ville pour la mettre en suretté dans la crainte que ledit P. Arscnne et lesdits sieurs Anglais ne la fissent enlever nuictamment, comme ils avoient déjà fait, et l'aurions fait mettre près de l'églize.
a Cependant ledit P. Arsenne avec lesdits sieurs Anglais ont tait stgnimer un acte, ce matin, sur les neuf heures, par M* Lermet, notaire, pai lequel lis somment )ed)t Pochon de consentir présentement qu'tts prennent ladite pierre et la fassent embarqu-r dans leur batteau et, à défaut de ce, protestent contre luy de tous dépens, dommages et intérêts, à ce qu'il a esté remply de plusieurs choses contre la vérité. Et aurait répondu qu'it ne pouvait y donner aucun consentement que par une dëhbération de la communauté. A quel effet, il a fait convoquer la présente assemblée pour y délibérer, et à remis ladite copie pour en estre fait lecture.
« Sur quoy se sont présentés sieur Louis Chalamel, procureur ;uris-
convoquent aussitôt une assemblée générale. Celle-ci leur donne tous pouvoirs en vue d'amener une solution au mieux des intérêts du pays, qui tenait justement à conserver son taurobole. Ils montent alors à l'Hermitage, voulant interroger ermite et anglais, qui se dérobent finalement, le fameux taurobole est descendu en ville et p)acé contre un mur, sur la place du Port dictionnel, sieur Aymard Chirouze, sieur André Chalamel, sieur Charles Girard. ex-consul, sieur Georges Barbier, Charles Grozon, Miche! Vantalon, sieur Pierre Chirouze, Henri Gonillon, Louis Deloche, François Mizery, Laurent Barbier, dom Jean Rostaing, prestre et sacristain de l'église Notre-Dame de cette ville, M- Etienne-Jean Deloehe, advocat au parlement, sieur Charles-Pierre Deuille, Pierre Ceu, Jacques Robin, sieur George Murguet, maître-chirurgien, s)eur Alexis Fleury, messire Jean Barbier, archiprestre et curé de cette ville, sieur François Besson, maitre-chirurgten, Antoine Pochon, François Théollier, Joseph Gleyzolle.
« Tous les susdits assemblés, composant la majeure partie des habitants, après avoir ouy lecture du remontré ci-dessus et de l'acte signifié de la part dudtt P. Arsenne et des sieurs Moussam et Zaubart, conjoinctement avec ledit P. Arsenne, que ladite pierre étant une chose prëcieus curieuse et rare, en étant fait mention dans l'histoire de la province, et une esrece d'immeuble dépendant de l'hermttage dont les hermites n'en ayant que l'usage, ne peuvent vendre ni alienner, MM. les officiers sont priés de faire un acte aux dits sieurs Moussain et Zaubart, de même qu'au P. Arsenne, comme ils s'opposent à la vente de ladite pierre, jusqu'à ce qu'autrement soit ordonné par les puissances sauf audit P. Arsenne de rendre à ces messieurs l'argent qu'il a receu d'eux, mal a propos, d'une chose dont il nepouvait disposer. Et pour établir le droit de la communauté, M. le lieutenant de maire est prié de se pourvoir, conjointement avec les sieurs consuls, par devant M. Barbier, subdélegué de Monseigneur l'Intendant pour informer dudit enlèvement, pour ce fait être porté plainte à MM. les commandants de la province. Et cependant garantira la sécurité de ladite pierre pour qu'elle ne soit enlevée.
« De laquelle délibération, nous dit lieutenant avons octroyé acte et avons signé avec les sachant écrire.
RosrAiNG, sacristain GLEYZOLLE, <" consul BARBIER, curé BARBIER, DELOCHE, CHALAMEL, CHIROUZE, GmARD, CHALAMEL, DELOCHjt, FLEURY, BESSOU, CHmOUZK, MIZERY, VANTALON, GROZOK, ROBIN, THÉOLUER, POCHON, GLEYZULLE, MuRGULT, CoUttTKVtLLK.
pour servir de piédestal à une colonne, portant ellemême une croix.
H n'était pas au bout de ses pérégrinations. La croix ayant été enlevée en t/f)~, la colonne restait, toujours sur le taurobole, mais celui-ci souffrait beaucoup des injures du temps et des hommes. L'abbé Chalieu, qui veillait sur lui avec une extrême sollicitude, obtint du maire, Charles-Prosper Jourdan, qu'il fût transféré à l'hôtel de ville, où il trouva enfin un abri convenable (t8o)). !) y resta jusqu'en )8)o. Cette année-là, la municipalité décida son transfert sur une place publique appelée d'abord place du champ de foire, puis place de Mars, où devaient être érigés « tous les monuments publics capables d'éterniser le triomphe de la Liberté et de l'Egalité » ( i ). On retrouve là le style emphatique
(i) Z)e<<)'t!ttOtM de la mM't<c~<!<;re. Séance du 23 pluviôse an H (t février 1704).
Cette place avait éte créée sur l'ancien jardin de l'émigré Mure de Larnage, dont tous les biens avaient été vendus comme biens nationaux, La vente dénnitive du terrain se fit aux enchères publiques, par devant l'administration du district de Valence, le 17 floréal an II (6 mai '794), au prix de 5,900 livres, plus 100 livres de frais d'adjudication et de droits d'enregistrement (0<rot;om de la tnHXtc~M/ffe, séances des i5 et 17 floréal an H et 6 mai '704).
Pour faciliter la vente des biens nationaux et pour donner plus de crédit aux assignats, la Constituante avait décrété que ces biens se paieraient, par annuités, en assignats et même sans intérêts Or, les assignats ne tardèrent pas a être dépréciés, tellement qu'au commencement de mai '794 l'assignat de toc livres n'en valait plus que 3~. On vott d'ici la somme assez innme que dut payer la municipalité de Tain pour l'acquisttion de son champ de foire et sa place de Mars. Par ce simple détail t) est permis de constater que l'Histoire économique de la Révolution est d'une importance capitale. Elle est aujourd'hui étudiée avec soin par des spécialistes de valeur, citons notamment Rene Stourm, Ch. Gomel, M. Marion, G. Lecarpentier, A. Vialay, des Cilleuls, Minzes et Loutchitskl. Quant à l'ouvrage de Sébastien Charléty, La vente des biens M~tOtMM.f dans le Rhône, ce livre contient
de la littérature révolutionnaire. Mais, après la tempête, des idées plus sensées se firent jour. La place changea de nom et prit celui d'un monument qui, s'il n'éternise pas le triomphe de la liberté et de l'égalité, atteste tout au moins que la voix, même posthume, du savant qu'était l'abbé Chalieu, a su se faire écouter de ses compatriotes et les amener à prendre des mesures qui devaient assurer la conservation du taurobole. Depuis lors, et grâce à la Société d'Archéologie de la Drôme, un décret ministériel l'a classé à juste titre parmi les monuments historiques ('90;).
H nous reste maintenant à dire ce qu'était un taurobole, ce que fut surtout le nôtre, enfin, à reproduire et à interpréter son inscription dans un sens strictement scientifique.
II
Dans les religions païennes de l'antiquité, il existait un culte de Mithra et de Cybèle, d'origine orientale, où s'accomplissaient les rites d'un sacrifice expiatoire ou purificatoire, dénommé taurobole, en raison du taureau immolé comme victime devant un autel en pierre, portant une inscription commémorative, et orné de sculptures caractéristiques repiésentant des bandelettes, des couteaux victimaires, et enfin la tête d'un taureau, appelée bucrane, d'un mot grec signifiant tète de ~u/.
des erreurs et des lacunes considérables, et ne peut que donner des idées fausses sur le prix définitif des ventes. Au fond, cette colossale translation de la propriété n'a été, pour ['Etat, qu'une vaste duperie.
Voici comment se passait la cérémonie.
Sur le devant de l'autel, était creusée une fosse recouverte d'un plancher percé de nombreux trous, audessous duquel se tenait le prêtre. La victime, parée de bandelettes, de guirlandes et de fleurs, était conduite avec pompe au lieu du sacrifice, et bientôt, sur la pierre même de l'autel, après des incantations et des prières, accompagnées par des joueurs de flûtes, on l'égorgeait, et son sang, coulant en abondance, retombait sur les vêtements du prêtre, lesquels en étaient bientôt tout couverts. Le sacrifice achevé, ce dernier sortait de la fosse et se montrait ainsi au peuple, qui poussait alors de bruyantes acclamations, et le reconduisait au temple, le considérant à i'éga) d'un dieu.
Ces sacrifices, qui nous paraissent étranges, étaient fort goûtés des populations païennes. Elles n'étaient pourtant pas très fréquentes, car elles n'avaient lieu que dans des circonstances exceptionnelles, où l'on invoquait Cybèle, soit pour la conservation de l'empereur et de sa famille, ou maison, soit pour la prospérité d'une province ou d'une ville (civitas), soit pour éloigner un fléau ou un danger imminent. Ajoutons que ces cérémonies se répétaient plusieurs jours de suite. Tel était le sacrifice païen appelé taurobole, mot qui s'applique également à l'autel en pierre dont on faisait usage. Ce culte, particulièrement consacré à ]a mère des dieux, Cybèle, se propagea rapidement dans le monde gréco-romain, où il resta très populaire jusque vers la fin du )v° siècle de notre ère.
Les Romains eurent soin de l'introduire avec leur religion, dans la Gaule Narbonnaise d'abord, puis dans les trois autres Gaules, les tres Galliae, dont Lyon était
la capitale, savoir l'Aquitaine, la Lyonnaise et la Gaule Belgique.
Toutefois, il semble avoir été beaucoup moins pratiqué dans ces provinces que dans la Narbonnaise qui comprenait, on le sait, toute la vallée du Rhône et le midi de la Gaule. C'est la région en effet où les autels tauroboliques ont été retrouvés en plus grand nombre. Citons notamment ceux de Lyon, de Tain, de Valence, de Die, d'Orange, d'Avignon, de Toulouse et de Lectoure.
Celui de Tain compte parmi les plus importants en raison de son inscription qui, en même temps qu'elle nous renseigne sur le culte et les cérémonies que commémore ce monument, présente encore, au point de vue de la langue latine, certaines particularités intéressantes justement relevées.
CHARLES BELLET.
(A COM<ttMet.)
LE DAUPHINÉ
A
L'ACADÉMIE FRANÇAISE
De toutes les institutions de l'ancienne France, l'Académie française est à peu près la seule qui ait résisté à l'action destructive du temps. Bien mieux, alors qu'il n'y a presque rien qui ne se désagrège et ne s'effrite avec les années, elle ajoute au contraire peu à peu, et pour ainsi dire chaque jour à son autorité, son importance et son prestige car, tandis qu'elle n'était à l'origine qu'un groupe de gens de lettres et de gens de cour ayant pour principal, sinon pour unique souci de mériter les bonnes grâces de Richelieu, qui finit par leur assurer l'existence légale, nous la voyons arriver insensiblement à la liberté de ses mouvements, devenir peu à peu la maîtresse de ses choix et, ce qui est peut être plus remarquable encore, constituer au sein d'une nation passionnément égalitaire, une aristocratie dont les membres décorés du titre d'immortels, comptent parmi les illustrations les plus indiscutées et les plus respectées du pays. Ce qui explique le soin avec lequel de vaillants érudits comme M. René Kerviler, par exemple, se sont attachés à recueillir tout ce qui se rapporte aux membres de l'Académie française, appartenant à telle ou telle province.
Or, bien que sous ce rapport là le Dauphiné n'ait pas été aussi favorisé que d'autres provinces, il n'en a pas moins eu son contingent d'immortels, six, dont trois ont compté parmi les premiers membres de l'illustre compagnie, autrement dit, furent les collègues de Conrart, de Balzac, de Voiture et de Chapelain, et dont les autres doivent à leurs travaux, dont l'Académie a consacré la valeur, d'avoir leurs noms entourés d'une auréole qui se réflete sur les pays qui les virent naître. On ne saurait donc trop mettre au jour ce que l'histoire nous apprend de ces hommes d'élite qui ont mérité le titre d'académiciens, et c'est ce que je vais tâcher de faire dans l'intérêt de ma province natale, dont toutes les gloires me tiennent au cœur, et cela, disons-le, sur les instances de mon vieil ami et collègue. M. Victor Colomb, dont la riche bibliothèque est une inépuisable carrière de matériaux pour tous ceux qui ont, comme lui, l'amour du pays.
BALTHAZAR BARO
Auteur dramatique et poète, maintenant oublié, Balthazar Baro est en réalité le premier dauphinois qui ait eté membre de l'Académie française, et nous pouvons ajouter qu'il jouit en son temps d'une célébrité aux longs
échos (j), car un critique moderne des plus sérieux, après avoir constaté que Baro conserva longtemps la réputation d'un grand écrivain, dont le Dictionnaire de l'Académie invoque souvent l'autorité, soutient que bien qu'il ne soit guère à présent connu que de nom, « il n'y a pas une de ses pièces, pas une des scènes qu'elles renferment où l'on ne trouve des beautés de premier ordre, qui seraient remarquées même dans Corneille H. Ce qui l'amène à dire que sa réhabilitation littéraire serait aussi juste et plus facile que celle de Ronsard (2).
Et le plus curieux dans tout cela, c'est que, bien que cet écrivain ait laissé une douzaine de pièces, il doit uniquement sa réputation à la part qui lui revient dans le fameux roman d'Astrée, dont Honoré d'Urfé fut le principal auteur, et dont la publication peut être considérée comme un événement du siècle, parce qu'elle marque l'avènement d'une autre littérature que celle des romans de chevalerie, et surtout a cause du prodigieux succès que ce roman eut dans tous les milieux. Mais précisons
Ainsi que l'érudit M. Mellier l'a péremptoirement établi dans une intéressante étude (~), Balthazar Baro appartenait à une famille de Valence, sur laquelle il a rassemblé quantité d'utiles renseignements, que nous tâcherons de résumer plus loin, et il y a tout lieu de croire que c'est lorsqu'il s'éloigna du Forez, pays de la
()) ~/)~<0)rc de l'.4cadérnte /)'t!ttC~txe, édition Livet, I, ~3y. (2) Reculs, Btog'rftf/tt'e du O~M~AtMe, 79. Catalogue .So~fUHf, t,<o~.
(3) Bd«A~arB<!ro, de l'Academie ~)tC~;M. Valence, tSg~.
belle Diane de Château-Morand, sa femme, dont les excentricités avec ses chiens de chasse lui rendaient la vie impossible, qu'allant en Piémont, où l'attiraient ses liens de parenté avec la maison de Savoie, d'Urfé emmena Baro avec lui, en qualité de secrétaire. Comment celui-ci, qui ne jouissait encore d'aucune réputation, attira-t-il l'attention du grand seigneur qu'était Honoré d'Urfé ? Il est assez difficile de le dire, mais il est vraisemblable qu'ils s'étaient auparavant rencontrés au collège de Tournon, alors le grand foyer intellectuel de la région, et conséquemment le rendezvous de la jeunesse intelligente et lettrée du Sud-Est. En tout cas, devenu secrétaire de l'auteur d'~4s/ Balthazar Baro ne tarda pas à être pour lui un collaborateur tellement imprégné de ses idées et nourri de son esprit, que lorsqu'il mourut le i" juin 1625, sans avoir pu terminer son œuvre, il lui recommanda expressément de cela faire, à l'aide des notes et papiers qu'il lui remit, le chargeant en outre de faire d'abord imprimer la quatrième partie de son roman restée manuscrite. Ce qui constitua certainement une lourde tâche pour notre valentinois, mais le plaça, par contre, dans une situation exceptionnelle, en le faisant bénéficier de l'enthousiasme extraordinaire qu'excitait alors dans toute la France et même au dehors, le roman inachevé d'Asti-ée.
Partant, Baro se mit donc résolument à l'œuvre et si bien qu'en deux ans et demi il remplit sa tâche, autrement fit imprimer la quatrième partie de I'/l~ œuvre de celui qu'il appelait avec raison son maître et, ce qui est toute autre chose, dédiait « à haut et puissant seigneur Ambroise de Spinola, marquis de
Balbaces, conseiller d'Estat de sa Maiesté catholique, chevalier de ses ordres, et son capitaine général (i). <( La COKC~M~!0/! et ~e~)'e partie d'A~/ree, où par plusieurs histoires et sous ~ersOKKes de ~er~ers et d'autres, sont d~«~ les /MC~/eM)'~ effets de l'honneste a~tï~ë », c'est-a-dire un volume de 956 pages, pouvant faire pendant aux mille ou douze cents pages consacrées par d'Urfé aux trois premières parties de son roman mais avec cette différence toutefois, qu'Honoré d'Urfé ne consacra pas moins de douze ans (tôoy-iôio) à l'élaboration de ses mille ou douze cents pages, tandis que Baro s'acquitta de sa tâche en deux ans et quelques mois.Et ce qu'il est d'ailleurs bon d'observer encore, c'est la promptitude avec laquelle tout ce qui se rapporte à l'Astrée fut mené par Baro, du temps de ce dernier, ainsi que le prouvent les pièces liminaires placées en tête de son volume. Car on y voit notamment que, dans l'esprit de son auteur, l'/ls~es dut toujours former cinq parties de douze livres chacune, et dont les trois premières seulement étaient imprimées quand mourut d'Urfé, qui laissa à notre valentinois le soin de faire imprimer la quatrième partie, restée manuscrite, et d'ajouter au tout une conclusion presque aussi importante que ce qui était sorti de sa plume. Enfin, nous savons par le privilège obtenu du roi, le 10 novembre 1627, pour l'impression de cet « agréable et excellent ouvrage », que huit jours, après Baro céda ce privilège à un libraire de Paris, qui s'en associa deux autres. Mais le plus extraordinaire, c'est que ces différentes cessions de droits ayant eu lieu le t8 novembre
(1) Un des plus fameux généraux du xvx' siècle, décédé en ;63o. 2" SÉRtE.Xt.Ut''VOLUME.–tÇOÇ. )8
1627, il est officiellement reconnu dans les registres des requêtes ordinaires de l'Hôtel du roi, que ce volume a été achevé d'imprimer pour la première fois, le dernier jour du mois de décembre dela même année 1627.
Et maintenant, comme je ne saurais résumer ici, si succinctement que ce soit, cet ~l~~c dont tant et tant d'écrivains se sont occupés pendant plus de deux cents cinquante ans, sans dépasser et de beaucoup les limites qui me sont assignées, et qu'on n'a généralement fait attention qu'à d'Urfé, alors que c'est tout particulièrement Baro qui nous intéresse, je vais tâcher de réparer cette omission a l'aide des travaux de Al. Met)ier. Les Baro étaient-ils d'origine étrangère, comme la désinence du nom tend à le faire supposer, piémontais, comme l'a avancé Henri Alartin C'est possible, mais il est en tou-t cas certain, qu'un Gaspard Baro étant devenu juge royal de la cour commune de Grenoble, le 15 novembre ]~68, obtint vingt ans après une charge de conseiller au parlement de cette ville, résignée en sa faveur par Claude Bertier, et passée en 1618 a autre Gaspard Baro, son fils, qui avait été reçu docteur en droit en l'université de Valence, le 9 décembre 158~ (t) et dut aux notes dont il enrichit les Dt~OHM de Guy Pape, ~édit. de Lyon, )6f8), d'être célébré par Expilly dans un médiocre sonnet dont les tercets que voici peuvent donner une idée
C'était Haspatd Baro qui fut en son vivant
Conseiller d'équité juste, sage, savant.
Qm fut doux et sévère en sa charge fidèle;
(t) Archives de la Drôme, E, g[.
Ferme, rond et constant il a vécu toujours,
Ferme, rond et constant il a fini ses jours.
Est-)) plus belle v<e, ou mort qui soit plus be!)e
Or, cet annotateur des Dec~ïo~e~ était évidemment le frère d'un Hercule Baro qui devint professeur en l'université de Valence vers 1592 et dont le nom figure parmi les collaborateurs de l'/Ks~t/t'o, ~-n~/e~t'a! ~a/!<~ MMt'T,'fr.s?'M Va/eK/yMfX, rarissime volume publié en 1601, sous le nom du recteur André Basset, et contenant avec les lettres-patentes du Dauphin, qui fut ensuite le roi Louis XI, la bulle du pape Pie II et les statuts primitifs rédigés vers i4go, par le premier recteur Adhémar de l'Orme, et quantité d'autres documents historiques d'un grand intérêt (i). Et cet Hercule Baro dont la femme appelée Claude ou Claudine de Burin, était veuve en 1610, fut le père de Balthazar, que les biographes font naitre à tort vers 1600 ou plus tard, attendu qu'il était docteur en droit et agrégé de l'Université en t6~, et dont la maison encore debout l'angle de la rue Chauffour et de la place du Colombier, appartient aujourd'hui à M. Mellier (2).
De toutes façons, Balthazar Baro était donc un dauphinois, qui plus est, un valentinois, dont la naissance ne saurait être postérieure à 1595, et comme l'auteur de l'/ls/~ëe fit ses études au collège de Tournon, dont les écoliers fréquentaient couramment ceux de l'université de Valence, leurs voisins, il est assez naturel que d'Urfé se soit adressé à Balthazar Baro, lorsqu'il voulut emmener avec lui, comme secrétaire, un français au
()) NADAL, /~MtrC~<'t/n!)'Pf~f<C ~tcxcf, t2Ç. (2) MELLIER, Baitharar Baro, t). i.
delà des Alpes. Mais ce qu'il est bon de remarquer avec cela, c'est que si d'Urfé trouva dans Baro un secrétaire idéal, celui-ci dut nécessairement gagner, par contre, beaucoup au contact d'un homme d'autant d'érudition et de culture qu'était d'Urfé; d'où s'en suivit entre ces deux hommes un courant de sympathies qui s'affirma à l'heure suprême, par la recommandation expresse que d'Urté fit à Baro, de mettre la dernière main à son œuvre, après en avoir fait imprimer la quatrième partie, son œuvre à lui, qu'il laissait manuscrite. Ce qui valut, ainsi que je ['ai dit, à notre valentinois, une situation exceptionnelle, en le faisant non seulement bénéficier de l'enthousiasme qu'excitait de plus en plus l'~4.shee, mais encore pénétrer plus avant dans la haute société savoisienne, ainsi qu'on peut l'induire de ce fait que la princesse de Piémont elle-même, intervint auprès de notre valentinois pour qu'il exécutât les dernières volontés d'Honoré d'Urfé (i).
Seulement il n'en fut pas tout à fait de même a Paris, quand Baro y alla pour s'entendre avec le libraire François Pomeray, touchant la publication de l'oeuvre entière car on ne voit pas que les Godeau, les Chapelain, les Alatlevilte et autres hommes de lettres qui devaient être les premiers membres de l'Académie française et s'assemblaient en attendant chez Conrart, lui aient fait l'accueil qu'il pouvait attendre, ne fût-ce qu'à cause de cet ~L/~eque François de Sales, te futur évêque de Genève et Camus, évêque de Belley, appelaient (( le bréviaire de tous les courtisans ?, et que La Fontaine, qui le disait (( un livre délicieux n, se vantait de le
()) GERM*, /f)-~e tf'/A)MQr~ ~'f/)/< ~3.
lire encore avec la barbe grise, après l'avoir lu petit garçon (:).
Or. il est assez difficile de se rendre compte de cette attitude, qui empêcha un moment Baro de prendre place parmi ses collègues car Pellisson, qui prétend que notre valentinois encourut le mauvais vouloir du cardinal et, par suite, celui des futurs académiciens, en se faisant admettre chez la duchesse de Chevreuse. où il eut beaucoup de succès, fait évidemment erreur, attendu que c'est justement Richelieu qui le fit entrer ensuite chez la grande Mademoiselle en qualité de gentilhomme de sa maison, et qu'on le gratifia peu après d'une charge nouvellement créée, de procureur du roi au présidial de Valence. Ce qui ne put évidemment se faire que de l'aveu du grand cardinal.
En dépit de tout, Baro finit, du reste, par obtenir la place à laquelle il avait droit parmi les immortels, car on lui attribua vers 1634 ou 35 le siège d'un nommé Auger de Mauléon, sieur de Granier, qui ayant été élu peu de temps auparavant, à t'unanimité moins trois voix, fut ensuite exclu de la compagnie par ordre de Richelieu, parce qu'il avait abusé du dépôt d'une somme considérable d'argent qui lui avait eté confiée par des religieuses étant convenu avec cela, qu'on ne parlerait plus de lui, à cause du repentir dont il avait ensuite fait preuve (2). Mais on ne sait pas grand chose touchant la part que notre valentinois prit aux travaux de l'Académie, sinon qu'il fut un des quatre commissaires chargés de se prononcer dans la fameuse querelle du (t) PELLISSON, ), 252.
(2) PELLISSON, f, 253.
Cid, et que c'est vraisemblablement à lui qu'il faut attribuer une épitaphe de Richelieu, dont les trentedeux fort médiocres vers sont signés par le sieur B., le sonnet que voici, étant d'ailleurs, à mon sens, ce que l'on trouve de meilleur dans la quantité de morceaux, tant en prose qu'en vers, que renferme la Co)tc/!<&oH ~'A~ee.
Eufin, cc long hyver a calmé les orages,
Leszcprur:) du Printempsannoncenttc retour, Les bergers amoureux dansent sous les ombrages Au chant de mille oiseaux qui se parlent d'amour. Le froid et la pasleur ont quitté nos visages,
Et mesme les poissons dans l'humide séjour
Admirent les oeillets, qui dessus nos rivages
Naissent quand le soiet) y fait naistre le jour. Amsi je vois qu'en l'atr, sur la terre et dans l'onde, Les oiseaux, les poissons et le reste du monde, Ttrent quelque plaisir d'un si doux changement. Moy seul infortuné, je meurs loin de Florice,
Rendez-la moy, grands dieux, est-ce un trait de justice, Que ma seule douleur dure éternellement (2).
Marié ensuite à Paris, avec une veuve Pouteau, sœur de son hôtesse et fort belle femme, il s'y occupa trois ans durant des querelles du Présidial. ce tribunal de nouvelle création, dont il faisait partie, avec l'évêque de Valence, qui n'admettait pas que le droit de justice dans son diocèse, dont il était seigneur féodal, put lui être contesté, et ce qu'il y a de plus surprenant, c'est que c'est précisément dans ce temps là, qu'il publia ses pièces de théâtre, dont la dernière est datée de
(t) Cone/t~tOtt d'~ttrM, édition de 1647, 3]y.
1652, tandis que c'est en 1650 que Baro mourut, non point à Montpellier, comme le dit Rochas, mais probablement à Paris, laissant une nombreuse famille. Il y avait alors trois ans que le libraire Antoine de Sommaville avait fait imprimer à Rouen une édition en cinq volumes de l'~ls~ëg. dont le dernier volume était entièrement consacré à la CoMc/M.s:'on et <~e)'M!'ere partie d'Astrée, composée s?<r les vrais ;7:e~HO:')es de ~/e:< M. Honoré d'Urfé, c'est-à-dire à ce qui était tout à fait de Baro, chacun des douze livres que renferme ce volume étant précédé d'une belle planche en taille douce, et le volume, lui-même ayant en tête un portrait emprunté à l'édition de 16~7, dans lequel Baro est représenté en buste de trois quarts, dans un ovale soutenu par deux amours et placé sur un fond d'architecture, avec ce texte autour de l'ovale BALTHAZAR BARO, NATIF DE VALENCE en bas Afa!.sMe ye, et dans une tablette au-dessous les vers suivants
On peut se convaincre d'après cela, que le roman d'Honoré d'Urfé terminé par Baro, excitait alors autant d'enthousiasme qu'autrefois en France, et cet enthousiasme qu'avaient partagé Huet, Patru, Pellisson, La. Fontaine et quantité d'autres hommes illustres, se retrouva encore longtemps après chez Jean-Jacques Rousseau mais il n'en faut pas moins convenir, quand
Cher Baro, bien que ton visage
Paroisse en ce fameux ouvrage
Aussi bien pftMt que ton esprit
?OM/;M-~<g'!<!Cf4~i~M
QM'<<~Kt<(}H'd'mO«r/<ti<MC)'~ D une des plumes de ses ailes,
DEL'ESTOÏLLE.
même, comme l'a remarqué M. Louis de Loménie (i), (' que cet ouvrage n'est pas de ceux qui survivent aux changements que le temps amène dans les goûts et les mœurs des sociétés, et qui traversent les âges doués d'une éternelle jeunesse )), car il n'est pas douteux que si un lecteur de nos jours ouvre l'/t~ree avec l'espérance de trouver dans cette lecture de vives émotions, il est à craindre que cette espérance soit déçue, et qu'il aura peut-être même besoin d'une certaine force de volonté pour continuer sa lecture jusqu'au bout.
En dehors de la Conclusion et dent!'ë)'e /)a)/e ~'As/)ëe, qui est sans contredit son œuvre capitale, Baro est encore l'auteur d'une Ode sur la Mto; t de Henri de Sc/tOM~e)' /7Mrec/ de France, qu'on trouve dans un recueil publié en 16B et Contre /'a;M<eH)' d'un libelle, ode ~0:0 le cardinal de Richelieu, Paris, Camusat, 1637, in-4°.
Et l'on a encore de lui les pièces de théâtre suivantes, toutes fort rares
1° Célinde, /)oë;Me Aerot~Ke, Paris, Fr. Pomeray, In-8" i62(), pièce en 5 actes, dont le ~°" est une tragédie en 3 actes et en vers, intitulée /7o/o~te)'Ke.
2° La Clorise de Baro, ~as~oraMe (en vers), Paris, Fr. Pomeray. [6~2, pièce tirée de l'Astrée, qui fut jouée à l'hôtel de Bourgogne en 16~1 et reprise en 16~6 et 16~7, par les troupes de Bellerose et Montdoré.
~° Saint-Eustache, tragédie, Paris, 16~9, In- Réimprimée dans un 7~ectM:7 de <rf.d:es saintes. Paris, Est. Loyson, 1666, in-12.
~° La Parthénie de Baro, dédiée à Ma~eMO!se/ Paris,
~<) Revue des deux mondes, <85y, 5gg.
Sommaville et Courbé, 1642, in-4°. Tragédie en 5 actes et en vers, jouée en 16~1.
~° La C~)'?~:OM~e de Baro, dédiée à la Reyne, Paris, les même, 164~, In-~°. Tragédie en actes.
6° Le prince /M~ ~oe/Me ~Ma:Me, Paris, les mêmes, 16~)9, in-8°.
7° Cariste ou les cA~r~Kes de la &eaM~, /)oe~Me d'ra/Ma!tique, Paris, les mêmes, 16~ In-~°.
8° Rosernonde, tragédie en 5 actes. Paris, les mêmes, 1651, in-4°.
ç" L'awaK/e~/M~/ca/n'e, Paris, les mêmes, i6~2,in-~°' L'érudit Al. Maignien. conservateur de la bibliothèque de Grenoble, cite dans ses Ge~ej/otyïe.s et anKO! ~a'?</)/Mo~e.< un ouvrage intitulé Cléosandle, « où sont rapportés tous les passe temps du carnaval de Toulouse, en cette année 1624, par le sieur Baro dédié à Al. le duc d'Angoulême) » Tolose, Jean Baude, 162~, in-8°, recueil mi patois, mi français, qui est inconnu des bibliographes et presque introuvable. Serait-il de notre valentinois Baro ? Je n'ose l'affirmer et me contente de l'indiquer.
J. BRUN-DuRAND,
.sti/T~e,).
TOPONYMIE DE LA DROME
DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE
DES COMMUNES, PEUPLES ANCIENS, FLEUVES, RIVIÈRES, MONTAGNES
DU DÉPARTEMENr DE LA DROME
(SutTE. – Voir les )6:' à ~6g* hvratsons)
Les Tricoriens et les Vertacomicores. Ce petit peuple celtique denomme par les auteurs latins Tricorii et par Strabon « Tomo~ot confond sa toponymie et son individualité avec les Vertacomicori (les Vertacomicores) dans le compartiment topographique, ils sont classés par le Geographe grec après les Iconiens, dans l'ordre suivant « /M « Voconces, les lconiens, les Tricoriens et à côté de ceux« ci les Médulles mais sur l'autre versant de ces régions de « montagnes qui s'inclinent vers l'Italie habitent les Tau« rini. » Ainsi ces peuplades Gauloises sont distribuées du côté ouest des Alpes en décrivant une ligne qui conduit le territoire des Médulles jusqu'au vallon des Gnndrans d'où descend la source de la Durance les Médulles avaient comme voisins à l'Est, dans les vallées inferieures des Alpes, les Taurini.
Mais les Tricoriens partagent avec les Tricastins l'héritage de renommée que leur a légue Tite-Live. Annibal et son armée, qui n'ont janmis vu tes bords de la Drome, non plus que les rives de t'Isère Annibal et son armée qui n'ont pas
traverse le territoire des Ségalauniens, non plus que celui des Allobroges proprement dits, arrivent c/ les Tricoriens, après avoir suivi la lisiere du domaine des Voconces. « Sans donner lieu à une discussion aussi animée que celle « sur les Tricastins, écrit Macé (suprà citai), la position des « autres peuples secondaires de nos pays a suscité quelques « débats. Tels sont les Tricoriens, mentionnés également « par Tite-Live, dans le récit de l'expédition d'Annibal, puis « par Pline qui les appelle Tricolliens. Les renseignements « que nous donnent ces trois écrivains (Strabon, Tite-Live « etPline), sont trop insuffisants et trop vagues (?) pour qu'on « puisse positivement déterminer la situation de ces peupla« des (les Iconiens et les Tricoriens). Tout ce que nous « savons par Strabon c'est qu'elles étaient voisines des « Voconces et des Médulles et qu'elles habitaient de très « hautes montagnes. C'est quelque chose mais ce n'est pas « assez
A cet exposé et à cette observation, nous repondrons que ces repères de voisinage et de relief topographique suffisent à délimiter les marges du domaine tenu pjr ces deux clans les Iconiens étaient enclavés, étreints pas les Voconces à gauche et les Medulles à droite, mais les Iconiens avaient également au nord les Ce~/roM~ comme voisins de droite deja nous connaissons la cartographie des Vuconces et des Medulles. ainsi celle de leur enclave deviendra plus facile à déterminer. Les Tricoriens et les Iconiens, écrit Delacroix, habi« taient la partie des départements de l'Isere et des Hautcs« Alpes qui limite les arrondissements de Die et de Nyons ». C'est exact, mais en adoptant cette position que les Iconiens sont au nord et les Tricoriens au sud.
En réalite les Tricoriens ou Vertacomicores occupaient les vallees du Royannais et les défilés du Vercors; ce dernier nom n'est qu'une contraction Ver et corr sont deux termes
de l'idiome celtique et néo-celtique avec la signification de ver montagne, corr petite, par opposition aux Alpes f'/H-pen cimes élevées), qui ferment l'horizon du nord au sud les monts du Vercors remarquables par la régularité de' leurs arètes, leurs grands et leurs petits goulets, ont à peine une moyenne de <8oo mètres d'altitude et s'abaissent en gradins par une série d'avalaisons.
On doit attribuer aux Tricoriens-Vertacomicores toute la région du Vercors et aussi le massit des montagnes du Dévo<M~ ce massit, le Dévoluy, dépend de la Drome, de l'Isère où il a son sommet le plus élevé, l'Obiou avec une altitude de 2793 mètres et surtout des Hautes-Alpes où se dresse le mont Aurouze. Le Dévoluy est separé du Vercors par une depression où passe le col de la Croix-Haute ce col met en communication le vallon du Buech, bassin de la Durance, et le vallon de l'Ebron, bassin de l'Isère, par le Drac. Le territoire des Vertacomicores et des Tricoriens affectait la forme d'un cône avec son sommet arrose à gauche par l'Isère et à droite par le Drac depuis son confluent avec l'Isère jusqu'à sa source dans la vallee de Champoléon. La nappe de ce cône avait sa base baignee par le cours de la Drome et du Buech la limite extrême de ces clans gaulois atteignait ce point historique inscrit sur la carte des itinéraires romains sous l'appellation de a ~4~ Fines » aujourd'hui la Roche des Arnauds, petite commune de l'arrondissement de Gap l'étude topographique des elements documentaires et des temoignages legués par les auteurs anciens, les grecs et les latins, permet de laisser rentrer chacun de ces petits peuples dans le cadre de son domaine particulier aux Vertacomicores appartient la region du Vercors; mais aux Tricoriens on doit abandonner le massif du Dévoluy et la belle vallee arrosee parla rivière le Drac qui les séparait des Iconiens au nord-est et des Médulles au sud-est.
En ce lieu de notre étude, nous devons relever un argument nouveau, une constatation dépassanten intérêt la simple
décomposition d'un tracé de limites entre peuples, Tite-Live va, une fois encore, nous aider a dissiper le mystere primitif du texte où il mentionne les Tricoriens.
De cette station qui a porté la dénomination latine de « Ad Fines (aux frontières, aux limites), c'est-à-dire le coin de terre où les Tricoriens plaçaient la limite sud de leurhabitat, si nous descendons par les bassins des Buech, à ce point de jonction où le petit Buech, alimenté et grossi par des torrents alpestres, s'unit au grand Buech, nous découvrons le massif montagneux désigné dans l'itineaire d'Antonin sous le terme de Mons Seleucus, mont Saléon, ce massif, dominé par le rocher d'Arambre à une altitude de 870 mètres, voit bâti à ses pieds le petit bourg de la Batie-Montsaléon. Or, la s'offre aux méditations, aux critiques de l'iiistoiieii le point de contact, de soudure des deux peuples, les Voconces et les Tricoriens les premiers y avaient le terminus topométrique des terrains qu'ils détenaient, et les seconds, lesTricoriens, allongeaient leur domaine jusqu'à leur terminus historique « Ad Fines », La Roche des Arnauds, situee a 22 kilomètres dans la direction nord-est, en suivant le demicercle formé parle coms du petit Buech; ce bassin du Buech confine à la vallee et au bassin de la Durance, qui coule à quelque distance au-dessous.
Là, en ce périmètre, en ces massifs baignes par ces cours d'eau, se saisit et se dénoue également le nœud du probleme carthaginois, le passage des troupes d'Annibal en marche vers les Alpes; ces quelques lignes du recit de Trte-Live se traduisent en face de ce tableau avec leur exacte valeur « Annibal, dit l'historien latin, se mit en marche, apres « avoir quitté l'Insula (t'He). vers les Alpes; il ne prit pas le droit chemin, mais il tourna a main gauche vers le pays « des Tricastins, puis suivant la lisière du paysdes Voconces <' il se dirigea vers les Tricoriens, et atteignit le ~M)~ la Durance. »
L'extrema ora de Tite-Live, c'est-à-dire l'extrémité du pays des Voconces, en côtoyant leur lisière méridionale jusqu'au point de contact avec les Tricoriens, avait son arrêt au pied de ce mont Seleucus. dominant la course des eaux du Buech, et de tatDurance; la base du massif contournée. la Durance montrait ses rives à l'armée du chef carthaginois.
Les Iconiens. Les Iconiens, dénommes en grec par les copistes du texte de Strabon tantôt txM<o< (lconioi), tantôt Etx~Mt (Siconioi), ont reçu dans les leçons des traductions françaises, de même, les noms de Iconiens (Tcon!) ou Siconiens (~t'co~) loin d'être des formes erronées, comme l'ecrit Aymar du Rivail, cette double graphie correspond au type dérivé de son étymologie. Mac é(supra cita), et la commission ad /?oc du congrès scientifique tenu à Grenoble en septembre <85y, pensaient « qu'entre les deux leçons Iconiens « et Siconiens, celle-ci devait être préferée et qu'il fallait « peut-être [?) retrouver le souvenir de cette peuplade dans « les noms actuels de quelques localités des Hautes et des « Basses-Alpes, Sigoitier dans le canton de Serres, les deux « Sigoyer, toutes ces localités situées dans des pays si acci« dentes et si tourmentés, entre le col de ta Croix-Haute, le « col de Cabre et le mont Aurouze, et dans les bassins de ces « torrents désignés sous le nom de Buech, qui se réunissent « pour aller se jeter dans ta Durance'
Cette définition des lieux a truies les qualites d'une étude precise dessinée sur place, mais cetteconfusion, ceiteréunion des deux clans en un seuf ne saurait se retenir les Iconiens et les Tricoriens constituaient deux groupements distincts, voisins il est vrai, mais vivant séparés; par la conduite logique de son récit, Tite-Live assigne aux Tricoriens leur
véritable domaine « dans ces pays accidentés et tourmentes, a dans ces bassins où coulent les Buech a au mont Seleucus, les Tricoriens se relient aux Voconces, d'après le témoignage de l'historien latin le point de contact reposait en ces lieux où gîte un minuscule f!CM~ du nom de La Batie-Montsaléon. Si les deux formes Iconiens et Siconiens peuvent être rattachées à une graphie commune, la raison s'en tire de l'origine onomastique l'étymologie de ces deux termes est dérivée des deux vocables celtiques e Is et Kun is ou a la signification de bas, profond, et kun a la valeur de vallée les deux termes liés font vivre l'expression topographique de « vallées profondes i' et évoquent le spectacle d'une contrée entrecoupée de gorges, de ravins, de bassins encaissés en des failles évidées, creusées, ~its d'abîmes sauvages; les graphies Iconiens et Siconiens s'expliquent par la connaissance de l'idiome de leur origine.
Le site discret du campement terrestre occupé par les Iconiens comprenait cette nappe montagneuse triangulaire, formée des massifs de Belledonne et des montagnes superbes du groupe des Grandes-Rousses; trois cours d'eau enveloppaient leur territoire La base méridionale du domaine Iconien était baigné par le Drac, de sa source jusqu'à son confluent avec l'Isère ce cours d'eau les separait des Tricoriens le sommet du triangle territorial s'achevait en ce lieu de Chamousset où l'Isère reçoit le Drac en bordure de la muraille de Belledonne à gauche, descend l'Isère, limite fluviale entre les Iconiens et les Allobroges; ce cône orographique était lavé à l'occident par les eaux de l'Isère, à l'orient par les flots torrentueux de l'Arc et au sud par les masses abondantes du torrent le Drac.
