ŒUVRES COMPLÈTES
DE F
FRANÇOIS VILLON
ŒUVRES COMPLÈTES
DE
FRANÇOIS VILLON SUIVIES d'un CHOIX DES poésies DE SES DISCIPLES ÉDITION PRÉPARÉE PAR LA_MQNHftYH Qi^/Vi MISE AU JOUR, AVEC NOTES ET GLOSSAIRE PAR
M. PIERRE JANNET
Troisième édition ^f^wï
PARIS
Chez Alphonse LEMERRE, libraire 27-29, passage Choiseul
M DCCC LXXIII
Tous droits réservés.
E. Picard.
PREFACE.
On ne sait guère de la vie deFrançois Villon que ce qu'il en dit lui-même, et l'on en sait trop. J'aurais voulu me dispenser de décrire, après tant d'autres (i), cette existence peu édifiante, mais }• n'ai pas cru pouvoir le faire. Le sujet des p^ésiesr de Villon, c'est Villon luî-même, çt sa biographie est la clef de ses oeuvres.
François Villon naquit àParis en 143 1. Sur la foi d'une pièce que Fauchet, dans son traité de l'Origine des chevaliers, imprimé en 1599, dit avoir Cp Voir notamment la Vie de Francois Villon, par Guillaume Colletet, en tête des œuvres de Villon, édition de M. P. L. Jacob, bibliophile (M. Paul Lacroix), Paris, 1854, in- 16; le Mémoire de M. Prompsault, entête de son édition de Villon, Paris, 1832, in-8; Francois Villon, Versuch ciner kritischen Darstellung seines Lebens nach seinen Gedichten, von Dr. S. Nagel. Mulheim an der Ruhr, i856, in-4, le travail le plus complet et le plus judicieux qu'on eût fait jusqu'alors sur ce sujet, et la base de ceux qu on a faits depuis: FranFois Villon, sa vie et ses œyyres, #ar Antoine Campeaux, Paris, Durand, |B§9, }Br8, et la notice de M. Anatole de Montaiglon, excellente P&UT le fond comme pour la forme, dans les Poëtes Français, recueil publié sous la direction de M. Engine Crépst, Paris, 1861-62, 4 vol. gr. «̃& t. I,p. 447-455.
trouv ée dans un manuscrit (te sa bibliothèque ( i ), on a mis en doute le lieu de la naissance et jusqu'au nom du poète. On s'estlivré à des conjectures ingénieuses pour concilier les renseignements fournis par lui-même avec les indications de Fauchet, pour expliquer comment il pouvait s'appeler à la fois Corbueil et Villon, être à la fois natif d'Auvers et de Paris. Pour moi, je crois, avec le P. Du Cerceau, Daunou et beaucoup d'autres, qu'on ne doit tenir aucun compte de ce huitain, amplification maladroite de l'épitaphe en quatre vers (2). Ce n'est pas sur une pareille autorité qu'on peut substituer le nom de Corbueil à celui de Villon, que notre poète se donne lui-même en vingt endroits de ses œuvres (3).
(i) Voici cette pièce, que j'ai cru dsvoir rejeter des («ivres
(je Villon
Je suis Francoys, dont ce me poise,
Nommé Corbueil en mon surnom,
Natif d'Anvers emprès Pantoise,
Et du commun nommé Villon.
Or, dune corde dune toise
Sauroit mon col que mon cul poite.
Se ne fut un joli appel.
Le jeu ne me semblait point bel.
L'auteur de ce huitain n'a pas compris l'intention comique ce ce vers de Villon
Né de Pçris emprès Pontoise;
C'est pourquoi il Je fait gravement naitre 4 Anvers, qui est en effet près de Pontoise. Mais une preuve certaine de la composition tardive de cette pièce, c'est qu'on ne trouverait probablement pas dans la seconde moitié du XV' siècle, et certainement pas dans les oeuvres de Villon, un boitun dont les rimes soient distribuées comme dans celui-là. Dans toua les huitains de Villon, sans exception, le premier vers rime avec le troisième, le second avec le quatrième, le cinouième et le septième, et le sixième avec le huitième. Les faussaires ne pensent jamais à tout.
(2) Voy. p. 101.
(3) Voy. le Glossaire-Index, au mot VilloK,
Les parents de Villon étaient pauvres (i). Sa mère était illettrée (a); son père était vraisemblablement an homme de métier, et peut-être, ainsi qùe t'a conjecturé M. Campeaux,un ouvrier en cuir, un cordouennier (S).
Poussé par le désir de s'élever au-dessus de la triste condition de ses parents, ou plutôt par ce besoin de savoir qui tourmente les natures comme la sienne Villon étudia. Il connut les misères de l'état d'écolier pauvre, On n'a pas de renseignements certains sur le genre d'études auquel il se livra mi sur les progrès qu'il y fit. M. Nagel suppose qu'il obtint le grade de maître ès arts, et se fonde surtout sur le legs qu'il fait plus tard, de sa « nomination qu'il a de l'Université » (p. i5). Mais ee legs pourrait bien n'être qu'une plaisanterie, comme tant d'autres. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il n'obtint pas le grade de maître en théologie, but suprême des études du tesips (4). En ce temps- là, comme plus tard, les étudiants étaient exposés à bien des tentations. Villon n'y sut pas résister. En contact avec des jeunes gens sans préjuges d'aucune sorte et dépaurv»s d'argent comme lui, il adopta leurs mœurs et façons de vivre. Bientôt il devint leur chef et leur providence (5). Les Repues fra»chesr singulier monument élevé à sa gloire par quelqu'un de ses disciples, nous font connaître par quelles combinaisons. ingénieuses' lui et ses compagnons se procuraient les moyens de mener joyeuse vie. Lsurs friponCi) V. p. îi, Hjïitain tttt.
(2) « OacquBs lettre as leai, » P. 55, 42.
(3) VojeS! Sfofes, p. 224. bi!Uiriî xï"ii (p. 31) et
(4) Voy. Grand Téstœm&ït, ^aSuâtA sSWii (p. 3ï) et
I.ZXI1 (p. 52.)
(5) C'estoit la mère ttourf iclète
De ceux qui n'avaient fûint cfdtgént)
A tromper devant et derrière
Estoit un homme diiigint. (P. ifio.)
neries étaient tout à fait dans les mœurs du temps, et ne dépassaient sans doute pas les proportions de ce qu'on serait volontiers tenté d'appeler des bons tours; mais Me étaient sur une pente (lissante, et la justice n'entendait pas raillerie. Rien ne prouv* cependant que Villon ait eu maille à partir avec elle à cause de ses entreprises sur le bien d'autrui. On a parlé de ses deux procès il en eut au moins trois, bien constatés par ses oeuvres, et le premier, qu'on n'avait pas fait ressortir jusqu'à présent, est le seul dont le sujet soit indiqué <é'un« manière certaine. C'est la suite d'une affaire d'amour.
Avant de tomber dans ces relations honteuses avec des femmes perdues dont la Ballade de la Grosse Margot (t) nou* lionne l'ignoble tableau, Villon fut amoureux. Il conai$ l'amour mkf l'amour nalf et timide (2). Quet-fbt l'objet de cette passion, c'est ce qu il n'est pas facile de dire. Il l'appelle de divers noms, Denise, Roze, Katherine de Vauzelles. Que ce fût une femme de meurs faciles, une gentille bourgeoise ou une noble damoiselle, il paraît certain que c'était une coquette. Elle l'écouta d'abord, l'encouragea (3) et finit par le rebuter. Il s'en plaignit sans doute à ses compagnons, que les femmes qu'ils fréquentaient n'avaient pas habitués à de pareilles rigueurs, et qui se moquèrent de lui (4). Villon s'emporta contre
f 1) Page 83.
(2) Le doux souvenir de cette passion se montre en maints endroits des œuvres de Villon) mêlé à ses regrets et aux reproches qu'il adresse à sa maîtresse avide et cruelle. Voy. les huitains 111, iv, v et x du Petit Testament, iv à ux du Grand Testament, la ballade de la page 57, le rondeau p. 59, etc.
(3) Quoy queje luy voulusse dire,
Elle estoit preste tfescouter, etc. (P. 47.)
(4) qui partout m'appelle
L'amant rcmy\tt renié.ÇP. 48.)
fa belle, lui fit des avanies, lui dit des injures, compoia peut-être contre elle quelque ballade piquante, quelque rondeau bien méchant. Or, bien que religieux au fond, il frondait volontiers les choses sacrées (i). La belle dame se plaignit; la juridiction ecclésiastique s'en mê,la (2), et Villon fut bel et bien condamné au fouet (3).
C'est à la suite de cette sentence que Villon, décidé à quitter Paris, composa les Lays ou legs auxquels on a donné depuis le titre de Petit Testament.
Dans le huitain vt, page 9, il annonce qu'il s'en va à Angers. Il est probable qu'il ne fit pas ce voyage. Ses habitudes, ses relations, sa misère, le retinrent à Paris ou aux environs. C'était en 1456. Flétri par le châtiment qu'il avait subi, aigri par l'infortune, il ne connut plus de bornes. L'année qui suivit «a condamnation fut assurément l'époque la plus honteuse de sa vie. En 1457, il était dans les prisons du Châtelet, pt le Parlement, après lui avoir fait appliquer la question de l'eau (4), le condamnait à mort. On ignore le motif de cette condamnation; on a supposé qu'il s'agissait d'un crime commis à Rueil par lui et plusieurs de ses compagnons, dont quelquesuns furent pendus (5). Cette supposition paraît (1) Voir notamment les huitains cvi à ex du Grand Testament.
(2) Quant chicanner me feit Denise,
Disant que je Tavoye mauldite. P. 69.
(3) La sentence fut exécutée. La Double ballade de la page 45 ne laisse aucun doute à cet égard
J'en fus batu, comme à ru telles
Toutnud. (P. 46, v. 24-25.)
(4) C'est ce qu'indiquent clairement ces deux vers de la page 104
On ne m'eust, parmi ce drapel,
Faict boyre 4 celle MCOfe&erM.
(5) Voy. la Belle 'lefon aux' en/ans perdu;, p. 86, et le Jargon, p. 11 5.
fondée. Quant au crime commis, il n'était peutêtre pas d'une extrême gravité. Les lois étaient sévèret, et les compagnons de Villon devaient avoir, tomme lui, des antécédents fâcheux. Quoi qu'il en soit, Villon ne partagea pas leur sort. 11 est vrai qu'il ne négligea rien pour se tirer d'affaire il appela de la sentence, ce qui lui valut quelque répit; puis, du moins ceci paraît certain, à l'occasion de la naissance d'une princesse qu'il appelle Marie, il implora la protection du père de cette princesse. Cette démarche lui réussit le prince intescéda pour lui, et le Parlement commua sa peine en celle du banaissement. Villon se montra pénétré de reconnaissance. Il adressa une requête au Parlement, pour lui rendre grâces autant que pour lui d*«ander un délai de trois jours pour quitter Paris, et il composa pour la princesse qui Venait de naître des vers pleins de sentiatent. M. Prompsoult a cru que cette princesse était Marie de Bourgogne, fille de Charles le Téméraire, nés le 13 février 1 487 mais c'était une erreur. M. Auguste Vitu, qui prépare depuis nombre d'années une édition de Villon, a reconnu qu'il s'agissait de Marie d'Orléans, fille du poète Charles d'Orléans, née le 19 décembre 1457, et M. Campeaux a clairement démontré que cette opinion était fondée.
A partir du moment où Villon quitte Paris, en exécution de l'arrêt du Parlement, nous perdons sa trace jusqu'en 1461. A cette époque nous le trouvons dans les prisons de Meung-sur-Loire, où le détient Thibault d'Aussigny, évfique d'Orléans. Quel nouveau méfait lui reprochait-on ? ¡ Ceux qui supposent qu'il avait fabriqué de la fausse monnaie n'ont pas pris garde que la punition de ce crime était exclusivement du ressort des juges séculiers. Dans le Débat du cœur et du corps de Villon composé dans sa prison le poète attribue sa détention à sa folle plaisance.
Ce qu'on lui reprochait, c'était peut-être quelque propos ou quelque écrit peu orthodoxe, quelque plaisanterie sentant le sacrilège, quelque aventure galante par trop scandaleuse, toutes choses dont il était bien capable et dont la répression regardait la justice ecclésiastique. Il y a lieu de croire que le délit n'était pas en rapport avec la punition, car Villon, qui n'a jamais protesté contre sa condamnation au fouet, qui se contente d'indiquer vaguement que le Parlement l'avait jugé par fausserie, fit preuve de la plus violente rancune contre Thibault d'Aussigny. Il paraît même certain que cette mauvaise affaire ne lui fit pas perdre la faveur de ses protecteurs, Charles d'Orléans et le duc de Bourbon.
Quoi qu'il en soit, Villon languit longtemps dans la prison de Meung, plongé dans un cul de basse-fosse, nourri au pain et à l'eau. Rien n'indique qu'une sentence quelconque ait été rendue contre lui. mais le traitement qu'on lui faisait subir devait le conduire lentement à une mort certaine. Heureusement Louis XI, qui venait de succéder à Charles VII, alla à Meung dans l'automne de 1461, et Villon lui dut sa délivrance. Fut-ce, ainsi que le dit M. Campeaux, par suite « du don de joyeux avènement qui remettait leur peine à tous les prisonniers d'une ville où le roi entrait après son sacre ? » Je serais plutôt porté à croire, malgré l'absence de preuves, que Villon fut personnellement l'objet d'une mesure de clémence de la part du roi la façon dont il en témoigne sa reconnaissance me paraît justifier cette supposition (1).
En sortant des prisons de Meung, Villon corft(t) On a dit récemment que le roi qui délivra Villon était Charles VII. Je ne puis adopter cette opinion. Sans examiner ici la Valeur du document sur lequel elle est basée, je me bornerai à faire remarquer qae Charles VII mourut à Mehun-sur-Yevre, près de Bourges, le 22 juillet 146 pré-
posa, du moins en partie, le Grand Testament, dans lequel sont intercalées des pièces qui se rapportent à diverses époques de sa vie, et dont quelquesunes ont dû être composées beaucoup plus tard. Il est probable, en effet, que Villon vécut encore longtemps; mais on ne sait rien de précis à cet égard. Les conjectures sur lesquelles on se fonde pour placer la date de sa mort entre 1480 et 1489 ne sont, en définitive, que des conjectures. Quant aux voyages qu'on lui fait faire à SaintOmer, Lille, Douai, Salins, Angers, Saint-Genoux, et jusque dans le Roussillon, rien ne prouve qu'ils ont eu lieu. Villon nomme ces localités dans ses oeuvres, il est vrai, mais nulle part il ne dit qu'il les a visitées. Son voyage à Bruxelles, son séjour en Angleterre, avec la réponse hardie qu'il aurait faite au roi Edouard V, ne me semblent pas beaucoup plus certains, malgré mon respect pour celui qui s'en est fait l'historien (1). Ce qui me semble hors de doute, c'est sa retraite dans le centre de la France, où semblait l'attirer quelque chose qui nous est inconnu, peut-être quelque relation de famille. Dans le Petit Testament, il annonce qu'il va à Angers (2) il en revenait peut-être lorsqu'il fut arrêté à Meung. Dans le Grand Testament, il dit qu'il « parle un peu poictevin (3). » La Ballade Villon (p. 109) et la Double ballade (p. 107) prouvent qu'il séjourna cisément au moment où Villon était dans la prison de Meung-sur-Loire, près d'Orléans, où il passa tout un été (p. 21, v. 14), c'est-à-dire tout l'été de la même année 14.61. (1) Rabelais, livre IV, chap. livu. M. Nage) a relevé deux erreurs dans ce passage de Rabelais. Villon n'aurait pu se trouver à la cour d'Edouard V, qui ne monta sur le trône qu'en 1483, et le médecin Thomas Linacre, né vers 146o, ne fut célèbre que sous les règnes de Henri VII et de Henri VIII.
(2) Page 9. Le Franc archer de Bagnolet dit, p. 157, v. ia Ma mère fut née d'Anjou » mais cela ne prouverait rien, même quand il serait démontré que ce monologue est de Villon.
(3) Page 62.
quelque temps à Blois, à la cour de Charles d'Orléans, et le vers de la page m
Quefais-je plus ? Quoi? Les gaiges ravoir,
autorise à penser qu'il avait obtenu auprès du prince une de ces charges qu'on donnait aux poëtes de cour. Ainsi, par le Dit de la naissance Marie, Villon n'avait pas seulement échappé au dernier supplice; il s'était de plus acquis la faveur de Charles d'Orléans, et il sut la conserver, du moins pendant quelque temps, et peut-être jusqu'à la mort du duc, arrivée en 1465.
Il eut un autre protecteur en la personne du duc de Bourbon, qui lui faisait de « gracieux prêts (i). » Enfin, Rabelais, livre IV, chapitre xm, nous apprend que « maistre François Villon, sus ses vieux jours, se retira à Saint-Maixent en Poictou, sous la faveur d'un homme de bien, abbé dudit lieu. Là, pour donner passetemps au peuple, entreprit faire jouer la Passion en gestes et langage poictevin (2). » Ce témoignage n'est pas irrécusable mais pourquoi ne pas l'accepter ? Après une vie aussi agitée, on aime à se représenter le pauvre poète enfin tranquille, à l'abri du besoin, s'occupant, pour son plaisir, de jeux dramatiques, auxquels il avait dû probablement, dans d'autres temps, demander son pain (3).
En pénétrant dans les mystères de cette existence misérable, on est frappé de deux choses D'abord, on remarque qu'elle n'exerça pas sur le (t) P. n5, v. 6. ¡
(s) Œuvres de Rabelais, édition Burgaud des Marets et Rathery, t. II, p. 92. On voit ensuite un tour joué au sacristain des cordefiers, Estienne Tapecoue, qui sent bien son Villon, mais dont le dénoûment cruel a pu être inventé par Rabelais, qui n'aimait pas les moines. (3) On croit que Villon donna des représentations dramatiques à Paris et ailleurs, et c'est comme directeur de troupe qu'on Vui fait parcourir une partie de la France et des Pays-Bas.
cœur de Villon toute l'action corruptrice qu'il y avait lieu de redouter. Au milieu de son abjection, Villon conserve des sentiments élevés. Il est plein d'amour et de respect pour sa mère (r), de recon naissance pour quiconque l'a secouru (z), de vénération pour ceux qui ont fait de grandes choses; il aime son pays, chose d'autant plu» honerrable qu'elle était rare en ce temps-là (3); il regrette les erreurs de sa jeunesse, et le temps qu'il a si mal employé (4); voilà qui doit lui faire pardonner bien des choses.
Puis, quelle influence n'eut-elle pas sur le talent du poète (5)! Formé, comme os dit aujourd'hui, à l'école du malheur, il vit les chose» sous leur vrai jour, et il entra dans une voie tout à fait nouvelle. Il rompit en visière à l'Allégorie, qui régnait alors en souveraine, à toutes les afféteries de la poésie rhétoricienne cultivée par les beaux esprits du temps. Il fut le premier poète réaliste. Que l'on compare avec ses autres oeuvres les quelques pièces qufi a composées selon la poétique de ses contemporains, la Ballade Villon (p. 109), la Requeste au Parlement (p. io3), et (1) Voy. p. 32, huit. xxxvm; p. 54, huit, lxxix; p. 55, Ballade.
(2) Guillaume Villon, p. 9, 53 Jean Cotard, p. m, 58 Louis XI, p. a3, 24; le Parlement, P. io3 Marie d'Orléans, p. ioï, 107 le duc de Bourbon, p. 114.
(3) Ces deux vers de la page 34
Et Jehanne, la bonne Lorraine,
Qu'Anglois brulèrent à Rouen, lui font d'autant plus d'honneur qu'à l'époque où il les écrivit des gens éclairés regardaient Jeanne d'Arc comme sorcière, et les Anglais avaient en France de nombreux partisans.
(4) Grand Testament, huitain xxvi et suiv.
(5) Travail mes labres sentemens,
Esguise\ comme une pelote,
Wouvrist plus que tous les Commens
D'Averroys sur Aristote. (P. a 5.)
d'autres, et Fon ne sera point tenté de regretter, avec Clément Marot, qu'il n'ait -pas été « iwarry en la court des rois et princes, où les jugement s'amendent et les langages se pollissent, » car il y eût certainement plus perdu que gagné. M. A. de Mentaigîon a parfaitement caractérisé le rôle de Villon dans la poésie française. Je ne puis mieux faire que de lui emprunter ces quelques lignes
« Au moment où parut Villon, la littérature française en était précisément à cette période de transformation de la poésie générale elle passait à la poésie personnelle ses contemporains, subissant à leur insu cette phase littéraire, s'essayaient à l'individualité avec plus d'effort que de bonheur; Villon l'atteignît du premier coup. Sa force est là, et sa valeur s'augmente de l'intérêt que, sous ce rapport, offraient ses œuvres. Elle est tellement saisissante qu'elle a été reconnue de tous, et le succès qui l'accueillit ne s'arrêta pas. François !«' lui fit l'honneur de faire faire une édition de ses poésies par Clément Marot, qui le combla de ses louanges. Ua peu plus tard, il est vrai, l'école de Ronsard protesta. Pasquier condamne Villon, et Du Verdier s'émerveille que Marot ait osé « louer un si goffe ouvrier et faire cas de ce qui ne vaut rien. » Cela marque moins un manque de goût que la force partiale du préjugé la Pléiade, qui est en réalité aussi aristocratique que savante, ne pouvait admirer Villon sans se condamner elle-même; mais, ce moment passé, le charme recommence Regnier est un disciple de Villon; Patru le loue; Boileau a senti quel était son rang; La Fontaine l'admire Voltaire l'imite; les érudits littéraires du XVIIe et du XVïïle siècle, CoHetet, le P.DuCerceau, l'abbé Massieu, l'abbé Goujet, parlent de lui comme il convient, en même temps que Coustelier et Formey le réimpriment, que La Monnoye l'annote, et que
Lenglet-Dufresnoy prépare une nouvelle édition. De nos jours, une justice encore plus éclatante lui a été rendue. L'édition de Prompsault, à laquelle M. Lacroix est venu ajouter, pourrait être acceptée comme définitive, au moins quant au texte, si M. Vitu n'en promettait une, qui, en profitant des précédentes, donnera sans doute le dernier mot. Tous ceux qui ont parlé incidemment de Villon, MM. Sainte-Beuve, Saint-Marc Girardin, Chasles, Nisard, Geruzez, Demogeot, Génin, et d'autres encore, l'ont bien caractérisé. En même temps qu'eux, M. Daunou a écrit sur notre poète une longue étude, insérée dans le Journal des Savants, et M. Théophile Gautier, dans l'ancienne Revue française, des pages vives, aussi justes que pleines de verve, qui ont été recueillies dans ses Grotesques. Enfin, en t85o M. Profillet, et en x856 un professeur allemand, M. Nagel, ont pris Villon pour sujet d'un travail spécial; l'année dernière (1859), M. Campeaux lui a consacré un excellent travail, auquel, pour être meilleur, il ne manque peut-être qu'une plus ancienne et plus familière connaissance des alentours. Tous sont, avec raison, unanimes à reconnaître l'originalité, la valeur aisée et puissante, la force et l'humanité de la poésie de Villon. Pour eux tous, et ce jugement est aujourd'hui sans appel, Villon n'est pas seulement le poète supérieur du XVe siècle, mais il est aussi le premier poète, dans le vrai sens du mot, qu'ait eu la France moderne, et il s'est écoulé un long temps avant que d'autres fussent dignes d'être mis à côté de lui. L'appréciation est maintenant juste et complète d'autres viendront qui le loueront avec plus ou moins d'éclat et de talent, qui le jugeront avec une critique plus ou moins solide ou brillante; mais désormais les traits de la figure de Villon sont arrêtés de façon à ne plus changer, et ceux qui entreprendront d'y revenir ne pourront
rester dans la vérité qu'à la condition de s'en tenir aux mêmes contours. »
Plus loin, M. A. de Montaiglon, passant légèrement sur le Petit Testament, « qui n'est que spirituel, » et sur quelques pièces qu'il regrette de trouver dans le Grand Testament, ajoute « Ce n'est pas là qu'il faut chercher Villon, mais dans la partie populaire et humaine de son œuvre. On ne dira jamais assez à quel point le mérite de la pensée et de la forme y est inestimable. Le sentiment en est étrange, et aussi touchant que pittoresque dans sa sincérité; Villon peint presque sans le savoir, et en peignant il ne pallie, il n'excuse rien; il a même des regrets, et ses torts, qu'il reconnaît en se blâmant, mais dont il ne peut se défendre, il ne les montre que pour en détourner. Je connais même peu de leçons plus fortes que la ballade Toutaux tavernes et aux filles. La bouffonnerie, dans ses vers, se mêle à la gravité, l'émotion à la raillerie, la tristesse à la débauche le trait piquant se termine avec mélancolie le sentiment du néant des choses et des êtres est mêlé d'un burlesque soudain qui en augmente l'effet. Et tout cela est si naturel, si net, si franc, si spirituel; le style suit la pensée avec une justesse si vive, que vous n'avez pas le temps d'admirer comment le corps qu'il revêt est habillé par le vêtement. C'est bien mieux que l'esprit bourgeois, toujours un peu mesquin, c'est l'esprit populaire que cet enfant des Halles, qui écrivait II n'est bon bec que de Paris, a recueilli dans les rues et qu'il épure en l'aiguisant. Il en a le sentiment, il en prend les mots, mais il les encadre, il les incruste dans une phrase si vive, si nette, si bien construite, si énergique ou si légère, que cette langue colorée reçoit de son génie l'élégance et même le goût, sans rien perdre de sa force. Il a tout la vigueur et le charme, la clarté et l'éclat, la variété et l'unité, la gravité et l'esprit,
la brièveté incisive du trait et U. plénitude du sens, la souplesse capricieuse et la fougue violente, la qualité contemporaine et l'éternelle humanité. Il faut aller jusqu'à Rabelais pour trouver un maître qu'on puisse lui comparer, et qui écrive le français avec la science et l'instinct, avec la pureté et la fantaisie, avec la grâce délicate et la rudesse souveraine que l'on admire dans Villon, et qu'il a seul parmi les gens de son temps. » On ne connaît certainement pas la totalité des oeuvres de Villon, du moins sous son nom. Il est évident que le Petit Testament n'est pas son coup d'essai. Lors de son second procès, en 1457, il était probablement connu par d'autres compositions. Sans cela, il est douteux que Charles d'Orléans fût intervenu en sa faveur, et que le Parlement lui eût fait grâce de la vie. Lorsqu'il composa le Grand Testament, il y fit entrer quelques pièces qui n'en faisaient pas nécessairement partie, mais qui s'y rattachaient assez naturellement. On n'y trouve pas une ballade, pas un rondeau composés antérieurement au Petit Testament. Villon ne paraît pas avoir été très-soucieux de recueillir ses oeuvres. La plupart sont sans doute perdues; d'autres sont disséminées dans des recueils manuscrits ou imprimés où il n'est pas facile de les reconnaître, soit parce qu'elles ne portent pas de nom d'auteur, soit parce qu'elles sont attribuées à d'autres. On ne connaît pas de manuscrit qui contienne tout ce qu'on sait positivement lui appartenir. Les premières éditions, qui furent faites sans son concours et probablement après sa mort, ne contiennent que le Grand et le Petit Testament, le Jargon, et un petit nombre de pièces détachées. Jean de Calais, l'éditeur présumé du Jardin de plaisance, dont la première édition est de 1499 ou de i5oo, s'acquitta fort mal des fonctions d'exécuteur testamentaire que Villon lui avait confiées, si tant est
qu'on doive prendre au sérieux les huitains CLX et CLXI du Grand Testament. Il fit entrer dans son recueil diverses pièces connues comme étant de Villon et beaucoup d'autres qu'on lui attribue avec plus ou moins de vraisemblance, mais sans dire des unes ni des autres qu'elles étaient de lui.
M. Brunet a donné, dans la dernière édition du Manuel du Libraire, une excellente notice des éditions de Villon. La première avec date est de Paris (Pierre Levet), 1489, in-40. Il en parut plusieurs autres à la fin du XVe siècle et au commencement du XVIe. Celle de Paris, Galiot Du Pré, i532, in-8, est la première à laquelle on ait joint les Repues franches, le Monologue du franc archier de Baignolet et le Dialogue des seigneurs de Mallepaye et de Baillevent (1).
L'année suivante, le même Galiot Du Pré publia la première édition des œuvres de Villon revues par Clément Marot.
En 1723 il parut chez Coustelier une édition de Villon, avec les remarques d'Eusèbe de Laurière et une lettre du P. Du Cerceau.
Les œuvres de Villon furent réimprimées en 1742, à la Haye, avec les remarques de Laurière, Le Duchat et Formey, des mémoires de Prosper Marchand et une lettre critique extraite du Mercure de février 1 714.
En i83z parut l'édition de Prompsault, fruit de longues et laborieuses recherches, et qui, sans être parfaite, ne méritait pas le discrédit dont elle a été frappée pendant longtemps.
Dans l'édition de 1854, dueauxsoins de M. P. L. (1) Il avait été fait antérieurement plusieurs éditions des Repeues franches, qui s'ajoutaient aux éditions correspondantes des œuvres de Villon, mais qui portaient des signatures ou une pagination séparées.
Jacob, bibliophile (M. Paul Lacroix.), le texte de Prompsault a été revu, notablement amélioré, élucidé par des notes où brillent l'érudition et la sagacité bien connues de leur auteur.
Enfin, tout récemment, M. Paul Lacroix a publié le texte des deux Testaments d'après un manuscrit de la bibliothèque de l'Arsenal. Je n'ai pu faire usage de cette intéressante publication, d'abord parce que l'impression de mon édition était trop avancée, puis pour une autre raison c'est que je ne pouvais m'écarter du texte que j'avais adopté.
On savait depuis longtemps que La Monnoye avait eu l'intention de faire une édition des œuvres de Villon. A cet effet, il avait annoté un exemplaire de l'édition de 1723. Cet exemplaire, dont on avait perdu la trace depuis longtemps, a été retrouvé, en i858, au British Museum, par M. Gustave Masson, qui m'a gracieusement offert une copie du travail de La Monnoye. En tête de son exemplaire, La Monnoye avait inscrit d'abord ce titre, qui nous fait connaître le plan d'une vaste collection qu'il projetait L'Histoireet les Chefs delapoésiefrançoise, avec la liste des poétes provençaux et français, accompagnée de remarques sur le caractère de leurs ouvrages.
Puis vient ce titre particulier:
Poésies de François Villon et de ses disciples, revues sur les différentes éditions, corrigées et augmentées sur le manuscrit de M. le duc de Coislin et surplusieurs autres, et enrichies d'un grand nombre de pièces, avec des notes historiques et critiques.
La Monnoye n'eut pas le temps de mettre la dernière main à son édition de Villon, Son travail ne porta que sur rétablissement du texte. La
comparaison des manuscrits et des anciennes édi.tions, faite par un homme tel que La Monnoye, devait donner d'excellents résultats. J'ai reproduit scrupuleusement, sauf deux ou trois exceptions indiquées dans les notes, le texte tel qu'il a été arrêté par lui, et ce texte est assurément le meilleur qu'on ait donné jusqu'à présent.
La Monnoye ne se contenta pas de revoir le texte de l'édition de 1723. Il y ajouta de sa main divers morceaux qui n'avaient pas encore été publiés, et qui ont paru pour la première fois dans l'édition Prompsault. Mais il ne put faire le choix des poésies qu'il voulait joindre aux oeuvres de Villon. Pour répondre de mon mieux à son plan, je donne à la fin du volume dix-sept pièces tirées du Jardin de plaisance. M. Campeaux en avait publié un plus grand nombre j'ai fait un choix dans son choix, et si les pièces que je donne ne sont pas de Villon, elles sont au moins de son école, et souvent dignes de lui.
Pour toute la partie du texte établie par La Monnoye, je n'avais qu'une chose à faire suivre la leçon adoptée par lui. A l'égard des pièces dont il ne s'était pas occupé, j'ai dû agir autrement je les ai revues sur les manuscrits et les éditions originales.
A défaut des notes historiques et critiques promises par La Monnoye, et sans avoir la prétention de les suppléer, je donne à la suitedu texte quelques renseignements qui m'ont paru nécessaires, puis un Glossaire-Index, dans lequel j'ai tenté d'expliquer les mots vieillis, de donner des renseignements sur les personnes et les choses. S'il n'a pas d'autre utilité, ce travail servira du moins de table.
Une édition de Villon n'est pas facile à faire. J'ai largement mis à profit les travaux de mes devanciers, et je me plais à le reconnaître. J'aurais
pu relever bien des erreurs je me suis contenté de les corriger. Je crois que cette édition vaut mieux que celles qui Pont précédée. D'autres viendront après moi qui feront mieux. J'ai cru prudent de leur donner l'exemple de l'indulgence.
P. Jannbt.
REMARQUES PHILOLOGIQUES.,
La langue de Villon est encore la vieille et bonne langue française, riche et simple, claire, naturelle, à l'allure vive et franche. C'est encore la langue des fabliaux, assouplie, mais presque entièrement préservée de l'invasion des mots pédantesques forgés dans la seconde moitié du XVe siècle. Le Glossaire, dont l'étendue est grande relativement à celle du livre, n'offre qu'un petit nombre de ces mots. En revanche, il en contient beaucoup d'autres dont la perte est regrettable.
Villon était très-sévère pour la rime. Aussi, lorsque nous rencontrons à la fin de ses vers quelque chose qui nous paraît anormal, nous devons nous garder de l'expliquer par une négligence du poète. Il faut chercher d'autres raisons; cela peut amener des observations intéressantes. Par exemple, lorsqu'il fait rimer e avec a (i), cela prouva, ainsi que Marot l'a remarqué, que Villon prononçait, à la parisienne, a pour e. Lorsqu'il fait rimer oi, oy-, avec ai, ay, é (2), cela prouve que ce que nous appelons la diphthongue oi se prononçait é ou è.
S'il fait rimer Changon, Nygon, escourgon, avec donjon (3), c'est que, dans certains cas, le g se prononçait j.
(1) Robert, haubert, avec pluspart, poupart (p. 1I et 1 2) La Barre, feurre, avec terre, querre (p. 14) appert avec part, despart (p. 44), etc.
(2) Chollet avec souloit (p. 14); exploict^ avec lai\ (p. 17); moyne, essoyne, royne, avec Seme (p. 34), etc. (3) Pages 12 et 1 3.
̃*̃
«.S'il foit riMer /atfe avec Jifsst,flmfhèai tiec fisses (t), c'est eiiçore une affaÉfe éCpronoHciation parisienne. '̃ S
Il en est de même fcuuâûi^ Valérien, paroissien, rinjïflt «yec; <ïrt (»).
Lorsqu'il écrit soulton pour ritaer avec Roussillon (3), il entend que les deux H seront mouillées, et prononcées comm$' tetlea. t^n» être précédées d'un t, eôtRme en etpafiu»(. '̃; Gonimel[tl«ut-il pfOROR^l' 1« iJom de Villon ? f
Î~BN~~tàMaB~,)~ l,
Laa»R^<itelajpaae99,l']B/ijfr?de')ayage 1 1 1,
le Problème ou Èaflàde- <te hr, p«g6 no» etc., ne
laissent «vciia^oute&ci^.<O*^oi^iej(«Hnoncer comme les^eui dçrnftreii sj^hibêjiu-inot jravi£i.oiBY ^c'est^dir^ «nôw p»; teHirra. En
France; ce n'est guère que dan?: le Mtâj qo'on^ait
prononcer le& /l, *iou«;Af., Le»' P»ri«6nr dirOBt F/ycm/lês^cards, waru. Afaïs bien est fia tt tunaticque
Qjti de.çe'fait te)tnortsi hngf.
Peurtuitàlachosepublicqtte
Se Brttssiens~disent Filon.
li ne m'en cAaidf gueres si ton
Choisit de ces façons la pire,
Et bien venil qu'on dise selon
Q]te dès pieça Von souloit dire.
(i) Page» j6«t 53.
(î)P.»i. ̃ ̃̃
(3)Voy.i«B«llad«MeUp«g«99. ̃
CLÉMENT MAROT DE CAHORS Varlet de chambre du Roy
AUX LECTEURS.
E NTRE tous les bons livres imprime; de la langue française ne s'en veoit ung si incorrect ne si lourdement corrompu que celluy de Villon, et m'esbahy (veu que c'est le meilleur Poète parisien qui se trouve) comment les imprimeurs de Paris et les enfans de la ville n'en ont eu plus grand soing. Je ne suis C certes), en rien son voysin; mais, pour l'amour de son gentil entendement, et en recompense de ce que je puys avoir aprins de luy en lisant ses Œuvres j'ai faict à icelles ce que je vouldroys estre faict aux miennes, si elles estoient tombées en semblable inconvénient. Tant y ay trouvé de broillerie en l'ordre des couplet^ et des vers, en mesure, en langaige, en la ryme et en la raison, que je ne sçay duquel je doy plus avoir pitié, ou de V œuvre ainsi oultrement gastée, ou de l'ignorance de ceux qui l'imprimèrent; et, pour en faire preuve, me suys advisé (Lecteurs) de vous mettre icy ung des couplet^ incorrect^ du mal imprimé Villon, qui vous fera exemple et tes-
moing d'ung grand nombre d'autres autant broille\ et gaste; que luy, lequel est tel
Or est vray qu'apres plainctz et pleurs
Et angoisseux gemissemens,
Apres tristesses et douleurs
Labeurs et griefz cheminemens
Travaille mes lubres sentemens
Aguysez ronds, comme une pelotî
Monstrent plus que les commens
En sens moral de Aristote.
Qui est celluy qui vouldroit nyer le sens n'en estre grandement corrompu? Ainsi, pour vray, Vay-je trouvé aux vieilles impressions, et encores pis aux nouvelles. Or, voyez maintenant comment il a esté r'abillé, et en juge j gratieusement Or est vray qu'apres plainctz et pleurs
Et angoisseux gemissemens,
Apres tristesses et douleurs,
Labeurs et griefz cheminemens,
Travail mes lubres sentements
Aguysa (ronds comme pelote),
Me monstrant plus que les commenta
Sur le sens moral d'Aristote.
Voylà comment il me semble que Pautheur l'entendoit et vous suffise ce petit amendement pour vous rendre adverti; de ce que puys avoir amendé en mille autres passaiges, dont les aucuns me ont esté aise; et les autres très difficiles. Toutesfoys, partie avecques les vieulx imprime;, partie avecques l'ayde de bons vieillards qui en sçavent par cueur, et partie par deviner avecques jugement naturel, a esté reduict nostre Villon en meilleure et plus entière forme qu'on ne l'a veu de nos
aages, et ce sans avoir touché à l'antiquité de son parler, à sa façon de rimer, à ses meslées et longues parenthèses, à la quantité de ses sillabes, ne à ses couppes, tant feminines que masculines; esquelles choses il n'a suffisamment observé les vrayes reigles de française poesie, et ne suys d'advis que en cela les jeunes Poetes l'ensuyvent, mais bien qu'ils cueillent ses sentences comme belles fleurs, qu'ilx contemplent l'esprit qu'il avoit, que de luy apreignent à proprement descrire, et qu'ilç contrefacent sa veine, mesmement celle dont il use en ses Ballades, qui est vrayment belle et héroïque, et ne fay doubte qu'il n'eust empoi-té le chapeau de laurier devant tous les Poètes de son temps, s'il eust esté nourry en la Court des Roys et des Princes, là où les jugemens se amendent et les langaiges se pollissent. Quant à l'industrie des lays qu'il feit en ses Testamens, pour suffisamment la congnoistre et entendre il fauldroit avoir esté de son temps à Paris, et avoir congneu les lieux, les choses et les hommes dont il parle la memoire desquels tant plus se passera, tant moins se congnoistra icelle industrie de ses lays dict%. Pour ceste cause, qui vouldra faire une œuvre de longue durée ne preigne son soubject sur telles choses basses et particulières. Le resté des Œuvres de nostre Villon (hors cela) est de tel artifice, tant plain de bonne doctrine et tellement painct de mille belles couleurs, que le temps, qui tout efface, jusques icy ne l'a sceu effacer; et moins encor l'effacera ores et d'icy en avant, que les bonnes escriptures françoises sont et seront mieulx congneues et recueillies que jamais.
Et pour ce (comme j'ay dit) que je n'ay touché à son antique façon de parler, je vous ay exposé sur la marge, avecques les annotations, ce qui m'a semblé le plus dur à entendre, laissant le reste à vox promptes intelligences, comme ly
Roys pour le Roy, homs pour homme, compaing pour compaignon; aussi force pluriers pour singuliers, et plusieurs autres incongruité^ dont estoit plain le langaige mal lymé d'icelluy temps. Après, quand il s'est trouvé faulte de vers entiers, j'ay prins peine de les refaire au plus près (selon mon possible) de l'intention de l'autheur, et les trouverez expressement marque^ de cette marque t, afin que céulx qui les sçauront en la sorte que Villon les fist effacent les nouveaulx pour faire place aux vieulx.
Oultre plus, les termes et les vers qui estoient interpose^, trouverez reduict\ en leurs places; les lignes trop courtes, allongées; les trop longues acoursies; les motf obmys, remys; les adjoutef osteç et les filtres myeulx attiltreq.
Finablement, fay changé l'ordre du livre, et m'a semblé plus raisonnable de le faire commencer par le Petit Testament, d'autant qu'il fut faict cinq ans avant l'autre.
Touchant le Jargon, je le laisse à corriger et exposer aux successeurs de Villon en l'art de la pinse et du croq.
Et si quelqu'un d'adventure veult dire que tout ne soit racoustré ainsi qu'il appartient, je luy respons dès maintenant que, s'il estoit autant navré en sa personne comme fay trouvé Villon blessé en ses Œuvres, il n'y a ai expert chirurgien qui le sceust panser sans apparence de cicatrice; et me suffira que le labeur qu'en ce j'ay employé soit agreable au Roy mon souverain, qui est cause et motif de ceste emprise et de l'exwcution d'icelle, pour l'avoir veu voulentiers escouter et par très bon jugement estimer plusieurs passages des Œuvres qui s'ensuyvent.
MAROT
AU ROY FRANÇOIS I».
S t à Villon on treuve encor à dire, S'il n'est reduict ainsi qu'ay pretendu, A moy tout seul en soit le blasme (Sire), Qui plus y ay travaillé qu'entendu; Et s'il est mieux en son ordre estendu Que paravant, de sorte qu'on l'en prise, Le gré à vous en doyt estre rendu, Qui fustes seul cause de l'entreprise.
LE
PETIT TESTAM ENT DE MAISTRE
FRANÇOIS VILLON
FAIT L'AN 14(6.
I.
M IL quatre cens cinquante et six, Je, Francois Villon, escollier,
Considérant, de sens rassis,
Le frain aux dents, franc au collier, Qu'on doit ses œuvres conseiller,
Comme Vegèce le racompte,
Saige Romain, grand conseiller,
Ou autrement on se mescompte.
I I.
En ce temps que j'ay dit devant,
Sur le Noël, morte saison,
Lorsque les loups vivent de vent,
Et qu'on se tient en sa maison,
Pour le frimas, près du tison
Cy me vint vouloir de briser
La très amoureuse prison
Qui souloit mon cueur desbriser.
