paraît plus solitaire et plus lointaine quand on l'atteint ainsi à travers tout le silence et toute l'étendue mélancolique de la Lagune. Le bruyant vaporetto avec le battement de sa machine troublerait l'impression que l'on ressent de ces eaux désertes où le chenal sinue entre les pali et le long des bancs d'algues, tandis que le glissement de la gondole, son balancement, le rythme régulier des rames sont en harmonieux accord avec le paysage marin que l'on traverse et qui est tout entier fait de couleur et d'espace. Choisissons donc une belle journée, une gondole aux coussins confortables, deux bons rameurs et qu'ils nous mènent vers l'île fameuse qui fut, dans la nuit des âges, l'aïeule de la grandeur vénitienne et qui s'enlise dans les boues, aux confins de la Lagune morte, dans les tristesses de la solitude et dans l'orgueil des souvenirs.
Il fait beau et toute la lumineuse douceur de l'automne est répandue entre le ciel et les eaux. Sous la noble courbe du Ponte dei Mendicanti, qui est comme une des portes