Au nord-est les Iconiens reconnaissaient comme voisins les CeMtroM~ distribués dans les hautes vallées des Alpes, audessus des Salasses, sur le versant Italien. Strabon nous apprend que sur ces hauteurs une route s'ouvrait, servant de passage d'Italie dans la Gaule transalpine méridionale cette
voie se bifurquait des deux branches, l'une accessible aux charriots, traversait le ~crrt'fofe des Centrons, etait la plus longue l'autre taillée dans la muraille des Alpes Péninnes était plus courte, mais très étroite et trop déclive Une remarque à noter '< On donne souvent dans les Alpes, écrit le colonel Niox ()), le nom de MONT a des passages et non à « des somfne~. C'est ainsi qu'il n'existe aucune ct~e à laquelle « on puisse a~Mef le ?io' de Mot!<M!«tt, deMont-Cenis, de iMott<-Ge)tewe D.
<
Les Allobroges, leur territoire, ses limites. 11 n'entre pas dans le cadre de cette étude de retracer par les annales l'histoire des Allobroges, mais nous devons nous borner seulement a vérifier et à déterminer quelles étaient l'étendue et les limites de leur domaine territorial avant et pendant la domination romaine Cette nation une des plus puissantes de la Gaule, par sa richesse, sa gloire, les évenements les plus considérables de l'histoire romaine auxquels elle a été mêlée, a éte citée par tous les écrivains de l'antiquite, non seulement les historiens, mais aussi les orateurs et les poètes. Toutefois son nom apparaît comme première mention étymographique dans le récit de Polybe, qui voyagea en Gaule vers l'an 5o avant notre ère; ce géographe grec, qui était militaire de métier, nous dévoile dans ses écrits sa mentalité réaliste.
Sobre de détails, « 11 ne citera, dit-il, )!: noms de lieux de nos régions, ne ~M!~Ma<«)tt de peuple, a/e//L!<iOMS/'<!)/a!<<'M!fn< « )~?torëeï~esMCo?t<ey)!~o!ns mais en regard du passage d'Annibal à travers la Narbonnaise, il nommelesAllobroges N ~fr fines Ga~orMM quos Allobroges foc(!/tf )' qui sont [t) Colonel Ntox. Geog~ttf. La /)'f!nce, Parts i8g3.
placés aux frontières mêmes de la Gaule c'est la première apparition du nom de ce peuple.
Nous avons interrogé sur cette question tous les textes et tous les auteurs anciens et modernes, mais notre intérêt a été retenu par le dernier écrit paru qui les analyse et les résume tous.
En t8g5, l'editeur H. Welter, à Paris, publia sous la plume d'un érudit italien, Francesco P. Garo/tï/o, » une étude avec le titre .< Gli Allobroges e dédiée allafacoltà di lettere, di Grenoble » comme il n'existe aucune version française de ce travail notre devoir nous a mis en demeure de le traduire en ces lignes essentielles Sans nous occuper ici de tout le « territoire, qui fut autrefois tenu par les Allobroges dans « son sensle pluslarge, compris comme confédération de plu« sieurs peuples ou districts, sujets ou alliés, territoire dans « lequel quelques auteurs englobent toute la province « Narbonnaise, possession que nous ne pouvons déterminer, « force nous est de limiter nos recherches aux Allobroges « seuls, pris et connus sous leur appellation propre et res« treinte en effet, il n'est pas possible de se prononcer sur « l'étendue de leur domaine aux temps qui ont précedé la « conquête romaine.
« Dans le monde géographique du lie siècle avant notre « ère, dans le récit de Polybe, les Allobroges formaient une « nation établie en des contrees qui, si on peut s'exprimer « ainsi, étaient placées dans l'interieur de la Gaule entre « la Narbonnaise et les Alpes en attant au nord-est leurs « domaines ne différaient pas sensiblement de ceux qu'ils « détinrent plus tard aux âges historiques. Sous la domina« tion romaine, quand le district des Allobroges fut incorporé « à la province Gauloise, leurs limites au nord et à l'ouest correspondaient aussi à celle de ladite province, c'est-à-dire te Rhône et le lac Lemann (au temps de César) une autre <- frontière était l'Isère, mais du côté des Alpes on n'en connut aucune.
2" SÉRIE. XLIII" VOLUME. )000. )g
« Le cours de l'Isère ne fournissait pas non plus les signes « d'une frontière certaine car les populations Alpines « n'étaient pas encore ni assujéties, ni domptées definitive« ment, dans la suite seule, quand l'assiette administrative « de l'empire fut ordonnée, on assigna, de ce côte, des mar« ches fixes de façon à les concilier le plus etroitement « possible avec les conditions topographiques du pays « malgré quelques légères modifications de tracé, principa« lement dans l'est, la nouvelle OTÉ latine et romaine acca« para l'ancien district Gaulois on peut ainsi, avec l'étendue « de la région que la « Civitas Viennensis s'attribua sous « l'empire, préciser à peu près celle qu'habitaient les Atto« broges.
« Sous le régime impérial, ce district, le plus vaste qu'il <' fut parmi les « ciTÉs )) de la Narbonnaise, s'étendait non « seulement le long de la rive gauche du Rhône, du lac « Lemann au confluent de ce fleuve avec l'Arar (la Saône) et « dans son cours méridien;)) jusqu'au confluent du Rhôneavec « l'Isère et même au-delà du Rhône au nord, aujourd'hui le « Bugey dans l'Ain et aussi à l'ouest jusqu'aux Cévennes, <t aux rivières le Doux et le Gier dans les départements du « Rhône et de l'Ardeche, mais ces fractions de l'ancien « domaine primitif des Allobroges ont été délaissées par les « Romains. 0
« En plus, le long de la rive gauche de t'fsere, la frontière « atteignait son cours moyen et aboutissait à la vallée de « l'Arly et certainement jusqu'à celle de l'Arve et même au« delà dans ce cadre qui renfermait le district des Allobroges « on peut dire que les productions de son sol, les variétés de « son climat en faisaient une région relativement heureuse. « Leur territoire confinait aux Helvètes, aux Sequanes et « même aux Ambarres au nord les Segusiaves et une petite « partie du district des /7c<f~H~ les touchaient à l'ouest au
«sud et au sud-est leurs voisins étaient les Segovelauniens, « les Voconces et leurs protégés les Vertacomicores, les « Tricoriens, les Iconiens et les Médulles; enfin au nord-est dans les défilés des Alpes, les Centrons, les Veragres et les « A~<Mt!<e~ sont les peuples limitrophes. x
Quelques auteurs ont accordé au territoire de la '< C~/f~ Viennensis les limites que lui attribue au nord-est la fameuse inscription lapidaire de « la ~o~'c/a~ de Prarion » petite commune de la Haute-Savoie, dans l'arrondissement de Thonon-les Bains: cette tegion comprendrait ces deux parties de ia Haute-Saveie connues sous les appellations « le Chablais et le ~c!MC!g'n~ e répétons également que quelques historiens, parmi lesquels Polybe, ont désigne sous le nom d'Allobroges tous les peuples compris entre le Rhône, les A Ipes et la DMr«?tce.
Strabon nous a laissé au regard de cette région des Allobroges un témoignage historique curieux « César (Auguste), '< écrit-H, comb!a d'honneurs les flls d'Hérode-le-Grand, « ainsi que sa sœur Salomé, et Bérénice, fille de celle-ci « toutefois les événements tournèrent au détriment des fils e d'Hérode, qui furent accusés de conspiration l'un d'eux, « envoyé en exil au pays des Allobroges y passa sa vie et y « mourut, les autres fils ne parvinrent qu'à force de soumis« sions à rentrer dans leur patrie revêtus de la dignité de « Tetrarque. B Auguste donna à Archelaus la moitié du royaume d'Hérode avec le titre d'Ethnarque l'autre moitié tut divisee en deux tétrarchies et partagee entre les deux fils d'Hérode. Philippe et Antipas (Josephe: Bell-Judj. Chorier nous a livré une autre version de cette mesure d'exil prise contre un des fils d'Hérode nous la résumons d'après l'historien dauphinois dans les lignes suivantes « Hérode Antipas possédait la souveraineté de Galilée, province qui était l'une de celles de l'Etat du premier Hérode son père.
« Ce fut à lui que Pilate envoya Jésus-Christ, et ce fut lui qui fit couper la tête à saint Jean-Baptiste pour complaire à Hérodiade. Caligula ayant élevé Agrippa qu'il aimait, sur le trône des rois de Judée, Hérodiade en conçut une envie si violente qu'elle persuada à son mari que Caligula n'aurait pas. moin.s de bonté pour lui qu'il en avait eu pour Agrippa s')t se resolvait à lui aller rendre en personne ses respects et ses devoirs à Rome.
<f Caligula chassa ce pauvre prince de sa présence pour obliger Agrippa, il le condamna sans l'ouïr, il le dépouilla de ses états et le relégua avec sa femme au-deçà des Alpes. « Josèphe écrit que ce fut à Lyon, Eusèbe et Adon que ce fut à Vienne. Mais il ne mourut ni en l'une, ni en l'autre de ces deux villes il se retira depuis en Espagne avec Hérodiade, qu) eut du moins la générosité de vouloir partager avec lui le malheur qu'elle lui avait cause par sa vanité inconsidérée. Peut-être que Caligula ne voulant point les voir. leur en envoya le commandement avant d'entrer dans les Gaules où il vint une année après.
La Confédération des Allobroges. Une patiente recherche nous a permis de découvrir le site territorial où se cantonnait dans un compartiment de petite taille chacun des peuples (jauiois qui, s'emmêlant les uns dans les autres, composaient la confédération des Allobroges, comme l'appelaient les historiens anciens et quelques modernes, Aymar du Rivail, Chorier, l'abbé Chalieu. Les Allobroges avaient embrassé, aux yeux de ces érudits, en un seul état, les pays compris entre la Durance, le Rhône, les Alpes; ce peuple confédéré était assez puissant pour ne rien appréhender et tout entreprendre les autres peuples de la Gaule ne formèrent point de desseins sans leurparticipation.
Topographiquement, l'ancien Dauphiné finissait à la rivière l'Eygues, l'Isaros de Polybe et de Strabon; son cours le séparait des Cavares, le Comtat-Venaissin actuel et de cette fraction de l'arrondissement de Nyons que tenaient en parti les Mimènes et les Medulles et qui appartient au domaine provençal.
De l'Eygues à l'Isère vivaient deux peuples, bordant la gauche rive du Rhône, les Tricastins au sud, les Ségalauniens au nord, au-dessus des premiers dans la nappe centrale, limitee au nord et à l'est par le cours de la Drome et des Buech, se mouvaient les Voconces, barrés au sud par une courbe de l'Ouvèze.
A l'orient, les Voconces touchaient, en voisinage, aux Médulles et aux Tricoriens les Tricoriens se tenaient audessus du cours de la Drome et avaient à leur gauche les Iconiens enfin ces deux peuples avaient en lisière à l'orient les Médulles dont les possessions s'allongeaient des bords de l'Eygues et decrivaient une courbe, suivaient tout le cours de la Durance jusqu'au vallon des Gondrans, où elle prend sa source à l'ouest, tandis que a l'est en face des Clavières découle une branche de la Doire dans la région du MontGenèvre.
La deuxième voie romaine par le territoire des Voconces. Une conclusion inattendue. Strabon guidé par la disposition du thème descriptif observé dans ses étapes, a noté dans des chapitres divers le spectacle topographique qui se déployait sous ses yeux; l'utilité de sa méthode s'affirme en des notions exactes dans leurs clartés historiques, et précises dans leur documentation.
Dans le livre IV chapitre I°r de la Gaule Narbonnaise, le géographe grec nous déroule par un système de profil h'guré le ruban des deux voies romaines qui de l'Ibérie
conduisaient en Italie; l'une, la plus longue, festonnait tout le littoral de la Provence, le long de la voie Aurélienne, doublait le cap des Alpes Maritimes et suivait toute la Gaule Ligurienne, qui correspond à ce qu'on appelle aujourd'hui la rivière de Gênes.
« La deuxieme voie, écrit Strabon, est tracée à travers le « pays des Voconceset le domainedu roi Cottius, toutefois de « Nimes à Beaucaire (Ugernum) et a Tarascon (Tarusco), la « voie est commune aux deux tronçons; de là, de Tarusco, « elle se dirige par le passage de la Durance et par Cavaillon jusqu'au limites sud du territoire des Voconces et au « commencement de la montée des Alpes; ce parcours est de « 63 milles, de ce point, elle court de nouveau jusqu'aux « limites nord des Voconces et côtoie les terres du roi « Cottius jusqu'au bourg d'Embrun, ce parcours est de « 99 milles. A partir d'Embrun, la route est de même lon« gueur et passe par le bourg de Briançon, de Scingomagus, « station située entre Briançon et Ocelum (Suze), et les « hauts défilés des Alpes pour aboutir à Ocelum (Suze) « qui est la fin du territoire de Cottius; mais de Scingo-magus « {Cenone, Césanne), qui est dejà en territoire Italique, la « distance est de 28 milles (exactement sept). » Ce vocable Ocelum a suscité quelques controverses. Cette voie à travers le pays des Voconces route la plus directe des bords du Rhône en Italie et vice-versa avait été parcourue par Jules Cesar quand il revint d'Italie en Gaule avec quelques légions par le plus court chemin (Quà proximum iter. per Alpes erat); César nous apprenant « qu'il partit d'Ocel« htm nous amène a croire, écrit Macé (supra-citat), soit que, « avec Cluvier, Adrien de Valois et Aymar du Rivail, on voie « Exilles dans Ocellum ou Oulx, avec d'autres savants, ou « encore avec d'Anville qu'Ocellunz correspondait a Usseau • dans la vallée de Pragelas, que les Grai-Ocèles, Garucelles
« ou Gar-Ocelles se trouvaient placés entre les Centrons et « les Caturiges. »
Or, cette attribution du bourg d'Ocelum ou Ocellum à Exiles, à Oulx ou a Usseau en Piemont est également controuvée notre affirmation ressort, en premier lieu, de l'addi.tion que les traducteurs de Strabon (Muller et Dubner supra citat) ont ajoutee à leur version latine; on lit, en effet, dans le texte grec: « mais de Scingomagus (Cenone Cezanne) « a Ocelum qui est déjà situé en territoire Italique, la « distance est de 28 milles » les traducteurs ont corrigé le texte en écrivant (vulgo septem) c'est-a-dire entre ces deux bourgs la distance est seulement de sept milles en second lieu, le geographe grec nous apprend « que cette voie directe n passait à Ocelum et longeait les rives de la Doire et du Pô » (livre V, ch. I, Italia] cette notation ecartait le petit bourg d'Usseau, commune piémontaise, assise dans la vallée de Fenestrelle en bordure du torrent le Chisone, vallée séparee de celle où coule la Doire ripaire on ne peut entendre la commune piemontaise d'Oulx, graphie du mot latin lux, prononcé loux et inscrit en oulx par la métathèse de la lettre l; entre ces deux lieux Cenone (Cézanne) et Oulx la distance sur route couvre exactement sept milles (c'est-à-dire dix kilomètres) et non pas 28 milles, soit environ 40 kilomètres les traducteurs latins ont cherche à justifier leur choix de Oulx par ce clapet correctif assignant entre les deux lieux (Scingomagus (Cézanne) et Ocelum ?) une distance de sept milles au lieu des vingt-huit milles enseignes par Strabon il est démontre que la Cézanne actuelle occupe la place de l'oppidum primitif de Scingomagus; l'attribution d'Oulx identifiée a l'Ocelum du texte grec doit être rejetee, la distance entre ces deux points ne correspondant en aucune façon à celle du tracé itinéraire cite par Strabon. D'autre part, la Drome possède une commune dont la graphie va nous servir de terme de comparaison Aucelon est un petit bourg perché sur une hauteur près de Luc-en-Diois, cette agglomération a porté les
noms d'Oucello et d'Ocellon; remontons à l'origine etymologique, elle nous dévoile un vocable celtique et néo-celtique Uc'hel, latinisé en Oucellum, qui a la signification de haut, elevé au-dessus du sol ce terme Ucltel est une forme derivée de U\ (Uss), ayant la même valeur « de lieu élevé », il est hors de doute que l'Ocelum de Strabon ne s'accorde, ni avec Oulx, (l'Ad-Martis des itinéraires romains), ni avec Exiles et moins encore avec l'Usseaux de la vallée de Fenestrelle, proposépar quelques commentateurs la precision du texte décrivant le profil de la route juxtaposee à la Doire et au Pô incline à accepter Su\e, comme l'Ocelum recherché. U\ et Uc'hel, ce dernier latinisé, sont en realite les deux variantes du terme primitif us, le rapprochement du récit en determine la fixation U\ et Su\e consacrent un terme unique nombreux sont tant dans la Gaule transalpine, que dans la cisalpine les groupements dénommés en Us, Usseau, Ussel, U\, Su\e; enfin la distance par route entre Cézanne et Suze compte 40 kilomètres, qui correpondent exactement aux vingthuit milles romains relatés par Strabon un autre point à indiquer, Suze est bâtie à une altitude de 789 mètres, c'est bien en realité un lieu élevé (U\ et Uchel), les deux termes celtiques qui lui sont attachés s'allient à l'assise de son emplacement). Par ce regard, jeté sur le schéma descriptif de cette route, développant les reliefs de son terrain à travers les Cavares, les Voconces, les terres du roi Cottius, creusée dans les massifs des hautes vallées alpestres, d'où naissent et s'écoulent plusieurs fleuves, parmi lesquels la Durance, une conception inédite, une conclusion inattendue surgissent créant une adaptation topographique ignorée jusqu'ici, enseignant par l'association des textes anciens, l'impression de l'itinéraire réel que suivirent Annibal et son armée. C'est par la décomposition des jalons de cette marche historique, par l'analyse des arguments et des documents qui nous ont été lègues, que se dissipe le mystère primitit de cette époque, impose comme un défi aux forces humaines, et
nous arrivons à cette conclusion inattendue d'avoir retrouvé l'itineraire réel de la marche suivie par Annibal et son armée, du point où elle traversa le Rhône jusqu'à son entrée dans les défilés des grandes Alpes.
La vérité sur l'itinéraire suivi par l'armée d'Annibal du Rhône aux Alpes. A qui sait lire, penser et traduire l'esprit d'un texte, un document authentique en dit plus qu'une dissertation d'archéologie philosophique. Les chercheurs ont à remplir un rôle modeste, mais qui n'est pas sans utilité; les soins de s'abandonner au courant commun ne sauraient les séduire. Il apparaît bien nettement aujourd'hui que tous les historiens n'ont pas saisi clairement les termes du problème carthaginois qu'ils se proposaient de resoudre. Par l'analyse logique des textes anciens, la vérite sur ce probleme eclate à cette heure sous une forme nouvelle mais réelle elle vit par la sincerité de son passe, envisagée dans ses rapports avec les historiens grecs et latins la science (?) de certains savants doit s'avouer en défaut. Elle s'est dérobée à son obligation impérieuse, qui comporte le devoir d'enseigner la vérité à leurs concitoyens; le fait de placer sous les yeux des critiques et des erudits tous les textes anciens, de les confronter, de les comparer, de les analyser, démontrera que l'on ne peut attacher aucun prix aux commentaires que l'on a ecrits sur ce passage. Tite-Live a écrit « Hannibal. jam in Volcarum perve« nerat agrum gentis validœ. Colunt autem cira utramque « ripam Rhodani. profectus adversci ripa Hannibal « était déjà arrivé au pays des Volces, nation puissante Les « Volces habitent le long de l'une et l'autre rive du Rhône parti de la rive gauche du Rhône, il gagna la region inté« rieure de la Gaule »
Le passage s'effectua auprès de Beaucaire, en face de Tarascon, puisque le delta commençait sur les rives de la Durance, sa limite au sud. En quel lieu Polybe assied-il la place topographique du delta et de l'Ile (N<i<xoç) où l'armée Carthaginoise stationna et se ravitailla ? consultons son récit.
« Annibal, écrit-il, au quatrième jour après le passage du « Rhône arriva en un endroit appelé l'Isle, lieu fertile en blé « et très peuplé, et a qui l'on a donne ce nom d'Isle à cause « de sa figure parce que le Rhône d'un côté et l'Isaros de « l'autre, descendus de deux points opposés des Alpes se « réunissent en un confluent et l'aiguisent en pointe. » Nous avons déja démontré que la rivière introuvable, le cours d'eau mystérieux que les traducteurs et les commen tateurs ont tour à tour graphié sous les formes de Arar, Araros, Scoras, Scaras et enfin Isaras, s'est dévoilé sous sa figure primitive, originale, inalteree, ecrite Isaros (Itràfot) qui est la rivière l'Eygues cette graphie, celle du manuscrit de Polybe, conservee par Strabon, reproduite par les chartes et les archives, rétablit la sincérite du recit grec.
Après tant d'autres auteurs, De Folard (i), dans ses commentaires sur l'histoire de Polybe avait dit « le mot de « Scoras, substitué a celui d'une rivière dont le nom est « visiblement altéré sur le manuscrit, a appuye l'erreur, qui » est en même temps détruite par la circonstance decisive qui « se lit dans Polybe. o
Poursuivons avec le narrateur grec; « cette Ile, d'autre part, « ressemble tant par son étendue que par sa figure à cette « contree que l'on appelle en Egypte le DELTA, avec cette i différence toutefois qu'en Egypte un des côtés du delta est « fermé par la mer, où se dechargent les fleuves qui l'enser« rent des deux autres côtés, tandis qu'ici un des côtés de « l'i le est fermé par un front de montagnes d'accès et de (i) Abrégé des Commentaires de M, de Folard, Paris, 1754.
« penetration difficiles et presque, dirai-je, inaccessibles, « (Polybe). »
A la suite de notre démonstration, M. le marquis de La Baume du Puy-Monbrun, l'érudit archéologue, a presenté dans le numéro 69 du Bulletin de la Société cT Archéologie de la Drame les trois points principaux a élucider sur lesquels les historiens n'étaient pas d'accord; ces trois points étaient: i° L'endroit où Annibal avait franchi le Rhône; 20 L'Ile où il s'était arrêté pour faire reposer son armée, se ravitailler et charger des provisions de route jusqu'à l'arrivee aux Alpes.
« Le second point, écrit le Commentateur précité, vient « d'être magistralement résolu et d'une façon irréfutable. « M. B. établit clairement que la fàmeuse île que des his« toriens plaçaient au confluent de l'Isère et du Rhône est le « DELTA CAVARE. ̃>
« Cette solution entraîne la determination de l'endroit où « le passage du Rhône s'est effectué; cet endroit ne peut être « qu'en dessus d'Arles, entre cette ville et Beaucaire. » Ce témoignage nous est precieux.
Nous le répétons; aux temps Gaulois, en l'an 218 avant notre ère et même après cette époque, le long des deux rives de l'Isère, de son confluent avec le Rhône jusqu'au bourg de Moirans (olim Morginum) s'étendait une zone déserte et inculte, couverte de taillis epais et de bois de sapins rabougris l'homme était rare dans ces solitudes, ce territoire bordant le cours du fleuve et au-delà sur un vaste périmètre au nord et a l'est, etait depourvu d'agglomerations humaines; nulle trace de culture, un groupe d'hommes, même numeriquement faible n'aurait pu y vivre encore moins s'y ravitailler de delta, de fleuves aucune trace; deux maigres ruisselets se cachaient en des lacis sous futaies. Continuons à suivre Polybe dans sa narration il s'exprime
avec une telle précision que tout espoir de controverse est exclus « Annibal arrivé dans l'Ile, trouva dans celle-ci deux « frères qui, armés l'un contre l'autre, se disputaient le « royaume.
« L'aîné mit Annibal dans ses intérêts, le priant de l'aider à « se maintenir dans sa souveraineté. Le général carthaginois « accepta cette brigue, il voyait trop bien les avantages que « cette intervention lui procurerait.
« Il se joignit à l'aîné, prit les armes avec lui et après avoir « chasse le plus jeune, il tut aidé en nombreux secours par « le vainqueur. Non seulement celui-ci fournit à son armée « des vivres et tous les matériaux nécessaires, mais encore « il lui renouvela ses armes usées, vieillies ou brisées et « aussi fort à propos, il lui remplaça ses ressources épuisées. « La plupart des soldats carthaginois furent vêtus, chaussés « et mis en etat de franchir plus aisément les Alpes. « Mais le plus signalé service qu'il reçut de ce prince, tut « que celui-ci suivit avec ses troupes l'arrière-garde d'An« nibal, qui n'entrevoyait qu'avec crainte son passage à « travers les frontières de ces Gaulois nommés Allobroges, « le conduisit par une route sans danger jusqu'au point où « ils approchèrent de l'ascension des Alpes. »
Ces deux fragments du récit, fragments qui se suivent dans le texte se completent, traduisent et commentent la pensée de l'auteur et nous aident a discerner la marche punique à travers la Gaule.
Nous avons démontré par les temoignages des historiens grecs et latins que l'Ile et le Delta de Polybe avaient leur place chez les Cavares avec son terrain de limitation entre la Durance et l'Isaros (l'Eygues) l'enseignement qui s'en dégage permet d'affirmer sans défaillance qu'Annibal ne sortit pas de cette Ile et que c'est là même, comme nous le raconte Polybe, qu'il prit parti entre les deux frères, npof in
ayiKoptivoj, xeu xaTct'J.fcSwv êv auTïi <?vo u.St\'fovf, Annibal arrivé à cette Ile, trouva dans celle-ci deux frères, etc.
L'Ile et le Delta étaient une région fertile, très peuplée et prospère; Annibal, par la reconnaissance d'un chef de clan qu'il maintint au pouvoir, y reçut des vivres, des armes, du matériel, des équipements, et ce même bren celtique, escorté d'une armée, lui servit de guide et le conduisit par le frayé d'une route connue d'eux seuls et le mit à l'abri de toute surprise jusqu'à l'ascension et le passage des Alpes; ces deux points du problème sont résolus Tite-Live nous livrera le secret du troisième terme du problème. L'historien latin a reproduit dans son livre XXI, ch. XXXI le texte même du récit de Polybe, notant l'arrivée d'Annibal dans l'Ile, la description de celle-ci, sa faible superficie (ibi.. agri aliquantulum amplexi confluant in unum), relatant la discorde entre deux frères, le jugement d'Annibal, le ravitaillement de l'armée et son départ nous joignons les phrases fameuses qui suivent cette arrivée, phrases si souvent citées, discutées et devenues sujets de controverses sans fin. « Cum jam « Alpes peteret, non recta regione iter institut, sed ad lœvam « in Tricastinos flexit inde per extremam oram Vocontio« rum agri tetendit in Tricorios, haud usquam impedita via, < priusquam ad Druentiam Jlumen pervenit.
« Comme déjà Annibal se dirigeait vers les Alpes, il ne « prit pas le droit chemin, mais il tourna sur la gauche vers « le pays des Tricastins de là après avoir suivi la lisière du « territoire des Voconces, il arriva chez les Tricoriens et, « sans avoir rencontré d'obstacles sur cette route, il atteignit « les bords de la Durance. »
Grâce aux deux historiens, Polybe et Tite-Live, l'enchaînement des étapes se déroule sous nos yeux avec sa régularité méthodique; nous avons interrogé et lu les commentaires
jugés les meilleurs où tous les auteurs cherchent une atténuation à leur perplexité dans le choix de l'itinéraire suivi par l'armée punique, mais aucun nous a paru laisser échapper un doute, une incertitude plus grands que les lignes que nous extrayons des Mémoires de l'abbé Chalieu « II ne me reste, pour remplir la tâche que je me suis impo« sée, que d'entrer dans un peu plus de détails sur la marche « d'Annibal depuis l'Isère jusqu'au Mont Genèvre, par où il « entra en Italie. »
« Le silence des historiens sur le passage de l'Isère, la difficulté et l'inutilité de ce passage, me persuadent qu'il ne mit pas le pied sur le sol des Allobroges et qu'il resta sur celui des Ségalauniens, c'est-à-dire sur la rive méridionale de l'Isère. Ce fut là que les Allobroges (?) vinrent l'établir arbitre sur le différend qui s'était élevé entre les deux fils de leur dernier souverain, dont le cadet voulait, contre les lois du pays, succéder à son père.
« Annibal jugea en faveur de l'aîné, conformément au vœu du Sénat de la nation (?). Il se disposa ensuite à se rendre aux Alpes. Jusqu'ici son armée avait l'Isère devant elle, le Rhône à sa gauche, à sa droite les Vertacomicores, derrière, le district des Ségalauniens, et au-dessous celui des Tricastins. « L'armee fait demi-tour à droite, Annibal ne la mène pas aux Alpes par le chemin le plus droit, « Cum jam Alpes « peteret, non recta regione iter instituit » je veux dire qu'il ne la conduit pas le long de l'Isère, il la fait prendre à gauche « Sed ad lœvam ». Je n'ajoute pas ici in Tricastinos flexit » parce que ce n'est pas sa place, il n'a pu y être amené que par une faute de copiste, comme je l'ai dit dans la notice. Il y impossibilité absolue qu'Annibal, partant des bords de l'Isèe-e, tendant aux Alpes, ail jamais les Tricastins à sa gauche.
A t'on saisi avec quelle énergie indignée, ce véiitable savant rejette le récit de Tite-Live « je n'ajoute pas ici, écrit
« il, in Tricastinos flexit, parce que ce n'est pas sa place il « n'a puy être amené que par une faute de copiste, comme « je l'ai dit dans ma notice. Il y a IMPOSSIBILITÉ ABSOLUE « qu'Annibal, partant des bords de l'Isère, tendant aux « Alpes, ait jamais eu les Tricastins à sa gauche. » Cette indignation s'explique l'expression impossibilité absolue a toute la saveur d'une réalité, car l'armée carthaginoise n'a jamais vu, même de très loin, (/x»xior«) la rivière l'Isère parvenue dans le delta et l'Ile, territoire Cavare enveloppé par l'Isaros (l'Eygues), le Rhône, la Durance et la muraille du Ventoux, elle s'y reposa, et des bords de l'Eygues (Isaros), gagna les Alpes par ta voie la plus directe, la plus courte, en prenant toujours à gauche l'antique frayé Gaulois qui la conduisit jusqu'aux défilés alpins. Titi-Livii testimonio.
Le Frayé Gaulois. L'histoire nous a-t-elle legué ou fourni des éléments assez actils, assez documentaires, de nature à déterminer par une sanction technique si, aux temps historiques, une voie d'acces, un frayé primitif s'ouvrait comme chemin d'invasion, des bords du Rhône au-dessus d'Arles, aux peuples celtiques vivant sous la pensée de pénétrer en Italie par les moyens les plus rapides ? L'existence de ce frayé, de cette voie primitive, s'affirme, dès l'aurore de notre histoire. Tite-Live a ecrit (livre V, Sect, 34). « En « marche avec une nombreuse armée d'hommes de pied et « de cavalerie, Bellovèse arriva chez les Tricastins; là en « face de lui s'élevaient les Alpes (le massif du Ventoux). » Chorier élargit la mention de cet événement historique, en disant « Dans le désir de rentrer dans l'héritage de leurs pères que les Romains avaient usupé et par un effet de la prudence d'Ambigat, roi des Allobroges, la plupart des Allobroges, des Cavares et des Voconces qui s'étaient engagés cï
son service suivirent Bellovèse; il entra dans la terre des Tricastins pour aller au Mont-Genèvre mais il rfy avait point alors de chemin propre au passage d'une armée, en sorte que cette difficulté ne jeta pas un trouble médiocre dans son esprit. »
Ainsi en l'an 587 avant J.-C., une armée Gauloise s'était rassemblée che\ les Tricastins, grossie des contingents Cavares et Voconces de ces plaines, elle monta jusqu'au col du Mont-Genevre sous l'empire de se ruer sur la terre italique et d'en entreprendre la conquête; cette armée nombreuse traça un fraye, instituant, au prix de quels travaux, une voie directe et courte, partant du territoire des Tricastins et aboutissant aux passages des Alpes, c'est ce même fraye que 369 ans plus tard Annibal, hanté par la même pensée de vaincre les Romains, suivra, guidé et escorté par les petits-fils de ces Cavares montagnards, les Mimenes, et aussi les Voconces qui, trois-cent- soixante ans antérieurement, avaient entraîné l'armee de Bellovèse.
Comment étaient marquées les etapes de ce sentier Gaulois, qui avait son emprise chez les Tricastins et ses relais piqués le long de la lisière domaniale des Voconces ? Aymar du Rivail est prêt à nous répondre.
Un de ses traducteurs et historiographes, (de Terrebasse 1844), « ne pretend pas donner du Rivail pour un auteur « complètement original, mais malgré l'imperfection de son « œuvre il écrivait à une époque où depuis plusieurs siècles « rien n'avait interrompu la chaîne des traditions (1535). » Le même biographe ajoute « Du Rivai], ses classes « terminées, passa les Alpes pour aller, selon l'usage du « temps, étudier le droit dans les universités de l'Italie. « Aymar se trouvait à Pavie en l'an 1 5 1 2, suivant les leçons « des celèbres professeurs Jason Mainus et Philippe Decius. » Ce sont les lignes de ce voyage en Italie, depuis son point de départ qui etait Avignon, que Du Rivail nous détaille dans un sobre exposé, exposé intéressant à un double point
de vue il relie à la tradition gauloise le thème conducteur de son trajet effectué au commencement du xvie siècle il acquiert un degré élevé de notation exacte par la décomposition topographique du parcours ponctué par l'indication des bourgs traversés.
Aymar du Rivail écrit
« La rivière Eca, c'est-à-dire l'Iquarius (l'Eygues) desu cendue de la région de Rosans, passe au pied de Nyons et « apres la traversée de Tulette d'abord, elle coule ensuite au« dessus d'Orange et court se mêler au Rhône au-dessous de « Caderousse, et au-dessus de Nyons, on trouve Rosans qui « est également un oppidum des Voconces desquels toute « cette contree a reçu le nom. Et par un chemin de monta« gne plus direct, mais aussi au parcours plus difficile, on « arrive de Nyons à Rosans et à Serres.
« Ensuite, après le passage du Buech, le voyageur rencontre Veynes, ville des Sigoriens (?) (Tricoriens) et de là, « il atteint Gap. Et dans nos jeunes ans, au départ d'Avignon nous nous sommes rendu en Italie par cette voie. « En quittant les Tricastins, Annibal gagna l'Italie en suivant la lisière du territoire des Voconces .), c'est-àdire le trajet que refit Du Rivail.
Cette lisière du territoire des Voconces, que l'historien Dauphinois frôla dans son voyage d'Avignon au Mont-Genèvre, a réveillé dans son esprit le souvenir de la marche de l'armée punique par le même frayé. Du Rivail a soin de nous laisser apprécier la dépendance étroite d'un itinéraire pratiqué dès les temps historiques, et qui à son époque était toujours en usage, comme la route qui raccourcissait la penetration en Italie à défaut de toute autre.
En 1808, rien n'était changé; Maxime Pazzis exhale ses doléances dans son Mémoire Statistique sur le département de Vaucluse; on suivait encore d'Avignon en Italie l'antique chemin, il écrit « quatre routes de seconde classe que la « direction des ponts et chaussées appelle ainsi sont ln la 2e série, xi.in' volume. – 190g. 20
« route d'Italie en Espagne, elle descend du Mont-Genèvre « passant à Gap, a Serres, à Rosans (Hautes-Alpes), à Nions, « Saint-Maurice, Tulette, Su^e (Drôme). Une petite por« tion de route depuis le territoire de Bollène au Rhône, « fut faite autrefois par l'administration du Comtat qui a attendait et espérait SANS CESSE la confection de cette nou« velle route d'Italie en Espagne. projetée et sollicitée par « chaque Intendant du Dauphiné, MAIS JAMAIS ENTREPRISE. » Par le rapprochement des temoignages des deux auteurs modernes que nous avons cités (tous deux qualifiés pour parler des chemins d'une region qu'ils avaient parcourue), avec le récit de Tite-Live « ad lœvam in Tricastinos flexit inde per extremam oram Vocontiorum agri tetendit in Tricorios », il nous sera facile de jeter un peu de lumière sur l'inconnu du tracé où Strabon place la voie romaine à travers le domaine des Voconces.
Du Rivail, voyageur avisé, a écrit « Et du fait que « Strabon a décrit la route qui de son temps passait par les « Voconces, laquelle route, a cause des déplacements de ̃( peuple, suit une ligne en partie inconnue, je ne parlerai « que de la voie la plus récente n. Le chemin (la deuxième voie romain), au dire de Strabon, se dirigeait de son départ à Tarascon, par le passage de la Durance et par Cavaillon jusqu'aux limites sud du territoire des Voconces; de ce point, la même voie courait en bordant la lisière des Voconjusqu'à leur limite au nord et atteignait Embrun ce profil se déploie à travers l'ancien frayé dont les étapes sont indiquées par Du Rivait et Maxime Pazzis.
Quelques auteurs ont cru désigner une autre percée par La Claup, Orpierre dans les Hautes-Alpes Pazzis infirme cette trace routière; il dit « cependant le nouveau pont « qui va être construit (en 1808) sur le Rhône à Avignon « fournira une communication beaucoup plus commode et « plus directe d'Espagne en Italie et toujours par ce même « Mont Genèvre; car, une fois passé le Rhône, au lieu de
s'enfoncer dans les gorges ravineuses de Nions, des Pilles « et de Ro\an, toujours sur les bords de l'Eygues, on mon« terait en suivant la Nesque jusqu'au Sault dans Vaucluse « et par La Claup et Orpierre dans les Hautes-Alpes. Au « reste, cette route la plus désirable pour le département a « été jugée nécessaire ».
En réalité ce que Lentheric appelle le fond confus des vieux récits, ce fond a dégagé assez de vérités documentaires avec le droit d'affirmer que le couloir naturel, par où se ruèrent les peuplades gauloises, avait son issue par les rives de l'Eygues et par les sentes, les défilés, les cols qui descendaient jusque sur les bords de la Durance; ce couloir adopté n'a été pendant xxv siècles que le seul canal terrien connu et foulé par les armées, les voyageurs passant d'Espagne en Italie.
Le fleuve anonyme de Polybe. Nous avons laissé la narration de Polybe au moment où Annibal, après avoir vu son armée pourvue de munitions, d'armes, de vêtements et ses piovisions renouvelees, quittait l'Ile du delta cavare, escorté par les troupes du bren celtique qui lui servaient de guides expérimentés, et se dirigeait vers les Alpes sous leur conduite.
Entre ce depart de l'Ile et sa marche de dix jours le long du fleuve anonyme en pays plat, le critique relève une lacune dans l'itinéraire, lacune comblée par le texte de Tite-Live. L'historien latin nous apprend qu'en s'éloignant de l'lie où ses troupes s'etaient reposées il s'engagea à sa gauche par le pays des Tricastins, longea la lisière extrême des Voconces, arriva che, les Tricoriens et de là atteignit les rives de la Durance, voici les termes de ce récit a II arriva chez les Tricoriens sans avoir rencontré
« d'obstacles, jusqu'à ce qu'il fût parvenu sur les bords de « la Durance. Cette rivière qui sort aussi des Alpes est, « sans comparaison, la plus difficile à passer de toutes celles « des Gaules. En effet, quoiqu'elle ait beaucoup d'eau, elle « ne porte point bateau, parce que n'étant pas retenue par « ses rives, elle coule dans plusieurs lits et jamais les « mêmes, formant toujours des gués et des gouffres nou« veaux, ce qui rend le passage incertain même pour des « piétons.
Cette lacune remplie, Polybe poursuit « Annibal avait « déjà marché pendant dix jours et parcouru environ huit a cents stades de chemin le long du fleuve ». Le traducteur latin édition Firmin Didot, Paris 1849 – a converti ces 800 stades en cent milles romains decem diebus centum ferme passuum milita propter Jluvium emensus) « déjà il se disposait à mettre le pied dans les Alpes, lors« qu'il se vit dans le plus grand danger. Tant qu'il fut dans « le plat pays, les petits chefs de clans chez les Allobroges « (les médulles) ne l'inquiétèrent pas dans sa marche, soit « qu'ils redoutassent sa cavalerie ou que les barbares dont elle était accompagnee les tinssent en respect. ». Tite-Live complète ainsi cette partie du voyage « Annibal alla de la Durance jusqu'aux Alpes presque toujours en « pays de plaine sans être aucunement inquiété par les « Gaulois de ces contrées. Annibal ab Druentia campestri « maxime itinere ad Alpes cum bona pace incolentium ea « loca Gallorum pervenit ».
Tite-Live brosse en langage imagé le décor de cette vision alpestre
« Là, quoique les soldats fussent déjà prévenus par la « renommée qui exagere ordinairement les choses incon« nues, dit-il, quand ils virent de près la hauteur des mon« tagnes, les neiges qui semblaient se confondre avec le ciel, « de misérables cabanes suspendues aux pointes des rochers, • le bétail et les chevaux rabougris par le froid, des hommes
« aux longs cheveux et presque sauvages. toute cette « désolation renouvela la terreur de l'armée ». Polybe moins disert a ecrit « Quand les barbares, qui « accompagnaient l'armée Carthaginoise depuis son départ « de l'Ile (Nijo-of], se furent retirés et qu'Annibal commença «d'entrer dans les détroits des montagnes, alors les mon« tagnards coururent en grand nombre s'emparer des lieux « qui commandaient les passages par où l'armée devait « nécessairement passer ».
Le fleuve anonyme de Polybe, le long du cours duquel il marcha pendant dix jours, est clairement désigné à plusieurs reprises par Tite-Live, c'était la Durance « qui est « sans comparaison à ses yeux la plus difficile à passer « de toutes celles de la Gaule ».
Toutes les autres rivières des Alpes, fleuves ou torrents. l'Isère, le Drac, l'Arc, le Doron, proposés par les critiques comme le fleuve anonyme, doivent continuer à couler dans leur mutisme historique; leurs eaux n'ont jamais mire des visages puniques.
La fin d'une légende. Lenthéric, dans une dissertation touffue et quelque peu confuse, laisse entrevoir son défaut d'enthousiasme en face des cent trente mémoires publiées (1892) sur la question du passage de l'armée d'Annibal. « Presque tous les écrivains militaires de l'antiquité, « dit-il, et des temps modernes ont écrit sur Hannibal. « Presque tous les grands capitaines ont dit leur mot sur « sa traversée du Rhône et sur son passage des Alpes et à « force d'en parler, on a fini par ne plus s'entendre (sic). « Polybe et Tite-Live ouvrent la marche. A vrai dire, ce « sont les deux sources principales auxquelles tout le monde « a puisé. Eux seuls sont originaux. Tous les autres ne
« sont que des historiens de seconde main. Mais comme « Polybe et Tite-Live diffèrent sur quelques points (inexact. « N. de l'A.), les écrivains et les géographes de tous les âges « ont trouvé là matière à discussion et ce sont ces diver« gences et ces contradictions entre les deux auteurs clas« siques, qui ont donné lieu à cette avalanche de dissertations « et de commentaires dont il est peu probable que nous « voyons aussitôt la fin ».