III.
Je le feis en telle façon,
Voyant Celle devant mes yeulx Consentant à ma deffacon,
Sans ce que jà luy en fust mieulx; Dont je me deul et plains aux cieulx, En requérant d'elle vengence
A tous les dieux venerieux,
Et du grief d'amours allégence. IV.
Et, se je pense à ma faveur,
Ces doulx regrets et beaulx semblans De très decepvante saveur,
Me trespercent jusques aux flancs Bien ilz ont vers moy les piez blancs Et me faillent au grant besoing. Planter me fault autre complant Et frapper en un autre coing.
v.
Le regard de Celle m'a prins,
Qui m'a esté felonne et dure;
Sans ce qu'en riens aye mesprins, Veult et ordonne que j'endure La mort, et que plus je ne dure. Si n'y voy secours que fouir.
Rompre veult la dure souldure, Sans mes piteux regrets ouir!
VI.
Pour obvier à ses dangiers,
Mon mieulx est, ce croy, de partir.
Adieu Je m'en voys à Angiers, Puisqu'el ne me veult impartir Sa grace, ne me départir.
Par elle meurs, les membres sains; Au fort, je meurs amant martir, Du nombre des amoureux saints VII.
Combien que le depart soit dur, Si fault-il que je m'en esloingne. Comme mon paouvre sens est dur Autre que moy est en queloingne, Dont onc en forest de Bouloingne Ne fut plus altère d'humeur.
C'est pour moy piteuse besoingne Dieu en vueille ouïr ma clameur VIII.
Et puisque departir me fault,
Et du retour ne suis certain
Je ne suis homme sans deffault, Ne qu'autre d'assier ne d'estaing. Vivre aux humains est incertain, Et après mort n'y a relaiz
Je m'en voys en pays loingtaing Si establiz ce present laiz.
IX,
Premierement, au nom du Père. Du Filz et du Saint-Esperit,
Et de la glorieuse Mère
Par qui grace riens ne périt,
Je laisse, de par Dieu, mon bruit A maistre Guillaume Villon,
Qui en l'honneur de son nom bruit, Mes tentes et mon pavillon.
x.
A celle doncques que j'ay dict,
Qui si durement m'a chassé,
Que j'en suys de joye interdict
Et de tout plaisir dechassé,
Je laisse mon cœur enchassé,
Palle, piteux, mort et transy
Elle m a ce mal pourchassé,
Mais Dieu luy en face mercy i
XI.
Et à maistre Ythier, marchant,
Auquel je me sens très tenu,
Laisse mon branc d'acier tranchant, Et à maistre Jehan le Cornu,
Qui est en gaige détenu
Pour ung escot six solz montant; Je vueil, selon le contenu,
Qu'on luy livre, en le racheptant. XII.
Item, je laisse à Sainct-Amant
Le Cheval Blanc avec la Mulle,
Et à Blaru, mon dyamant
Et l'Asne rayé qui reculle.
Et le décret qui articulle
Omnis utriusque sexus,
Contre la Carmeliste bulle,
Laisse aux curez, pour mettre sus.
XIII.
Item, à Jehan Trouvé, bouchier,
Laisse le mouton franc et tendre,
Et ung tachon pour esmoucher
Le bœuf couronné qu'on veult vendre, Et la vache qu'on ne peult prendre. Le vilain qui la trousse au col,
S'il ne la rend, qu'on le puist pendre Ou estrangler d'un bon licol!
XIV.
Et à maistre Robert Vallée,
Povre clergeon au Parlement,
Qui ne tient ne mont ne vallée,
J'ordonne principalement
Qu'on luy baille legerement
Mes brayes, estans aux trumellières, Pour coeffer plus honestement
S'amye Jehanneton de Millières.
xv.
Pour ce qu'il est de lieu honeste,
Fault qu'il soit myeulx recompensé, Car le Saint-Esprit l'admoneste.
Ce obstant qu'il est insensé.
Pour ce, je me suis pourpensé,
Puysqu'iln'a sens maisqu'uneaulmoire, De recouvrer sur Malpensé,
Qu'on lui baille, l'Art de mémoire. XVI.
Item plus, je assigne la vie
Du dessusdict maistre Robert.
Pour Dieu n'y ayez point d'envie Mes parens, vendez mon haubert,
Et que J'argent, ou la pluspart,
Soit employé, dedans ces Pasques, Pour achepter à ce poupart
Une fenestre emprès Saint-Jacques. XVII.
Derechief, je laisse en pur don
Mes gands et ma hucque de soye
A mon amy Jacques Cardon;
Le gland aussi d'une saulsoye,
Et tous les jours une grosse oye
Et ung chappon de haulte gresse
Dix muys de vin blanc comme croye, Et deux procès, que trop n'engresse. jïiii,
Item, je laisse à ce jeune homme,
René de Montigny, troys chiens;
Aussi à Jehan Raguyer, la somme De cent frans, prins sur tous mes biens Mais quoy! Je n'y comprens en riens Ce que je pourray acquerir
On ne doit trop prendre des siens,
Ne ses amis trop surquerir.
XIX.
Item, au seigneur de Grigny
Laisse la garde de Nygon,
Et six chiens plus qu'à Montigny,
Vicestre, chastel et donjon;
Et à ce malostru Changon,
Moutonnier qui tient en procès,
Laisse troys coups d'ung escourgon, Et coucher, paix et aise, en ceps. xx
Et à maistre Jacques Raguyer,
Je laisse l'Abreuvoyr Popin,
Pour ses paouvres seurs grafignier; Tousjours le choix d'ung bon lopin, Le trou de la Pomme de pin, )
Le doz aux rains, au feu la plante, Emmailloté en jacopin;
Et qui vouldra planter, si plante. XXI.
Item, à maistre Jehan Mautainct Et maistre Pierre Basannier,
Le gré du Seigneur, qui attainct Troubles, forfaits, sans espargnier; Et à mon procureur Fournier,
Bonnetz courts, chausses semellées, Taillées sur mon cordouennier, Pour porter durant ces gellées.
XXII.
Item, au chevalier du guet,
Le heaulme luy establis;
Et aux piétons qui vont d'aguet Tastonnant par ces establis,
Je leur laisse deux beaulx rubis, La lenterne à la Pierre-au-Let.. Voire-mais, j'auray les Troys licts, S'ilz me meinent en Chastellet.
XXIII.
Item, à Perrenet Marchant,
Qu'on dit le Bastard de la Barre, Pour ce qu'il est ung bon marchant, Luy laisse trois gluyons de feurre Pour estendre dessus la terre
A faire l'amoureux mestier,
Où il luy fauldra sa vie querre, Car il ne scet autre mestier
XXIV.
Item, au Loup et à Chollet,
Je laisse à la foys un canart,
Prins sous les murs, comme on souloit, Envers les fossez, sur le tard;
Et à chascun un grand tabart
De cordelier, jusques aux pieds, Busche, charbon et poys au lart, Et mes housaulx sans avantpiedz. xxv.
Derechief, je laisse en pitié,
A troys petitz enfans tous nudz, Nommez en ce present traictié,
Paouvres orphelins impourveuz, Tous deschaussez, tous despourveus, Et desnuez comme le ver;
J'ordonne qu'ils seront pourveuz, Au moins pour passer cest yver. XXVI.
Premierement, Colin Laurens,
Girard Gossoyn et Jehan Marceau,
Desprins de biens et de parens, Qui n'ont vaillant l'anse d'ung ceau, Chascun de mes biens ung faisseau, Ou quatre blancs, s'ilz l'ayment mieulx; Ils mangeront maint bon morceau, Ces enfans, quand je seray vieulx XXVII.
Item, ma nomination,
Que j'ay de l'Université,
Laisse par résignation,
Pour forclorre d'adversité
Paouvres clercs de ceste cité,
Soubz cest intendit contenuz
Charité m'y a incité,
Et Nature, les voyant nudz.
XXVIII.
C'est maistre Guillaume Cotin
Et maistre Thibault de Vitry,
Deux paouvres clercs, parlans latin, Paisibles enfans, sans estry,
Humbles, bien chantans au lectry. Je leur laisse cens recevoir
Sur la maison Guillot Gueuldry, En attendant de mieulx avoir.
XXIX.
Item plus, je adjoinctz à la Crosse Celle de la rue Sainct-Anthoine, Et ung billart de quoy on crosse, Et tous les jours plain pot de Seine, Aux pigons qui sont en l'essoine, Enserrez soubz trappe volière,
Et mon mirouer bel et ydoyne, Et la grace de la geollière.
xxx.
Item, je laisse aux hospitaux
Mes chassis tissus d'araignée;
Et aux gisans soubz les estaux, Chascun sur l'œil une grongnée, Trembler à chière renffrongnée, Maigres, velluz et morfonduz; Chausses courtes, robbe rongnée, Gelez, meurdriz et enfonduz.
XXXI.
Item, je laisse à mon barbier
Les rongneures de mes cheveulx, Plainement et sans destourbier Au savetier, mes souliers vieulx, Et au fripier, mes habitz tieulx Que, quant du tout je les délaisse, Pour moins qu'ilz ne coustèrent neufz Charitablement je leur laisse.
XXXII.
Item, aux Quatre Mendians,
Aux Filles Dieu et aux Beguynes, Savoureulx morceaulx et frians, Chappons, pigons, grasses'gelines, Et puis prescher les Quinze Signes, Et abatre pain à deux mains.
Carmes chevaulchent nos voisines, Mais cela ne m'est que du meins.
TESTAMENT.
XXXIII.
Item, laisse le Mortier d'or
A. Jehan l'Espicier, de la Garde, Et une potence à Sainct-Mor, Pour faire ung broyer à moustarde, Et celluy qui feit l'avant-garde, Pour faire sur moy griefz exploitz, De par moy sainct Anthoine l'arde Je ne lui lairray autre laiz.
xxxiv.
Item, je laisse à Mairebeuf
Et à Nicolas de Louvieulx,
A chascun l'escaille d'un œuf, Plaine de frans et d'escus vieulx. Quant au concierge de Gouvieulx, Pierre Ronseville, je ordonne, Pour luy donner encore mieulx, Escus telz que prince les donne. xxxv.
Finalement, en escrivant,
Ce soir, seullet, estant en bonne, Dictant ces laiz et descripvant, Je ouyz la cloche de Sorbonne, Qui tousjours à neuf heures sonne Le Salut que l'Ange predit; Cy suspendy et cy mis bonne', Pour pryer comme le cueur dit. XXXVI.
Cela fait, je me entre-oubliai, Non pas par force de vin boire,
Mon esperit comme lié;
Lors je senty dame Memoire
Rescondre et mectre en son aulmoire Ses espèces collaterales,
Oppinative faulce et voire,
Et autres intellectualles.
XXXVII.
Et mesmement l'extimative,
Par quoy prosperité nous vient; Similative, formative,
Desquelz souvent il advient
Que, par l'art trouvé, hom devient Fol et lunaticque par moys
Je l'ay leu, et bien m'en souvient, En Aristote aucunes fois.
XXXVIII.
Doncques le sensif s'esveilla
Et esvertua fantasie,
Qui tous argcutis resveilla,
Et tint souveraine partie,
En souppirant, comme amortie, Par oppression d'oubliance,
Qui en moy s'estoit espartie
Pour montrer des sens l'alliance. XXXIX.
Puis, mon sens qui fut à repos Et l'entendement desveillé,
Je cuide finer mon propos;
Mais mon encre estoit gelé,
Et mon cierge estoit sourie.
De feu je n'eusse pu finer.
Si m'endormy, tout enmouflé, Et ne peuz autrement finer. XL
Fait au temps de ladicte date, Par le bon renommé Villon, Qui ne mange figue ne date; Sec et noir comme escouvillon, II n'a tente ne pavillon
Qu'il n'ayt laissé à ses amys, Et n'a mais qu'un peu de billon, Qui sera tantost à fin mys.
CY FINE LE TESTAMENT VILLON.
CY COMMENCE
LE
GRANT TESTAMENT DE
FRANÇOIS VILLON
FAIT EN 1461.
I.
En l'an trentiesme de mon eage, Que toutes mes hontes j'eu beues, Ne du tout fol, ne du tout sage. Nonobstant maintes peines eues, Lesquelles j'ay toutes receues
Soubz la main Thibault d'Aussigny. S'evesque il est, seignant les rues, Qu'il soit le mien je le regny 1
11. I,
Mon seigneur n'est, ne mon evesque; Soubz luy ne tiens, s'il n'est en friche; Foy ne luy doy, ne hommage avecque; Je ne suis son serf ne sa biche. Peu m'a d'une petite miche
Et de froide eau, tout ung esté.
Large ou estroit, moult me fut chiche. Tel luy soit Dieu qu'il m'a esté.
III.
Et, s'aucun me vouloic reprendre
Et dire que je le mauldys,
Non fais, si bien me scait comprendre, Et rien de luy je ne mesdys.
Voycy tout le mal que j'en dys
S'il m'a esté misericors,
Jésus, le roy de paradis,
Tel luy soit à l'ame et au corps!
IV.
S'il m'a esté dur et cruel
Trop plus que cy ne le racompte,
Je vueil que le Dieu eternel
Luy soit doncq' semblable, à ce compte! Mais l'Eglise nous dit et compte
Que prions pour nos ennemis;
Je vous dis que j'ay tort et honte
Tous ses faictz soient à Dieu remis! v.
Si prieray Dieu de bon cueur,
Pour l'âme du bon feu Cotard.
Mais quoy! ce sera doncq par cueur, Car de lire je suys faitard.
Prière en feray de Picard
S'il ne le scait, voise l'apprandre,
S'il m'en croyt, ains qu'il soit plus taH A Douay, ou à Lysle en Flânai*
VI.
Combien souvent jeveuil qu'on prie Pour luy, foy que doy mon baptesme, Obstant qu'à chascun ne le crye, II ne fauldra pas à son esme.
Au Psaultier prens, quand suys àmesme, Qui n'est de beuf ne cordoen,
Le verset escript le septiesme
Du psaulme de Deus laudem.
VII.
Si pry au benoist Filz de Dieu,
Qu'à tous mes besoings je reclame, .Que ma pauvre prière ayt lieu
Verz luy, de qui tiens corps et ame, Qui m'a preservé de maint blasme Et franchy de vile puissance.
Loué soit-il, et Nostre-Dame,
Et Loys, le bon roy de France!
VIII.
Auquel doint Dieu l'heur de Jacob, De Salomon l'honneur et gloire; Quant de prouesse, il en a trop; De force aussi, par m'ame, voire! En ce monde-cy transitoire,
Tant qu'il a de long et de lé;
Affin que de luy soit memoire,
Vive autant que Mathusalé!
I X.
Et douze beaulx enfans, tous masles, Veoir, de son très cher sang royal,
Aussi preux que fut le grand Charles, Conceuz en ventre nuptial,
Bons comme fut sainct Martial.
Ainsi en preigne au bon Dauphin; Je ne luy souhaicte autre mal,
Et puys paradis à la fin.
x.
Pour ce que foible je me sens,
Trop plus de biens que de santé,
Tant que je suys en mon plain sens, Si peu que Dieu m'en a presté,
Car d'autre ne l'ay emprunté,
J'ay ce Testament très estable
Faict, de dernière voulenté,
Seul pour tout et irrévocable
XI. 1.
Escript l'ay l'an soixante et ung,
Que le bon roy me delivra
De la dure prison de Mehun,
Et que vie me recouvra,
Dont suys, tant que mon cueur vivra, Tenu vers luy me humilier,
Ce que feray jusqu'il mourra
Bienfaict ne se doibt oublier.
Icy commence Villon à entrer en matière pleine d'erudition et de bon sçavoir.
XII. 1.
Or est vray qu'après plaingtzet pleurs t aus>oisseux gemissemens,
Après tristesses et douleurs,
Labeurs et griefz cheminemens, Travail mes lubres sentemens,
Esguisez comme une pelote,
M'ouvrist plus que tous les Commens D'Averroys sur Aristote.
XIII.
Combien qu'au plus fortdemesmaulx, En cheminant sans croix ne pile, Dieu, qui les Pellerins d'Esmaus Conforta, ce dit l'Evangile,
Me montra une bonne ville
Et pourveut du don d'esperance; Combien que le pecheur soit vile, Riens ne hayt que perseverance. XIV.
Je suys pecheur, je le scay bien; Pourtant Dieu ne veult pas ma mort, Mais convertisse et vive en bien Mieulx tout autre que peché mord, Soye vraye voulenté ou enhort, Dieu voit, et sa misericorde,
Se conscience me remord,
Par sa grace pardon m'accorde.
xv.
Et, comme le noble Romant
De la Rose dit et confesse
En son premier commencement, Qu'on doit jeune cueur, en jeunesse, Quant on le voit vieil en vieillesse, Excuser; helas! il dit voir.
Ceulx donc qui me font telle oppresse, En meurté ne me vouldroient veoir. XVI.
Se, pour ma mort, le bien publique D'aucune chose vaulsist myeulx, A mourir comme ung homme inique Je me jugeasse, ainsi m'aid Dieux Grief ne faiz à jeune ne vieulx,
Soye sur pied ou soye en bière Les montz ne bougent de leurs lieux, Pour un paouvre, n'avant, n'arrière. XVII.
Au temps que Alexandre regna, Ung hom, nommé Diomedès,
Devant luy on luy amena,
Engrillonné poulces et detz
Comme ung larron; car il fut des Escumeurs que voyons courir.
Si fut mys devant le cadès
Pour estre jugé à mourir.
XVIII.
L'empereur si l'arraisonna
« Pourquoy es-tu larron de mer? » L'autre, responce luy donna
« Pourquoy larron me faiz nommer? Pour ce qu'on me voit escumer « En une petiote fuste ? >
« Se comme toy me peusse armer, « Comme toy empereur je fusse.
XIX.
« Mais que veux-tu De ma fortune, « Contre qui ne puis bonnement, « Qui si durement m'infortune,
« Me vient tout ce gouvernement. « Excuse-moy aucunement,
« Et scaches qu'en grand pauvreté « (Ce mot dit-on communément) « Ne gist pas trop grand loyaulté. » xx.
Quand l'empereur eut remiré
De Diomedès tout le dict
« Ta fortune je te mueray,
« Mauvaise en bonne! » ce luy dit. Si fist-il. Onc puis ne mesprit
A personne, mais fut vray homme; Valère, pour vray, le rescript,
Qui fut nommé le grand à Romme. XXI.
Se Dieu m'eust donné rencontrer Ung autre piteux Alexandre,
Qui m'eust faict en bon heur entrer, Et lors qui m'eust veu condescendre A mal, estre ars et mys en cendre Jugé me fusse de ma voix.
Necessité faict gens mesprendre, Et faim saillir le loup des boys. XXII.
Je plaings le temps de ma jeunesse, Ouquel j'ay plus qu'autre gallé,
Jusque à l'entrée de vieillesse,
Qui son partement m'a celé.
Il ne s'en est à pied allé,
N'à cheval; las! et comment donc? Soudainement s'en est voilé,
Et ne m'a laissé quelque don.
XXIII.
Allé s'en est, et je demeure,
Pauvre de sens et de sçavoir,
Triste, failly, plus noir que meure, Qui n'ay ne cens, rente, n'avoir; Des miens le moindre, je dy voir, De me desadvouer s'avance,
Oublyans naturel devoir,
Par faulte d'ung peu de chevance. XXIV.
Si ne crains avoir despendu,
Par friander et par leschier
Par trop aimer n'ay riens vendu, Que nuls me puissent reprouchier, Au moins qui leur couste trop cher. Je le dys, et ne croys mesdire.
De ce ne me puis revencher
Qui n'a meffait ne le doit dire. xxv.
Est vérité que j'ay aymé
Et que aymeroye voulentiers;
Mais triste cueur, ventre affamé, Qui n'est rassasié au tiers,
Me oste des amoureux sentiers. Au fort, quelqu'un s'en recompense,
Qui est remply sur les chantiers, Car de la panse vient la danse.
XXVI.
Bien sçay se j'eusse estudié
Ou temps de ma jeunesse folle, Et à bonnes meurs dedié,
J'eusse maison et couche molle! Mais quoy? je fuyoye l'escolle, Comme faict le mauvays enfant. En escrivant ceste parolle,
A peu que le cueur ne me fend. XXVII.
Le dict du Saige est très beaulx dictz, Favorable, et bien n'en puis mais, Qui dit « Esjoys-toy, mon filz, A ton adolescence; mais
Ailleurs sers bien d'ung autre mectz, Car jeunesse et adolescence
(C'est son parler, ne moins ne mais) Ne sont qu'abbus et ignorance. » XXVIII.
Mes jours s'en sont allez errant, Comme, dit Job, d'une touaille Sont les filetz, quant tisserant
Tient en son poing ardente paille Lors, s'il y a nul bout qui saille, Soudainement il le ravit.
Si ne crains rien qui plus m'assaille, Car à la mort tout assouvyst.
XXIX.
Où sont les gratieux gallans
Que je suyvoye au temps jadis,
Si bien chantans, si bien parlans,
Si plaisans en faictz et en dictz ? >
Les aucuns sont mortz et roydiz D'eulx n'est-il plus rien maintenant. Respit ils ayent en paradis,
Et Dieu saulve le remenant!
xxx.
Et les aucuns sont devenuz,
Dieu mercy grans seigneurs et maistres, Les autres mendient tous nudz,
Et pain ne voyent qu'aux fenestres; Les autres sont entrez en cloistres De Celestins et de Chartreux,
Bottez, housez, com pescheurs d'oystres: Voilà l'estat divers d'entre eulx.
XXXI.
Aux grans maistres Dieu doint bien fair Vivans en paix et en requoy.
En eulx il n'y a que refaire;
Si s'en fait bon taire tout quoy.
Mais aux pauvres qui n'ont de quoy, Comme moy, Dieu doint patience; Aux aultres ne fault qui ne quoy, Car assez ont pain et pitance.
XXXII.
Bons vins ont, souvent embrochez, Saulces, brouetz et gros poissons;
Tartres, flans, œufz fritz et pechez, Perduz, et en toutes façons.
Pas ne ressemblent les maçons, Que servir fault à si grand peine Ils ne veulent nulz eschancons, Car de verser chascun se peine. XXXIII.
En cest incident me suys mys, Qui de rien ne sert à mon faict. Je ne suys juge, ne commis,
Pour punyr n'absouldre meffaict. De tous suys le plus imparfaict. Loué soit le doulx Jesus-Christ! Que par moy leur soit satisfaict! Ce que j'ay escript est escript. XXXIV.
Laissons le monstier où il est; Parlons de chose plus plaisante. Ceste matière à tous ne plaist Ennuyeuse est et desplaisante. Pauvreté, chagrine et dolente, Tousjours despiteuse et rebelle, Dit quelque parolle cuysante; S'elle n'ose, si le pense-elle.
xxxv.
Pauvre je suys de ma jeunesse, De pauvre et de petite extrace. Mon pere n'eut oncq grand richesse, Ne son ayeul, nommé Erace. Pauvreté tous nous suyt et trace. Sur les tumbeaulx de mes ancestres,
Les ames desquelz Dieu embrasse, On n'y voyt couronnes ne sceptres. XXXVI.
De pouvreté me guermentant,
Souventesfoys me dit le cueur « Homme, ne te doulouse tant Et ne demaine tel douleur,
Se tu n'as tant qu'eust Jacques Cueur. Myeulx vault vivre soubz gros bureaux Pauvre, qu'avoir esté seigneur Et pourrir soubz riches tumbeaux! » XXXVII.
Qu'avoir esté seigneur! Que dys? Seigneur, lasse! ne l'est-il mais! Selon ce que d'aulcun en dict, Son lieu ne congnoistra jamais. Quant du surplus, je m'en desmectz, Il n'appartient à moy, pécheur; Aux théologiens le remectz,
Car c'est office de prescheur.
XXXVIII.
Sine suys, bien le considère,
Filz d'ange, portant dyadème
D'etoille ne d'autre sydère.
Mon pere est mort, Dieu en ayt l'amc; Quantest du corps, il gyst soubz lame. J'entends que ma mère mourra, Et le sçait bien, la pauvre femme; Et le filz pas ne demourra.
XXXIX.
Je congnoys que pauvres et riches, Sages et folz, prebstres et laiz,
Noble et vilain, larges et chiches, Petitz et grans, et beaulx et laidz, Dames à rebrassez colletz,
De quelconque condicion,
Portant attours et bourreletz,
Mort saisit sans exception.
XL.
Et mourut Paris et Helène.
Quiconques meurt, meurt à douleur. Celluy qui perd vent et alaine,
Son fiel se crève sur son cueur,
Puys sue Dieu scait quelle sueur! Et n'est qui de ses maulx l'allège Car enfans n'a, frère ne sœur.
Qui lors voulsist estre son pleige. XLI.
La mort le faict fremir, pallir,
Le nez courber, les veines tendre, Le col enfler, la chair mollir,
Joinctes et nerfs croistre et estendre. Corps feminin, qui tant est tendre, Polly, souef, si precieulx,
Te faudra-il ces maulx attendre? Ouy, ou tout vif aller ès cieulx.
BALLADE
DES DAMES DU TEMPS JADIS. Dictes-moy où, n'en quel pays, Est Flora, la belle Romaine;
Archipiada, ne Thaïs,
Qui fut sa cousine germaine;
Echo, parlant quand bruyt on maine Dessus rivière ou sus estan,
Qui beauté eut trop plus qu'humaine ? Mais où sont les neiges a'antan! Où est la très sage Heloïs,
Pour qui fut chastré et puis moyne Pierre Esbaillart à Sainct-Denys? Pour son amour eut cest essoyne. Semblablement, où est la royne Qui commanda que Buridan
Fust jetté en ung sac en Seine? Mais où sont les neiges d'antan! La royne Blanche comme ung lys, Qui chantoit à voix de sereine;
Berthe au grand pied, Bietris, Allys; Harembourges, qui tint le Mayne, Et Jehanne, la bonne Lorraine, Qu'Anglois bruslèrent à Rouen; Où sont-ilz, Vierge souveraine?. Mais où sont les neiges d'antanî
ENVOI
Prince, n'enquerez de sepmaine Où elles sont, ne de cest an, Que ce refrain ne vous remaine: Mais où sont les neiges d'antan l
BALLADE
DES SEIGNEURS DU TEMPS JADIS S Suyvant le propos precedent.
Qui plus? Où est le tiers Calixte, Dernier decedé de ce nom,
Qui quatre ans tint le Papaliste? Alphonse, le roy d'Aragon,
Le gracieux duc de Bourbon,
Et Artus, le duc de Bretaigne, Et Charles septiesme, le Bon?. Mais où est le preux Charlemaigne! Semblablement, le roy Scotiste, Qui demy-face eut, ce dit-on,
Vermeille comme une amathiste Depuys le front jusqu'au menton? Le roy de Chypre, de renom
Helâs! et le bon roy d'Espaigne, Duquel je ne sçay pas le nom?. Mais où est le preux Charlcmaigne!
D'en plus parler je me desiste; Ce n'est que toute abusion.
11 n'est qui contre mort resiste, Ne qui treuve provision.
Encor fais une question
Lancelot, le roy de Behaigne, Oli est-il? Où est son tayon?. Mais où est le preux Charlcmaigne! ENVOI.
Où est Claquin, le bon Breton ? Où le comte Daulphin d'Auvergne, Et le bon feu duc d'Alencon?. Mais où est le preux Charlemaigne 1 BALLADE
A ee propos, en vieil françois.
Mais où sont ly sainctz apostoles, D'aulbes vestuz, d'amys coeffez, Qui sont ceincts de sainctes estoles, Dont par le col prent ly mauffez, De maltalent tout eschauffez? Aussi bien meurt filz que servans; i De ceste vie sont bouffez
Autant en emporte ly vens.
Voire, où sont de Constantinobles L'emperier aux poings dorez, Ou de France ly roy tresnobles, Sur tous autres roys décorez,
Qui, pour ly grand Dieux adorez, Bastist églises et convens?
S'en son temps il fut honorez, Autant en emporte ly vens.
Où sont de Vienne et de Grenobles Ly Daulphin, ly preux, ly senez? Où, de Dijon, Saltins et Dolles, Ly sires et ly filz aisnez?
Où autant de leurs gens privez, Heraulx, trompettes, poursuyvans? Ont-ilz bien bouté soubz le nez?. Autant en emporte ly vens.
ENVOI.
Princes à mort sont destinez,
Et tous autres qui sont vivans; S'ils en sont coursez ou tennez, Autant en emporte ly vens.
XLII.
Puys que papes, roys, filz de roys, Et conceuz en ventres de roynes, Sont enseveliz, mortz et froidz, En aultruy mains passent leurs resnes; Moy, pauvre mercerot de Renes, Mourray-je pas? Ouy, se Dieu plaist; Mais que j'aye faict mes estrenes, Honneste mort ne me desplaist. XLIII.
Ce monde n'est perpetuel,
Quoy que pense riche pillart; Tous sommes soubz coutel mortel.
Ce confort prent pauvre vieillart, Lequel d'estre plaisant raillart Eut le bruyt, lorsque jeune estoit, Qu'on tiendroit à fol et paillart, Se, vieil, à railler se mettoit.
XLIV.
Or luy convient-il mendier,
Car à ce force le contraint.
Regrette huy sa mort, et hier; Tristesse son cueur si estrainct, Souvent, se n'estoit Dieu qu'il crainct, II feroit un horrible faict.
Si advient qu'en ce Dieu enfrainct, Et que luy-mesmes se deffaict. XLV.
Car, s'en jeunesse il fut plaisant, Ores plus rien ne dit qui plaise. Tousjours vieil synge est desplaisant: Moue ne faict qui ne desplaise. S'il se taist, affin qu'il complaise, Il est tenu pour fol recreu;
S'il parle, on luy dit qu'il se taise, Et qu'en son prunier n'a pas creu. XLVI.
Aussi, ces pauvres femmelettes, Qui vieilles sont et n'ont de quoy, Quand voyent jeunes pucellettes En admenez et en requoy,
Lors demandent à Dieu pourquoy Si tost nasquirent, n'à quel droit? Notre Seigneur s'en taist tout coy, Car, au tanser, il le perdroit.
LES REGRETS
DE LA BELLE HEAULMIÈRE Jà parvenue à vieillesse.
Advis m'est que j'oy regretter
La belle qui fut heaulmière,
Soy jeune fille souhaitter
Et parler en ceste manière
« Ha! vieillesse felonne et fière, Pourquoy m'as si tost abatue? Qui me tient que je ne me fière, Et qu'à ce coup je ne me tue?
« Tollu m'as ma haulte franchise Que beauté m'avoit ordonné
Sur clercz, marchans et gens d'Eglise Car alors n'estoit homme né
Qui tout le sien ne m'eust donné, Quoy qu'il en fust des repentailles, Mais que luy eusse abandonné Ce que reffusent truandailles.
« A maint homme l'ay reffusé, Qui n'estoit à moy grand saigesse, Pour l'amour d'ung garson rusé, Auquel j'en feiz grande largesse. A qui que je feisse finesse,
Par m'ame, je l'amoye bien!
Or ne me faisoit que rudesse,
Et ne m'amoyt que pour le mien.
« Jà ne me sceut tant detrayner, Fouller au piedz, que ne l'aymasse, Et m'eust-il faict les rains trayner, S'il m'eust dit que je le baisasse Et que tous mes maux oubliasse; Le glouton, de mal entaché,
M'embrassoit. J'en suis bien plusgrasse! t Que m'en reste-il? Honte et péché. « Or il est mort, passé trente ans, Et je remains vieille et chenue.
Quand je pense, lasse! au bon temps, Quelle fus, quelle devenue;
Quand me regarde toute nue,
Et je me voy si très-changée,
Pauvre, seiche, maigre, menue, Je suis presque toute enragée.
« Qu'est devenu ce front poly,
Ces cheveulx blonds, sourcilz voultyz, Grand entr'œil, le regard joly,
Dont prenoye les plus subtilz;
Ce beau nez droit, grand ne petiz; Ces petites joinctes oreilles,
Menton fourchu, cler vis traictis, Et ces belles lèvres vermeilles?
< Ces gentes espaules menues,
Ces bras longs et ces mains tretisses; Petitz tetins, hanches charnues, Eslevées. propres, faictisses
A tenir amoureuses lysses;
Ces larges reins, ce sadinet,
Assis sur grosses fermes cuysses, Dedans son joly jardinet?
« Le front ridé, les cheveulx gris, Les sourcilz cheuz, les yeulx estainctz, Qui faisoient regars et ris,
Dont maintz marchans furent attaincts; Nez courbé, de beaulté loingtains; Oreilles pendans et moussues;
Le vis pally, mort et destaincts; Menton foncé, lèvres peaussues « C'est d'humaine beauté l'yssues! Les bras courts et les mains contraictes, Les espaulles toutes bossues;
Mammelles, quoy! toutes retraictes; Telles les hanches que les tettes. Du sadinet, fy Quant des cuysses, Cuysses ne sont plus, mais cuyssettes Grivelées comme saulcisses.
« Ainsi le bon temps regretons
Entre nous, pauvres vieilles sottes, Assises bas, à croppetons,
Tout en ung tas comme pelottes, A petit feu de chenevottes,
Tost allumées, tost estainctes;
Et jadis fusmes si mignottes! Ainsi en prend à maintz et maintes, e
BALLADE DE LA BELLE HEAULMIÈRI AUX FILLES DE JOIB.
« Or y pensez, belle Gantière,
Qui m'escolière souliez estre,
Et vous, Blanche la Savetière,
Ores est temps de vous congnoistre. Prenez à dextre et à senestre
N'espargnez homme, je vous prie Car vieilles n'ont ne cours ne estre, Ne que monnoye qu'on descrie. « Et vous, la gente Saulcissière, Qui de dancer estes adextre;
Guillemette la Tapissière,
Ne mesprenez vers vostre maistre; Tous vous fauldra clorre fenestre, Quand deviendrez vieille, flestrie; Plus ne servirez qu'un vieil prebstre, Ne que monnoye qu'on descrie. « Jehanneton la Chaperonnière, Gardez qu'ennuy ne vous empestre; Katherine la Bouchière,
N'envoyez plus les hommes paistre Car qui belle n'est, ne perpetre Leur bonne grace, mais leur rie. Laide vieillesse amour n'impetre, Ne que monnoye qu'on descrie. ENVOI.
« Filles, veuillez vous entremettre D'escouter pourquoy pleure et crie
C'est que ne puys remède y mettre, Ne que monnoye qu'on descrie. »
XLVII.
Ceste leçon icy leur baille
La belle et bonne de jadis;
Bien dit ou mal, vaille que vaille, Enregistrer j'ay faict ces ditz
Par mon clerc Fremin l'estourdys, Aussi rassis que je pense estre.
S'il me desment, je le mauldys Selon le clerc est deu le maistre. XLVIII.
Si apercoy le grand danger
Là où l'homme amoureux se boute. Hé! qui me vouldroit laidanger
De ce mot, en disant « Escoute Se d'aymer t'estrange et reboute
Le barat de celles nommées,
Tu fais une bien folle doubte,
Car ce sont femmes diffamées.
XLIX.
« S'ils n'ayment fors que pour l'argent, On ne les ayme que pour l'heure. Rondement ayment toute gent,
Et rient lors quant bourse pleure. De celles n'est qui ne recœuvre
Mais en femmes d'honneur et nom Franc homme, se Dieu me sequeure, Se doit employer; ailleurs, non. »
L.
Je prens qu'aucun dye cecy,
Si ne me contente-il en rien.
En effect, je concludz ainsy,
Et sy le cuyde entendre bien,
Qu'on doit aymer en lieu de bien. Ascavoir-mon se ces fillettes,
Qu'en parolles toute jour tien,
Ne furent pas femmes honnestes?
LI. I.
Honnestes, si furent vrayement,
Sans avoir reproches ne blasmes.
S'il est vray que, au commencement, Une chascune de ces femmes
Lors prindrent, ains qu'eussent diffames, L'une ung clerc, ung lay, l'autre ung moine, Pour estaindre d'amours les flammes, Plus chauldes que feu Sainct-Antoine. lu.
Or firent selon le decret
Leurs amys, et bien y appert;
Elles aymoient en lieu secret,
Car autre qu'eulx n'y avoit part.
Toutesfois, ceste amour se part
Car celle qui n'en avoit qu'un
D'icelluy s'eslongne et despart,
Et ayme myeulx aymer chascun.
LII I.
Qui les meut à ce? J'imagine,
Sans l'honneur des dames blasmer
Que c'est nature feminine,
Qui tout vivement veult aymer.
Autre chose n'y scay rymer;
Fors qu'on dit, à Reims et à Troys, Voire à l'Isle et à Sainct-Omer,
Que six ouvriers font plus que troys. LIV.
Or ont les folz amans le bond,
Et les dames prins la voilée
C'est le droit loyer qu'amours ont; Toute foy y est violée,
Quelque doulx baiser n'acollée.
De chiens, d'oyseaulx, d'armes, d'amours, Chascun le dit à la vollée
« Pour ung plaisir mille doulours. »
DOUBLE BALLADE
SUR LE MÊME PROPOS.
Pour ce, aymez tant que vouldrez, Suyvez assemblées et festes,
En la fin jà mieulx n'en vauldrez, Et sy n'y romprez que vos testes Folles amours font les gens bestes Salmon en idolatrya
Samson en perdit ses lunettes. Bien heureux est qui rien n'y a! Orpheus, le doux menestrier,
Jouant de flustes et musettes,
En fut en dangier du meurtrier Bon chien Cerberus à troys testes; Et Narcissus, le bel honnestes, En ung profond puys se noya, Pour 1 amour de ses amourettes. Bien heureux est qui rien n'y a! Sardana, le preux chevalier,
Qui conquist le règne de Crêtes, En voult devenir moulier
Et filer entre pucellettes.
David ly roy, saige prophètes, Craincte de Dieu en oublya,
Voyant laver cuisses bien faictes. Bien heureux est qui rien n'y a! Ammon en voult deshonnorer, Feignant de manger tartelettes, Sa sœur Thamar, et deflorer, Qui fist choses moult deshonnestes; Herodes (pas ne sont sornettes) Sainct Jean-Baptiste en decolla, Pour dances, saultz et chansonnettes. Bien heureux est qui rien n'y a! De moy, pauvre, je veuil parler; J'en fu« batu, comme à ru telles, Tout nud, jà ne le quiers celer. Qui me feit mascher ces groiselles, Fors Katherine de Vauselles? Noé le tiers ot, qui fut là.
Mitaines à ces nopces telles,
Bien heureux est qui rien n'y a!
Mais que ce jeune bachelier
Laissast ces jeunes bachelettes,
Non! et, le deust-on vif brusler, Comme ung chevaucheur d'escovettes. Plus doulces luy sont que civettes; Mais toutesfoys fol s'y fia •.
Soient blanches, soient brunettes, Bien heureux est qui rien n'y a!
LV.
Si celle que jadis servoye
De si bon cueur et loyaument,
Dont tant de maulx et griefz j'avoye, Et souffroye tant de torment
Se dit m'eust, au commencement, Sa voulenté (mais nenny, las!),
J'eusse mys peine aucunement,
De moy retraire de ses las.
LVI.
Quoy que je luy voulsisse dire,
Elle estoit preste d'escouter,
Sans m'accorder ne contredire;
Qui plus, me souffroit arrester,
Joignant elle près s'accouter;
Et ainsi m'alloit amusant,
Et me souffroit tout racompter,
Mais ce n'estoit qu'en m'abusant. LVII.
Abusé m'a, et faict entendre
Tousjours d'ung que ce fust ung aultre; De farine, que ce fust cendre
D'ung mortier, ung chapeau de feautre; De viel machefer, que fust peaultre D'ambesas, que ce fussent ternes. Toujours trompant ou moy ou aultre, Et vendoit vessies pour lanternes. LVIII.
Du ciel, une poisle d'arain;
Des nues, une peau de veau;
Du matin, qu'estoit le serain;
D'un trongnon de chou, ung naveau D'orde cervoise, vin nouveau;
D'une truie, ung molin à vent;
Et d'une hart, ung escheveau;
D'un gras abbé, ung poursuyvant. LIX.
Ainsi m'ont amours abusé,
Et pourmené de l'uys au pesle.
Je croy qu'homme n'est si rusé,
Fust fin comme argent de crepelle, Qui n'y laissast linge et drapelle, Mais qu'il fust ainsi manyé @
Comme moy, qui partout m'appelle L'Amant remys et renyé.
LX.
Je renye Amours et despite;
Je deffie à feu et à sang.
Mort par elles me précipite,
Et si ne leur vault pas d'ung blanc. Ma vielle ay mys soubz le banc;
Amans je ne suyvray jamais;
Se jadis je fuz de leur ranc,
Je declaire que n'en suys mais.
LXI.
Car j'ay mys le plumail au vent Or le suyve qui a attente
De ce me tays dorenevant.
Poursuyvre je vueil mon entente, Et, s'aucun m'interroge ou tente Comment d'amours ose mesdire, Ceste parolle les contente
« Qui meurt a ses loix de tout dire. » LXII.
Je cognoys approcher ma soef; Je crache, blanc comme cotton, Jacobins gros comme ung estœuf Qu'est-ce à dire? que Jehanneton Plus ne me tient pour valeton, Mais pour ung vieil usé regnart. De vieil porte voix et le ton,
Et ne suys qu'ung jeune coquart. LXIII.
Dieu mercy et Jaques Thibault, Qui tant d'eau froide m'a faict boyre, En ung bas lieu, non pas en hault; Manger d'angoisse mainte poire; Enferré. Quand j'en ay mémoire, Je pry pour luy et reliqua,
Que Dieu luy doint. et voire, voire Ce que je pense. et cetera.
LXIV.
Toutesfoys, je n'y pense mal,
Pour luy et pour son lieutenant;
Aussy pour son official,
Qui est plaisant et advenant,
Que faire n'ay du remenant;
Mais du petit maistre Robert?. Je les ayme, tout d'ung tenant, Ainsi que faict Dieu le Lombart. LXV.
Si me souvient, à mon advis,
Que je feis, à mon partement,
Certains lays, l'an cinquante six, Qu'aucuns, sans mon consentement, Voulurent nommer Testament
Leur plaisir fut, et non le mien Mais quoy on dit communement, Qu'un chascun n'est maistre du sien. LXVI.
S'ainsi estoit qu'aulcun n'eust pas Receu les lays que je luy mande, J'ordonne que, après mon trespas, A mes hoirs en face demande; Qui sont-ilz ? si on le demande Moreau, Provins, Robin Turgis; De moy, par dictez que leur mande, Ont eu jusqu'au lict où je gys. LXVII.
Pour le revoquer ne le dy,
Et y courust toute ma terre
De pitié en suys refroidy,
Envers le bastard de la Barre Parmy ses trois gluvons de foerre, Je luy donne mes vieilles nattes;
Bonnes seront pour tenir serre, Et soy soustenir sur ses pattes. LXVIII.
Somme, plus ne diray qu'ung mot, Car commencer veuil à tester Devant mon clerc Fremin, qui m'ot (S'il ne dort), je vueil protester, Que n'entends homme detester, En ceste presente ordonnance; Et ne la vueil manifester
Sinon au royaulme de France.
