absent à écrire lui-même quelques mots, qu'il promettait de
remettre sur-le-champ à destination, si Boeck voulait les lui
adresser. La traite étant sur Paris, il se ferait ensuite un plaisir
d'en toucher le montant, pourvu qu'elle fût endossée à son nom.
Cependant, il s'en fallait de beaucoup qu'Abel en fût arrivé au
comble de ses peines et de ses préoccupations d'avenir il gardait
encore de l'espoir, et, aux yeux de ses amis du moins, les diffi-
cultés de sa situation semblaient ne devoir être que transitoires.
Sans doute, la chaire qui lui eût convenu, Holmboe l'avait obtenue;
mais l'Université elle-même avait déclaré, en même temps, qu'il
ne fallait pas perdre de vue « l'étudiant Abel ». On songeait donc
à le placer à l'Université, et Hansteen s'intéressait à lui, ce qui
devait lui être d'un puissant secours. De plus, Abel avait fait de
bonnes choses pendant son séjour en Allemagne, et il avait été
très heureux avec le mémoire qu'il avait présenté à l'Institut. S'il
n'avait pas eu de succès auprès de Cauchy, au moins Legendre
l'avait encouragé, et le jugement d'une autorité aussi élevée que
l'était l'Académie des Sciences de Paris devait produire beaucoup
d'effet en sa faveur dans son propre pays.
Ce n'était donc pas sans raison que Keilhau—bien qu'il eût déjà
une chaire à l'Université croyait que, de tous les compagnons
du même voyage, c'était Abel qui finirait par arriver à la situation
la plus avantageuse.
Abel ne pouvait pas nier qu'il y eût quelque chose de probable
dans cette opinion. Cependant, il avait des doutes il savait que,
même dans les cas les plus favorables, il rencontrerait encore
beaucoup de difficultés, tenant à ses embarras et à ses rapports
personnels.
« Ma position », écrit-il à Boeck, « deviendra la meilleure, à
ce que pense Keilhau. Officiellement, il en sera peut-être ainsi;
mais, entre nous, je vois, privatiyn, bien « des laideurs » sur la
route que je dois parcourir. En vérité, j'ai grand'peur de l'avenir!
Peut-être devrais-je chercher à rester pour toujours en Allemagne,