Après cette digression, où l'auteur accuse de divergences les deux auteurs originaux, alors qu'il est démontré par leur récit même que l'un et l'autre ont été des historiens consciencieux et observateurs, ayant puisé à la source les meilleurs renseignements, Lenthéric arrive à cette conclusion « Quoiqu'il en soit, la route par la vallée de la Durance et « le Mont Genèvre était la plus naturelle, la mieux dessinée « la plus facile, et tout porte à croire que ce fut celle qui fut « suivie dès les temps les plus reculés. Une fois connue, elle fut « p} esque toujours adoptée. C'est par là certainement qu'ont « passé les hordes de Bellovèse, les éléphants d'Annibal et « les premières légions de Cesar ».
A notre tour nous pourrions croire que Lentheric a resumé en ces lignes, et avant la lettre, l'analyse et les conclusions de notre étude.
La légende a présenté la donnee de ce probleme historique sous cinq termes; quatre de ces termes, qui intéressent particulièrement la région du Dauphine et plus spécialement le département de la Drome, doivent être regardés aujourd'hui comme définitivement résolus par le temoignage des deux auteurs originaux, qui lie different en aucun point dans leurs écrits sur la question de la traversée du Rhône aux Alpes. Le premier terme à élucider était le point de passage du Rhône ce passage s'effectua au-dessus d'Arles en face de Beaucaire, où le Rhône resserré entre cette ville et Tarascon
ne forme qu'un bras et que le delta limité au sud par la Durance est situé immédiatement au dessus {Tite-Live, Polybe).
Le deuxième terme à propos duquel les thèses et controverses se sont amassées, comme Pélion sur Ossa, est également elucidé; le delta et l'Ile de Polybe, ce delta semblable au delta Egyptien par sa forme et son étendue, région fertile en ble, très peuplee, riche en ressources, ont dissipé par t'analyse des textes le mystere primitif de leur emplacement; c'est irréfutablement le delta Cavare fermé au nord par le fleuve mystérieux l'Isaros (l'Eygues), et le Rhône, au midi par la Durance et barré à l'orient par les Alpes du Ventoux Annibal se reposa dans la partie nord du delta, île véritable, y jugea le différend entre les deux frères, chefs de clans montagnards, y reçut en récompense des vivres, des munitions, des armes et une escorte nombreuse, guides expérimentes qui le conduisirent jusqu'aux Alpes.
Le troisième terme tout autant controversé que le deuxième, cette fameuse phrase « ad lœvam in Tricastinos flexit. a a reçu sa solution documentaire et a affirmé la fidelite topographique de la narration de Tite-Live; de l'Isaros (l'Eygues), l'armée punique traverse un coin du territoire des Tricastins, contourne le domaine des Voconces par l'ancien frayé Gaulois, le seul connu, adopté et suivi, sur les bords de l'Eygues elle arrive chez les Tricoriens et par le bassin des Buechs atteint les rives de la Durance. Le quatrième terme était la divulgation de la rivière anonyme suivie pendant dix jours par Annibal, dans une vallée en plat pays; cette rivière a été reconnue dans cette Durance même si bien décrite par Tite-Live.
Le cinquième terme du problème s'agite en dehors de notre domaine, de nos recherches et de notre étude; c'està-dire la détermination du passage, du col, du défilé par lequel l'armée Carthaginoise se déversa en Italie aux stratèges avises à répondre.
Par cette analyse, une nouvelle clarté historique descend et dissipe cette fallacieuse obscurité reprochee au texte grec de Polybe et au récit latin de Tile-Live mais c'est encore une légende qui se dissout, s'évanouit, se volatilise et se classe au rang des mythes historiques; c'est aussi un grief de plus ajouté à la longue liste de ceux qui figurent déjà à notre actif. f.
En notre beau pays de France, chez certains esprits hypnotisés, le bon sens et la mentalité consciente s'atrophient à leur tour sous le souffle morbide du scepticisme moderne. Toute erreur historique, archéologique, linguistique dévoilée, est considérée, à leurs yeux, comme une offense à la majesté de la science officielle placée sous la tutelle des compagnies académiques et réputée intangible
Pauvres gens
Nous avons obéi au devoir de reviser, à l'aide de materiaux inédits, la toponymie de nos régions et de fouiller les vestiges du passe sur cette terre où toutes les invasions se sont croisées et toutes les civilisations se sont heurtées; mais notre sujet nous a porté en dehors des marges de ce cadre Notre étude nous a contraint d'evoluer sur ce terrain en compagnie des troupes que commandait Annibal, et par l'interprétation des récits grecs et latins, expliqués méthodiquement, nous avons suppléé à l'insuffisance d'un enseignement faux oeuvre des critiques et des commentateurs inféodés à une évocation stérile par la decouverte de la vérité historique sur ce thème tant controversé, dissimule sous des apparences défigurées. La première partie de notre travail est achevée; la deuxième, qui embrasse le champ des explorations toponymiques, est appelée à satisfaire l'intérêt des lettrés et des érudits consciencieux et à les mettre en garde contre de vagues constructions onomastiques, apports d'une documentation inexacte
(A continuer) A. BÉRETTA,
Inspecteur dv l'Assistance publique de la Drome.
SflllïT-PAUlt-TROIS-GHflTEAUX
Nous savons encore moins à quelle époque et dans quelles circonstances son corps vénérable fut porté à Cruas. Il est certain cependant que ce ne fut pas de suite après sa mort, comme on le verra par des faits de la vie de saint Paul, qui va suivre. Il est même probable que cette translation n'eut lieu qu'après le vnT siècle, puisque l'abbaye de Cruas ne date, elle-même, que du ix°. En effet, cette abbaye fut fondée en 804, par Eribert, père d'Elpodorius, comte de Vivarais. Cruas n'était auparavant qu'un lieu aride et désert, faisant partie du domaine de Louis-le-Débonnaire. Celui-ci, devenu empereur, confirma la fondation du monastère, dont la Très Sainte Vierge Marie, mère de Dipu, et saint Gosserand, confesseur, étaient les principaux patrons. Ce dernier avait été religieux de cette maison, mais on ignore l'époque où il a vécu. Ses reliques et celles de saint Torquat, évêque de Trois-Châteaux, que l'on conservait encore au xvi" siècle dans la célèbre abbaye vivaraise, y furent brûlées par les calvinistes (en 1 561 dit Chorier).
HISTOIRE DU DIOCÈSE DE
(Suite. Voir les 1 63 à 169" livraisons)
C'est à raison de la translation des reliques de notre saint évêque Torquat à Cruas et de leur conservation pendant fort longtemps dans l'abbaye de ce lieu, que la fête de saint Torquat fut marquée dans un ancien bréviaire de Viviers. Elle l'était au 31 janvier (1), Au surplus, il est resté de saint Torquat dans le diocèse de Trois-Châteaux, avec le précieux souvenir de ses venus et les fruits de son apostolat, le culte immémorial qu'on lui a rendu jusqu'à la Révolution. A la fin du siècle dernier, on y célébrait encore le 3 janvier la fête de saint Torquat, évêque de Trois-Châteaux et confesseur. Dans les Offices propres de ce diocèse, imprimés en 1758, l'office de ce saint est du rite double de seconde classe. Il y est pris du commun des confesseurs pontifes en premier lieu, sauf l'antienne de Magnificat servant aux premières et secondes vêpres et dite aussi "à Laudes pour le Benedictus, sauf encore les trois leçons du deuxième nocturne, tirées de saint Bernard, et celles du troisième, tirées de l'homélie 17e de Saint Grégoire, pape, sur saint Mathieu. Il s'agit d'une homélie sur ces paroles de saint Mathieu Homo peregre (2); mais elle est différente de celle que nous lisons aujourd'hui au troisième nocturne des confesseurs pontifes (3).
L'antienne en question rappelait ce qu'on voulait rappeler au clergé et au peuple de la vie et des vertus (0 Gallia chnstiana (vieux), t. III, p. 545. – Galha chnstiana nova, t. XVI, col. 591-6, instrum col. 219 20. – Acta Sanctor. Bollandi (1638), febr. I, 93; cf 934 (3 a 943). Congrès at-clieol. de France, t. XXI, pp. 257-64, 288-90, 338-49. – Rouchiur, Hist. relig., ctvile et polit, du Vtvarars, t. 1er, pp. 3^.1-3, 35o, 601-2.
\i) Matth., XXV, 14.
(3) Offic. propria ecclestoe Tncastinensis (1758). p. 8-11
du saint pontife, et, pour ce motif, nous en donnons la traduction « Cet homme fut l'appui de sa race, le gouverneur de ses frères, et le soutien du peuple ses os ont été visités avec soin, et ont prophétisé après sa mort (1) ».
Au rétablissement du culte, l'adoption de la liturgie viennoise dans le diocèse de Valence fit laisser de côté la fête de saint Torquat Le culte officiel de ce saint n'a même pas été repris lors de l'adoption des Propres de 1855 et de 1884.
Enfin, c'était un monument, élevé en l'honneur de saint Torquat et en souvenir de son nom, que le prieuré situé sur les bords de la rivière du Lez, dans les bois de Suze-la-Rousse. Là, en effet, était jadis un prieuré de Saint-Torquat. Nous ne savons ni l'année de sa fondation, ni le nom de son fondateur, mais en 1286 un religieux. Imbert de Marzieu (de Mar^iaco), prieur de l'église de Saint-Torquat. avait à ce titre des propriétés considérables, et la directe de Boisbrun sur Saint-Restitut.
En 1458, le prieuré de Saint-Torquat dépendait des Clunistes du Pont-Saint-Esprit, et le prieur de son église était frère Jean de Morières. Il ne sera pas sans intérêt de donner ici la substance d'un bail emphytéotique qu'il passa à un habitant de Saint-Paul-troisChâteaux.
« Le 16 février 1458 (n. st.), Louis, fils du roi de France, régnant, et Etienne, évèque de Trois-Châteaux, étant seigneurs communs de la ville dudit Trois-Châ(1) Homo firmamentum gentis, rector fiatrum, stabiltmentum popult, ossa ipsius visitata sunt, et post mortem prophetaverunt (Offic. ctt. Cf. Eccli., xlix, 17-8.
teaux et de la terre commune et de la juridiction de cette ville, a été fait ce qui suit. Vénérable et religieux homme Messire Jean de Morières, moine, bachelier ès-lois, prieur du prieuré de Saint-Torquat, diocèse de Trois-Châteaux, a donné et concédé pour toujours à nouvel achat, c'est-à-dire à emphytéose perpétuelle, à Guillaume Roux, fils de feu Pierre Roux et citoyen de Trois-Châteaux, un bois de son dit prieuré appelé Bois-brun avec une terre contiguë, situé dans le territoire de Saint-Restitut, confrontant du levant avec le bois de l'Estagnol, du couchant avec le bois de Vincent Berbigier, de bise droit avec le bois de Leron, et du vent avec le chemin public. Le prieur se réserve sur ledit bois et la terre contiguë le domaine direct et la seigneurie pour lui prieur et son prieuré, ainsi que le cens et service de deux deniers viennois par an payables à Noël à raison de l'achat, et d'une paire de poulets. Le prieur investit Roux en lui remettant une plume d'écrivain, selon l'habitude. Roux promet le payement annuel du cens ou service de deux deniers viennois, et la reconnaissance du bois et de la terre contiguë à toute requête. Fait à Trois-Châteaux, présents Jacques Barralier, Jean Bordet, citoyens de Trois-Châteaux, et le notaire Jean Amblard n. Vers 1458, Jean de Morières était vicaire du prieuré conventuel du Pont-Saint-Esprit pour le cardinal d'Avignon, prieur commendataire dudit prieuré du PontSaint-Esprit. 11 avait encore le prieuré de Saint-Torquat en 1 48 1 et vers ce même temps on se plaignait de ce que ce prieur, quoiqu'il eût charge d'âmes, ne faisait aucun service à Saint-Torquat et n'y tenait pas de vicaire.
En 1557 le prieur n'était cotisé aux décimes que 43 sous, mais en 1583 cet impôt montait à 8 livres 17 sous. On trouve aux archives communales de Suzela-Rousse une quittance de 5 livres 1/2 par le curé de Bouchet, pour !e service de Saint-Torquat pendant six mois. Nous n'en savons pas la date précise. Elle est de 1671 ou environ. Enfin, en 1704, le prieuré ne rapportait au bénéficier que 1 150 livres (1).
Le quartier où existaient le prieuré et son église s'appelle aujourd'hui en provençal San-Turquan. On y voyait encore naguère une antique chapelle dédiée à saint Torquat.
Cette chapelle n'a pas disparu. Elle vient d'être restaurée par les soins de M. l'abbé Prunier, et voici la description qu'il en donne « C'est un parallélogramme avec abside primitivement semi-circulaire, ayant dans œuvre, abside non comprise, 10 mètres en longueur, 4 mètres 5o en largeur et 9 mètres sous voûte en hauteur, ce qui la rend fort élégante. Le plan est coupée en deux travées avec pilastres et arceaux latéraux. La voûte est légèrement en tierspoint et vient reposer sur une corniche qui court le long du mur. Les fenêtres au nombre de trois sont fortement évasées à l'intérieur comme à l'extérieur et à plein cintre ainsi que les deux portes. La principale de ces dernières présente, à la naissance de son arcade intérieure, deux pierres en saillie creuses, ayant servi à retenir le haut de la porte, tandis que la partie inférieure
(1) Cartul. de Saint-Paul, B, ff. 83, 98-99 et 100. Archives de la Drôme, fonds de Saint-Paul, rôle des décimes. – Archlv. de la mairie de Saint-Paul. Notice histor. sur Su^e-la-Rousse, par l'abbé Vincent, pp. ji et 36. Arch. communales de Suze, CC 21.
reposait sur un pivot. C'est la première fois que dans un édifice de ce genre, je rencontre cette singularité. Là tout est construit en pierre de taille dont, la plupart portent une lettre, l'initiale peut-être du nom de l'ouvrier
« Malheureusement cette chapelle a subi de nombreuses dégradations. Une travée a été démolie à mi-hauteur, la voûte, moins l'arceau du pilastre du milieu, renversée, l'abside primitive détruite et une partie de l'édifice affectée à des usages profanes. Dieu aidant, avec de la patience, l'aide de quelques bonnes personnes, des sacrifices personnels, j'ai pu rendre le tout à sa destination première, débarrasser ensuite ce petit monument des masures qui l'encombraient, et, employant la plupart des anciens matériaux, le reprendre aux endroits que le marteau démolisseur avait respectés, et lui rendre en quelque sorte sa forme primitive. « J'ai fait tout ce qui m'a été possible, mais aujourd'hui mes ressources étant épuisées, je me vois dans la dure nécessité d'abandonner cette œuvre, peut être pour toujours. Et Dieu sait si elle est intéressante Et cependant, avec une somme relativement modique (t,ooo ou 1,500 fr.), on arriverait à rendre cette chapelle digne d'être classée parmi les monuments historiques ».
M. l'abbé Prunier ajoute « J'ai découvert tout auprès une fabrique de poterie romaine et quelques monnaies antiques ».
On voit par les archives de Suze que les religieux de Cluny de la maison du Pont-Saint-Esprit avaient une ferme en cet endroit, transformée dans la suite en prieuré avec deux saulmées de terre à titre de dotation.
Ce prieuré que les guerres du xvi* siècle ruinèrent ne jouissait plus, en 1704, que de 1 50 livres de revenus. « Le hameau voisin, dit l'auteur de Y Arrondissement de Montélimar (tome VIII, 122), dépendait du fief de l'Estagnol et de la province de Dauphiné, par suite d'une transaction de 1601 d'un arrêt du Grand-Conseil du 30 mars 1662 et d'un arrêt du Parlement de Grenoble de 1759.
« Le château de l'Estagnol, en 12^3, appartenait au monastère de Bouchet sous la dépendance du comte de Toulouse. En 1234, Imbert de Rac, chanoine, reconnaissait y tenir divers fonds de la seigneurie directe de l'évêque de Saint-Paul. Les Templiers d'après la légende, l'auraient aussi possédé et la chèvre d'or venant s'abreuver au Lez et le moine sauvage errant la nuit font partie de la même fable ». L'Estagnol, par son étymologie, indique un étang et il y en avait autrefois plusieurs dans les bois voisins. « Un seul, le plus vaste, oflre encore à cette heure, d'après M. de Laineel, un asile aux bécassines qui y font leurs nids dans les grands roseaux. Le coup d'œil de ce lac, entouré de collines où croissent les chênes verts est vraiment ravissant ».
Et voilà tout ce que nous savons sur saint Torquat et ses souvenirs (1). j,
(1) Bullet. de la Société d'Arch. de la Drôme, XXXI, 178-80.
CHAPITRE VI
SAINT PAUL PATRON DE LA VILLE ET DU DIOCÈSE La parcimonie désespérante des chroniqueurs dans leurs récits à l'égard des anciens évêques de TroisChâteaux est heureusement moins excessive à l'égard de S. Paul. C'est avec joie que nous sortons des ténèbres qui couvrent presque complètement ses prédécesseurs, pour entrer avec lui dans une période historique éclairée d'une lumière presque satisfaisante.
Voici ce que nous apprennent d'intéressantes légendes fournies par les anciens livres liturgiques de l'Eglise tricastine et résumées dans les leçons de l'office actuel du saint patron de cette Eglise. Nous y joignons quelques détails intéressants fournis par une Vie du même saint trouvée dans un manuscrit du xiii" siècle conservé à la bibliothèque publique de Grenoble (i),
Paul naquit à Reims en Champagne, d'une famille fort honorable, qui l'éleva dans la piété et lui inspira de bonne heure un grand amour pour la vertu. Dès son enfance, il donna des marques de la sainteté à laquelle il devait un jour arriver. Au lieu de se livrer aux amusements qui ont tant d'attrait pour le jeune âge, il pratiquait l'humilité et l'obéissance. 11 soulageait les misères des pauvres selon son pouvoir; il fuyait soigneusement la compagnie des libertins, et, comme un autre (») Voir Gallia christianna novissima, t. IV, n" 4-6.
Job, il renouvelait chaque jour le pacte qu'il avait fait avec ses yeux de ne jamais faire aucun regard dangereux pour sa parfaite chasteté.
Cependant il touchait à sa dix-huitième année, quand, pour obéir aux ordres de ses parents, il consentit à épouser une jeune fille de qualité. Mais Paul avait si bien compris l'excellence de la vie angélique, qu'imitant la sublime vertu de Joseph, il fit consentir son épouse à vivre avec lui dans une entière et perpétuelle virginité. Mais la vie tranquille du pays natal ne devait pas être de longue durée pour les nouveaux époux. Voici que des bords de la Vistule et des forêts de la Pannonie, accourent des hordes barbares, qui vont se précipiter sur les Gaules comme un torrent furieux et semer partout le ravage et la mort. Les Vandales, qui firent plus tard cause commune avec les Alains, les Suèves et les Burgondes, entrent les premiers en campagne et envahissent les provinces septentrionales. Rien ne subsiste sur leur passage. Les champs sont saccagés, les récoltes détruites, les maisons pillées et livrées aux flammes. Pour les malheureux des villes et des bourgs il n'y a de salut que dans la fuite.
Nos « deux jeunes colombes, voulant éviter la cruauté de ces vautours, prirent la fuite, se mirent en chemin pour aller chercher quelque solitude et se mettre à couvert de cette tempête. Ils s'abandonnèrent au gré de la Providence, qui n'abandonne jamais les justes », et arrivèrent à Lyon. Là, ils s'embarquèrent sur le Rhône avec leur mère qui les avait suivis, et prirent terre à Tarascon ou à Arles. Mais, ne trouvant pas dans ce pays des déserts assez profonds pour s'y dérober entièrement au monde, ils vinrent sur la mon2* SÉRIE. XLHl' VOLUME. [ÇJÛÇ. JI t
tagne nommée Madère (1), « proche du Mausolée, sur le territoire de Saint-Remy, petite mais très ancienne ville de la Provence », alors dans le diocèse d'Avignon (2), aujourd'hui dans le diocèse d'Aix. C'est dans ce lieu solitaire que Paul voulut vivre, inconnu des hommes et connu seulement de Dieu et de ses anges. a C'est là que, pour gagner sa vie, celle de sa femme et de sa mère, il fut obligé de servir de valet et de laboureur de terre «. Mais Dieu qui l'avait destiné de toute éternité pour être ce serviteur fidèle et prudent qu'il devait établir sur sa famille pour lui donner la nourriture dans le temps opportun, enleva de ce monde saint Torquat, évêque de Trois-Châteaux. L'église du peuple Tricastin, privée de pasteur s'assembla, selon la coutume de cet âge d'or, pour demander à Dieu, par des prières ferventes, de faire connaître celui que sa Providence avait choisi pour la gouverner. La volonté divine ne tarda pas à se manifester. Quelques personnes pieuses eurent révélation de chercher Paul.
(1) Mous Macenus, ce qui signifie une montagne produisant des lattes ou autres bois propres à la construction.
(2) La légende de saint Paul qui nous donne ce détail a été rédigee au plus tot vers la fin du vi* siècle. On le voit par les dénominations qui y ont été employées. En ellet, au iv° siècle Il n'y avait près du morts Macenus que la ville gauloise de Glanum, qui occupait un petit plateau, à l'entrée d'un défilé conduisant aux Baux. Vers l'an 48o, les Visigoths, allant assiéger la ville d'Arles, détruisirent Glanum et en dispersèrent la population, dont une partie se groupa sur les bords du Louérion, à l'endroit où est au)ourd'hui Saint-Remy, ville qui aurait pns le nom du grand évêque de Reims, ensuite d'une guerison miraculeuse qu'il y auratt opérée Saint-Remy est actuellement un chef-lieu de canton de plus de 6.000 âmes. Quant au Mausolée, c'est un monument antique datant au moms du commencement de l'ère chrétienne et resté debout au milieu des ruines de Glanum. L'antique pneuré de Saint-Paul de iiausohs en est tiè, rapproché et en tire son nom.
On envoya partout des messagers, qui le trouvèrent enfin à la suite d'une charrue, au pied de la montagne dont nous avons parlé. On lui demanda son nom. Il répondit simplement qu'il s'appelait Paul. Les messagers lui dirent que le clergé et le peuple du pays tricastin l'avaient choisi pour leur pasteur. Il répliqua qu'ils se trompaient, qu'il était indigne de cette charge, qu'il n'était pas ce Paul qu'ils demandaient. Mais les messagers persistèrent à lui persuader qu'ils n'en voulaient point d'autre, puisqu'ils avaient celui-là même que Dieu leur avait choisi. Enfin, « après plusieurs raisons qu'il 1 apporta pour s'excuser d'accepter un fardeau formidable aux épaules des anges, cet homme simple ajouta, en fichant son bâton dans la terre quand ce bâton produira des feuilles et des fleurs, pour lors je consentirai à l'offre que vous me faites ». Aussitôt le bâton de sec devint tout verdoyant et chargé de fleurs Paul, connaissant par ce prodige que le choix qu'on avait fait de lui venait de Dieu plutôt que des hommes, accepta par obéissance la charge éminente qu'il avait refusée par humilité. « II fit part de cette nouvelle à sa chaste épouse qui y consentit avec joie et, connaissant les dangers » auxquels l'innocence est exposée « dans ce monde malin, se fit religieuse à Arles ». Elle mourut, dans cette ville même, en odeur de sainteté.
Paul, ayant ôté tous les empêchements qui pouvaient « s'opposer à cette élection miraculeuse, fut conduit en triomphe à la cité des Tricastins. Là, il fut consacré prêtre et évêque avec les applaudissements de tout le monde. Il était seul triste et humilié de son élévation. C'est ce qui le fit passer toute la nuit suivante dans l'oraison et dans les larmes, pour obtenir de Dieu la
rémission de ses péchés. Il eut la consolation d'apprendre, par le ministère d'un ange, qu'ils lui étaient pardonnés ». Dès lors, il commença à faire valoir les talents que le Seigneur lui avait confiés et qui avaient été jusques-là « comme enfouis dans la terre ». Mais, avant d'enseigner les vérités de notre sainte religion par ses paroles, il les enseigna, et plus efficacement, par ses œuvres. Ainsi il devint, comme l'apôtre dont il portait si dignement le nom l'ordonnait à l'un de ses disciples, l'exemple des fidèles par sa modestie, par sa charité, par sa foi, par toutes sortes de vertus. Il était depuis peu de temps, mais bien entièrement à son peuple et aux fonctions de sa charge pastorale, lorsque Dieu voulut que sa sagesse et ses vertus brillassent d'un éclat surnaturel. L'événement montra que si Dieu expose les siens, et en particulier ses pontifes, aux ennuis causés par la perversité du monde, il répond constamment à leurs prières et les assiste miséricordieusement, pourvu qu'ils recourent à lui avec une entière confiance. Il s'agit du miracle accompli par l'homme de Dieu sur le tombeau de saint Torquat. Nous allons le rapporter au moins dans ce qu'il présente de plus digne et d'après les divers récits que nous en trouvons dans les anciennes légendes de l'office du saint. Mais observons, avant de commencer que ces légendes sont, pour le fond du moins, en accord parfait avec le texte fourni par la Vie de notre évèque publiée en 1891 1 dans les Analecta des Bollandistes d'après le manuscrit de la bibliothèque de Grenoble. Voici donc ce qui est rapporté dans ces documents.
Saint Torquat, prédécesseur de saint Paul sur le siège de Trois-Châteaux, se trouvait dans un embarras
qui, hélas n'est particulier ni à ce pontife ni au temps de son pontificat. Il voyait que les secours dont il avait besoin pour les offrandes à faire à Dieu dans le service de son église devenaient insuffisants, et qu'il n'avait pas de quoi fournir des vêtements aux pauvres. Il emprunta cent sous à un juif nommé Jonathas. Il en rendit la moitié avant sa mort et de ses propres mains, comme l'a rapporté un récit absolument digne de foi. Mais, quand, à l'appel du Seigneur, le bienheureux évêque eut expiré, le juif exigeait de son archidiacre le paiement du reste de la dette et alors Dieu, qui, pour faire briller encore davantage le caractère divin de son Eglise, permet des défaillances jusque dans les ministres de cette église, permit une implication grave de cet archidiacre dans un complot avec le juif Jonathas. Juif et archidiacre s'entendirent en vue d'arracher au nouveau pontife, moyennant un mensonge, tout l'argent prêté et de s'en partager le montant. Aussi, quand saint Paul fut orné de la couronne du pontificat, le juif, pressé de faire la réclamation, ne manqua pas de l'adresser mensongèrement au nouveau pontife. Celuici, étant ignorant de la chose, voulut se renseigner auprès de Gaudence l'archidiacre. Mais celui-ci, égaré et faux comme le juif, affirmait comme lui que rien n'avait été rendu. Seuls leurs visages les trahissaient par la pâleur qui y succédait à la rougeur.
Bientôt, par l'inspiration divine, le serviteur de Dieu reconnut que leur langage était celui de la fausseté plutôt que celui de la vérité. Etant entré dans sa chambre et laissant le témoignage de l'aveuglement terrestre, il pria le Seigneur de daigner lui montrer ce • qu'il en était de cet argent. La puissance miséricor-
dieuse de Dieu lui fit voir clairement qu'il y avait eu un atroce complot de fràude. A cette salutaire révélation, l'évêque convoqua le peuple et le réunit dans l'église du premier martyr Etienne, pour que tous y fussent témoins de ce qui allait se passer entre lui et saint Torquat. Là, il mit genou à terre et pria. Puis, sentant qu'il avait Dieu pour lui, il se lève et, touchant de son bâton la tète du cercueil de saint Torquat, il dit Mon maître Torquat, mon maître Torquat, mon maître Torquat! Celui-ci, que Dieu avait retiré de ce monde et prévenu par une mort inopinée, sortant comme d'un rude sommeil, répondit d'une voix faible de son sépulcre Que pouve\-vous désirer de moi, à bon pasteur, pontife glorieux ? Saint Paul lui dit Jonathas le juif me demande l'argent qu'il vous avait prêté il dit que rien ne lui a été rendu. Saint Torquat répondit Il est sar qu'il m'avait prêté cent sous je lui en ai rendu cinquante, les autres cinquante sont dus.
Alors tout à coup, pendant que les serviteurs de Dieu s'entretiennent, la vengeance divine éclate. L'archidiacre, qui avait donné lieu à la tromperie et comploté avec l'ennemi de Dieu, en cherchant par un mensonge impie à arracher de l'argent, est livré devant tout le peuple au démon, qui se met à le tourmenter et lui arrache des cris. Le peuple entier, voyant cela était dans l'effroi. Pendant que cela se passait, saint Paul dit à saint Torquat, évêque Prie\ pour moi, serviteur de Dieu, le Seigneur notre Dieu, afin que le peuple dirigé jusqu'ici par vous le soit désormais par llll pasteur convenable. Saint Torquat lui dit O amide Dieu, prêtre glorieux, que notre Dieu a élu comme plus digne d'être leur pasteur après moi, vous qui m'ave\ tiré du
lieu de la mort, et qu'il m'a été donné de voir au séjour de la Majesté parler avec ses anges, je vous conjure de m'aider de vos prières auprès du souverain Censeur. Et, dès que les serviteurs de Dieu ont échangé ces paroles, Notre pontife Paul, toujours plein de courage,
Toujours grand, toujours saint, fidèle à son devoir,
En brillant, poétique et solennel langage,
Explique aux assistants tout ce qu'il vient de voir.
Quant au juif, debout tremblant et immobile, il n'espérait pas survivre à ce coup si terrible pour lui. Enfin, à l'exhortation du peuple, il se jette aux pieds du saint et pleure sa faute. Alors saint Paul, qui avait à la bouche les paroles du Seigneur, dites avec une douceur supérieure à celle du miel, s'arrête pour adresser au juif des mots de paix. Celui-ci reprend un peu ses sens, confesse sa faute et demande à l'évêque à devenir chrétien. Saint Paul, pour s'assurer contre la dureté de son cœur et pour prévenir les dangers de la rechute, lui dit La bénédiction accordée à ceux qui manquent de foi et sont souillés, n'enlève pas la tache el ne désarme pas la sévérité.
Le juif se voyant privé du secours du saint homme et sans espoir d'en obtenir grâce, était là comme hors de lui-mème. Le saint évèque lui dit Je vous confèrerai la grâce du baptême, si vous me promette^ de tout cœur de croire que dans le Père, le Fils et le Saint-Esprit il y a une seule vertu, divinité el gloire. Le juif répondit Je vous rends grâce, très pieux pasteur, de m'avoir acquis à Dieu, que je crois vrai en trois personnes. Alors l'évêque lui prescrivit un jeûne, et Jonathas, privé de nourriture pendant la semaine, selon qu'on le pratique, fut baptisé par lui. L'imposition des mains du prêtre du Seigneur remplaça en lui la perversité par une pleine
foi. Quant à l'argent prêté, non seulement il laissa à l'église la partie encore due, mais il lui rendit la partie retirée de saint Torquat.
Après cela, saint Paul, pensant que selon l'Apôtre la piété est utile à tout, ne voulut pas laisser l'aveugle puissance et le nuisible ennemi dominer définitivement l'archidiacre et lui ôter une vie déjà en péril. Voulant au malheureux donner un prompt salut, il se le fait amener. L'archidiacre, quoique encore tourmenté par le démon, confesse avoir menti au glorieux pontife, et, arrivé devant le saint prêtre du Seigneur, dès que le signe de la croix eut été fait sur son front, il se trouva délivré de l'esprit immonde, qui, Dieu aidant, ne vint plus l'infester.
Voilà comment ce miracle éclatant, en prouvant avec évidence l'avarice de l'archidiacre, la perfidie du juif et la sainteté de Paul, aboutit au salut de tous. Mais, quelque temps après, la sagesse et la sainteté de Paul allaient briller aussi hors de son Eglise, à l'occasion du concile tenu à Valence le 12 juillet 374 et auquel il assista (1). Comme les canons de ce concile réflètent à
(1) La vie de saint Paul et les légendes de son office, antérieures à 1738, ne mentionnent pas l'assistance de cet évêque au concile de 374. La mémoire de la part qu'il avait prise à ce concile s'était même perdue, paraît-il, dans l'Eglise tricastine. C'est grâce à la publication des actes de cette assemblée que Boyer et d'autres ont pu mentionner l'assistance de ce pontife et le rédacteur de la légende du saint figurant dans nos Propres de 1758, de t853 et de 1884, suivi par divers historiens modernes, n'a pas manqué de le faire. Mais pourquoi Boyer et ses copistes supposent-ils que cette assistance a éte anterieure aux réclamations du Juif, que la vie et toutes les légendes antérieures à 1758 disent positivement avoir été faites dès l'arrivée de Paul à l'épiscopat; puis, le )uif rapace aurait-il attendu pour réclamer, que saint Paul fût resté à la tête de son Eglise pendant le temps assez considérable d'épiscopat que suppose son rang en tête et parmi les souscriptions des actes du concile en question.
nos yeux des points de discipline observés ou établis dans les Eglises des évêques présents, par conséquent dans celui de Trois-Châteaux, il y a lieu de les indiquer ici, au moins sommairement.
L'occasion pour laquelle il fut tenu, fut, comme il est dit dans la préface que les Pères de ce concile mirent à la tête de ses canons, quelque différend survenu dans l'Eglise de Valence, différend qui n'y est point expliqué. Mais il était assez ordinaire dans ces premiers temps, que les évêques assemblés pour les affaires particulières de quelque Eglise profitassent de l'occasion pour établir les règles et faire les réformes utiles ou nécessaires à toutes leurs Eglises.
Ce concile n'a que quatre canons. Le premier établit une discipline que l'Eglise a reçue depuis dans plusieurs de ces conciles. Il ordonne qu'à l'avenir les bigames ne pourront pas être ordonnés, que les mariages par lesquels ils auront contracté la bigamie soient antérieurs ou postérieurs à leur baptême. Toutefois, on ne touchera pas aux ordinations faites par le passé. Le second porte que les filles qui, après s'être consacrées à Dieu par le vœu de virginité, viendraient à se marier, ne seraient pas reçues à la pénitence dès qu'elles la demanderaient et que, quand elles y seraient reçues, on leur différerait la communion jusqu'à ce qu'elles eussent pleinement satisfait à Dieu.
Le troisième marque la charité et la fermeté de nos saints évêques à l'égard des pécheurs. Il ordonne que ceux qui après leur baptême seront tombés dans des crimes considérables, qu'il spécifie, comme d'avoir sacrifié aux démons, ou souffert d'être rebaptisés par les hérétiques, seront à la vérité reçus à la pénitence,
SOCIETE n ARCHÉOLOGIE ET DE STATISTIQUE
de peur qu'ils ne tombent dans le désespoir, mais qu'ils continueront cette pénitence jusqu'à la mort. Le concile ajoute que, en offrant ainsi à Dieu cette satisfaction, ces grands pécheurs doivent espérer de lui une pleine et entière rémission de leurs péchés, puisqu'il est si riche en miséricorde, que personne ne doit désespérer de l'obtenir de lui.
Le quatrième et dernier canon est peut-être le plus remarquable. Sa décision paraît d'abord singulière, mais elle édifie beaucoup, en montrant l'innocence que l'Eglise exigeait alors pour le sacerdoce, et la crainte respectueuse qui éloignait de cette dignité plusieurs ministres de cette Eglise. « Nous avons cru, disent les Pères de ce concile, qu'il était du bien de l'Eglise d'ajouter encore cette nouvelle règle à celles que nous venons d'établir. C'est que ceux qui se diront dorénavant coupables de quelque crime mortel, lorsqu'on voudra les ordonner pour le diaconat, la prêtrise ou l'épiscopat, ne doivent pas être ordonnés car alors ou ils seront réellement coupables du crime avoué, ou, s'il est faussement déclaré, ils seront coupables du mensonge commis en le déclarant, et dans.l'un et l'autre cas il y aura indignité.
(-4 suivre.) ABBÉ FILLET
NÉCROLOGIE
M. CLERC (Louis)
Vice-président du tribunal civil.
Le dimanche 28 mai dernier, les autorités administratives et un grand nombre d'habitants de la ville de Valence accompagnaient, à sa derniere demeure un des enfants les plus distingués de la cité, M. Clerc (Louis), fils de l'ancien maire et député de la Drôme de 1871 à 1892.
Au cimetière, MM. Cabasse, président du tribunal, Roux, procureur de la République, et Joulie, bâtonnier des avocats, ont tour à tour rendu hommage aux rares qualités, au talent et aux vertus du regretté défunt, homme de coeur, ami sincère, et membre de toutes les Sociétés qui s'occupent des améliorations sociales, de l'instruction et de la moralisation populaire.
La Société d'Archéologie, formée par des membres dispersés dans le département, a regretté de ne pouvoir assister aux funérailles de ce collègue dévoué, et elle associe de tout cœur ses regrets légitimes à ceux de sa respectable famille, de ses amis et des infortunés qu'il a protégés et constamment défendus.
A. Lacroix.
SÉANCE DU 10 MAI 1909
M. Brun-Durand, président, fait en termes émus un bel éloge du regretté M. Nugues, vice-président, membre de la Société depuis sa fondation en 1866, et dont la disparition laisse aux siens, comme à nous tous les plus vifs regrets. Il est décidé qu'il sera pourvu à son remplacement par voie d'élection, lors de la prochaine réunion de la Société au mois de juillet. La Société française d'archéologie doit tenir, à Avignon, sa session annuelle, sous la présidence autorisée de M. Lefèvre-Pontalis. Une invitation nous a été adressée à cet égard. Il est à désirer que plusieurs membres de notre Société assistent à cette session qui aura une réelle importance, en raison surtout des travaux de restauration en cours d'exécution au Palais des papes.
La seconde Table des Matières de notre Bulletin est à l'impression. Elle va du tome XXI au tome XLI. Il est décidé qu'elle sera envoyée à tous les membres indépendamment des livraisons ordinaires du Bulletin. M. Marius Villard, notre laborieux collègue, en recueillant les notes déjà publiées de Claude Rogier, d'Aimar du Rivail, de Belleforest, de Golnitz et autres sur le tombeau de l'impératrice Justine, a préparé une étude définitive de l'inscription de ce tombeau. Les
inscriptions de la ville, bien qu'ayant été soigneusement reproduites par la Société dans son Bulletin, pourraient exiger une étude définitive, au moins à titre de complément.
M. Prompsal, possesseur d'une étude notariale fort ancienne, a bien voulu nous communiquer des copies de vieux cantiques assez curieux. Mais un examen de leur mérite, au point de vue littéraire et religieux, ne semble pas devoir justifier leur publication dans le Bulletin.
M. Brun-Durand donne ensuite lecture d'un chapitre de son étude sur les Dauphinois à l'Académie française.
Au cours de la séance, nous avons eu la visite d'un aimable publiciste, M. Charles de Coynart, qui s'est occupé avec talent de divers personnages du xvine siècle. Actuellement, il 'porte son attention sur une Dauphinoise, Madame de Tencin. M. de Coynart a bien voulu nous donner, à ce sujet, d'intéressants détails, grâce à l'appoint de documents inédits et ignorés, qui vont lui permettre de replacer, sous son vrai jour, toute la première partie de la vie de Aladame de Tencin, jusqu'à son arrivée à Paris. Inutile de dire que cette communication a été écoutée avec le plus vif intérêt.
CHRONIQUE
M. le chanoine Jules Chevalier vient de publier le tome 111 et dernier de son Essai historique sur l'Eglise et la Ville de Die, ouvrage qui compte parmi les meilleures publications d'histoire locale, si bien qu'on peut le prendre pour modèle Dans ce volume, notre savant collègue a abordé des questions d'un intérêt considérable les origines et les débuts de la Réforme en Dauphiné, surtout dans le Diois et le Valentinois, les guerres de religion, le régime de l'Edit de Nantes, sa révocation en 1685, enfin la biographie des derniers évêques de Die, jusqu'à la suppression du siège en 1790. Il y aura lieu de revenir à ce livre par un compte rendu spécial. On sait que M. J. Chevalier à consacré deux volumes à l'histoire de Die pendant la période de la Révolution et de l'Empire.
Dans toutes ces publications, l'auteur est constamment remonté aux sources qui, très souvent, viennent des archives publiques ou privées, et sont inédites. S'il est remarquablement documenté, il fait preuve aussi, dans ses jugements sur les hommes et les choses du passé, d'une sérénité d'esprit, d'une impartialité, enfin, d'une indépendance, qui donnent à son œuvre une valeur scientifique du meilleur aloi. L'Académie des Inscriptions l'a hautement reconnue, en accordant à l'auteur deux mentions honorables et une deuxième médaille, en 1897 et en 1907. Ces récompenses ont leur éloquence.
La Provence du pi entier au douzième siècle. Etudes d'histoire et de géographie politique, par M. de Manteyer, est un livre excellent, et qui nous touche de trop près, pour qu'il ne soit pas au moins mentionné ici, en exprimant le désir de voir le jeune et sympathique érudit reporter plus directement sur sa province d'origine, le Dauphiné, une part de son activité intellectuelle.
L'infatigable archiviste des Hautes-Alpes, M le chanoine Guillaume, vient de publier le tome I" de YHistone de Gap et du Gapençais, par Théodore Gautier, avec une introduction et d'abondantes notes qui mettent au point voulu un travail inédit, déja ancien, et qui méritait de voir le jour.