LXIX.
Je sens mon cueur qui s'affoiblist, Et plus je ne puys papier.
Fremin, siez-toy près de mon lict; Que l'on ne me viengne espier Prens tost encre, plume et papier, Ce que nomme escryz vistement; Puys fais-le partout copier,
Et vecy le commancement.
Ici commance Villon à tester.
LXX.
Au nom de Dieu, Père eternel, Et du Filz que Vierge parit, Dieu au Père coeternel,
Ensemble et du Sainct Esperit, Qui saulva ce qu'Adam perit, Et du pery pare les Cieulx.
Qui bien ce croyt, peu ne merit De gens mortz se font petiz Dieux. LXXI.
Mortz estoient, et corps et ames, En damnée perdition
Corps pournz, et âmes en flammes, De quelconque condition;
Toutesfoys, fais exception
Des patriarches et prophètes;
Car, selon ma conception,
Oncques grand chault n'eurent aux fesses. LXXII.
Qui me diroit « Qui te faict niectre Si très-avant ceste parolle,
Qui n'es en Theologie maistre ? A toy est presumption folle. »
C'est de Jésus la parabolle,
Touchant le Riche ensevely
En feu, non pas en couche molle, Et du Ladre de dessus ly.
LXXIII.
Si du Ladre eust veu le doy ardre. là n'en eust requis réfrigère,"
N'au bout d'icelluy doiz aherdre, Pour refreschir sa maschouëre.
Pions y feront mate chère,
Qui boyvent pourpoinct et chemisj. Puys que boyture y est si chère, Dieu nous garde de la main mise
LXXIV.
Ou nom de Dieu, comme j'ay dit, Et de sa glorieuse Mère,
Sans peché soit parfaict ce dict Par moy, plus maigre que chimère Si je n'ay eu fièvre effimère,
Ce m'a faict divine clemence; Mais d'autre dueil et perte amère Je me tays, et ainsi commence LXXV.
Premier, je donne ma pauvre ame A la benoiste Trinité,
Et la commande à Nostre Dame, Chambre de la divinité;
Priant toute la charité
Des dignes neuf Ordres des cieulx, Que par eulx soit ce don porté Devant le Trosne precieux
LXXVI.
Item, mon corps j'ordonne et laisse A nostre grand mère la terre; Les vers n'y trouveront grand gresse Trop lui a faict faim dure guerre. Or luy soit delivré grand erre v De terre vint, en terre tourne. Toute chose, se par trop n'erre, Voulontiers en son lieu retourne. LXXVII.
Item, et à mon plus que père, Maistre Guillaume de \illon:
Qui m'a esté plus doulx que mère D'enfant eslevé de maillon;
Dejetté m'a de maint boillon,
Et de cestuy pas ne s'esjoye,
Si luy requiers à genoillon,
Qu'il m'en laisse toute la joye. LXXVIII.
Je luy donne ma librairie,
Et le Rommant du Pet au Diable,
Lequel maistre Gui Tabarie
Grossoya, qu'est hom veritable. Par cayers est soubz une table. Combien qu'il soit rudement faict, La matiere est si très notable, Qu'elle amende tout le meffaict. LXXIX.
Item, donne à ma bonne mère Pour saluer nostre Maistresse, Qui pour moy eut douleur amère, Dieu le sçait, et mainte tristesse; Autre chastel ou fosteresse
N'ayoù retraire corps et ame,
Quand sur moy court male destresse, Ne ma mère, la povre femme I
BALLADE
QUE VILLON FEIT A LA REQUESTE DE SA MÈRE, POUR PRIER NOSTRE-DAME.
Dame du ciel, regente terrienne,
Emperière des infernaulx palux,
Recevez-moy, vostre humble chrestienne, Que comprinse soye entre voz esleuz, Ce non obstant qu'oncques rien ne valuz. Les biens de vous, ma dame et ma maistresse, Sont trop plus grans que ne suis pecheresse, Sans lesquelz biens ame ne peult merir N'avoir les cieulx, je n'en suis jengleresse. En ceste foy je vueil vivre et mourir. A vostre Filz dictes que je suis sienne; Que de luy soyent mes pechez aboluz Pardonnés moi comme à l'Egyptienne, Ou comme il feit au clerc Theophilus, Lequel par vous fut quitte et absoluz, Combien qu'il eustau diable faict promesse. Preservez-moy, que je ne face cesse; Vierge, pourtant, me vouilliés impartir Le sacrement qu'on celebre à la messe. En ceste foy je vueil vivre et mourir. Femme je suis povrette et ancienne, Ne riens ne scay; oncques lettre ne leuz; Au monstier voy dont suis parroissienne Paradis -painct, où sont harpes et luz,
Et ung enfer où damnez sont boulluz L'ung me faict paour, l'autrejoye et liesse. La joye avoir fais-moy, haulte Deesse, A qui pecheurs doivent tous recourir, Comblez de foy, sans faincte ne paresse. En ceste foy je vueil vivre et mourir. ENVOI.
Vous portastes, Vierge, digne princesse, Jésus regnant, qui n'a ne fin ne cesse. Le Tout-Puissant, prenant nostre foiblesse, Laissa les cieulx et nous vint secourir; Offrist à mort sa très clère jeunesse Nostre Seigneur tel est, tel le confesse. En ceste foy je vueil vivre et mourir.
LXXX.
Item, m'amour, ma chère Rose, Ne luy laisse ne cueur ne foye Elle aymeroit mieulx autre chose, Combien qu'elle ait assez monnoye; Quoy? une grand bourse de soye, Pleine d'escuz, profonde et large Mais pendu soit-il, que je soye, Qui luy lairra escu ne targe. LXXXI.
Car elle en a, sans moy, assez. Mais de cela il ne m'en chault; Mes grans deduictz en sont passez; Plus n'en ay le cropion chauld.
Si m'en desmetz aux hoirs Michault, Qui fut nommé le bon fouterre.
Priez pour luy, faictes ung sault A Saint-Satur gist, soubz Sancerre. LXXXII. 1.
Ce non obstant, pour m'acquitter Envers Amours, plus qu'envers elle, Car oncques n'y peuz acquester
D'amours une seule estincelle;
Ne scay s'à tous est si rebelle
Qu'à moy ce ne m'est grand esmoy; Mais, par saincte Marie la belle! Je n'y voy que rire pour moy.
LXXXIII,
Ceste Ballade luy envoye,
Qui se termine toute en R.
Qui la portera? que j'y voye:
Ce sera Pernet de la Barre,
Pourveu, s'il rencontre en son erre Ma damoyselle au nez tortu,
21 luy dira, sans plus enquerre « Orde paillarde, d'où viens-tu? » BALLADE
DE VILLON A S'AMYE.
Faulse beaulté, qui tant me couste cher. Rude en effect, hypocrite doulceur;
Amour dure, plus que fer, à mascher; Nommer que puis de ma deffacon soeur, Cherme felon, la mort d'ung povre cueur, Orgueil musse, qui gens met au mourir j Yeulx sans pitié! ne veult droicte rigueur, Sans empirer, ung pauvre secourir? Mieulx m'eust valu avoir esté crier Ailleurs secours, c'eust esté mon bonheur: Rien ne m'eust sceu hors de ce fait chasser; Trotter m'en fault en fuyte à deshonneur. Haro, haro, le grand et le mineur!
Et qu'est cecy? mourray, sans coup ferir, Ou pitié veult, selon ceste teneur,
Sans empirer, ung povre secourir.
Ung temps viendra, qui fera desseicher, Jaulnir, flestrir, vostre espanie fleur Je m'en risse, se tant peusse marcher, Mais nenny lors (ce seroit donc foleur) Vieil je seray; vous, laide, et sans couleur. Or, beuvez fort, tant que ru peult courir. Ne donnez pas à tous ceste douleur, Sans empirer, ung povre secourir.
ENVOI.
Prince amoureux, des amans legreigneur, Vostre mal gré ne vouldroye encourir; Maistoutfranc cueur doit, par Nostre Seigneur, Sans empirer, ung povre secourir.
LXXXIV.
Item, à maistre Ythier, marchant, Auquel mon branc laissay jadis, Donne (mais qu'il le mette en chant), Ce lay, contenant des vers dix; Et aussi ung De profundis
Pour ses anciennes amours,
Desquelles le nom je ne dis,
Car il me herroit à tousjours.
LAY OU PLUSTOST RONDEAU. MoRT, j'appelle de ta rigueur,
Qui m'as ma maistresse ravie,
Et n'es pas encore assouvie,
Se tu ne me tiens en langueur.
Onc puis n'euz force ne vigueur; Mais que te nuysoit-elle en vie,
Mort?
Deux estions, et n'avions qu'ung cueur; S'il est mort, force est que devie, Voire, ou que je vive sans vie,
Comme les images, par cueur,
Mort!
LXXXV.
Item, à maistre Jehan Cornu,
Autres nouveaux lays luy vueil faire,
Car il m'a tousjours secouru
A mon grand besoing et affaire Pour ce, le jardin luy transfère, Que maistre Pierre Bourguignon Me renta, en faisant refaire
L'huys, et redrecier le pignon. LXXXVI.
Par faulte d'ung huys, j'y perdis Ung grez, et ung manche de houe. Alors, huyt faulcons, non pas dix, N'y eussent pas prins une alloue. L'hostel est seur, mais qu'on le cloüe. Pour enseigne y mis ung havet; Qui que l'ait prins. point ne l'en loüe Sanglante nuict et bas chevet [ LXXX VI I.
Item, et pource que la femme De maistre Pierre Sainct Amant (Combien, si coulpe y a ou blasme, Dieu luy pardonne doulcement !) Me meist en reng de caymant, Pour le Cheval Blanc qui ne bouge, Luy changeay à une jument,
Et la Mulle à ung Asne rouge. LXXXVIII.
Item, donne à sire Denys
Hesselin, Esleu de Paris,
Quatorze muys de vin d'Aulnis, Prins chez Turgis, à mes perilz. S'il en beuvoit tant que periz
En fust son sens et sa raison,
Qu'on mette de l'eau ès barrilz
Vin perd mainte bonne maison.
LXXXIX.
Item, donne à mon advocat,
Maistre Guillaume Charruau,
Quoy qu'il marchande ou ait estat, Mon branc. Je me tays du fourreau. Il aura, avec ce, ung réau
En change, affin que sa bourse enfle, Prins sur la chaussée et carreau
De la grand closture du Temple. xc.
Item, mon procureur Fournier
Aura, pour toutes ses corvées
(Simple seroit de l'espargner)
En ma bourse quatre havées,
Car maintes causes m'a saulvées, Justes, ainsi, Jesus-Christ m'ayde I Comme elles ont esté trouvées
Mais bon droit a bon mestier d'ayde. XCI.
Item, je donne à maistre Jaques
Raguyer le grant godet de Grève, Pourveu qu'il payera quatre plaques, Deust-il vendre, quoy qu'il luy griefve, Ce dont on ceuvre mol et grève; Aller sans chausses et chappin,
Tous les matins, quand il se liève, Au trou de la Pomme de pin.
XGII.
Item, quant est de Mairebeuf, Et de Nicolas de Louviers,
Vache ne leur donne ne beuf, Car vachers ne sont, ne bouviers, Mais gens à porter esperviers, Ne cuidez pas que je vous joüe, Pour prendre perdriz et plouviers, Sans faillir, sur la Maschecroüe. XCI Il.
Item, vienne Robert Turgis
A moy, je luy payeray son vin, Combien, s'il trouve mon logis, Plus fort sera que le devin.
Le droit luy donne d'eschevin, Que j'ay comme enfant de Paris. Se je parle ung peu poictevin, Ilce m'ont deux dames appris. XCIV.
Filles sont très belles et gentes, Demourantes à Sainct-Genou, Près Sainct-Julian des Voventes, Marches de Bretaigne ou Poictou, Mais je ne dy proprement où, Or y pensez trestous les jours, Car je ne suis mie si fou.
Je pense celer mes amours.
xcv.
Item, à Jehan Raguyer je donne, Qui est sergent, voir des Douze,
Tant qu'il vivra, ainsi l'ordonne, Tous les jours une talemouze,
Pour brouter et fourrer sa mouse, Prinse à la table de Bailly
A Maubuay sa gorge arrouse,
Car à manger n'a pas failly.
XCVI.
Item, donne au prince des Sotz
Pour ung bon sot Michault du Four, Qui à la fois dit de bons motz
Et chante bien Ma doulce amour Avec ce, il aura le bonjour.
Brief, mais qu'il fust ung peu en poinct, II est ung droit sot de séjour,
Et est plaisant où il n'est point.
XCVII.
Item, aux unze vingtz Sergens
Donne, car leur faict est honneste, Et sont bonnes et doulces gens,
Denis Richier, et Jehan Vallette, A chascun une grand cornette,
Pour pendre à leurs chappeaulx de feautre^ J'entendz à ceulx de pied, hohecte Car je n'ay que faire des autres.
XCVIII.
De rechef, donne à Périnet,
J'entendz le bastard de la Barre,
Pour ce qu'il est beau fils et net,
En son escu, en lieu de barre,
Trois detz plombez, de bonne carre, Ou ung beau joly jeu de cartes.
Mais quoy s'on l'oyt vessir ne poirre, En oultre aura les fièvres quartes. xcix.
Item, ne vueil plus que Chollet Dolle, trenche, douve ne boyse, Relye brocq ne tonnelet,
Mais tous ses outilz changer voyse A une espée lyonnoise,
Et retienne le hutinet
Combien qu'il n'ayme bruyt ne noyse, Si luy plaist-il ung tantinet.
c.
Item, je donne à Jéhan le Lou, Homme de bien et bon marchant. Pour ce qu'il est linget et flou,
Et que Chollet est mal chassant, Par les rues plustost qu'au champ, Qui ne lairra poulaille en voye. Le long tabart, et bien cachant, Pour les musser, qu'on ne les voye. CI.
Item, à l'orfèvre Du Boys,
Donne cent clouz, queues et testes, De gingembre sarazinoys,
Non pas pour accoupler ses boytes, Mais pour conjoindre culz et coettes, Et couldre jambons et andoilles, Tant que le laict en monte aux tette3, Et le sang en devalle aux coilles.
CIl.
Au cappitaine Jehan Riou,
Tant pour luy que pour ses archiers, Je donne six livres de lou,
Qui n'est pas viande à porchiers, Prins à gros mastins de bouchiers, Et cuittes de vin de buffet.
Pour manger de ces morceaulx chiers, On en feroit bien un mau faict.
CIII.
C'est viande ung peu plus pesante, Que duvet, ne plume, ne liège.
Elle est bonne à porter en tente, Ou pour user en quelque siège.
Et, s'ilz estoient prins en un piège, Les mastins, qu'ils ne sceussent courre, J'ordonne, moy qui suis bon miège, Que des peaulx, sur l'hyver, se fourre. civ.
Item, à Robin Troussecaille,
Qui s'est en service bien faict;
A pied ne va comme une caille,
Mais sur roussin gros et reffaict Je luy donne, de mon buffet,
Une jatte qu'emprunter n'ose;
Si aura mesnage parfait:
Plus ne luy failloit autre chose.
cv.
Item, donne à Perrot Girard,
Barbier juré du Bourg-la-Royne,
Deux bassins et ung coquemard,
Puis qu'à gaigner mect telle peine.
Des ans y a demy douzaine,
Qu'en son hostel, de cochons gras
M'apastela une sepmaine;
Tesmoing l'abesse de Pourras.
CVI.
Item, aux Frères mendians,
Aux Devotes et aux Beguines,
Tant de Paris que d'Orléans,
Tant Turlupins que Turlupines,
De grasses souppes jacobines
Et flans leurs tais oblation;
Et puis après, soubz les courtines,
Parler de contemplation.
CVII.
Si ne suis-je pas qui leur donne,
Mais du tout en sont-ce les mères,
Et Dieu, qui ainsi les guerdonne,
Pour qui souffrent peines amères.
Il fault qu'ilz vivent, les beaulx pères, Et mesmement ceulx de Paris.
S'ilz font plaisir à noz commères,
Hz ayment ainsi les maris.
CVIII. 1.
Quoy que maistre Jehan de Pontlieu En voulsist dire, et reliqua,
Contrainct et en publique lieu,
Voulsist ou non, s'en revocqua.
Maistre Jehan de Mehun se moqua De leur façon; si fcit Mathieu.
Mais on doit honorer ce qu'a
Honnoré l'Eglise de Dieu.
cix.
Si me submectz, leur serviteur,
En tout ce que puis faire et dire,
A les honorer de bon cueur,
Et servir, sans y contredire.
L'homme bien fol est d'en mesdire, Car, soit à part, ou en prescher,
Ou ailleurs, il ne fault pas dire
Si gens sont pour eux revencher.
ex.
Item, je donne à frère Baulde,
Demourant à l'hostel des Carmes, Portant chère hardie et baulde,
Une sallade et deux guysarmes,
Que De Tusca et ses gens d'armes Ne luy riblent sa Caige-vert.
Vieil est s'il ne se rend aux armes, C'est bien le diable de Vauvert.
CXI.
Item, pour ce que le Scelleur,
Maint estront de mousche à masché, Donne, car homme est de valleur,. Son sceau davantage craché,
Et qu'il ait le pouce escaché,
Pour tout comprendre à une voye J'entendz celluy de l'Evesché,
Car les autres, Dieu les pourvoye.
CXII.
Quant de messieurs les Auditeux, Leur chambre auront lembroysée; Et ceulx qui ont les culz rongneux, Chascun une chaise persée,
Mais qu'à la petite Macée
D'Orléans, qui eut ma ceincture, L'amende soit bien hault taxée Elle est une mauvaise ordure. cxin. 1.
Item, donne à maistre Francoys, Promoteur de la vacquerie,
Ung hault gorgerin d'Escossoys, Toutesfois sans orfaverie;
Car, quant receut chevalerie, II maugrea Dieu et saint George. Parler n'en oyt qu'il ne s'en rie, Comme enragé, à pleine gorge. CXIV.
Item, à maistre Jehan Laurens, Qui a les povres yeulx si rouges, Par le péché de ses parens,
Qui beurent en barilz et courges, .le donne l'envers de mes bouges, Pour chascun matin les torcher. S'il fust archevesque d.e Bourges, Du cendal eust, mais il est cher. c xv.
Item, à maistre Jehan Cotard, Mon procureur en Court d'Eglise,
Devoye environ ung patard,
Car à present bien m en advise, Quant chicanner me feit Denise, Disant que l'avoye mauldite;
Pour son ame, qu'ès cieulx soit mise! Ceste Oraison j'ay cy escripte.
BALLADE ET ORAISON.
Père Noé, qui plantastes la vigne;
Vous aussi, Loth, qui bustes au rocher, Par tel party qu'Amour, qui gens engigne, De vos filles si vous feit approcher,
Pas ne le dy pour le vous reprocher, Architriclin, qui bien sceustes cest art, Tous trois vous pry qu'o vous veuillez percher L'ame du bon feu maistre Jehan Cotard! Jadis extraict il fut de vostre ligne, Luy qui beuvoit du meilleur et plus cher; Et ne deust-il avoir vaillant ung pigne, Certes, sur tous, c'estoit un bon archer; On ne luy sceut pot des mains arracher, Car de bien boire oncques ne fut faitard. Nobles seigneurs, ne souffrez empescher L'ame du bon feu maistreJehan Cotard! 1 Commcun viellart qui chancelle et trepign L'ay veu souvent, quand il s'alloit coucher; Et une foys il se feit une bigne,
Bien m'en souvient, à l'estal d'ung boucher.
Brief, on n'eust sçeu en ce monde chercher Meilleur pion, pour boire tost et tard. Faictes entrer quand vous orrez hucher L'ame du bon feu maistre Jehan Cotard. ENVOI.
Prince, il n'eust sceu jusqu'à terre cracher; Tousjours crioyt Haro, la gorge m'ard Et si ne sceut oncq sa soif estancher, L'ame du bon feu maistre Jehan Cotard.
cxvi.
Item, vueil que le jeune Merle
Desormais gouverne mon change, Car de changer envys me mesle,
Pourveu que tousjours baille en change, Soit à privé, soit à estrange,
Pour trois escus, six brettes targes Pour deux angelot z, ung grand ange Car amans doivent estre larges.
CXVII.
Item, j'ay sceu, à ce voyage,
Que mes trois vres orphelins
Sont creus et deviennent en aage, Et n'ont pas testes de belins,
Et qu'enfans d'icy à Salins
N'a mieulx saichans leur tour d'escolle Or, par l'ordre des Mathelins,
Telle jeunesse n'est pas folle.
CXVIII.
Si vueil qu'ilz voysent à l'estude; Où? chez maistre Pierre Richer. Le Donnait est pour eulx trop rude Jà ne les y vueil empescher.
Ilz scauront, je l'ayme plus cher Ave sàlus, tibi decus,
Sans plus grandes lettres chercher Tousjours n'ont pas clercs le dessus. cxix.
Cecy estudient, et puis ho
Plus procéder je leur deffens. Quant d'entendre le grand Credo, Trop fort il est pour telz enfans. Mon grant tabard en deux je fendz Si vueil que la moictié s'en vende, Pour eulx en achepter des flans, Car jeunesse est ung peu friande. cxx.
Et veuil qu'ilz soyent informez En meurs, quoy que couste bature; Chapperons auront enfermez, Et les poulces soubz la ceincture; Humbles à toute créature;
Disans Hen? Quoy? Il n'en est rien! Si diront gens, par adventure « Vôycy enfans de lieu de bien! » CXXI.
Item, à mes pouvres clergeons, Auxquelz mes titres je resigne,
Beaulx enfans et droictz comme joncs, Les voyans, je m'en dessaisine, Et, sans recevoir, leur assigne, Seur comme qui l'auroit en paulme, A ung certain jour que l'on signe, Sur 1 hostel de Guesdry Guillaume. cxxii.
Quoy que jeunes et esbatans
Soyent, en rien ne me desplaist; Dedans vingt, trente ou quarante ans Bien autres seront, se Dieu plaist. Il faict mal qui ne leur complaist, Car ce sont beaux enfans et gents; Et qui les bat ne fiert, fol est,
Car enfans si deviennent gens. CXXIII.
Les bourses des Dix-et-huict clers Auront; je m'y vueil travailler Pas ilz ne dorment comme lerz, Qui trois mois sont sans resveiller. Au fort, triste est le sommeiller Qui faict aise jeune en jeunesse, Tant qu'enfin luy faille veiller, Quant reposer deust en vieillesse. CXXIV. ·
Cy en escris au collateur
Lettres semblables et pareilles Or prient pour leur bienfaicteur, Ou qu'on leur tire les oreilles. Aucunes gens ont grand merveilles, Que tant m'encline envers ces deux;
Mais, foy que doy, festes et veilles, Oncques ne vey les mères d'eulx! cxxv.
Item, et à Michault Culdou,
Et à sire Charlot Taranne,
Cent solz s'ilz demandent prins où? Ne leur chaille; ils viendront de manne; Et unes houses de basanne,
Autant empeigne que semelle;
Pourveu qu'ils me saulveront Jehanne, Et autant une autre comme elle. CXXVI.
Item, au seigneur de Grigny,
Auquel jadis laissay Vicestre,
Je donne la tour de Billy,
Pourveu, se huys y a ne fenestre Qui soit ne debout ne en estre,
Qu'il mette très bien tout appoinct Face argent à dextre, à senestre II m'en fault, et il n'en a point.
CXXVII.
Item, à Thibault de la Garde
Thibault? je mentz, il a nom Jehan Que luy donray-je, que ne perde? Assez ay perdu tout cest an.
Dieu le vueille pourvoir, amen. Le barillet? par m'ame, voyre!
Genevoys est le plus ancien,
Et plus beau nez a pour y boyre.
CXXVIII.
Item, je donne à Basanyer,
Notaire et greffier criminel,
De giroffle plain ung panyer, Prins chez maistre Jehan de Ruel. Tant à Mautainct; tant à Rosnel; Et, avec ce don de giroffle,
Servir, de cueur gent et ysnel, Le seigneur qui sert sainct Cristofle, CXXIX.
Auquel ceste Ballade donne,
Pour sa dame, qui tous biens a. S'Amour ainsi tous ne guerdonne, Je ne m'esbahys de cela;
Car au Pas conquesté celle a
Que tint René, roy de Cecille, Où si bien fist et peu parla
Qu'oncques Hector feit, ne Troïle.
BALLADE
Que Villon donna à un gentilhomme, nouvellement marié, pour l'envoyer à son espouse, par luy conquise à l'espée. Au poinct du jour, que l'esprevier se bat, Meu de plaisir et par noble coustume, Bruyt il demaine et de joye s'esbat,
Recoit son per et se joint à la plume Ainsi vous vueil, à ce desir m'allume.
Joyeusement ce qu'aux amans bon semble. Sachez qu'Amour l'escript en son volume, Et c'est la fin pourquoy sommes ensemble. Dame serez de mon cueur, sans debat, Entierement, jusques mort me consume. Laurier soüef qui pour mon droit combat, Olivier franc, m'ostant toute amertume. Raison ne veult que je desaccoustume, Et en ce vueil avec elle m'assemble, De vous servir, mais que m'y accoustume; Et c'est la fin pourquoy sommes ensemble. Etqui plus est, quand dueil surmoys'embat, Par fortune qui sur moy si se fume, Vostre doulx oeil sa malice rabat,
Ne plus ne moins que le vent faict la fume. Si ne perds pas la graine que je sume En vostre champ, car le fruict me ressemble: Dieu m'ordonne que le fouysse et fume; Et c'est la fin pourquoy sommes ensemble. ENVOI.
Princesse, oyez ce que cy vous resume: Que le mien cueur du vostre desassemble Jà ne sera tant de vous en presume; Et c'est la fin pourquoy sommes ensemble. cxxx.
Item, à sire Jehan Perdryer,
Riens, n'à Françoys, son second frère.
Si m'ont-ilz voulu aydier,
Et de leurs biens faire confrère; Combien que Françoys, mon compère, Contre langues flambans et rouges, Sans commandement, sans prière, Me recommanda fort à Bourges. CXXXI.
Si aille veoir en Taillevent,
Ou chapitre de fricassure,
Tout au long, derrière et devant, Lequel n'en parle jus ne sure; Mais à Macquaire vous asseure, A tout le poil cuysant ung dyable, Affin que sentist bon l'arsure.
Ce Recipe m'escript, sans fable.
BALLADE.
En reagal, en arsenic rocher,
En orpigment, en salpestre et chaulx vive; En plomb boillant, pour mieulx les esmorcher; En suif et poix, destrampez de lessive Faicte d'estronts et de pissat de Juifve; En lavaille de jambes à meseaulx;
En raclure de piedz et vieulx houseaulx; En sang d'aspic et drogues venimeuses; En fiel de loups, de regnards et blereaux, Soient frittes ces langues envieuses
En cervelle de chat qui hayt pescher, Noir, et si vieil qu'il n'ait dent en gencive
D'ung vieil mastin, qui vault bien aussi cher Tout enragé, en sa bave et salive;
En l'escume d'une mulle poussive, Detrenchée menu à bons ciseaulx;
En eau où ratz plongent groings et museaulx, Raines, crapauds, telz bestes dangereuses, Serpens, lezards, et telz nobles oyseaulx, Soient frittes ces langues envieuses! En sublimé, dangereux à toucher;
Et au nombril d'une couleuvre vive En sang qu'on mect en poylettes secher, Chez ces barbiers, quand plaine lune arrive, Dont l'ung est noir, l'autre plus vert que cive, En chancre et fix, et en ces ords cuveaulx Où nourrices essangent leurs drappeaulx En petits baings de filles amoureuses Qui n'entendent qu'à suivre les bordeaulx, Soient frittes ces langues envieuses
ENVOI.
Prince, passez tous ces friands morceaux, S'estamine n'avez, sacs ou bluteaux, Parmy le fons d'unes brayes breneuses; Mais, paravant, en estronts de pourceaulx Soient frittes ces langues envieuses!
CXXXM.
Item, à maistre Jehan Courault, Les Contredictz Franc-Gontier mande
Quant du Tyrant seant en hault, A cestuy-là rien ne demande;
Le saige ne veult que contende,
Contre puissant, pouvre homme las, Affin que ses filez ne tende,
Et que ne tresbuche en ses laqs.
CXXXIII.
Gontier ne crains il n'a nulz hommes Et mieulx que moy n'est herité; Mais en ce debat cy nous sommes, Car il loue sa pouvreté
Estre pouvre, yver et esté,
A felicité il repute,
Ce que tiens à malheureté.
Lequel à tort? Or en dispute.
BALLADE
Intitulée Lu Contrciktz de Franc-Gontier
Sur mol duvet assis, ung gras chanoine, Lez ung brasier, en chambre bien nattée, A son costé gisant dame Sydoine,
Blanche, tendre, pollie et attaintée Boire ypocras, à jour et à nuyctée,
Rire, jouer, mignonner et baiser,
Et nud à nud, pour mieulx des corps s'ayser, Les vy tous deux, par un trou de mortaise Lors je congneuz que, pour dueil appaiser, II n'est tresor que de vivre à son aise.
Se Franc-Gontier et sa compaigne Heleine Eussent tousjours tel douce vie hantée, D'oignons, civetz, qui causent forte alaine, N'en comptassent une bise tostée.
Tout leur mathon, ne toute leur potée, Ne prise ung ail, je le dy sans noysier. S'ilz se vantent coucher soubz le rosier, Ne vault pas mieulx lict costoyé de chaise? Qu'en dictes-vous? Faut-il à ce muser? Il n'est tresor que de vivre à son aise. De gros pain bis vivent, d'orge, d'avoine, Et boivent eau, tout au long de l'année. Tous. les oyseaulx d'icy en Babyloine A tel escot une seule journée
Ne me tiendroient, non une matinée. Or s'esbate, de par Dieu, Franc-Gontier, Helène o luy, soubz le bel esglantier; Si bien leur est, n'ay cause qu'il me poise; Mais, quoy qu'il soit du laboureux mestier, Il n'est tresor que de vivre à son aise. ENVOI.
Prince, jugez, pour tous nous accorder. Quant est à moy, mais qu'à nul n'en desplaise, Petit enfant, j'ay ouy recorder
Qu'il n'est tresor que de vivre à son aise. CXXXIV.
Item, pour ce que sçait la Bible,
Mademoyselle de Bruyères,
Donne prescher, hors l'Evangile, A elle et à ses bachelieres, Pour retraire ces villotières Qui ont le bec si affilé,
Mais que ce soit hors cymetières, Trop bien au marché au filé.
BALLADE
DES FEMMES DE PARIS.
Quoy qu'on tient belles langagières Florentines, Veniciennes,
Assez pour estre messaigières,
Et mesmement les anciennes;
Mais, soient Lombardes, Rommaines, Genevoises, à mes perilz,
Piemontoises, Savoysiennes,
II n'est bon bec que de Paris.
De très beau parler tiennent chaires, Ce dit-on, les Napolitaines,
Et que sont bonnes cacquetoeres Allemanses et Bruciennes;
Soient Grecques, Egyptiennes,
De Hongrie ou d'autre pays,
Espaignolles ou Castellannes,
II n'est bon bec que de Paris.
Brettes, Suysses, n'y sçavent guères, Ne Gasconnes et Tholouzaines;
Du Petit-Pont deux harangères Les concluront, et les Lorraines, Anglesches ou Callaisiennes, (Ay je beaucoup de lieux compris?) Picardes, de Valenciennes
II n'est bon bec que de Paris. ENVOI.
Prince, aux dames parisiennes De bien parler donnez le prix; Quoy qu on die d'Italiennes, Il n'est bon bec que de Paris.
cxxxv.
Regarde-m'en deux, trois, assises Sur le bas du ply de leurs robes, En ces monstiers, en ces eglises; Tire t'en près, et ne t'en hobes; Tu trouveras là que Macrobes
Oncques ne fist tels jugemens;
Entens quelque chose en desrobes; Ce sont tous beaulx enseignemens. CXXXVI.
Item, et au mont de Montmartre, Qui est ung lieu moult ancien, Je lui donne et adjoincts le tertre Qu'on dit de mont Valerien;
Et, oultre plus, d'ung quartier d'an Du pardon qu'apportay de Romme Sy yra maint bon paroissien,
En l'abbaye où il n'entre homme. François Villon. 6
CXXXVII.
Item, valetz et chambrières
De bons hostelz (rien ne me nuyst), Faisans tartes, flans et goyères, Et grant rallias à minuict
Riens n'y font sept pintes ne huict, Tant que gisent Seigneur et dame; Puis après, sans mener grant bruyt, Je leur ramentoy le jeu d'asne. CXXXVIII.
Item, et à filles de bien,
Qui ont pères, mères et antes,
Par m'ame! je ne donne rien;
Tout ont eu varletz et servantes; Se fussent-ilz de pou contentes, Grant bien leur feissent maintz lopins, Aux povres filles advenantes,
Qui se perdent aux Jacopins.
CXXXIX.
Aux Célestins et aux Chartreux, Quoy que vie meinent estroicte, Si ont-ilz largement entre eulx, Dont povres filles ont souffrette Tesmoing Jaqueline et Perrette, Et Isabeau, qui dit Enné!
Puis qu'ilz ont eu telle disette, A peine en seroit-on damné.
CXL.
Item, à la grosse Margot,
Très doulce face et pourtraicture, Foy que doy Brelare Bigod,
Assez devote creature.
Je l'ayme de propre nature, Et elle moy, la doulce sade. Qui la trouvera d'adventure, Qu'on luy lise ceste Ballade.
BALLADE
DE VILLON ET DE LA GROSSE MARGOT. Se j'ayme et sers la belle de bon haict, M'en devez-vous tenir à vil ne sot?
Elle a en soy des biens à fin souhaict. Pour son amour ceings bouclier et passot. Quand viennent gens, je cours ethappeun pot: Au vin m'en voys, sans demenergrand bruyt. Je leur tendz eau, frommage, pain et fruict, S'ils payent bien, je leur dy que bien stat « Retournez cy, quand vous serez en ruyt, En ce bourdel où tenons nostre estat! » Mais, tost après, il y a grant deshait, Quand sans argent s'en vient coucher Margot; ¡ Veoir ne la puis mon cueur à mort la hait. Sa robe prens, demy-ceinct et surcot Si luy prometz qu'ilz tiendront pour l'escot. Par les costez si se prend, l'Antechrist Crie, et jure par la mort Jesuchrist, Que non fera. Lors j'enpongne ung esclat, Dessus le nez luy en fais ung escript, En ce bourdel où tenons nostre estat.
Puis paix se faict, et me lasche ung gros pet Plus enflée qu'ung venimeux scarbot. Piant, m'assiet le poing sur mon sommet, Gogo me dit, et me fiert le jambot. Tous deux yvres, dormons comme un g sabot; Et, au reveil, quand le ventre luy bruyt, Monte sur moy, qu'el ne gaste son fruit. Soubz elle geins; plus qu'ung aiz me faict plat; De paillarder tout elle me destruict, En ce bourdel où tenons nostre estat. ENVOI.
Vente, gresle, gelle, j'ay mon pain cuict! Je suis paillard, la paillarde me suit. Lequel vault mieux, chascun bien s'entresuit. L'ung l'autre vault c'estàmau chatmau rat. Ordure amons, ordure nous affuyt. Nous deffuyons honneur, il nous deffuyt, En ce bourdel où tenons nostre estat.
CXLI.
Item, à Marion PYdolle,
Et la grand Jehanne de Bretaigne, Donne tenir publique escolle, Où l'escolier le maistre enseigne. Lieu n'est où ce marché ne tienne, Sinon en la grille de Mehun De quoy je dy Fy de l'enseigne, Puis que l'ouvrage est si commun 1
CXLII.
Item, à Noë le Jolys,
Autre chose je ne luy donne,
Fors plein poing d'osiers frez cueilliz En mon jardin; je l'abandonne.
Ghastoy est une belle aulmosne; Ame n en doit estre marry.
Unze vingtz coups lui en ordonne, Par les mains de maistre Henry. CXLIII.
Item, ne scay que à l'Hostel-Dieu Donner, n'aux povres hospitaulx; Bourdes n'ont icy temps ne lieu, Car povres gens ont assez maulx. Chascun leur envoye leurs os.
Les Mandians ont eu mon oye;
Au fort, ilz en auront les os
A menues gens menue monnoye. CXLIV.
Item, je donne à mon barbier,
Qui se nomme Colin Galerne,
Près voysin d'Angelot l'Herbier, Ung gros glasson. Prins où? En Marne, Affin qu'à son ayse s'yverne.
De l'estomach le tienne près.
Se l'yver ainsi se gouverne,
II n'aura chault l'esté d'après.
CXLV.
Item, rien aux Enfans-Trouvez; Mais les perduz fault que console,
Si doivent estre retrouvez,
Par droict, sur Marion l'Ydolle. Une lecon de mon escolle
Leur liray, qui ne dure guière. Teste n'ayent dure ne folle, Mais escoutent c'est la dernière
BELLE LEÇON
DE VILLON, AUX ENFANS PERDUZ. Beaux enfans, vous perdez la plus Belle rose de vo chapeau,
Mes clers apprenans comme glu; Se vous allez à Montpippeau
Ou à Ruel, gardez la peau
Car, pour s'esbatre en ces deux lieux, Cuydant que vaulsist le rappeau, La perdit Colin de Cayeulx.
Ce n'est pas ung jeu de trois mailles, Où va corps, et peut-estre l'ame S'on perd, rien n'y sont repentailles, Qu'on ne meure à honte et diffame; Et qui gaigne, n'a pas à femme
Dido la royne de Cartage.
L'homme est donc bien fol et infame, Qui, pour si peu, couche tel gage. Qu'ung chascun encore m'escoute On dit, et il est verité,
Que charretée se boyt toute, Au feu l'yver, au bois l'esté. S'argent avez, il n'est enté Mais le despendez tost et viste. Qui en voyez-vous hérité ? Jamais mal acquest ne proffite.
BALLADE
DE BONNE DOCTRINE,
A ceux de mauvaise vie.
Car ou soyes porteur de bulles, Pipeur ou hazardeur de dez,
Tailleur de faulx coings, tu te brusles, Comme ceux qui sont eschaudez, Traistres pervers, de foy vuydez Soyes larron, ravis ou pilles
Où en va l'acquest, que cuydez? Tout aux tavernes et aux filles. Ryme, raille, cymballe, luttes, Comme folz, faintis, eshontez;
Farce, broille, joue des flustes;
Fais, ès villes et ès cités,
Fainctes, jeux et moralitez;
Gaigne au berlan, au glic, aux quilles Où s'en va tout? Or escoutez
Tout aux tavernes et aux filles.
De telz ordures te reculles;
Laboure, fauche champs et prez Serz et panse chevaulx et mulles, S'aucunement tu n'es lettrez; Assez auras, se prens en grez. Mais, se chanvre broyes ou tilles, Où tend ton labour qu'as ouvrez? Tout aux tavernes et aux filles. ENVOI.
Chausses, pourpoinctz esguilletez, Robes, et toutes vos drapilles, Ains que cessez, vous porterez Tout aux tavernes et aux filles.
CXLVI.
A vous parle, compaings de galles, Qui estes de tous bons accors;
Gardez-vous tous de ce mau hasles, Qui noircist gens quand ils sont mortz; Eschevez-le, c'est ung mal mors; Passez-vous-en mieulx que pourrez; Et, pour Dieu, soyez tous recors Qu'une fois viendra que mourrez. CXLVIT. 1.
Item, je donne aux Quinze-Vingtz, Qu'autantvauldroit nommer Trois-Cens De Paris, non pas de Provins,
Car à eulx tenu je me sens.
Ilz auront, et je m'y consens,
Sans les estuis, mes grans lunettes, Pour mettre à part, aux Innocens, Les gens de bien des deshonnestes.
CXLVIII.
Icy n'y a ne rys ne jeu.
Que leur vault avoir eu chevances, ]N'en grans lictz de parement geu, Engloutir vin, engrossir panses, Mener joye, festes et danses, Et de ce prest estre à toute heure? Tantost faillent telles plaisances, Et la coulpe si en demeure.
CXLIX.
Quand je considère ces testes
Entassées en ces charniers,
Tous furent maistres des requestes, Ou tous de la Chambre aux Deniers, Ou tous furent porte-paniers Autant puis l'ung que l'autre dire, Car, d'evesques ou lanterniers, Je n'y congnois rien a redire.
CL.
Et icelles qui s'inclinoient Unes contre autres en leur vies; Desquelles les unes regnoient, Des autres craintes et servies Là les voy toutes assouvies, Ensemble en ung tas pesle-mesle. Seigneuries leur sont ravies; Clerc ne maistre ne s'y appelle.
CLI.
Or sont-ilz mortz, Dieu ayt leurs ames! Quant est des corps, ils sont pourriz. Ayent esté seigneurs ou dames,
Souef et tendrement nourriz
De cresme, fromentée ou riz,
Leurs os sont declinez en pouldre, Auxquelz ne chault d'esbat, ne riz. Plaise au doulx Jesus les absouldre! 1
CLII.
Aux trespassez je fais ce lays, Et icelluy je communique
A regentz, courtz, sieges et plaids, Hayneurs d'avarice l'inique,
Lesquelz pour la chose publique Se seichent les os et les corps De Dieu et de sainct Dominique Soient absolz, quand ilz seront mortz
LAYS.
Au retour de dure prison, Où j'ay laissé presque la vie, Se Fortune a sur moy envie, Jugez s'elle fait mesprison 1 Il me semble que, par raison, Elle deust bien estre assouvie, Au retour.
Cecy plain est de desraison,
Qui vueille que de tout desvie; Plaise à Dieu que l'ame ravie En soit, lassus, en sa maison, Au retour 1
CLIII.
Item, donne à maistre Lomer, Comme extraict que je suis de fée, Qu'il soit bien amé; mais, d'amer Fille en chief ou femme coëffée, Jà n'en ayt la teste eschauffée, Ce qui ne luy couste une noix, Faire ung soir pour soy la fastée, En despit d'Auger le Danois. CLIV.
Item, rien à Jaques Cardon,
Car je n'ay rien pour luy honneste. Non pas que le jette à bandon Sinon cette Bergeronnette
S'elle eust le chant Marionnette, Faict por Marion la Peau-Tarde, D'un Ouvrez vostre huys, Guillemette, Elle allast bien à la moustarde. CLV.
Item donne aux amans enfermes, Oultre le lay Alain Chartier, A leurs chevetz, de pleurs et lermes Trestout fin plain ung benoistier,
Et ung petit brin d'esglantier,
En tout temps verd, pour gouppillon, Pourveu qu ilz diront ung Psaultier Pour l'ame du pouvre Villon.
CLVI.
Item, à maistre Jacques James,
Qui se tue d'amasser biens,
Donne fiancer tant de femmes
Qu'il vouldra; mais d'espouser, riens Pour qui amasse-il? Pour les siens. Il ne plainct fors que ses morceaulx; Ce qui fut aux truyes, je tiens
Qu'il doit de droit estre aux pourceaulx. CLVII.
Item, le Camus Seneschal,
Qui une fois paya mes debtes,
En recompense, mareschal,
Pour ferrer oës et canettes.
Je luy envoye ces sornettes,
Pour soy desennuyer; combien, Si veult, face-en des alumettes.
