sorte que l'une ne puisse avancer sans faire marcher l'autre?
Il y a plusieurs causes qui peuvent concourir à rendre les mœurs d'un peuple moins rudes mais, parmi toutes ces causes, la plus puissante me paraît être l'égalité des conditions. L'égalité des conditions et l'adoucissement des moeurs ne sont donc pas seulement à mes yeux des événements contemporains, ce sont encore des faits corrélatifs. Lorsque les fabulistes veulent nous intéresser aux actions des animaux, ils donnent à ceux-ci des idées et des passions humaines. Ainsi font les poètes quand ils parlent des génies et des anges. Il n'y a point de si profondes misères ni de félicités si pures qui puissent arrêter notre esprit et saisir notre coeur, si on ne nous représente à nousmêmes sous d'autres traits.
Ceci s'applique fort bien au sujet qui nous occupe présentement.
Lorsque tous les hommes sont rangés d'une manière irrévocable, suivant leur profession, leurs biens et leur naissance, au sein d'une société aristocratique, les membres de chaque classe se considérant tous comme enfants de la même famille, éprouvent les uns pour les autres une sympathie continuelle et active qui ne peut jamais se rencontrer au même degré parmi les citoyens d'une démocratie.