L' Histotie de Châties V, par M. Delachenal, est une oeuvre de premier ordre, traitée avec une haute compétence, telle qu'on pouvait l'attendre du savant éditeur des Letties de Chai les V. Aussi, vient-elle d'obtenir le grand prix Gobert à l'Académie des Inscriptions. Le chapitre relatif à la réunion du Dauphiné à la France nous intéresse particulièrement. La, comme ailleurs, la connaissance des sources est parfaite. Même après Guiffrey, dont le livre sur la réunion du Dauphiné est resté définitif, M. Delachenal a pu formuler des rectifications de détails et apporter une part d'inédit. Les articles de M. Masson sur Madame de Tencin parus dans la Revue des Deux Mondes et réunis en volume, ne constituent pas encore la biographie définitive de cette femme célèbre, dont la vie a donné lieu à tant de critiques. Et pourtant, son récent biographe a réuni une documentation bibliographique vraiment considérable. Mais, comment n'a-t-il pas vu qu'en acceptant sans contrôle toutes les données perfides et calomniatrices des jansénistes sectaires du xvme siècle, ennemis acharnés des Tencin, il risquait de faire fausse
route, et, comme ses devanciers, d'être victime d'une opinion historique ainsi erronée ? C'est précisément ce qui lui est arrivé. Et puis, il a ignoré l'existence de documents fort importants, toutes les pièces du procès de sécularisation de Madame de Tencin, procès instruit par l'officialité de Grenoble, et qui, nous en avons l'assurance, ne tardera pas à faire connaître la vérité viaie, la seule qui importe, et ici comme ailleurs, elle a besoin d'être rétablie, car il y a des réputations noircies à plaisir. N'oublions pas la Palatine et Madame de Maintenon si maltraitées par Saint-Simon, et dont la mémoire n'a été réhabilitee que de nos jours. Il n'y a pas jusqu'à Madame du Barry qui, victime des Choiseul, ne soit presque dans le même cas, d'après son récent biographe, M Claude Saint-André, dont le livre, au dire d'un connaisseur entre tous, M. Pierre de Nolhac, présente « les éléments d'une défense qui n'a qu'à laisser parler les faits pour décider le lecteur » (Journal des Débats du io juin 1908). Peut-être faut-il en revenir au mot de Paul Bourget « Le roman n'est que de la petite histoire probable l'histoire c'est du grand roman vrai et porté sans cesse à sa suprême puissance ».
Terminons par deux bonnes nouvelles Un érudit dauphinois bien connu, et qui a plusieurs fois enrichi notre Bulletin d'intéressantes études, M. J. Roman, a été nommé correspondant de l'Institut (Académie des Inscriptions), Toutes nos plus sincères félicitations. Notre compatriote, M. Robert de la Sizeranne, a vu sa belle œuvre littéraire justement récompensée par l'Académie française, qui lui a décerné un prix de 2500 francs. Bravo D'aucuns le disent académisable. Quod faxit Deus
Charles BELLET
Le Secrétaire-Gérant A. LACROIX.
Le Tramway
DE
Valence à Pont-en-Royans
(SUITE. Voir la 170* livraison)
CHABEUIL ET SES DERNIERS SEIGNEURS
Le prince de Monaco visita Chabeuil, sa nouvelle seigneurie, en 1656, et il y fut reçu avec beaucoup de solennité, dès ce moment il laissa totalement libre l'administration municipale cependant il sollicita auprès du ministre de Louis XIV l'exemption du logement du régiment de Bretagne, qui fut remplacé par les dragons de la reine, qui s'y livrèrent à toute espèce de malversations.
Les revenus de la seigneurie comprenaient les charges de juge ducal, de procureur juridictionnel et de capitainechâtelain, les greffes, les langues de bœuf et la leyde, sorte d'impôt sur les comestibles et les greffes, affermés 150 livres en 1680. La seigneurie comptait alors 135 gros domaines et 13 hameaux, habités par plus de 6,000 communiants. La forêt à cause du droit de pâturage concédé aux habitants était journellement dégradée par les étrangers. Des usurpations commises dans son sol boisé, après 1638, en diminuèrent beaucoup les revenus. L'histoire des 3,089 habitants actuels de la commune pour une superficie de 3.964 hectares, étant impossible, nous nous bornerons à faire connaître ses personnages remarquables par leurs 2e SÉRIE. XLII11 VOLUME. 19°9, :u
fonctions, ieur bienfaisance, leur savoir, leur courage, leur dévouement et surtout leurs droits à la reconnaissance publique.
1° Bonnefoy (ou de Bonnefoy) (Ennemond), né à Chabeuil, le 20 octobre 1536, mort à Genève le 2 février 1574, fut un professeur distingué de l'Université de Valence. On a de lui un traité du droit Oriental.
2° L'abbé Bruyère, curé de St-Martin, à Paris, né à Chabeuil le 9 ventôse an XI, fiTdon à l'hospice de cette commune, par acte du 27 juillet 1866, de divers immeubles d'une valeur de 10.124 francs, et d'une rente de 1,200 francs, pour la création et l'entretien d'un hospice, composé de quatre lits de malades, dont deux pour les hommes et deux pour les femmes. Voici à ce sujet la délibération du conseil municipal « Extrait du registre des délibérations du conseil municipal de la commune de Chabeuil.
« L'an mil huit-cent-soixante-six et le premier juillet, le conseil municipal de la commune de Chabeuil, réuni extraordinairement dans la salle de ses délibérations, en vertu d'une lettre de M. le Préfet en date du 22 juin dernier, sous la présidence de M. Urtin, en sa qualité de maire, présents MM. Bellon, Bernard, Derbuel, Perrot, Escoffier, Métifiot, Eydoux, de Bimard, Gérin, Rosset, Ferlay, Jouvenet, Faure, Lambert et Roux, notaire, conseillers.
« M. le maire expose au conseil qu'il l'a réuni extraordinairement à l'effet de lui donner connaissance de la lettre de M. l'abbé Bruyère, et l'engage à délibérer sur sa donation ci-après détaillée. Suit la teneur de sa lettre
A Monsieur le Maire de Chabeuil, en conseil municipal. Monsieur le maire,
« Le soussigné Pierre-Bruno Bruyère, curé de St-Martin, à Paris, chanoine honoraire de Valence et de Montpellier,
chevalier de la légion d'honneur, demeurant à Paris, rue de l'Entrepôt, n° 17, a l'honneur d'exposer: que voulant donner à la ville de Ghabeuil, son pays natal, un témoignage de son affection et manifester en même temps sa reconnaissance pour les marques de bienveillante sympathie dont il a été l'objet de la part des habitants, soit dans sa personne, soit dans la personne de ses chers parents défunts.
« II a résolu
« 1° De fonder un hôpital en faveur des pauvres malades de la commune de Chabeuil, composé de quatre lits, dont deux pour hommes et deux pour femmes.
« 2° D'affecter à cette fondation les immeubles dont il est propriétaire et qui consistent 1 en une maison située rue du Béai des Moulins, avec toutes ses dépendances, contiguë d'une part à la communauté des sœurs du St-Sacrement et de l'autre à l'habitation de M. Eugène Clairfond 2° en une prairie située au quartier du Moulin de Lambert 3° en une pièce de terre complantée en vigne et mûriers, située au quartier des Rosiers.
« 3° D'affecter, en outre, comme dotation du service de ces quatre lits, une inscription de douze cents francs de rente annuelle et perpétuelle sur le grand livre de la dette publique, dont le titre sera remis entre les mains de M. le maire, dès que les formalités legales auront été accomplies et en tous cas au plus tard, le 1er juillet mil-huit-cent-soixante-sept.
« Après l'autorisation d'accepter obtenue par le conseil municipal, les intentions ci-dessus exprimées seront constatées par un acte de donation entre vifs qui sera reçu par Messieurs les notaires résidants à Chabeuil.
« Le soussigné exprime la condition que les immeubles et l'inscription de rente, mentionnés ci-dessus, ne pourront, en aucun cas, être détournés de leur destination actuelle. Tout en s'en rapportant aux décisions de l'autorité supé-
rieure pour la composition de la commission administrative, conformément aux prescriptions légales le soussigné exprime, si non la condition, du moins le désir que le curé de la paroisse de Chabeuil, soit de droit, membre de ladite commission.
« Le bénéfice de la présente condition est applicable exclusivement aux pauvres malades domiciliés sur le territoire de la commune de Chabeuil, sans distinction de culte. Le soussigné croit devoir néanmoins introduire une réserve formelle dans la prévision du cas où un acte gouvernemental prononcerait la distraction d'une ou de plusieurs sections de la circonscription actuelle de la commune de Chabeuil. Dans cette hypothèse les habitants des fractions distraites n'auraient plus aucun droit, ni à la propriété, ni à l'admission dans l'hôpital de Chabeuil. « Le soussigné a l'espérance fondée que les sœurs du StSacrement, dont l'établissement est contigu à la maison affectée à la présente fondation, prêteront leur concours pour le service des malades, et que la commission administrative s'entendra facilement avec elles, pour le règlement de la subvention qui pourra leur être attribuée à titre rémunératoire.
Le soussigné est présentement en congé à Chabeuil, il prie M. le maire de vouloir bien saisir officiellement le conseil municipal de la présente communication. « Il prend la respectueuse liberté d'ajouter en terminant qu'il serait heureux d'apprendre, avant son retour à Paris, que l'autorité municipale a commencé les démarches nécessaires pour mener à bonne fin une œuvre qu'il a entreprise avec une grande confiance en Dieu et un grand amour pour ses compatriotes.
Chabeuil, le 18 juin 1866.
Signé BnuvÈnE, curé de St-Martin.
« Et à l'instant même, avant de délibérer, et sur la proposition que lui en a faite M. le maire, le conseil municipal appréciant le mérite infini et l'avantage si précieux des intentions généreuses de M. le curé Brnyère, a décidé, à l'unanimité, qu'il devait se rendre en corps auprès de cet estimable bienfaiteur, pour lui répéter de vive voix et comme interprète en même temps de tous les autres habitants de la commune de Chabeun, combien tous nous appréc'ons la grandeur de ses bienfaits et combien nous avions à cœur de lui en témoigner notre profonde et bien vive reconnaissance.
« Et immédiatement M. le maire, ayant proposé au conseil de suspendre la séance, à cette intention, nous nous sommes rendus auprès de M. le curé Bruyère, au domicile de M. de Lambert, ou ayant eu le bonheur de le rencontrer, nous lui avons fait part de l'objet de notre visite en corps, en lui renouvelant nos sentiments d'admiration et le priant d'agréer en même temps l'expression de notre respectueuse reconnaissance.
« M. le curé Bruyère a été, on ne peut plus sensible à cette démonstration de cœur et de sympathie, et, malgré sa visible émotion, n'a encore fait qu'ajouter au mérite de ses œuvres en les confirmant par des paroles qui n'appartiennent qu'à une belle âme et un noble cœur.
« De retour à la salle du conseil, la séance a été reprise pour délibérer sur l'objet de sa réunion, et le conseil a pris la délibération suivante
« Vu la lettre de M. le curé Bruyère, adressée à M. le maire en sou conseil municipal, en date du 18 juin 1866. « Oui l'exposé des intentions de M. Bruyère considérant que ces intentions si admirables de chanté et de dévouement sont avantageuses à la commune et complètent le système d'assistance aux indigents. surtout en ce qui touche les malades et les vieillards considérant que les revenus des immeubles et de la rente annuelle et perpétuelle de douze
cents francs sont suffisants pour que l'hôpital que M. Bruyère a l'intention de fonder à Chabeuil. puisse satisfaire, dès à présent, à l'entretien constant de quatre lits.
« Considérant que cet hôpital, en complétant les moyens d'assistance dans la commune de Chabeuil, outre et indépendamment des autres ressources distinctes et séparées qui résultent déjà depuis longtemps du fonctionnement de notre bureau de bienfaisance, ne peut qu'aider encore mieux à l'extinction si désirée de la mendicité.
« Considérant que l'intention manifestée par M. Bruyère, que l'hôpital soit la propriété exclusive de la commune de Chabeuil, pt que si une partie des habitants de cette commune devait s'en séparer, pour former une commune distincte, les habitants de cette section séparée ou distraite perdraient tous droits à la propriété et au bénéfice ou à l'usage dudit hôpital, cette réserve est une condition équitable et juste de tous points.
« Par ces motifs, le conseil autorise M. le maire à accepter, au nom de la commune de Chabeuil, la donation que M. Bruyère propose de faire à ladite commune pour la fondation d'un hôpital, dans les termes énoncés par lui. « Charge M. le maire de solliciter, :par l'intermédiaire de M. le préfet, l'autorisation de l'hôpital dont il s'agit, comme établissement public et d'accepter la donation, avec la distinction que M. Bruyère y rattache, par suite de décret impérial exprime, montre, le désir qu'une expédition de la présente délibération soit adressée à M. le curé Bruyère. « Et à l'instant même, avant la clôture et le levée de la séance, le conseil municipal, à l'unanimité, voulant à ses justes titres, perpétuer le souvenir d'un si beau témoignage de bienfaisance et de dévouement, propose et décide que la rue du canal des Moulins, où se trouve la maison de Monsieur Bruyère, qui doit servir d'hôpital, prendra désormais et conservera à perpétuité, le nouveau nom qui lui est présentement donné de Rue Bruyère.
« Fait, clos et délibéré les jours, mois et an susdits, et ont signé au registre tous les membres présents à la séance. Pour extrait conforme
Le maire,
URTIN.
3° Charpey (Laurent), fut secrétaire du roi, maison et couronne de France, en 1636, charge qui anoblissait. L'ancienne et noble famille de Claveyson avait une branche établie à Chabeuil depuis 1580.
4° Clairfond, élève distingué de l'école des chartes, préféra le commerce à l'érudition et s'établit à Moulins. On a de lui quelques brochures politico-sociales, où il se livre à des hypothèses toutes contraires à ses études premières et aux révélations de l'histoire, que tout archiviste doit connaître et enseigner.
5° Crozat de Vaugraud, né à Chabeuil le 8 janvier 1733, mort le 2 avril 1811, fut nommé maréchal de camp et chevalier de Saint-Louis.
6° Du. Vache (Louis), appartenait à une famille de Chabeuil ennoblie en 1420, fut une des personnalités marquantes du parti protestant et devint conseiller et président de la chambre de l'Edit à Grenoble.
7° Fayard, sénateur de la Drôme et maire de Chabeuil, décédé récemment.
8° Génissieux (.Jean-Joseph-Victor), né à Chabeuil le 31 octobre 1749, était avocat au parlement de Grenoble. En t791, les électeurs de cette ville le nommèrent juge an tribunal du district et l'année suivante député à la Convention, dont il fut le dernier président. Elu membre du conseil des Cinq-cents il en devint président le 18 juin 1799.
On lit dans le Moniteur Universel du 23 brumaire an VU! i de la République Française
Génissieux, Dorimond et Grascassaud ont été écroués pour avoir crié qu'il fallait mettre le général hors la loi. On dit que ces prisonniers seraient conduits à Vincennes. Le même Moniteur du 24 brumaire an VIII (24 nov. 1799), ajoute On avait ordonné l'arrestation de Génissieux qu'on avait accusé d'avoir demandé la mise hors la loi de Bonaparte, mais comme il n'a pas été prouvé qu'il se fût trouvé à la séance de St-Cloud, on a donné l'ordre de le mettre en liberté.
Le 15 germinal an VIII (2 avril 1800), le même Montteur Universel annonce la nomination de Génissieux, comme juge au tribunal d'appel de la Seine, par arrêté de Honaparte, premier consul de la République. Ce magistrat mourut le 27 octobre 1804.
9° Lacroix-Saint-Pierre, né à Chabeuil le 10 août 1817, décédé le 3 juin 189), fut président de la Société des Omnibus et Tramways de Lyon, des Messageries maritimes et de la compagnie du Chemin de fer d'Orléans. Il fut colonel dans la garde nationale de Paris, membre du conseil général de la Drôme, il devint député de ce jdépartement en H63. Après le 4 septembre 1870, il renonça à la vie politique, resta membre du conseil municipal et administrateur de l'hospice de Chabeuil. Il fut également un des fondateurs de la Société d'Archéologie de la Drôme, et donna la maison Clairfond pour servir de presbytère.
100 Laurencin, Jean-Espérance (comte de), né à Chabeuil le 17 janvier )740, mort à Lyon le 21 janvier 1812, savant écrivain, il fit une ascension avec Montgolfier, le 19 janvier 1784, et publia une lettre sur une expérience aérostatique faite devant le roi de Suède.
)1° Lérisse, procureur au parlement de Grenoble, fut nommé dans cette ville capitaine de santé lors de la peste
de 1597, son livre sur le fléau a été attribué à Louis de ViMeneuve. médecin du roi auquel il est dédié.
)2°Mazet [Jean-Baptiste), négociant à Lyon, né à Chabeuil, le 15 novembre 1781, mort à Lyon le 6 novembre 1873 a légué à Chabeuil, par testament en date du 4 octobre 1870, la moitié de ses biens évalués à 340.000 francs.
)3° Patin (Antoine), substitut du procureur général au parlement de Grenoble, publia en 1659, une brochure sur la question de savoir si un ou plusieurs particuliers plaidant contre leurs communes comme demandeurs ou défendeurs doivent contribuer aux frais et dépenses que la communauté fait contre eux e. Cette famille de Chabeuil, n'avait rien de commun avec celle du médecin Guy Patin, auteur des Lettres /a)7u<tères voir pour plus de détails le Dictionnaire biographique de M. Brun-Durand.
t4° Vidames (Hugonin de), né à Chabeuil, vint à Grenoble en 1398, où il se fit remarquer par ses talents, d'après le même Dictionnaire.
Cette liste que l'âge m'a contraint de laisser incomplète méritait d'être publiée telle quelle pour compléter la notice de M. l'abbé Vincent ()), sur Chabeuile~honorer le souvenir de plusieurs vrais amis du peuple dont les bienfaits devraient être écrits sur une « table de marbre
())Né à St-Jean-en-Royans, le 4 avril 18)3, écrivain de talent qui publia une notice littéraire sur Chabeuil, où il était professeur au collège; il mourut à Serves, où il était curé, le 2 janvier 1891. A. LACROix, archiviste.
LE DAUPHINÉ
A
L'ACADÉM] E F RANÇAÏSE
(SuiTb.–Vo~rtat~o'ttvrdU.nn)
II
PIERRE BOISSAT Seigneur d'Avernals et de Licieu
Autrement, Pierre Boissat, troisième du nom, ou bien encore, Boissat l'Esprit comme l'appelaient ses admirateurs, naquit à Vienne en 16o3. Il était d'une famille de moyenne robe (i), que Chorier, son ami et son biographe (2), n'a pas craint de faire remonter au temps de Charles-le Chauve et, dans tous les cas, le petit-fils de Pierre savant héléniste et jurisconsulte distingué, qui étant devenu vibailli de Vienne, rendit de tels services à ses concitoyens pendant les guerres civiles du xv!" sièete, que les Etats du Dauphiné le chargèrent (~) Dont les armories étaient de gueules à la cottire d'argent, accompagnée de six besants d'or, poséa en orle, trois en chef et trois en pointe, avec pour devise Ny regret du passe, A' peur de l'aveni, (2) De Pftrf 'BoMMfu. f~a ~mtct~uf y~f)! /.t~rf duo ~fM/<:f C/'orcri. ~<e"tenstS, J. C. Grenoble. Fr. Provensa), t68o, in-12.
maintes fois de missions importantes à Paris, pour les affaires de la province. Comme aussi était-Il le fils de Pierre It, qui après avoir étudié le droit à l'université de Valence, puis plaidé pendant quelque temps avec succès devant le parlement de Grenoble, succéda comme vibailli de Vienne à son père et, chaud partisan d'Henri IV pendant la Ligue, dut à cela d'obtenir des lettres de noblesse, que lui auraient d'ailleurs mérité différents ouvrages tels que ses T~ecAerc~M sur les duels; une /s/0!6' des cAe~s de ~'0~-e de /'Ao~?'/a/ de .S/e~M de /ërH~a/e~ plusieurs fois réimprimée, et une //M/on'e ~ë)!6a~o~?'<e de la t~a~'soH de ~/e~c:s. Quant à notre académicien lui-même, né, ainsi que je l'ai dit, à Vienne, en ~60~, il fit preuve, tout enfant, d'une intelligence extraordinaire, ayant de telles dispositions pour la poésie latine, qu'au collège il mettait ses thèmes en vers latins, au fur et à mesure que les dictait le professeur.
Neveu d'André Valadier, vicaire général de l'évêque de Metz et abbé de Saint-Arnulphe de la même ville, ses parents le destinaient au sacerdoce, mais son père étant mort, il alla prendre le bonnet de docteur en droit à l'université de Valence, puis ayant abandonné le droit pour la carrière des armes, servit au siège du Pouzin, comme simple volontaire en 1632. Emmené ensuite à Malte, par le seigneur du Passage, il n'y resta pas moins d'un an, le grand maître Antoine de Paule, l'ayant fort bien accueilli, à cause de l'histoire de l'Ordre écrite par son père, et, de retour en France, obtint le grade de capitaine au régiment de Sancy, dans l'armée de Lesdiguières, avec laquelle il fit la campagne de Piémont, où non content de servir avec
les armes, il servit encore avec sa plume car les Génois ayant répandu des calomnies contre la conduite des soldats français, il publia alors une Apologie en latin, dédiée au pape Urbain VIII.
Quelque temps après, des raisons de santé l'ayant contraint de déposer les armes, notre jeune homme allait à Paris, où le gouverneur du Languedoc, Henri de Montmorency, dont il avait fait connaissance en revenant de Malte, le présenta à Gaston d'Orléans, frère de Louis XIII, qui séduit par son esprit et ses manières, se l'attacha en qualité de gentilhomme de la chambre, et l'ayant ensuite emmené avec lui à l'expédition de l'île de Rhé (1627), puis au siège de la Rochelle (1620), enfin en Lorraine et en Belgique après sa brouille avec le roi son frère, le mit ainsi à même de se comporter en parfait gentilhomme, suivant son panégyriste Chorier. Seulement, comme il n'était pas, en somme, d'humeur belliqueuse, c'est avec bonheur qu'il revint à Paris avec Gaston, quand celui-ci se fut réconcilié avec Louis XIII, la maison de ce prince étant alors devenue le rendez-vous de quantité d'hommes de lettres et de savants, qui se réunissaient au moins une fois chaque semaine chez lui pour causer de littérature, d'arts, de sciences, voire même de métaphysique, et lire ensuite des ouvrages de leur crû. Ainsi est-ce là que Boissat lut pour la première fois son ~/a;)/e~:fs, poème en vers latins, sur Charles-Martel, auquel on donna des éloges tellement exagérés, que Chapelain, qui était la grande autorité de cet aréopage, le dit « empreint d'une gravité magnifique H, et d'autres furent jusqu'à le placer au-dessus de l'Eneide. Ce qui n'était que ridicule, mais lui valut en fin de compte, une célé-
brité qui le fit comprendre aussitôt parmi les hommes d'élite qui formèrent en 1635 l'Academie française; académie qu'il s'efforça, mais en vain, de faire appeler Académie d'éloquence.
Ainsi comblé, Boissat tint à se montrer à ses compatriotes dauphinois, et pour cela vint à Vienne, d'où il alla saluer à Grenoble le comte de Sault, gouverneur de la province, qui le reçut fort bien, mais ne l'empêcha cependant pas d'avoir dans cette ville une aventure des plus fâcheuses.
Invité à un bal masqué pendant le carnaval de 1637, Boissat crut pouvoir y aller déguisé en femme et, comme la comtesse de Sault (i) passait pour mordante, lui offrit une paire de ciseaux. Ce que cette dame prit si mal, qu'elle fit bâtonner le lendemain notre académicien par ses laquais. D'où un scandale d'autant plus grand que la noblesse dauphinoise, se fit un point d'honneur de relever l'injure faite à Boissat, qui trouva encore un sérieux appui chez ses collègues de l'Académie française la foule de lettres et de mémoires qui se retrouvent dans les registres de l'Académie nous apprennent enfin que ce n'est qu'après treize mois de querelles, de discussions et de débats, qu'on put faire accepter par les parties un accommodement les renvoyant dos à dos. Boissat dut affirmer n'avoir jamais eu l'intention d'offenser la comtesse de Sault, et le mari de celle-ci manifester le regret des violences auxquelles ils s'était laissé aller. Etant en outre prescrit aux gardes du comte, « de se présenter avec leurs casaques et sans armes et de se mettre à genoux devant le sieur
())AnnedetaMade)einedeRagny.
de Boissat » pour être condamnés par ce dernier a telle durée de prison qu'il jugerait bon ». Et venant ensuite le tour des valets, ils devaient s'agenouiller à leur tour devant Boissat, qui, prenant un bâton des mains du président en userait a sa volonté. Seulement, il faut bien dire que notre académicien ne revendiqua pas ces dernières satisfactions jugeant probablement et avec raison que gardes et valets n'avaient été en cette circonstance que des instruments irresponsables, il respecta la liberté des gardes du comte de Sault et l'échine de ses valets.
Cet accommodement est du 2~ février 16~8 et l'on peut juger de l'importance que l'Académie attacha à cette malheureuse affaire par ce fait qu'elle est rapportée tout au long dans l'histoire de Pélisson (i), comme aussi est ce un irrécusable témoignage de la considération qu on avait pour Boissat dans l'illustre compagnie mais celui-là ne s'en trouva pas moins trop atteint pour retourner au milieu de ses collègues. Dévoré de chagrin, il se confina à Vienne, exclusivement occupé de pratiques de dévotion et de la culture des lettres, on prétend même que dans sa vieillesse notre académicien délaissa un peu celle-ci pour consacrer tout son temps à Dieu, rassemblant les pauvres dans les carrefours pour les catéchiser et faisant de fréquents pèlerinages, notamment à Notre-Dame de l'Osier, dont il fut le premier à vanter les miracles poussant enfin les choses au point que l'abbé d'Artigny raconte dans ses A~oHfeaMJc yMe~ones d'A~/on'e et de (f) ~Mforf de t'/tca~'mie /ranMM~, par Pehsson et d'Ohvet. édition de Ch.-L. Livet, 1, i3ô-!4.8. – Voir aussi L'armee /)M<~)t)tf, par de la Jonqmeres, ~-25.
/a'<)€ (i), que lorsque la reine Christine de Suède passa à Vienne, le j~ août [6~6, Boissat, prié par les consuls de se mettre à leur tête pour la complimenter, se présenta devant elle avec une longue barbe, un habit grossier et un air de malpropreté qui la choqua, et qu'il lui fit un long sermon sur le mépris du monde et les jugements de Dieu, qui lui déplut encore davantage. « Elle souffrit impatiemment, ajoute-t-il, qu'au lieu de lui donner des louanges, il se jetât en une matière si lugubre » et quand il se fut retiré, s'adressant au duc de Lesdiguières, gouverneur de la province « Ce n'est point là, dit-elle, ce Boissat que je connais, « c'est plutôt un prêcheur qui emprunte son nom, ou « si c'est Boissat, il faut que son aventure de Grenoble « lui est troublé l'esprit ».
Et cependant il faut bien reconnaître que Boissat exerça, malgré tout, une influence considérable en Dauphiné pour tout ce qui regarde les belles lettres, et fut jusqu'à son dernier jour la grande autorité et comme le centre d'un mouvement intellectuel fort utile, sa grande réputation poétique groupant autour de lui tous les hommes distingués de la région, ainsi que le prouve la liste dont Chorier a cru devoir agrémenter sa biographie, que Rochas a reproduite et que nous lui empruntons.
(f)Tume),.i37-
AMIS DE BOISSAT A VIENNE
« Pierre Allard, de Beaurepaire, pharmacien, qui était très versé dans la connaissance des simples. Il mourut à la fin de jô~i et légua sa bibliothèque à Chorier, son ami.
« Louis de Basemont, seigneur de Fiançayes et de Saint-Egrève, d'une famille de la Beauce, fixée en Dauphiné dès 1549, fut d'abord vibailli de Vienne. H donna ensuite sa démission et devint conseiller au parlement de Grenoble. II vivait encore en ]ô8o (t). « Jérôme Bertal, nommé en 16~5 conseiller à la Cour des aides et transféré en 1658 au parlement de Metz. « Jean de Bussières, jésuite, écrivain, né à Villefranche, mort à Lyon en octobre jôyS, demeura quelque temps à Vienne dans la maison de son ordre. « Etienne Chaume, né à Vienne, étudia la médecine à Montpellier et alla ensuite exercer sa profession à Paris. Au bout de quelque temps ses rapports avec les illuminés et les rose-croix lui ayant attiré des démêlés avec la police, il se réfugia à Vienne, et y devint un habile médecin. H mourut vers 1660, âgé de 50 à 60 ans.
« Nicolas Chorier, l'historien.
« Jean Colombi ou Colomb, jésuite, né à Manosque. auteur de l'Histoire des évêques de Valence et de Die, demeura quelque temps à Vienne dans la maison de son ordre
« Mathieu Compain, de Lyon, jésuite, grand amateur (<) Nommé conaeitter le <2 juin <6~5, à moins de viogt-un ans.
de médailles, demeura aussi à Vienne et mourut à Lyoneni6y8.
« Louis David, avocat, puis chanoine de Saint-Maurice de Vienne, était savant et aimait les lettres. Sur la fin de sa vie il abandonna l'étude pour se livrer à la dévotion son intelligence baissa, et en proie à de bizarres imaginations, il se cachait dans son lit, faisait fermer toutes les fenêtres et demeurait ainsi dans la plus profonde obscurité. Il mourut âgé de plus de 60 ans.
« Ennemond Gaultier, musicien.
« Humbert Golat de la Garenne (i).
« Jacques-Timoléon Guignard de Saint-Priest, né à Lyon le i~ août 160~, d'abord président de la Cour des aides de Vienne, puis du conseil souverain de Bourg, fut élu prévôt des marchands de Lyon en 1653. 11 mourut en 167~.
« Hugues Jannon, fut procureur général à la Cour des aides de Vienne dès 1655, se démit de cette charge pour entrer dans l'état ecclésiastique. M était en 1680 obédiencier de Saint-Just de Lyon, et avait une si merveilleuse mémoire, que dans l'espace de quelque mois il apprit le grec, l'histoire, le droit, la géographie, etc.
« Joseph de la Porte de Theys, d'une famille noble de Dauphiné, seigneur d'Eydoche et d'Aiguebelle, d'abord conseiller à la Cour des aides de Vienne en 16~, fut nommé conseiller au parlement de Metz, en
(t) L'auteur des Bacchanales ou Lotjf de Bacchus, ~);?!<'c de N~-sc, rot d'pte et des Indes et Dieu des buveurs, ouvrage dont le titre indique l'esprit et qut, bien que reimpnme plusieurs fo)s, est encore fort rare.
2* SÉRIE. XHH' VOLUME. )f)OC). 22
16~8, d'où il passa à la Chambre des comptes de Grenoble.
« Madeleine de Loras, veuve de N. de Chaponay, vibailli de Vienne, était, dit Chorier, une femme aussi illustre par ses vertus que par sa naissance. Elle aimait les belles-lettres et ceux qui les cultivaient. Elle mourut vers t6~o. Les beaux esprits de Vienne se faisaient un devoir de lui montrer leurs productions nouvelles.
« Laurent Lusse ou Leusse, né à Vienne, conseiller à la Cour des aides, était un joyeux vivant. Homme d'esprit, fort savant en jurisprudence et en philosophie, poète au besoin, il aimait les livres, le bon vin, la bonne chère et ne craignait pas de compromettre sa robe en allant au cabaret. Il mourut en 16~, âgé de 48 ans,
« Jacques Marchier, avocat général à la Cour des aides, était un homme d'esprit. Dans sa vieillesse, dit Chorier, Libidimus donum impleverat. Il mourut en 16~ âgé de plus de 60 ans.
« Le P. Ménétrier, jésuite, écrivain, professa quelque temps la réthorique à Vienne.
« Georges de Musy, d'une famille de Dauphiné, né le i" janvier 1596, mort à Vienne en 16~, fut successivement vibailli de cette ville, procureur général au parlement de Grenoble (i), et vers i6/}o premier président de la cour des aides de Vienne. Laurent Crozat. professeur de droit à l'université de Valence, et le P. Ménétrier, prononcèrent son oraison funèbre. II était très savant en philosophie et en théologie.
(<) C'est lui qui remplaça Servien comme procureur général au parlement de Grenoble.
« Pierre de Musy, son fils, lui succéda en sa charge. Lors de la suppression de la Cour des aides de Vienne, il fut envoyé à Paris, pour solliciter la création d'une cour souveraine à Bourg, et ses démarches ayant été couronnées de succès, il en devint premier président et passa ensuite, avec le même titre, au parlement de Metz, où il mourut en 1660.
« Arnaud Pollod de Foissy, d'une maison noble de Dauphiné, s'était retiré à Vienne, apres avoir servi pendant plusieurs années en France et dans les PaysBas. Grand amateur de médailles et d'antiquités il avait formé un cabinet des plus curieux.
« Claude Treillard, jésuite, écrivain.
Claude de Trivio, avocat à Vienne.
« Gaspard Viallier, né à Lyon, beau-frère de Chorier, était un grand prédicateur. Il prononça à Vienne, en j66~, l'oraison funèbre d'André de Boissat.
AMIS DE BOISSAT A GRENOBLE
« Antoine Boniel de Catilhon, avocat général à la Chambre des comptes.
« Fr. Boniel, prieur de Treffort, poète.
« Claude de Chaulnes, premier président des trésoriers de France en Dauphiné, poète.
( Barthélemy Dauby, chef des écuries du duc de Créqui, obtint, par son habileté à dompter les chevaux, des lettres de noblesse en 1630. Il mourut fort âgé, après [659, des suites de l'opération de la taille mal pratiquée par Jeannot, médecin grenoblois. H avait de
l'esprit et écrivait bien. On trouve deux lettres de sa façon dans le recueil de Faret, intitulé Recueil de /?M KOMt'e/fM. Paris, CI. Prevd'homme, 17~0, 2 vol.,ln-i2. « Jacques des Isles, d'une famille noble de Bretagne, avait été amené à Grenoble pa~A~au~Ice Bressieu, qui lui fit épouser Jeanne Belleton, sa nièce. C'était un savant mécanicien très versé dans les lettres grecques et latines. Sa IH)e épousa Satomnn de Avérez, nommé conseiller au Présidial de Vatence en 16~8 et maitre ordinaire en la Chambre des comptes en j66o.
« Antoine Faure ta Rivière, d'une famille noble de Dauphiné, conseiller au Parlement.
« Pierre Labbé, jésuite, né à Clermont en i~o-t, demeura plusieurs années à Grenoble, où il publia quelques ouvrages.
« Philippe Lagneau, d'une famille originaire d'Orange, bibliomane, avait formé une très riche bibliothèque, dans laquelle se réunissaient souvent les beaux esprits de Grenoble. Dans sa vieillesse, vers 16~, il épousa la veuve de Pierre Blanc, président à la Chambre des comptes (i) et commit l'imprudence de s'engager à payer les dettes de celui-ci. Ces dettes s'étant trouvées trop élevées et trop nombreuses, non seulement tous ses biens ne purent suffire à les acquitter, mais encore il fut obligé de vendre sa bibliothèque. La perte de ses livres lui causa un tel chagrin qu'il en mourut. « Pierre Legoux de la Berchère, d'une famille originaire de Flandre, d'abord premier président du parlement de Dijon, puis de celui de Grenoble, en 16~, à
(<) Pierre Leblanc, sieur de Mtons, controleur des domaines en Dauphiné, qui devint président en la Chambre des comptes au mots de juillet t6o3 et résigna sa charge en )64.3.
la mort de Louis Frère. Il mourut en 16~, âge de i ans (i).
« Humbert de Lionne, doyen de la chambre des comptes (2).
« Flotard Moret de Champrond, prévôt de l'église Saint-André de Grenoble.
« François de Ponnat, conseiller au Parlement (3). a Jean-Louis de Ponnat de Combes, maître ordinaire en la Chambre des comptes (~).
<' Philippe Pourroy de Lauberivière, maître ordinaire en la Chambre des comptes.
« Nicolas Prunier de Saint-André, président du Parlement (5).
Gabriel Prunier de Bochaine, président du Parlement (6).
« Jean Rabot de Buffières, avocat général au Parlement (7).
« Etienne Roux de Morges, conseiller au Parlement. (( Alphonse de Simiane de la Coste, abbé de SaintFirmin.
(i) Pierre Legoux de la Berchère, ancien premier président du parlement de Bordeaux, puis de celui de Dijon, maitre des requêtes de l'Hôtel du roi, premier président du parlement de Grenoble, d'août 16~ à sa mort.
(2) Etait un fort savant homme, au dire de Guy Allard. (3) Docteur en droit, nommé le 28 août 1628, en remplacement de Jean-Baptiste de Ponant, son père, décédé le 3 décembre 1660. (~) Reçu le juillet i6~2, décédé le 23 jumi6o6.
(5) Nicolas Prunier, seigneur de Vineu et de Saint-André, nommé le g septembre 1645, et successivement président le 17 novembre i65o, et premier président le 23 août 1679, décédé le 22 août i6g2. (6) Gabriel Prunier de Saint-André, baron de Beauchène, conseiller, nommé président tel*'août i658,décède le i5 mars 1606 (y) Jean de Rabot, seigneur de Buffieres et de Veyssitieu, nommé le 26 janvier 16~.5.
« Ennemond Vachon de Belmont, conseiller au Parlement, mort vers 166~.
« Louis Videl, écrivain.
« Philippe du Vivier, président de la Chambre des comptes.
Rochas qui a consacré à Boissat un long article (i), dit que ses vers sont faciles, nombreux et d'une élégance rare, mais que leur insignifiance complète provoque l'ennui et qu'il doit être compris dans cette classe de gens qui excellent à dire curieusement des fadaises, suivant un mot de Montaigne. Seulement, combien d'autres écrivains, qui furent considérés de leur temps comme des maîtres, méritent-ils le même reproche ? Sachons leur toujours gré de ce qu'ils ont fait pour le progrès des lettres et des sciences, et pour ce qui regarde tout particulièrement Boissat, comme en dehors de son Histoire Nègre ~)OM/He, coM/fKan~ la vie et les a~:o:os c~'A~e.rctMche Cas~'ï'o~; une traduction des fables d'Esope et une Relation des Miracles de Notre-Dame de ~'O~'sr, il laissa un recueil d'autres ouvrages en prose ou en vers dont on ne connaît qu'un exemplaire appartenant à la bibliothèque de Lyon, et dont se sont occupés tour à tour Nicéron, d'Olivet, et d'Artigny, empruntons à ce dernier ce qu'il en dit: « Ce recueil, dit-il, est divisé en deux parties, la première contient les pièces en prose et la seconde celles en vers. Dans la première partie on trouve six relations des expéditions où Boissat s'était trouvé, et comme notre auteur ne date rien, je marquerai les années pour suppléer à son peu d'exactitude n. ()) jBfo~-d~ie du Dt!<tp/«Me, ), t5o-<55.
Relatio I PMS!'Ke~s!'x obsidio. C'est le siège du Pouzin, qui fut pris le 17 mars 1622, par le connétable de Lesdiguières, que Boissat appelle Ca~)M/a):'s senex, sed experecti vigoris !e?-a;/o?-.
Relatio II. A~ar!~a/o Melitensis. Le grand galion et les galères de Malte ayant pris port à Marseille, sur la fin de 1622, Boissat, à la sollicitation de Gaspard de Poisieu du Passage, profita de cette occasion pour aller à Malte et engagea Musy de Véronin et Quison, ses amis intimes à faire le voyage Ils revinrent en France au mois de novembre 162~. L'auteur fait ici la description des plus célèbres villes qu'il vit sur sa route et dépeint d'une manière intéressante les périls qu'il courut à son retour, pendant les horreurs d'une tempête qui dura sept jours entiers.
Relatio III, L!<.s/ca; expeditio. C'est l'expédition de Charles-Emmanuel, duc de Savoie et du connétable de Lesdiguières contre les Génois en 162$. Boissat dit que le connétable s'éloigna de la Cour, afin de ne pas dépendre du cardinal de Richelieu, qui était alors maître absolu Les trois frères Boissat, Pierre, dont il s'agit, André, enseigne de chevaux légers, et Claude, chevalier de Malte, se distinguèrent extrêmement dans cette guerre. L'auteur n'en put voir la fin, car ayant été atteint d'une dangereuse maladie, il fut soigné à Turin, d'où il revint à Vienne pour reprendre ses forces.
Relatio IV, /lH~/o;'K/M ad ~/teaw excensio et ~i<~e//a obsessa. Le maréchal de Schomberg défit les anglais dans l'île de Ré, le 8 novembre 1627. On trouve ici des particularités curieuses sur la belle défense de Thoiras au fort Saint-Martin, attaqué par le duc de Buckingham.
Relatio V, /e~a capta. La Rochelle se soumit au roi, le 28 septembre ou plutôt le 2ç octobre [628, après un blocus de plus d'une année.
Relatio VI, Silva Ducensis e~M~?M/o. Gaston, duc d'Orléans, s'était retiré de la Cour mécontent Boissat qui l'avait suivi en Lorraine, voyant qu'on travaillait à réconcilier ce prince avec le roi son frère, passa en Hollande et se trouva au fameux siège de Bar-le-Duc, qui fut pris le 14 septembre 1620, par Frédéric-Henri, prince d'Orange, assisté des troupes de France et d'Angleterre. On trouve ensuite un morceau d'histoire de 160 pages, divisé en six livres, sous le titre de Lo~Aa/M~M capta. C'est ce que Boissat a fait de meilleur. Il parle en homme bien instruit des brouilleries qui firent sortir du royaume la Reine mère et le duc d'Orléans, et décrit avec détails les expéditions qu'on fit en Lorraine, jusqu'à la prise de la Alotte par le maréchal de la Force, le 26 juillet 16~. Il finit par l'arrêt du parlement de Paris qui déclara nul le mariage de Monsieur avec la princesse Marguerite de Lorraine.
Passons à la deuxième partie, qui contient les poésies. 1. Ma~/e~MS. C'est son poème épique de CharlesMartel en six livres, avec des arguments à la tête et des allégories à la fin de chaque livre. Les dix-sept premières pages manquent Ce poème a eu cela de commun avec la Pucelle de Chapelain, qu'il a été excessivement loué par quantité d'auteurs qui ne l'avaient pas lu. On parlait de Boissat comme d'un digne rival de Virgile. On ne pouvait lui pardonner de faire languir le public dans l'attente d'un ouvrage qui devait effacer tout ce qui avait paru jusqu'alors de plus parfait en
ce genre Saint-Geniez, célèbre poète d'Avignon, dit dans les Hendécasillabes adressés à notre auteur
An pectus gravioribus relaxans
Curis Aonium chorum frœquentas Vel moles elegos canens, vel acri Epos grande tuba. Quid )Ue victor Martellus tibi nunc gerit? Qmd ilh, Quis lucem videat, struis morarum ? Virorum manibus politiorum
Jam tritum oportun. Anne semptternis Pressum condere cogitas tenebris ? Nœ tu, si faceres, decore summo Frandares patrtam, tuœque tniquus Famœ, consuteres Maronianae.
