et charme l'oreille et les yeux par ses mille ressauts. A chaque instant le sentier passe d'un hord à l'autre de la rivière, et nos chevaux doivent la passer à gué : ces pauvres bêles , accablées de chaleur, ne peuvent résister à la tentation de s'y abreuver.
L'aspect de la vallée est sauvage et pittoresque. Des rochers à pic surplombent au-dessus de nos têtes : ils sont de ce granit rouge que j'avais remarqué dans la gorge d'Ute-Pass. La végétation est de toute beauté. Une infinité de fleurs aux couleurs les plus riches et les plus variées croissent le long du chemin. Des milliers de conifères couvrent les flancs des montagnes : j'y reconnais le pin, le sapin, le cèdre, lepinon.
Bientôt on commence à s'élever, par d'interminables festons, sur le flanc des premiers contre-forts du Pike's Peak. Le sentier, fort étroit, côtoie d'effrayants précipices; mais nos chevaux y marchent d'un pied sûr : ce sont de vrais chevaux de montagne. Quand on a gravi quelque temps, il faut se retourner pour contempler les magnifiques échappées qui s'ouvrent sur la plaine du Colorado : l'oeil plane sur une si vaste étendue de pays, que, par une illusion d'optique, la plaine semble monter vers l'horizon par une inclinaison de 45 degrés. Grâce à l'admirable transparence de l'air, les objets les plus éloignés se dessinent avec une netteté incroyable.
Déjà nous avons atteint les hautes régions, celles où régnent le calme et le silence. La végétation, tantôt si luxuriante, devient maigre et rachitique. Les forêts de sapins semblent avoir été ravagées par les ouragans,