De bien chanter s'ennuye-on bien. CLVIII.
Item, au Chevalier du Guet
Je donne deux béaulx petitz pages, Philippot et le gros Marquet,
Qui ont servy, dont sont plus sages, La plus grant partie de leurs aages, Tristan, prevost des mareschaulx. Hélas, s'ilz sont cassez de gaiges, Aller leur fauldra tous deschaulx
CLIX.
Item, au Chappelain je laisse
Ma chapelle à simple tonsure,
Chargée d'une seiche messe,
Où il ne fault pas grand lecture. Resigné luy eusse ma cure,
Mais point ne veult de charge d'ames; De confesser, ce dit, n'a cure,
Sinon chambrières et dames.
CLX.
Pour ce que sçait bien mon entente, Jehan de Calays, honnorable homme, Qui ne me veit des ans a trente, Et ne sçait comment je me nomme, De tout ce Testament, en somme, S'aucune y a difficulté,
Oster jusqu'au rez d'une pomme Je luy en donne faculté.
CLXI.
De le gloser et commenter,
De le diffinir ou prescripre,
Diminuer ou augmenter;
De le canceller ou transcripre
De sa main, ne sceust-;l escripre; Interpréter, et donner sens,
A son plaisir, meilleur ou pire; A tout ceci je m'y consens.
CLXII.
Et s'aucun, dont n'ay congnoissance, Estoit allé de mort à vie,
Audict Calais donne puissance,
Affin que l'ordre soit suyvie
Et mon ordonnance assouvie,
Que ceste aulmosne ailleurs transporte, Sans se l'appliquer par envie;
A son ame je m'en rapporte.
CLXI II.
Item, j'ordonne à Saincte-Avoye, Et non ailleurs, ma sepulture
Et, affin que chascun me voye,
Non pas en chair, mais en paincture, Que l'on tire mon estature
D'ancre, s'il ne coustoit trop cher. De tumbel? Rien je n'en ay cure, Car il greveroit le plancher.
CLXIV.
Item, vueil qu'autour de ma fosse Ce que s'ensuyt, sans autre histoire, Soit escript, en lettre assez grosse; Et qui n'auroit point d'escriptoire, De charbon soit, ou pierre noire, Sans en rien entamer le piastre Au moins sera de moy memoire Telle qu'il est d'ung bon folastre. CLXV.
CY GIST ET DORT EN CE SOLLIER,
Qu'Amour OCCIST DE SON RAILLON, UNG POUVRE PETIT ESCOLLIER,
QUI FUT nommé FRANÇOIS VILLON. ONCQUES DE TERRE N'EUT SILLON.
IL DONNA TOUT, CHASCUN LE scet TABLE, TRETTEAULX, PAIN, CORBILLON. Pour DIEU, DICTES-EN CE VERSET. RONDEAU.
Repos eternel donne à cil,
Lumière, clarté perpétuelle,
Qui vaillant plat ny escuelle
N'eut oncques, n'ung brin de percil.
Il fut rez, chef, barbe, sourcil,
Comme ung navet qu'on ree et pelle.
Repos eternel donne à cil.
Rigueur le transmit en exil,
Et le frappa au cul la pelle,
Nonobstant qu'il dist J'en appelle! Qui n'est pas terme trop subtil.
Repos eternel donne à cil.
CLXVI.
Item, je vueil qu'on sonne branle Le gros Beffray, qui n'est de voire; Combien que cueur n'est qui ne tremblej Quand de sonner est à son erre. Saulvé a mainte belle terre,
Le temps passé, chascun le sçait Fussent gens d'armes ou tonnerre, Au son de luy tout mal cessoit.
CLXVII
Les sonneurs auront quatre miches; Et se c'est peu, demy-douzaine, Autant qu'en donnent les plus riches; Mais ilz seront de sainct Estienne. Vollant est homme de grant peine L'ung en sera. Quand j'y regarde, II en vivra une sepmaine.
Et l'autre ? Au fort, Jehan de la Garde, CLXVIII.
Pour tout ce fournir et parfaire, J'ordonne mes executeurs,
Auxquelz faict bon avoir affaire, Et contentent bien leurs debteurs. Hz ne sont pas trop grans venteurs, Et ont bien de quoy, Dieu mercysï De ce faict seront directeurs.
Escrip.ts je t'en nommeray six. CLXIX.
C'est maistre Martin Bellefaye,
Lieutenant du cas criminel.
Qui sera l'autre? J'y pensoye
Ce sera sire Colombel.
S'il luy plaist et il lui est bel,
Il entreprendra ceste charge.
Et l'autre? Michel Jouvenel.
Ces trois seulz, et pour tous, j'en charge. CLXX.
Mais, au cas qu'ils s'en excusassent, En redoubtant les premiers frais,
Ou totalement recusassent,
Ceulx qui s'ensuivent cy-après
J'institue, gens de bien très,
Philip Bruneau, noble escuyer,
Et l'autre, son voysin d'emprès,
Cy est maistre Jacques Raguyer; [CLXXI.
Et l'aultre, maistre Jaques James, Trois hommes de bien et d'honneur, Desirans de saulver leurs ames,
Et doubtans Dieu Nostre Seigneur. Plustot y metteront du leur,
Que ceste ordonnance ne baillent. Point n'auront de contrerooleur,
Mais à leur seul plaisir en taillent CLXXII
Des testamens qu'on dit le maistre De mon faict n'aura quid ne quod; Mais ce sera ung jeune prebstre,
Qui se nomme Colas Tacot.
Voulentiers beusse à son escot,
Et qu'il me coustast ma cornette S'il sceust jouer en ung trippot,
II eust de moy le Trou Perrette.
CLXXIII.
Quant au regard du luminaire,
Guillaume du Ru j'y commectz.
Pour porter les coings du suaire, Aux executeurs le remectz.
Trop plus mal me fontqu'oncques mais Penil, cheveulx, barbe, sourcilz.
Mal me presse; est temps desormais Que crie à toutes gens merciz.
BALLADE
Par laquelle Villon crye mercy à chascun.
A Chartreux, aussi Celestins,
A mendians et aux devotes,
A musars et cliquepatins,
Servantes et filles mignottes,
Portant surcotz et justes cottes;
A cuyderaulx d'amours transis,
Chaussans sans meshaing fauves bottes, Je crye à toutes gens merciz 1
A fillettes monstrans tetins,
Pour avoir plus largement hostes; A ribleurs meneurs de hutins,
A basteleurs traynans marmottes, A folz et folles, sotz et sottes,
Qui s'en vont sifflant cinq et six A veufves et à mariottes,
Je crye à toutes gens merciz
Sinon aux trahistres chiens mastins, Qui m'ont fait ronger dures crostes Et boire eau maintz soirs et matins, Qu'ores je ne crains pas trois crottes. Je feisse pour eulx petz et rottes; Je ne puis, car je suis assis.
Bien fort, pour eviter riottes
Je crye à toutes gens. merciz 1
ENVOI.
Qu'on leur froisse les quinze costes De gros mailletz, fortz et massis, De plombée et de telz pelottes. Je crye à toutes gens merciz 1
BALLADE
POUR SERVIR DE CONCLUSION. Icy se clost le Testament
Et finist du pouvre Villon.
Venez à son enterrement,
Quant vous orrez le carillon,
Vestuz rouges com vermillon,
Car en amours mourut martir;
Ce jura-il sur son coullon
Quand de ce monde voult partir. Et je croy bien que pas n'en ment, Car chassié fut comme un soullon De ses amours hayneusement,
Tant que, d'icy à Roussillon,
Brosses n'y a ne brossillon,
Qui n'eust, ce dit-il sans mentir, Ung lambeau de son cotillon,
Quand de ce monde voult partir. Il est ainsi, et tellement,
Quand mourut n'avoit qu'un haillon.
Qui plus? En mourant, mallement L'espoignoit d'amours l'esguillon; Plus agu que le ranguillon
D'an baudrier luy faisoit sentir, C'est de quoy nous esmerveillon, Quand de ce monde voult partir. ENVOI.
Prince, gent comme esmerillon, Saichiez qu'il fist, au departir Ung traict but de vin morillon, Quand de ce monde voult partir. FIN DU GRAND TESTAMENT.
Que feit Villon quand il fut jugé à mourir.
E suis François, dont ce me poise, Né de Paris emprès Ponthoise. Or d'une corde d'une toise
Saura mon col que mon cul poise.
L'EPITAPHE
EN FORME DE BALLADE
Que feit Villon pour luy et ses compagnons, s'attendant estre pendu avec eulx.
Frères humains, qui après nous vivez, N'ayez les cueurs contre nous endurciz, Car, si pitié de nous pouvres avez, Dieu en aura plustost de vous merciz. Vous nous voyez cy attachez cinq, six
POÉSIES DIVERSES
rv s
LE QUATRAIN
Quant de la chair, que trop avons nourrie, Elle est pieça devorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et pouldre. De nostre mal personne ne s'en rie,
Maispriez Dieu que tous nous vueille absouldre 1 Se vous clamons, frères, pas n'en devez Avoir desdaing, quoyque fusmes occis Par justice. Toutesfois, vous scavez
Que tous les hommes n'ont pas bon sens assis; Intercedez doncques, de cueur rassis,
Envers le Filz de la Vierge Marie,
Que sa grace ne soit pour nous tarie,
Nous preservant de 1 infernale fouldre. Nous sommes mors, ame ne nous harie; Mais priez Dieu que tous nous vueilleabsouldre! La pluye nous a debuez et lavez,
Et le soleil dessechez et noirciz;
Pies, corbeaulx, nous ont les yeux cavez, Et arrachez la barbe et les sourcilz.
Jamais, nul temps, nous ne sommes rassis; Puis cà, puis là, comme le vent varie,
A son plaisir sans cesser nous charie,
Plus becquetez d'oyseaulx que dez à couldre. Ne soyez donc de nostre confrairie,
Mais priez Dieu quetousnous vueille absouldre ENVOI.
Prince Jésus, qui sur tous seigneurie,
Garde qu'Enfer n'ayt de nous la maistrie A luy n'ayons que faire ne que souldre. Hommes, icy n'usez de mocquerie
Mais priez Dieu que tous nous vueille absouldre
LA REQUESTE DE VILLON
Présentée à la Cour de Parlement, en forme de ballade. Tous mescinqSens, yeulx, oreilles et bouche, Le nez, et vous, le sensitif, aussi;
Tous mes membres où il y a reprouche, En son endroit ung chascun die ainsi « Court souverain, par qui sommes icy, Vous nous avez gardé de desconfire;
Or, la langue ne peut assez suffire
A vous rendre suffisantes louenges
Si prions tous, fille au souverain Sire, Mèredes bons, et sœur des benoistz anges! » » Cueur, fendez-vous, ou percez d'une broche, Et ne soyez, au moins, plus endurcy
Qu'au desert fut la forte bise roche
Dont le peuple des Juifs fut adoulcy;
Fondez larmes, et venez à mercy,
Comme humblecueurquitendrement souspire Louez la Court, conjoincteau sainct Empire, L'heur des Françoys, le confort des estranges, Procreée la sus au ciel empire,
Mère des bons, et sœur des benoistz anges! Et vous, mesdentz, chascune si s'esloche; Saillez avant, rendez toutes mercy,
Plushaultement qu'orgue, trompe, ne cloche, Et de mascher n'ayez ores soulcy;
Considerez que je fusse transy,
Foye, pommon, et rate qui respire;
Et vous, mon corps, vil qui estes ou pire Qu'ours ne pourceau, qui faict son nid ès fan ges, Louez la Court, avant qu'il vous empire, Mèredes bons, et sœur des benoistz anges 1 ENVOI.
Prince, trois jours ne vueillez m'escondire, Pourmoy pourvoir, et aux miens adieu dire Sans eulx, argentjen'ay, icy n'aux changes. Court triumphant, fiat, sans me desdire; Mère des bons, et sœur des benoistz anges
BALLADE
DE L'APPEL DE VILLON.
Que dites-vous de mon appel, Garnier? Feis-je sens ou follie ? Toute beste garde sa pel
Qui la contrainct, efforce ou lye, S'elle peult, elle se deslie.
Quand à ceste peine arbitraire On me jugea par tricherie, Estoit-il lorstemps de me taire? Se fusse des hoirs Hue Capel, Qui fut extraict de boucherie, On ne m'eust, parmy ce drapel, Faict boyre à celle escorcherie Vous entendez bien joncherie ? Ce fut son plaisir voluntaire
De me juger par fausserie.
Etoit-il lors temps de me taire? Cuydez-vous que soubz mon cappel N'y eust tant de philosophie
Comme de dire « J'en appel? » Si avoit, je vous certifie,
Combien que point trop ne m'y fie. Quand on me dit, présent notaire « Pendu serez » je vous affie,
Estoit-il lors temps de me taire? ENVOI.
Prince, si j'eusse eu la pepie,
Pieca je fusse où est Clotaire,
Aux champs debout comme ung espie. Estoit-il lors temps de me taire?
LE DIT
DE LA NAISSANCE MARIE.
Jam nova progenies cela demittitur alto.
Virg., ecl. 4, v. 7J
O louée Conception
Envoiée sà jus des cieulx;
Du noble Lys digne syon;
Don de Jhésus très précieux,
MARIE, nom très gracieux,
Font de pitié, source de grace,
La joye confort de mes yeulx,
Qui nostre paix batist et brasse La paix, c'est assavoir, des riches, Des povres le substantement,
Le rebours des felons et chiches, Très nécessaire enfantement,
Conceu, porté honnestement,
Hors le pechié originel,
Que dire je puis sainctement
Souverain bien,Dieu éternel!
Nom recouvré, joye de peuple, Confort des bons, de maulx retraicte Du doux Seigneur première et seule Fille, de son cler sang extraicte, Du dextre costé Clovis traicte, Glorieuse ymage en tous fais,
Ou hault ciel créée et pourtraicte, Pour esjouyr et donner paix!
En l'amour et crainte de Dieu, Es nobles flans Cesar conceue; Des petis et grans, en tout lieu, A très grande joye receue;
De l'amour Dieu traicte, tissue, Pour les discordez ralier,
Et aux enclos donner yssue,
Leurs lians et fers delier.
Aucunes gens, qui bien peu sentent, Nourriz en simplesse et confiz, Contre le vouloir Dieu attentent, Par ignorance desconfiz,
Désirans que feussiez ung filz; Mais qu'ainsi soit, ainsi m'aist Dieux, Je croy que ce soit grans proufiz; Raison Dieu fait tout pour le mieulx. Du Psalmiste je prens les dictz Deleciasti me, Domine,
In factura sua! Je diz
« Noble enfant, de bonne heure né, A toute doulceur destiné
Manna du Ciel, celeste don,
De tous bienfais le guerdonné, Et de nos maulx le vray pardon! »
DOUBLE BALLADE.
Combien que j'ay leu en ung Dit Inimicum putes, y a,
Qui te presentem laudabit,
1'outesfois, non obstant cela,
Oncques vray homme ne cela En son courage aucun grant bien, Qui ne le monstrast cà et là On doit dire du bien le bien.
Saint Jehan-Baptiste ainsi le fist, Quand l'Aignel de Dieu descela. En ce faisant pas ne meffist,
Dont sa voix ès tourbes vola; De quoy saint André Dieu loua, Qui de luy cy ne scavoit rien,
Et au Fils de Dieu s'aloua
On doit dire du bien le bien.
Envoyée de Jhesucrist,
Rappelles sà jus, par deçà,
Les povres que Rigueur proscript Et que Fortune betourna.
Cy scay bien comment y m'en va 1 De Dieu, de vous, vie je tien.
Benoist celle qui vous porta!
On doit dire du bien le bien.
Cy, devant Dieu, fais congnoissance, Que creature feusse morte,
Ne feust vostre doulce naissance, En charité puissant et forte,
Qui ressuscite et reconforte
Ce que Mort avoit prins pour sien. Vostre présence me conforte
On doit dire du bien le bien.
Cy vous rens toute obéissance, A ce faire raison m'exorte,
Pe toute ma povre puissance; ]
Plus n'est deul qui me desconforte, N'autre ennuy de quelque sorte. Vostre je suis et non plus mien Ad ce droit et devoir m'enhorte On doit dire du bien le bien.
O grace et pitié très immense,
L'entrée de paix et la porte,
Some et benigne clemence,
Qui noz faultes toult et supporte,
Sy de vous louer me deporte, Ingrat suis, et je le maintien, Dont en ce refrain me transporte On doit dire du bien le bien. ENVOI.
Princesse, ce loz je vous porte, Que sans vous je ne feusse rien. A vous et à vous m'en rapporte. On doit dire du bien le bien.
Euvre de Dieu, digne, louée
Autant que nulle créature,
De tous biens et vertuz douée,
Tant d'esperit que de nature,
Que de ceulx qu'on dit, d'adventure, Plus nobles que rubis balais;
Selon de Caton l'escripture
Patrem insequitur proies.
Port assuré, maintien rassiz,
Plus que ne peut nature humaine, Et, eussiez des ans trente-six,
Enfance en rien ne vous demaine. Que jour ne le die et seomaine, Je ne scay qui me le deffend.
A ce propos ung dit ramaine
De saige mère saige enfant.
Dont resume ce que j'ay dit
Nooa progenies cœlo.
Car c'est du poëte le dit
Jamjam demittitur alto.
Saige Cassandre, belle Echo,
Digne Judith, caste Lucresse,
Je vous congnois, noble Dido,
A ma seule dame et maistresse.
En priant Dieu, digne pucelle,
Que vous doint longue et bonne vie; Qui vous ayme, MADEMOISELLE,
Jà ne coure sur luy envie.
Entière dame et assouvie,
J'espoir de vous servir aincoys,
Certes, se Dieu plaist, que'devie Vostre povre escolier Françoys.
BALLADE VILLON.
Je meurs de soif auprès de la fontaine, Chauld comme feu, et tremble dent à dent, En mon païs suis en terre loingtaine Lez un brazier friconne tout ardent; Nu comme ung ver, vestu en president; Je ris en pleurs, et attens sans espoir; Confort reprens en triste desespoir Je m'esjouys et n'ay plaisir aucun;
Puissant je suis sans force et sans povoir, Bien recueilly, debouté de chascun. Rien nem'est seur que la chose incertaine, Obscur, fors ce qui est tout évident
Doubte ne fais, fors en chose certaine; Science tiens à soudain accident
Je gaigne tout, et demeure perdent;
Au point du jour, diz «Dieu vous doint bon soir » Gisant envers, j'ay grant paour de cheoir; J'ay bien de quoy, et si n'en ay pas un; Eschoicte attens, et d'homme ne suis hoir, Bien recueilly, debouté de chascun.
De riens n'ay soing si metz toute ma paine D'acquerir biens, et n'y suis pretendant; Qui mieulxmedit,c'estcilqui plus m'attaine, Et qui plus vray, lors plus me va bourdant; Mon ami est qui me fait entendant
D'ung cygne blanc que c'est ungcorbeau noir; Et qui me nuyst croy qu'il m'aide à povoir. Venté, bourde, aujourd'uy m'est tout un. Je retiens tout; riens ne scay concepvoir, Bien recueilly, debouté de chascun.
L'ENVOI.
Prince clement, or vous plaise savoir
Que j'entens moult, et n'ay sens ne scavoir; Parcial suis, à toutes lois commun.
Que fais-je plus? Quoy? Les gaiges ravoir, Bien recueilly, debouté de chascun.
EPISTRE
EN FORME DE BALLADE, A SES AMIS. Ayez pitié, ayez pitié de moy,
A tout le moins, si vous plaist, mes amis!
En fosse giz, non pas soubz houx ne may, En cest exil ouquel je suis transmis Par fortune, comme Dieu l'a permis. Filles, amans, jeunes, vieulx et nouveaulx; Danceurs,saulteurs,faisans les pi ez de veaux, Vifs comme dars, aguz comme aguillon; Gouffres tintans, clers comme gastaneaux, Le lesserez là, le povre Villon.
Chantres chantans à plaisance, sans loy; Galans, rians, plaisans en faictz et diz, Coureux, allans, francs de faulx or, d'aloy; Gens d'esperit, ung petit estourdiz; Trop demourez, car il meurt entandiz. Faiseurs de laiz, de motets et rondeaux, Quand mort sera vous lui ferez chande aux. Il n'entre, où gist, n'escler ne tourbillon; De murs espoix on luy a fait bandeaux Le lesserez là, le povre Villon?
Venez le veoir en ce piteux arroy,
Nobles hommes, francs de quars et de dix, Qui ne tenez d'empereur ne de roy,
Mais seulement de Dieu de Paradiz Jeuner lui fault dimanches et mardiz Dond les dens a plus longues que ratteaux, Après pain sec, non pas après gasteaux; En ses boyaulx verse eau à gros bouillon Bas enterré, table n'a, ne tresteaulx Le lesserez là, le povre Villon?
ENVOI.
Princes nommez, anciens, jouvenceaulx, Impetrez-moy graces et royaulx sceaux,
Et me montez en quelque corbillon. Ainsi se font l'un à l'autre pourceaux, Car, où l'un brait, ilz fuyent à monceaux. Le lesserez, là, le povre Villon?
LE DEBAT
DU CUEUR ET DU CORPS DE VILLON,
En forme de Ballade.
Qu'est-ce que j'oy? Cesuis-je. Qui? Toncueur, Qui ne tient mais qu'à ung petit filet,
Force n'ay plus, substance ne liqueur,
Quand je te voy retraict ainsi seulet,
Com pouvre chien tappy en recullet.
Pourquoy est-ce? Pour ta folle plaisance. -Qu e t'en chault-il J'en ai la desplaisance. Laisse m'en paix Pourquoi ? J 'y penseray Quand sera-ce?-Quant seray hors d enfance. Plus ne t'en dy. Et je m'en passeray. -Que penses-tu Estre homme de valeu r. -Tu as trente ans.-C'est l'aage d'ung mullet. Egt-ce enfance? Nenny. C'est donc folleur r Qui te saisit?-Par où?-Par le collet.
Rien ne congnois.- Si fais mouches en laict L'ung estblanc, l'autre est noir, c'est la distance. -Est-ce doncq tout?-- Queveulx-tu que je tance? Si n'est assez, Je recommenceray.
-Tu es perdu! J'y mettray resistance. Plus ne t'en dy. Et je m'en passeray.
-J'en ay le dueil toi le mal et douleur. Si fusse ung povre ydiot et folet,
Au cueur eusses de t'excuser couleur
Se n'as-tu soing, tout ung, tel, bel ou laid, Ou la teste as plus dure qu'ung jalet,
Ou mieulx te plaist qu'honneur ceste meschance! Que respondras à ceste conséquence?
J'en seray hors quand je trespasseray. Dieu, quel confort! Quelle saige éloquence Plus ne t'en dy. Et je m'en passeray. D'ond vient ce mal? II vient de mon malheur. Quand Saturne me feit mon fardelet,
Ces maulx y mist, je le croy. C'est foleur Son seigneur es, et te tiens son valet.
Voy que Salmon escript en son roulet « Homme sage, ce dit-il, a puissance
Sur les planètes et sur leur influence. » Je n'en croy rien; tel qu'ilz m'ont faict seray. Que dis-tu ? Rien. -Certe, c'est ma créance. Plus ne t'en dy.- Et je m'en passeray. ENVOI.
Veux-tu vivre? Dieum'en dointla puissance! Il te fault. Quoy ? Remors de conscience Lire sans fin. Et en quoy? En science Laisse les folz! Bien, j'y adviseray.
Or le retiens. J'en ay bien souvenance. N'attends pas tant que tourne à desplaisance. Plus ne t'en dy.-Et )e m'en passeray.
LA REQUESTE
Que Villon bailla à Monseigneur de Bourbon.
Le mien seigneur et prince redoubté, Fleuron de Lys, royale geniture,
Françoys Villon, que travail a dompté A coups orbes, par force de batture, Vous supplie, par cette humble escripture, Que luy faciez quelque gracieux prest. De s'obliger en toutes cours est prest; Si ne doublez que bien ne vous contente. Sans y avoir dommage n'interest,
Vous n'y perdrez seulement que l'attente. A prince n'a ung denier emprunté, Fors à vous seul; vostre humble créature. Des six escus que lui avez presté,
Cela pieca, il mist en nourriture;
Tout se payera ensemble, c'est droicture, Mais ce sera légèrement et prest
Car, se du gland rencontre en la forest D'entour Patay, et chastaignes ont vente, Payé serez sans delay ny arrest
Vous n'y perdrez seulement que l'attente. Si je pensois vendre de ma santé
A ung Lombard, usurier par nature, Faulte d'argent m'a si fort enchanté, Que j'en prendrois, ce croy-je, l'adventure. Argent ne pend à gippon ne ceincture; Beau sire Dieux! je m'esbahyz que c'est, Que devant moy croix ne se comparoist,
Sinon de bois ou pierre, que ne mente; Mais s'une fois la vraye m'apparoist, Vous n'y perdrez seulement que l'attente. ENVOI.
Prince du Lys, qui à tout bien complaist, Que cuydez-vous, comment il me desplaist Quand je ne puis venir à mon entente? Bien m'entendez, ayd ez-moi, s'il vous plaist Vous n'y perdrez seulement que l'attente. SUSCRIPTION DE LADITE REQUESTE Allez, Lettres, faictes un sault,
Combien que n'ayez pied ne langue
Remonstrez, en vostre harengue,
Que faulte d'argent si m'assault.
BALLADE
DES PROVERBES.
Tant ^rate chèvre que mal gist;
Tant va le pot à l'eau qu'il brise; Tant chauffe-on le fer qu'il rougist; Tant le maille-on qu'il se debrise; Tant vault l'homme comme on le prise; Tant s'eslongne-il qu'il n'en souvient; Tant mauvais est qu'on le desprise; Tant crie l'on Noel qu'il vient.
Tant raille-on que plus on ne rit; Tant despend-on qu'on n'a chemise;
Tant est-on franc que tout se frit; Tant vault tien que chose promise; Tant ayme-on Dieu qu'on suyt l'Eglise Tant donne-on qu'emprunter convient Tant tourne vent qu'il chet en bise; Tant crie l'on Noel qu'il vient.
Tant ayme-on chien qu'on le nourrist; Tant court chanson qu'elle est apprise; Tant garde-on fruict qu'il se pourrist; Tant bat-on place qu'elle est prise Tant tarde-on qu'on fault à l'emprise; Tant se haste-on que mal advient; Tant embrasse-on que chet la prise; Tant crie l'on Noel qu'il vient;
ENVOI.
Prince, tant vit fol qu'il s'advise; Tant va-t-il qu'après il revient;
Tant le matte-on qu'il se radvise; Tant crie l'on Noel qu'il vient.
BALLADE
DES MENUS PROPOS.
Je congnois bien mouches en laict; Je congnois à la robe l'homme; Je congnois le beau temps du laid; Je congnois au pommier la pomme; Je congnois l'arbre à veoir la gomme;
Je congnois quand tout est de mesme; Je congnois qui besongne ou chomme; Je congnois tout, fors que moy-mesme. Je congnois pourpoinct au collet; Je congnois le moyne à la gonne; Je congnois le maistre au valet; Je congnois au voyle la nonne; Je congnois quand piqueur jargonne; Je congnois folz nourriz de cresme; Je congnois le vin à la tonne;
Je congnois tout, fors que moy-mesme. Je congnois cheval du mulet;
Je congnois leur charge et leur somme; Je congnois Bietrix et Bellet;
Je congnois gect qui nombre et somme; Je congnois vision en somme;
Je congnois la faulte des Boesmes; Je congnois filz, varlet et homme Je congnois tout, fors que moy-mesme.
ENVOI.
Prince, je congnois tout en somme; Je congnois coulorez et blesmes;
Je congnois mort qui nous consomme Je congnois tout, fors que moy-mesme.
BALLADE
DES POVRES HOUSSEURS. On parle des champs labourer, De porter chaulme contre vent, Et aussi de se marier
A femme qui tance souvent; De moyne de povre couvent, De gens qui vont souvent sur mer; De ceulx qui vont les bleds semer, Et de celluy qui l'asne maine; Mais, à trestout considérer, Povres housseurs ont assez peine. A petis enfans gouverner,
Dieu scait se c'est esbatement! De gens d'armes doit-on parler? De faire leur commandement? De servir Malchus chauldement? De servir dames et aymer?
De guerrier et bouhourder
Et de jouster à la quintaine? Mais, à trestout considérer, Povres housseurs ont assez peine. Ce n'est que jeu de bled soyer, Et de prez faulcher, vrayement; Ne d'orge battre, ne vanner, Ne de plaider en Parlement; A danger emprunter argent; A maignans leurs poisles mener
Et à charretiers desjeuner,
Et de jeusner la quarantaine; Mais, à trestout considérer, Povres housseurs ont assez peine.
PROBLÈME OU BALLADE AU NOM DE LA FORTUNE.
Fortune fuz par clercz jadis nommée, Que toy, Françoys, crie et nomme meurtrière. S'il y a hom d'aucune renommée
Meilleur que toy, faiz user en plastrière, Par povreté, et iouyr en carrière,
S'a honte viz, te dois tu doncques plaindre? Tu n'es pas seul; si ne te dois complaindre. Regarde et voy de mes faitz de jadis, Maints vaillans homspar moymors et roidiz, Et n'eusses-tu envers eulx ung soullon, Appaise-toy, et mectz fin en tes diz Par mon conseil prends tout en gré, Villon 1 Contre grans roys je me suis bien armée, Le temps qui est passé; car, en arrière, Priame occis et toute son armée;
Ne lui valut tour, donjon, ne barrière. Et Hannibal, demoura-il derrière?
En Cartaige, par moy, le feiz actaindre Et Scypion l'Affricquain feiz estaindre; Julius Cesar au senat je vendiz;
En Egipte Pompée je perdiz;
En mer noyay Jazon en ung boullon; Et, une fois, Romme et Rommains ardiz. Par mon conseil prends tout en gré, Villon! Alexandre, qui tant fist de hamée, Qui voulut voir l'estoille poucynière, Sa personne par moy fut inhumée. Alphasar roy, en champ, sous la bannière, Ruay jus mort; cela est ma manière. Ainsi l'ay fait, ainsi le maintendray; Autre cause ne raison n'en rendray. Holofernes, l'ydolastre mauldiz,
Qu'occist Judic (et dormoit entandiz!) De son poignart dedens son pavillon; Absallon, quoy! en fuyant suspendis. Par mon conseil prends tout en gré, Villon 1 ENVOI.
Povre Françoys, escoute que tu dis Se rien peusse sans Dieu de paradiz, A toy n aultre ne demourroit haillon Car pour ung mal lors j'en feroye dix Par mon conseil prends tout en gré, Villon!
BALLADE
CONTRE LES MESDISANS DE LA FRANCE. Rencontré soit de bestes feu gectans, Que Jason vit, querant la Toison d'or; Ou transmué d'homme en beste, sept ans,
Ainsi que fut Nabugodonosor;
Ou bien ait perte aussi griefve et villaine Que les Troyens pour la prinse d'Heleine; Ou avallé soit avec Tantalus
Et Proserpine aux infernaulx pallus, Ou plus que Job soit en griefve souffrance, Tenant prison en la court Dedalus, Qui mal vouldroit au royaume de France! Quatre mois soit en un vivier chantant, La teste au fons, ainsi que le butor; Ou au Grand-Turc vendu argent contant, Pour estre mis au harnois comme ung tor; ̃ Ou trente ans soit, comme la Magdelaine, Sans vestir drap de linge ne de laine Ou noyé soit, comme fut Narcisus; Ou aux cheveux, comme Absalon, pendus, Ou comme fut Judas par desperance, Ou puist mourir comme Simon Magus, Qui mal vouldroit au royaume de France i D'Octovien puisse venir le temps C'est qu'on luy coule au ventre son trésor Ou qu il soit mis entre meules flotans; En un moulin, comme fut saint Victor; Ou transgloutis en la mer, sans haleine, Pis que Jonas au corps de la baleine; Ou soit banny de la clarté Phœbus, Des biens Juno et du soulas Venus, Et du grant Dieu soit mauldit à outrance, Ainsi que fut roy Sardanapalus,
Qui mal vouldroit au royaume de France
ENVOI.
Prince, porté soit des clers Eolus,
En la forest où domine Glocus,
Ou privé soit de paix et d'espérance, Car digne n'est de posseder vertus, Qui mal vouldroit au royaume de France
LE JARGON OU JOBELIN
DE HAIITRI
FRANÇOIS VILLON.
BALLADE I.
A Parouart, la grand Mathe Gaudie, Où accollez sont ducpez et noirciz, De par angels suyvans la paillardie, Sont greffiz et prins cinq ou six.
Là sont bleffeurs, au plus hault bout assis Pour l'evagie, et bien hault mis au vent. Escevez-moy tost ces coffres massis! Ces vendengeurs, des ances circoncis, S'embrouent du tout à néant.
Eschec, eschec, pour le fardis 1
Brouez-moy sur ces gours passans, Advisez-moy bien tost le blanc,
Et pictonnez au large sur les champs Qu'au mariage ne soyez sur le banc Plus qu'un sac de piastre n'est blanc.
Si gruppez estes des carireux,
Rebignez-moy tost ces enterveux,
Et leur montrez des trois le bris
Que clavés ne soyez deux et deux. Eschec, eschec, pour le fardis
Plantez aux hurmes vos picons,
De paour des bisans si très-durs,
Et, aussi, d'estre sur les joncs,
En mahe, en coffres, en gros murs. Escharricez, ne soyez durs,
Que le grand Can ne vous fasse essorer. Songears ne soyez pour dorer,
Et babignez tousjours aux ys
Des sires, pour les debouser.
Eschec, eschec, pour le fardis
ENVOI.
Prince Froart, dit des Arques Petis, L'un des sires si ne soit endormis,
Levez au bec, que ne soyez griffis,
Et que vous n'en ayez du pis.
Eschec, eschec, pour le fardis
BALLADE II.
Coquillars, narvans à Ruel, Men ys vous chante que gardez Que n'y laissez et corps et pet, Com fist Colin de l'Escaillier, Devant la roe babiller
Il babigna, pour son salut.
Pas ne scavoit oingnons peller, Dont Lamboureur lui rompt le suc. Changez, andossez souvent,
Et tirez tout droit au tremble, Et eschicquez tost en brouant. Qu'en la jarte ne soyez ample. Montigny y fut, par exemple, Bien estaché au halle-grup,
Et y jargonnast-il le temple, Dont Lamboureur lui rompt le suc. Gailleurs, bien faitz en piperie, Pour ruer les ninars au loing, A l'assault tost, sans suerie!
Que les mignons ne soient au gaing, Tout farcis d'un plumas à coing, Qui griefve et garde le duc,
Et de la dure si très loing,
Dont Lamboureur luy rompt le suc.
ENVOI.
Prince, arrière de Ruel,
Et n'eussiez vous denier ne pluc, Que au giffle ne laissez la pel, Pour Lamboureur, qui rompt le suc.
BALLADE III.
Spélicans,
Qui, en tous temps,
Avancez dedans le pogois,
Gourde piarde,
Et sur la tarde,
Desboursez les pauvres nyais, Et pour soustenir vostre pois, Les duppes sont privez de caire, bans faire haire,
Ne hault braiere,
Mais plantez ils sont comme joncz, Pour les sires qui sont si longs. Souvent aux arques,
A leurs marques,
Se laissent tous desbouser
Pour ruer,
Et enterver
Pour leur contre que lors faisons. La fée aux Arques vous respond, Et rue deux coups, ou bien troys, Aux gallois.
Deux, ou troys
Mineront trestout aux frontz, Pour les sires qui sont si longs. Et pour ce, benards,
Coquillars,
Rebecquez-vous de la montjoye,
Qui desvoye
Votre proye,
Et vous fera de tout brouer; Par joncher
Et enterver,
Qui est aux pigeons bien cher Pour rifler
Et placquer
Les angels de mal tous rondz, Pour les sires qui sont si longs. ENVOI.
De paour des hurmes
Et des grumes,
Rassurez-vous en droguerie Et faerie,
Et ne soyez plus sur les joncz, Pour les sires qui sont si longs.
BALLADE IV.
Saupicquetz frouans des gours arques, Pour deshouser, beau sire dieux, Allez ailleurs planter vos marques Benards, vous estes rouges gueux. Berard s'en va chez les joncheux Et babigne qu'il a plongis.
Mes frères, soiez embrayeux
Et gardez les coffres massis.
Se gruppez estes, desgrappes
De ces angels si gravelitfes i
Incontinent, manteaulx et cappes, Pour l'emboue ferez eclipses;
De vos sarges serez besifles,
Tout debout et non pas assis.
Pour ce, gardez d'estre griffes
Dedens ces gros coffres massis.
Nyais qui seront attrapez,
Bientost s'en brouent au Halle, Plus ne vault que tost ne happez La baudrouse de quatre talle.
Des tires fait la hairenalle,
Quand le gosser est assiegis,
Et si hurcque la pirenalle,
Au saillir des coffres massis.
ENVOI.
Prince des gayeulx, à leurs marques, Que voz contres ne soient griffis. Pour doubte de frouer aux arques, Gardez-vous des coffres massis.
BALLADE V.
Joncheurs, jonchans en joncherie, Rebignez bien où joncherez;
Qu'Ostac n'embroue vostre arrerie, Où acollez sont vos ainsnez.
Poussez de la quille et brouez, Car tost seriez roupieux.
Eschet qu'acollez ne soyez,
Par la poe du marieux.
François Villon. 9
Bendez-vous contre la faerie,
Quanques vous aurez desbousez, N'estant à juc la riflerie
Des angelz et leurs assosez.
Berard, se povez, renversez,
Si greffir laissez voz carieux;
La dure bientost renversez,
Pour la poe du marieux.
Entervez à la floterie,
Chantez-leur trois, sans point songer. Qu'en artes ne soyez en surie, Blanchir vos cuirs et essurger. Bignez la mathe, sans targer; Que vos ans ne soyent ruppretnc Plantez ailleurs contre assiéger, Pour la poe du marieux.
ENVOI.
Prince Benard en Esterie,
Querez coupans pour Lamboureux Et autour de vos ys tuerie,
Pour la poe du marieux.
BALLADE VI
Contres de la gaudisserie,
Entervez tousjours blanc pour bis, Et frappez, en la hurterie,
Sur les beaulx sires bas assrs. Ruez de feuilles cinq ou six, Et vous gardez bien de la roe,
Qui aux sires plante du gris,
En leur faisant faire la moe.
La giffle gardez de rurie,
Que vos corps n'en ayent du pis, Et que point, à la turterie,
En la hurme ne soyez assis.
Prenez du blanc, laissez du bis, Ruez par les fondes la poe,
Car le bizac, à voir advis,
Faict aux Beroars faire la moe. Plantez de la mouargie,
Puis ça, puis là, pour l'artis,
Et n'espargnez point la flog'e
Des doulx dieux sur les patis.
Vos ens soyent assez hardis,
Pour leur avancer la droe;
Mais soient memorandis,
Qu'on ne vous face la moe.
ENVOI.
Prince, qui n'a bauderie
Pour eschever de la soe,
Danger du grup, en arderie,
Faict aux sires faire la moe.
FIN DES œuvres DE maistre François VILLON,
POESIES
ATTRIBUÉES A VILLON
1 RONDEL.
Es biens dont vous estes la dame L Ont mon cueur si très fort espris, Qu'il feust mort, s'il n'eust entrepris De vous aymer plus que nul ame. Quant à moy, point je ne l'en blasme, Pour ce qu'ilz ont de tous le pris Les biens dont vous estes la dame. De ce qu'il fault que je vous ayme, Je scay trop bien que j'ay mespris Mais qui en doit estre repris?
Non pas moi. Qui donc? Sur mon ame, Les biens dont vous estes la dame. II. RONDEL.
A bien juger mon propre affaire Et piteux cas, sans riens en taire,
Plus qu'autre croire me dcbvez, Se par advanture n'avez
Information de contraire.
Celle ou celluy qui m'a brassé
Ce maulvais los et pourchassé
Me het et ne vous ayme pas
Mais il quiert que soye chacié
De vostre amour et effacié.
Je congnois bien telz advocas.
Se vous avez voulu refaire
Leur voulenté pour me deffaire, Vous faictes mal et me grevez.
Considerez que vous scavez
Qu'onc vers vous ne voulus meffairs A bien juger.
III. RONDEL.
Une fois me dictes ouy,
En foy de noble et gentil femme; Je vous certifie, ma Dame,
Qu'oncques ne fuz tant resjouy. Veuillez le donc dire selon
Que vous estes benigne et doulche, Car ce doulx mot n'est pas si long Qu'il vous face mal en la bouche. Soyez seure, si j'en jouy,
Que ma lealle et craintive ame
Gardera trop mieulx que nul amc Vostre honneur. Avez-vous ouy? Une fois me dictes ouy.
IV. RONDEL.
Se mieulx ne vient d'amours, peu me contente; Une j'en sers qui est bien suffisante
Pour contenter un grant duc ou un roy. Je l'ayme bien, mais non pas elle moy; II n'est besoing que de ce Je me vante. Combien qu'elle est de taille belle et gente, De m'en louer pour ceste heure presente Pardonnez-moy, car je n'y voy de quoy; Se mieulx ne vient d'amours, peu me contente. Quant je luy dy de mon vouloir l'entente, Et cueur et corps et biens je luy presente, Pour tout cela remède je n'y voy.
Deliberé suis, scavez-vous de quoy?
De luy quicter et le jeu et l'actente.
Se mieulx ne vient d'amours, peu me contente. v. RONDEL.
De mon faict je ne scay que dire;
Par tout où je vois je m'adire,
Et des yeulx voy moins que du conte. En danger suis qu'il ne me couste
La vie, tant suis remply d'ire.
De mon faict je ne scay que dire,
Car ma dame si ne tient compte
De mon martyre, quant luy compte,
Mais me dit que trop aise suis,
Et qu'en ce royaulme n'a conte
Qui ait de nulle meilleur compte
Que j'ay d'elle, quant je la suis,
Nullement, de paour de mesdire, Jamais je ne l'ose desdire;
A son gré parler je l'ecoute,
Puis empilés elle je m'accoute,
Sans luy vouloir riens contredire. De mon faict je ne sçay que dire. VI. RONDEL.
Pour entretenir mes amours
Colorer me fault maints fins tours; Car ma bourse est très mal garnie Pour fourrer le poignet tousjours. Ung jour demande haults atours, Et l'autre ung grant bort de velours, Et je respons « Or bien, m'amye, » Pour entretenir mes amours.
Veez-vous ce donneur de bonjours? Il a faict en el tant de cours,.
Practiqué l'art de baverie,
Qu'il scet moult bien, sans ce qu'il rie, Dire sa pensée à rebours.
Pour entretenir mes amours
Colorer me fault maints fins tours. VII. RONDEL.
Tu te brusles à la chandelle!
Helas mon cueur, ne vois tu pas Que danger est tousjours au pas, Qui fait à tous guerre mortelle?
VII. RONDEL.
Soyes seur que tu l'auras belle
Se tu n'y vas bien par compas;
Tu te brusles à la chandelle.
Sont-ce chastaignes qu'on y pelle, A ton advis, pour ton repas?
Nennil. Retrais toy tout le pas,
Ains qu'on te frape au cul la pelle. Tu te brusles à la chandelle.