St-Geniez craignait, comme l'on voit, que la réputation de Virgile ne reçut quelqu'atteinte par l'édition de Charles-Martel mais jamais crainte ne fut si mal fondée, car c'est un poème froid, languissant, sans vie, sans enthousiasme dans lequel on ne trouve presque rien qui intéresse. Les vers en sont bons, mais quelque effort qu'ait, fait Boissat pour attraper le style virgilien, il est en cela fort au-dessous du père Mambrun, jésuite, auteur du poème épique de Constantin. II. //f~MH:'W: sive !'MS<H<OMM/M 7)M/?e?~MW libri IV. Les neuf premières pages manquent. C'est une paraphrase en vers héroïques des Institutes de Justinien avec une explication en prose des mots et des endroits les plus difficiles. Hermonimus est un vieillard qui donne des leçons à son élève Euthinoiis.
III. -Sy/tWMW liber /')'W! //<0!CCE ~)0<?~!a/a cotttinens. Le peu qu'il en reste fait juger que c'était un éloge du cardinal de Richelieu. Les autres ont pour titre /~M/)e~! in /l;M<t's fro~o/)o/'cet'Œ, Henrici ~/OK<WO-
n!?tC! duces :')!pt'c<ss! /)ro~o/)o/)ce/a. L'auteur fait parler le duc de Montmorency, qui eut la tète tranchée à Toulouse, cette pièce est très belle.
Ca)MMK ad C. V. ~K/OM:M~ ~3)':<M:<~M, in Dolano SeKa/:< re~nt/T: ~7'ocMra'~o!'e~.
~/)~6KS!<~M ex fO~O E'MC/!ar!'S/!CM/7:.
D. AH)'e/!0 ÂM~HS/ï'nO e/)!'SCO/)0 /Y!/)/)0)!eMS! /:yMK! D. T~~KCt'sco Xaverio. A~)HMMs.
~e?7!~ora?teM?7! ~eog~At'ee ~'ro~'e~coK.
:'?' boni (~MS.
Sylvarum liber secMM~MX. Elogia ~t<t&MS <~aM! imaginibus ad fu't~M e~ress!'s o~oKenda! continens. On trouve ici les éloges de Louis XIII, du duc d'Orléans, de son fils le duc de Valois, du maréchal de Gassion, d'André Boissat, frère de l'auteur, du marquis de Piennes et d'André de Baix, maréchaux de Camp.
IV. jE/e~)ar!<m libri /res; ~)un:<s sacras Continens, secMK~M.s /et'fas, ~)/:tis coM!M!MMes. il manque en cet endroit huit pages et la première élégie, la troisième du second livre mérite attention. Elle a pour titre /s!eH/!<M! manes. Boissat nous dit lui-même qu'il a consacré ce monument à la mémoire de ses proches, dont les cendres reposent à Vienne dans l'église de Saint-André-le-Bas. La onzième élégie du troisième livre est remplie de traits ingénieux et délicats Boissat l'adresse à ses amis à l'occasion du mariage qu'il allait t contracter avec Clémence de Chatte de Gessans, de l'illustre maison de Clermont.
V. //e~ra;t.!)H/M //e;o/t/!< Z~t.s/o/a;. Ces épitres sont rangées dans l'ordre suivant Sara a Abraham, Rébéca
à Isaac, Rachel à Jacob, Séphora à Moise, la fille de Jephté à son père, Raab à Josué, Anne, mère de Samuel, au grand prêtre Héli, Debora à Baruch, Abigail à David, Judith au grand prêtre Joachim, Esther à Assuérus, Suzanne à Joachim son époux. L'auteur a voulu imiter Ovide, et quoiqu'il soit fort audessous de son original, on ne laisse pas de le lire avec plaisir. I) a mis des arguments à la tête de chaque épitre, et à la fin une explication du sens littéral ou allégorique.
VI. Sacrce métamorphoses. Le sujet de la plupart dé ces pièces est tiré de l'Ancien et du Nouveau Testament. La seconde partie a pour titre ~VoMt'u~M a/~Mo~ ~a~at'M~M ~M/o~/tor~Ac'.ses. le tout en vers élégiaques. VII. ~7'a~!M~UMt liber ~M~~a/'M. Voici un épigramme assez joli sur la nécessite où se trouvait Madame de Boissat de faire couper ses cheveux pendant les ardeurs d'une violente fièvre.
VIII. TMWM/orM~M liber s:'?!~M/ar:s. On trouve ici des épitaphes.
IX. &ÏC)': a~M~!CM/! disticha.
Suivant Nicéron et d'Olivet, Boissat fit commencer l'impression de ce recueil en 16~0, mais poussé par un excès de modestie, détruisit ensuite tous les exemplaires à l'exception d'un seul, dont il arracha le titre tandis qu'au dire de d'Artigny, Boissat fit tirer 1200 exemplaires de son recueil, mais les garda, ne voulant pas les livrer au public de son vivant, et les légua ensuite à l'Hôtel-Dieu de Vienne, pour être vendus au profit des pauvres. Seulement sa fille les ayant tous fait mutiler, aucun libraire ne voulut se charger de la vente et ils restèrent conséquemment à
l'Hôtel-Dieu jusqu'en 1720, que les administrateurs, après avoir inutilement tâché de les vendre aux libraires de Grenoble et Lyon, en firent brocher i';o exemplaires qu'on distribua à des particuliers et aux archives, puis vendirent le reste à des épiciers. Terminons en disant que Boissat ayant épousé le 16 février 16~0 Clémence de Clermont Chatte-Gessans, nièce du grand maître de Alalte, eût de ce mariage un fils, André-François-Joseph, qui se fit militaire et périt le i" août 167; au combat d'Altenheim, et une fille, Marie-Françoise-Gertrude, qui épousa en 1680, Claude-Jérôme de Chabens, marquis de Saint-Maurice en Savoie.
J. BRUN-DuRAND.
(à SM!f)e~.
NOTICE
St:R LE
TAUROBOLE DE TAIN
(SutTK.–Vo)f)aiyo*tivraison)
III
Le taurobole de Tain est un bloc quadrangulaire mesurant [ mètre ~c centimètres en hauteur et 62 cenmètres en largeur. H est en granit dur de l'Hermitage coteau célèbre par son vin, et dont la partie nord-ouest, qui surplombe le Rhône, surtout au lieu dit Pierre Aiguille (t), appartient aux roches granitiques de la rive gauche du fleuve (2).
(t) Ce nom apparat pour la première fois dans les comptes consulaires de Tain de l'année t~o'y, où il est appelé, en langue vulgaire a ~'iera Gu)/!g u, ~t'cAtPM communales de Tain, CC, 40. (2) Voici ce qu'en dit un savant très compétent, Ch. Lory, dans sa Description géologique du Dauphine, premIère partie, ;86o, p. 27-28. a Depuis les roches de Condrieu jusqu'à Andancette, la rive gauche du Rhône ne présente aucun aflieurement de roches granitiques mais elles reparaissent à partir d'Andancette et forment une bande continue qui s'étend jusqu'à Tain. Dans la partie nord de cette bande, jusqu'aux environs de Saint-Vallier, ces rochers ont encore une structure feuilletée bien marquée. Ce sont des variétés de g'tio~ que l'on peut étudier, par exemple, dans la petite gorge très pittoresque
Sur la lace antérieure est gravée une inscription, dont il manque toute la première ligne et la première moitié de la seconde. On verra plus loin que l'érasion de ces mots avait été pratiquée dès l'antiquité. Cette inscription comprend deux parties entièrement séparée l'une, dans le haut de la pierre, avec l'érasion que nous venons de dire l'autre, dans le bas. Entre elles, dans un espace réservé, avait été sculptée une tète de taureau ou bucrane. Les deux côtés latéraux présentaient, à droite, des bandelettes et un couteau victimaire, et à gauche, une tête de bétier. Toutes ces sculptures, absolument enacées, ne sont plus visibles aujourd'hui. Mais, il y a un siècle et même moins, elles étaient encore en assez bon état de conservation pour avoir pu alors être constatées et dessinées.
C'est ainsi que, vers f8~o, le savant archéologue lyonnais, Alphonse de Boissieu, chargea M. Thévenet,
de la Galaure, entre Saint-Vallier et Saint-Uze. Mais de là jusqu'à Tain, la structure feuilletée disparait bientôt et on a des roches massives purement grenues, constituant diverses variétés de granite. Le granite commun est gris, à petits grains au-dessus de Ponsas, il est enchevêtré avec des ~eg~tttM, composées presque entièrement de quartz et de feldspath, et contenant de gros filons de quartz pur. Plus loin nous rencontrons le beau granité de Pierre-Aiguille, près Tain, contenant de grands cristaux de feldspath blanc c'est un excellent type de granite ~Ot'p~-foMc. Dans la direction du nord-est, cette roche passe à une ~g'MM<<~ où le feldspath est de plus en plus abondant et se décompose facilement. Le kaolin exploité à l'ouest du village de Larnage, est le résultat de la décomposition sur place de cette roche presque entièrement feldspathique. Le granite se termine au-dessus de Tain, dans le coteau de l'Ermitage, dont les vignobles snnt sur cette roche. En général, tous les granites des environs de Tatn (et on peut en dire autant de ceux de Tournon, sur la rive opposée) ont une grande tendance à se desagréger et à se réduire à l'état friable que l'on désigne sous le nom d'arène. Ce n'est que par suite de cette désagrégation que leur surface se prête à la culture de la vigne e.
architecte à Tournon, de lui en faire, sur place deux dessins, « dont la scrupuleuse fidélité révèle l'artiste intelligent et consciencieux » (i). Ces deux dessins ont été remarquablement gravés (2). L'un représente la face antérieure avec l'inscription, l'autre, le côté droit avec le couteau victimaire Nous reproduisons en phototypie la première de ces belles gravures elle donne une idée fort exacte de ce qu'était le taurobole vers 1840, et les lettres de l'inscription y sont encore très apparentes (3). Sur la partie supérieure, destinée à recevoir la tête de la victime, la pierre a été creusée de façon à présenter, tout autour, un évasement arrondi formant comme une espèce de rigote qui recevait tout d'abord le sang du taureau c'est la partie du taurobole qui a été la moins endommagée (4).
Quant à l'inscription, elle a beaucoup souffert des injures du temps, et la pierre s'étant effritée en certains endroits, plusieurs lettres ont disparu.
(1) A. DE BotssiEU, Inscriptions antiques de Lyon rcpro~t<t<es d'après les monuments Ot< r~cM~Mt~ dans les auteurs. Lyon, 846-) 85~ in-foL, p. 28.
(t)!bid.
(3) Les lettres fN BN et FN, qu'on remarque sur le couronnement de l'autel, ne sont pas antiques elles avaient été probablement gravées comme marque d'acquisition, par les Anglais qm, en 1723, avaient voulu acheter et emporter le Taurobole. Nous relatons plus haut ce curieux incident. L'abbé Chalieu donne la même explication, et Il ajoute K Je n'ai pas eru devoir présenter ces contre-marques dans la gravure; j'ai pensé qu'il suffisait d'en parler dans une note ». (Ut supra, p. 6). De fait, ces lettres ne figurent pas dans la gravure donnée par l'abbé Chalieu, mais elles se voient très bien dans notre reproduction de la gravure publiée par A. de Boissieu.
(;).) La partie postérieure présente une ouverture quadrangulaire. D'après l'abbé Chalieu, c'était là qu'on déposait les entrailles des victimes.
Heureusement qu'elle avait été relevée dès le xv)*' siècle par Scaliger, et souvent reproduite après lui, mais surtout, elle a été tue et transcrite très fidèlement, par l'abbé Chalieu, dont Millin nous a parlé en termes si sympathiques.
Non content d'établir le texte de l'inscription avec autant de soin que de fidélité, Chalieu en donna une interprétation qui a rallié les suffrages des juges compétents. Ce travail, accompagné d'une planche gravée (i), fut l'objet d'une publication posthume faite par souscription et avec le concours empressé de la municipalité d'alors et de son maire, Louis-Antoine Jourdan (2).
Le texte donné par l'abbé Chalieu a été accepté et publié par des épigraphistes de valeur, et qui font autorité, citons notamment de Boissieu (~), Allmer (4) et Hirschfeld j~). A leur suite, nous allons le reproduire en mettant entre crochets les mots effacés et dûment restitués par Chalieu
(r) Le cuivre de cette gravure est encore conservé à l'Hôtel de ville de Tain.
(2) A~emûtres sur diverses antiquités du dcpartemMf de la Drôme, e<ïMr~d<t'eM<~p~Mp/M~M;<!tttafe'!<<<!Kt la conquéte des Romains, SMtf<s de plusieurs dissertations t';<rteu~e~ sur la n«tt:<~M~<tgMf, et sur les preuves que Sa A/Mte l'empereur est le premier qui ott passe le Saint-Bernard avec une armée.
Ouvrage posthume de ~M. l'abbe C/)~heM. ttnpr;)t!e par souscriptions des amis des sciences et des pauvres, et par les soms de M. le Maire dfyofH.
A Valence, chez Marc-Aurel, imprimeur libraire, s. d. [<8[!], in-4', de 4 feuilles non chiffrées et de Xfx t~o p.
(~) A. DE BotsstEU, Ut supra.
(~) A. ALLMER, Inscriptions antiques de Vienne en Dauphiné, t. f, t875, p. 78-88. Cf. l'ATLAS, n' ~34, 3.
(5) OTTO HtxscHpSLc, Corpus ;Mcr)p(toHMm /<!<)MarMt!, t. XII, Berlin, <8<)5. Inscrtptiones Galliae A~r<'oncn!tï, n* 1782, p. 5.
[Prosatute Imp. Caes. M. Aur. Commodi Antonini Aug. Pi] t DOMVVSQ D)V)
NAE COLON COPIAE CLAVD AVG LVG
TAVROBOLIVM FECIT Q AQVtVS ANTONIA
NVS PONTIF PERPETVVS
(Ici, sculpture en relief représentant une tête de taureau) EX VADONATtO~E PVSONII IVLIANI ARCH [)]
GALLI INCHOATVM XII KAL MAI CONSVM MATVM VIIII MAI L EGGIO MARVLLO CN PAPIRIO AELIANO COS PRAEEVNTE AELIO CAS~REN~ saceRDOTE TIBICINE ALBiO VERINO
« Pro salute Imperaloris Caesaris M. Aurelii Commodi Antonini ~M~M~</ Pi(i), domuusque divine, coloniae Copiae Claudiae Augustae Lugduni, taurobolium fecit Q. Aquvius Anionianus, pontijex perpetuus, ex vaticinatione Pu~cn~ Juliani arcA~ûtMt. Inchoatum XII Kalendas /Ma<~ co/M~n/Mfï~m ~/7// Kalendas Matï, L. Eggio Marullo, Cn. Papirio Aelieno consulibus; praeeunle Aelio Castrense sacerdote, ~ct/te Albio ~nno.
C'est-à-dire
« Pour /a conservation de l'Empereur César MarcAurèle Commode, Antonin Auguste Pieux, el de famille divine, de /a CC/O~ Copia Claudia ~M~M~/d' de 2' SÉR)E. Xt.U)' VOLUME. tÇOÇ. 23
Lyo~ Quin/us Aquvius ~n/o/i<anM~, poH/e perpétuel, a fait ce ~Myc~û~, d'après l'augure de PM~n;u~ Julianus, archigalle (grand pr~~rc). Ccw/y~~c~ le -X/7 des calendes de mai, achevé le VIII des calendes de mai, sous le consulat de Lucius Eggius Marullus, et de Cneus Papirius Aelianus, sous la cf~Hc/Mce du prêtre Aelius Cay/r~n~M, récitateur, Albius Verinus, joueur de ». Comme on le voit, ce monument est destiné à rappeler un sacrifice taurobolique offert sous le consulat de Lucius Eggius Marullus et de Cneus Papirius Aelianus consulat qui correspond à l'année tS~ de l'ère chrétienne pour la conservation de l'empereur, de sa maison et aussi de la colonie de Lyon. Ce sacrifice avait été prescrit par le grand prêtre de Cybèle, Pusonius Julianus, sur l'ordre même de la déesse. Les cérémonies se prolongèrent pendant quatre jours, du j2 au c) des calendes de mai, soit du 20 au 23 avril (84. Ce fut un prêtre, vraisemblement de Lyon, Quintus Aquvius Antonianus, qui fut le sacrificateur. Un autre prêtre, Aelius Castrensis, conduisit les cérémonies et récita les formules sacrées. Enfin, un joueur de flûte, Albius Verinus, contribua, par le son de son instrument, a rehausser la solemnité.
Nous avons dit qu'une particularité de notre inscription consiste dans l'effacement, au ciseau, des noms de Commode, et que la place de ces mots correspondait à toute la première ligne et à la moitié de la seconde. Là, en effet, il n'y a plus qu'un creux, sans aucune trace de lettres.
Chalieu et, après lui, Allemer, en ont très bien donné la raison. Ecoutons ce dernier
« La date )8~ fournie par le consulat d'Eggius Marullus et de Papirius Aelianus, fait aisément reconnaître que l'empereur dont les noms ont été ainsi enlevés, ne peut avoir été que Commode, parcourant alors le commencement de la cinquième année de son règne, depuis la mort de Marc-Aurèle, arrivée le 17 mars t8o, et la dernière partie de la sixième à partir r du moment où il avait été créé Auguste et associé à l'empire par son père dans le courant de )~y; enfin, ayant encore à régner pendant près de huit ans. L'Histoire ne nous a conservé, pour l'an ;8~, le souvenir d'aucune circonstance particulière qui puisse nous apprendre le motif du sacrifice qui a donné lieu à l'érection de l'autel de Tain mais l'année précédente, Commode avait failli périr à la suite d'une conspiration contre sa vie. Rendu soupçonneux par le danger qu'il avait couru, il ne voyait plus partout que des ennemis, et sa cruauté exploitée par l'avarice des favoris à qui son insouciance des affaires publiques abandonnait l'exercice du souverain pouvoir, allait frapper des victimes jusqu'au fond des provinces. Il est remarquable que ce prince, un des plus odieux tyrans sous lesquels les Romains aient eu à gémir, fut un de ceux pour la conservation de qui furent faits le plus de vœux et de sacrifices. Il est permis de penser que la crainte, plus que le dévouement, fut le mobile de la plupart de ces manifestations s (<).
Quant à l'érasion des noms de Commode sur l'autel de Tain, l'abbé Chalieu, dit encore Allmer, « n'a pas eu de peine à démontrer qu'elle a été faite dans l'anti(t) An-MKR, Ut supra, p. 8o-8f.
quité, en exécution d'un décret rendu aussitôt après la mort de cet empereur, qui périt étrangté, le dernier jour de l'année t02 D (1).
D'après l'abbé. Chalieu, les noms de Commode auraient été précédés des sigles M. D. M. ID., abréviation des mots Matri D~UM: Ma~na~ Idaee, invocation à ia mère des Dieux, la grande déesse de l'Ida, Cybèle. Allmer n'est pas de cet avis.
!) motive ainsi son opinion
« Comme il faudrait alors supposer gratuitement une inadvertance du lapicide qui aurait à tort fait disparaître ces lettres, et qu'en outre, on voit, par d'autres inscriptions du même genre, que la mère des dieux n'y était pas toujours rappelée, nous n'apercevons pas la nécessité d'introduire les sigles en question dans la restitution des lignes martelées B (2).
Notre inscription présente encore une autre particularité fort intéressante, car pendant très longtemps (~), de toutes les inscriptions connues, elle était la seule qui présentât les noms de la colonie de Lyon exprimés autrement que par des initiales. En d'autres termes, c'est par l'inscription taurobolique de Tain qu'on a su que Lyon se nommait Colonia Copia Claudia Augusta Lugdunum. A cet égard, )'abbé Chalieu, suivi par Allmer, a donné des indications très judicieuses. Enfin, au point de vue grammatical notre inscription n'est pas sans intérêt. Ecoutons Allmer « un V semble de trop à la deuxième ligne, dans le mot DOMWS, et (J) Jbid., p. 8!.
[:) tbid., p. 83.
(3) Jusqu'en ;8-).S. Cette année-là, une inscription trouvée & Ntmes, donna un texte identique à celui de Tain. Cf. ALmsR, p. 83.
manquer à la quatrième dans le mot AQVIVS; il n'y a cependant de faute ni dans l'un ni dans l'autre de ces mots. Domuus, pour le génitif Dc~ répond à une ancienne manière d'écrire que Quintilien (i,~) nous apprend avoir commencé à être en pratique au temps d'Accius, et même dès avant, laquelle consistait à doubler les voyelles longues. L'épigraphie nous a conservé un certain nombre d'exemples de ce redoublement des voyelles longues, la plupart sans doute antérieurs aux empereurs, mais dont cependant quelquesuns peuvent appartenir, comme celui que fournit notre inscription, à une époque où ce redoublement était tombé depuis longtemps en désuétude.
Quant à Aquius pour Aquvius, c'était également une orthographe permise et dont il reste quantité d'exemples. A Quintilien encore nous devons la connaissance de la règle qui l'autorisait. Lorsque deux V se rencontraient dans un mot à la suite l'un de l'autre, on pouvait snpprimer ou remplacer parO l'un des deux » (i). Allmer et Hirschfeld ont fait une autre remarque assez intéressante. Ce taurobole offert à Tain, pour la conservation de Commode et de la famille impériale, l'était aussi pour la prospérité de la Colonie de Lyon, représentée par son pontife perpétuel. Un tel fait, constaté en dehors du territoire de cette colonie, à l'extrémité de celui de la colonie de Vienne, parait assez singulier, invraisemblable même. « Peut-être, dit Allmer, l'archigalle, inspiré par Cybé)e, avait-il prescrit l'endroit du sacrifice; peut-être aussi y avait-il à Tain quelque temple en renom, ou un bois consacré à la (f) )btd., p. 87.
déesse. Le nom ancien de Tain, Tegna, si peu différent de Tigna, semble apporter quelqu'ombre de probabitité à cette hypothèse, ou du moins indiquer que le pays abondait en pins ((). A l'appui de cette opinion il faut ajouter que, vers la fin du xv!!i° siècle, du temps de l'abbé Chalieu, on voyait encore, sur le coteau de l'Hermitage, les vestiges d'un édifice romain, et, d'après ce savant archéologue, la chapelle de Saint-Christophe de l'Hermitage, était bâtie sur l'emplacement d'un temple antique (2).
Une grande inscription trouvée auprès de cette chapelle nous révèle un fait intéressant, ['érection d'une statue en l'honneur d'un Quintus Valerius Macedo, important personnage Viennois, contemporain d'Hadrien ("7-)(~).
De son côté, Hirschfeld a présenté une autre explication, qu'il appuie sur la situation administrative de notre pays, qui est loin d'être pour nous parfaitement élucidée. Peut-être le yicus de Tain, bien que situé dans la colonie de Vienne n'appartenait-il pas à cette colonie, mais y aurait formé une enclave dépendante de celle de Lyon (~).
(t) Ibid., p. 86.-Sur le nom ancien de Tain, Tegna, forme fautive, voir ce que nous en avons dit dans l'Histoire de T~tK, t. f, p. 5-8. (2) CHALIEU, Ut supra, p. 63.
(3) Cf. L. REN[ER, Afélanges d'épigraphie, p. 68-&Q. ALLMER, Ut supra, t. I), p. 25o-55. Le méme, dans BM/f)M de la Societé d'Archéologie de la DfOM?, t. VI, p. 35~57. BALLET, Hist, de Tain, t f, p. [7-<9.
(4) HIRSCHFELD. Zur Geschichte des CAt't~~MfAMH!~ in Lugdunum f0'' Constantin. Académie des sciences de Berlin. Séance de la section phitosophtco-htstorique du 4 avril j8o5. Dans une lettre à nous adressée et datée de Charlottemburg, avril )!ig8, M. Hirschfeld revient sur sa manfère de voir, consistant à considérer Va/Mha comme une dépendance de la colonie de Lugdunum, ce qu'il infère des inscriptions trouvées à Valence.
Quoi qu'il en soit, le sacrifice se fit à Tain, dans les conditions que l'on sait, et l'inscription qui le commémore est aujourd'hui définitivement établie. H est vrai que la restitution et l'interprétation des deux mots PAPIRIO et CASTRENSIS ont donné lieu à une longue polémique entre deux épigraphistes, Ch. Robert et A. Allmer (;). Ce dernier, dont l'autorité est exceptionnelle, a eu le dernier mot aux yeux du monde savant, et Hirschfeld a, sans hésité, accepté sa lecture. H n'y a plus à revenir sur ce point de détail, assez insignifiant du reste. Quant au monument lui-même, s'il a beaucoup souffert des injures du temps et des hommes, les savants travaux dont il a été l'objet. le font du moins suffisamment connaître, et, ce qui est capital, nous donnent désormais son Inscription avec une exactitude vraiment irréprochable.
BIBLIOGRAPHIE
Classée chronologiquement
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Autre édition très amétiorée; non mentionnée dans la grande Encyclopédie à l'article Gruter. y~Mt G'M/er!
(t) Cette po!enuque d paru dans le Bulletin de la Soc. d'Archeologie o!e<<rotne,t.I,p.2uoet204,H,p.8g,)07et 336-~2. Cf, la Bt~/to~ray/ttc, donnée o-apres.
corpus tMScrtp~oMMMt ex recensione et cum a~~to<at<to't!&M~ Joannis Georgii Grfteftt. Amsterdam, 1707, 4 in-fol., tome l, p. xxx, article 2.
2. Du Bots (yoan)tes a Bosco) ();;o-[626). Floriacensis velus Bibliotheca, Benedictina, Sancta, /t~os<o/!Ca, Pontificia, Caesarea, Regia, Franco-Gallica, etc. Veteris Floriacensis Bibliothecae regiae levum A'ys<o~. Antiquae Sanctae et Senatoriae Viennae Allobrogum GaMt'corMW, sacrae et prophanae plurimae antiquitatunz A~MMOM pr:~M<t<m ejus et archiepiscoporum Elenchus historicus. Lyon, fôo;, in-8, p. ty. Tigni in De//)A<;ta<M. Ad ere'Kt<w S. CAfts<o~/tort supra collem Tigni in De~p/twa~M.
GnoRtER (Nicolas) (1612-1692). Histoire générale de Dau~AtMe. Grenoble, <66[, in-fol., p. 2~.5. « Cette inscription trouvée au siècle passé dans le territoire de Teing 4. SPON (Jacob) ()6.).7-[68;). Recherches des antiquités et curiosités de la ville de Lyon, ancienne co/o~te des Romains et capitale de la Gaule celtique avec un M:ef?!0t're des princt/)aH~ d);<t'<a!rM e< CMrt'e;Mc de /?Mt-o/!e. Lyon, 167~, cipaux antiquaires et curieux de l'Europe. Lyon, Montin-16. Seconde édition donnée par Léon Rénier et Montfalcon. Lyon, i858, in-8°, p. 3~2.
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8. VAN DALE (Antoine) ()b~8-)7o8). (Ne figure pas dans la grande Encyclopédie) D!Met'<<!<!OMes IX f)ttft~M!<a/t&Ks ~:<)tt et M<a; )Kon'~M, cum Romanis tum ~0/tMnnMM Graecis tMtfs~att~s t'Mse)'u<eM<es. Amsterdam, )702, in-4°, p. )o~.
9. CELLARIUS (Christophe)–(tÔ~S-t~O?). –A~f!ao~MM<qui. Leipzig, tyo)-!7o6. Autre édition plus complète avec les additions de Schwartz, Leipzig, 17~ 2 in-4' t. I, p. t7;.
)0. PITISCUS (Samuel) –(~ô~y-fyty). Lexicon aM<!a!<t<a/w ro/Ka/ta' ~~M quo !<!M et antiquilates <M~t Graecis et Romanis communes tum Romanis ~at<tCM/f!t'eA MC~OMHK/Mr. Leeuwarden, tyt~, 2 in-fol., t. I!, p. 964.
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f4. MAUTouR (Philibert-Bernard Moreau de) –()6;4-t7~7).–Sur une MMtt/'<:oM de Tain en Dauphiné. Dans t'ts/o~e de l'Acadénzie des /)MCft/)~oM.s et Be/~M'/e/~M. Paris, 1720, in-4", p. 204-06.
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'6. BozE ~Ctaude Gros de; ()68o-i7;3). ~ca/to~ d'une Inscription antique, où sont décrites les /)a)<!CM/a~!<ës des sacrifices f/)~c/M tauroboles. Dans ~e)MO:re~ de /t/<e'a<tne e tirés des Registres de l'Académie des Inscriptions et Belles-lettres. Paris, 1736, in-4°, t. H, p. 44~-7~.
)7. CHAHEu(A!exis)–(<7~-t8o8).–;Me'MOtrM sur diverses antiquités du i./ë~)j[r<e~tett< de la Drôme, et sur les aft~ëre~ ~M/)/M qui /'Aa~!<ate~< avant /J conquête des Romains, suivis de /)/H~!et<;x dissertations curieuses sur la A~MMttï~M~t~ue et sur les ~) e;<feï que Sa Majesté /'E'tt/)ereur est le premier qui ait passé le 5atM/-BetHart/ avec une armée.
Ouvrage posthume de M. /&e Chalieu, t/?t/))-)!e par ~Oif~c;<to't des amis des sciences et des pauvres, et par les soins de M. le maire de Tain. Valence, Marc-Aurel, s. d. [t8n], tn-4", avec Planches gravées, p. t-66.
t8. MILLIN (Aubin-Louis) (ty;()-t8t8). – Voyage dans les ~e~a)<e~!eMs du midi de /;t France. Paris, t8oy-[8tt, tomes en 5 volumes in-8", et atlas in-~° de 80 planches, tome Il, p. 69 à 78.
tQ. DELACROIX (Nicolas) (<78;-)8~). Essai SMr la S<a<Mtique, l'histoire et les antiquités du ~e'~a; <~?!eM< de la Drôme. Valence, t8)7, in-8°. ~~i~'s/~Mf ~)i ~/n!~eMc~!< de la D;o)tte. A~OMf<e e~t~tOM. Valence, Bore); Paris, Didot, 18 in-4° avec carte et vues lith., p. 609-611.
20. BoYb (Albert du) ()8o2-t88o). – Dans Album du Dau~AiMë, 2* année, 18~6, p. 122.
2!. BotsStEU (de). Inscriptions antiques de Lyon reproduites d'après les monuments ou recueillies dans les aM<ems. Lyon, Louis Perrin, <84.6-t8; in-fol., p. 28-~0 (z pi. gravées). 22. VINCENT (Joseph-Abe)) – ()8f~-t8gt). – A~<t'ce histoi ique sur la ville de Tain (Drôme). Valence, t 86~, in-8°, p. ~-16. 2~. RoBERT (Charles). Taurobole de Tain. Restitution d'un mot de son inscription. Dans Bulletin de la Société d'archéologie de la Drôme, t. 1866, p. 288-~00.
2~ An.MER (Auguste) ()8t;-i8oQ). – TaMro~o/e de Tain. Remarques de M. Allmer sur l'article précédent, Ibid. t. II, 1867, p. ~04-200.
2;. ROBERT. Réponse de M. Robert, ibid., p. 316-16. 26. ALLMhR. Tauroboles de Tain et de Valence /)e);ttéretë/)r)!e de A~. Allmer à la dernière fë/)/Me de A~. ~Ro&e<<, )bid., t. II, 1867, p. to7-t4.
27. ROBERT. Tauroboles de 7~ e< de Valence. Courtes refléxions de M. Robert sur la dernière réponse de M. Allmer, ibid, p. 336-42.
28. ALLMER. Tam obole de Tain. Nouvelles 0&M!M<:OMS critiques de M. Allmer, motivées par la réponse de Af. Robert, ibid., P-4~-44-
2Ç. ROBERT, Lettre Af Robert à Messieurs les membres du Comité de publication du Bulletin de la Société d'Archéologie et de Statistique de la Drôme. Paris, le 27 septembre 1867, ibid, p. ~4;-
~o. ROBERT. TaMro~o/e de Tain. Réponse de M. Rober t aux nouvelles observations de M. Allmer, ibid., t. II!, )868, p. 89- 1 o6
31. ALLMER, /sc;t~<:OMs antiques de Vienne e~ Djt</)~;Me. Vienne, )87;. z(.vot. tn-8", avec atlas, tome I, p. 78-88. ~2. HtRSCHFhLD (Otto). /MSC')<:OMM Galliae A~ft~OMgM~tS. Berlin, 189;, in-fol., tome XII du Co~MS /MM)-~</oMMM latinarum,p. 5, n° 1782.
BeLLET (Charles). Histoire de la ville de Tain en D-tM~/tMe tome '90;, p. )2-)6
~4. FoRQUET DE DORNE. Les Césars /l/t:Ca!'MS et 5yt'eM~ et l'Anarchie w:7!re. Angers, s. d. [1907], p. 94.
Charles BELLET
DetiberaHons Consulaires
COMTÉ D'ALBON
(SUITE. Voir les 168' à )~o' ttvraisons)
Du dimanche second mars 1727, au lieu d'Anneyron, sur l'heure de midi, par devant nous Charles-Hector Robert, capitaine châtelain royal de la comté d'Albon, écrivant le substitut du greffier soussigné.
« A comparu sieur Etienne Couturier, consul moderne de la comté d'Albon, d'où la paroisse d'Anneyron en dépend, lequel nous a dit avoir fait assigner tous les ecclésiastiques, nobles et autres possédant biens dans la paroisse d'Anneyron, par exploit de Gabet, sergent, du H février dernier dûment contrôlé à Anneyron par le sieur Gauthier, le 12 dudit mois, pour venir délibérer sur plusieurs réparations et autres choses à faire concernant l'église d'Anneyron. En premier lieu consistant en ce qu'il est nécessaire de faire fondre la cloche qui est cassée, raccommoder le carrelage de l'église qui est fort endommagé, doubler les deux portes de l'église et y mettre des serrures, réparer les couverts de la sacristie et des chapitaux de l'entrée de
de 1708 à d743
l'église qui ont été endommagés par les grands vents, acheter deux fanaux pour porter devant le Saint-Sacrement, faire étamer la cuvette des fonds baptismaux et pourvoir au luminaire de l'église pour le service divin, n'y ayant aucun revenu dans ladite église. Le tout ordonné d'y être pourvu par le procès-verbal de visite de son Altesse Mgr l'Archevêque de Vienne, du 10 mai 1726, plus pourvoir à six chandeliers de léton pour le grand autel, plus une clochette pour avertir le peuple lorsqu'on porte le viatique aux malades, plus pourvoir à l'acquisition d'une bourse pour porter le Saint-Sacrement dehors, pourvoir au payement de quatre livres qui ont été données au secrétaire de son Altesse pour l'extrait du procès-verbal, plus à l'acquisition d'une aube, et d'un surplis et finalement pourvoir à l'acquisition d'une maison pour le vicaire de la paroisse. Requérant ledit consul de faire délibérer les habitants et autres ci-présents sur les faits ci-dessus, et s'est soussigné. COUTURIER, consul.
« Auquel lieu sont comparus, dame Virginie Boucon, dame de Saleton, François Despierre pour monsieur le comte de la Blachc, Me Nicolas Gauttier, notaire royal, sieurs Barthélémy Champeley, Claude Champeley, François Disdier, François Ardy, Jean Crozat, Pierre Michalon, Pierre Métrai. Louis Sibut, Pierre Dumas, Jean Veaune, Jacques Lafumas, Jean Thomas, Claude Silliard, François Perron, Antoine Servan pour M. de Larnage, François Clopet pour le sieur Rey, Philibert Chosson, Louis Duret, Antoine Blain, Jean Viérou, Claude Henry, Jean Blain pour M. de Reveton, Joseph Donzel.
« Tous lesquels sus-nommés assemblés après avoir ouï lecture du comparant du consul, ils ont tous unanimement délibéré qu'ils nomment Me Nicolas Gauttier, notaire royal d'Anneyron, pour donner le prix-fait de la fonte de la cloche, du carrelage de l'église, des réparations à faire aux portes
et couverts, et après qu'il aura donné les prix-faits, ils lui donnent pouvoir de se pourvoir à nos seigneurs du Parlement pour qu'd leur plaise d'accorder l'imposition du montant. Et de se pourvoir aussi à nus dtts seigneurs pour obtenir la permission d'imposer la somme de 1,429 livres 10 sols outre celle du montant des prix-faits pour être employée, savoir 20 livres pour l'achat des fanaux, une livre 6 sols pour l'étamure de la cuvette, 800 livres pour le capital d'une pension annuelle de 40 livres pour être employée au luminaire, 20 livres pour l'acquisition de 6 chandeliers, 4 livres pour une clochette, 10 livres pour une bourse pour porter le Saint-Sacrement, 4 livres pour le remboursement de ce qu'à coûté le procès-verbal de visite, 30 livres pour une aube et un surplis et 600 livres pour l'acquisition d'une maison pour le logement de M. le vicaire de la paroisse, avec promesse d'agréer tout ce qui par ledit sieur Gauttier sera fait, et de le relever de toutes charges et de lui payer ses peines et vaccations. « Nous avons octroyé acte des dites comparutions, délibérations et nominations et défaut contre les absens et se sont les sachant écrire avec nous soussignés et le substitut de notre grefiler, ensemble ledit sieur Gauttier qui a accepté ladite charge.
GAUTTIER BOUCON-SALETON P. CHAMPELEY
DËPIERRE SiBUT CHAMPELEY MËTRAL
LAFUMAS BLAiN RoBERT, capitaine châte-
lain royal; FoNTAtNE, substitut.
Le 9 octobre )729 les notables habitants de la communauté nomment Pierre Baborier et Pierre Dumalle pour établir le devis d'une maison curiale à Andancette et en donner le prix-fait, par devant notaire. En attendant qu'elle soit construite, ils louent, au prix de 20 livres par année, deux chambres dans la maison de Pierre Dumalle, pour
loger le curé de la paroisse d'Andancette, et votent 30 livres pour l'acquisition des gros meubles qui lui seront nécessaires.
« Du dimanche 17 septembre 1730, au lieu de SaintRoman d'Albon, dans la chambre de la communauté où l'on tient les assemblées, devant nous Charles-Hector Robert, capitaine châtelain royal de la comté d'Albon, escrivant le substitut du greffier soussigné.
« A comparu sieur Etienne Couturier, consul moderne de la communauté, lequel requiert les principaux habitants de voter la somme de 300 livres pour les urgentes affaires de la communauté Et attendu qu'il passe une quantité extraordinaire de soldats invalides, auxquels il faut fournir des voitures gratis et comme il n'y a aucun fonds pour payer ceux qui fournissent les voitures, ce qui cause des disputes et des embarras terribles et des refus de la part de ceux qui sont commandés, il serait à propos de députer quelqu'un d'intelligent pour se pourvoir à Mgr l'Intendant pour avoir la permission d'imposer toutes les années une somme convenable pour pouvoir payer les voitures ou pour en avoir le remboursement si les voitures doivent être payées par sa Majesté.
CouTUJUER, consul.
« Auquel lieu sont comparus, Marc Bnsquot pour M. le président de Valernod, sieurs Pierre Baborier, Nicolas Gauttier, François Baboin, Henri Salore, Charles Girard, François Figuet, Jean Paquien, Martin Chapre, François Thomas, Hyacinthe Fleury, Jean Oger, Nicolas Goudard, Louis Sibut, Jacques Faure, François Rozier, Antoine Boudin, Jean Lapeine, Vital Rozier, Pierre Vermillière. « Tous lesquels assemblés ont délibéré d'imposer suivant la coutume la somme de 300 livres pour les urgentes
araires de la communauté et pour en avoir la permission ils députent le substitut du greffier pour se pourvoir à MM. du Parlement.
« Ils délibèrent aussi d'imposer suivant la coutume la somme de tOO livres pour les gages des gardes fruits et 18 livres pour les loués des corps de garde d'Anneyron et de Saint-Roman.
« Et sur la réquisition du consul au sujet des voitures des invalides, ils députent le sieur Charles Fontaine pour se pourvoir à Mgr l'intendant pour obtenir permission d'imposer une somme sumsante, supposé que les frais ne doivent être remboursés par sa Majesté de quoi le sieur Fontaine s'instruira.
« Nous capitaine châtelain royal avons octroyé acte de la présente délibération et nous nous sommes soussigné avec les sachant escrire.
FLEURY BuSCOT GOUDARU j IJABOIN F]GUET
BABORIER; SIBUT; GAUTTIER; ROBERT, châ-
telain FONTAINE, substitut (1).
Le t4 avril 1734, le consul Etienne Couturier fait lecture aux notables habitants réunis, d'une déclaration du Roy, du 17 novembre 1733, ordonnant la levée d'un dtxiè~e, et déclare qu'il en a fait la publication à l'issue de la messe paroissiale la 25 mars dernier fête de Notre-Dame. Les notables présents nomment M. Charles Fontaine pour recevoir les déclarations de chaque particulier possédant biens et les envoyer à M. de Maucune, subdélégué à Romans.
(1) De l'année t73t à l'année 034, il ne s'est passé aucun fait important dans la communauté, parce qu'on ne trouve que des délibérations où on nomme dans chaque section, une personne pour percevoir la taille.
Le 9 mai 1734, les Trois Ordres de la paroisse de SaintPhilibert votent la somme de 250 livres pour les réparations à leur église, l'achat d'une petite cloche, d'un joug et les ferrures nécessaires à l'installation de cette cloche. Le 6 juin 1734, les habitants d'Albon votent la somme de 363 livres pour les ouvriers miliciens et 300 livres que l'on a coutume d'imposer chaque année pour les affaires intérieures de la communauté.
« Du 19 juin 1734, au lieu de St-Roman-d'Albon dans la chambre de la communauté où l'on tient les assemblées, par devant nous Charles-Hector Robert, capitaine châtelain royal de la comté d'Albon, escrivant le substitut du greffier, est comparu sieur Etienne Couturier, consul moderne, lequel nous a dit avoir fait avertir tous les habitants de la communauté par affiche de placard suivant la coutume, à comparaître à ce présent jour pour venir délibérer sur ce que nous avons à leur proposer et il requiert que nous les fassions délibérer et s'est soussigné.
COUTURIER, consul.
« Auquel lieu sont comparus sieurs Pierre Baborier, Nicolas Gauttier, François Baboin, Nicolas Goudard, Claude Champeley, Pierre Métrai, Louis Sibut, Henry Salorre, Louis et Vital Rozier, Raymond Rozier, Antoine Sadin, Pierre Tremoulet, Claude et Jean Lambert, Joseph Thomas, Pierre Michalet, Jean Pascal, Pierre Rotton, Jean Bal, Etienne Micoud, Dominique Février.
