LETTRES DU SOUDAN I
OCTOBRE 1889-AOUT 1891
Sorti de Saint-Cyr en octobre 1*88, le sous-lieutenant Mangin, d'abord nommé au l*r régiment d'Infanterie de marine, à Cherbourg, fut désigné sur sa demande, en septembre 1889, pour servir au Sénégal, à l'Ëlat-Major hors cadres, et mis à la disposition du Commandant supérieur du Soudan. Nous sommes heureux de pouvoir donner ces lettres intimes d'un officier de vingt-trois ans, où se dessine d'une façon si émouvante la figure de l'homme aussi bien que celle du futur grand chef.
A ses parents.
Dakar, 3 octobre 1889, 1 heure apres-midi.
Me voici arrivé après trois jours d'une belle traversée, chers parents. Nous étions hier soir, à dix heures, en rade de Dakar, mais n'avons pu débarquer que ce matin.
Nous arrivons à lu belle saison. Le Brésil a essuyé, à son arrivée ici, une tornade sèche et il faisait il y a quinze jours une chaleur effroyable, qui a fort éprouvé les malheureuses compagnies formant la garnison de Dakar. Maintenant, au contraire, la température est très supportable et, moyennant certaines précautions, aucune chance de maladie. Le casque est obligatoire, même quand le soleil est voilé, et le fait de se contenter du couvre-nuque d'un képi est une grosse imprudence. Cette habitude est, par le fait, facile à prendre, les autres prescriptions sont du même ordre. Les nuits sont assez fraîches et reposantes. Dans le fleuve, la température descend jusqu'à 2°. A ce soir, chers parents, et je vous embrasse affectueusement.