VIII. RONDEL.
Adieu vous dy la lerme à l'œil;
Adieu, ma très gente mignonne,
Adieu, sur toutes la plus bonne,
Adieu vous dy, qui m'est grand dueil. Adieu, adieu, m'amour, mon vueil; Mon povre cueur vous laisse et donne. Adieu vous dy la lerme à l'œil.
Adieu, par qui du mal recueil
Mille fois plus que mot ne sonne; Adieu, du monde la personne
Dont plus me loue et plus me dueil. Adieu vous dy la lerme à l'œil.
IX. BALLADE.
Las! je me plains d'amours et de ma dame, Et de mes yeulx dont j'ay veu sa beaulté; Et oultre plus, je me plains d'une femme Qui contre moy a le conseil donné
Dont j'ay dejà tant de mal enduré
Qu'il me fauldra, par deffaulte de joye, Aller criant, comme tout forcené
Je hez ma dame que tant aymer souloye. Car se pitié son très doulx cueur n'entame A me donner ce que j'ay désiré,
J'iray mourir, ainsi qu'ung homme infame, Tout hors de sens et si desespéré
Qu'après ma mort il en sera parlé
Plus loin dix fois que d'icy en Savoye, Et lors diray pour plus estre blasmé Je hez ma dame que tant aymer souloye Se je le dy, je jure sur mon ame
Que ce sera contre ma voulenté.
Je prye à Dieu qu'il n'y puist avoir ame A celle fin qu'il ne soit raporté.
Car jasoit ce qu'elle m'ait courroucé Tant qu'on peut plus, cent mille fois mourroyï Avant que j'eusse ne dit ne proféré Je hez ma dame que tant aymer souloye. x. RONDEL.
Quelque chose qu'Amours ordonne, Force m'est que vous habandonne
Pour pourchasser ailleurs mon bien; Car, sur ma foy, je congnois bien
Que vous m'estes pire que bonne.
Trop a de cueur qui vous en donne: Pour ce jà Dieu ne me pardonne
Se vous avez jamais le mien,
Quelque chose qu'Amours ordonne. Si n'aymeray je jà personne
Que vous, quoy que l'on me sermonne, En tout ce monde terrien;
Mais maintenant je n'en fais rien, Et sers selon qu'on me guerdonne. Quelque chose qu'Amours ordonne, Force m'est que vous habandonne. XI. RONDEL.
Hahay! estes vous rencherie,
Dieux y ait part, puis devant hier? Ma dame, c'est pour enrager!
Le faictes-vous par mocquerie?
Mais venez cà, je vous en prie
Est le cuir devenu si cher?
Hahay! estes vous rencherie?
Et dea! et ne scavez-vous mie
Que mon père est cordouennier ¡ Vous voulez bazanne priser
Plus que cordouen la moitié.
Hahay! estes-vous rencherie?
XII. RONDEL.
Au plus offrant ma dame est mise Et dernier enchérisseur.
Je ne scay se c'est par honneur, Mais je'n'en prise pas la guise.
Elle m'avoit sa foy promise,
Mais je voy qu'elle a mis son cueur Au plus offrant.
Et pour ce je quitte la prinse D'estre nommé son serviteur, Car donner me porte malheur. Ainsi j'ay laissé l'entreprise
Au plus offrant.
XIII. RONDEL.
Entens à moy, vray dieu d'amours, Et faiz que la mort ait son cours Hastivement,
Car j'ay mal employé mes jours. Je meurs en aymant par amours Certainement.
Languir me fault en griefs doulours. XIV. BALLADE
Pour ung prisonnier.
S'en mes maulx me peusse esjoyr Tant que tristesse me feust joye Par me doulouser et gemir,
Voulentiers je me complaindroye; Car, s'au plaisir Dieu, hors j'estoye, J'ay espoir qu'au temps advenir A grant honneur venir pourroye Une fois avant que mourir.
Pourtant, s'ay eu moult à souffrir Par fortune, dont'je larmoyé, Et que n'ay pas peu obtenir
N'avoir ce que je pretendoye, Au temps advenir je vouldroye Voulentiers bon chemin tenir Pour acquerir honneur et joye Une fois avant que mourir.
Sans plus loin exemple querir, Par moy mesme juger pourroye Que meschief nul ne peult fouyr, S'ainsi est qu'advenir luy doye. C'est jeunesse qui tout desvoye; Nul ne s'en doit trop esbahyr. Si juste n'est qui ne fourvoye Une fois avant que mourir.
Prince, s'aucun povoir avoye Sur ceulx qui me font cy tenir, Voulentiers vengeance en prendroye Une fois avant que mourir.
XV. RONDEL.
Comme moy vous aurez voz gages. J'en fuz bien payé au partir Plain de dueil jusques au partir, Ne sont-ce plaisans advantages? Servez amours entre vous sages II vous en fera repentir;
Comme moy vous aurez vos gages.
Repeuz serez de doulx langaiges Pour vous garder de departir. Quant est à moy, j'en suys martir. Bien tard congnoistrez teiz ouvrages Comme moy vous aurez vos gages. XVI. BALLADE.
Il n'est danger que de vilain,
N'orgueil que de povre enrichy, Ne si seur chemin que le plain, Ne secours que de vray amy, Ne desespoir que jalousie,
N'angoisse que cueur convoiteux, Ne puissance où il n'ait envie, Ne chère que d'homme joyeulx; Ne servir qu'au roy souverain, Ne lait nom que d homme ahonty, Ne manger fors quant on a faim, N'emprise que d'homme hardy, Ne povretê que maladie,
Ne hanter que les bons et preux, Ne maison que la bien garnie, Ne chère que d'homme joyeulx; Ne richesse que d'estre sain,
N'en amours tel bien que mercy, Ne de la mort rien plus certain, Ne meilleur chastoy que de luy; Ne tel tresor que preudhommye,
Ne paistre qu'en grant seigneurie, Ne cbère que d'homme joyeulx
ENVOI.
Que voulez-vous que je vous die il Il n'est parler que gracieulx,
Ne louer gens qu'après leur vie, Ne chère que d'homme joyeulx XVII. BALLADE MOR.ALE.
D'une dague forte et aigûe
Soit-il frappé parmy l'eschine, Et ait tousjours une sansue
Attachée à sa poitrine,
Et attainct d'une coulevrine
Entre le nez et le menton,
Ou qu'en prison vive en famine, Qui autruy blasme sans raison. Son giste soit emmy la rue,
Tout nud quand il fera bruyne, Sur pel de bericon pointue,
Couvert d'une cfëre estamine; De vent de bise sa courtine,
Et soit mors d'ung escorpioo, Ou qu'en prison vive en foraine,. Qui antruy blasme sans raison. Sa chair soit detrenchéeMSTrae Plus qu'au rrrcmïfn n'est1a farine, Ou de gros nerfz soit bien battre, Ou couche nud sur tas d'espîne: Et affin que plus tost il fine,
Son corps soit remply de po;son,
Ou qu'en prison vive en famine, Qui autruy blasme sans raison.
ENVOI.
Prince, soit mis en la gehaine
Dix fois le jour comme ung larron, Ou qu'en prison vive en famine,
Qui autruy blasme sans raison.
XVIII. BALLADE.
J'ay ung arbre de la plante d'amours, Enraciné en mon cueur proprement, Qui ne porte fruits, sinon de dolours, Fueillesd'ennuy et fleurs d'encombrement; Mais, puis qu'il fut planté premièrement, Il est tant creu, de racine et de branche; Que son umbre, qui me porte nuysance, Fait au dessoubs toute joye seichicr, Et si ne puis, pour toute ma puissance, Autre planter, ne celuy arrachier.
De si long-temps est arrosé de plours Et de lermes tant douloureusement, Et si n'en sont les fruits de rien meillours Ne je n'y truys guères d'amendement. Je les recueill' pourtant soigneusement. C'est de mon cueur l'amère soustenance, Qui trop mieux tusten friche ou en souffrance Que porter fruits qui le dussent blecier; Mais pas ne veult 1 amoureuse ordonnance, Autre planter, ne celuy arrachier.
S'en ce printemps, queles feuilles et flours Et arbrynceaux percent nouvellement, Amours vouloit moy faire ce secours, Que les branches qui font empeschemeni: Il retranchast du tout entierement, Pour y enter ung rynceau de plaisance, Il gecteroit bourgeons de souffisance; Joye en istroit, dont il n'est rien plus chier; Et ne fauldroit jà, par desesperance, Autre planter, ne celuy arrachier. ENVOI.
Ma princesse, ma première espérance, Mon cueur vous sert en dure pénitence. Faictes le mal qui l'acqueult retranchier, Et ne souffrez en vostre souvenance Autre planter, ne celuy arrachier.
XIX. BALLADE.
Plaisant assez, et des biens de fortune Ung peu garny, me trouvay amoureux, Voire si bien, que, tant aymay fort une, Que nuit et jour j'en estois langoureux. Mais tant y a, que je fus si heureux Que, moyennant vingt escus à la rose, Je fis cela que chacun bien suppose. Alors je dis, connoissant ce passage « Au fait d'amours, babil est peu de chose Riche amoureux a tousjours l'advantage. Or est ainsy que, durant ma pecune, Je fus traite comme amy precieux; Mais, tost après, sans dire chose aucune,
Cette vilaine alla jetter les yeulx
Sur un vieillard riche, mais chassieux, Laid et hideux trop plus qu'on ne propose. Ce neantmoins, il en jouit sa pose, Dont moy, confus, voyant un tel ouvrage, Dessus ce texte allay bouter en glose Riche amoureux a tousjours l'advantage. Or elle a tort, car noyse ny rancune N'eut onc de moy. Tant lui fus gracieux, Que, s'elle eust dit « Donne-moy de la lune » J'eusseentreprisde monter jusqu 'aux cieulx; Et, nonobstant, son corps tant vicieux Au service de ce vieillard expose.
Dont, ce voyant, un rondeau je compose, Queluytransmets; mais,enpoudelangage, Me respond franc « Povreté te dépose Riche amoureux a tous;ours l'advantage » ENVOI.
Prince tout bel, trop mieux parlant qu'Orose, Si vous n'avez toujours bourse desclose, Vous abusez car Meung, docteur très sage, Nous a descrit que, pour cueillir la rose, Riche amoureux a tousjours l'advantage. XX. BALLADE.
Qui en amours veut estre heureux, Faut tenir train de seigneurie,
Estre prompt et advantureux
Quand vient à monstrer l'armaris:
Porter drap d'or, orfaverie,
Car cela les dames esmeut.
Tout sert; mais, par saincte Marie! 1 Il ne fait pas ce tour qui veult.
Je fus naguères amoureux
D'une dame cointe et jolie,
Qui me dit, en mots gracieux
« Mon amour est en vous ravie; Mais il faut qu'el soit desservie
Par cinquante oscus d'or, s'on peut. Cinquante escus! Bon gré ma vie! Il ne fait pas ce tour qui veult. »
Alors luy donnay sur les lieux
Où elle feisoit l'endormie
Quatre venues, de cœur joyeux,
Luy fis en moins d'heure et demie.
Lors me dit, à voix espasmie
« Encore un coup! le cœur me deult. Encore un coup! Hélas! m'amye, II ne fait pas ce tour qui veult » »
ENVOI.
Prince d'amours, je te supplie,
Si plus ainsi elle m'accuelt,
Que ma lance jamais ne plie
II ne fait pas ce tour qui veult! ̃!
XXI. BALADE JOYEUSE DES TAVERNIERS. D'ung gect de dart, d'une lance asserée, D'ung grant faussart, d'une grosse massue, D'une guisarme, d'une flèche ferrée, D'ung bracquemart, d'une hache esmolue, D'ung grand penart et d'une bisagüe,
D'ung fort espieu et d'une saqueboute; De maulx briguans puissent trouver tel route Que tous leurs corps fussent mis par morceaulx, Le cueur fendu, desciré par monceaulx, Le col couppé d'ung bon branc acherin, Descirez soient de truye et de pourceaulx Les taverniers qui brouillent nostre vin. D'ung arc turcquois, d'une espée affilée Ayent les paillars la brouaille cousue, De feu gregoys la perrucque bruslée, Et par tempeste la cervelle espandue, Au grand gibet leur charongne pendue, Et briefvement puissent mourir de goutte, Ou je requiers et pry que l'on leur boute Parmy leur corps force d'ardans barreaulx; Vifs escorchez des mains de dix bourreaulx, Et puis bouillir en huille le matin,
Desmembrez soient à quatre grans chevaux, Les taverniers qui brouillent nostre vin. D'un gros canon la tête escarbouillée Et de tonnerre acablez en la rue
Soienttous leurs corps, et leur chair dessirée, De gros mastins bien garnye et pourvue, De forz esclers puissent perdre la veue, Neige et gresil tousjours sur eux degoutte, Avecques ce ilz aient la pluye toute
Sans que sur eux ayent robbes ne manteaulx, Leurs corps trenchezde daguesetcouteaulx, Et puis traisnez jusques en l'eau du Rin; Desrompuz soient à quatre-vingts marteau Ix Les taverniers qui brouillen nostre vin.
Prince, de Dieu soient maulditz leurs boyaulx, Et crever puissent par force de ven'n Ces faulx larrons, maulditz et desloyaulx, Les taverniers qui brouillent nostrs vin
XXII. S'ENSUIT
LE MONOLOGUE OU u
FRANC ARCHIER DE BAIGNOLLET
AVEC SON ÏPITAPHE,
/'Vest à meshuy! J'ay beau corner! 1 COr ça, il s'en fault retourner, Maulgré ses dentz, en sa maison Si ne vis-je pieca saison
Où j'eusse si hardy couraige
Que j'ay! Par la morbieu j'enraige Que je n'ay à qui me combatre. Y a-il homme qui à quatre,
Dy-je, y a-il quatre qui vueillent Combatre à moy ? Se tost recueillent Mon gantelet; vela pour gaige Par le sang bieu! je ne crains paige, S'il n'a pomt plus de quatorze ans. J'ay autresfoys tenu les rencz,
Dieu Mercy! et gaigné le prix
Contre cinq Angloys que. je pris,
Povres prisonniers desnuez,
Si tost que je les euz ruez.
Ce fust au siège d'Alençon.
Les troys se misrent à rançon,
Et le quatriesme s'enfuyt.
Incontinent que l'autre ouyt
Ce bruit, il me print à la gorge.
Se je n'eusse crié Sainct George Combien que je suys bon Francoys, Sang bieu il m'eust tué ançoys
Que personne m'eust secouru"
Et quand je me senty féru
D'une bouteille, qu'il cassa
Sur ma teste « Venez ça, ça
Dis-je lors. Que chascun s'appaise! Je ne quiers point faire de noise,
Ventre bieul et buvons ensemble. Posé soit ores que je tremble,
Sang bieu je ne vous crains pas maille. » Cy dit ung quidem, par derrière les gens Coquericoq.
Qu'esse cy? J'ay oüy poullaille
Chanter chez quelque bonne vieille; II convient que je la resveille.
Poullaille font icy leurs nidz
C'est du demourant d'Ancenys,
Par mafoy! ou du Champ-Toursé. Helas 1 que je me vis coursé
De la mort d'ung de mes nepveux J'euz d'ung canon par les cheveux, Qui me vint cheoir tout droit en barbe;
Mais je m'escriay « Saincte Barbe! Vueille-moy ayder à ce coup,
Et je t'ayderay l'autre coup! » Adonc le canon m'esbranla,
Et vint ceste fortune-là
Quand nous eusmes le fort conquis. Le Baronnet et le Marquis,
Craon, Cures, l'Aigle et Bressoire, Accoururent pour veoir l'histoire; La Rochefouquault, l'Amiral, Aussi Beuil et son attirail,
Pontièvre, tous les capitaines, Y deschaussèrent leurs mitaines De fer, de paour de m'affoler,
Et si me vindrent acoler
A terre, où j'estoye meshaigné, De paour de dire « Il n'a daigné » Combien que je fusse malade, Je mis la main à la salade,
Car el m'estouffoit le visaige.
« Ha! dist le Marquis, ton oultraige Te fera une foys mourir! »
Car il m'avoit bien veu courir, Oultre l'ost, devant le chasteau. Hélas! j'y perdy mon manteau, Car je cuidoye d'une poterne
Que ce fust l'huys d'une taverne. Et moy tantost de pietonner,
Car, quand on oyt clarons sonner, Il n'est courage qui ne croisse. Tout aussitost « Où esse? Où esse? » Et, à brief parler, je m'y fourre, Ne plus ne moins qu'en une bourre. Si ce n'eust esté la brairie
Du costé devers la prairie,
De nos gens, qui crioient trestous, Disant « Pierre, que faictes-vous? N'assaillez pas la basse court
Tout seul! » je l'eusse prins tout court, Certes; mais c'eust esté outraige. Et se ce n'eust esté ung paige
Qui nous vint trencher le chemin, Mon frère d'armes Guillemin
Et moy, Dieu lui pardoint, pourtant! Car, quoy? il nous en pend autant A l'oeil, eussions, sans nulle faille, Frappé au travers la bataille
Des Bretons mais nous apaisames Nos couraiges et recullames.
Que dy-je? non pas reculer,
Chose dont on ne doibt parler. Ung rien, jusque au Lyon d'Angiers. Je ne craignoye que les dangiers, Moy; je n avoye paour d'aultre chose. Et quand la bataille fut close,
D'artillerie grosse et gresle
Vous eussez ouy, pesle-mesle Tip, tap, sip, sap, à la barrière,
Aux esles, devant et derrière.
J'en eus d'ung parmy la cuirace. Les dames qu'estoient en la place Si ne craignoyent que le couillart. Certes, j'estoye ung bon paillart; J'en avoye ung si portatif,
Se je n'eusse esté si hastif
De mettre le feu en la pouldre, J'eusse destruit et mis en fouldre Tout quanqu' avoit de damoiselles.
Il porte deux pierres jumelles,
Mon couillart jamais n'en a meins. Et dames de joindre les mains,
Quand ilz virent donner l'assault. Les ungs se servoyent du courtault Si dru, si net, si sec que terre.
Et puis, quoy ? parmy ce tonnerre, Eussez ouy sonner trompilles,
Pour faire dancer jeunes filles
Au son du courtault, hautement. Quand j'y pense, par mon serment C'est vaine guerre qu'avec femmes J'avoye toujours pitié des dames. Veu qu'ung courtault tresperce ungmur, Hz auroyent le ventre bien dur, S'il ne passoit oultre. Pensez
Qu'on leur eust faict du mal assez, Se l'en n'eust eu noble couraige; Mesmes ces pehons de villaige,
J'entens pehons de plat pays,
Ne se fussent point esbahis
De leur mal faire; mais nous sommes Tousjours, entre nous gentilz hommes, Au guet dessus la villenaille.
J'estoye pardeca la bataille,
Tousjours la lance ou la bouteille Sur la cuisse c'estoit merveille, Merveille de me regarder.
Il vint ung Breton estrader,
Qui faisoit rage d'une lance;
Mais il avoit, de jeune enfance, Les reins rompus; c'estoit dommaige. Il vint tout seul, par son oultraige, Estrader par mont et par val
Pour bien pourbondir ung cheval Il faisoit feu et voire flambe.
Mais je lui trenchay une jambe, D'ung revers, jusques à la hanche Et fis ce coup-là ung dimenche, Que dy-je? ung lundy matin.
Il ne s'armoit que de satin,
Tant craignoit à grever ses reins. Voulentiers frappoit aux chanfrains D'ung cheval, quand venoit en jouste, Ou droit à la queue, sans doubte. Point il ne frappoit son roussin, Pource qu'il avoit le farcin,
Que d'ung baston court et noailleux, Dessus sa teste et ses cheveulx,
De paour de le faire clocher.
Aussi, de paour de tresbucher»
Il alloit son beau pas, tric, trac,
Et ung grant panon de bissac
Voulentiers portoit sur sa teste. D'ung tel homme fault faire feste Autant que d'ung million d'or. Gens d'armes! c'est ung grant trésor; S'il vault riens il ne fault pas dire. J'av fait raige avecques La Hire Je l'ay servy trestout mon aage. Je fus gros vallet, et puis page, Archier, et puis je pris la lance, Et la vous portoye sur la panse, Tousjours troussé comme une poche. Et puis, monseigneur de la Roche, Que Dieu pardoint, me print pour paige. J'estoye gent et beau de visaige, Je chantoye et brouilloye des flustes,
Et si tiroye entre deux butes.
A brief parler, j'estoye ainsi
Mignon comme cest enfant-cy;
Je n'avoys pas gramment plus d'aage. Or ça, ça, par où assauldray-je
Ce cocq que j'ay ouy chanter?
A peu besongner bien vanter;
11 fault assaillir cest hostel.
Adonc apperçoit le Franc Archier un espoventail de chenevière, faict en façon d'ung gendarme, croix blanche devant et croix noire
derrière, en sa main tenant
une arbaleste.
(A part.)
Ha le Sacrement de l'autel 1
Je suis affoibly Qu'esse-cy?
(A l'espoventail.)
Ha! Monseigneur, pour Dieu, mercy l Hault le trait, qu'aye la vie franche 1 Je voy bien, à vostre croix blanche, Que nous sommes tout d'ung party. (A part.)
D'ond, tous les diables est-il sorty, Tout seul et ainsi effroyé?
(A l'espoventail.)
Comment Estes-vous desvoyé?
Mettez jus, je gage l'amende.
Et, pour Dieu, mon amy, desbende Au hault ou au loing ton baston 1
Adonc il advise sa croix noire.
Par le sang bieu c'est ung Breton, Et je dy que je suis Françoys! Il est fait de toy, ceste fois,
Perrenet; c'est ung parti contraire! (A l'espoventail.)
Hen, Dieu! et où voulez-vous traire? Vous ne scavez pas que vous faictes. Dea! je suis Breton, si vous l'estes. Vive sainct Denis ou sainct Yve! Ne m'en chault qui, mais que je vive! Par ma foi Monseigneur mon maistre, Se vous voulez sçavoir mon estre, Ma mère fut née d'Anjou,
Et mon père je ne scay d'où,
Sinon que j'ouy révéler
Qu'il fut natif de Lantriquer.
Comment scauray-je vostre nom ? r Monseigneur Rollant, ou Yvon, Mort seray quand il vous plaira 1 (A part.)
Et comment il ne cessera
Meshuy de me persecuter,
Et si ne me veult escouter 1
(A l'espoventail.)
En l'honneur de la Passion
De Dieu, que j'aye confession,
Car je me sens jà fort malade 1
Or, tenez, velà ma salade,
Qui n'est froissée ne couppée;
Je la vous rens, et mon espée,
Et faictes prier Dieu pour moy. Je vous laisse, sur vostre foy,
Ung vœu que je doibs à sainct Jacques. Pour le faire, prendrez mon jacques, Et ma ceinture et mon cornet.
(A part.)
Tu meurs bien maulgré toy, Pernet, Voire maulgré toi et à force
(Au public.)
Puis qu'endurer fault et à force, Priez pour l'ame, s'il vous plaist, Du Franc Archier de Baignolet, Et m'escripvez, à ung paraphe, Sur moy ce petit epitaphe
Cy gist Pernet le Franc Archier,
Qui cy mourut sans desmarcher,
Car de fuyr n'eut onc espace,
Lequel Dieu, par sa saincte grace,
Mette ès cieulx, avecques les ames
Des francs archiers et .tes gens d'armes, Arriere des arbalestriers.
Je les hay tous ce sont meurdriers!
Je les congnois bien de pieça.
Et mourut l'an qu'il trespassa.
Velà tout; les mots sont très beaux. Or, vous me lairrez mes houseaulx, Car, se j'alloye en paradis
A cheval, comme fist jadis
Sainct Martin, et aussi sainct George,
J'en seroye bien plus prest. Or je Vous laisse gantelet et dague
Car, au surplus, je n'ay plus bague De quoy je me puisse deffendre. (A l'espouventail.)
Attendez! me voulez-vous prendre En desaroy? Je me confesse
A Dieu, tandis qu'il n'y a presse, A la Vierge et à tous sainctz.
(A paît.)
Or meurs-je les membres tous sains Et tout en bon point, ce me semble. Je n'ay mal, sinon que je tremble De paour et de malle froidure,
Et de mes cinq sens de nature. Cinq cens! Où prins, qui ne les embie Je n'en veiz onc cinq cens ensemble, Par ma foy n'en or, n'en monnoye. Pour néant m'en confesseroye
Oncques ensemble n'en veiz deux. Et de mes sept pechez morteux
II fault bien que m'en supportez Sur moy je les ay trop portez;
Je les metz jus, avec mon Jacques. J'eusse attendu jusques à Pasques, Mais vecy ung advancement.
Et du premier commendement
De la Loy, qui dit qu'on doibt croire (Non pas l'estoc quand on va boire, Cela s'entend) en ung seul Dieu, Jamais ne me trouvay en lieu
Où j'y creusse mieulx qu'à ceste heure, Mais qu'à ce besoing me sequeure.
(A l'espoventai!.)
Ne desbendez ? Je ne me fuys 1 (A part.)
Hélas je suis mort où je suis. Je suis aussi simple, aussi coy Comme une pucelle; car, quoy Dit le second commendement? Qu'on ne jure Dieu vainement. Non ay-je en vain, mais très ferme, Ainsi que fait ung bon genderme, Car il n'est rien craint, s'il ne jure. Le tiers nous enjoingt et procure, Et advertist et admoneste,
Que l'en doit bien garder la feste, Autant en hyver qu en esté
J'ay tousjours voulentiers festé, De ce ne mentiray-je point;
Et le quatriesme nous enjoint Qu'on doit honnorer père et mère J'ay tousjours honoré mon père, En moy congnoissant gentilhomme De son costé, combien qu'en somme Sois villain et de villenallle.
(A l'espoventail.)
Et, pour Dieu, mon amy, que j'aille Jusques amen; misericorde!
Relevez ung peu vostre corde; Ferez que le traict ne me blesse. (A pan.)
Item, morbieu je me confesse Du cinquiesme, sequentement
Deffend-il pas expressément
Que nul si ne soit point meurtrier?. (A l'espoventail.)
Las Monseigneur l'arbalestrier,
Gardez bien ce commendement;
Quant est à moy, par mon serment, Meurdre ne fis onc qu'en poulaille. (A part.)
L'aultre commendement nous baille Qu'on n'emble rien; ce ne fis oncque, Car en lieu n'en place quelconque Je n'euz loysir de rien embler.
J'ay assez à qui ressembler
En ce point; je n'ay point meffait, Car, se l'en m'eust pris sur le fait, Dieu scet comme il me fust mescheu! Cy laisse tomber à terre l'espoventail, celluy qui le tient.
(A l'espoventail.)
Las! monseigneur! vous estes cheul. Jésus 1 et qui vous a.bouté,
Dictes? Ce n'ay-je pas esté,
Vrayement, ou diable ne m'emporte, Au cas, dictes? Je m'en rapporte
A tous ceulx qui sont cy, beau sire, Affin que ne vueillez pas dire
Que c'est demain ou pour demain. Au fort, baillez-moy vostre main, Je vous ayderay à lever.
Mais ne me vueillez pas grever
J'ai pitié de vostre fortune.
Cy apperçoyt le Franc Archier, de l'espoventail, que ce n'est pas ung homme.
Par le corps bieu! j'en ay pour une! Il n'a pié ne main; il ne hobe;
Par le corps bieu! c'est une robe
Plaine, de quoy? charbieu! de paille! 1 Qu'esse-cy? morbieu! on se raille,
Ce cuiday-je, des gens de guerre. Que la fièvre quartaine serre
Celray qui vous a mis icy!
Je le feray le plus marry,
Par la vertu bieu! qu'il fut oncques. Se mocque on de moy quelconques? Et ce n'est, j'advoue samct Pierre! Qu'espoventail de chenevitre,
Que le vent a cy abatu!
La mort bieu vous serez bara,
Tout au travers, de ceste espée.
Quand la robbe seroit couppée,
Ce seroit ung très grand dommaige. Je vous emporteray pour gaige,
Toutesfoys, après tout butin.
Au fort, ce sera mon butin,
Que je rapporte de la guerre.
On s'est bien raillé de toi, Pierre,
La charbieu saincte et beni*te! 1
Vous eussiez eu l'assault bien vis'te, Se j'eusse sceu vostre prouesse
Vous eussiez tost eu la renverse,
Voir, quelque paour que j'en ewwe. Or pleust à Jésus que je fusse,
A tout cecy, en ma maison! t
Qu'il poise! Mengié a foison
De paille elle chiet par derrière. C'est paine pour la chamberière, De la porter hors de ce lieu.
(Au public.)
Seigneurs, je vous commande à Dieu; Et se l'on vous vient demander Qu'est devenu le Franc Archier, Dictes qu'il n'est pas mort encor, Et qu'il emporte dague et cor, Et reviendra par cy de brief.
Adieu; je m'en vois au relief.
Fi» DU HONQLOOUE DU FRANC ARCHIER DE BAIGNOLLET.
y xxni.
DIALOGUE ne MESSIEURS
DE MALLEPAYE ET DE BAILLEVENT. M. Hée, Monsieur de Baillevent! B. Quoy De neuf? M. On nous tient en aboy, Comme despourveuz, malureux.
B. Si j'avoye autant que je doy,
Sang bieu je seroye chez le Roy,
Un page après moy! M. Voire deux! B. Nous sommes francs. M. Adventureux. B. Riches. M. Bien aises B. Plantureux. M. Voire, de souhaits. B. C'est assez. M.Gentilz hommes. B. Hardis. M. Et preux. B. Par l'huys. M. Du joly Souffreteux Heritiers. B. De gaiges cassez.
J M. Nous sommes, puis troys ans passez Si minces. B. Si mal compassez.
M, Si simples. B. Legiers comme vent.
M. Si esbaudiz. B. Si mal pansez,
De donner pour Dieu dispensez,
Car nous jeusnons assez souvent.
M. Hée, monsieur de Baillevent,
Qui peult trouver, soubz quelque amant, Deux ou troys mille escus, quel proye B. Nous ferions bruyt. M. Toutallement. B. Le quartier en vault l'arpent,
Pardieu! Monsieur de Mallepaye!
M. J'escripz contre ces murs. B. Je raye, Puis.de charbon et puis de craye.
M. Je raille. B. Je fays chère à tous. M. Nous avons beau coucher en raye, L'oreille au vent, la gueulle baye,
On ne faict point prochas de nous. B. Helas serons-nous jamais soulx? M. Il ne fault que deux ou trois coups Pour nous remonter. B. Doux. M. Droictz. B. Druz.
M. Pour fringuer. B. Pour porter le houx. M. Gens. B. A dire D'ond venez-vous? M. Francs. B. Fins. M. Froidz. B. Forts. M. Grans. B. Gros. M. Escreuz.
B. De serjens sommes tous recreux, Et si n'avons nulz bien acreuz.
M. Nous debvons. B. On nous doibt. M. Fourraige.
B. Entretenus. M. Comme poux creux. B. Jurons sang bieu, nous serons creuz Arrière, piettons de village
M. Ne suis-je pas beau personnaige? B. J'ay train de seigneur. M. Pas de saige. B. Ressourdant. M. Comme bel alun. B. Pathelin en main. M. Dire raige. B. Et, par la mort bieu! c'est dommage, Que ne mettons vilains en run.
M. Hée! cinq cens escus! B. C'est esgrun. M. Quand j'en ay j'en- offre à cbascœn, Et suis bien aise quand j'en preste. B. Mes rentes sont sur le commun M. Mais povres gens n'en ont pas nng; B. J'y romproye pour néant la teste. M. S'il povoyt Tenir quelque enqueste, Quelque mandement ou requeste, Ou quelque bonne commission
B. Mais en quelque banquet honneste, Faire accroire à cest ou à ceste
La Pragmatique Sanction
M. Et si elle y croit? B. Promision. M. Se elle promet? B. Monitien.
M. Se on l'admoneste? B. Qu'on marchande. M. Se on faict marché? B. Frmctîon. M. Se on fruict? B. La Petition
En façon de belle demande
D'ung beau cent escus. M. Quelle viande B. Qui l'anroit quand on la demande, On feroit. M. Quoi? B. Feu. M. Sainct Jehan, voire
B. On tauxeroit bien grosse amende
Sur le faict de ceste demande,
Se j'en quictoye le petitoire.
M. Quel bien! B. Quel heur! M. Quel acB. Je me raffroichiz la memoire [cessoire! Quand il m'en souvient. M. Quel platsirf B. Se on nous foailloit par i.nventoire Deux mil escuz en une armoire,
Ilz n'auraient garde d'y moysir.
M. Qui peut prendre! B. Qui peut choisir! M. Gaigner! B. Espargner! M. Se saisir! 1 Nous serions partout bienvenuz.
B. Ung songe! M. Mais quel? B. De plaisir. M. Nous prendrons si bien le loisir De compter ne scay quantz escuz. B. Nous sommes bien entretenuz. M. Aymez. B. Porter. M. Et soustenuz. B. De nos parens. M. De bonne race. B. Rentes assez et revenuz,
Et s'à présent n'en avons nulz,
Ce n'est que malheur qui nous chasse. M. Je n'en fais compte. B. Je raimasse. M. Je voile par coups. B. Je tracasse, Puis au poil et puis à la plume.
M. Je gaudis, et si je rimasse,
Que voulez-vous! 11 ne tient qu'à ce Que je ne l'ay pas de coustume.
B. D'honneur assez. M. Chascun en hume. B. Je destains le feu. M. Je l'allume.
B. Je m'esbas. M. Je passe mon dueil. B. Le plus souvent, quand je me fume, Je batteroye comme fer d'enclume, Si je me trouvoye tout seul.
M. Je ris. B. Je bave sur mon sueil. M. Je donne à quelqu'une ung guin d'oeil. B. Je m'esbas à je ne sçay quoy.
M. J'entretiens. B. Je fais bel accueil. M. On me fait tout ce que je vueil, Quand nous sommes mon paige et moy. B. Je ne demande qu'avoir dequoy, Belle amye, et vivre à requoy,
Faire tousjours bonne entreprise, Belles armes, loyal au Roy.
M. Mais trois poulx rempans en aboy Pour le gibier de la chemise!
B. Je porteroye pour ma devise
La marguerite en or assise
Et le houx partout estandu.
M. Vostre cry, quel? B. Nouvelle guise. M. Riens en recepte, tant en mise, Et, toute somme, item perdu.
B. Je vous seroye, au residu,
Gorgias sur le hault verdi
Le bel estomac d'alouette.
M. Robbe! B. De gris blanc, gris perdu, Bien emprunté et mal rendu,
Payé d'une belle estiquette.
M. Puis la chaine d'or, la baguette,
Le lacqs de soye, la cornette.
B. De velours. M. C'est bel affiquet. B. Quand nous aurions fait nostre empiète, La porte seroit bien estroicte
Se ne passions jusqu'au ticquet.
M. Nectelet. B. Gorgias. M. Friquet. B. De vert? M. Tousjours quelque bouquet. B. Selon la saison de l'année.
M. Et de paige? B. Quelque naquet. M. S'il vient hasart en ung banquet? B. Le prendre entre bond et voilée.
M. Aux survenans? B. Chère meslée. M. Aux povres duppes? B. La havée. M. Et aux rustes? B. Le jobelin.
M. Aux mignons de court? B. L'accollée. M. Aux gens de mesmes? B. La risée. M. Et aux ouvriers? B. Le pathelin. M. D'entretenir? B. Damoiselin.
M. Et saluer? B. Bas comme lin.
M. Et diviser? B. Motz tous nouveaulx. Pour contenter le femynin.
Nous ferions plus d'ung esclin
Qu'ung aultre de quinze royaulx.
M. Hée, cueurs joyeux! B. Hée, cueurs loyaulx!
M. Prests. B. Prins. M. Prompts. B. Preux. M. Especiaulx.
B. Aymez. M. Supportez. B. Bien receuz. M. Nous devrions passer aux sceaulx
Envers les officiers royaulx,
Comme messieurs les despourveuz. B. De congnoissance bien pourveuz Et de sagesse. M. On nous a veuz Si gentilz et si francs. B. Si doulx. M. Helas! cent escuz nous sont deubz. B. Au fort, si nous les eussions euz, On en tint plus compte de nous.
M. Nous avons faict plaisir à tous. B. Chère à dire D'ond venez-vous? M. Esmerillonnez. B. Advenans. M. Cent escus, et juger des. coups. On auroit beau mettre aux deux bouts, Se nous ne tenions des gaignans. B. Nous sommes deux si beaulx gallans. M. Fringans. B. Bruyans. M. Allans. B. M. Esmeuz de franche volunté. [Parlans. B. Aagez de sens. M. Et jeunes d'ans» B. Bien gays. M. Assez rescéans. B. Povres d'argent. M. Prou de santé. B. Chascun de nous est habité.
M. Maison à Paris. B. Bien monté. Aussi bien aux champs qu'en la ville. M. Il y a ceste malheurté
Que de l'argent qu'avons presté
Nous n'en arrons ne croix ne pille. B. Où sont les cens et deux cens mille Escus que nous avions en pile,
Quand chascun avoit bien du sien? M. Au fort, se nous n'en avons mille, Nous sommes, selon l'Évangile,
Des bienheureux du temps ancien. B. J'aymasse mieulx qu'il n'en fust rien. M. Trouvons en par quelque moyen. B.. Qui en a à présent M. Je ne scay. B. Hé, ung eagin parisien.
M. Art lombard. B. Franc praticien, Pour faire à présent ung essay
M. Je vis le temps que j'avancay
L'argent de chose, et adressay
Tel et tel et tel benefice.
B. Et, pour moy, quand je compassé Monseigneur tel, et pourchassé
Moy mesmes tout seul son office.
M. J'estois tous;ours à tous propice; Mais je crains. B. Et quoy? M. Qu'avarice Nous surprint, si devenions riches. B. Riches, quoi Ceste faulce lisse, Pauvreté, nous tient en sa lice.
M. C'est ce qui nous faict estre cfakhes. B. Nous sommes legiers. M. Comme biches. B. Rebondis. M. Comme belles miches. B. Et fraysés. M. Comme beaulx ongnons. B. Aussi coustelez. M. Comme chiches. B. Adventureux. M. Comme Suysses A Nancy, sur les Bourguygnons.
B. Entre les gallans. M. Compaignons.
B. Entre les gorgias. M. Mignons. B. Entre gens d'armes. M. Courageux. B. S'on barguigne. M. Nous barguignons. B. Heureulx. M. Comme beaux champiMis sus en ung jour ou en deux. [gnons. B. Nous sommes les adventureux Despourveuz. M. D'argent. B. Plantureux. M. De nouvelles plaisantes. B. Tant. M. Pour servir princes. B. Curieux. M. Et pour les mignons. B. Gracieux. M. Et pour le commun. B. Tant à tant. M. Hée, monsieur de Baillevent, Quand reviendra le bon temps?
B. Quand chascun aura ses souhaits. M. Cent mille escus argent comptant, Sur ma foy, je seroye content
Qu'on ne parlast plus que de paix. B. Nous sommes si francs. M. Si parfaits. B. Si sçavans. M. Si cauts en nos faiz. B. Si bien nez. M. Si preux. B. Si hardis. M. Saiges. B. Subtilz. M. Advisez. B. Mais Faulte d'argent et les grans prestz. M. Nous ont ung peu appaillardis. B. Abandonnez. M. Comme hardis. B. Requis. M. Comme les gras mardis. B. Et fiers. M. Comme ung beau pet en baing.
B. J'ay dueil que vieulx villains tarnys
Soient d'or et d'argent si garnis,
Et mignons en ont tant besoing.
M. Nous avons froid. B. Chauld. M. Faim. B. Soif M. Soing.
B. Nous tracassons. M. Çà. B. Là. M. Près. B. Loing.
M. Sans prouffit. B. Sans quelque advantaige.
M. Mais, s'on nous foncoit or au poing, Nous serions pour faire à ung coing Nostre prouffit d'aultruy dommage. Avez-vous tousjours l'heritaige e
De Baillevent? B. Ouy. M. J'enraige Qu'en Mallepaye n'a vins, blez, grains. B. Cent francs de rente et ung fromaige, Vous m'orriez dire de couraige.
Vive le roy! M. Ronfflez, villains! B. Qui a le vent? M. Joyeulx mondains. B. Gré de dames? M. Amoureux craints. B. Et l'argent, qui? M. Qui plus embource. B. Qu'est-ce d'entre nous courtissains ? M. Nous prenons escus pour douzains, Franchement, et bourse pour bource. B. Ha! Monseigneur! M. Sang bieu, la mousse
M'a trop cousté. B. Et pourquoy? M. Pource. B. Hay! hay! tout est mal compassé. M.Commeht?B. On ne joue plus du poulce. M. Qui ne tire. B. Quicte la trousse; Autant vauldroit ung arc cassé.
M. Monsieur mon père eust amassé Plus d'escus qu'on eust entassé
En ung hospital de vermine.
B. Mais nous avons si bien sassé,
Le sang bieu que tout est passé,
Gros et menu, par l'estamyne.
M. Si vient guerre, mort ou famine, Dont Dieu nous gard, quel train, quel myne Ferons nous pour gaigner le broust? B. Quant à moy, je me determine
D'entrer chez voisin et voisine
Et d'aller voir si le pot bout.
M. Mais regardons, à peu de coust,
Quel train nous viendroit mieulx à goust Pour amasser biens et honneurs.
B. Le meilleur est prendre partout. M. De rendre, quoy? B. On s'en absoult, Pour cinq solz, à ces pardonneurs.
M. Allons servir quelques seigneurs. B. Aucuns sont si petitz d'honneurs Qu'on n'y a que peine et meschance. M. Et prouffit, quel? B. Selons les heurs; Mais entre nous, fins estcadeurs,
Il nous fault esplucher la chance.
M. Servons marchans pour la pitance, Pour fructus ventrii, pour la pance.
B. On y gaignerait ses despens.
M. Et de foncer? B. Bonne asseurance, Petite foy, large conscience;
Tu n'y scez riens et y aprens.
M. De procès, quoy? B. Si je m'y rens, Je veulx estre mis sur les rangs,
S'ilz ont argent, si je n'en crocque. M. Quels gens sont-ce? B. Gros maicheQui se font bien servir des gens; [sens, Mais de payer, querez qui bloque! 1 M. Officiers, quoi? C'est toute mocque L'ung pourchasse, l'autre desroque, Et semble que tout soit pour eutx. B. Laissons-les là. M. Ho! je n'y tocque. Il n'est point de pire def-roque
Que de malheur à malheureux.
B. Pour despourveuz adventureux Comme nous, encor c'est le mieulx De faire l'ost et les gens d'armes.
M. En fuite je suis couraigeux.
B. Et à frapper? M. Je suis piteux; Je crains trop les coups, pour les armes. B. Servons donc Cordeliers ou Carmes, Et prenons leurs bissacs à fermes, Car il n'y a pas grand débit.
M. Hz nous prescheroient en beaulx termes, Et pleureroyent maintes lermes
Devant que nous prinssions l'habit. B. Se en cest malheur etlabit
Nous mourions, par quelque acabit, Ame n'y a qui bien nous face.
M. J'ay ung vieil harnoys qu'on forbit,
Sur lequel fonde ung obit,
Et du surplus, Dieu leparïaee!