« Aux quels sus-nommés assemblés nous avons donné connaissance du jugement rendu par M. Vallier, conseiller du roy, maître des eaux et forêts de Dauphiné au département de Saint-MarceUin, du 17 février dernier, qui nous 2" SÉRIE. XLIII" VOLUME. fÇOÇ. 2-~
charge de rapporter preuve à peine d'en répondre, que le mauvais état dans lequel est la forêt des Foulliouzes provient de ce que plusieurs particuliers ont mené paître en toutes saisons leurs bêtes à laine dans ladite forêt et aux. Champagnières et aux Clavettes qui sont des communaux appartenant à la comté d'Albon et que les officiers d'icelle ont dû veiller à leur conservation. li est important de rapporter preuve que les dites forêts ne sont pas des communaux.
a A quoy satisfaisant les délibérants ont tous unanimement dit et déclaré que les bois des Foulliouzes, Champagnières et Clavettes ne sont pas des communaux appartenant à la comté d'Albon qu'tls sont enregistrés dans leur dernier cadastre fait en 1642 sous le nom du seigneur de Tournon, engagiste de la comté d'Albon, de qui Mgr le prince de Rohan a droit, que les bois des Clavettes ont dû depuis appartenir à Madame l'abbesse de Saint-Pierre de Lion, qui les a vendus ou alliénés à plusieurs particuliers, qu'ils ignorent son titre, que le sieur de La Coste de Montélimar fit signifier le 20 janvier 1725, par Boisset, sergent à la comté d'Albon, une vente qu'il prétend lui avoir été passée par les commissaires députés par le roy par arrêt de son conseil du 28 septembre i7)7, la dite vente en date du 31 décembre 1718, des forêts des Foulliouzes et Champagnières, en vertu de quoi il en jouit, les affermant au prix de 50 livres par année. Ce qui prouve évidemment que lesdits bois ne sont pas des communaux à la comté d'Albon.
« Les délibérants déclarent au surplus qu'ils ont toujours vu le terrain des Foulliouzes et Champagnières dans la même situation qu'il est, et que c'est un terrain très aride (t).
(1) Ce que l'on appelait autrefois forêts des FouU!ouzes, Champagnières et Ctavettes était une immense plaine de landes qui
« Nous, capitaine châtelain royal, nous avons octroyé acte de tout ce que dessus pour servir à ce que de raison, et nous nous sommes soussignés avec les sachant escrire et le substitut du greffier.
GOUDARD BABORIER; TREMOULET BABOtN
METRAL; CHAMPELEY GrAUTTIER; SiBUT;
Pierre RouTTON BAL ROBERT, châtelain
royal FONTAINE, substitut.
Le dimanche 16 mars i738 (<), le sieur Etienne Couturier désire se faire remplacer dans sa charge de consul. Les notables habitants nomment pour consuls les sieurs François Baboin père et fils. Ces derniers acceptent la dite charge et promettent de l'exercer en grand honneur. Les registres des routes, le contrôle des voitures et celui des habitants leur ont été remis par le dernier consul Etienne Couturier.
Le i2 avril t738, Madame la marquise de Bonsaille de Cornillon, résidente à Tournon, étant incommodée d'une maladie de langueur, son médecin lui ordonnant de changer d'air et de boire du lait de chèvre, est autorisée par Monsieur Vallier, maître des eaux et forêts de Saint-Marcellin, à avoir, pendant six mois, une chèvre dans son domaine de la Beraudière situé à Anneyron, pour user du lait de chèvre.
occupait la moitié de la commune de Saint-Rambert; d'un sol très pierreux et aride, parsemé de ci et de là de quelques bouquets de chênes noueux ou de pins rabougris, les moutons y trouvaient à peine un peu de nourriture. Cette plaine, très morcelée actuellement, a été défrichée complètement depuis environ trente ans les propriétaires y ont planté de la vigne, des cerisiers et des pêchers, et aujourd'hui ces landes d'autrefois font la fortune des habitants de la commune de Saint-Rambert-d'Albon. (1) Nous n'avons trouvé aucune délibération importante de juin )734 à mars 1738.
Même autorisation est accordée à Claude Delhomme d'Anneyron qui est en danger de perdre la vie Monsieur Barbier, médecin de Tain, lui ayant ordonné de boire du lait de chèvre. On devra tenir la chèvre à l'attache et la faire matter (1) passé six mois.
Le 4 août 1738, le consul Baboin enregistre sur le registre des Délibérations l'ordonnance suivante datée du i7 mai H38.
De par le Roy.
Ordonnance pour la tenue des Assises ou grands jours de la Maîtrise royale des eaux et forêts de Saint-Marcellin. « Michel Vallier, conseiller du roy, maître des eaux et forêts au Dauphiné, au département de Saint-Marcellin, assesseur civil et criminel au siège royal et présidial de la même ville.
« Et à tous ceux que ces présentes verront, salut Savoir faisons sur ce qu'il nous a été représente par le procureur du roy en notre siège, que suivant l'ordonnance de )C69 et le règlement du mois d'octobre t73), fait en conséquence par MM. les commissaires généraux nommés par le roy pour la réformation générale des Eaux et forêts de la province de Dauphiné, nous sommes obligés de tenir assises ou haut-jours une fois l'année pour chaque élection dont notre Maîtrise est composée. C'est pourquoi il nous a requis d'indiquer, une fois pour toujours, la tenue des dites assises afin qu'il puisse y faire comparaître les personnes dénommées dans les ordonnances des règlements. En sorte qu'en conséquence de bon réquisitoire, il a été rendu ordonnance dont la teneur en suit
~) Vieux mot français qui voulait dire assomtner. abattre. Autrefois on appelait les abattoirs des matteries.
ARTICLE I" « Nous, de l'avis du conseil soussigné, faisant droit sur le réquisitoire du procureur du roy au siège et de son consentement, ordonnons que le titre des assises de l'ordonnance de 1669 sera exécuté suivant sa forme et tenue, ensemble celui du règlement général du mois d'octobre t73), conformément aux lettres patentes du I"'septembre i733. Enjoignons à cet effet à tous les juridictiables de notre maîtrise de s'y conformer sous les peines y portées.
ARTICLE II. « Déclarons que nous tiendrons annuellement nos assises ou haut-jours pour l'élection de Romans, à perpétuité et pour toujours, le premier et second septembre, et lorsque le premier septembre tombera un dimanche le 2 et le 3 septembre, dans l'auditoire royal du palais de Saint-MarceIlin, depuis huit heures du matin jusqu'à midi, et depuis une heure de relevée jusqu'à cinq heures du soir.
ARTICLE III. « Nous tiendrons pareillement nos assises ou haut-jours pour l'élection de Vienne dans le même auditoire royal et aux heures indiquées par l'article ci-dessus les 9 et 10 du mois de septembre et ce à perpétuité et pour toujours à moins que pour des raisons légitimes il ne fut trouvé à propos de les renvoyer à un autre temps pour la commodité de ceux qui doivent y assister.
ARTICLE IV. f Tous les officiers de la maîtrise, les gardes généraux et particuliers seront tenus d'assister aux assises; même les gardes bois et champêtres des communautés séculières et des ecclésiastiques pour répondre du fait et administration de leurs charges, à peine de cent livres d'amende contre les défaillants s'il n'est rapporté une excuse légitime.
ARTICLE V. « Chaque communauté séculière sera tenue d'envoyer aux assises un de ses officiers ou député pour y assister. Pourront néanmoins pour éviter des frats les communautés laiques, qui ont des gardes bois et champêtres, députer lesdits gardes et les charger des pièces qu'ils devront remettre ensemble des réponses qu'ils seront tenus de faire aux interrogats qui leur seront par nous fait, à la charge toutes fois que la députation sera par écrit. ARTICLE VI. « Les communautés qui ne composent qu'un seul mandement et qui ont intérêt commun ne seront obligées que d'envoyer un seul député à la charge toutes fois qu'il sera en état de répondre du fait de toutes les communautés et paroisses qui l'auront envoyé, et, à ce défaut les officiers et consuls seront condamnés à l'amende de cent livres comme s'ils n'avaient envoyé personne. ARTICLE VII. « Les communautés seront tenues de comparaître aux assises par le moyen de leur syndic ou autre religieux député par icelles, sous peine de pareille amende de cent livres au payement de laquelle ils seront contraints par saisie de leur temporel.
ARTICLE VIII. « Les péagers établis sur les rivières navigables de notre ressort comparaîtront aux assises et rapporteront les registres par eux tenus pour y être examinés. Et à ce défaut ils seront condamnés à l'amende de cent livres, au payement de laquelle ils seront contraints par corps.
ARTICLE IX. « Les gardes bois et champêtres du domaine de sa Majesté qui sont tenus en engagement ou à autre titre que ce soit par des seigneurs, des paroisses ou autres de quel état et condition qu'ils soient, comparaîtront aux assises pour y répondre du fait de leur charge sous les mêmes peines que dessus.
ARTICLE X. « Tous les maîtres pêcheurs comparaîtront aux assises sous pareilles peines de cent livres d'amende. ARTICLE XI. « Le procureur du roy pourra citer aux assises toutes autres personnes dénommées dans les ordonnances qui peuvent y avoir intérêt, comme les usagers ou prétendus usagers dans les forêts du roy, les marchands ventiers, leurs facteurs, pêcheurs, taneurs, meuniers et autres travaillant sur les rivières, briquetiers, chauffourniers, tuilliers, charbonniers, tonneliers, ceveliers, charpentiers, menuisiers et autres travaillant en bois aux seins et rives de forêts ou ailleurs, leur enjoignons de satisfaire aux assignations qui leur seront données et de rapporter aux assises état des bois par eux travaillés ou employés depuis la dernière année, les ventes qui leur en auront été passées, ou le certificat en bonne et due forme des maîtres ventiers pour être le tout vérifié et examiné sans frais pendant la tenue des assises et à défaut de satisfaire ils seront condamnés en l'amende de cent livres chacun. ARTICLE XII. « Les ordonnances locales et règlements généraux faits par le bureau de la réformation ayant été notifiées aux parties intéressées, nous ordonnons aux consuls, syndics ou députés des communautés régulières ou séculières d'apporter aux assises, conformément au règlement général du mois d'octobre 1731, un certificat signé des autres officiers ou prudhommes des autres communautés qui constatera l'exécution ou l'inexécution des édits, ordonnances ou règlements, où les raisons de l'inexécution pour en être dressé procès-verbal le cas y échéant, et y être pourvu par qui il appartiendra.
ARTICLE XIII. « Les consuls et députés de chaque communauté séculière rapporteront aux assises un autre certificat signé d'eux, du châtelain, consul, et greffier de
l.i communauté contenant le nom, le surnom de chaque habitant qui aura tenu des chèvres dans le courant de l'année, soit qu'elle leur ayent été permises ou non ce qu'ils observeront de distinguer.
ARTICLE XIV. « Dans le cas qu'il n'y ait point de chèvres dans la communauté, ils en rapporteront certificat à la forme que dessus; et en cas de fausseté ils seront condamnés en l'amende portée par le règlement en leur propre et privé nom.
ARTICLE XV. « Les communautés qui n'ont pas rapporté au greffe de la maîtrise l'état de répartition des moutons, devant être nourris conformément au règlement général, le rapporteront pour tous délais lors des assises. Et à l'égard de celles qui l'ont fourni, leur député rapportera un certificat contenant le nom de ceux qui ont entretenu une plus grande quantité de moutons ou brebis que celle portée en la répartition, ou de ceux qui n'en doivent tenir aucun, attendu qu'ils n'ont point de terrain. ARTICLE XVI. « Il sera aussi rapporté annuellement aux assises un certificat signé comme dessus du nombre de ceux qui auront essartés, défrichés ou cultivés les essartb dans les bois, soit que les bois appartiennent aux particuliers ou aux communautés laïques, séculières ou régulières, ou à quelqu'autre particulier que cela puisse être.
ARTICLE XVII. – « S'il n'y a point eu de défrichement ou que les anciens essarts n'ayent point été cultivés il en sera pareillement rapporté certificat.
ARTICLE XVIII. « Les officiers des communautés qui refuseront de signer les certificats seront condamnés solidairement en leur propre et privé nom en l'amende de
cent cinquante livres. Et en pareille somme au cas qu'il soit vérifié lors des visites qui seront par nous faites ou autres officiers que les certificats sont faux au payement desquelles amendes les officiers seront contraints par corps et solidairement comme dessus.
ARTICLE XIX. « Les états et certificats ci-dessus mentionnés seront remis et affirmés véritables au greffe de la maîtrise par le consul ou député pour être ensuite communiqués au procureur du roy et y être fait droit après ses conclusions ainsy qu'il appartiendra.
ARTICLE XX. « Toutes les forêts de l'étendue de notre maîtrise demeureront fermées pendant la tenue des assises qui ne pourront être prolongées au-delà de deux jours pour chaque élection, et si quelqu'un y entrait il serait condamné à l'amende et s'il y commettait quelque délit il en sera puni comme pour crime de vol.
ARTICLE XXI. « Tous les rapports, procès-verbaux, plaintes et autres cas qui seront envoyés ou portés aux assises seront jugés pendant la tenue d'icelles, si faire se peut si non renvoyés à la première audience pour y être fait droit.
ARTICLE XXII. « Tous jugements, signatures et autres expéditions de justice qui seront par nous faites et autres officiers de la maîtrise seront délivrés gratuitement aux parties intéressées, sauf le papier timbré qui sera payé au greffe du siège.
ARTICLE XXIII. « Le chapitre des assises tant de l'ordonnance que du règlement sera lu et publié à l'ouverture d'icelles, ensemble tous autres articles que les syndics ou députés des communautés ont particulièrement intérêt de savoir pour empêcher les contraventions et principalement
les titres entiers du règlement général du mois d'octobre 1731. De laquelle lecture il sera par nous octroyé acte ou par autre officier qui présidera aux assises.
ARTICLE XXIV. – « 11 sera aussi fait lecture des ordonnances locales rendues concernant les communautés qui possèdent des bois, près, marais, landes, bruyères, pâtis, pêcheries et autres biens leur appartenant en commun aux fins qu'ils ayent à s'y conformer.
ARTICLE XXV. « Et attendu que plusieurs consuls des communautés de notre ressort nous ont représenté que leurs prédécesseurs avaient égaré les ordonnances locales rendues concernant leur communauté, en sorte qu'ils ne savent à quoi s'en tenir. Leur enjoignons de prendre au greffe de notre maîtrise, aux frais de qui il appartiendra, des extraits des dites ordonnances pour les mettre dans les archives de leur communauté et de les inserrer tout au long dans leur registre de délibérations pour en éviter la perte.
ARTICLE XXVI. – « Enjoignons particulièrement à ceux qui ont conservé les ordonnances de les déposer dans les archives, de les inscrire ou faire inscrire dans les registres pour en être fait lecture à chaque élection consulaire, de même que du règlement général, de laquelle lecture il sera donné acte par celuy qui présidera l'assemblée.
Article XXVII. « Déclarons que lors des visites qui seront par nous faites dans les communautés de notre département nous nous ferons représenter les registres des greffes, et dans le cas qu'il soit trouvé que les officiers n'ayent pas satisfait aux articles ci-dessus nous les condamnerons en l'amende de cent livres à la forme du règlement. ARTICLE XXVIII. « Les officiers seront tenus de représenter les registres soit à nous, le lieutenant, procu-
reur du roy, garde marteau et aux gardes généraux de la maîtrise sans déplacer et sans frais. Et en cas de refus il en dressera procès-verbal pour y être statué aux formes ordinaires.
ARTICLE XXIX. « La présente ordonnance sera envoyée dans chaque communauté pour cette fois seulement, à la diligence du procureur du roy, quinzaine avant la tenue des assises, par un sergent de la maîtrise ou autre personne par luy proposée, le tout sans frais pour les communautés, sauf à faire taxer par M. le grand maître les salaires du dit sergent et autres impenses par luy faites pour la tenue des assises.
ARTICLE XXX. « Incontinent après la réception de la présente ordonnance les officiers des communautés la feront enregistrer tout au long sur leurs registres de délibérations, publier et afficher un jour de dimanche ou fête à l'issue de la messe paroissiale de chaque communauté, et la notifieront aux maisons religieuses et autres ecclésiastiques de leur communauté. De tout quoy le député aux assises rapportera certificat pour une fois tant seulement, à peine contre les officiers de répondre en leur propre et privé nom des amendes auxquelles les défaillants aux assises pourraient être condamnés, faute par eux d'avoir connu la teneur des présentes.
ARTICLE XXXI. « Au surplus la présente ordonnance sera lue à la première audience, publiée, affichée, partout ou besoin sera, à la diligence du procureur du roy et exécutée par provision, nonobstant opposition, appellation et autres empêchements et sans préjudice à iceux. Fait à Saint-Marcellin, dans la chambre du Conseil, le 17 may 1738. Signé Vallior Chabert, lieutenant; Fival,
Anisson, procureur du roy; Robert de Revol, garde marteau Collationnée, Drevon.
« L'an 1738 et le 26 juillet, Joseph Bouvier, premier huissier audiencier à la maîtrise royale des Eaux et forêts de Saint-Marcellin, y résidant, reçu au greffe d'icelle soussigné, rapporte qu'en vertu de l'ordonnance cy-dessus et en la requête du procureur du roy je me suis exprès transporté au lieu de Saint-Philibert où j'ai dûment intimé et signifié aux officiers, consuls et habitants du dit lieu parlant au sieur Baboin, consul, l'ordonnance cy-dessus avec commandement d'y satisfaire sous les peines portées par les ordonnances et règlement, ainsi le certifie.
Signé Bouvier.
« Du vendredi 15 août 1738, au lieu de Saint-Roman d'Albon, dans la chambre de la communauté par devant nous Charles-Hector Robert, capitaine châtelain royal de la comté, écrivant le substitut greffier.
« A comparu sieur François Baboin, consul moderne de la communauté, lequel nous a dit avoir fait avertir par affiche de placard aux portes des églises suivant la coutume, tous les habitants de la communanté à comparaître à ce présent jour, lieu et heure par devant nous pour venir délibérer sur une ordonnance rendue par M. Vallier, conseiller du roy maître des eaux et forêts de Dauphiné au département de Saint-Marcellin. du 17 may dernier, à lui envoyée et signifiée le 26 juillet aussi dernier, laquelle il a lue, affichée, publiée, le troisième du présent à la porte de l'église de Saint-Roman, et en celles d'Aniieyrori et de Saint-Philibert. Et qui a été enregistrée au registre des délibérations de cette communauté le quatrième du présent mois, de laquelle ordonnance il requiert qu'il en soit fait lecture pour y être ensuite délibéré et satisfait. Plus qu'il soit délibéré sur l'imposition de la somme de trois cents
livres qu'on est en la coutume d'imposer conjointement avec la taille royale pour être employée aux dépenses que la communauté est obligée de faire lors du passage des troupes, fourniture des voitures aux soldats invalides, et autres dépenses indispensables à faire en la dite communauté et ce par les habitants cy-présents, requérant défaut contre les absents, au péril desquels il soit délibéré et s'est soussigné.
I3aboin, consul.
« Auquel lieu sont comparus sieurs Reymond Rozier, Jean Crozat, Nicolas Gabet, Louis Rozier, Pierre Michalet, Mathieu Rozier, André Ageron, Pierre Farquet, Vincent Lafemas, François Thomas, Nicolas Goudard, Louis Cotte, Joseph Donzel, François Robin, Jean Oger, Jean Paquien, Pierre Sadin, Joseph Crozat, Antoine Pérouze, Jean Pérouze, Julien Barret, Pierre Michalon, Jean Marion, Etienne Couturier, Mathieu Ganzan, François Figuet. « A quoy satisfaisant les susdits assemblés, après avoir ouy lecture du comparant du consul et de l'ordonnance de M. Vallier y énoncée, satisfaisant au cinquième article de la dite ordonnance ont tous unanimement nommés sieurs François Baboin père et fils pour assister aux assises qui seront tenues par M. le Maître des eaux et forêts le premier et second septembre prochain pour répondre aux interrogats qui leur seront faits et satisfaire au contenu de l'ordonnance. Et pour ce sujet ils se transporteront à SaintMarcellin, ce que les sieurs Baboin ont accepté, et leurs vaccations leur seront payées,
« Sur le septième article, déclarent n'y avoir aucune communauté régulière en la comté d'Albon.
« Sur le huitième article il n'y a point de péages. « Sur le neuvième article ils disent que la communauté d'Albon est du Domaine, engagée à Mgr le prince de Rohan.
« Sur le dixième article qu'il n'y a aucun pécheur. « Sur le douzième article, les édits, ordonnances et règlements ont été publiés suivant la coutume et la présente délibération servira de suffisant certificat.
« Sur le treizième article, le consul a envoyé très régulièrement les certificats de ceux qui ont eu des chèvres, aux quels on doit se rapporter et la présente servira aussi de certificat. Et d'ailleurs les habitants disent qu'il serait à propos d'avoir des cavaliers de la maréchausssée pour les retirer, sans quoy on ne pourra jamais en venir à bout, les plus pauvres en ayant et les aysés en supportent les dommages.
« Sur le quinzième article on croit que l'état des brebis et moutons de la comté d'Albon a été remis et ils disent que quand il y aurait le double de brebis et moutons dans la comté les terres seront plus que suffisantes pour les nourrir sans les mener dans les bois. D'ailleurs on est en usage dans les gros domaines de la communauté et chez les particuliers de n'avoir que la même quantité de bestiaux en vendant lorsqu'ils en ont de plus, par la difficulté qu'il y a de les nourrir dans les écuries pendant l'hiver, par rapport à la disette des fourrages.
« Les délibérants disent sur le seizième et dix-septième article qu'il n'est pas de leur connaissance qu'il aye été fait aucun défrichement, et que d'ailleurs le temps est trop court pour cette année pour le vérifier au juste à cause de la grande étendue de la communauté et l'année prochaine la vérification en sera faite exactement et la présente servira de certificat.
« Sur l'imposition de la somme de trois cents livres, les délibérants trouvent qu'il est très nécessaire d'imposer cette somme conjointement avec la taille royale de l'année prochaine 1739, pour être employée à la dépense que la communauté est obligée de faire lors du passage des troupes, voitures des invalides et autres dépenses indispen-
sables. Et pour obtenir la permission de l'imposer, ils députent sieur Baboin, consul, pour se pourvoir à nos seigneurs de parlement pour la demander, sous promesses de le défrayer de toutes légitimes mises.
« Nous capitaine châtelain royal susdit avons octroyé acte des comparutions, réquisitions, lectures, déclarations et délibérations pour servir à ce que de raison et particulièrement pour les certificats demandés par la susdite ordonnance de M. Vallier et se sont les sachant écrire avec nous soussignés.
« BABOIN, consul Couturier GAZAND j Louis Cotte Pérouze Figuet Goudard Sadin
Robert, châtelain royal Fontaine, subst.
Le 15 août 1738 le sieur Jean Joud, médecin chirurgien habitant à Anneyron du comté d'Albon a obtenu la permission d'avoir une chèvre pendant six mois. Le 26 octobre de la même année le sieur François Baboin, consul a obtenu la même permission de M. Chabert, lieutenant de la maîtrise des Eaux et forêts de Saint-Marcellin. (A suivre). PROSPER VALLERNAUD.
LA POPULATION
DES
Taillabilités du Dauphiné
APRÈS 1755 ET AVANT 1762
(SUITE. Vocr les. O40 à 169* livraisons)
A la date de 1755, Jean-Baptiste Girerd de Bolland était subdélégué au département de Faverges (1). Le troisième manuscrit relatif à la population du Dauphiné, ne mentionnant pas l'existence de cette subdélégation, est postérieur au 14 juin 1755 cette preuve peut être jointe à celles administrées précédemment.
Le territoire de quelques communautés était partagé entre deux provinces ou entre deux souverains. Aux exemples déjà donnés on peut ajouter celui tiré de la communauté de Donzère, car il n'a été signalé nulle 'part. L'ile de Grillac ou Grilhac, située dans le Rhône, mais dépendant du territoire de Donzère, relevait du Languedoc et non du Dauphiné. Elle avait été taxée à 1,621 livres. Les propriétaires de cette île,
( 1 ) Albergement pour sieur Jean-Baptiste Girerd Bolland, subdélegué, à Jean Double, du lieu de Tuellin(Tulltns), sous la pension de 12 livies et deux poulets (14 juin ij 5 5) Girerd habitait le domaine de Bolland à Faverges. Les subdélégués étaient qualifiés Mr M* (Ms ma bibliothèque).
appartenant à des familles connues, MM. de Barruel. Joubert, Durand, Servier et Madame de Moutet de St-Auban, présentèrent une requête à l'intendant du Languedoc, de Lamoignon, pour le prier de faire procéder à « l'arpentement » des îles de Grillac, de Martin et de Desserres, toutes sises dans l'étendue de la communauté de Donzère et appartenant au Languedoc. De Lamoignon rendit immédiatement une ordonnance conforme (22 mars 1687) (1). Chacune de ces îles constituait, semble-t-il, une taillabilité séparée.
La bibliothèque de Grenoble possède un manuscrit volumineux de Guy Allard (2), différent de celui publié par Gariel et revêtu du titre factice « Recherches sw le Dauphiné ». Il a été compose postérieurement à 1693, car un rôle, daté de cette année, est cité. (3). L'écriture en est difficile à lire. Les paroisses et les communautés ne sont pas distinguées les unes des autres elles sont parfois confondues (4).
Quelques notes témoigneront des modifications profondes, apportées par l'Etat de 1706, aux taillabilités. Scrrières était taxé auparavant à 6 feux 3/4 (5). St-Jean-de-Soudain était compté pour 2 feux, 1/4, 1/6 et 1/48 la parerie était équivalente à 1/8 de feu et elle disparut avant 1698. L'Isle d'Artas est de nouveau identifiée avec l'Isle d'Abeau par Guy Allard (6). La communauté de Vourey était unique (7), quoique composée de deux parties se trouvant dans le mandement de
(1) Ms. (ma bibliothèque).
(2) U, 4^9. Ce manuscrit est rigoureusement inédit.
(3) T. I, f» i5i. V. aussi ibid. f« 1 56.
(4) On lit au t. l, f° 333 « la description des communautez ou paroisses » appartenant à l'abbaye de St-Antoine. Cet exemple n'est pas isolé.
(5) Il fut rattaché à l'élection de Vienne, lors de la création des élections, tandis que Roussillon était joint à celle de Romans. Antérieurement, Serrières faisait partie du mandement de Roussillon (ibid., t. I f 264).
(6) T. I, f» 154 et 164.
(7) L'Etat de yo6 la subdivisa en deux parties.
2' SÉRIE. XUII" VOLUME. IÇ)OÇ). 25
Moirans (2 feux 2/3) ou dans celui de Tullins (3 feux 1/4) (1). Cette particularité démontre de nouveau que Bouchu a eu recours aux taillabilités et non aux communautés. Montferrier et Cras formaient une seule taillabilité, La Pierre, fief de la maison de Monteynard, était cotisée à part (1 feu). La Chapelle-Blanche, ne figura pas toujours dans la taillabilité d'Avalon elle se trouvait en 1693 dans celle de St-MaximinGrignon (2).
A propos du nom de la Chapelle, on peut rappeler qu'à une époque ancienne la taillabilité de la Chapelle, sise dans le Gaudemar, fut divisée en deux parties égales en faveur des deux familles d'Ambel et Peyrouse, d'où les taillabilités de Clémence d'Ambel et de Guillaume Peyrouse (3), devenues en [706 des communautés A l'origine ces deux taillabilités étaient identiques au xvme siècle, le revenu de la seconde était un peu plus élevé que celui de la première. Aucune d'elles n'avait de fonds affranchis.
A Saint-Guillaume et à Saint-Andéol (4), le dauphin, Claude d'Arces, Claude Hicoz et Pierre Terrier, possédaient des hommes à leur service en temps de guerre et faisant une taillabihté personnelle, en quelque paroisse que fussent situés leurs fonds. Ces « hommes furent supprimés, dit Guy Allard, sur l'ordre des intendants de Sève et de Lozières, en vertu de l'arrêt du Conseil du 26 mai 1646 (5). Cette mesure ne fut pas exécutée complètement. Malgré la réunion de Noël Terrier à
(1) T. II, (• 758.
(2) T. II, fo' 760, 805 et 822.
(3) Guy ALLARD. Dict., etc., t. I, p. 245.
(4) Son territoire fut appelé longtemps Toschane ce nom resta au château en ruines. (Guy Allard. Dict. etc., t. H, p. 546). Dans le texte qui suit, il s'agit du dauphin Louis Il. Claude d'Arces, seigneur d'Arces, de Saint-Ismier et de Saint-Guillaume, testa le 10 avril 1473 (Bib). de Grenoble, R, i3, P, 1028. f°' 302-340). Pierre Terrier est un ascendant de Noêl Terrier.
(5) U, 439, t. 1, 83o-3i.
St-Guillaume et à St-Andéol (1706), ce lieu continua à être l'objet d'un rôle spécial. Cette rare particularité subsista jusqu'à la Révolution.
Oulles et Séchilienne-en-Oisans formaient des taillabilités distinctes. Le mandement de l'Oisans recevait un rôle unique, comprenant le Bourg et toutes les paroisses de cette contrée, moins les deux précédentes A l'époque où Guy Allaid rédigeait son copieux travail (1), le rôle général était subdivisé de la façon suivante
Allemont 4 feux
Auris 4 1/4 1/16
Besse 6 1/4 1/8 1/16 6
Bourg (Le). 6 1/41/8
Clavans 4 1/4 1/16
Freney (Le) 2 3/4 1/12 z
Garde (La) 2 3/41/8 1/16 6 i/24 Gauchoirs (Les) 1/4 1/8
Huez. 4 1/4 1/16
Livet et Gavet 1 1/8 1/16
Mizoën. 2 1/4 1/16
Mont de Lans 6 1/4 1/8 1/16
Ornon. 2 2/4 1/8 1(16
Oz 3 3/4
St-Christophe 3/4
Vaujany 4
Venosc. 3 1/4 1/16
Villard-d' Arène 4 1/4 1/ 16
Villard-Eymond, 2 2/4
Villard-Reculas 1 1/16 (2).
(t) Malgré les notes de Rochas (Biographie du Dauphiné t. I. p. t8, cette date semble être d'une détermination difficile. Au folio 108 bis du t. I, est collé un document daté de 1698 concernant Marie Galle, femme de Guy Allard.
(2) T. II. f" 695 et s.
La Grave ne figure pas dans cette énumération c'est là le résultat d'un oubli.
La plus grafide partie de Baix était située dans le Languedoc. Une faible portion dépendait du Dauphiné et était taxée sur le pied de 3 feux (élection de Valence) (ij. Cette observation complète l'indication comprise dans le Dictionnaire de Guy Allard, qui emplaçait Baix-sur-Baix dans le Languedoc; mais, disait-il, cette paroisse du domaine delphinal a trois feux. Ses dernières recherches établissent que la portion de Baix, sise en Dauphiné, avait trois feux elle fut annexée à la taillabilité de Mirmande avant 1698. St-Restitut aurait formé une taillabilité unique avec St-Paul-trois-Châteaux. Le fief de Pontaulard aurait été constitué en communauté indépendante (2), relevant du Dauphiné. Loisque les princes d'Orange cessèrent de posséder Montbrison à titre allodial, Pontaujard fut annexé à Montbrison. Bouvières et Guisans auraient été réunis à une époque ancienne. L'expression bellue était en usage à Rac, Donzère et Mondragon au xv. siècle (3). Cessieu comprenait outre la part du roi-dauphin, une pareriedont la taillabilité fut supprimée avant 1698(4). Buisse et Blacons étaient dénommés anciennement et respectivement la Bâtie-Blacons et Bâtie-dela-Lance, de même que St-Maurice était appelé la Bâtie-StMaurice (5). Le manuscrit de Bouchu mentionne les Forains de Vizille à Montchaboud. Ce nom doit être complété par 0 et à Montjean ». En 1684, Montchaboud et Montjean formaient deux taillabilités distinctes, qui furent jointes avant 1698. Par suite d'une erreur bizarre, Guy Allard a transformé dans son Diclionnaire Montjean en Montléan (6).
(1) T. Il. f' 962.
(2) T. Il. f- 965 et 1048.
(3) T. IV. f«- 6 et 11. i,
(4) Guy ALLARD. Dict t. I, p. 216.
(5) U, 439, t. III, ('• 55 et 56. T. IV, f- 132.
(6) T. II, P. 188.
Au cours du xvi* siècle, quelques taillabilités subirent de sérieuses transformations. Le péréquaire de 1544, portait la division des feux entre St-Crépin, Guillestre, Risoul, Ceillac, St-Clément, Crévoux, Châteauroux, Champcella et la Roche, en suivant l'ordre adopté par Guy Allard (1). La Roche est devenue la Roche-sur-Embrun.
Neuf taillabilités furent créées. Le territoire de la taillabilité unique dont elles furent tirées et qu'elles remplacèrent était fort étendu. La plus importante, au point de vue'du nombre des feux, était Châteauroux Serait-ce celle qui donna naissance aux huit autres ? Un peu plus tard un arrêt de la Chambre des comptes, du 15 juillet 1602, tira de Champcella deux nouvelles taillabilités, Freyssinières et la Roche séparée de Freyssinières (2). Au cours du xvne siècle et avant 1698, Champcella devint Champcella à Freyssinières et la Roche séparée de Freyssinières fut jointe à la Roche-sur-Embrun Les guerres de religion avaient provoqué la décadence ou même la ruine d'un grand nombre de lieux. Sous le règne réparateur de Henri IV, les mesures nécessaires furent prises et la circonscription de plusieurs taillabilités fut remaniée. Un arrêt du parlement de Grenoble sépara Jons de la taillabilité d'Anthon (5 avril 1591). Au cours de cette année-là, une décision de même nature transforma en six taillabilités indépendantes Saint-Paul-lez-Romans, Saint-Sauveur, Beauregard, Crispalot, le Laris, Montfaucon, jusque-là réunis en un seul groupe fiscal (1591) (3).
Un peu plus tard le parlement de Grenoble supprima la taillabilité de Quint, pour créer celles de Saint-Julien-enQuint (2 feux 2/4 1/24), de Sainte-Croix (i feu 1/4), de SaintAndéol (1 feu 1/8 1/12) et de Pontaix (4 feux 1/4 1/8I do mai (1) U, 439. T. IV. f» 179.
(2) T IV, 2DO.
(3) T. I, f 210 et 376
1595) (1). Les paroisses du mandement de la Buissière, la Buissière, Barraux, la Flachère et Sainte-Marie -d'Alloix furent élevées au rang des taillabilités vers le même temps (20 décembre 1597) (2).
Courtenay et Quirieu auraient possédé respectivement 500 et 80 communiants. La première évaluation doit être considérée comme exagérée (3). Le fief de Buisse, non imposé à la taille avant 1699, comptait 12 habitants ou chefs de famille, selon le dénombrement du 2 avril 1688 (4). Bouchu a cité dans son mémoire Alençon comprenant Buisse, RiconnièresBlacons et la Roche-Saint-Secret, car leur imposition venait d'être décidée.
Vulson formait une taillabilité à part, quoique n'ayant pas été érigé en communauté et dépendait de celle de Morges. Guy Allard lui attribue 1/4 et 1/8 de feu (5). L'Etat de 1706 confirma cette situation, tout en atténuant cette dernière estimation. Ses auteurs agirent n de même à l'égard de deux autres communautés, où ils créérent ou maintinrent des sections pour la taillabilite Saint-Guillaume et Saint-Andéol, Saint-Julien. Les communautés jointes au contraire à ce point de vue là, ont été déjà énumérées.
Siccieu fut séparé de Crémieu, quant à la taillabilité, avant 1489 (6).
Ces extraits succincts établissent l'importance relative des volumes composant la compilation de Guy Allard. Les historiens dauphinois trouveraient certainement à glaner de nombreux renseignements dans ce recueil, dont la lecture est parfois indigeste et dont la rédaction a été laissée au hasard.
(1) T. III, f* i5«.
(2) T. III, f- 63.
(3) T. I. f" 188 et 87. (4) T. IV, f» 1 52.
(5) T. II, f- 108a.
(6) T. IV, f° i56.
Si le volume de Souvent/ dû au baron d'Haussez est peu utile, ce préfet, du moins, aura eu le mérite de faire imprimer une Nomenclature d'une grande valeur. Une circulaire du Ministre de l'Intérieur du 28 juin 1820, prescrivit la rédaction d'états généraux des communes de chaque département. Conformément à ces instructions, le préfet de l'Isère fit dresser une « Nomenclatui des communes du dépai tement de l'Isere ». Datée du 8 octobre [821, elle fut imprimée la même année à Grenoble, par F. Allier. Du format grand in-8°, elle comprend 52 pages non chiffrées, couverture comprise. Ce document est à peu près inconnu aujourd'hui la plupart des bibliothèques du Dauphiné ne le possèdent 'pas. Il doit être considéré, comme constituant sensiblement un complément des Etats de 1762 et de 1777, souvent visés au cours de ce mémoire.
Les renseignements fournis concernent i" le numéro d'ordre 20 le nom des communes et de leurs sections 3° le nom des paroisses et succursales dont elles dépendent 40 le nom du canton 50 le nom de l'arrondissement. Le relevé des sections est fort utile, quoiqu'il soit incomplet. Dans tous les cas, il était indispensable de signaler son existence aux auteurs étudiant la topographie.
Le nombre des communes est fixé à 554. Un supplément concerne les sections de cinq d'entre elles (1). Ni le département de la Drôme, ni celui des Hautes-Alpes, ne possèdent de Nomenclature de cette nature.
Trois imprimés du 1er, du 16 et du 27 février 1653 donnent la liste des communautés données en aide à celle de Montélimar, pour le logement du régiment d'infanterie de Quincé et de la compagnie de cavalerie du même nom (2). Ces trois textes renferment uniformément la mention de la commu(1) Ma bibliothèque. Les deux éditions des Souvenirs s'y trouvent également.
(2) Archives de la Drôme (Série A supplementl.
nauté de Poët-Célard et Mournas ou Mornas On doit substituer Mornans à Mornas. Les taillabilités du Poët-Célard et de Mornans étaient distinctes, à la date de 1684. La constitution des deux communautés indépendantes doit être contemporaine de la rédaction de l'Etat de 1706, car on n'en trouve pas trace avant cette date. De même Saint-Nazairele-Désert, Gumiane et Brette formaient en 1653 une communauté unique Le partage ne tarda pas à être effectué conformément aux taillabilités. Ces remarques prouvent de nouveau que Bouchu a pris pour base de son rapport l'Etat des taillabilités.
Les Delphinaux du Monestier-du-Percy étaient comptés à part à la date de 1653, malgré l'arrêt de 1646.
Un état des communautés données en aide au Buis pour la subsistance de six compagnies d'infanterie légère (1650) établit la réunion en une seule communauté de Mévouillon et de Villefranche La Frette (1) et Beaumont avaient eu une certaine importance au moyen âge. Les guerres de religion causèrent leur ruine. Ces lieux furent annexés au Touvet, dénommé encore en 1650, le Touvet, la Frette et Beaumont (2). L'étude de ces états des communautés est fort utile au point de vue de l'histoire administrative de ces dernières. (A suivie.) R V C.
(1) Différente de la Frette (élection de Vienne). (3) irchives de la Drame {ibid ).
UNE ÉNIGME HISTORIQUE
A VALENCE
Qui était Justina ?
La famille des enigmes historiques est gent très prolifique; chaque jour voit naître à la lumière un rejeton nouveau et le sphinx, leur père, jette à la face des critiques, des archéologues, des chercheurs deconcertés un de ses insidieux problèmes à resoudre.
Deux historiens Valentinois, Claude Rogier en 1572 et François Roaldès, auteur d'une notice sur les « Antiquités de Valence » restée manuscrite, mais que Jules Ollivier indique dans ses « Essais historiques » à l'etat de « manuscrit de la Bibliothèque royale, fonds de Lancelot, n° 3o2 », nous ont légué des informations très précises sur la découverte d'un sarcophage exhumé à Faventines au commencement du xvie siècle, portant lapicidée l'inscription « JVSTINA » ce tombeau est déposé dans la cour de l'immeuble, catalogué sous le n" 53 de la Grand'Rue à Valence. Claude Rogier a écrit « .Outre ce, en l'an 1 5 1 2 hors « la porte Saint-Félix, en une vigne, sur le béai venant des « fontaynes des Faventines, fut trouvé ung sépulcre de « pierre de chuin (?), couvert d'une pierre espesse d'un pied
« et demy, et en y celuy y avait ces mots D. IVSTINA. M. '< La pierre duquel sépulchre avec la dite inscription est « au Logis du dauphin et, comme l'on dit, fut trouvé « dedans le corps d'une femme ayant en chascune des « aureilles une bague d'or, desquelles en une estait enclose « une émeraude et en l'autre une turquoise cassée, et bientôt « après qu'elle fut découverte fut réduite en pouldre. « Auprès d'icelle femme, costé de la teste, fut trouvée une « lampe de verre et du costé des pieds une tasse en verre « cristallin.
La deuxième version rapportée par le manuscrit de François Roaldès s'écarte peu du récit ci-dessus. Jules Ollivier nous l'a transmise, sous la forme suivante « Un autre « ancien monument fut trouvé en l'an de salut, mille cinq « cent sei^e, hors de la ville, au chemin qui conduit de la « porte Saint-Félix aux fontaines de Faventines, dedans une « vigne, près le béai, un monument de grosse pierre de « chouin fort anctique et grossièrement taillé, auquel en « l'un des coustés par dehors était esculté en grosse « lettre antique et en la forme qui s'en suit D. IVSTINA « M. et dedans ledict monument fut trouvée la forme d'un » corps de femme, auquel en une des oreilles était attachée « une perle, et une bague en l'un des doigts en laquelle étaient o encloses une émeraude et une turquoise cassée, et au « cousté une tasse de verre cristallin et une lampe; duquel « monument les parties sont encore en la cour du logis du « Dauphin.
Qui était Justina ? Ce sarcophage, qui n'avait révelé qu'un atome de son secret, ne tarda pas, sous de sagaces
recherches historiques, à divulguer la relation entre ce vocable de Justina et la personnalité qu'elle cachait. Valence, au xvie siècle, possédait une Université réputée qui, par le rayonnement de son enseignement, détenait dans le domaine des lettres et des sciences une place enviée. Il n'est pas douteux que les doctes professeurs de cette Université tentèrent de dissiper ce mystère primitif et s'impressionnèrent d'une documentation exacte.
