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Notice complète:

Titre : Le Magasin pittoresque / publié... sous la direction de M. Édouard Charton

Éditeur : [s.n.] (Paris)

Date d'édition : 1854

Contributeur : Charton, Édouard (1807-1890). Directeur de publication

Contributeur : Desportes, François. Rédacteur

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32810629m

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb32810629m/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Format : Nombre total de vues : 37695

Description : 1854

Description : 1854 (A22).

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Description : Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées

Description : Collection numérique : Thématique : administration publique, sciences humaines et sociales

Description : Collection numérique : Thématique : bâtiment, urbanisme, architecture, arts

Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k314378

Source : Bibliothèque nationale de France

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 15/10/2007

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qui semblait survivre en lui, il reconquérait le souvenir et reprenait sa récitation interrompue.

D'autres fois il se croyait soumis à quelque interrogatoire solennel qui allait décider de son sort; i1 répondait à des questions imaginaires, il expliquait touchant les passages demandés, il les commentait avec une hésitation inquiète. Les camarades de classe venaient l'un après l'autre à son chevet et s'en retournaient le cœur serré en secouant la tête; tout espoir était visiblement perdu.

Moi, j'avais obtenu de ne le point quitter et je suivais les rapides progrès de cette agonie délirante. Bientôt les forces s'affaiblirent le malade ne s'agitait plus sa voix alanguie répétait confusément quelques vers de Virgile qu'il avait particulièrement aimé. On eut dit que tous les autres, poëtes, orateurs, historiens, avaient abandonné te mourant, et que le berger de Mantoue était seul resté, murmurant son oreillo quelques fragments de mélodie, comme une mère qui endort son enfant. Dans le flux et le reflux des vagues pensées qui traversaient cette agonie, chaque vers balbutié semblait une rapide allusion ou un fugitif souvenir. Tantôt quelque gracieux tableau de son enfance surgissait dans ce dernier rêve, et il répétait tout bas

J'allais entrer dans ma douzième année; je pouvais

· Déjà atteindre de mes mains les fragiles rameaux (').

Puis un plus tendre souvenir succédait, une douce figure passait confusément devant ses paupières à demi closes, sa voix bégayante laissait tomber le passage si connu

Commence, jeune enfant, à reconnaître ta mère en lui souriant (*). Et comme je me penchais sur lui pour m'efforcer de lui imposer doucement silence, il reprenait d'un accent plus élevé: `

Continuons en chantant; tes chants abrègent la route (~).

Mais presque aussitôt, pris d'une subite/défaillance, il refermait ses paupières appesanties, et sa voix mourait en bégayant l'adieu du poëte

Assez t'ombre est fatale à ceux qui chantent ('*).

Ce furent les derniers mots que l'on put distinguer. Le malade tomba bientôt dans cette somnolence convulsive qui précède la séparation suprême une nuit encore se passa, mais le lendemain te rate s'éteignit insensiblement, et quand le médecin arriva, tout était fini.

Le collège entier alla conduire te mort à sa dernière demeure. C'était la première fois que je voyais descendre dans la terre quelqu'un dont j'avais touché la main, que j'avais senti vivre comme moi. Tous les détails me sont encore présents. Le jour était clair et froid tes campagnes, récemment labourées et tachées de neige, avaient l'apparence d'un immense suaire noir semé de larmes blanches; les prêtres, qui marchaient en tête, chantaient les hymnes funèbres entre chaque verset il y avait une pause, et l'on n'entendait que le bruit de nos pas sur la route gelée. Enfin nous arrivâmes au cimetière. Le cercueil fut déposé à côté de la fosse, et, tandis que les fossoyeurs se consultaient à voix basse, il y eut un assez long silence. Je regardais te trou sombre où le compagnon de mes études et de mes jeux allait disparaître; un petit oiseau saisi par le froid chantait plaintivement, à quelques pas, sur la branche dépouillée d'un saule pleureur. Aussi loin que mon regard pouvait s'étendre, il n'apercevait que des tombes à demi enfouies souslaneige ou (') Alter ab undccimo tam me jam ceperat annus

Jam fragiles poteram a terra contmgere ramos.

(~) fncipo, parve puer, risu cognoscere matrem.