B. Hée, fault-il que Fortune efface
Nostre bon bruyt? M. Malheur nous chasse; Mais il n'a nul bien qui n'endure. [trasse. B. Prenons quelque train. M. Suyvons B. Nous trassons, et quelqu'un nous trasse A loups ravis grosse pasture.
M. Allons! B. Mais où? M. A l'adventure. B. Qui nous admoneste? M. Nature. B. Pour aller? M. Où on nous attend. B. Par quel chemin? M. Par soing ou cure. B. Logez où? M. Près de la clousture De monsieur d'Angoulevent.
B. Comment yrons? M. Jusqu'à Claqdent
Et passerons par Mallepaye. «
B. Brief, c'est le plus expedient
Que nous jetons la plume au vent
Qui ne peult mordre, si abaye.
M. Où ung franc couraige s'employe, II treuve à gaigner. B. Querons proye. M.Desquelz serons-nous? B. Des plus forts. M. Il ne m'en chault, mais que j'en aye, Que la plume au vent on envoye.
B. Puis après? M. Alors comme alors. B. La plume au ventl M. Sus. B. Là. M. Dehors! 1
B. Au hault et au loing. M. Corps pour Je me tiendray des mieux venuz. [corps. B. On n'yra point, quand serons mors, Demander au roy les tresors
De messieurs les despourveuz.
La plume au vent! M. Je le concluz. Pour les povres de ceste année. · «
B. Ne demeurons plus si confuz.
Au grat, la terre est dégelée!
M. Allons, suyvons quelque traînée. Devant! vostre fievre est tremblée, Car nous sommes tous estourdiz. B. Dieu doint aux riches bonne année! M. Aux despourveuz grasse journéel 1 B. Et aux femmes pesans mariz 1
Prenez en gré, grans et petiz.
FIN DU DIALOGUE DE MALLEPAYE ET DE BAILLEVENT.
xxnr,
LES REPEUES FRANCHES DE FRANÇOIS VILLON
ET DE SES COMPAGNONS.
Vous qui cerchez les repeues franches, Et, tant jours ouvriers que dimenches, N'avez pas planté de monnoye,
Affin que cnascun de vous oye
Comment on les peut recouvrer,
Vueillez vous au sermon trouver
Qui est escript dedans ce livre.
Mettez tous peine de le lire,
Entre vous, jeunes perriacatz,
Procureurs, nouveaulx advocatz,
Aprenans aux despens d'aultruy.
Venez-y tost, sans nul estrif,
Clercz, de praticque diligens,
Qui congnoissez si bien vos gens; Sergens à pied et à cheval,
Venez-y d amont et d'aval,
Les hoirs du deffunct Pathelin,
Qui scavez jargon jobelin;
Capitaine du pont-à-Billon;
Tous les subjetz Francoys Villon, Soyez, à ce coup, réveillez.
Pas ne devez estre oubliez,
Tous gallans à pourpointz sans manches, Qui ont besoing de repeues franches, Et tous ceulx, tant yver qu'este, Qui en ont grant nécessité.
Venez vous apprendre comment Les maistres anciennement
Scavoyent tous les tours de ce faire: s Messire Chascun Poicdenaire,
Qui de livres scait les usaiges,
Et veult lire tous les passaiges,
De celuy en prins appetis;
Venez-y donc, grans et petis,
Car, de la science scavoir,
Vous ne povez que nadeulx valoir. Venez, chevaucheurs d'escuyrie, Serviteurs de grant seigneurie,
Venez-y sans dilation,
Tous gens sotz et toutes gens sottes; Venez-y, bigotz et bigottes;
Venez-y, povres Turlupins
Et Cordehers et Jacopins
Venez aussi, toutes prestresses,
Qui scavez piecà les adresses
Des presbitaires hault et bas;
Gardez que vous n'y taillez pas 1 Venez, gorriers et gorrières,
Qui faictes si bien les manières
Que c'est une chose terrible.
Pour bien faire tout le possible; Toutes manières de farseurs,
Anciens et jeunes mocqueurs;
Venez-y tous, vrays macquereaulx De tous estatz, vieulx et nouveaulx; Venez-y toutes, macquerelles,
Qui, par vos subtilles querelles, Avez tousjours en vos maisons
Pour avoir, en toutes saisons,
Tant jours ouvriers que dimenches, Souvent les bonnes repeues franches. Venez-y tous, bons pardonneurs, Qui scavez faire les honneurs,
Aux villages, de bons pastez,
Avecques ces gras curatez,
Qui ayment bien vostre venue
Pour avoir la franche repeue;
Affin que chascun d'eulx enhorte Les paroissiens, qu'on apporte
Des biens aux pardons de ce lieu, Et qu'on face du bien pour Dieu. Tant que le pardonneur s'en aille, Le curé ne despendra maille,
Et aura maistre Jehan Laurens
Fermement payé les despens
Et quarte de vin, simplement,
Au curé, à son partement.
De tout estat, soit bas ou hault, Venez-y, qu'il n'y ait deffault;
Venez-y, varletz, chamberièrea, Qui sçavez si bien les manières, En disant mainte bonne bave,
D'avoir du meilleur de la cave,
Et puis joyeusement preschez,
Après que vos gens sont couchez. Ceulx qui cerchent banquets ou festes Pour dire quelques chansonnettes, Affin d'atrapper la repeue,
Que chascun de vous se remue D'y venir bien legièrement;
Et vous pourrez ouyr comment Ung grant tas de bonnes commères Scavent bien trouver les manières De faire leurs marys coqus.
Venez-y, et n'attendez plus,
Entre vous, prebstres.sans séjour, Qui dictes deux messes par jour A Sainct-Innocent, ou ailleurs; Venez-y, pour scavoir plusieurs Des passaiges et des adresses
De maintes petites finesses
Que l'en faict facillement
Qu'advient, par faulte d'argent, En maint lieu, la franche repeue, Qui ne doit à nul estre teue.
Par tel, cil qui veue ne l'aura, Paiera, et celuy qui fera
De ceste repeue le present,
De l'escot s'en yra exempt,
Moyennant qu'il monstre ce livre Par ce moyen sera delivre;
En lieu où n'aura esté veu
11 sera franchement repeu,
Ainsi qu'on orra plus à plain, Qui de l'entendre prendra soing.
BALLADE DE L'ACTEUR. Quant j'euz ouy ce présent mandement: Qu'on semonnoit venir, de par l'Acteur, Le dessusdict, j'ay pensé fermement De moy trouver, et en prins l'adventure, Comme celuy qui, de droicte nature: Vouloit de ce faire narration,
A celle fin qu'il en fust mention,
A une chascun, pour le temps advenir, Qui s attendent et ont intention
Que les respeues les viendront secourir. Mais ce secours est d'anciennement De tous repas le chief, et par droicture; Pourquoy, aulcuns, qui ont entendement, Le treuvent bon, et aultres n'en ont cure, Et ne cerchent tant que l'argent leur dure, Mais font au leur si grant destruction, Qu'ilz en entrent en la subjectioa
De faire aux dens l'arquemie, sans faillir, En attendant, pour toute production, Que les repeues les viendront secourir. J'en ay congneu, qui souvent largement Donnoyent à tous repeues outre mesure Qui depuis ont continuellement
Servy le Pont-à-Billon, par droicture, Dont la façon a esté à maint dure,
En leur grant dueil et tribulation;
Mais lors n'avoyent nulle remission, Combien que ce leur fist le cueur fremir,
Ilz n'attendoyent aultre succession, Que les repeues les viendront secourir. ENVOI.
Prince, pour ce que ne me puis tenir Que de teiz faitz ne face mention, Puisque à mon temps les ay veu avenir, J'en vueil faire quelque narration. Et escripre, scaaiiz la ccarrection
Des escouitans, affin d'en souvenir, La présente nouvelle invention, Que les repeues les viendront secourir.
BALLADE DES ES COUT. AN S. Qui eu a est le bien veau
Qui n'en.a point, l'en n'en tient .compte Cil qui en a est bien congneu,
Cil qui n'en a point vit à honte.
Qui paye l'on exauce et monte
Jusque au tiers ciel, pour en prester Son honneur tout aultre surnaonte, Par force de bien acquester.
Quant eratendismes les estati
De telz dissimulations,
Congnoissant les hauts et les bas Par toutes abréviations,
Nous mismes, sans sommations,
Aux champs, par bois et par tailllis,
Pour congnoistre les fictions, Qui se font souvent à Paris. Pource que chacun maintenoit Que c'estoit la ville du monde Qui plus de peuple soustenoit, Et où maintz estranges abonde, Pour la grant science parfonde Renommée en icelle ville,
Je partis, et veulx qu'on me tonde, S'à l'entrée avois croix ne pille. Il estoit temps de se coucher, Et ne scavoye où héberger D'ung logis me vins approcher, Scavoir s on m'y vouldroit loger, En disant « Avez à menger? » L'hoste me respondit « Si ay. » Lors luy priay, pour abréger « Apportez-le donc devant moy. » Je fus servy passablement,
Selon mon estat et ma sorte, Et pensant, à part moy. comment Je cheviroye avec l'hoste,
Je m'avisé que, soubz ma cotte, Avois une espée qui bien trenche Je la lairray, qu'on ne me l'oste, En gaige de la repeue franche. L'espée estoit toute d'acier,
Il ne s en failloit que le fer; Mais l'hoste la me fist machier,
Fourreau et tout, sans fricasser; Puis, après, me convint penser De repaistre, se faim avoye;
Rien n'y eust valu le tencer De leans partis sans monnoye. L'ACTEUR.
Lendemain, m'aloye enquerant Pour encontrer Martin Gallant. Droit en la Salle du Palays
Rencontray, pour mon premier mès, Tout droit soubz la première porte, Plusieurs mignons d'estrange sorte, Que sembloit bien à leur habit Qu'ilz fussent gens de grant acquit. Lors vins pour entrer en la Salle L'ung y monte, l'aultre devalle. Là me pourmenoye, de par Dieu, Regardant l'estat de ce heu,
Et quand je l'euz bien regardée, Tant plus la voys tant plus m'agrée Je vis là tant de mirlificques, Tant d'ameçons et tant d'afficques, Pour attraper les plus huppez. Les plus rouges y sont happez; A l'ung convient vendre sa terre; Maint, sans sainctir, là se detterre, Partie ou peu en demourra
De tout ce que vaillant aura; Cuydant destruyre son voysin De Poytou, ou de Lymousin, Ou de quelque aultre nation, Maint en est en destruction,
Et fauit, ains partir de léans,
Qu'ilz facent 1 arquera y aux dens. On emprunte, quia crédit,
Tout ainsi que devant est dktQuand leur argent fort s'appelisse, Lors leur est la repeue propice, Et lors cerchent (plus n'en doubtez), Hault et bas et de tous costez,
Comme on verra par demomstrances En ce traicté des Repeues franches. Et quant au regard de plusieurs Aultres repeues, sont escriptes Affin qu'on preigne les meilleurs, En lisant, grandes ou petites.
Vous orrez maintz moyems licites Comment ilz ont esté happez,
Hault et bas, par bonnes condoiàctes De ceulx qui les ont attrapez.
LA REPEUE
DE VILLON ET DE SES COMPAIGNONS. « Qui n'a or, ny argent, ny gaige,
Comment peult- il faire grant chère ? Il fault qu il vive d'avamtaige
La facon en est coustmmière.
Scaurions-rrous trouver la manière De tromper quelqu'ung, pour repaistre ? P Qui le fera sera bon maistre 1 »
Ainsi parloyent les compaigttoiïs Du bon maistre Francoys Villon, Qui n'avoient vaillant deux ongnons, Tentes, tapis, ne pavillon.
Il leur dit « Ne nous soucion, Car, aujourd'huy, sans nul deffault, Pain, vin, et viande, à gratit foyson, Aurez, avec du rost tout chault. i> La manière d'avoir du Poisson,
Adoncques il leur demanda
Quelles viandes vouloyent macher L'ung de bon poysson souhaita 5 L'autre demanda de la chair.
Maistre Francoys, ce bon archer, Leur dist « Ne vous en souciez; Il vous faut voz pourpointz lascher, Car nous aurons viandes assez. » Lors partit de ses compaignons, Et vint à la Poyssonnerie,
Et les laissa delà les pontz,
Quasy plains de melencolie.
Il marchanda, àchère lye,
Ung pannier tout plain de poysson, Et sembloit, je vous certifie, Qu'il fust homme de grant façon. Maistre Françoys fut diligent D'achapter, non pas de payer, Et dist qu'il baiMeroit l'aTgcnt Tout comptant au porte-pannier. Ils partent sans plus plaidoyer, Et passèrent par Nostre-Dame,
Là où il vit le Penancier,
Qui confessoit homme ou bien femme. Quant il le vit, à peu de plait, Il luy dist « Monsieur, je vous prie Que vous despechez, s'il vous plaist, Mon nepveu car, je vous affie Qu'il est en telle resverie
Vers Dieu il est fort negligent; Il est en tel merencolie,
Qu'il ne parle rien que d'argent. Vrayment, ce dit le Penancier, Très voulentiers on le fera. »
Maistre Francoys print le pannier, Et dit « Mon amy, venez ça; Velà qui vous depeschera,
Incontinent qu'il aura faict. » Adonc maistre Francoys s'en va, Atout le pannier, en'effect.
Quand le Penancier eut parfaict De confesser la créature,
Gaigne-denier, par dit parfaict, Accourut vers luy bonne alleure, Disant « Monsieur, je vous asseure, S'il vous plaisoit prendre loysir De me depescher à ceste heure, Vous me feriez ung grant plaisir. Je le vueil bien, en verité
Dist le Penancier, par ma foy i Or, dictes Benediciie,
Et puis je vous confesseray,
Et, en après, vous absouldray, Ainsy comme je doy le faire;
Puis penitence vous bauldray, Qui vous sera bien necessaire.
-Quel confesser! distle povrehomme Fus-je pas à Pasques absoulz?
Que bon gré sainct Pierre de Romme! Je demande cinquante soulz.
Qu'esse-cy? A qui sommes-nous? Ma maistresse est bien arrivée! 1 A coup, à coup, depeschez-vous, Payez mon panier de marée.
Ha! mon amy, ce n'est pas jeu, Dist le Penancier, seurement
II vous fault bien penser à Dieu Et le supplier humblement.
Que bon gré en ayt mon serment 1 Dist cet homme, sans contredit, Depeschez-moy legierement,
Ainsi que ce seigneur a dit. »
Adonc le Penancier vit bien
Qu'il y eut quelque tromperie; Quand il entendit le moyen,
II congneut bien la joncherie.
Le povre homme, je vous affie, Ne prisa pas bien la façon,
Car il n'eut, je vous certifie,
Or ne argent de son poysson.
Maistre François, par son blason. Trouva la façon et manière
D'avoir marée à grant foysoa,
Pour gaudir et faire gjçant chère. C'estoit la mère nourricière
De ceulx qui n'avoyent point d'argent; A tromper devant et derrière,
Eatoit ung homme diligent.
La manière éfavoir des Trippes pour c&ntr. Que fist-il? A bien peu de plet,
S'advisa de grant joncherie
Il fist laver le cul bien net
A ung gallant, je vous affie,
Disant « Il convient qu'on espie Quand seray devant la trippière, Monstre ton cul par raillerie,
Puis, après, nous ferons grant chière. » Le compai,gnon ne faillit pas,
Foy que doy sainct Remy de Rains A Petit-Pont vint par compas
Son cul descouvrit jusque aux rains. Quand maistre Françoys vit ce train, Dieu scet s'il fit piteuses lippes, Car il t'enoit entre ses mains
Du foye, du polmon et des trippes. Comme s'il fust plain de despit, Et courroucé amèrement,
II haulsa la main ung petit,
Et le frappa bien rudement,
Des trippes, par le fondement;
Puis, sans faire plus long caquet,
Les voulut, tout incontinent* Remettre dedans le baquet.
La trippiére fut courroucée
Et ne les voulut pas reprendre. Maistre Francoys, sans demourée, S'en alla, sans compte luy rendre. Par ainsi, vous povez entendre, Qu'ilz eurent trippes et poisson. Mais, après, il faut du paim tendre, Pour ce dismer de grant façon» La manière d'avok du Pain.
Il s'en vint chez un boulengkr Affin de mieubc fornir son train, Contrefaisant de l'escuyer
Ou maistre d'hasteL pottr certain, Et commanda que, tout souldain, Cy pris, cy mis, an chaippellast
Cinq ou six douzaines de paiar
Et que bien test on. se hastast. Quand la moytié fut chappellé, En une hotte- le fifit mettre,
Comme s'il fust de près hasté, II pria et requist au maistre Qu aucun se voulsist entremettre D'apporter, après luy courant, Le pain chappellé en son estre» Tandis qu'on fist le demourant. Le varlet le mist sur son col;
Après maistre François le porte, Et arriva, soit dur ou mol,
Emprès une grant vielle porte.
Le varlet deschargea sa hotte
Et fut renvoyé, tout courant,
Hastivement, tenant sa hotte,
Pour requerir le demourant.
Maistre Françoys, sans contredit, N'attendit pas la revenue.
Il eut du pain, par son édit,
Pour fournir sa franche repeue. Le boulengier, sans attendue,
Revint, mais ne retrouva point
Son maistre d'hostel; il tressue, Qu'on l'avoit trompé en ce point. La manière d'avoir du Vin.
Après qu'il fut fourny de vivres, Il fault bien avoir la mémoire
Que s'ils vouloyent ce jour estre yvres, Il falloit qu'ils eussent à boire.
Maistre Françoys, debvez le croire, Emprunta deux grans brocs de boys, Disant qu'il estoit necessaire
D'avoir du vin par ambagoys.
L'ung fist emplir de belle eaue clère, Et vint à la Pomme de Pin,
Atout ses deux brocs, sans renchère, Demandant s'ils avoient bon vin, Et qu'on luy emplist du plus fin,
Mais qu'il fust blanc et amoureux. On luy emplist, pour faire fin,
D'ung très bon vin blanc de Ëaigneux. MaistreFrançoys print les deux brocs, L'un emprès l'autre tes bouta j:
Incontinent, par bons propos, ,̃ Sans se haster, il demanda
Au varlet « Quel vin est ce là? » II luy dist « Vin blanc de Baigneux. Ostez cela, ostez cela,
Car, par ma foy, point je n'en veulx. « Qu'esse-cy? Estes- vous bejaïilne ? Vuidez-moy'tnon brocvvîsteniënt. r ` Je demande du vin de;Ëèiuline,
Qui soit bon, et non aultrernent. » Et, en.pariant, subtilkrnent
Le broc qui estoit d'èaue'jplain
Contre l'aultre legiereineht
Luy changea, à pur et ft plain.
Par ce point, ils eurent du vin
Par- fine force de tromper;
Sans aller -parier au <ievin,
Ils repeurent, per ou non per.
Mais lebegu jeu fut au souper,
Car maistre Françoys, à brief mot, Leur dit Je me vueil occuper, Que mangerons enriûyt du rost. »
La manière d'avoir du Rost.
Il fut appointé qu'il yroit
Devant l'estal d'ung rotisseur,
Et de la chair marchanderoit,
Contrefaisant du gaudisseur,
Et, pour trouver moyen meilleur, Faignant que point on ne se joue, II viendroit un entrepreneur,
Qui luy bailleroit sur la joue.
Il vint à la rostisserie,
En marchandant de la viande; L'autre vint, de chère marrie « Qu'est-ce que ce paillart demande?» w Luy baillant une buffe grande, En luy disant mainte reproche. Quand il vit qu'il eut ceste offrande, Empoigna du rost pleine broche. Celuy qui bailla le soufflet
Fuist bien tost et à motz exprès. Maistre Françoys, sans plus de plet, Atout son rost, courut après.
Ainsi, sans faire long procès,
Ils repeurent, de cueur devot,
Et eurent, par leur grant excès, Pain, vin, chair, et poisson, et rost.
SECONDE REPEUE
DE L' EPI DEMIE. Jjfc
Et pour la première repeue
Dont après sera mention,
Bien digne d'estre ramenteue
Et mise en revelation,
Et pourtant, soubs correction,
Affin que l'en en parle encore,
Comme nouvelle invention,
Redigé sera par mémoire.
Or advint, de coup d'aventure,
Que les suppostz devant nommez, Ne cherchoyent rien par droicture, Qu'en richesse gens renommez.
Ung jour qu'ilz estoient affamez, En la porte d'ung bon logis
Virent entrer, sans estre armez, Ambassadeurs de loing pays.
Si pensèrent entre eux comment Ilz pourroient, pour l'heure, repaistre, Et, selon leur entendement,
L'ung d'iceulz s'aprocha du maistre D'hostel, et se fit acopgnoistres
Disant qu'il luy enseigneroit
Le haut, le bas marché, pour estre Par luy conduyt, s'il luy plaisoit. Je croy bien que monsieur le maistre,
Qui du bas mestier estoit tendre, Fit ce gallant très bien repaistre, Et luy commenda charge prendre De la cuysine, d'y entendre,
Tant que leur train departira, Et bien payera, sans attendre, A son gré, quand il s'en yra.
Lors s'en vint à ses compaignons, Dire « Nostre escot est payé; Je suis jà l'ung des grans mignons De léans et mieulx avoyé,
Car le maistre m'a envoyé
Par la ville, pour soy sortir;
Mais, se mon sens n est desvoyé, Bien brief l'en feray repentir. Va, lui dirent ses compaignons, Et esguise tout ton engin
A nous rechauffer les rongnons Et nous faire boire bon vin.
Passe tous les sens Pathelin,
De Villon et Pauquedenaire,
Car se venir peux en la fin,
Passé seras maistre ordinaire. » Ce gallant vint en la maison
Où estoyt logé l'ambassade,
Où les seigneurs, par beau blason, Devisoyent rondeau ou ballade. II estoit miste, gent et sade,
Bien habitué, bien en point,
Robbe fourrée, pourpoint d'ostade; Il entendoit son contrepoint.
Le principal ambassadeur
Aymoit une peu le bas mestier,
Dont le gallant fut à honneur,
Car c'estoyt quasi son mestier,
Et luy conta que, à son quartier,
Avoit de femmes largement,
Qui estoyent, s'il estoit mestier,
A son joly commandement.
Le gallant fut entretenu
Par ce seigneur venu nouveau,
Et léans il fut retenu,
Pour estre fin franc macquereau.
Le jeu leur sembla si très beau;
Aussi, il fit si bonne mine,
Qu'il fut esleu, sans nul appeau,
Pour estre varlet de cuysine.
Les ambassadeurs convoyèrent
Seigneurs et bourgeois à disner,
Lesquels voulentiers y allèrent
Passer temps, point n'en faut doubter. Toutesfoys, vous debvez scavcir,
Quelque chose que je vous dye,
Que l'ambassadeur, pour tout veoir, Craignoit moult fort l'Epidemie.
Ce gallant en fut adverty,
Qui nonobstant fist bonne mine,
Et quand il fut près de midi,
A l'heure qu'il est temps qu'on disne, Il entra dedans la cuysme,
Manyant toute la viande,
Comme docteur en médecine
Qui tient malades en commande. Tous les seigneurs là regardèrent Son train, ses façons et manières; Mais, après luy, pas ne tastèrent, Aussi ne luy challoit-il guères. Après il print les esguières,
Le vin, le clairé, l'ypocras,
Darioles, tartes entières
Il tasta de tout, par compas.
Et, pour bien entendre son cas, Quand il vit qu'il estoit saison, A bien jouer ne faillit pas,
Pour faire aux seigneurs la raison, Si bien que dedans la maison
Demoura tout seul pour repaistre, Soustenant, par fine achoison,
Qu'il se douloit du cousté destre. Lors y avoit une couchette
Où il failloit la feste faire,
Et n'a dent qui ne luy cliquette; Là se mist, commençant à braire Que l'on s'en fuyt au presbytaire, Pour faire le prebstre aco ;rir,
Atout Dieu et l'autre ordinaire Qu'il fault pour ung qui veult mourir. Quand les seigneurs virent leprebsir- Avec ses sacremens venir,
Chacun d'eulx eust bien voulu estre Dehors, je n'en veulx point mentir
Si grant haste eurent d'en sortir, Que là demourèrent les vivres, Dont les compaignons du martir Furent troys jours et troys nuyts yvres. Par ce point eurent la repeue
Franche chascun des compaignons. La finesse le prebstre a teue,
Affin de complaire aux mignons; Mais les seigneurs dont nous parlons Eurent tous, pour ce coup, l'aubade Chascun d'eulx fut, nous ne faillons, De la grant paour troys jours malade.
LA TROISIEME REPEUE DES TORCHECULS.
Un Lymousin vint à Paris,
Pour aulcun procès qu'il avoit. Quand il partit de son pays
Pas gramment d'argent il n'avoit, Et toutefoys il entendoit
Son fait, et avoit souvenance
Que son cas mal se porteroit
S'il n'avoit une repeue franche. Ce Lymousin, c'est chose vraye, Qui n'avoit vaillant ung patac, Se nommoit seigneur de Combraye, Sans qu'on le suivist à son trac.
Plus rusé estoit qu'ung vieil rat,
Et affamé comme un vieil loup,
Avec monsieur de Penessac,
Et le seigneur de Lamesou.
Les troys seigneurs s'entretrouvèrent, Car ilz estoyent tous d'ung quartier Et Dieu scait s'ilz se saluèrent,
Ainsi qu'il en estoit mestier;
Toutesfoys, ce bon escuyer
De Combraye, propos final,
Fut esleu leur grant conseillier,
Et le gouverneur principal.
Ils conclurent, pour le meilleur,
Que ce bon notable seigneur
Yroit veoir s'il pourroit trouver
Quelque bon lieu pour s'y loger,
Et, selon qu'il le trouveroit,
Aux aultres le raconteroit.
Or advint, environ midy,
Qu'il estoit de faim estourdy,
S'en vint à une hostellerie,
Rue de la Mortellerie,
Où pend l'enseigne du Pestel
A bon logis et bon hostel,
Demandant s'on a que repaistre
« Ouy, vrayment, ce dist le maistre; Ne soyez de rien en soucy,
Car vous serez très bien servy
De pain, de vin et de viande.
Pas grand chose je ne demande, Dist le bon seigneur de Combraye
Il n'y a guère que j'avoye
Bien des)uné; mais, toutesfoys, Si ai-je disné maintes foys
Que n'avoye pas tel appetit. »
Ce seigneur menga ung petit,
Car il n'avoit guère d'argent,
Commendant qu'on fust diligent D'avoir quelque chose de bon,
Pour son soupper ung gras chapon; Car il pensoit bien que, le soir, Il devoit avec luy souper
Des gentilzhommes de la cour. L'hostesse fut bien à son gourt, Car, quand vint à compter l'escot, Le seigneur ne dist oncques mot, Mais tout ce qu'elle demanda
Ce gentilhomme luy bailla,
Disant « Vous comptez par raison » Puis il sortit de la maison,
Bouta son sac soubs son esselle, Et vint raconter la nouvelle
A ses compaignons, et comment Il failloit faire saigement.
Il fut dit, à peu de parolles,
Pour eviter grans monopolles, Que le seigneur de Penessac
Yroit devant louer l'estat
Et blasonner la suffisance
De ce seigneur, car, sans doubtance, La chose le valoit très bien,
Et, pour trouver meilleur moyen, II menroit en sa compaignie,
Lamesou; et n'y faillit mye.
Si vint demander à l'hostesse S'ung seigneur remply de noblesse Estoit logé en la maison.
L'hostesse respondit que non, Et que vrayement il n'y avoit Qu'ung Lymousin, lequel debvoit Venir au soir souper léans.
a Ha dist-il, dame de céans, C'est celuy que nous demandons; Par ma foy c'est le grant baron, Qui est arrivé au matin.
Je n'entens point vostre latin, Dist l'hostesse; vous parlez mal II n'a ne jument ne cheval;
II va à pied, par faulte d'asne. » Lors Penessac respondit « Dame, Il vient icy pour ung procès
II est appellant des excès
Qu'on luy a faictz en Lymousin, Et va ainsi de pied, affin
Que son procès soit plus tost faict. » L'hostesse le creut, en effet.
Alors, le seigneur de Combraye Arrive, et Dieu scait quelle joye Ces deux seigneurs icy lai firent; Et le genoil en bas tendirent
Aussi tost comme il fut venu, Et par ce point il fut congneu Qu il estoit seigneur honorable. Le bon seigneur se sist à table, En tenant bonne gravité.
Vis-à-vis, de l'autre costé,
S'assit le seigneur de l'hostel,
Et eurent du vin, Dieu scait quel! Il ne le fault point demander.
Quand ce vint à l'escot compter L'hostesse assez hault comptait, Mais au seigneur il n'en challoit, Feignant qu'il fust tout plain d'argent. Lors il dist qu'on fust diligent
De penser à faire les litz,
Car il vouloit en ce logis
Coucher; puis après, par exprès, II print son grand sac à procès, Et le bailla léans en garde,
Disant « Qu'on me le contregarde. Si de l'argent voulez avoir,
II ne faut que le demander. »
L'hostesse ne fut pas ingrate,
En disant « Je n'en ay pas haste. N'espargnez rien qui soit céans. » Ces seigneurs couchèrent léans L'espace de cinq ou six moys,
Sans payer argent, toutesfoys,
Non obstant ce qu'il demandoit A l'hostesse s'elle vouloit
Avoir de l'argent, bien souvent; Mais il n'estoit point bien content De mettre souvent main en bourse. L'hostesse n'estoit point rebourse, Et dist « Ne vous en soucyez; Dieu mercy! j'ay argent assez,
A vostre bon commandement. » Ces mignons pensèrent comment Ilz pourroyent retirer leur sac •, Et lors monsieur de Penessac
Dist à ce baron de Combraye
Qu'il se boutast bientost en voye, Jugeant qu'il fust embesongné. Ce seigneur vint, tout refrongné, Vers l'hostesse, par bon moyen, Et lui dit « Mon cas va très bien; Mon procès est ennuyt jugé.
A coup, qu'il n'y ait plus songé, Baillez-moy mon sac, somme toute, Car j'ay paour et si fays grant doubte, Que les seigneurs soyent departis. » Il print son sac « Adieu vous dis! Je reviendray tout maintenant. » II s'en alla diligemment,
Atout ses procès et son sac;
Et les seigneurs de Penessac
Et de Lamesou l'attendoyent
Lesquelz seigneurs si s'esbatoyent, A recueillir les torcheculz
Des seigneurs qui estoyent venus Aux chambres, et bien se pensoyent Qu'à quelque chose serviroyent Hz ostèrent tous ces procès
De ce sac, et, par motz exprès,
L'emplirent de ces torcheculz;
Puis, au soir, quand furent venuz A leur logis, fut mis en garde, Et, pour mieulx mettre en sauvegarde, Il fut bouté, par grant humblesse, Avec les robbes de l'hostesse,
Qui sentoyent le muguelias.
Au soir, firent grant ralias
Le lendemain il fut raison
De departir de la maison
Pour s'en aller sans revenir.
On cuydoit qu'ilz deussent venir Lendemain soupper et disner, Pour leurs offices resiner,
Maiz ilz ne vindrent oncques puis. Ils faillirent cinq ou six nuitz, Dont l'hostesse fut eschec et mac. Elle n'osoit ouvrir le sac
Sans avoir le congé du juge,
Auquel avoit piteux déluge;
Tellement qu il fut necessaire Qu'on envoyast ung commissaire Pour ouvrir ce sac, somme toute. Quand il fust là venu sans doubte, II lava ses mains à bonne heure, De paour de gaster l'escripture, Car à cela estoit expert.
Toutesfoys, le sac fut ouvert; Mais, quand il le vit si breneux, Il s'en alla tout roupieux,
Cuydant que ce fust mocquerie, Car il n'entendoit raillerie.
Ainsi partirent ces seigneurs De Paris, joyeux en couraige. De tromper furent inventeurs Cinq moys vesquirent d'avantaige; De blasonner ilz firent raige; Leur hoste fut par eulx vaincu. Ils ne laissèrent, pour tout gaige Qu'un sac tout plain de torchecu.
LA
QUATRIESME REPEUE FRANCHE DU SOUFFRETEUX.
Cf. Où pris argent, qui n'en a point? Remède est vivre d'avantaige.
Qui n'a ne robbe ne pourpoint,
Que pourroit-il laisser pour gaige ? Toutesfoys, qui aurait l'usaige
De dire quelque chansonnette
Qui peust deffrayer le passaige,
Le payement ne seroit qu'honneste. » L'ACTEUR.
Ainsi parloit le Souffreteux,
Qui estoit fin de sa nature;
Moytié triste, moytié joyeux.
Du Palays partit, bonne alleure,
En disant « Qui ne s'adventure, II ne fera jamais beau fait, »
Pour pourchasser sa nourriture,
Car il estoit de faim deffaict.
Pour trouver quelque tromperie,
Le gallant se voulust haster
En la meilleure hostellerie
Ou taverne s'alla bouter,
Et commenca à demander
S'on avoit rien pour luy de bon
Car il vouloit léans disner,
Et faire chère- de façon.
Lors on dernanua ^aelle viande II falloit à ce pèlerin.
Il respondit « Je ne demande Qu'une perdrix ou un poussin, Avec une pinte de vin
De Beaulne, qui soit frais tirée. Et puis après, pour faire fin,
Le cotteret et la bourrée. »
Tout ce qui luy fut convenable Le varlet luy alla quérir.
Le gallant s'en va mettre à table, Affin de mieulx se resjouyr,
Et disna là, tout à loisir,
Maschant le sens, trenchant du saige; Mais il fallut, ains que partir,
Avoir ung morceau de formaige. a Adonc dit le clerc Mon amy, II fault compter, car vous devez. Tout par tout, sept solz et demy, Et convient que les me payez.
Je ne scay comment les aurez, Dist le gallant, car, par sainct Gille! Je veulx bien que vous le saichez, Je ne soustiens ne croix ne pille. Qui n'a argent si laisse gaige; Ce n'est que le faict droicturier. Vous voulez vivre d'avantaige, Et n'avez maille ne denkr!
Estes-vous larron ou meurtrier?
Par Dieu, ains que d'icy je hobe, Vous me payerez, pour abréger,
Ou vous y laisserez la robbe.
Quant est d'argent, je n'en ay point, Affin de le dire tout hault.
Comment! m'en iray-je en pourpoint, Et desnué comme ung marault?
Dieu mercy je n'ay pas trop chault; Mais, s'il vous plaisoit m'employer, Je vous serviray, sans deffault,
Jusques à mon escot payer.
Et comment? Que sçavez-vous faire ? Dites-le moy tout plainement.
Quoy? toute chose nécessaire. Point ne fault demander comment; Je gaige que, tout maintenant,
Je vous chanteray ung couplet,
Si hault et si cler, je me vant,
Que vous direz « Cela me plaist » L'ACTEUR.
Lors, le varlet, voyant cecy,
Fut content de ceste gaigeure,
Et pensa en luy-mesme ainsi,
Qu'il attendroit ceste adventure; Et s'il chantoit bien d'adventure, II lui diroit, pour tous desbâts,
Qu'il payast l'escot, bon alleure, Car son chant ne lui plaisoit pas.
L'accord fut dit, l'accord fut faict, Devant tous, non pas en arrière. Lors le gallant tire, de faict,
De dedens sa gibecière
Une bourse, d'argent legière,
Qui estoit pleine de mereaulx, Et chanta, par bonne manière, Haultement, ces mots tout nouveaulx De sa bourse dessus la table
Frappa, affin que je le notte,
Et, comme chose convenable,
Chanta ainsi à haùlte notte
« Faut payer ton hoste, ton hoste! » Tout au long chanta ce couplet. Le varlet, estant coste à coste, Respondit « Cela bien me plaist » Toutesfoys, il n'entendoit pas Qu'il ne fust de l'escot payé,
Parquoy il failloit sur ce pas.
De son sens fut moult desvoyé. Devant tous fut notiffié
Qu'il estoit gentil compaignon, Et qu'il avoit, par son traicté, Bien disné pour une chanson.
C'est bien disné, quand on eschappc Sans desbourser pas ung denier, Et dire adieu au tavernier
En torchant son nez à la nappe.
^«̃̃'••jurv
François Villon. r^y/' 14
LA CINQUIESME REPEUE DU PELLETIER.
Ungjour advînt qu'ung Pelletier spousa une belle femme
Qui appetoit le bas mestier,
En faisant recorder sa game.
Le Pelletier, sans penser blasme, Ne s'en soucioit qu'ung petit
Mieulx aymoit du vin une dragme, Que coucher dedens ung beau lict. Ung curé, voyant cest affaire,
De la femme fut amoureux,
Et pépia qu'à son presbytaiïe
Il maineroit ce malstre gueux.
Il s'en vint à luy tout joyeux,
A celle fin de le tromper, E* disant « Mon voysin, je veux •* Vous donner ennuyt à soupper. »' Le Pelletier en fut content, ·
Car il ne vouloyt que repaistre,
Et alla tout incontinent
Faire grant chère avoftle prestre, Qui luy joua d'un tour de maistre, Disant « Ma robbe est deffourrée; Il vous y convient la main mettre, Affin qu'elle soit reffourrée.
Et bien, ce dist le Pelletier,
Monseigneur, j'en suis bien content, Mais que vous m'en vueillez payer Je suis tout vostre, seurement. » Ils firent leur appoinctement
Qu'il auroit, pour tout inventoire, Dix solz tournois entièrement,
Et du vin largement pour boire, Pourvu qu'il la despecheroit,
Car il luy estoit necessaire,
Et que toute nuyt veilleroit, Avec son clerc, au presbitaire.
Il fut content de cest affaire.
Mais le Curé les enferma
Soubs la clef, sans grant noyse faire, Puis hors de la maison alla. ♦
Le Curé vint en la maison
Du Pelletier, par ses sornettes,
Et trouva si bonne achoyson
Qu'il fist très bien ses besongnettes. Hz firent cent mille chosettes,
Car, ainsi comme il me semble, JI contenta ses amourettes, ;>
Et puis h#rs de la maison emble. Ce fourreur, pour la repeue franche Fut fait coqu bietf fermement;
Et luy chargea la dame blanche Qu'il y retournast hardiment,
Et que, par son sainct sacrement, Jamais nul jour ne l'oubliera,
Mais luy fera hébergement,
Toutes les foys qu'il luy plaira.
Et pourtant, donne soy bien garde Chascun qui aura belle femme
Qu'on ne lui joue telle aubade
Pour la repeue c'est grant diffame; Quant il est sceu, ce n'est que blasme Et reproche, au temps advenir.
Vela des repeues la grant game;
Pourtant, ayez-en souvenir!
SIXIESME REPEUE FRANCHE DES GALLANTS SANS SOULCY.
Une assemblée de compaignons,
Nommez les Gallans sans soucy,
Se trouvèrent entre deux pontz,
Près le Palays, il est ainsi;
D'aultres y en avoit aussi,
Qui aymoient bien besoigne faicte, Et estoient, de franc cueur transi,
A l'abbé de Saincte Souffrette.
Ces compaings ainsi assemblez
Ne demandèrent que repas;
D'argent ilz n'estoyent pas comblez, Non pourtant ne faillirent pas.
Ilz se boutèrent, c'est le cas,
A l'enseigne du Plat d'estaing,
Où ilz repeurent par compas,
Car ilz en avoient grant besoing.
Quant ce vint à l'escot compter,
Je crois que nully ne s'en cource; Mais le beau jeu est au payer,
Quant il n'y a denier en bourse.
Nul d'eulx n'avoit chère rebourse « Pour de l'escot venir au bout, A Dist ung gallant, de plaine source, II n'en faut qu'ung pour payer tout. » Ilz appointèrent tous ensemble,
Que l'ung d'iceulx on banderoit:
Par ainsi, selon qui me semble,
Le premier qu'il empoigneroit,
Estoit dit que l'escot payeroit.
Mais ilz en eurent grand discord
Chascun bandé estre vouloit,
Dont ne peurent estre d'accord.
Le varlet, voyant ces desbas,
Leur dit « Nul de vous ne s'esmoye; Je suis content que, par compas, .̃, Tout maintenant bandé je soye. » Les gallans en eurent grand joye,
Et le bandèrent en ce lieu,
Puis chascun d'eux si print la voye Pour s'en aller sans dire adieu.
Le varlet, qui estoit bandé,
Tournoyoit parmy la maison.
Il fut^de l'escot prébende
Par jÊstCsiibtile achoiAn.
Affia d'avoir provision
De l'escot, l'hoste monte en hault Quand il vit Geste intention,
A peu que le cueur ne lui fault. En montant, l'hoste fut happé
Par son varlet, sans dir6mot,
Disant «Je vous ay attrapé,
Il faut que vous payez l'escot, Ou vous laisserez le surcot. »
De quoy il ne fut pas joyeux,
Cuydant qu'il fust mathelineux. Quand le varlet se desbanda
La tromperie peut bien congnoistre Fut estonné quand regarda,
Et vit bien que c'estoit son maistre. Pensez qu'il en eut belle lettre, Car il parla lors à bas ton,
Et, pour sa peine, sans rien mettre, Il eut quatre coups de baston.
i i..t
Ainsi furent, sans rien payer,
Les povres gallans délivrez
De la maison du tavernier,
Où ilz s'estoyent presque enyvrez Des vins qu on leur avoit livrez Pour boire à plain gobelet,
Que paya le povre varlet.
Et que ce soit vray ou certain, Ainsi queito'ont dit cinq ou Six, Le cas advint au Plat d'estaift Près Sainct-Pierre-des-Arsis. Bien eschéoit unggrant mercis, A tout le moins, pour ce repas, Et si ne le payèrent pas.
Aussi fut si bien aveuglé,
Le povre varlet malheureux,
Qui fut de tout l'escot sanglé, Et fallust qu'il payast pour eulx Et s'en allèrent tous joyeux
Les mignons, torchant leur visaige, Qui avoyent disné d'advantaige.
LA SEPTIESME REPEUE FAICTE AUPRÈS DE MONTFAULCON. Pour passer temps joyeusement,
Raconter vueil une repeue
Qui fut faicte subtillement
Près Montfaulcon, c'est chose $ceue, Et diray la desconvenue
Qu'il advint à de fins ouvriers;
Aussi y sera ramentevie
La finesse des escolliers.
Quand compaignons sont desbauchsz, Ilz ne cherchent que compaignie
Plusieurs ont leurs vins vendangez Et beu quasy jusqu'à la lye.
Or advint qu'une grant mesgnie
De ccmpaignons se rencontrèrent.
Et, sans trouver la saison chère,
Chascun d'eulx se resjouyssoit
Disant bons motz, faisant grant chère; Par ce point le temps se passoit.
Mais l'ung d'iceulx promis avoit
De coucher avec une garce,
Et aux aultres le racontoit,
Par jeu, en manière de farce.
Tant parlèrent du bas mestier,
Que fut conclud, par leur facon,
Qu'ilz yroyent ce soir-là coucher
Près le gibet de Montfaulcon,
Et auroyent pour provision
Ung pasté de facon subtile,
Et meneroyent, en conclusion,
Avec eulx chascun une fille.