Aymar du Rivail, dans son manuscrit sur les Allobroges, (De Allobrogibus libri novem) dont le texte nous est connu par les soins de la publication parue en 1844, relate dans sa description de Valence ce qui suit « Avant le règne de Valenti« nien Ier, Valence existait déjà au témoignage de Ptolémée « et de Pline, qui vivaient bien avant Valentinien Ier et ont « fait mention de Valence dans leurs écrits. Toutefois, comme « Valentinien a tenu sous son sceptre la ville de Valence, « comme d'ailleurs toutes les Gaules, je ne nierai pas pour « ces raisons que Valentinien ne l'ait embellie parce qu'il a « habité cette ville, comme cela est démontré par ce fait que « Justina son épouse a été inhumée à Valence. Et de nos « jours ( 1 532) son tombeau de marbre a été transporté « au logis du Dauphin on y lit cette inscription en lettres « romaines
D. JVSTINA. M
« Et par les artifices d'Arbogast, Valentinien II, fils de « cette même Justine et de son époux Valentinien Ier, fut « étranglé dans la Vienne des Allobroges, située non loin « de Valence.
Que le sarcophage de Justina ait été découvert en 1 5 1 au dire de Claude Rogier, ou en i5i6 d'après l'affirmation de François Roaldès, il n'en est pas moins permis de noter que seize ans après cet événement, Aymar du Rivail, un érudit du
temps, avait recueilli sur place le témoignage du lien historique attribuant ce sarcophage de marbre à la deuxième épouse de Valentinien Il, empereur, dont le sejour à Valence avait été de longue durée avant et après son mariage avec Justina. C'est un premier jalon et un argument placés sur la route qui doit conduire à la solution poursuivie. Un siècle après la visite d'Aymar du Rivail, un autre voyageur érudit, le savant Danois Abram Golnitz, surnommé l'Ulysse Belgico-Français, publiait à Amsterdam, en i63i, ex officine Elieviriand, la relation d'un voyage « à travers « la Belgique espagnole, le royaume de France, la Savoie, « pour se terminer a Turin, la métropole du Piémont » ce récit est écrit en latin. Ce voyageur, à travers ses pérégrinations, s'arrêta à Valence qui fut, de sa part, l'objet d'une minutieuse investigation.
Golnitz nous livre de Valence une description qui éclaire notre curiosité il anime le paysage sur lequel la ville est assise, retrace l'inscription d'une antique construction adossée à la porte Saunière, étudie la valeur artistique de chaque edifice religieux et conclut ainsi a les édifices publics « méritent à peine un trait de plume. Les bâtiments privés « du propriétaire du logis du Dauphin renferment un sépul« cre de marbre d'une seule pierre, qui sert de réservoir à « eau; ce sarcophage, dit-on, était celui occupé par une certaine impératrice paienne [ethnicœ) on n'y lit rien « autre que les mots suivants
D. JVSTINA. M.
« peut-être DIVA JUSTINA Mater.
« Dès que ce tombeau fut ouvert, il laissa voir une femme « très belle (speciosam), ayant les oreilles percées, à chacune « d'elles étaient suspendus des anneaux ornés de perles et « d'émeraude; à ses pieds on trouva une ampoule en verre o cristallin une lampe en verre était placée auprès de sa
« tête, mais dès que l'air envahit le tombeau, le cadavre « s'en alla en poussière.
Ici deux arguments nouveaux surgissent, cette Justine était une impératrice paienne et une femme d'une grande beauté; nous apprécierons plus loin la valeur documentaire et l'exactitude de ces déclarations, c'est le prélude de la moisson d'informations précises.
Alfred de Terrebasse, qui livra à l'impression l'Histoire des Allobroges d'Aymar du Rivail, cite en entier le passage du récit latin, emprunté à Abram Gôlnitz; il l'accompagne de la réflexion suivante « Hujus inscriplionisformula nullo « modo imperatrici christianœ convenire potest Justinœ « c'est-à-dire, la formule de cette inscription ne peut en « aucune façon s'approprier à f impératrice chretienne Jus« tina ». Nous saisissons ici la première des erreurs dont la série va suivre nombreuse; ou Terrebasse n'avait pas lu la vie de Justina, ou il n'avait jamais eu connaissance des incidents tumultueux qui ont marqué dans le domaine religieux le fanatisme anti-chrétien de cette Impératrice, sa persécution contre les orthodoxes, la fermeture des églises catholiques, sa fureur contre saint Ambroise, l'archevêque de Milan, qu'elle résolut de perdre a tout prix. Saint Ambroise lui-même a decrit l'histoire de cette petite guerre que lui fit Justina dans un épître à sa soeur Marcellina; ce point historique est acquis, l'épouse de Valentinien Ie' et mère de Valentinien II n'entra jamais dans le giron catholique elle vécut attachée au culte des dieux du paganisme romain et se constitua la protectrice farouche des Ariens.
L'affirmation de Terrebasse ne peut être retenue,
La légende. Justina apparaît dans l'histoire comme une personnalité de premier plan pendant une période de vingt années, de 369 à 38g de notre ère, elle exerce sur les affaires de l'Empire Romain et sur l'esprit de trois empereurs, une influence décisive; le monde latin obéit à sa volonté impérieuse.
Femme douée d'une grande énergie, d'une rare beauté physique, « elle était habile dans les affaires, dit Zozime, « ne manquait pas d'adresse à trouver des expédiens ». Peu de princesses, en ces temps troublés, ont autant occupé la critique historique et ont tenu dans les annales des mémorialistes une si large place. Rien n'étonne plus, le sujet analysé, de voir la légende s'emparer de cette femme et dresser, en face des réalités historiques, les apparences d'un enseignement où la culture raisonnée des textes fait défaut. o Dans la Cosmographie universelle de tout le monde (Paris 1575), Belleforest répète, sans rien y ajouter, le récit tracé par Rogier et Roaldès.
Dans les « Antiquités des villes de France » (Paris, 1647-1668), Duchesne, dans sa notation sur Valence, ne change rien à la version connue dans l'un et dans l'autre, la mention de l'inscription reproduit celle des érudits Valentinois.
Avec L. Moréri, dans son « Dictionnaire historique » Paris, 1732, la vérité et l'erreur se côtoient; il n'y a là rien d'offensant dans ce rapprochement Moréri citait des textes, les juxtaposait, mais ne les analysait pas; c'est l'oeuvre d'un compilateur adroit, qui ne se confond pas avec les droits de l'histoire Moréri écrit
« Justine, femme du tyran Magnence (?), la fut ensuite « de l'empereur Valentinien l'ancien, qui paraît l'avoir « épousée vers l'an 368. Elle fut mère de Valentinien le « jeune, de Galla, de Grata et de Justa, dont les deux « dernières moururent vierges, et l'autre fut mariée à « Théodose. Justina s'etant laissée surprendre aux Ariens « soutint leurs erreurs avec opiniâtreté, et persécuta les « orthodoxes, surtout les prélats, avec une fureur etrange. « C'est à sa sollicitation que Valentinien, son époux, refusa « de voir saint Martin de Tours, et que son fils Valentinien, i le jeune, fut contraire à saint Ambroise. Ce prélat avait « refusé de donner une église aux Ariens dans Milan ce « qui avait si.fort aigri Justine, qu'elle résolut de le perdre « quelque prix que ce fût. Elle en chercha les moyens, « mais il ne lui fut pas possible d'en venir à bout. Saint « Ambroise lui-même, décrit l'histoire de cette petite guerre « qu'on lui fit dans l'épilre à sa sœur Marcellina. L'impé<< ratrice se vit obligée dans la suite d'avoir recours à celui « qu'elle venait de persécuter, et l'employa pour apaiser « le tyran Maxime. Elle se retira depuis avec son fils à « Thessalonique, où elle mourut vers l'an 388 (?) Socrate « parle d'elle d'une manière bien différente de celle de « Zo\ime. Si on le croit, Justine était née en Sicile (?), Juste, « son père, qui était juge du Picenum en Italie, fut tué « par ordre de Constance, parce qu'on disait qu'il serait « père d'un empereur. L'Impératrice Sévera, première a femme de Valentinien, la prit à son service, et l'empereur « en étant devenu amoureux, et voulant l'épouser sans « répudier l'impératrice, fit publier une loi par laquelle il « permettait à quiconque de ses sujets d'avoir deux femmes « à la fois. On ne doute point que ce ne soit là de la fiction, « parce qu'outre qu'on ne connaît point de loi de cette « sorte, Ammien Marcellin qui a pris a tâche de décrire « toutes les fautes de Valentinien, le loue néanmoins « de la continènce à l'égard du sexe; mais on ne sait
« si le reste doit être rejetté de même et il serait Jort pos« sible que Justine, veuve d'un tyran mort en 353, fut « différente de Justine mariée à Valentinien en 368, et « mère d'un prince et de trois princesses.
Lamartinière, dans son Grand Dictionnaire géographique historique et critique (1768), ecrit sur Valence
« Dans la ville de Valence on fait voir un tombeau qu'on « prétend être de l'Impératrice Justine, parce qu'on y lit « dessus
D. JUSTINA. M.
« ce que Golnitz, dans son itinéraire explique très mal, Diva Justina Mater, au lieu de Diis Manibus (?) Justina, « car la première et la dernière lettre vont ensemble, étant « d'un caractère plus gros que le mot du milieu c'est-à« dire que l'on recommandait aux Dieux manes cette Justine « pour qui était fait ce tombeau. Comme le tombeau est « petit, sanc ornement, il paraît que ce n'était qu'une jeune fille dont les parents étaient pauvres, non une impératrice « romaine (?) »
L'argument produit par Lamartinière, que le tombeau de Justina était petit, que ses parents étaient pauvres, que c'était une jeune fille, le conduit à cette conclusion les Dieux manes doivent remplacer le » Diva mater n; disons que l'argument est non seulement spécieux mais entaché d'ironie; Gôlnitz, d'abord en i63i, ayant vu à Valence le sarcophage lapicidé a Justina. et M. Villard, en 1909, c'est-à-dire 278 ans après ce voyageur, nous affirment que cet appareil funéraire est en marbre.
On avouera que le corps d'une femme d'une rare beauté (speciosam feminam), écrit Gôlnitz, portant aux oreilles des anneaux d'or ornés d'émeraude et de perles, recélant dans son coffre de marbre une ampoule en cristal irrisé
d'Alexandrie, une lampe de verre, ne nous révèle pas l'indice d'une personnalité de pauvre origine, mais se présente aux veux de la postérité avec tous les signes qui lui confèrent un rang très élevé dans la société romaine.
Tour à tour, les lexicographes, les critiques, les compilateurs, engagés sur la voie dangereuse de l'anachronisme historique, n'ont pas su discerner la réalité, et séduits par le titre de savants, attribué à certaines individualités, ont reproduit-sans contrôle – leurs interprétations erronées, jusqu'à Chandon et Delandine, qui, en 1810 – dans leur Dictionnaire Universel (tome IX, t8io) répétèrent à l'égard de Justina les mêmes inexactitudes, soit son mariage avec Magnence et sa fin à Thessalonique en 388.
L'abbé Fléchier, dans son Histoire de Théodose-le-Grand, s'est acquitté avec une exacte fidélité documentaire de la tâche difficile de rendre au prestige de l'histoire sa vertu didactique. Son jugement droit, sa conscience d'écrivain fortifiée par l'autorité incontestée des deux mémorialistes grecs, Zozime et Socrate le 'scolastique, ont su évoquer la figure hautaine et dominatrice de Justina et nous la présenter en son relief humain.
Les événements qui, au cours des années 388 et 389, ont occupé la scène politique romaine, laissent encore apparaître Justina tenant les rênes du pouvoir à côté du jeune Valentinien simple instrument en ses mains. ·
L'Histoire. La légende, avec sa production stérile et son enseignement erroné, a creusé un fosse assez profond où, à tour de rôle, les commentateurs, les critiques, les fabricateurs 2' SÉRIE. XL11I' VOLUME. – 1 909. 26
de lexiques biographiques, les auteurs d'opuscules réputés historiques, ont culbuté.
L'histoire a des exigences auxquelles on ne saurait se soustraire; notre méthode, à laquelle dans nos études nous avons été toujours soumis, est plus impérieuse, plus ardue, plus longue à suivre, mais par un patient labeur de reconstitution historique, elle annihile la paralysie de la légende, diminue et dissipe l'opacité d'un problème et conduit sûrement à la manifestation de la vérité.
L'obligation de remonter aux sources mêmes, de consulter les textes primitifs, de traduire les auteurs grecs et latins est un devoir consécutif à toute méthode d'investigations complexes mais sûres sur la question de Justina nous possédons une documentation assez abondante léguée par le passé, de nature à préparer une leçon décisive et à détruire toute conception hasardée
La liste des historiens grecs et latins, contemporains des événements auxquels prit part cette Impératrice, est assez longue nous y rencontrons parmi les grecs, Zo\ime^ So\omène, (Hermias); Socrate, (le Scolastique), écrivains, témoins et interprétateurs des faits consignés dans leurs textes parmi les latins citons Orosius, Paul, ive siècle; Pontius Paulinus (353-43 1), saint Ambroise, l'archevêque de Milan à cette liste on doit ajouter saint Augustin et saint Chrysostôme.
L'interrogation, l'analyse, la traduction de ces textes ont rendu nos recherches faciles, ont satisfait notre curiosité éveillée, et ont précisé la forme de la sanction à extraire; il nous a été ainsi démontré
i° Que Justina n'a pas épousé le tyran Magnence et n'a pu devenir sa veuve
2" Que Justina n'a jamais été chrétienne;
3° Qu'elle n'est pas décédée à Thessalonique;
4° Qu'une Impératrice romaine y décéda en 38S 5° Que l'inscription du sarcophage découvert à Valence s'affirme dévoilée sous une unique et absolue interprétation.
Le tyran Magnence. Sa fin tragique à Lyon en 353. « Au commencement de l'été 353, la guerre recommença. Magnence défait de nouveau près du mont Séleucus (entre Luc en Diois et Gap dans le Dauphiné), s'enfuit à Lyon. Les soldats qui l'accompagnaient, le voyant sans ressource, résolurent de le livrer au vainqueur. Informé de ce dessein, il entra en fureur, égorgea tout ce qu'il avait de parents et d'amis autour de lui, tua sa mère, porta à son frère Désiderius, qu'il avait fait César, plusieurs coups dont aucun ne fut mortel puis, appuyant la garde de son épée contre la muraille, il se perça la poitrine, et expira sur les corps de ses victimes. Il périt le i i août 353, âgé de cinquante ans environ, et après avoir porté le titre d'Auguste pendant trois ans et sept mois. Son frère Decentius ou Décence, qu'il avait associé à l'empire et qui acctiurait à son secours, apprenant à Sens cette fin tragique, s'étrangla de ses propres mains le 18 du même mois ». (août 353) [Zo\ime, Socrate, So\omène).
Or, en cette année 353 (août) qui vit se dérouler à Lyon cette sanglante tragédie, Justina comptait à peine de six à huit ans, comme l'histoire nous le démontre; elle ne pouvait être l'épouse de ce tyran.
La jeunesse de Justina. Sa beauté. Son union avec Valentinien 1er. Socrate, le Scolastique, au
livre IV de son histoire ecclésiastique (i), burine, en traits délicats, le discret tableau de la jeunesse de Justina, de sa beauté rayonnante, de la passion qu'elle inspira à Valentinien Ier. Nous avons traduit le passage ci-après de la version latine du texte grec qu'Henri Valesius nous a léguée: « Le sixième jour après la nouvelle de la mort brutale « de l'empereur Valentinien (survenue le 17 novembre Zjb « à Bregetio, près de Presbourg, Hongrie), les soldats de Pannonie proclamèrent empereur son fils encore enfant « et également appelé Valentinien.
« Or, il est avéré que le jeune Valentinien était ne de « Justina (Augusta), que l'empereur avait épousée pour les raisons que nous expliquons, quoique sa première femme « Sévera lut encore vivante.
« Justus, père de Justina, qui sous le règne de Constance, « administrait la province de Picenum en Italie, avait vu « dans ses songes un enfant revêtu de la pourpre impériale « naître en droite lignée dans sa famille.
« Ce songe, avec beaucoup d'autres de la même nature, « avait été divulgué et parvint enfin aux oreilles de l'empe« reur Constance.
« Celui-ci tirant du sens de ce songe la conjecture que, « dans l'avenir, un empereur naitrait dans la famille de « Juste, le fit occire par un meurtrier à ses gages. « Justina privée sinsi de son père vécut longtemps en « vierge sans appui; toutefois à la suite du temps, elle « parvint à être connue de Sévera, l'épouse de l'empereur « Valentinien et fréquemment était tenue dans la société de « l'Augusta.
« Comme cette amitié affectueuse grandissait, on les « remarqua souvent ensemble même au bain or, il advint « que Severa, étant un jour aux thermes avec Justina, fut
(1) Pans, Pierre Le Petit, éditeur, 1686.
« appelée à voir la beauté corporelle de la jeune vierge, « et en fut très surprise; elle en entretint l'empereur, lui « depeignant la jeune vierge, fille de Juste, comme douee « d'une pureté de forme si parfaite, que bien que femme « elle-même, elle n'avait rien moins qu'été séduite par une « telle gracieuse beauté.
« L'Empereur en fut troublé jusqu'au fond de l'âme il « etait très attaché à sa femme Sévera, pourtant il caressa « le projet de s'unir à Justina, sans vouloir descendre à « répudier Severa, qui lui avait donné son fils Gratien que, « peu auparavant, il avait élevé à la dignité d'Auguste. o Dans ce but, il édicta une loi publiée dans chaque ville « de l'Empire, qui permettait à tout citoyen d'avoir deux « épouses à la fois et cet édit fut, en vérité, promulgué. « Lui-même alors épousa Justina, de laquelle il eut un « fils, Valentinien II, et en outre trois filles, Justa, Grata « et Galla les deux premières de celle-ci vécurent à « l'état de vierges, mais Galla fut, dans la suite, épousée « par l'empereur Théodose l'Ancien Il eut d'elle sa fille « Placida déjà Arcadius et Honorius ses fils, étaient nés « de sa première épouse Flacilla.
Cette page d'histoire est l'oeuvre d'un contemporain. Socrate le Scolastique, qui s'éteignit en 440, a continué les annales de l'histoire ecclésiastique des années 366 à 43g avec lui nous connaissons les détails de la vie domestique de Justina, enfant, jeune fille et enfin épouse de Valentinien Ier. Dès son jeune âge, et après la fin barbare de son père Justus, recueillie à la cour de Valentinien, elle capta l'amitié et les bonnes grâces de l'impératrice Sévera et vécut dans son intimité. Ainsi, d'ailleurs, est rendue intelligible cette période de 15 années, entre 353, date de la disparition de Magnence par le suicide, et 368, année où Justina, aux yeux de l'histoire, est consacrée épouse légitime de Valen-
tinien Ier. On voyait mal cette princesse, impératrice même si elle avait été unie au tyran Magnence, errer à travers le monde romain à la recherche d'une position sociale. Le voyageur Gôlnitz en i63i, avait relaté qu'à l'ouverture du sarcophage de Justina, on découvrit une femme très belle (speciosam feminam) Socrate, en son récit, nous a vanté le type de prestigieuse beaute de Justina (ve siècle).
Justina n'était pas chrétienne. « En 385, on « appréhenda de voir rétabli dans l'Empire d'Occident, le « règne de l'Arianisme, par le moyen de l'Impératrice « Justine qui en faisait profession.
« Elle régnait dans l'Italie, l'lllyrie et l'Afrique sous le « nom du jeune Valentinien son fils. Mais quelque autorité « qu'elle eût, la généreuse résistance de saint Ambroise « arrêta l'impétuosité de ce torrent et un second Auxence, « à qui elle avait donné le titre d'archevêque de Milan ne « put pas même y avoir une seule église « (Tillemont, tome I V, page 630).
« Ce fut en ce temps (385) que l'impératrice Justine, « aigrie contre saint Ambroise, crut qu'elle pourrait faire « eclater son ressentiment.
« La mort de Gratien, l'éloignement de l'empereur Théo« dose, la trêve conclue avec Maxime lui laissaient la liberté « d'agir dans toute sa puissance.
« Elle fit un édit au nom de Valentinien, son fils, par « lequel elle permettait aux Ariens l'exercice public de leur « Religion, et déclarait tous ceux qui oseraient s'X opposer « auteurs de sédition, perturbateurs du repos de l'Eglise et « dignes du dernier supplice.
« Justine avait fait élire évêque de Milan un certain « Auxence, scythe de nation, chassé de son pays par ses « crimes, qui n'avait qu'un esprit médiocre mais qui faisait « beaucoup de bruit. Elle fut d'avis qu'il provoquât saint « Ambroise à une dispute publique dans le palais, espérant « de le discréditer s'il refusait, ou, s'il acceptait, le faire « déclarer vaincu par les commissaires gagnés et le chasser « de sa cathédrale ». (Tillemont, Histoire des empereurs pendant les six premiers siècles (6 vol., 1692-1738). En l'année 387 se deroulent les phases de la persécution engagée par Justina contre saint Ambroise et les Orthodoxes. Saint Ambroise avait refusé à l'Impératrice l'ouveiture de l'ancienne basilique de Milan au culte des Ariens. L'abbé Fléchier nous a tracé ce récit mouvementé (t) « Ce fut alors que le dépit, la honte et la haine de l'Impératrice éclatèrent. Elle commanda à tous les officiers des gardes de marcher avec leurs compagnies, et de se rendre maîtres de l'église Portienne à Milan. Ils y allèrent pour exécuter leurs ordres le peuple y courut en armes pour s'y opposer. C'était le matin du dimanche des Rameaux (387) et saint Ambroise, après avoir prêché, allait commencer la messe, lorsqu'on vint lui annoncer cette nouvelle. Il ne laissa pas de célébrer les sacrés mystères et ayant appris dans le temps de l'oblation qu'un prêtre Arien était tombe entre les mains des bourgeois et courait fortune d'être mis en pièces, il envoya ses prêtres et ses diacres pour lui sauver la vie »,
« Cependant l'Impératrice résolut d'aller le lendemain avec (Empereur prendre elle-même possession de l'ancienne Basilique. Elle y envoya des soldats pour l'en saisir, et pour y tendre le dais impérial.
Enfin la persécution cessa lorsqu'elle paraissait plus
(t) Histoire de Tnéodose-le-Grand. Lyon, Rusand, éditeur, 1811
échauffée. Valentinien commença à connaître qu'on abusait de son autorité. La ville émue, la cour indignée, l'armée résolue de vivre dans la communion de l'archevêque, la protection visible du ciel sur les catholiques, les suites lâcheuses que pouvait avoir la passion de Justina, si l'on s'obstinait à la suivre, toutes ces raisons l'obligèrent à remettre les choses en leur premier état, et à rappeler les soldats qui avaient investi les églises »
« L'Impératrice seule demeura endurcie, et se servit des voies les plus noires et les plus exécrables pour se défaire du Saint, montrant par là jusqu'où vont les emportements d'une femme puissante et irritée, jalouse de son autorité et de sa religion. Mais la crainte arrêta sa fureur, et la nécessité des affaires l'obligea bientôt à recourir à ce même prélat qu'elle avait si cruellement persécuté.
« Maxime qui se préparait sourdement à passer en Italie, et qui ne cherchait qu'un prétexte pour justifier son irruption, écrivit une lettre à Valentinien, pour l'exhorter à demeurer dans la religion catholique et à faire cesser la persécution qu'on faisait à saint Ambroise, et à ceux qui tenaient dans Milan le parti de la vérité. Il faisait même entendre qu'il allait se déclarer le protecteur de cet archevêque. Il envoya ordre au même temps aux ambassadeurs qu'il tenait à la cour de Constantinople, de s'y plaindre de ï Impératrice Justina, et de faire agréer qu'il s'approchât dans l'Italie pour y maintenir la religion ».
La haine que Justina ressentait contre l'archevêque de Milan était si vive qu'elle l'incita jusqu'à se livrer à des tentatives criminelles. Meropius Paulinus (Saint-Paulin), gouverneur de la Campanie, consul en 378, revêtu de commandements en Italie (378-393), nous a retracé le récit d'une de ses tentatives « Alius etiam (Sicarius) Gladium « ferens ad cubiculum usque pervenisset ut interficeret
« sacerdotem; sed cum elevasset manum districto Gladio, « dextera obrigente remansit.
« Tunc se missum a Justinâ postquam confessus est « brachium quod inique, cum extenderetur riguerat, sana« tum est confessione » extrait qui se traduit en ces termes « Même un second Sicaire (assassin), portant une épée, « était arrive jusqu'à la couche du Saint dans le but de le « tuer; mais comme il élevait la main tenant le glaive « dégainé, cette main droite demeura inerte et rigide. « Alors, après qu'il eut avoué avoir été envoyé par Justina pour accomplir ce meurtre, il arriva que le bras qui etait étendu inerte et rigide revint à son état naturel, après « cette confession ».
Justina quitte Thessalonique en août 388. Le troisième terme du problème qui s'attache à la destinée de Justina, ne s'est pas dérobé à nos recherches documentaires les textes ci-dessus cités ont infirmé l'enseignement de certains critiques et ont confondu leurs prétentions au titre d'historiens; nous avons démontré que Justina n'a pas été unie au tyran Magnence ensuite qu'elle n'était pas chrétienne, mais bien hérétique attachée au culte des dieux du paganisme et protectrice des Ariens.
Avec Zozime, qui vivait sous Honorius et Theodose, et a écrit l'Histoire romaine en six livres, nous dégageons la vérité et, retenu par le simple développement de son récit, nous apprenons que Justina avait quitté Thessalonique en août 388 et qu'elle s'etait retirée à Milan, où elle vivait encore en 389 et peut-être en 39o.
Sozomène, historien grec, né en Palestine à la fin du iv" siècle, a composé une histoire ecclésiastique, publiée à
Paris pour la premiere fois en 1544 elle embrasse l'époque comprise entre les années 323 et 439 et nous indique que Justina vivait encore à Milan en 389.
Le récit détaché de l'histoire de Zozime au jour où Maxime menaçait Valentinien et sa famille, par sa marche rapide vers l'Italie, nous place au printemps de l'année 387. « Maxime, écrit Zozime, livre IV, s'avance avec diligence « par les montagnes et les lacs, entre en Italie et mène son « armée en Aquilie.
« Valentinien ayant été surpris de la sorte, ses amis « appréhendèrent qu'il tombât entre les mains de son « ennemi et qu'il ne perdit la vie et ils le firent monter sur « un vaisseau avec Justine, sa mère, qui avait été mariée « à l'empereur Valentinien à cause de l'excellence de sa « beauté. Elle avait avec elle Galla, su fille.
« Etant abordés à Thessalonique, ils envoyèrent supplier « Théodose de venger au moins alors les injures faites à « la famille de Valentinien.
0 Justine qui était habile dans les affaires et qui ne tnan« quait pas d'adresse pour trouver des expédients, sachant que « Théodose était fort amoureux de son naturel, mit devant « lui Galla, sa fille qui était une personne d'une excellente « beauté et s'étant jetée à ses genoux et les ayant embrassés ~e~M~e et s'étant jetée à ses genoux et les ayant embrassés « le supplia de ne pas laisser impunie la mort de Gratien. « En faisant cette prière, elle lui montra sa fille qui « fondit en larmes et déplorait ses mal/leurs.
« Théodose fut touché par ses discours et témoigna par « ses regards qu'il était touché de la beauté de Galla. Il « remit l'affaire à une autre temps et leur dit qu'elles eussent « bonne espérance.
« Justine se promit de la lui donner qu'à la charge qu'il « entreprendrait la guerre contre Maxime pour venger la « mort de Gratien et pour rétablir Valentinien sur le trône. « Ayant donc épousé Galla, sa femme Flacilla étant « morte auparavant, il se prépara sérieusement à la guerre.
« L'empereur delivré de l'inquiétude des affaires d'Egypte « marcha à la tête de ses troupes contre Maxime avec une « vigueur incroyable.
« Il mit Justine sur un vaisseau avec sa femme et sa fille et « les envoya à Rome dans la croyance qu'ils y seraient d'autant « plus favorablement reçus que Maxime y était fort odieux « Maxime ayant eu avis que la mère de Valentinien traversait « avec ses enfants le golfe Jorzique, envoya Andragathius les « poursuivre avec des vaisseaux légers, mais il manqua son « coup étant arrivé trop tard.
« Théodose était en Pannonie et ayant pris le pas de l'Apennin, il arriva à l'improviste à Aquilée et y surprit « Maxime; quand on l'eut dépouillé de sa robe impériale « on l'amena devant Théodose qui lui ayant reproché ses « crimes le livra à l'exécuteur.
« Théodose rendit à Valentinien tout ce que son père « avait possédé dans l'empire; il parut avoir toute la recon« naissance qu'il devait à son bienfaiteur et permit à Valen« tinien de gouverner l'Italie et les Gaules comme il le « jugerait à propos.
« Justine sa mère le soulageait autant qu'elle pouvait et « suppléait par sa prudence au défaut de l'âge.
Par ce premier témoignage, nous apprenons que Justina, Valentinien et sa fille la belle Galla, furent mis par les soins de Théodose sur un vaisseau, quittèrent Thessalonique (vers août 388) et arrivèrent à Rome sans encombre; Andragathius, un des familiers du tyran Maxime, qui avait mission de les capturer dans leur traversée de la mer d'Ionie, manqua son coup et trouvant leur piste trop tard les laissa échapper.
L'abbé Fléchier, à son tour, adopta la version de l'histo-
rien grec Zozime, dont l'autorité incontestée et la conscience de narrateur fidèle lui inspiraient le plus grand crédit. Fléchier a écrit [Histoire de Théodose-le-Grand) ut suprà, « Théodose délivre de l'inquiétude causée par l'avis « d'une trahison de quelques-uns de ses officiers, soudoyes « par lesagens de Maxime, y?/ embarquer Valentinien et l'Impe« ratrice Justine (automne 388) et les fit conduire sûrement dans « Rome, soit que l'Italie les eût redemandés, soit qu'il ctût que « leur présence rassurerait ces peuples qui leur étaient encoi e « affectionnés et qui ne pouvaient souffrir la tyrannie de Maxime. « Andragatius qui s'était chargé de garder les Alpes « avait eu ordre au premier bruit de l'embarquement « de Valentinien et de Justine de se mettre en mer avec « tous les vaisseaux qu'il pourrait rassembler et de les pren« dre sur sa route.
« Mais il attendit en vain sur les côtes d'Ionie Valentinien, « qui avait dejà passé le trajet et il abandonna les détroits « des montagnes à Théodose.
Ces pages consacrées à Justina eveillent l'idée que si les critiques ont mentionné la fuite de cette Impératrice abandonnant sa capitale, Milan, accompagnée de son fils Valentinien et de sa fille, accourant à Thessalonique implorer la main puissante de Théodose, ces mêmes auteurs ont négligé ou oublié de relater que cette famille, Impératrice, Empereur et princesse avaient repris la voie du retour et sur l'ordre de ce même Théodose avaient été transportes en Italie, d'où par leur débarquement à Ancône sur l'Adriatique, ils parvenaient à Rome en octobre 388.
Cette mentalité chez certains esprits nous les montre comme refractaires au recours aux textes primitifs, méthode qui leur semble inconnue ainsi au lieu d'instruire, ils languissent et s'atrophient dans les habitudes stériles d'un enseignement faux.
Zozime, si souvent interrogé, cité, invoqué par tous les auteurs, ne parle même pas de la fin de Justina «, Théodose, dit il, « (juin 389), rendit à Valentinien tout ce que son père avait « possédé dans l'empire et lui permit de gouverner l'Italie, « les Gaules comme il le jugerait à propos ».
Enfin, ce même contemporain nous produit un argument qui, par sa valeur documentaire, revêt le caractère d'une démonstration décisive; il nous apprend que « Justine, sa « mère, le soulageait ( Valentinien son fils) autant qu'elle pouvait « et suppléait par sa prudence au défaut de l'âge » en vérité, en ce mois de juin 389, Valentinien comptait à peine dix-huit printemps.
Dans l'Histoire de Théodose-le-Grand par Fléchier, nous lisons, livre III, chapitre CVIII « Théodose, aptes avoir « passé tout l'hiver et une paitie du printemps de l'an 389 à « Milan, en partit pour aller à Rome y recevoir l'honneur du « triomphe. Il y fit son entrée au mois de juin avec toute la « magnificence que méritaient les grandes actions qu'il <̃ avait faites.
« Il voulut que Valentinien qui l'était venu tiouvei après la « défaite de Maxime, partagea avec lui la gloiie e de celte, journée, « il le fit monter sur son char avec le pi ince Honorius qu'il 0 avait fait venir de Constantinople; on portait devant lui « les dépouilles et les représentations des provinces con« quises ».
Après cette journée triomphale de juin 389, le séjour de Théodose à Rome fut de longue durée, puisque sa présence en la ville universelle est encore indiquée en mai 390, aux temps où éclatèrent les troubles de Thessalonique, qui furent réprimés avec une sauvagerie barbare au nom de l'empereur. Le bruit de cette répression en vint à Milan où plusieurs évêques s'étaient rendus avec le dessein d'assister au concile qu'on y devait tenir. Saint Ambroise ayant appris que Théodose avait projeté de quitter Rome et de 'le venir trouver à Milan, lui écrivit d'abord une lettre pour lui
marquer la grandeur de son crime et l'exhorter à faire pénitence (Fléchier, suprà).
Ainsi en cette année 390, l'indice de la présence soit à Milan, soit i Rome, de l'empereur Valentinien Il, disparaît; Théodose est arrivé à Milan en août 390 et, en décembre pour la Noël, il appert qu'il n'avait pas quitté cette métropole, siège de saint Ambroise, et sa résidence épiscopale; l'empereur n'avait même pas achevé son œuvre de paix religieuse dans les premiers mois de l'année 3g et Milan le retenait encore, (Baronius. Annales ecclésiastiques).
Dans les documents du temps, retraçant le rôle historique joue par Justina et reliant son autorité au caractère des entreprises de Valentinien II, son fils, et de Théodose, nous n'avons entrevu, malgré tous les artifices produits par les critiques, aucune indication sous une forme quelconque inclinant à dire, à croire ou à écrire que Justina passa de vie à trépas à Thessalonique en 388 tout démontre l'inanité de cette notation acceptée sans contrôle.
Sozomène, Histoire ecclésiastique, livre VII, chapitre IV, mentionne les mêmes événements.
Dans le même temps, où Théodose préparait son expédition contre Maxime. et son armée, mise en état de faire la guerre, il se rendit en Italie (juin 388). mais l'empereur entra en campagne de son propre mouvement.
« Les soldats de Maxime, soit qu'ils fussent effrayés par l'appareil guerrier que Theodose avait rassemblé contre eux, soit qu'ils obéissent à un sentiment de trahison, tuèrent le tyran tait prisonnier.
« Andragathius, le même qui avait occis Gratien, se précipita dans les eaux du fleuve (la Save) et périt de cette façon. « Ainsi, aussitôt la guerre terminée, comme le meurtre de l'empereur Gratien avait été vengé, Théodose se rendit à Rome, où il reçut les honneurs du triomphe accompagné de Valentinien (juin 38g).
« En ces temps, Théodose ramena les affaires ecclésias-
tiques dans la bonne voie et tout à propos Justina était passée de vie à trépas. »
Ces dernières lignes, servent à déterminer la fixation de l'année où selon l'expression de Sozomène « Justina était passée de vie à trépas » c'est, historiquement, vers la fin de l'annee 3go, que l'empereur Théodose, fut débarrassé des soucis des luttes religieuses, que Justina avait soulevées en Italie, et que la paix religieuse, la foi orthodoxe régnèrent sous la protection éclairée de Théodose ce sont autant de realités qui nous aident à saisir la verité, et en écrivant que Justina disparut de la scène humaine en cette fin de l'an 3go, « où les affaires ecclésiastiques furent ramenées dans la « bonne voie » nous ne nous égarons pas.
Il est permis de noter que les historiens grecs dejà cites, narrateurs, dans le domaine religieux, des événements de leur temps, faits digrres de mémoire, n'auraient pas omis d'inscrire sur leurs tablettes le lieu où s'éteignit Justina, si cette impératrice patenne, dont la vie agitée s'était affirmée avec tant d'éclat, était décédee dans une de ces capitales célèbres, Thessalonique, Rome ou Milan, à l'appelation si souvent répétee dans leurs recits, ce silence nous est un enseignement.
L'épouse de Théodose-le- Grand, décédée à Thessalonique en 388. Au cours de l'été de 388, Théodose, délivré de l'inquiétude des affaires d'Egypte, prit la résolution de marcher à la tête de ses troupes et de mener avec vigueur la campagne contre le tyran Maxime.
Appelé en Pannonie, par les besoins de l'expédition
dirigée contre ce tyran, il partit de Thessalonique, sa résidence impériale habituelle, y laissant son epouse, l'Augusta Mïïa Flacilla et son entourage.
« Dans la croyance que Justina et ses enfants Valen« tinien II et la belle Galla, seraient plus en sûreté à Rome, « où .ils seraient d'autant plus favorablement reçus que « Maxime y était fort odieux, il les fit embarquer sur un « vaisseau.
« Maxime, avisé que la mère de Valentinien II traversait « avec ses enfants le golfe Ionique, envoya Andragathius les « poursuivre avec des vaisseaux legers, mais il manqua son « coup, étant arrivé trop tard (Zozime, livre IV). » Justina et ses enfants arrivèrent sans encombre à Rome, vers octobre 388; leur débarquement s'était effectué à Ancône, dans une marche de cette province de Picenum qu'avait administrée Justus, son père.
Or, sur ces entrefaites, la pieuse Flacilla, l'épouse de Théodose, l'Augusta romaine, terminait sa vie à Thessalonique le 14 septembre 388.
Nous lisons dans l'ouvrage « l'Art de vérifier les dates des faits historiques, » dédié au Roi (Louis XV), par ses très humbles, très obéissants et fidèles sujets le supérieur général et les religieux de la congrégation de Saint-Maur, de l'ordre de Saint-Benoît, œuvre d'une valeur chronologique incontestée, les lignes qui suivent sur la fin de l'épouse de Théodose.
« Théodose, à qui ses grands exploits, et encore plus sa haute piété, son zèle pour la foi, son amour pour l'Eglise, ont mérité le nom de GRAND, était le fils de Théodose, le plus habile général de son temps.
« L'an 395, ce prince, couvert de gloire, plein de bonnes œuvres, mourut saintement à Milan le ty janvier à l'âge de 5o ans, après 16 ans moins 2 jours de règne.
« II est le dernier empereur qui ait possédé l'empire romain en entier; en mourant il le partagea entre ses deux fils Arcade et Honorius.
a Théodose avait épousé i° ALlia Flacilla, morte en odeur de sainteté le 14 septembre 388 (à Thessalonique), après lui avoir donné Arcade (né en Espagne en 377 et Honorius, né le 9 septembre 384
« 20 Galla, fille de Valentinien I6r et de Justina, dont il eut Placidie, femme d'Ataulphe, roi des Visigoths, et ensuite de Constance III, collègue d'Honorius. » (L'Art de vérifier les dates des faits historiques, nouvelle édition, par un religieux Bénédictin. Paris, Desprez, Imprimeur du Roi, 1770. Quelques biographes et aussi la nouvelle Biographie publiée sous la direction du Dr Hoefer, par l'éditeur Firmin Didot, écrivant sans consulter les documents contrôlés, placent la naissance de Placidie (Galla), ta fille née du mariage de Théodose, avec Galla, sa deuxième epouse, fille de Justina, entre les années 383 et 393 comme référence chronologique, le chercheur consciencieux a le droit de se montrer perplexe.
Valentinien II et le gaulois Arbogaste. Zozime, l'historien grec (supra citat), nous apprend que l'empereur Théodose, après la défaite et l'exécution du tyran Maxime, « rendit à Valentinien H, tout ce que son père avait possédé « dans l'empire; il paraît avoir toute la reconnaissance qu'il « devait à son bienfaiteur et permit à Valentinien de goua verner l'Italie et les Gaules, comme il le jugerait à propos. « Justina, sa mère, le soulageait autant qu'elle pouvait et « suppléait par sa prudence au défaut de l'âge. » Mais cette suppléance allait bientôt cesser; Théodose qui 2' SÉRIE. XLIIl' VOLUME. – IÇOQ. 2~]
avait remis le jeune Valentinien en possession de son empire (389J, avait tout a redouter des intrigues, d'un retour de son fanatisme anti-orthodoxe toujours en éveil, en un mot, de la combativité de Justina; aux luttes religieuses avait succédé en Italie une ère de calme, d'apaisement dans les esprits et de soumission chez les ennemis de la foi comme nous l'apprend Sozomène Théodose, en ces temps (389-39o) « ramena les affaires ecclésiastiques dans la bonne voie >>. Il jugea prudent de placer auprès du jeune Valentinien un « homme d'une fidélité reconnue, qui par son crédit et par « son exemple pouvait retenir la cour de Valentinien dans le « devoir, et assister de ses conseils ce jeune empereur qui avait de très bonnes inclinations, mais qui n'avait pas assez « d'expérience dans les affaires. » (Fléchier).
Le choix de l'empereur tomba sur Arbogaste, gaulois qui s'était mis fort jeune au service des Romains et avait suivi Gratien dans ses guerres; Theodose qui connaissait ses grandes qualités, jugea à propos de le laisser en occident et avec le titre de « Magister rnilitum » l'adjoignit à Valentinien II, en qualité de tuteur et delegue impérial.
Enfin, Théodose qui avait passe près de trois ans en Italie, (388-390), et les avait employés à remettre l'ordre dans ces provinces et à instruire le jeune Valentinien qu'il aimait comme son fils, résolut de retourner en Orient.
Mais, dès que l'ordre règna et que la paix fut rétablie, Théodose prescrivit à Valentinien II, et à son tuteur Arbogaste, de suivre l'exemple de ses prédécesseurs, d'imiter la conduite de son père Valentinien I", de repasser les Alpes et de s'arrêter à Vienne, où était le palais des empereurs (vers les premiers mois de 39o).