(~ Contantes )icct usque (minus via Mat) camus.

(*) Surgamus sotct esse gravis cantantibus umbra.

des croix penchées auxquelles tes glaçons pendant comme des larmes! Jusqu'alors je m'étais tenu ferme; mais cet ensemble froid, triste et mort me donna le frisson je sentis mon cceur se gonfler; je m'éloignai brusquement pour me mêler aux derniers rangs.

Le bruit du cercueil qui frôlait la fosse me fit retourner maigre moi; j'entendis la terre s'ébouler, je vis les porteurs retirer avec effort les cordes qui grinçaient sous la lourde bière; puis la voix des prêtres se fit entendre de nouveau, le dernier adieu fut adressé ait mort, et les fossoyeurs commencèrent à rejeter sur lui la terre tandis que nous passions l'un après l'autre.

Au moment ou j'armai, on n'apercevait plus qu'un des bouts du cercueil; il se dressait du fond de la fosse, comme si le trépassé eût fait un eubrt, dans l'enveloppe de chêne, pour sortir de son lit funèbre. Je tressaillis, et dans mon trouble mon pied trébucha; j'aurais glissé dans la tombe encore entr'ouvertc sans un bras qui me retint. C'était celui de-notre excellent professeur.

–Prenez garde! dit-il avec une douée tristesse; c'est assez d'un., c'est trop

Puis il se retourna vers le cercueil qui allait disparaître il découvrit lentement sa chevelure Manche, et adressa à celui que nous ne devions plus revoir, dans la langue qu'il savait si bien, le salut des combattants du cirque à César Ceux qui ~Oh'CK< MOM)'H' te S~M~ (').

Les jours suivants furent tristes. Quand le Dauphin était là, bien peu y pensaient; mais depuis qu'il avait disparu tous les yeux semblaient le chercher. Sa seule place vide occupait plus que toutes les places remplies.

Moi surtout, je ne pouvais m'accoutumer ce départ. I! fallut'pour cela bien des jours enfin le temps fit son omce. Près d'un mois s'était écoulé un nouveau venu avait remplacé l'absent, chacun s'était repris à ses habitudes, lorsqu'un jour, au milieu de la récréation qui suivait le dîner, un mot courut tout à coup de proche en proche, et, bien que prononcé à demi-voix, il nous arrêta comme un cri La mère du Dauphin la mère du Dauphin 1

Tous les jeux furent suspendus; tous les regards s'étaient tournés du même côté.

La veuve traversait la cour, toujours vêtue de noir, mais plus pâle et plus courbée. Derrière elle marchait le garçon de salle portant ce qui pouvait lui rappeler son fils des livres, un violon, quelques cahiers remplis de son écriture. La pauvre femme se retournait à chaque instant vers ces tristes richesses dans la crainte de les perdre encore. Arrivée près de nous, elle s'arrêta; son eeil se promena, dans nos rangs, comme si elle eût espéré y découvrir quelque trace plus vivante de son fils; elle semblait demander ce qui pouvait le lui mieux rappeler, chercher les endroits où il avait coutume de se tenir, ceux d'entre nous qu'il préférait. Un instant je crus qu'elle allait nous parler; elle avait fait un pas vers le groupe ou je me trouvais,' mais l'effort était sans doute trop grand; elle s'arrêta brusquement, rabattit son voile noir, et traversa la cour d'un pas.hàté. Nous la suivîmes des yeux jusqu'à ce qu'elle eût disparu, puis nous nous regardâmes, et on se sépara sans rien dire. Hélas! quelques années auparavant, nous l'avions tous vue passer là, tenant par la main l'enfant qu'elle n'avait sevré de son lait que pour l'allaiter de tendresse; nous l'avions vue revenir six fois pour jouir de ses triomphes. Mère trop confiante, elle avait livré au collége le fruit de ses douleurs et de ses veilles, les sacrifices de son passé, les récompenses de son avenir, et le collége ne lui rendait que quelques livres désormais.sans maître avec l'adresse d'une tombe. Ce souvenir, qui m'est revenu à propos du volume de Virgile que j'ai dû feuilleter pour mon petit-fils, m'a fait (') Morituri te saMMt.