Ce çasté, je vous en respons,
Fut faict sans demander qu'il couste, Car il y avoit six chapons,
Sans la chair, que point je n'y boute. On y eust bien tourné le coute,
Tant estoit grant, point n'en doubtez. Le Prince des Sots et sa routte
En eussent esté bien souppez.
Deux escolliers voyant le cas,
Qui ne sçavoyent ien que tromper, Sans prendre conseil d'advocatz, Ilz se voullurent occuper,
Pensant à eux, comme atrapper Les pourroyent d'estoc ou de trenche; Car ilz voulloyent ce soir soupper Et avoir une repeue franche.
Sans aller parler au devin,
L'ung prist ce pasté de façon,
L'autre emporta un broc de vin, Du pain assez, selon raison,
Et allèrent vers Montfaulcon,
Où estoit toute l'assemblée.
Filles y avoit à foyson,
Faisant chère desmesurée.
Aussi juste comme l'orloge,
Par devis et bonne manière,
Ilz entrèrent dedans leur loge,
Esperant de faire grant chière,
Et tastoient devant et derrière
Les povres filles, hault et bas.
Les escolliers, sans nulle fable, Voyant ceste desconvenue,
Vestirent habitz de diable,
Et vindrent là, sans attendue
L'ung, ung croc, l'autre, une massue,
Pour avoir la franche repue,
Vindrent assaillir les gallans.
Disant « A mort! à mort, à mort Prenez, à ces chaisnes de fer,
Ribaulx, putains, par desconfort, Et les amenez en enfer;
Hz seront avec Lucifer,
Au plus parfond de la chauldière, Et puis, pour mieulx les eschauffer, Gettez seront en la rivière »
L'ung des gallans, pour abbreger, Respondit « Ma vie est finée En enfer me fault heberger.
Vecy ma dernière journée
Or suis-je bien ame dampnée Nostre peché nous a attains,
Car nous yrons, sans demourée, En enfer avec ces putains »
Se vous les eussiez veu fouyr,
Jamais ne vistes si beau jeu,
L'ung amont, l'autre aval courir; Chascun d'eulx ne pensoit qu'à Dieu. Hz s'en fouyrent de ce lieu,
Et laissèrent pain, vin et viande, Criant sainct Jean et sainct Mathieu, A qui ilz feroyent leur offrande. Noz escolliers, voyant cecy,
Non obstant leur habit de diable, Furent alors hors de soulcy,
Et s'assirent trestous à table
Et Dieu sçait si firent la galle
Entour le vin et le pasté,
Et repeurent, pour fin finalle, De ce qui estoit appresté.
C'est bien trompé, qui rien ne paye, Et qui peut vivre d'advantaige, Sans desbourser or ne monnoye, En usant de joyeux langaige.
Les escolliers, de bon couraige, Passèrent temps joyeusement,
Sans bailler ny argent ny gaige, Et si repeurent franchement.
Si vous vouliez suyvre l'escolle De ceulx qui vivent franchement, Lisez en cestuy prothocolle,
Et voyez la façon comment
Mettez-y vostre entendement
A faire comme ilz faisoyent,
Et, s'il n'y a empeschement,
Vous vivrez comme ilz vivoyent.
FIN DES REPEUES FRANCHES
ET DES POÉSIES attribuées A VILLON.
(Les chiffres renvoient aux pages du volume. V. signifie vers; Pr., Prompsault; P. L., M. Paul L. Jacob, bibliophile.)
P. t. Clément Marotaux Lecteurs. Cette préface, avec le huitain qui l'accompagne, est en tête de l'édition de Paris, Galiot du Pré, i 533, la première donnée par Marot.
P. 2, lig. 28. Toittesfoys. Marot dit clairement qu'il n'a pas consulté un seul manuscrit. Il n'a pas non plus eu sous les yeux toutes les éditions du XVe siècle.
P. 4, lig. 5. Après. Les vers que Marot dit avoir refaits sont au nombre de dix ou douze seulement, et, chose singulière, on les trouve tels quels dans les manuscrits et les anciennes éditions. (P. L.)
P. 7. Le Petit Testament. Ce titre, que Villon n'avait pas eu l'intention de donner à ses lays 'voy. p. 5o,v. n), se trouve en tête des plus anciennes éditions de ses oeuvres.
P. 8-9. Les huitains IV à IX ont été publiés pour la première fois par Prompsault, d'après un mss. La Monnoye ne les a pas connus.
P. 9, huitain IX. L'invocation par laquelle Villon commence son Testament n'est qu'une affaire de simple formule. Ce n'est pas là qu'il faut chercher la preuve de ses sentiments religieux. P. J4, huit. XXIII. Ce huitain, publié pour la première fois par Prompsault, se trouve en manuscrit dans l'exemplaire annoté de La Monnoye. P. 17-19. Les huitains XXXVI-XXXIX, publiés pour la première fois par M. Prompsault, n'étaient
NOTES.
pas connus de La Monnoye. C'est une satire du jargon scolastique du temps. Il n'est pas certain que Villon en soit l'auteur. J'ai conservé quelques-unes des corrections introduites dans ce texte par M. P. L.
P. 2.1. Le Grand Testament. Huit. I. En Van trentiesme de mon eage. On a conclu de ce vers que Villon n'avait pas trente ans accomplis en 1461. La mesure du vers ne lui permettait pas d'être plus exact; mais dans Je Débat du corps et du cœur (p. u3), fait dans la prison de Meung, il dit positivement « Tu as trente ans. » Il était donc réellement né en 143 1.
P. 22, huit. V. La leçon de l'édition Prompsault est meilleure que celle de La Monnoye. La voici
Si prieray pour lui de bon cueur,
Par l'ame du bon feu Cotard.
C'est-à-dire que Villon jure par l'âme de son procureur Cotard (voy. ce nom au Glossaire-index), de prier Dieu pour Thibault d'Aussigny. L i suite nous apprend ce qu'il entend par là. P. 37-38. On a cru que dans les huitains XLIII-XLV Villon parlait de lui-même; c'est évidemment une erreur. Pour le reconnaître, il suffit de se rappeler qu'il n'avait que trente ans, et n'était pas un « pauvre vieillart. »
P. 45, huit. LIV. Je n'ai pas adopté la- correction de La Monnoye, qui termine ainsi ce huitain
C'est pure verité decellêe
Pour une joye cent doulours.
P. 56. Les six premiers vers de l'Envoi donnent en acrostiche le nom de Villon, ainsi que M. Nagel l'a remarqué le premier. Il a découvert
aussi que le premier huitain de la Ballade de Villon à s'amye, p. 57, donne en acrostiche le nom de Françoys. Le second huitain donne Martheos, sans doute par l'effet du hasard.
P. 90. Lays. Publié pour la première fois par Prompsault. En manuscrit dans La Monnoye. Il en est de même du huitain CLIII, p. 91. P. gg. « Et je croy bien que pas n'en ment. » Le huitain qui commence par ce vers et le reste de la ballade ont été publiés pour la première fois par Prompsault. Ils existent en manuscrit dans La Monnoye.
P. tot. Poésies diverses. Le titre de plusieurs éditions annonce un Codicille, ce qui a préoccupé quelques éditeurs plus que de raison. L'édition de Pierre Levet, 1489, et une autre édition du XV'siècle (la troisième décrite par M. Brunet), disent ce qu'il faut entendre par là. Dans celle de Pierre Levet on lit Cy commence le grant Codicille et Testament de maistre François Villon, et dans l'autre Sensuit le grant Testament et Codicille de maistre Francois Villon. Le Codicille n'est donc autre chose que le Grand Testament, postérieur de cinq ans au Petit Testament.
Les poésies diverses ont été classées de différentes façons, selon le gré des éditeurs. J'ai cherché à les ranger chronologiquement. Le quatrain et l'épitaphe (p. 10 1), la Requeste au Parlement (p. io3), la Ballade de l'appel (p. 104), le Dit de la naissance Marie 'p. io5) et la Double ballade (p. 107) se rapportent au procès de 1457. Je parlerai des autres pièces plus tard.
P. io5. Le Dit de la naissance Marie. Cette pièce et les deux suivantes se trouvent dans un très-beau manuscrit des Poésies de Charles d'Orléans, conservé à la Bibliothèque impériale. Elles ont été publiées pour la première fois par M. Prompsault.
P. 107. Double ballade. Cette pièce, adressée
à Marie d'Orléans, fut composée longtemps après la précédente, et lorsque la princesse était déjà grande, et avait « port assuré, maintien rassis » (p. 109, v. 17).
P. 110. Ballade Villon. Cette pièce est incontestablement de Villon, dont elle porte le nom dans le manuscrit des poésies de Charles d'Orléans. Il n'est pas aussi certain que les deux autres pièces tirées du même manuscrit soient de lui, mais c'est on ne peut plus vraisemblable. Cette ballade fut composée sur un sujet donné par le duc d'Orléans. On trouve dans le manuscrit de ses poésies celles qui furent composées à la même occasion par onze autres poètes. P. in. Epistre. Cette pièce fut composée dans la prison de Meung. Elle a été publiée pour la première fois par Prompsault, mais elle existe en manuscrit, avec des variantes, dans La Monnoye.
P. 112. Le Débat du cueur et du corps. Composé dans la prison de Meung. Les précédents éditeurs n'ont pas remarqué que le nom de Villon se trouve en acrostiche dans les six vers qui, non compris le refrain, forment l'envoi.
P. 1 13. La Requeste à Monseigneur de Bourbon. Prompsault se trompe lorsqu'il dit que Marot a fait le titre de cette ballade. On le trouve dans les éditions du XVe siècle tel qu'il est reproduitici.
Le duc de Bourbon était Jean II, qui mourut en 1487 ce ne pouvait être Charles Ier, mort en décembre 1456, à l'époque précisément où Villon, peu connu comme poêle, se faisait fouetter publiquement.
P. 1 19. Ballade des povres housseurs. Cette pièce a éte tirée du Jardin de plaisance par Prômpsault. Il n'est pas bien prouvé qu'elle soit de Villon. On ne sait pas au juste ce que signifié ce mot housseurs. Cotgrave le traduit par balayeurs,
ramoneurs; M. P. L., par batteurs de tapis; Prompsault, par porteurs de housseaux ou de bottes;-M. Campeaux, par écoliers portent des housses, comme ceux du collège de Navarre. Son explication me paraît la meilleure, à moins que housseurs ne signifie faiseurs de houstaux. Il y a un rapprochement à faire entre cette supposition et, d'une part, les conjectures de M. Campeaux relativement à la profession du père de Villon; d'autre part, l'affirmation très-nette de la onzième des pièces attribuées à Villon, que je publie, p. 13g. « Mon père est cordouennier. » Malheureusement ce rondeau n'est pas plus certainement de Villon que la Ballade des povres housseurs.
P. no. Probleme ou Ballade, Publié pour la première fois par Prompsault. En manuscrit dans La Monnoye.
P. 1 2 1 Ballade contre les mesdisansde laFrattce. Prompsault a cru publier cette pièce pour la première fois; mais il en existe une édition en caractères gothiques, reproduite par M. A. de Montaiglon dans les Anciennes Poésies franroises, t. V, p. 32o, qui m'a fourni de bonnes variantes. La Monnoye la connaissait. Elle existe en manuscrit dans son exemplaire annoté, avec le titre qu'elle porte ici.
P. 124. Le Jargon ou Jobelin. Tous les éditeurs de Villon ont reculé devant l'explication de ces ballades en argot. Je suis leur exemple; mais cela ne doit.pas décourager ceux qui voudraient tenter l'entreprise. En recueillant avec soin toutes les variantes des anciennes éditions, en rapprochant les ballades de Villon des monuments assez nombreux de ce langage qui nous restent du XV. siècle et du commencement du XVIe, on arriverait probablement à quelque chose de satisfaisant.
P. 1 33. Poésies attribuées à Villon. J'ai choisi
ce titre à cause de son élasticité. Je ne suis pas convaincu que ces pièces soient de notre poëte; mais je n'ai pas voulu, en les donnant comme émanant de ses disciples, lui faire tort de celles qui peuvent lui appartenir.
P. i33-i43. Dix-sept pièces choisies parmi celles que M. Campeaux a tirées du Jardin de plaisance. On ne peut lire son travail sans être tenté d'admettre que plusieurs de ces pièces sont réellement de Villon.
P. 144-146. Les ballades XVIII, XIX et XX ont été réunies pour la première fois aux œuvres de Villon dans l'édition de 1723. Je ne crois pas qu'elles soient de lui.
P. 147. Ballade joyeuse des taverniers. Cette pièce se trouve dans toutes les éditions de la Chasse et le Départ d'Amours, d'Octavien de Saint-Gelais, dont la première est de 1509. Je dois cette indication à mon ami M. Louis Moland. P. i5o. Monologue du franc archier de Baignollet. Réuni pour la première fois aux œuvres de Villon en i532, dans une édition de Galiot du Pré. Il existe de ce monologue une édition gothique, format d'agenda, qui a été reproduite dans l'Ancien théâtre français, t. II, p. 326. J'en ai tiré quelques variantes.
P. 164. Dialogue de messieurs de Mallepaye et de Baillevent. De même que le Monologue du franc archer, cette pièce fut réunie pour la première fois aux œuvres de Villon dans l'édition de Galiot du Pré, t53z. Elle est écrite, comme l'a remarqué le premier M. A. de Montaiglon, « en strophes de six vers sur deux rimes, qui s'enchaînent de telle façon que la rime placée dans une strophe au troisième et au sixième vers se répète, dans la strophe suivante, aux quatre autres vers, c'est-à-dire au premier, au second, au quatrième et au cinquième. » Je l'ai divisée selon ces
indications, et l'on conviendra qu'elle y a beaucoup gagné.
Deux strophes sont incomplètes, l'une d'un vers, p. 172, et l'autre de deux, p. 177. P. 178. Les Repeues franches. Ce recueil fut imprimé plusieurs fois dans le XVe siècle et la première moitié du XVIe. Il n'est pas de Villon mais le poète y joue un tel rôle qu'on ne peut se dispenser de le joindre à ses œuvres, ce qu'on fait, du reste, depuis plus de trois cents ans. Il est écrit presque tout entier en strophes de huit vers, ce que les précédents éditeurs n'avaient pas assez remarqué, comme l'a dit M. A. de Montaiglon. Il y a vers la fin quelques strophes que je n'ai pu compléter, bien que j'aie consulté plusieurs éditions anciennes, y compris celle de Jean Trepperel, que je crois la première.
P. 187. La Manière d'avoir du poisson. Le moyen employé par Villon pour se débarrasser du porte-pannier rappelle le fabliau des Trois Avugles de Compiengne, par Cortebarbe. Voir aussi les Aventuresde Til Ulespiègle, chsip.LXXl (Nouvelle collection Jannet); Morlini, nouv. XIII; les Facétieuses Nuitç de Straparole, édition Jan.net, Paris, 1857, t. ï«, p. liv.
P. 190. La Manière d'avoir des trippes. Voir un expédient analogue dans les Aventures de Til Ulespiègle, édition citée, chap. LXXII. P. 191. La Manière d'avoir- du pain. Imité par l'auteur des Aventures de Til Ulespiègle, chap. VI.
P. 192. La Manière d'avoir du vin. Se retrouve dans Til Ulespiègle, chap. LVII. P. 206. La Repeue franche du Souffreteux. Imité par l'auteur de Til Ulespiègle, chap. LXI, et par Bonaventure Des Périers. Voy. l'édition de M. Louis Lacour, i856. In-16, p. 12a.
GLOSSAIRE-INDEX.
A
A, avec. P. 34, v. 18; p. 1 $8, v. 12.
A coup, vite, toutdesuite. A tout, avec.
Abandonné, libéral, prodigue. 172.
Abayer, aboyer.
Aboluz, abolis,absous. j. f. Aboy (en), aux abois, abaissé.
« Trois poulx rampans en aboy », c'est-à-dire des cendant le long de la che- mise,telles sont les armoiries que le seigneur de Mallepaye assigne à son ami j Baillevent, P. 16S.
ABSALON, 121, 122.
Absoluz, absolz, absous. Abusion, peine inutile, fait de quelqu'un qui s'a- buse. (P. JS, v. 2.)
Acabit, accident (?). 175. S Accollée, acol'Je, accolade. Accouter, appuyer, acco- jter. 47, 136.
Acherin, acéré, d'acier.
Achoison, achoyson, occasion, feinte, ruse.
Acongnoistre, connaître.
195.
A cqueillir, tenu. 14 j.
Acquester, acquérir.
Acreuz, acquis, augmentés. 165.
Acteur (V), l'auteur. 182. Adextre, adroit, habile.
Adirer, absenter, suppriment} $.
Admenez (en) (?), P. 38, v. 25.
Adonc, adoncques, alors. Advantaige, voy. avantaige.
Affier, assurer, certifie!. Affiques, affiquets. 185. Affoler, blesser, ijî. Affuyt, suit.
Aguet (aller d'), marcher avec précaution et-sans bruit, c'est ce que faisaient sans doute les soldats de police à pied dont parle Villon,p. 13, v. 21.
néoà Louis le Jeune, roi de France, et morte en 12 [6. (Pr.)
Alour (s'), s'attacher, se dévouer. 108.
Alphasar, p. m, Arphaxad, roi des Mèdes. Alphonse, le roy d'Aragon. Alphonse V, dit le Sage, mort en t4S8.
Amant, 1 6;, amendement.. Amathiste, améthiste. 55. Ambagoys, ambages, finesses. 192.
Ambesas, doubleas. P. 48. Ameçons, hameçons. Employé au figuré, p. i8;. Amiral(I'), p. 152. M. P. L. suppose que c'est Prégent, seigneur de Coetivy et de Retz, crééamiral en 1439, et tué en 1410, au siège de Cherbourg.
AMMON, fils de David. Plaisant récit de son amour pour sa sœur Thamar. (P. 46, v. ij.)
Amoureux, agréable, bon. 195, v. 1.
Amys, amicts. 56.
Ance, anse. 15. f.
Ancenys, 1 î 1.
Ançoys, avant.
Ancre, encre.
Andoilles, andouilles. 64. Ange, Angelot !p. 70J, étaient des monnaies d'or. Deux angelots valaient un grandange. Villon veut que le jeune merle agisse consciencieusement, ce qui n'était sans doute pas dans ses liabitudes. (Pr.)
Aherdre, p. 52, se trouve dans Cotgrave avec le sens de toucher, prendre.
A honti, déshonore, couvert de honte. 142.
Aid, aide, assiste « Ainsi m'aid Dieux » P. 26, v. 6. Aignel, agneau. 107.
Ainçoys, avant.
Ains, avant.
Aist, aide. « Ainsi m'aist Dieux! » 107.
Aiz, planche. 84.
alençon. iji. Cette ville fut prise et reprise plusieurs fois par les Anglais et les Français pendant les guerres du XVe siècle. C'est en 1448 que Charles VII l'assié- gea pour la dernière fois; il s'en empara, ainsi que de toutes les autres places fortes de la Normandie. (P. L.) Le bon feu duc d'Alençon dont parle Villon (p. 56) serait, selon M. Pr., Jean I", tué à la bataille d'Azincourt, en 141s.
ALEXANDRE, p. 26. Cette anecdote d'Alexandre et du pirate Diomédès est, suivant Fotraey, rapportée par Cicéron, dans un fragment du traité De Republica, liv. III, que nous a conservé Nonius Marcellus. Le nom du pirare ne s'y trouve pas. Voy.
m.
80. Alleiianses, allemandes,
80.
Alleure (bonne), promptement.
Allys (p. 34, v. 19I, Alix de Champagne, manee en
Angelot l'herbier (l'her- C boriste, 8j. le ANGIERS, 9. Le Lyon d'An-
giers (153) était sans doute l'enseigne d'une hôtellerie. ANGLAIS, p. 151. 1. ANGLESCHES, anglaises,
p.8i,v. 5. Angoisseux, plein d'an- t( goisse.
ANGOULEVENT, p. 176. l' Un Prince des Sots nommé 1 Angoulevent vivait à la fin v du XVIe siècle et se fit connaître par un procès qu'il soutint pour défendre les priviléges de sa principauté. Mais ce passage prouve que le nom d'Angoulevent était 1 générique parmi les gueux et les aventuriers dès le XVe t siècle. (P. L.) c Anjou, 157. r Antan, l'an passé. f Ante, tante. 82.
Apasteler, nourrir. ( Apostoles, pape (p. 3e), et, 1 par extension évêque et peut-être prêtre. Appaillardir, appauvrir,
mettre sur la paille 172. i t Appeau, appel. 197.
Appoinct, à point. 7;. Appointé, convenu. Appoinctement, accord. <
Aprins, appris.
Arain, airain, cuivre. 48
Arbrynceaux, arbrisseaux.
Archipiada, 34, vraisem-
blablement Archippa, l'amante de Sophocle. Pr.)
ARCHITRICLIN (p. 69). Le
maître d'hôtel des noces de
:ana, qui conseilla de boire e bon vin le premier.
Ardiz, brûlai. m,v. 2.
Ardre, brûler.
Argeutis, arguties. 18.
Aristote, 18, 25.
Armarie (montrer l'), p. 146, paraître armé dans un ournoi. (P. L )
Arquemie, alchimie. « Faire 'arquemie aux dens » (p. 182 et 186), c'est vivre de rent, n'avoir rien à manger. Arraisonner, interroger.
Arrons, aurons.
Ars, brûlé. 17.
Arsure. brûlure. 76.
Art de la pinse et du croc, l'art des voleurs. P. 2.
Art de mémoire, t Probablement l'Ars memorativa, ouvrage didactique souvent réimprimé au XVe s. avec des figures singulières. (P. L.) ARTUS, le ducdeBretaigne (p. 55, y. 10) est Artus III, le Justicier, mort en 1458. Asçawir mon, c'est à savoir.
ASNE ROUGE, 60. Est-ce une enseigne?
Assier, acier. 9.
Assouvir, calmer, satisfaire, accomplir. 29, 89, 90, 94, no.
Atout, avec.
Attaine, m. Atteigne, blesse. (P. L.)
Attaintée, 78, bien parée vPr.),- fardée (P. L.).
Attendue, attente, retard.
Attente, intention. 49.
Aubade, peur. 199-
Aucun, aucune, quelque. 30, 120. I.
Aucunement, en quelque façon.
Auditeux, auditeurs.
Auger LE DANOIS, 91.
Aulmoire, armoire.
AULNIS (vin d'i, 60.
Aussicm(Thibaultd'), 2 1. AUVERGNE (p. 36).. Le dernier Dauphin de la branche héréditaire fut Beraud m, qui mourut en 1428. (P. L.) Avaller, descendre, précipiter en bas.
Avantage (vivre rf'), vivre aux dépens d'autrui. 206, 208, etc.
Avenir, advenir.
AVERROYS, Averrhoès. 2j. Avoyé, en voie, bien venu. 196.
Ayier (s*), se mettre à son aise, se servir librement, P. 78, v. 21.
B
Babyloinb, Babylone. 79. Bathelette, jeune fille. 47. Bachelier, jeune galant, amoureux. 47.
Bague, bagage, arme.
Baigneux, 19;
Baignolet, 150.
Bailler, donner.
BAILLY, ( 3.
Bandon (d), à l'abandon. Barat, tromperie. Barbiers, étaient les chi- rurgiens du temps. 77.
Barguigner, marchander, 1 hésiter.
Barre (p 6î), pièce du bla-
SDn qui indique la bâtardise. Au lieu de cela, Villon donne au bâtard de La Barre trois dés pipés pour mettre dans son écusson.
BASANYER, 74.
Bas mestier, acte amoureux.
Baston, 156. Nom des
armes portatives en général. On a dit plus tard « baston à feu ».
Batture, action de battre. 7'» "J.
BAULDE [frire). 67.
Baulde, réjouie. 67.
Bauldray, donnerai.
Bave, bavardage. 180.
Baver, bavarder.
Baverie, bavardage, vaines promesses.
Baye, ouverte. 16$.
Beaulnb. 193, 207.
Beffray, beffroi.
Béguines, 66.
Béjaulne, niais. 193.
Belin, mouton. 70.
BELLEFAYE (Martin), p.
96, à qui Villon donne le titre de lieutenant criminel, était conseiller au Parlement de Paris.
Bellst, 118.
Benoist, béni.
Benoistier, bénitier.
Bergeronnette, chanson rustique. 91.
Berlan, brelan. 87.
BERTHE au grand pied (p. 34, v. 19) fut mère de Charlemagne.
Besongner, travailler. 1 18.
Besongnettes, affaires d'a-
mour.
Betourner, dompter, abat-
tre. 108.
Bière (en), mort, enseveli.
Bietris (p. J4, v. 19),
Béatrix de Provence, mariée à Charles de France, fils de Louis VIII. (Pr.)
BlETRIX, t 18.
Billart, bâton recourbé
avec lequel on jouait à la crosse.
BILLY (la tour de), 73.
Bisagüe, besaiguë.
Bise, brune. 79.
Blanc, ij, 48, monnaie d'argent qui, du temps de Villon, valait douze deniers. 1 BLANCHE. Prompsault dit
que la reine Blanche dont il est question p. 54, v. 17, était Blanche de Bourbon, mariée en 1352 à Pierre le Cruel. M. P. L. pense qu'il s'agit plutôt de Blanche de Castille, mère de saint Louis. BLANCHE LA SAVETIÈRE,
42.
Blason, conversation, beau parler. 189, 196.
Blasonner, vanter, bavar-
der, se moquer. 201, 206. Bloquer, donner de l'ar-
gent. 17s.
Boesmes, p. 118. « La
faute des Boesmes », c'était l'hérésie des Bohémiens, sectateurs de Jean Hus et de Jérôme de Prague.
Boillon, y, (4- Le bouton
ou bouillon est l'endroit de la rivière où l'eau forme un tournant. On ditencore, dans
le langage trivial, boire un bouillon, c'est à dire courir le risque d'être englouti dans une mauvaise affaire. (P. L.)
Boiture, boisson J2.
Bonne. « Cy suspendy et
cymisbonne»,p.i7.Prompsauit interprète bonne par borne. M P. Lacroix suppose que cette expression équivaut à mettre en panne.
Bonne alleure, prompte-
ment.
Bordeaulx, lieux de prostitution. 77.
Bort, bordure. 136.
Bouffé, soufflé, emporté
par un souffle. (P. 36, v. 19.) Bouges, chausses, cu-
lottes.
Bouhourder, lutter à armes
courtoises. 119.
Boullon, bouillon, tourbillon.
Boulluz, bouillis. 56.
BOULOGNE, 9.
BOURBON. Le gracieux duc de Bourbon (p. 35 V. 9) est Jean Ier, mort en 14 j6. Voy. p. u i, et notes, p. 223.
Bourde, mensonge. III.
Bourder, mentir.
BOURG-LA-ROYNE, 6j-
BOURGES, 68, 76.
Bourguignon {Pierre), 60.
BOURGUYGNONS. 17I.
Bourreletz, sorte de coif-
fure. 3 3.
Bourse. «Les bourses des
dix-et-huit clers » ïp. 72). Le collége des Dix-huit, où l'on recevait les étudiants tiop pauvres pour pourvoir à leurs
besoins, {tait situé, suivant M. P. L devant le collége de Clugny, sur l'emplacement actuel de l'église de la Sorbonne.
Bouter, mettre. 146, 148,
193. frapper, pousser. léi. Bouter soubz le nez, p. )7, manger et boire.
Boyser, travailler le bois.
64.
Bracquemart, épée courte etlarge.
Braire, crier. 198.
Brairie, cris. i;2.
Branc, sorte d'épée.
Brayes,chausses, culottes.
Brelare Bigod fp 82),
sorte de juron en allemand corrompu: Vertoren,beyGott! BRESsoiRE.Bressuire. 1(2.
Britaigne, £2.
BRETONS, IS)> 1(4, 1)7. j
Brettes, Bretonnes. 80.
Brief, brièvement. 19e.
Broiller, p. 87 M. P. L.
dit que cela signifiait jouer des imbroglios, des scènes comiques.
Broillerie, désordre.
Brosses, brossillons, broussailles. 99.
Brouaille, 148, me paraît synonyme de brodier, broudier, anus.
Brouillez, en désordre, em-
breuillés. 2
Broust, nourriture, subsis-
tance. 174.
Brouter, manger. 6}.
Broyer à moustarde, mor-
tier. 17.
Brucibnnbs, Prussiennes. «0.
Brunsau (Pktlip), 97.
Bruire, faire du bruit.
Bruit, bruyt, renommée, réputation 9, 176.
Bruyères (M"c de), 79
Bueil, p. 1(2 Selon M. P. L., c'est Jean de Beuil, comte de Sancerre, qui succéda comme amiral à Prégent de Coëtivy.
Bufe, soufflet. 194.
Bulle (Carmelhte), 10 Voy. DÉCRET. Les porteurs de bulles (p. 87) étaient des ecclésiastiques ou des officiers du Saint-Siège, qui venaient quêter et vendre des indulgences au nom du pape dans les pays catholiques. Mais ils ne pouvaient plus être admis en France sans un ordre du roi; les priviléges de l'Église gallicane ou de la Pragma tique-Sanction s'opposaient à ces collectes papales, qui avaient tant appauvri la chrétienté au moyen âge. (P. L.) Bureaux, vêtements de bure. 12.
BURIDAN, ;4. C'était une tradition bien établie parmi les écoliers de l'Université de Paris, qu'une reine de France avoitfaitde la Tour de Nesle, située au bas de la Seine, sur l'emplacement du palais de l'Institut, le théâtre de ses débauches nocturnes. Elle attirait chez elle tous les passants, et surtout les écoliers, qui lui plaisaient; puis, son caprice satisfait, elle les faisait tuer et jeter dans la rivière. Buridan eut le bon-
heur d'échapper à la mort, et il inventa ce fameux sophisme, qui devait être sa vengeance et sa justification « Il est permis de tuer une reine si c'est nécessaire. » Villon est le plus ancien auteur qui ait parlé de cette tradition. Gaguin, dans son Compendium des Annales de France, l'a rapportée ensuite avec plus de détail. Quoi qu'il en soit, les trois brus de Philippe le Bel furent accusées d'adultère, et l'une d'elles, Marguerite de Bourgogne, femme de Louis le Hutin, fut étranglée dans sa prison, en i j 14, par ordre du roi. Quant à Buridan, il devint un des plus célèbres professeurs de l'Université de Paris, et fut exilé de France comme disciple d'Ockan. Il se retira en Autriche, où il continua de professer la philosophie nominaliste. (P. L.)
Butor, p. 122. Espèce de héron, oiseau aquatique On croyait au moyen âge qu'il restait enfoui dans la vase, au fond de l'eau, durant l'hiver. (P. L.)
c
Caquctoerts, caqueteuses, bavardes. 80.
Cadis, juge, cadi. 26.
Caige-vert, 67. Pr. suppose que c'était un nom donné aux filles publiques M. P. L. rappelle, à l'appui de cette
opinion, qu'une célèbre maison de débauche, à.Toulouse, était appeléeChâtel-vert.
Calixte (le tiers), ;j.
Calixte III, élu pape le 8 avril i4( s, siégea trois ans et quatre mois. (Pr.)
Callaisiennbs, 81.
Canceler, 9;. Barrer, an-
nuler. (Pr ). Authentiquer, légaliser. (P. L.)
Canettes, canes. Ferrer les
oies et les canes (p. 92) est quelque chose comme « mener les poules pisser. »
Capitaine du Pont à Billon,
179. Les crocheteurs, gueux etmendiantsquise mettaient sur le pont au Change, le nommaient alors le pont à Billon. (Pr.)
Cappel, chapeau. 10;.
CARDON [Jacques), 91.
Carmes, 17 s.
CARMES [l'hostel des), 67.
Carre, dimension. « Trois
detz plombez de bonne carre.» (P. 63, v. 27.)
Cartaige, Carthage, 1 20.
CARTES à jouer, &
CASSANDRE, 1 10.
CASTELLANBS, Castillanes,
80.
Caton, 109.
Caut, habile, prudent. 172.
Caver, creuser. 102.
Caymant, mendiant. 60.
Céans, ici dedans.
Ceau, seau. 15. S.
Cecille, Sicile. 74.
Ceincture, virginité. 6S.
CSLESTINS, 30, 82, 98.
Celle, cette. 104.
Cendal, 68. Etoffe de soie
orientale, ordinairement rouge. (P. L.)
Ceps, 13. Fers qu'on mettait aux pieds des prisonniers. CERBERUS, Cerbère, le chien qui garde la porte des enfers. 46.
Cervoise, 48.
César {Jules), 120.
Chaille (ne leur), qu'ils ne s'en inquiètent pas. P. 73. Chambres, privés. 104.
CHAMBRE AUX DRNIERS, 89. CHAMP -Tourcé 151. I. Chantocé ou Champtocé village du département de Maine-et-Loire.
Chandeaux, vers louangeurs (>). uz.
CHANGON, yoy. moutonnier.
Chapeau de laurier, couronne. 2
CHAPPELAIN {le), p. 93, était quelque ami de Villon qui portait ce surnom. Vil- lon lui lègue sa chapelle à simple tonsure (p 9 3 v 2 ) ). Le bénéfice à simple tonsure, selon Pr., était destiné à des clercs étudiants, et n'exigeait pas beaucoup d'instruction.
Chappin, savate (?). £1. Charlemagne, 35.
CHARLES {le grand), Charlemagne. 24.
CHARLES VII, roi de France, mort en 1461, pendant le séjour de Villon dans la prison de Meung, p. 35. CHARRUAU(Gul7/flUm€),6l. CHARTIER (Alain), 91.
CHARTREUX, 31, 82, 98. Chascun Poicdenaire, 171. f. Personnification de tous ceux qui n'ont pas d'argent.
Chastoy, correction, châtiment. 8j, 142.
Chat «quihayt pescher», qui a horreur de l'eau. P. 76. Chault (il ne m'en), je m'en moque. 56, 157.
Chef, tête. 94.
Chenu, vieux, blanchi par l'âge. 40.
Cheoir, tomber. 1 1 1
Chère, chilre, mine, visage. Chère lye, 187, mine joyeuse. Chère marrie, 194, air de mauvaise humeur. Chère meilée, 169, visage renfrogné. Chère rebourse, mine refrognée.
Cherme, charme, 58.
Chet, tombe. 117.
Cheu, tombé.
CHEVAL BLANC, enseigne(?),6o.
CHEVALIER DU GUET. 92. Chevance, avoir, argent, capital. 28, 89.
Chevaulcher, faire l'acte amoureux. 16.
Ckevaucheur, celui qui va à cheval. 47.
Chevir, venir à bout, se tirer d'affaire. 184.
Chière, voy. Chère.
Chiet, tombe.
CHOLLET, 64.
Chosettes, petites choses, caresses amoureuses.
Chypre. Le roi de Chypre mentionné p. 36, v. 17, serait, selon Le Duchat, Pierre de Lusignan, qui vivait dans
le XIVe siècle. Pr. croit qu'il s'agit plutôt de Guy de Lusignan, mort en 1 194.
Cil, celui, 95, m. t.
Clamer, appeler, crier. 102. Claqdent, 176. Pays des gueux, à qui le froid fait claquer les dents. Plus tard on y fit voyager les malades qu'on traitait par le mercure. Leur itinéraire obligé était par Surie, Bavière et Claquedent.
Claquin, le bon Breton (p. ;6),Bertrand Du Guesclin, mort en 1380.
Clercs clers savants, hommes instruits. 71, 120. écoliers, étudiants, 15, f, 86; garçons de divers métiers. Les clers Eolus i p. 123, sont les vents. Les garçons d'hôtellerie sont ap- pelés clercs, p. 207. Quand on dit de nos jours un clerc de perruquier, par exemple, on fait une plaisanterie qui n'est pas nouvelle.
Cler, clair, pur. 56, 106. Clergeon, écolier, petit clerc d'homme de loi. 11, 71-
Cliquepatins, 98, traînesavates. (Le Duchat.)
Clorre, clore, fermer.
CLOTAIRE, ioj.
Clovis, 106.
Coettes lits de plume e (p. 64). Ce mot paraît être employé ici dans un autre sens.
Coing, le coin qui sert à battre monnaie. 8.
Cointe, jolie, gentille. 147. COLIN du CAYEULX, 86, COLIN GALERNE, 8(.
Collatérales (espèces), [8. Termes d'école, qui signifient les facultés dépendantes de la mémoire. (P. L.) Colombel, 96.
Com, comme.
Combien que, bien que, quoique.
Combraye (le seigneur de). 199.
Commander, recommander. 163.
Commens, Commentaires.
25.
Compaings, compagnons. Compasser (?).:i7i. [.
Complaindre (se), se plaindre, se lamenter. 120, 140. Conclure, vaincre dans la dispute, mettre à bout d'arguments. 81, v. 2.
Congnoistre (soy), se reconnaître 160.
Conjoindre, réunir. 64. Conseiller, agir avec prudence. P. 7, v. 5.
CONSTANTINOBLES. L'empereur de Constantinople, aux poings dorez, dont parle Villon (p. 36, v. 22), serait, selon M. Pr., l'empereur Basile, souverain très-libéral. Conte, comte. 13). 5.
Contemplation, employé dans un sens équivoque. 66. Contendre, disputer. 78. Contraict, déformé, recourbé, contracté. 41.
Contregarder garder. 203. Contrepoint (entendre le), être habile. 196.
Convenir, falloir. ;8, t8j. Convent, couvent. 37.
Convoyer, convier. 197. Coquart, coq. 49.
Corbillon, panier. 113. CORDELIERS, 17 J, J 79.
Cordoen, cuit. 23, '139. Cordouennkr, ouvrier en cuir, cordonnier.
CORNU (Jean), 59.
COTARD (Jehan), 11, 68. Le procureur en cour d'Église qui défendit Villon lors de son premier procès, en 14 $6. Cottiret, cotret. 207.
Coucher, mettre au jeu. « Qui pour si peu couche tel gage. » P. S6.
Couillart, coulart, canon à main, long et mince. Employé dans un sens équivoque. 1 s J
Coullon, p. 99, rime avec vermillon, carillon, Villon, ce qui donne assez clairement le sens du mot et la façon dont se prononçait le nom du poète.
Courage, cœur. P. 107, v. t8.
COURAULT (Jehan), 77. Courrt, courir. P. 6}.
Coursé, fâché, courroucé. J7, IJI.
Courtault, 1(4. Canon portatif. Employé dans un sens équivoque.
Courtissain courtisan. >7Î-
Coustelez, 171. M. P. L. traduit ce mot par armés. Coute, coude. 1 jj. 5.
Coutel, couteau.
CRAON, IJJ.
Créance, croyance, opinion. 114.
Crepelle, coupelle. «Argent de crepelle » (p. 48), ̃ argent épuré.
Crète, 46.
Creu, grandi, accru. 70. Croire, faire crédit, prendre à crédit, parfois en donnant un gage. P. 1(9, v. 26-27.
Croix,argent.Ce que Villon appelle irrévérencieusement la vraie croix (p. 1 1 j-i 1 6), c'était la marque empreinte sur la plupart des monnaies du temp*, et qui a été depuis remplacée par l'effigie du prince. Pile désignait le revers. On joue encore à pile ou face. « Sans croix ne pile » sans argent.
Croppetons (à), accroupi. 41.
Crosse (la), 1 M. Prompsault croit qu'il s'agit d'une potence.
Croites, croûtes. 98.
Cry, 168, cri d'armes.
Cueur [Jacques), 32.
Cuider, croire.
CULDOU (Michault), 71. Curatez, curés. t8o.
Cure, soin, souci.
Cures, 1 j 2.
Cuvedulx, cuviers, baquets. 77.
Cuyder, croire.
Cuyderaulx d'amours, 98, jeunes vaniteux, selon Pr.; M. P. L. rapproche de cette locution celle de « cuydeurs de vendanges », employée par Rabelais [Gargantua, ch.i $).
Cy, ici.
Cy pris, cy mis, donnant, donnant. 191.
Cymballer, jouer des cymbales. 87.
D
Damoiselin, de damoiseau. Danger 119. « A danger emprunter argent », c'était, si je ne me trompe, emprunter à dix pour cent.
Dangier, danger, péril. 8. DAUPHIN (le), 24. Joachim de France, fils de Louis XI et de Charlotte de Savoie, sa seconde femme, mourut en bas âge.
DAULPHIN de vienne et de Grenobles (p. 37). Le Dauphin de viennois résidait à Grenoble. (Pr.)
David (p. 46, v. 11). Jolie allusion à son amour pour Bethsabée.
Dca exclamation Dame Débouté, rebuté. 110.
Debteur, débiteur. 96. Villon, comme on le fait encore souvent, emploie ce mot dans le sens de créancier.
Debuer, laver, lessiver. 102.
Déchassé, banni, chassé, 10.
DÉCRET Omnis utriusque sexus, 10. Ce décret a été porté par le quatrième concile de Latran,tenuen 121;. ç. 11 ordonne à tous les chrétiens de l'un et de l'autre sexe deconfesser leurs péchés
à leur propre pasteur, au moins une fois l'an. En 1489, les religieux mendiants obtinrent de Nicolas V une bulle datée de Pise, 2 octobre, qui leur donnait le pouvoir de confesser, au préjudice des droits des curés, établis par le canon que nous venons de citer. L'Université se leva contre, tint plusieurs assemblées, dans l'une desquelles les Mendiants furent exclus de son sein. Les évèques de France se joignirent à elle. Des députés furent envoyés à Rome, et en rapportèrent une bulle de Calixte 1 1 1 qui révoquait celle de Nicolas V. Cette affaire était à peine terminée, ou même ne l'était pas encore, quand Villon composait son Petit Testament. Témoin du zèle chaleureux des curés de Paris, il leur légue le canon Omnis pour le remettre en vigueur. (Pr.)
Dedalus, Dédale. Sa court » (p. \22, v. 7) était son célèbre labyrinthe, où ilfut enfermé lui-même. Dedans, d'ici à. « Dedans ces Pasques. » (P. 12, V. 4.)
Dédié, consacré. a Et à bonnes mœurs dédié » (p. 29, v. s)-
Deffaçon, ruine, destruction. 8, 58.
Deffuyr, éviter, négliger. 84.
Dejeter, retirer. S4.
Delivre, quitte, libéré. 181. t
Demener, mener, faire, gouverner, 32, 83, 109. Demonstrance, démonstration. 186.
Demourant (le), le reste. Demourée, retard, séjour. 191.
Demourra, restera. 32.
Demourroit, resterait. 121. Demy-ctinct,f.ii «Ceinture d'argent avec des pendants auxquels on attachait la bourse, les clefs, etc. » (P. L.)
De par, au nom de. 9. Départir, départ. P. 100, v. 8.
Departir, partir, se séparer. 9, M2> "?6, 204, 20 5.
Departir, donner en partie, accorder une part. 9, v. 3. Deporter (se), cesser, renoncer. 109.
Desbriser, maltraiter, martyriser. 7.
Deschaulx, nu-pieds. P. 92 Desclos, ouvert.
Desconfire, ruiner, détruire. 103, 106.
Descrier, décrier, 4 2 est dit des monnaies dont on interdisait la circulation par un cri public.
Descrire, écrire, rapporter. 146.
Deshait, 83, dispute, désappointement.
Desmarcher, reculer. 1 s 8. Desnué, dépouillé. 14, 208. Despartir {se), se séparer.
44.
Despendre, dépenser.