Justina vivait encore à Milan mais dépossédée de tout pouvoir, de toute autorité, écartée du gouvernement de l'empire d'Occident et séparée de son fils, auprès duquel Arbogaste gouvernait et agissait comme le seul souverain, investi par Théodose de la puissance impériale, elle était
réduite à se soumettre, bientôt ignorée, exilée, ne conservant de sa suprématie évanouie qu'un titre pompeux, AugustaMater, c'est-à-dire l'impératrice mère.
Diva Justina Mater. Ce titre de « DIVA » attaché à la personne de feue Justina, impératrice-mère, avait perdu le caractère cultuel, la valeur solennelle, respectueuse, mystique même que le monde Romain lui avait consacré dès l'origine. Quatre siècles de son application à toutes les impériales épouses défuntes, avaient détrôné, altéré, diminué le sens de l'allégorie primitive.
Justina, épouse et mère d'empereurs romains, était qualifiée de son vivant du titre d'ALGUSTA Tacite nous apprend que ce titre était accordé aux imperatrices de Rome, « mais, dit-il, « il était aussi quelquefois attribué aux filles et aux sœurs de « l'empereur régnant » cette dignité d'Augusta suivait toute impératrice durant sa vie et entourait sa personne d'une respectueuse considération en notre siècle, le xx", en l'an 1909, l'opinion publique, la tradition ont conservé cet antique usage. Qui ne connaît cette Impératrice errante qui, de sa grandeur passée, n'a garde que le titre purement décoratif de Sa Majesté ? Combien d'autres personnalités, femmes filles ou mères d'empereurs ou de rois détronés ou défunts, traversent la société saluées du seul titre de « Majesté » qualité correspondante à celle d'Augusta chez les Romains. Dans la société romaine, une dignité plus élevée que celle d'Augusta avait été créée les empereurs à partir d'Auguste, furent divinisés après leur mort, un culte Augustal fut instauré, et cette divinisation s'étendit aux défuntes impératrices. Hippolyte Bazin, l'érudit auteur de Vienne et Lyon
Gallo-romains, nous explique l'origine dans la Gaule romaine, de ce culte nouveau et de la déification des maîtres impériaux défunts, il écrit:
« Après cet examen du temple de Vienne, au point de vue <. architectural, il nous reste à en parler au point de vue de « sa destination primitive et de son importance historique. « Nous sommes à peu près fixés sur ce sujet par l'inscription « en lettres de bronze, dont les trous de scellement appa« raissent encore, au-dessous du fronton, sur la frise et sur « une partie de l'architrave
OIVO AVGUSTO OPTIMO MAXIMO ET DIVAE AVGVSTAE
Au Dieu Auguste, très bon, très grand et à la divine Augusta « On connaît les circonstances dans lesquelles furent « élevés les Temples en l'honneur de l'empereur. « Lorsque, « suivant le mot de Tacite, l'obéissance à un seul eut apporté « le repos au monde fatigué de discordes, la reconnaissance « publique se manifesta avec une intensité, qui ne connut « plus de limites. On se prit à considerer Auguste, dont le « pouvoir bienfaisant, procurait la paix à tant de millions « dliommes, comme un véritable Dieu, et on ne lui ménagea » pas les adulations. Il résista d'abord avec une modestie « calculée, et défendit qu'en Italie on lui élevât des temples « mais il le permit aux provinces, à la condition d'associer « la divinité de Rome a la sienne. »
« Bientôt sous prétexte de rehausser la grandeur de l'Em« pire, il décida que l'image de son génie serait placée à côté « de celle des dieux tutélaires de la cité, dans tous les larai« res publics. Lorsque après sa mort, le sénat eut décrété son « apothéose, les villes s'empressèrent de lui consacrer des sanctuaires.
« Quelques années après, sous le règne de Claude, les
« Viennois associèrent, comme à Rome, le culte de la divine « Augusta, l'impératrice Livie, à celui du divin Auguste' i ). » Après la mort d'Auguste (14 ans après J.-C.) un SénatusConsulte investit Livia, sa veuve, du titre de « prêtresse Augustale » ce fut le premier exemple de cette dignité qui passa dans la personne de Livia au sexe féminin, et de Rome, se répandit dans les autres villes de l'Empire leurs devoirs étaient de rendre un culte à la mémoire des empereurs ou des princes.
Dès lors, et jusqu'à la disparition de l'empire d'Occident, le titre de Divin (Divus), accompagna tout empereur défunt, dans la mémoire publique, dans les inscriptions funéraires et dans les actes de reconnaissance plus ou moins hyperboliques que gravaient sur stèles ou sur les monuments d'édilité publique les villes ou les provinces.
D'autre part, la qualité de DIVA, que Claude institua en l'honneur de Livia, l'épouse d'Auguste, fut attribuée dans l'empire d'Occident aux seules impératrices défuntes de Rome cette divinisation hypothétique s'imposa à travers les siècles de domination latine, mais les rites cultuels ne tardèrent pas à disparaître, et seuls survécurent les titres de DIVUS et de DIVA.
L'impératrice Justina ensevelie à Valence. Son sarcophage. Avec l'aide des témoignages écrits laissés par les historiens grecs, contemporains de Justina, nous avons reconstitué les étapes de la vie de cette impératrice à travers (t) Vienne et Rome Gallo-romain, par Hippolyte BAZIN, Pans, imprimerie nationale, 1891.
ses destinées agitées. Nous l'avons montrée après la privation de son père Justus, occis par un meurtrier aux gages de l'empereur Constance, recueillie par Sévera, l'épouse de Valentinien Ier nous l'avons vue gagner l'amitié, l'affection de cette princesse et devenir sa fidèle compagne. Sa beauté corporelle, sa pureté de forme, ses grâces naturelles surprises au bain, émeuvent et troublent Sévera l'empereur au récit de cette perfection physique est touche jusqu'au fond de l'âme. Epris des charmes de Justina, Valentinien, même du vivant de son épouse, mit tout en œuvre pour l'épouser i nfin en 368, Sévera décéda et Justina fut consacrée femme légitime de Valentinien I"; cette princesse était alors âgée d'environ 22 ans. Son époux, parti de Trèves au commencement du printemps de 3y5, gagna ITllyrie à grandes journées, et périt de mort violente le 17 novembre 3/5, à l'âge de 55 ans, après 12 ans de règne. Le fils de Justina et de Valentinien, fut proclamé César Auguste sous le nom de Valentinien II, par l'armée de Pannonie, le 22 novembre 3/5, dans la ville de Acinque Valentinien II, né sur la fin de 371, n'avait que 4 ans. Le rôle politique de cette femme, fertile en expédients, fière, impérieuse, vouée au culte des dieux du paganisme et protectrice de toutes les impiétés des Ariens, commença, sous le nom de son fils, un règne qui dura 14 années. Le crédit qu'elle avait pris sur l'esprit de son fils, causa de grands troubles dans l'église orthodoxe, comme nous l'avons exposé.
En 387, presque dépouillée de ses Etats par le tyran Maxime, elle se réfugia avec son fils Valentinien et sa fille la belle Galla, auprès de l'empereur Théodose à Thessalonique.
En août 388, sur les ordres de Théodose, elle quitte cetie ville, s'embarque avec ses enfants sur un vaisseau mis à sa disposition, traverse le golfe d'Ionie, échappe à la poursuite d'Andragathius, général de Maxime, monté sur des vaisseaux légers, envoyé par Maxime avec mission de la capturer, enfin anivesansencombre à Rome en l'automne de 388.
En juin 389, elle assiste à Rome, aux honneurs du triomphe que Théodose partagea avec le jeune Valentinien II, qu'il remit en possession de tous les Etats de l'empire d'Occident. En 3go, Justina vivait encore à Milan, Théodose avait gardé auprès de lui le jeune Valentinien, qu'il élevait dans l'administration del'Empire et qu'il aimait comme son fils. En cette même annee 3go, Théodose adjoint à Valentinien le gaulois Arbogaste, élevé à la plus haute dignité dans l'armée, avec la mission d'aider Valentinien de ses conseils, de le guider, de le maintenir dans les devoirs de sa charge et de le surveiller étroitement.
En même temps, Théodose, comme suite à cette mesure, ordonnait à Valentinien d'imiter l'exemple de son père, Valentinien Ier, de repasser les Alpes, et d'occuper sa résidence de Vienne, siège de son gouvernement (printemps 39o). Par cette décision, Justina descendit du pouvoir, séparée de son fils et bientôt après le départ de Théodose, « qui avait ramené dans la bonne voie les affaires ecclésiastiques » selon l'expression de Zozomène, seule, comme exilée en son empire Justina passa de vie à trépas » (Sozomène).
La question ouverte est de préciser le lieu où Justina finit ses jours nous ne mettons pas en doute que si Sozomène (Hermias) (2a>Çd^ivof) l'historien ecclésiastique, qui a compose le récit des luttes soutenues contre les Ariens, qui vivait à Constantinople sous Théodose-le-Jeune, qui a intéresse ses contemporains à la destinée de Justina, il n'est pas douteux, disons-nous, que cet écrivain réputé, n'eût pas manqué de compléter sa phrase caracteristique « Justina passa de vie à trépas », en nous indiquant le nom du lieu, s'il etait venu a sa connaissance.
De même, si ce trépas était survenu dans une des villes témoins des événements qu'il a contes, Milan, Rome, Cons-
tantinople, Thessalonique, ou tout autre cité grande ou petite d'Italie, ou de l'empire d'Orient, il aurait transmis ce nom à la postérité. Le critique a le droit de déclarer que le trépas de Justina ne fut accepté par lui que comme un événement ordinaire, sans rechercher ou même vouloir connaître en quel lieu il advint.
Il s'en suit que la particularité relevée par Aymar du Rivail, dans sa visite à Valence, vers 1572 « que Justina, épouse de « Valentinien Ier et mère de Valentinien II, fut ensevelie à « Valence où l'on y voit son sarcophage en marbre », particularité rapprochée de celle vérifiée par le voyageur danois Abram Golnitz, dans son arrivée à Valence eni63i, ainsi décrite: « les bâtiments du propriétaire du logis du Dauphin renferment un sépulcre de marbre d'une seule pierre; ce sarcophage, dit-on, était celui occupé par une certaine impératrice paienne on y lit seulement les mots suivants soit D. IVSTINA M.
soit: DIVA JUSTINA MATER;
s'affirment avec leur valeur documentaire.
Ces deux particularités, répétées à un siècle de distance par deux voyageurs, qui s'ignoraient, apparaissent, après notre documentation, avec leur véritable caractère de sincérité.
11 reste à repondre à une objection que l'on serait en droit de soulever, la voici comment affirmer ou démontrer même que la fin des jours de Justina ait eu Valence comme témoin ? notre réponse sera courte et judicieuse.
En l'année 3go (printemps), le rôle politique de Justina est tini le gaulois Arbogaste, imposé au jeune Valentinien, comme delégué de Théodose, avec mission de le conseiller, de le guider et surtout de le surveiller, a été substitué à son omnipotence et à sa direction, auprès de son fils; elle est descendue et même chassée du pouvoir impérial d'arbitre des destinées de l'empire, Justina est mise au rang des com-
parses. Dejà privee de la compagnie de ses deux filles, Justa et Grata, qui avaient réprouvé ses menées anti-religieuses, condamné son zèle arien et surtout sa persécution contre saint Ambroise, Justina fut frappée aussi dans son affection et dans sa destinée par le rescrit de Théodose, renvoyant son fils Valentinien dans ses Etats en Gaule, sous la conduite du gaulois Arbogaste.
L'historien étudiant la psychologie de cette femme, saisit l'ardent désir qu'elle nourrissait de répondre à cette sorte de provocation par l'espoir de reprendre son crédit sur l'esprit de son fils. Sa solitude, son abandon à Milan lui pesaient Vienne, la résidence impériale, l'attirait, la sollicitait, l'appelait Justina dut s'arrêter à la résolution ferme de s'y transporter, dût-elle par ce voyage déplaire à Théodose, enfreindre ses ordres et même le gêner dans ses projets. Sa tentation fortifiait sa résolution, d'un élément rendant facile ce projet qui tourmentait son esprit.
La grande voie de communication entre la Gaule cisalpine et la Gaule transalpine était celle de la vallée de la Durance; Milan, la résidence de Justina, en était dans tous les sens le point de départ. Cette route directe était désignée dans l'Itinéraire d'Antonin sous la formule a A Mediolano ~er « Alpes Cottias ad Viennam » c'est-à-dire « route de Milan à Vienne par les Alpes Cottiennes La voie s'engageait dans la vallée de la Drome se dirigeant ci Valence et Vienne, par B'w~tMM, Gap, le Mont-Saléon, Luc-en-Diois, Die, Aoste, Valence, Ursolis (le Péage-de-Roussillon), et enfin Vienne. Lenthéric, dans les voies antiques de la Gaule par la région du Rhône (le Rhône, tome premier), nous a noté étape par étape les relais de cette grande voie de communication, la seule fréquentée dans le trajet de Milan à Vienne, par sa traversée par les cités des bords de la Drome et par Valence. Lenthéric a décrit ce tracé en ces lignes
< Vienne, tout comme Lyon, était un centre de rayonnement. Six routes y aboutissaient, deux venaient des Alpes, deux de Lyon, une d'Arles, la dernière de l'Helvie.
Mais, la grande voie de co')!fM!<Ctt/tOft entre /j Gaule Cisalpine et la Gaule Transalpine était ce~ë vallée de la Durance.
') MILAN ÉTAIT TOUJOURS LE POINT DE DÉPART
« La route gagnait d'abord en droite ligne Pavie (Ticeno), et la vallée du Pô, qu'elle ne quittait qu'à Turin ~TaM-nto~. Elle passait ensuite à Rivoli ~dOc/ap!<));),eiSuze~Se~MS:'oMe~ à Oulx (ad Matrh' elle escaladait alors le Mont-Genèvre, ~Mo~s-M<!<ro)ta~, et descendait dans la vallée de la Durance par Briançon (D?r~a~:o), Embrun CE~Mro~MMo), et Gap (Vapincum).
<' De là, la voie s'engageait dans la vallée de la Drôme et marquait ses étapes par Mont-Saléon (Mons-Seleucus), Hautes-Alpes, ~LMCt~, Luc, Drôme; ~DeaBoMf:<;or:<Mt~ Die, ancienne capitale des Voconces (Drôme), ~M~s~, Aoste-enDiois (Drôme), (Valentia), Valence, (Drôme) ('f7fM/s~, SaintVallier et enfin ~V:e~)M~, Vienne, Métropole des Allobroges. « Cette route est désignée dans l'itinéraire d'Antonin sous la rubrique A Mediolano /)e! ~4/~)M Coltias, I~eM~aw LENTHÉRIC, Les voies antiques de la <'e~:ot! du Rhône. Le Rhône, tome premier).
Une autre considération documentaire surgit avec la précision d'un nouvel argument. Ce ruban de route de quatre cent neuf mille pas d'étendue, se dévidant de Milan à Vienne par la vallée de la Drome, avec son étape à Valence, avait été maintes fois parcouru par Justina dans les deux sens d'aller et de retour. Valentinien ler, son époux, malgré l'instabilite de ses changements de résidence, avait longuement séjourné à Vienne et Valence l'avait, aussi, souvent retenu dans ses murs, Justina était aux côtés de son époux en ces déplacements. Ce trajet n'avait à jeter aucun émoi dans son esprit; ses yeux avaient déjà contemplé les sites, admiré les désordres d'une nature en délire; les cités, éparses sur les bords du i uban,
l'avaient toujours accueillie avec allégresse un nouveau parcours à travers ces régions lui inspirait toute sécurité et l'espérance au cœur elle foulait à nouveau cette voie à ses pas douloureuse.
Chorier, déjà, dans son Histoire du Dauphiné (tome ["), avait écrit f< le grand chemin par ces mêmes Alpes depuis « Mitan jusques à Vienne avait quatre cent neuf mille pas « d'étendue; il ne différait pas de la voie commune jusqu'à « Gap et de là il était continué jusqu'à Vienne par cette « route
« Vapinco (Gap),
a Montem Seleucum (Mont-Saléon), « Lucum (Luc-en-Diois),
« Deam Vocontiorum (Die),
a Augustam (Aouste),
«VatentiamfVatence),
« Ursolin (Le Péage-de-Roussillon), « Viennam (Vienne),
« Lugdunum (Lyon).
C'est dans ce voyage entrepris par Justina, vers la fin de l'année 3oo, obéissant à ce sentiment bien maternel d'aller revoir son fils Valentinien à Vienne, que l'analyse de tous les textes que nous avons étudiés, traduits et évoqués, nous a acquis le droit de déclarer que l'impératrice Justina fut surprise par la mort dans ia ville de Valence, où elle fut ensevelie. Et dans ces conjonctures, la phrase lapidaire et énigmatique de l'historien Sozomène « en ces temps, Théo« dose ramena les affaires ecclésiastiques dans la bonne voie « et TOUT A PROPOS Justina était passée de vie à trépas perd son caractère obscur; cette mention « tout à propos » sortie de la plume d'un historien grec qui avait vécu dans l'intimité de Théodose-ie-Grand et de Théodose If, est la
meilleure indication que Théodose vit sans regret la mort de Justina, qui avait semé, durant son existence, tant de sujets de discorde. C'etait à ses yeux un soulagement.
Le sarcophage. Une nouvelle question pourrait être posée, celle-ci « Comment, dira-t-on, concevoir qu'une Impératrice romaine eut comme sépulture un sarcophage de si modeste apparence? A ce point d'interrogation, Hippo~fe .Ba~t'K, l'érudit, auteur de Vienne et Lyon, GalloRomains, va nous fournir une réponse concluante au sujet des sarcophages que renferment les musées de Lyon et de Vienne, il nous sert en ces termes une leçon appréciée Vienne Antique. Quant aux sarcophages, ils n'ont également en général d'autre décoration que l'inscription qui se développe sur l'un des grands panneaux; elle est parfois entourée d'un cadre en moulures avec queues d'aronde, portant à l'intérieur les deux lettres traditionnelles: D. M. (Diis Manibus). Seul parmi les sarcophages du Musée, celui de Nigidia Aureliana et celui de Sextus Sollius Demosthenianus portent l'image de deux génies ailés, sculptée à droite et à gauche du cadre qui renferme l'inscription. Lyon Antique. Les sarcophages de Lyon ne diffèrent généralement pas des stèles au point de vue de la simplicité et « même de l'absence de decoration. Ce sont de grandes « auges de pierre, avec couvercle EN FORME DE rotr. La «face latérale porte l'inscription qui est <H.e~ souvent « enfermée dans un cadre en moulures, terminé à droite et « à gauche en queue d'aronde. D'ailleurs pas d'autre orne« mentation, ni guirlandes, ni génies, ni têtes de bélier ou « de taureau comme sur les sarcophages d'Artes. Les artistes « /~OM~M; ne paraissent pas ~'e~re jamais mis beaucoup en
« frais d'imagination. Quand on voulait pour soi ou pour « sa famille, une tombe particulièrement somptueuse, on la « faisait venir toute sculptée de Grèce.
Remarquons seulement que M. Marius Villard, l'érudit « Annalistes Valentinois nous apprend « que la nature « de la pierre formant le sépulcre proprement dit de Justina « n'est pas ici de ce calcaire connu sous le nom « de pierre « de choin », que ce n'est ni du Crussol, ni du Chomérac; « c'est un marbre de co:</eMr jaune, ressemblant beaucoup au << M?a)~?'e MMMe l'Echaillon, près G;eMO~/e, mais dont nous « ne saur ions fixer exactement la ~ofeMMee ».
Hippolyte Bazin (supra citat) nous dit également que les familles gallo-romaines de la region Lugduno-Viennoise étaient obligees de se fait expédier ~'7<a/:e les sarcophages e;t marbre, nos contrées n'exploitaient pas des brèches de marbre ou des gîtes de cette nature et l'usage ne les employait pas en ces temps.
L'Inscription. L'interprétation de l'inscription sommaire lapicidée sur la face latérale du sarcophage ne tombe pas sous le coup de la discussion, car sa formule ne présente aucune équivoque.
L'épigraphie funéraire et les règles de la langue latine sont soumises à des formules rigides que l'on ne peut transgresser. Les « Dii Manes », les Dieux manes, appellation rituelle accordée aux âmes des défunts, ne se mêlaient pas aux sigles, signes isolés, ou lettres initiales gravées dans les inscriptions comme abréviations des titres, dignités, profession, fonction, grades militaires attachés à chaque défunt.
Justina, l'~M~MS/a Mater, l'Impératrice Mère, était divinisée hiérarchiquement, pour ainsi dire, par son trépas et son titre seul était inscrit sur son sarcophage D JVSTINA M. « Diva Justina mater ",soitc divine Justina (Impératrice) mère x c'était sa seule qualité, son seul titre, sa seule dignité.
En règle latine comme linguistique et comme sujet de formule funéraire, l'interprétation qu'ont adoptée à tort certains critiques, exigerait cette face D. JVSTIN~E, M. c'est-à-dire a aux Dieux Mânes de Justina o l'inscription du sarcophage refuse cette version erronée; nous n'insistons pas.
La tâche que nous avaient confiée quelques membres de la Société d'Archéologie de la Drome est achevée. Nous avons fouillé, pour notre étude, l'oeuvre des historiens grecs et latins des <v et v" siècles et, par une analyse logique des textes et des événements du temps, nous avons reconstitué toutes les étapes de la vie agitée de Justina, épouse et mère d'Empereurs romains, femme imperieuse d'une grande énergie et d une rare beauté.
Le mystère que cachait le sarcophage portant l'inscription D. Justina M. nous paraît éclairci le sarcophage a livré son secret. En cela, nous aurons enrichi de quelques pages inédites les fastes de la ville de Valence.
A.HÉRETTA,
/nspec<eut' de t'~sststance pu~hguc de la Drome.
SÉANCE D U 20 JUILLET 1909
PRÉ&tDhNCt. DE M. BRUN-DuHAND
H est procédé, au début de la séance, à la nomination d'un vice-président en remplacement de M Alphonse NUGUES. Le nombre des membres présents ou ayant envoyé leur procuration est de 47. Au dépoutHement il est trouvé 7 voix perdues sur divers noms, i bulletin blanc, 6 voix à M. Vallentin du Cheylard et à M. Marius VtUard, architecte honoraire de la ville, bien connu par ses travaux historiques'sur Vaience. Le président annonce la nomtnation de M. ViLLAHb, à la vjce-préstdence; celui-ci le temerc~e aussitôt, ams< que les membres de la Société, pour l'honneur qui lui est fait; d assure de son dévouement à t'œuvre entreprise il y a 43 ans. Sur la présentation de M. Brun-Durand et de M. Charles Bellet, sont proclamés membres titulaires M. le capitaine CnARETON, à Privas, et M. de SAtNT-PuLGENT, à Montbrison, et membre correspondant M. Ros'rOLLAND, professeur au Lycée.'
Sur la présentation de M. Lacroix et de M. Mellier, est aussi nommé membre titulaire M. BÉRETTA, inspecteur de l'Assistance publique.
La Société d'Archéologie, réunie en séance, vote des félicitattons à M. Roger Vallentin du Cheylard, pour la médaille de vermeil qu'il a obtenue au Congrès d'Avignon (la plus haute récompense décernée), et pour sa nomination d'inspecteur des monuments historiques de l'Ardèche en remplacement de M. le vicomte de Montravel
A. LACROtX.
TABLE ALPHABÉTIQUE D U TOME XLIII
(ANNÉE 1909)
ANNIBAL EN GAULE ET EN ITALIE, par M. le Marquis DE LA BAUMEDE PUY-MONTBRUN t~3 B)BnoGRApmE,parM.A.LACROix. no BtBHOTHÈQUE (LA) DE VALENCE, par UN BIBLIOPHILE 215 CHRONIQUE, par M. A. LACROIX ET M. Charles BELLET ;o8, 221, 333 DAUPH)NÉ(LR)AL'ACADEMtEFRANÇA)SE,parM.BRUN-DuRAND. 26g, 346 DÉDBERATiONS CONSULA!RES DU COMTÉ D'ALBON, (DE )~o8a '7~3), par M. Prosper VALLERNAUD go, ~5t, 238, 38o ESPENEL, par M. A. LACROIX 105 EuGÈNE VILLARD, par M. Henry VASCHALDE i I HISTOIRE DE SArffT-PAUL-Tpots-CHATEAux, par M. l'abbé Louis FILLET 65, t83 3;3 lLE-EvE(L'),parM.A.LACROi)[ 176 ISÈRE (L') A BLAUMONT-MoxTEux, par M. l'abbé FROMENT 70 NÉcROLOG<E,parM.A.LACRO:x. ~[7, 33t NOTICE SUR LE TAUROBOLE DE TAIN, par M. Charles BELLET. 255, 365 POPULATION (LA) DES TAILLABILITÉS DU DAUPHINÉ EN f6a8, par M. R. V. C 63, !4<, ~M SÉANCE DU 26 octobre tcoS,par M. A. LACROtX. 107 DUltfevriertûOQparM.A.LACROtX 2:0 DU i mai 1 gog, par M. LACROIX ET BELLET 332 Du 20 juillet toog, par M. LACROtx ~y TABLEAU DEa MEMBRES DE LA SoCtETÉ 5 TOPONYMIE DE LA DRÔME, DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE DES COMMUNES, PBUPLES ANCIENS, FLEUVES, RIVIÈRES, MONTAGNES DU DEPARTEMENT M LA DROME, par M. A. BERETTA 33, 21, 282 TRAMWAY ['E) DE VALENCE A PONT-EN-ROYANS, par M. A LACROfX. 25, )t3, 225, 33y UNE ÉNIGME HISTORIQUE A VALENCE. QUI ETAtT JuSTJNA, par Monsieur Amédée BERETTA 409 UNEPAGED'mSTOtREDELAFROVtNCE.parM.A.LACROtX. t?~
Le Sect-etatt-e-Gera~ .1. L~C~OZ~.
REVUE TRIMESTRIELLE
BULLETIN
DE
LA SOCIÉTÉ DÉPARTEMENTALE DARCHÈOLOGtE KT
BE STATISTIQUE DE LA DROME
ANNÉE 1909 (AVRIL)
i69' UVRAtSON
VALENCE
AU SECRÉTARIAT DE LA SOCIÉTÉ, RUE FARNERIE, 31 IMPRIMERIE DE JULES CËAS ET FILS
TABLE DES MATIÈRES de la 160* LivraisoiY
i LE TRAMWAY DE VALENCE A PONT-EN-ROYANS, par A.LACROIX )t~ 2. TOPONYMIE DE LA DpOME. DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE DES COMMUNES, PEUPLES ANCIENS, FLEUVES, RIVIÈRES, MONTAGNES DU DEPARTEMENT DE LA DRÔME,parM.A.BÉRETTA. 121 3. LA POPULATION DES TAILLABILITÉS DU DAUPHINÉ EN 1698, par R. V. C. 141 f 4. DÉLIBÉRATIONS CONSULAIRES DU COMTÉ D'ALBON (DE 1708 A 174?), par Prosper VALLERNAUD [;i I 5. ANNIBAL EN GAUL~ ET EN ITALIE, par le Marquis de la BAUME DE PUY-MONTBRUN [7~ 6. L'tLE-EvE, par A. LACROIX )76 7. UNE PAGE D'HISTOIRE DE LA PROVINCE, par André LACROIX 177 8. HISTOIRE Db SAINT-PAUL-TROIS-CHATEAUX, par M. l'abbé FILLET [8~ o. LA BIBLIOTHÈQUE DE VALENCE, par un Bibliophile 21; 10 NÉCROLOGIE, par M. 'André LACROIX 217 I l. SÉANCE DU n février 1900. par M. A. LACROIX 2iç 12. CHRONIQUE, par M. A. LACROIX. 22) -a~y-
« Ltt Société laisse à chaque auteur l'entière responsabilité des opinions qu'il f'!H~.
Nota. Les cotisations sont exclusivement recouvrées par les soins du' CRÉDIT LvoNNAis, chargé de présenter les quittances.
En cas de changement d'adresse, prière d'en informer de suite, le Trésorier, M. Etienne MELHER, l'illa des Lierres, à Valence-sur-Rhône.
Pl c REVUE TRIMESTRIELLE BULLETIN
DE
LA SOCIÉTÉ DÉPARTEMENTALE DARCHÉOLOGIE ET
DE STATISTIQUE
DE LA DHOME
ANNÉE IQOQ (JUILLET)
i70 LIVRAISON
VALENCE
AU SECRETARIAT DE LA SOCIÉTÉ, RUE FARNERIE, 31 IMPRIMERIE DE JULES CÉAS ET FILS
TABLE DES MATIÈRES
de la 170' Livraison
I. LE TRAMWAY DE VALENCE A PONT-EN-ROYANS, par A. LACROIX 22; 2. DÉLIBÉRATIONS CONSULAIRES DU COMTÉ D'ALBON (DE 1708 A 1743), par Prosper VALLERNAUD 238 3. NOTICE DU LE TAUROBOLE DE TAIN, par M. Charles BELLET. 1 2! S LE DAUPHINÉ A L'ACADEMIE FRANÇAISE, par M. J. BRUN-DURAND 269 5. TOPONYMIE Db. LA DpÔME. DICTIONNAIRE ÉTYMOLOGIQUE DES COMMUNES, PEUPLES ANCIENS, FLEUVES,
RIVIÈRES. MONTAGNES DU DÉPARTEMENT DE LA
DRÔME, par M. A. BÉRETTA 282 6. HISTOIRE DH SAINT-PAUL-TROtS-CHATEAUX, par M. l'abbé FILLET f NÉCROLOGIE, par M. André LACROix 33I · 8. SÉANCE DU 10 mai 1000. par M" LACROix. et BELLET ~2 0. CHRONIQUE, par M. BELLET. :j~
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Nota. – Les cotisations bout exclusivement recouvrées par les &oin~ du CanotT LvoNNAis, chargé de présenter les quittances.
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-911- REVUE TRIMESTRIELLE
BULLETIN
DE
LÀ SOCIÉTÉ DÉPARTEMENTALE DARCHÉOLOGIE ET
DE STATÏSTtQUE
DE LA DROME
ANNÉE igog (OCTOBRE)
171' LIVRAISON
VALENCE
AU SECRETARIAT DE LA SOCIETE, RUE FARNERIE, 31 IMPRIMERIE DE JULES CÉAS ET FILS ~M
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I. LE TRAMWAY DE VALENCE A PONT-EN-ROYANS, par A.LACROIX 337 2. LE DAUPHINÉ A L'ACADÉMIE FRANÇAISE, par M. J. BRUN-DURAND 346 3. NOTICE SUR LE TAUROBOLE DE TAIN, par M. Charles BELLET. e ~6; DÉLIBÉRATIONS CONSULAIRES DU COMTÉ D'ÂLBON (DE 1708 A 174~), par Prosper VALLERNAUD 380 LA POPULATION DES TAtLLABILITÈS DU DAUPHINÉ EN t6ç8,par R. V. C ~oo 6. UNE ÉNIGME HISTORIQLE A VALENCE. QUI ÉTAIT JUSTINA ? par M. A. BERLTTA ~OÇ 7.SÉANCEparM.A.LACROix. 447 8. TABLE ALPHABÉTIQUE DU TOME XLIII ~48
« La Societé laisse à chaque auteur l'entière responsabilité ~M~!H!O~H'~6')!if<.)) »
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COMMUNICATION INTERESSANTE
La Société d'Archéologie et de Statistique tient à la disposition de ses Membres titulaires et correspondants, au prix de 80 francs l'une, quelques collections complètes du BULLETIN (1866 à 1906 inclus), sott trente-neut volumes tn-8" raisin, comprenant chacun plus de 400 pages. Comme d'autre part il existe un certain stock ne pouvant former des collections complètes, les livraisons qui le composent, divisées en trois séries, suivant leurs dates, pourront etre livrées aux prix suivants: Première Série du n° i au n* 4.5 (année 1878)
Aux membres de la Société, habitant Valence. o.~5 Aux membres de la Sociéte, n'habitant pas Valence 0.40 Aux personnes ne faisant pas partie de la Société o.5o Deuxième Série du n° 46 au n° 140 (année ino~)
Aux membres de la Société, habitant Valence. o.~5 Aux membres de la Société n'habitant pas Valence. 1 u Aux personnes ne faisant pas partie de la Société :.a5 Troisième Série du n" t4i au n° 160 (année 1907)
Aux membres de la Société, habitant Valence. i.5o Aux membres de la Société, n'habitant pas Valence. i.y5 Aux personnes ne faisant pas partie de la Société. 2 » Frais de port en sus.
Une table des principaux articles publiés dans le Bu//cftK de la .Société d'Archéologie et de St~t;.st<~Me du département de la Drôme, depuis sa fondation (t866), jusqu'au t" janvier t<)o6, insérée dans les précédentes livraisons, rendra facile les recherches pour le choix des livraisons. Cette table sera communiquée aux personnes qm en feront la demande.
La Société peut aussi leur céder, au prix de 3 francs le volume, les 5*, 6', y et 8' tomes de L'ARRONDISSEMENT DE MoNTÉLiMAp, par M. A. Lacroix. (Les tomes 7, 2 et Mttt épuisés). Le 4' se vend 4 francs. Le IV' tome comprend les communes de ~-a Garde-Adhémar, les Gr~M~-Gonf~)-~M, Grignan, Lachamp.
Le V' La Laupie, Manas, .~t'MHM, Mont~oucAer, .MbMt&rtsoM, Montélimar. (400 pages).
Le VI' Montélimar (fin). Montjoux, Montjoyer, Montségur, Orcinas, Le Pégue. (400 pages).
Le Vil' Pierrelatte, Poet-Laval, Pont-de-Barret, Portes, .f'M)~:r<M, Rac, Re~M~t~c, Rochebaudin, Koc~e/brt, ~oeAeg'M~e, La Roche, 5a;MtSecret, Roussas, Rousset, .Sa!Mt-AMrcf/Sau~f, ~t~f-f~ntaMot!, ~'<Kf-P<!K/-7'ro!ï-C/!<!ff<!M-< (456 pages).
Le VIH' Satut-Restitut, Salles, Sallettes, Sauret, Savasse, Solérieu, ~M7C-oKMC, 7'~H/H<M, y~-M!M, La Touche, Les Tourettes, Tulette, ~Kr;c, Vesc. (3o6 pages).
MEMOIRES DE EUSTACHE PIEMONT ()~72-1608)
par J. BpUN-DuRAND – Prix 6 fr.
Un tort volume in-8* jésus, 666 pages.
Pour renseignements et demandes, s'adresser au Secrétariat de la Société, rue Farnerie, ~t, à Valence.
Avis ti~s iopoptant
Les cotisations anerentes à l'exercice 1909, seront exclusivement recouvrées par les soins du Crédit Lyonnais, qui fera présenter les quittances le 31 MARS 1909.
En cas de changement d'adresse ou d'absence prévue pour cette date du mars 7909 et aûn de s'éviter des frais de retour onéreux, prière d'en informer avant le 15 mars 1909, dernier délai, le Trésorier, M. Etienne MELLIER, Villa des L~res. à Valence-surRhône.
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La Société d'Archéologie et de Statistique tient à la disposition de ses Membres ntulaires et correspondants, au prix de 80 francs l'une, quelques collections complètes du BULLETIN (1866 à <oo6 inclus), soit trente-neut volumes m-8° raisin, comprenant chacun plus de 400 pages. Comme d'autre part il existe un certain stock ne pouvant former des collections complètes, les livraisons qui le composent, divisées en trois séries, suivant leurs dates, pourront être livrées aux prix suivants: Première Série du n° i au n* 45 (année t8y8)
Aux membres de la Société, habitant Valence. o.:5 Aux membres de la Société, n'habitant pas Valence 0.4.0 Aux personnes ne faisant pas partie de la Société o.5o Deuxième Série du n° 4.6 au n° 14.0 (année 190~)
Aux membres de la Société, habitant Valence. o.y5 Aux membres de la Société n'habitant pas Valence. t » Aux personnes ne faisant pas partie de la Société 1.25 Troisième Série du n° t~.t au n° [60 (année too~)
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Une table des principaux articles publiés dans le Bulletin la Societe ~rc/teo~ogie et de Sf~Mf:~M du département de la Drôme, depuis sa fondation (;8ôo), jusqu'au t" janvier 1006, insérée dans les précédentes livraisons, rendra facile les recherches pour le chotx des livraisons. Cette table sera communiquée aux personnes qui en feront la demande.
La Société peut aussi leur céder, au prix de 3 francs le volume, les 5*, 6°, 7' et 8° tomes de L'ARRONDISSEMENT DE MorfTELMAR, par M. A. Lacroix. (Les tomes 7, 2 et MM( épuisés). Le 4* se vend 4 francs. Le IV* tome comprend les communes de ~-a Gardc-~d/!eMar, les GrtM~M-GoMMf'~M, Gr!pMM, Lachamp.
Le V* ~.a Laupie, Manas, ..t~!)'.Mnttc, Montboucher, Montbrison, AfoM~hm~)'. (4.00 pages).
Le VI'' Montélimar (fin). Afatif/OK~f, ~yoMf/oyp)', Moutségur, Orcinas, Le f~< (400 pages).
Le V)!' .fi~rre/a~, Poet-Laval, fot!<Bt!r<-et, Portes, Puygiron, Rac, ~<ju)' /<oc/K~ ~of/~orr, ~!oc/)e~K~, La Roche, SaintSecret, RoMSM~, ~OMM~f, ~:M~rec~H~er, Satnt-Pantaléon, ~<Mt-P~M/-7't-OM-C/M~~M~ (456 pages).
Le VII!' ~Mt-~estttMt. Salles, Sallettes, ~t~et. Savasse, Solérieu, ~H~oKM~, y't!t<f:g'Matt, T'e~'s~tëres, La ?'OMC/:f, Les VoMrcrtc~, yx/c~c, ~/aM)')C, Vesc. (3o6 pages).
MEMOIRES DE EUSTACHE PIÉMONT (t ~72-;6o8)
par J. BRUN-DURAND Prix 6 fr.
Un ~orf volume m-8° jésus, 666 pages.
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Aux membres de la Société, habitant Valence. 0 75 Aux membres de la Société n'habitant pas Valence. i » Aux personnes ne faisant pas partie de la Société i.~5 Troisième Série du n° 141 au n" 160 (année 1007)
Aux membres de la Société, habitant Valence. i.5o Aux membres de la Société, n'habitant pas Valence. 1-7~ Aux personnes ne faisant pas partie de la Société. 2 x Frais de port en sus.
Une table des principaux articles publiés dans le BMMcr:H de la Societe d'~trc/~o/o~ et de S~<<«e du departement de la Drôme, depuis sa fondation (1866). jusqu'au i" janvier 1006, insérée dans les précédentes livraisons, rendra facile les recherches pour le choix des livraisons Cette table sera communiquée aux personnes qui en feront la demande.
La Société peut aussi leur céder, au prix de 3 francs le volume, les 5*, 6*, y* et S* tomes de L'ARRONDISSEMENT DE MosTÉUMAR, par M. A. Lacroix. (Les tomes c~J sont ~Mt~). Le 4' se vend 4 francs. Le tV' tome comprend les communes de La Gardc-~l~:gM!at', les Gr~M~M-GoM~tr~, Gr;g~MM, Lachamp.
Le V" La ~.atipi~, A/anct~, .arMt!?te, .A~o)!f~0!i<<er, 3~on~rtson, Montélzmar. (400 pages).
Le VI° A/onf?/)M)~)' (/?"). ~/ont/0!<j)', ~yon~'oy~r, Montségur, Orctttas~ Le Pégue. (400 pages).
Le Vft* .f':err~afrf, Poet-Laval, Pont-de-Barret, Portes, Puygzron, Rac, ~~MftHc, ~ocAe~M~t, 7<oc/!e/brf, ~oe/t~g~M~, La Roche, ~~ttttSecret, KO)MM~, Rousset, ~!t;r-M~rce/<?r, ~Mf-f<!Mft!/MK, ~[tt<-P<!tf!-T'ro!s-CftateaMjc. (456 pages).
Le Vtl!' Satut-~estttMt, Salles, ~Hc~e~, SftK~er. Savasse, ~o/gr!et<, .SM?e-y~<at<ssc, 7'au!t~nan, T'f~'Mt~tes, La T'oxe/t?, Les 7'o:<retteï, ?"!«~!rf, ~~urtc, Vesc. (306 pages).
MEMOIRES DE EUSTACHE PIÉMONT (t;72-t6o8)
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~77~ INTERESSANTE
La Société d Archéologie et de Statistique tient à la disposition de ses Membres titulaires et correspondants, au prix de 80 francs l'une, quelques collections complètes du BULLETIN (1866 à 1906 inclus), soit trente-neuf volumes in-8° raisin, comprenant chacun plus de 400 pages. Comme d'autre part il existe un certain stock ne pouvant former des collections complètes, les livraisons qui le composent, divisées en trois séries, suivant leurs dates, pourront être livrées aux prix suivants Première Serie du n° i au n' 45 (annee 1878)
Aux membres de la Société, habitant Valence. o.25 Aux membres de la Société, n'habitant pas Valence 0.40 Aux personnes ne faisant pas partie de la Société o.5o Deuxième Série du n' 46 au n° 140 (année 100~)
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Aux membres de la Société, habitant Valence. i.5o Aux membres de la Société, n'habitant pas Valence. 1.75 Aux personnes ne faisant pas partie de la Société. 2 » Frais de port en sus.
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Le Ve La Z.a! .MantM, ~/arMntie, A~o)!~0!<c/;er, Montbrison, .A/bnre/tm~r. (~oo pages).
Le VI' Montélimar (;?t). A~on~OH.r, 3/ont/oye' Montségur, Orcinas, Le f~i~. (400 pages).
Le VII* ~'i'erre~tte, Poet-Laval, fOir-de-B~t'rcr, Portes, ~'M~troM, Rac, Réauvtlle, ~oc/)c<'ai<n, ~oc/!e/b)'t, 7?oc/;e~H~e, La Roche, ~ntSecret, Roussas, Rousset, .S~!M<-A/~rce/S~;<~r, ~itif-xr~~O)!, ~<ttr-f~H<-yt-o:s-C/!Ac~M~ (~.56 pages).
Le VIII' ~ao~-TPes~tHt, Salles, Sallettes, ~f~ef. Savasse, ~o/crt~M, ~MfC-<o)iM~, 7~«/t~;t:H, T'~yMt~rM, La yo«c/ Les yoM''er~s, yx/erf~, ~H' Vesc. (3o6 pages).
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