Despendu, dépensé. 28. Desperance,Aésesf oii. 122.
Despiter, défier. 48.
Despiteux, querelleur, hargneux. 31. 1.
Despourveu dépourvu.
14.
Desprins, dépourvu. ij. Despriser, déprécier. 1 1 6. Desplaisance, déplaisir.
Desroquer, 175, pour dérocher, terme de fauconnerie, qui signifie forcer la bête. (P-L.)
Dessaisiner {se), se dessaisir. 72.
Dessiré, déchiré. [48.
Destaindre, éteindre. 167. Destourbier, trouble, embarras. 16.
Destre, droit. 198.
DesveiUc, réveillé, ravivé. 18.
Desvier, dévier. 91.
Desvoyé, t SG, égaré, écarté de votre bannière. :P. L.) Detrayner, maltraiter. 40. Détrenché, coupé, haché. 143.
Detterrer (se), perdre ses terres. 185.
Detz, doigts. 26.
Detz, dés. 63. J.
Deul, chagrin, deuil. 108. Deul (jeme), je me plains. 8.
Devaller, descendre 1 8 ( Devant, ci-devant. P. 7, v. 9.
Dater, sortir de sa voie, mourir. 59, 110.
Dextre, droit, droite.
Dtoo, Didon. 86, iro. Die, dise. 103.
Diffame, déshonneur. 44, 8û.
Diffinir, définir, expliquer. 93-
Dijon, 37.
Dilution, retardjdélai. 179. Diomedès, 26
Discordez, désunis. 106. Ditz, propos, discours. 43. Diviser, causer, parler. 169.
Drx kt huict (les), 72, voy. Bourse.
Doint, donne.
Doller, travailler de la doloire. 64.
Doncques, donc.
D'ond, d'où. 114, i;6.
DONNAIT (70). On appelait Donat, ou Donet, la grammaire d'/Elius Donatus, intitulée De octo partibus orationis, laquelle était en usage dans toutes les universités de l'Europe, et surtout dans celles de France. (P. L.) DOUAY, 22.
Doubtance, doute. 201. 1. Double, supposition, crainte. 43, 204-
Doubter, craindre, redouter. 97.
Doukhe, douce. 134.
Doulouser (se), se plaindre, se lamenter. 32, 140. Douver, faire des douves. 64.
Douzain, petite monnaie. ̃73-
DouzE (sergent des), 62. Douze sergents étaient particulièrement attachés au prévôt de Paris et lui tenaient lieu de garde. (Pr.)
Doye, doive. 141. [
Drapel, linge. 104.
Drapelle, linge, habits. 48. Drapilles, linge, hardes. 88.
Du Boys. 64.
Du Ru (Guillaume). 97. Du tout, entièrement, complètement. 16, 21. 1.
E
ECHO, nymphe, 34, no. Edit, adresse, invention. 192.
Effimère, éphémère, s 3, Efforcer, contraindre. 104. Effrayé, 156, effarouché, avec un air menaçant. (Pr.) Egipte, Egypte. 120.
EGYPTIENNE (!'), Ste Marie l'Egyptienne. S 5.
El, elle. 9, 84.
Embattre (s'), s'abattre. 75.
Embesongnè, occupé, affairé. 204.
Embler, voler. 159, 161. Se dérober, 211.
Embroché (vin), mis en perce. ;o.
Emmy, au milieu de.
Empescher, 71, occuper, embarrasser.
Emperier, empereur. 36. Emperière impératrice souveraine. SS.
Empire (ciel), l'empyrée. 103.
Emprès, auprès de.
Emprise, entreprise.
£/!di<înttr,ensorceler. 117. Encliner (s'), avoir de l'inclination. 72.
Enclos, enfermé. îoé.
Encombrement, tristesse, ennuis. [44.
ENFANS pbrduz 8{, 86. Jeunes compagnons de VUlon.
Enfans-trouvsz, 85.
Enfermes, infirmes. 91. Enfondu, 16. Creux et décharnez, dit Marot. Ne pouvant se soutenir. (Pr.) Engigner, tromper. 68. Engin esprit, intellect. 196. Invention, tour d'adresse. 171.
Engrillonni, attaché avec des menottes. 26.
Enhort, exhortation. 2;. Enhorter, exhorter.
Enmouflé, chaussé de moufles ou pantoufles, selon Pr. et M. P. L. Je croirais que cela signifie plutôt emmitouflé.
Enni ip. 8z), sortedejuron, parent de enda, parmanenda (par mon âme).
Ennuyt, aujourd'hui, ce soir. 193,204.
Enquerir, rechercher. 35. 5. Enserré, enfermé. i{.
Ensupre, suivre, imiter. 2. Entandiz, pendant ce temps. 1 12, 121.
Entendre, connaître, savoir « J'entends que ma mère mourra.» P. 52, v. 2 j. ) Entente, intention, projet. 49.
Entour, autour de.
Entrepreneur, survenant qui se mêle des affaires de quelqu'un, qui l'entreprend. >9-|.
Entr'ail, espace entre les deux yeux. 40.
Enters,i Penvers.renyersé. m, v. 5.
Envys, malgré soi. 70.
Eolus, 12;. Les u clerc Eolus » sont les sujets de ce dieu, les vents.
Erace, père de Villon, 51. 1. Erre, voie, chemin. (7> I v. 17. Grand erre, promptement, tout de suite. 53. A son erre, en train, en voie.
95-
Es, aux, dans les.
Esbaillurt, Abailard. 34. Esbatans, joyeux, aimant à s'amuser, à s'ébattre. 71. Esbatement, amusement. 119.
Esbaudiz, privés de joie. "«4-
Escaché, écrasé. 67.
Escarbouilli, écrasé. 148. Eschec et mac{Jltre), échec et mat. Terme du jeu d'échecs. 20$.
Eschever, éviter. 88.
Eschoictt, échéance, héritage. 1 1 1
Esclat, 83, bâton, échalas. Esclin, 169. Escalin, petite monnaie allemande (schilling).
Escollier, étudiant, jeune homme qui suit les cours de l'Université.
Escondire, refuser. 104. Escossoys, 68.
Escourgeon, sorte defouet. 13.
Escoutans, auditeurs. 183. Escouvillon, balai, de four. '9-
Escovette, balai, du latin scopa. Les « chevaucheurs d'escovettes » (p. 47, v. 4) sont les sorciers, qui vont au sabbat à cheval sur un balai. Escreuz, 16 Bien faits, selon Pr.
Escriptures, écrits, ouvrages. 2.
Escuz, écus, monnaiesd'or ou d'argent, de valeurs diverses, p. 56, 70, 145, M7. Prendre écus pour douzains, p. 17;, c'est ne pas regarder à l'argent. « Escuz telz que prince les donne,» p. 17, peut s'entendre des armoiries.
Esgrun, 166, Amer, du bas latin egrunum.( (P. L.) Esguière, vase à mettre de l'eau. 198.
̃ Esguilletez (pourpoinctz^j, 88, pourpoints garnis d'atguillettes.
Esguisé, aiguisé. « Esguisez comme une pelote » (p. 25, v. 4), obtus.
Esjouir, esjoir, réjouir. Estes, ailes. 153.
Eslocher, ébranler. 103. Esmaus (les pelerins d'), 2J. Voy. Evangile selon S.Luc,chap. XXIV.
Esme, 23, pour estime, estimation, intention. (P. L.) Esmerillon, 100. L'émélillon est le plus petit des oiseaux de proie qu'on dressait pour la chasse au vol. (P. L.)
Esmérillonné, gai, vif. 170. Esmolu, émoulu, aiguisé. M7-
Esmorcher, nettoyer, purifier. 76.
Esmoyer (s'), s'inquiéter. Espagne. Il serait difficile de dire quel est ce valeureux roi d'Espagne (p. JS.v. 18), dont le poëte ne savait pas le nom. (Pr.) M. P. L. suppose que c'est Jean II, roi de Castille et de Léon, qui régna jusqu'en 1454.
Espani, épanoui. j8.
Espasmie, pamée. 147.
Espartir, épandre, répartir, 18.
Especiaulx, 169. D'un mérite tout particulier. (P. L. ) Esperviers (gens à porter), 62. Gentilshommes ayant le droit de chasser au vol. M. P. L. remarque que l'épervier est aussi un filet de braconnier.
Espie, espion, guetteur. «Aux champs debout comme ung espie» (p. 105), veut dire pendu.
Espoindre, piquer, exciter. 100.
Espoir (/'), j'espère, no. Espois, épais. 112.
Essoine, essoyne, embarras, tourment. 1 5 34,
Estaux, étaux. 16.
Estable, stable. 24.
Establis, étaux des marchands. 13.
Estaing, étain. 9.
Estamine, étoffe claire.
Estan, étang. 34.
Estature, stature, portrait.
94-
Estceuf, éteuf. 49.
Estomac d'alouette (?). 168.
Estrader, battre l'estrade, escarmoucher. 1(4.
Estradeur, batteur d'estrade, coureur de fortune. •74-
Estrange, étranger. 70, y. 15; 103, 184.
Estranger, éloigner. 4;,
Y. 15- s.
Estre, demeure, hôtel. 191.
Estre. état, existence, manière d'être. 42, 157. En estre, p- 75, en état.
Estrenes, étrennes (p. 37, v. 2;). Villon, qui se dit mercerot de Rennes, se compare à un marchand qui désire étrenner avant de fermer boutique. (P. L.)
Estrif, estry, débat, querelle, dispute. ts, 178.
Exaucer, élever, monter. 183.
Extimative, qui juge, qui apprécie. iS 8
Extrace, extraction, lignée.
JI.
F
Fable, mensonge. 76.
Faictisses, jolies, bien faites. 40.
Faille, faute. 153.
Faillent, manquent. 8.
Faillir, manquer.
Failly, découragé, abattu. 28.
Fainctes, 87. Momeries ou mascarades, h. L.
Faintis, trompeur, 87.
Faitard, paresseux. 22,
G9.
Fantasie, imagination. 1 8. Farcer, faire ou jouer des farces. 87.
Fardelet, 114, petit fardeau. Saturne préparait le fardeau que chaque mortel devait porter pendant sa vie. Fastée (la). Je ne sais pas ce que signifie ce vers « faire ung soir pour soy la fastée» (p. 91). ). D'autres éditions portent la saffèe, ce que je ne comprends pas davantage.
Faulse, méchante. <],
Fault, faut, manque.
Faussart, fauchard, sorte de hallebarde.
Fausserie, fausseté, fausse accusation. 105.
Feautre, feutre, 48, 63. Fenestres. Les fenê'res servaient de montre aux marchands pour étaler leurs marchandises. «Et pain ne voient qu'aux fenêtres » (p. 30, v. 12) est dit des pauvres gallans qui n'avaient pas de quoi manger. Clone fenestre, 42. Fermer boutique.
Ferir, frapper.
Fictions, feintes, tours de finesse. 184.
Fière, frappe. 39.
Fiert, frappe.
Filetz, bouts de fil, 29. Finablement, finalement, enfin. 2
Finer, finir, achever. 18, 143. -Obtenir. «De feu je
n'eusse pu finer » (p. 18, v. 28).
Fix, fics, terme de médecine. 77.
Flambans, enflammés. 76. Flambe, flamme. 1 ss-
Flans, sorte de patisserie. 7'-
Flora, 34. 11 y a eu plusieurs courtisanes romaines de ce nom. La plus célèbre est la plus ancienne, à qui l'on attribue l'institution des florales. Une autre Flora fut maîtresse du grand Pompée. (P. L.)
Flou, mince, fluet. 64.
Flours, fleurs. 145.
Foleur,folie. s8, 13, 114. Foncer, donner de l'argent, des fonds. 174.
Font, fontaine, source. 105.
Forclorre, délivrer, mettre hors. « Pour forclorre d'adversité », p. 1 j.
Formative (faculté), faculté d'inventer. 12.
Fors, excepté, hormis.
Fort {au), au fond, après tout. 161, 170.
Fouir, fuir. 8.
Fournier, 61 le procureur de villon, qui lui avait « sauvé maintes causes justes ».
Fourrer le poignet à la bourse, tirer de l'argent. 136.
Fouterre, voy. Michault. Fouyr, fuir. 141. Creuser. 120.
FRANC-GONTIER 78. M. Paul Lacroix a publié ré-
cemment, à la suite des Testaments de Villon, le Banquet du Bois, qu'il regarde comme la pièce contre laquelle sont dirigés les Contredictz de Franc-Gontier, et qu'il croit une œuvre de la jeunesse de Villon.
France, 36, 121. Le très noble roi de France, a sur tous autres roys décore! », dont parle Villon (p. 36, v. 2;), était, selon M. Pr., saint Louis.
Franchise, puissance, domination (p. 59, v. 9).
Franchy, affranchi, délivré. 23.
FRANÇOIS, promoteur de la vaquerie. 68.
Fremin, ji.
Frez, frais. 85. S
Friquet, élégant, fringant. 169.
Fromentée, sorte de gâteau dont Taillevent donne la recette. 90
Fruiction, bénéfice, profit. 166.
Fruire, profiter, tirer avantage. 166.
Fume, fumée. 7(.
Fumer (se), se mettre en colère, s'emporter.
Fuste, bateau, petitnavire, de fustis, bois. 26.
G
Gallans jeunes gens joyeux compagnons.
Gallans sans souci, p. 212. Ce sont peut-être les Enfants
sans souci, écoliers et basochiens, qui s'étaient mis en société à la fin du XVe siècle pour jouer des farces et des soties. Clément Marot fit partie de cette bande joyeuse. (P. L.)
Galles, plaisir, jouissances, gaies parties.
Galler, se réjouir, mener joyeuse vie, se gaudir. 27. Carnier, 104.
Castaneaux, 112. Prompsault a lu Gastaveaux, qu'il traduit par grelots. J'ai suivi la leçon de La Monnoye.
Gaudisseur, plaisant, farceur. 194.
Gect, 118. Jetons servant à compter.
Gehaine, instrument de torture. 144.
Gendarme, genderme, soldat, homme d'armes.
GENEVOIS, 7).
Gtnoillon (à), à genoux.
M-
Geu, couché. 89.
Gippon, jupon, robe. 117.
GIRARD (Perrot). 6;.
Gisans, ceux qui sont couchez. 16.
Glic, jeu de cartes qu'on appelait aussi la chance. P. 87.
GLOCUS, 123. La forét où
règne Glaucus, c'est la mer. (P. L.)
Gluyons de feurre, bottes
de paille. 14, ;o.
Godet de grive, 61. Grand
pot de grès à mettre du vin. (P. L.) Je crois qu'il s'agit
plutôt de quelque abreuvoir situé place de Grève.
Gogo, 84. « II semblerait que gogo ait été synonyme de rufien dans les mauvais lieux. On a dit de là vivre à gogo, du latin gaudium, dont on avait fait gogue. Le mot goguette est resté. » (P. L.) Gonne, vêtement de moine, tunique, froc. 118.
Corgerin, 68. C'était une pièce de l'armure destinée à protéger la gorge de l'homme d'armes. Nous croyons que Villon appelle gorgerind'Escossoys la corde d'une po tence. (P. L.)
Gorgias, élégant, richement vêtu. 168, 169, 172. Gorriers gorrières, 179, hommes et femmes élégants, vêtus richement et à la mode. Gourt (être à son), p. 20 1 t être à son affaire, être content.
Gouvieulx, voy. RoxseVILLE.
Goyères, sorte de gâteaux. 81.
Grâce (par qui), par la grâce de qui. 9.
Grafignier déchirer avec les ongles. (Pr.)
Gramment,beaucoup,grandement. ijé, 199.
GRAND-TURC, 122. z.
Grat, action de gratter la terre pour trouver quelque chose, comme les poules. « Au grat, la terre est dégelée! » P. 177.
Greigncur plus grand grandior. 58.
Grenoble, 37.
Grève, jambe. 61.
Grever, charger, blesser. 94, 134, iss, i6'-
Grez, 60, pierre à aiguiser. (Pr.)
Grez, gré. « Prendre en gré n, avoir agréable, savoir se contenter (p. 88).
GRIGNY, 73.
Grille, prison. 84.
Cris blanc, gris perdu, p. 168, sortes de fourrures. Grivelé, marqueté, moucheté comme les grives. 41. Groiselles, groseilles. Mascher des groiselles (p. 46, V. 26), c'est ce qu'on appelle maintenant avaler la pilule »
GroAgnèe sur l'œil, emplâtre ou meurtrissure. 16. GROS VALLET, i 5 j. C'était un des servants de l'homme d'armes. Il faisait partie de ce qu'on appelait une lance fournie, c'est-à-dire les trois ou quatre combattants qui devaient accompagner un homme d'armes et marcher à ses côtés dans la bataille. (P. L.)
Guerdonner, récompenser. Guermenter (se), 52. Se lamenter, se plaindre. Voy. Cotgrave.
Guerrier, guerroyer. 119. Guesdry Guillaume (p. 72). Le même que Guillaume Gueuldry, p. I(. M. P. L. pense que « la maison Guesdry Guillaume était le pilori ou la maison du bourreau. Guet (chevalier du), 92.
On donnait le titre de chevalier au capitaine du guet, parce qu'il était resté peutêtre seul en possession de l'ordre de l'Etoile, créé par le roi Jean. (Pr.)
GUILLEMETTE la tapissière. 42.
GUILLEMIN, IJ3. 3.
GUILLOT GUEULDRY, p. I J. V. GUESDRY.
Guin d'ail, regard, clin d'ceil. 168.
Guisarme, guysarme, 67, 147. espèce de hache àdeux tranchants. (P. L.i
Guise, mode, façon, manière. 139, iû8,
H
Habité, 170, ayant maison, habitation.
Habitué ibien), ayant de belles manières. 196.
Hahay! exclamation. 139. Haict (de bon), de bon cœur, avec plaisir, avec empressement. P. 83.
Hamée (?), 121.
Hannibal, Annibal. 120. Hardis, p. 172, v. 24, liards. Petite monnaie qui avait cours sous Philippe le Hardi.
Harembourges (p. 34, v. 20), Eremburges, fille et unique héritière d'Elie de la Flèche, comte du Maine, mort en 1 1 10. (Pr.)
Harier, tracasser. 102.
Hcules, hâle. 88.
Havée, peignée, poignée de main. 61, 169.
Havet, 60, croc. (Pr.)
Hayneurs, qui détestent. 90.
Hayter, profiter, réussir.
a Riens ne hayt que persevérance. » (P. 25, v. 14.) Heaulmiire, marchande de heaumes. ;9.
Hebergement, accueil.
Hector, 74.
Hélène, Heleine, 33, «î.
Heloïs, Hêloïse, nièce de Fulbert, amante d'Abailard
34.
HENRY (maistre), 8j- « Henri Cousin était alors bourreau et tourmenteurjuré de la prévôté de Paris.» (P. L.)
Herode (p. 46) fit décapiter saint Jean Baptiste, sur la demande de la danseuse Hérodiade.
Herroit, hairait. f9.
Hesselin (Denys). 60.
Hez, hais. 138.
Histoire, ornement. « Sans autre histoire », 94. Au quinzième siècle et au commencement du seizième, on appelait histoires les gravures dont les livres étaient ornés.
Ho! assez! halte là! P. 71, v. 9.
Hober, remuer, bouger.
Hohecte(p. 65). Si ce n'est une sorte d'exclamation, c'est incompréhensible.
Hoirs, héritiers.
HOLOFIRNES, 111.
Hom, homme, on. 18, 120.
Hostel, maison. 82.
Hotil-Dieu de Paris, 85. Houseaulx, houses. Sorte de chaussure. 14, 73, 76, 158.
Housseurs, )9. Voy. Notes, p. 2jj.
Houx, houssine, baguette. Les muguets portaient des houssines ou cravaches à la main, pour montrer qu'ils avaient des chevaux à l'écurie. (P. L.)
Hucher, crier, appeler à haute voix. 70.
Hucque, 12, camail à capuchon, que les hommes de toute condition portaient au XVe siècle (P. L.)
Hie Capel, Hugues Capet. 104.
Humblesse, humilité. 20s. Hutin, bruit, bataille. 98, 162
Hutinet. bruit, brouillerie. 64.
Huy, aujourd'huy. 38.
Huys, porte.
1
I celle, cette.
Idolatryer tomber dans l'idolatrie. 45. f.
lice, cela. P. 62, v. 16. Istroit, sortirait, 145.
Ils, ilz, elles. « S'ils n'ayment fors que pour l'argent. » (P-4Î, v. 19).
Impartir, accorder, donner. 9, iS-
Impêtrer, obtenir. 42.
Impourveu pauvre qui n'est pas pourvu de biens. 14-
Informé, instruit. « Informez en meurs » (p. 71), bien élevés.
INNOCENS (les), cimetière de Paris, 89.
Inventoire, compte fait.
Isabeau, 82.
Isle (l'). Lille en Flandre, p. 4S-
J
Jà, déjà, certainement.
Jacobins, glaires, flegmes.
49-
Jacobines (soupes), bonnes soupes grasses. 66.
Jacopins, Jacobins. J3, 82,179.
Jacques (p. 158). Les Francs Archiers portaient des jacques ou cottes de mailles sous leur hoqueton ou casaque. (P. L.) Il y avait des jacques de toutes sortes d'étoffes. Nous disons encore jaquette.
Jacqueline, 82.
Jalet, galet, caillou. 1 [4. Jambot p. 84. Petite jambe, membre viril.
JAMES, (Jacques), 92, 97. Jargon jobelin, argot, 179. Jargonner. p. 118. <̃ Je congnois quand pipeur jargonne », veut dire je" connais l'artifice du chasseur à la pipée
Jasoit, quoique, i;8.
Jason, Jazon, 121. 1.
Jehan de CALAYS, 95.
Jehan LAURENS, p. 180. Personnification du peuple, qui apportait de l'argent aux pardons ou peut-être un nom donné aux pardonnturs. JEHANNE, I73.
JEHANNE DE BRETAIGNE, 84.
Jehanne la bonne Lorraine (p. 34, v. 21), Jeanne d'Arc.
JEHANNETON, 49.
JEHANNETON la Chaperonnière, 42.
Jengkrcssc, menteuse, ( j Jeu d'asne (p. 82), jeu d'amours. M. P. L. suppose qu'on devrait lire le jeu de dame. C'est la même chose. Jeux, pièces dramatiques, 87.
JOB, 29, 122.
Jobelin, argot. 169, 179. Joinctes, jointures, articiilations
Jonas, 122.
Joncherie, plaisanterie raillerie friponnerie. 104., 189, 190.
Jouvenel (Michel) (p. 96), huitième fils de Jean Jouvenel des Ursins, fut bailli de Troyes, et mourut en 1470. JUDAS, 122.
Judic, Judith, no, 121. JUIFS, 103.
JUNO, Junon. 122.
Jus, bas, à bas. 76, ijfi, 159-
Jusq_u.'il, jusqu'à ce qu'il.
K
Katherine la Bouckièri, 41.
Katherine de Vauskllbj, 46.
L
L'en, on, l'on.
Là sus, là haut. 103.
LA BARRE, jo, S7, 6).
iaW/, 17s, décadence, de labesiP. L.). ).
Labour, travail,labeur. 88. Laboureux mestitr, état de laboureur. 79.
LA Gard» (Jean de). 17, 7Î. 96-
LA H ire. 155. Etienne Vignoles, dit La Hire, fut un des plus braves capitaines de Charles Vit. Il se distingua dansles guerres contre les Anglais, et mourut à Montauban en 1442. (P. L.) Laidanger, injurier, railler. 43.
L'Aigle, I $ î.
Lairra, laissera.
Lairray, laisseray.
Lait, laid.
Laiz, laïques. 33.
Lame, pierre tumulaire. « Quant est du corps, il gyst soubl tant » {32, v. 23). Lamesou [le seigneur de), zoo.
LANCELOT, le roi de Behaigne (p. 36, v. é).'Pr. a cru voir dans ce personnage La-
dislas V, prince d'une rare bravoure, tué à la bataille de Varnes en 1444, et qui ré- gnait sur la Pologne la Bohême et la Hongrie. M. P L. remarque avec raison que Lancelot ne ressemble guère à Ladislas.
Lantriojjer, nom breton de la ville de Treguier. 1 57. Laqs, filets, pièges. 78.
Larmoyer, pleurer, verser des larmes. 141. J.
LA Roche, if(- Le seigneur de La Roche était un des bons capitaines de Charles VU. Il s'attacha à la personne du Dauphin Louis, et le suivit dans ses révoltes contre son père On le voit figurer parmi les familiers du Dauphin dansles Cent nouvelles du bon roy Louis XI, où il est toujours nommé « monseigneur de La Roche » (P. L.)
LA RocHeFouojiAULD, 1 2. Ce ne peut être que Foucauld, 3e du nom seigneur de La Rochefoucauld, de Marsillac. etc., conseiller et chambellan de Charles vil, fait chevalier sur le champ de bataille, en 1461. (P. L.)
Las, lacs, filets, 47.
Lasse! hélas. 32.
Lassut, là haut. 91.
Latin, langage parler quelconque. Je n'entends point vostre latin. » 202.
Laurens 'Jehan), 68.
Lavaille, eau qui a servi à laver. 76.
Lay, laïque 44.
Plusieurs banquiers, juifs d'origine, lombards de nation, vinrent s'établir à Paris dans la rue qui porte leur nom. Comme ils prêtaient à gros intérêts, le peuple donna le nom de lombards aux usuriers et prêteurs sur gages. (Pr.)
Art lombard, 171, art d'attraper de l'argent.
Lomer, 91.
LORRAINES, 81.
Los, lot. 1)4.
Loth,<>9.
Louviers (Nicolas de) ou
de Louvieulx, 17,62. Prompsault croit qu'il s'agit d'un bourgeois de Paris qui concourut à remettre la ville de Paris entre les mains de Charles VII et qui fut fait conseiller à la Chambre des comptes par Louis Xl.
Loyaument, loyalement.
Loyer, récompense. 45. f
Loys, le bon roi de France
Louis XI, p. 2;. 3.
Loz, louange. 109.
Lubreslp. 9;, v. 3), sombres et tristes, dit Pr.
Lucresse. Lucrèce. iiS.
Lunettes, yeux, vue. Samson fut livré par Dalila aux Philistins, qui lui crevèrent les yeux. C'est ce que Villon rapporte ainsi p. 4J, 2. 21 « Samson en perdit ses lunettes. »
Lutter, faire le métier de
baladin. 87.
Luz, luths. s(. f
Ly, le, les. 56.
Lay, pièce de vers. « Ce lay contenant des vers dix. » P- 59, v. 4-
Lays est employé, dans la préface de Marot et dans les deux Testaments, dans le sens de legs.
Lt, large « Tant qu'il a de long et de lé » (25, v. 22).
Lealle, loyale. 1 34.
Léans, là dedans.
LE Camus Seneschai.,92. Lectry, lutrin. 1 j.
Lègirement vivement promptement.
LE Lou (Jehan), 64.
Lembroysé, lambrissé. 68. Lermes, larmes.
Lerz, loirs. 72.
Leschier, rechercher les bons morceaux se livrerà sa gourmandise. 28.
Lettres, savoir, connaissances. « Sans plus grandes lettres chercher » (p. 7', v. 7). )·
Lez auprès, à côté de.
Lians, liens. 106.
Librairie, bibliothèque. $4. Lice, lisière, laisse. 171, v. 21. 1.
Lit de parement, 89. C'était un grand lit d'honneur, avec dosseret, dais et courtines, chevet, couvrepied, marchepied, chaire d'attente, prie-dieu, etc. (P. L.)
Ligne, 69, lignée, race.
Linget, mince, délié. 64.
Lisse, chienne, p. 171, v. 20
LOMBART, (0. Synonyme de juif ou usurier. (P. L.)
GLOSSAIRE-INDEX. 249
Lysii EN FLANDRE, Lille. 22.
LysSes, lices, luttes « à tenir amoureuses lysses » (p. 40, v. 29).
M
M', mon, ma. « Par m'ame. » 73.
Macée d'Orléans. 68.
Macher, manger. 187.
macojjaire, 76.
Macrobe, 81.
Maçdelaine (la), 122.
Maignan chaudronnier. 119.
Maille petite pièce de monnaie. 86, 180, 208.
Maille, pas du tout. « Je ne vous crains pas maille », 151.
Mailler, battre à coups de marteau, de maillet. hé. Maillon, maillot. (4.
Main mise, jj. « Dieu nous garde de la main mise », nous préserve d'être pris. Mairebeuf. 17, 62.
Mais, plus. « Il n'a mais qu'un peu de billon. » (P. 1 9, v. 9.)
Mais que, pourvu que.
Maistre des testamens, 97. Je ne sais ce que c'était.
Maistrie,domination. 102. Mal, maie mauvais, mauvaise.
Malchus, 199. Servir Malchus, c'était, selon M. P. L., servir un homme d'épée à la guerre, porter un épieu, une
guisarme ou un coutelas, appelé Malchus du nom de celui à qui saint Pierre coupa une oreille.
Mal gré, disgrâce. 58.
Malheureti, infortune, malheur, misère.
Mallement, méchamment, durement.
MALPBNSÉ, ii. Personnage imaginaire, aux idées peu nettes.
Maltalent méchanceté colère. 36.
Mander, envoyer. 77.
Manna, manne. 107.
Manne. « Venir de manne» (73), venir du ciel, comme la manne.
Marché au filé (?), 80.
Marché(haultet 6as),t9S, toutes sortes d'affaires, y compris les affaires d'amour. Marchesens (?), 175.
Margot (la grosse), 82,
8}.
Marie [d'Orléans), ios.
MARION LA PEAU TARDE, 91.
MARION L'YDOLLE, 84, 86. MARIONNETTE, titre ou refrain de chanson. P. 91. Marioltes femmes mariées (}), 98.
Marquet. 92.
MARTIN GALLANT, 1 8 j.
Maschecroue (la). Prompsault croit que c'est le nom d'une tavernière. M. P. L. pense qu'il s'agit des plaines arrosées par la Crou, petite rivière qui passe à Gonesse et à Saint-Denis.
Maschouere, mâchoire, $2.
JtfalecMre, triste mine. 52. Mathelins (l'ordre des), 70, l'ordre des fous, des insensés. Peut-être la confréiie des Sots ou de Mère-Sotte, cette société joyeuse de poètes et de comédiens, qui était alors la rivale de la Confrérie dramatique de la Passion. (P. L.)
Mathelineux, fou.
MATHIEU, p. 66. M. B. L. suppose qu'il s'agit de Mathieu de Gand, trouvère du XIIIe siècle, qui a écrit contre les moines.
Mathon fromage mou. (P. L.)
MathusalS, Mathusalem,
*3-
Mau, mauvais, 65, 84.
MAUBUAY, p. 63. La fontaine Maubuée (c'est-à-dire malpropre) était située à l'entrée de la rue de ce nom, qui n'avait alors que des filles et des mauvais garçons pour habitants (P. L.). Villon envoie Jean Raguyer boire à la fontaine Maubuée, 1.
Mauffez, le diable. Villon dit assez irrespectueusement que le prêtre exorcisant les possédés, prend le diable par le col avec son étole (p. 36). Mauldite, injuriée avec blasphème. (P. L.)
Maulgré, malgré. 158.
Maulx mauvais. 106 v. 12.
Mautainct, 74.
Mehun, 24, 84.
Mehun (Jehan de), conti-
nuateur du Roman de (fi Rose, 66.
Meins, moins. 1 J4.
Meist, mit. 60.
Mendians (frlres), 66,58. Menestrier, musicien. 45. Menroit, mènerait. 201.
Mercerot petit mercier. « Moy, pauvre mercerot de Rennes 1) (p. )7, v. îi), signifie gueux comme un mercelot, c'est-à-dire comme ces merciers ou porte-balles qui couraient le pays, et qui étaient affiliés aux bandes de gueux et de bohémiens.
Merciz, miséricorde.
Mereaulx jetons qui servaient à faire [es comptes. Mèrmcoiie mélancolie folie. 188.
Merir, mériter. 5 j, v. S. ·
Merit, mérite. $2, v. 1.
MERLE, 70.
Ueschance, misère, malheur.
Meschief, malheur, accident, 141.
Meschoir, arriver du mal. Mescompter (se), s'exposer à des mécomptes. 7.
Merdire mentir. « Je le dys et ne croys mesdire, » (P. 28, v. 20.)
Meseaulx, lépreux. 7e.
Meshaigné, blessé, en mauvais état. 1(2.
Meshning, peine. 98.
Meshuy, p. 150. « C'est à meshuy » C'est maintenant, pour le coup Aujourd'hui.
'57-
Mesprendre, mal agir, 27. 42, 133-
Mtsprins, mal agi, 8. Messaigières entremet- teuses. P. 80, v. 9. Messe (seiche), 93, messe sans consécration.
Mestier, besoin. 61, 197, 200.
Mestier [bas), affaires d'amour.
Mbung, p. 14e. C'est le continuateur du Roman de la Rose, Jehan de Meung. Voy. MEHUN.
Meurdri, meurtri. 16.
Meure, mûre, fruit de la ronce. (t Plus noir que meure.» (P. 28, v. 9.)
Mcurté, maturité. 26.
Michault DU FOUR, 63.
Michault le bon fouterre, 57. Il y a dans le recueil publié par Barbazan un fabliau du Foteor; mais le héros du conte n'est pas nommé.
Mie, pas du tout. £1.
Miege, mégissier. 65.
Mignon, favori. 196.
Mignotte, jolie, mignonne. 4L ?S.
Mineur, petit. «Haro, haro, le grand et le mineur! » (p (8, v 11.) A l'aide, grands et petits!
Mirlificques 185. Merveilles, pour mirifiques. (P. L.)
Misericors, indulgent, miséricordieux 22.
Miste, joli, aimable. 19a. Mitaines. L'avant-dernier vers de la page 46 fait allusion à l'usage, qui n'est pas encore complètement perdu,
de donner des gants aux convives d'une noce.
Mitaines de fer, gantelets. 152.
Mocque, moquerie. 175.
Mol mollet. 61.
MONFAULCON, 21 J.
Monopolles, cabales, complots. 201.
Monstier, couvent.
MONTMARTRE, 8l.
montpippeau, 86.
Mont-Valéribn, 81.
Moralitez (p. 87) pièces dramatiques dont les vertus, les vices, etc., sont les personnages.
MOREAU, 50.
Morillon (vin), p. 100. Vin rouge
Mors, mordu. 143, v. 18. Mort. « Aller de mort à vie", p. 91, est un jeu de mots, l'inverse d'aller de vie à trépas.
MORTELLSRIE (Rue de la), à Paris. 200.
Morteux, mortels. 159.
MORTIER d'or. Parait avoir été l'enseigne de Jehan de la Carde, l'épicier. [P. 17, v. 1.)
Moulier, femme, 46.
Moult, très, beaucoup.
Mouse, museau. 6f.
Mousse, p. 175, v. 21. Vin On dit encore moût dans le sens de vin nouveau. (P. L.) Je crois qu'il s'agit plutôt des frais faits pour paraître, pour se faire mousser
Moustarde (aller à la) 9 r, faire grand bruit d'une
chose, s'en vanter, en parler à tout propos.
Moutonnier, 12. M. P. L. croit que Changort était un mouton ou faux compagnon que Villon avait rencontré dans les prisons, pour son malheur. C'est assez vraisemblable.
Muer, changer. 27.
Muguelias, muglias, 204. Sorte de parfum.
MULLE, 60, probablement une enseigne.
Musars, fainéants, 98.
Muser, s'amuser, perdre son temps. 79
Musser, cacher. 58.
Mye, point, pas du tout. 202.
N
N\ ni 108.
Nabugodonozor, [22.
NANCY. P. 171. Ce souvenir du siège et de la bataille de Nancy, où les Suisses défirent le duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, prouve, ainsi que l'a remarqué M. P. L,, que le Dialogue de Mallepaye et Baillevent a été composé après l'année 1477. Naquet, 169, jeune garçon, d'où laquais (P. L.). On appelait particulièrement naquets les garçons des jeux de paume.
Narcissus, Narcisse, 46, 122.
Natté, garni de nattes, suivant l'usage du temps.
« En chambre bien nauée», 78.
Naveau, navet. 48.
Navrer, blesser.
Ne, ni.
Ne que, pas plus que.
Nectekt 169. Propret, bien vêtu.
Nennil, nenny, non.
Noailleux, noueux. 155. · Noë, 69.
noé LE jolys, 46, 8$. Probablement un ancien compagnon de Villon qui le chargea dans son premier procès pour se disculper luimême, et ne fut condamné qu'au tiers de la peine infligée a Villon. Celui-ci lui en gardait encore rancune lorsqu'il écrivit le grand Testament. (Huitain cxlii.)
Noise, bruit, querelle.
Nombrer, compter. 118. NOTRE Dame DE -PARIS, 187.
Nourri, élevé, 2
Noyse, bruyt, querelle.
Noysier, faire du bruit quereller. 79.
Nully, nul, aucun, personne. 21 J.
Nuyctée, durée de la nuit. 78.
Nuysance, préjudice. 144. o
0, avec. 69, 79.
Obstant malgré, nonobstant.
Octovien, 122. Prompsault croit qu'il s'agit de
Caius Julius Casar Octavianus, qui fut empereur sous le nom d'Auguste.
Ois, oies. 92.
One, oncques, jamais.
Oppresse, oppression. 26.
Ord, sale.
Orbes, 115, aveugles, selon M. P. L.
Ores, maintenant.
Orfaverie, orfèvrerie, bijoux, ornements en or. 68, 146.
Orléans, 66.
ORPHEUS, Orphée, 4;.
Orrez, entendrez.
Ost, armée.
Ostade, étoffe précieuse. 196.
Or, entend. $ 1. Eut, 46. Ou, au. 29, v. 4; 106, v. 17.
Oubliante, oubli. 18.
Oultraige, courage intempestif, outrecuidance. 152, '54-
Oultrement beaucoup plus que de raison. t.
Ouquel, auquel, dans lequel.
Ouvrer, travailler. 87.
Ouvrez vostre huys, Guillemette; refrain ou commencement de chanson. 91.
Oy, entends. 11;.
Oystres, huitres. 50.
Oyt, entend. 64, 68.
P
Paillart, gueux. 194.
Palais (le), à Paris, |8$, zo6.
Fallut, palux, marais. Si, 122.
Panon de Bissac (p. 15 s), pennen ou bannière de toile grise (P. L.).
Paour, peur.
Paouvre, pauvre. 9.
Papaliste, papauté. }j;
Papier (p. ji, v. 12), respirer, souffler.
Par tel, de telle façon. Peut-être le vers 22 de la page 181 devrait être ainsi « Par tel si, qui veue ne l'aura. »
Pardoint, pardonne. 1 j j. Pardons, 180. Prières publiques, processions et autres pratiques pieuses auxquelles étaient attachées des indulgences particulières. (P. L.) Pardonneurs vendeurs d'indulgences, de pardons. 174, 180.
Parfaict, achevé. 188.
Parfond, profond.
Paris, 33.
Paris, 66, 80, 88, loi, 184, 199 etpassim.
Parit, engendra. si, v. 20.
Parmi, avec. 50. Au milieu de, dans. 15). A travers. 104.
Parlement départ.
Pas. est question, p. 74, v. 1} et suiv., d'un pas d'armes tenu par René d'Anjou, qui prenait le titre de roi de Sicile.
Passot (83). Pr. croit que c'est une lance; M. P. L., une épée courte.
GLOSSAIRE-IN DEX.
Patac, patard, petite monnaie. <59, 199.
Patay, chef-lieu de canton dans le Loiret. 11$. Pr. fait la remarque qu'il n'y a pas de forêt dans cette localité, et qu'il n'y vient pas de châtaignes.
PATHELIN, 179, 196. Le héros d'une farce bien connue, qu'on a attribuée à Villon. Pathelin, 166, 169, langage mielleux et plein d'artifices.
Paulme (en), dans la main. « Seur comme qui l'auroit en paulme», p. 72.
Pauquedenaire, p. 196, est présenté comme un homme expert en tromperies, comme Villon et Pathelin. Il n'est pas autrement connu. Voy. POICPENAIRE.
Ptaultre, 48. Suivant Cotgrave, le peautre est le gouvernail d'un navire. Dans l'Ancien thiâttt français t. II p. ijs, on trouve battu comme peaultre, ce qui équivaut à battu comme pldtre.
Peaassu, couvert d'une peau épaisse et ridée. 41 Pelion, piéton, fantassin. M4-
Pet, peau. 143.
Peiner (se), se donner de la peine. )i.
Penancier, Penitencier, confesseur. 188.
Penart, lance ornée d'un pennon. 147.
Pbnessac (monsieur de), 200.
Per (?). « Reçoit son per et se joint à la plume », p. 74, v. 20.
Per ou non per, pair ou non, quoi qu'il en soit. 193. P b rdrveb. (Jehan et FranÇoys), 7î- S
Pirnst (158), Permet (ij7), diminutifs de Pierre, nom du franc archer de Bagnolet.
Perpétrer obtenir acquérir. 42.
Perrette, 82.
Perrucatz, 178. Gens à perruque. On appelait perrucats tous les gens de la Basoche (P. L.)
Pery, perdu. JI, v. 2}.
Pesle, poêle, s. m. 48.
Pïstsl (enseigne du), ou pilon. 200.
Petiote, petite. 26.
Pbtit-pont, à Paris. 8i, 190.
Peu, repu, nourri. (P. 21, v. i}.)
PHILIPPOT, 92.
Phœbus, 122. La clarté Phcebus, c'est, on le sait, la lumière du jour.
PICARDS 122. C'ëtaieJt des hérétiques qui ne faisaient aucune prière pour les morts. Voilà pourquoi Villon promet à Thibault d'Aussigny une prière de Picard. PICARDES, 81.
Pieça, il y a longtemps.
Piétonner, courir à pied. IS2.
Piez blancs, p. 8. Avoir les pieds blancs, c'est, suivant M. P. L., revenir de,
loin, comme les voyageurs aux pieds poudreux.
Piez de veaux ( faire les),
danser, faire des gambades. 112.
Pigne, peigne, 69.
Pigon, pigeon. « Les pi-
geons qui sont en l'essoine, enserrez sous trappe volière» (p. is, v. 27-28), sont des prisonniers enfermez dans une prison grillée.
Pion, buveur, ivrogne. j2,
7°.
Piptur ou hazardeur de
dez (87), filou qui joue avec des dés pipés.
Piteux, porté à la pitié.
•75-
Plain, uni 1 42 entier.
a Tant que je suis en mon plain sens » (p 24, v. 9).
Plaindre, regretter.» Je
plaings le temps de ma jeu-
nesse.» (P. 27, y. 2j.) | Plaisance, plaisanterie,vie joyeuse ou plutôt affaires d'amour. Plaisant, agréable, éj. Plait plaid, plaidoyer.
«A peu de plait », sans grands discours.
Planté, abondance. 178.
Plaque (p. 61), monnaie fabriquée sous Charles VII, à l'imitation des Pays-Bas.
Plat D'ESTAIN, cabaret de
Paris. 21), 21
Pleige, caution, répondant.
3»
Plet, voy. Plait.
Plombée, 99. Fouets ou
masses garnis de plomb. (P. L.) 1
Plours, pleurs. 144.
Plumail. Mettre le plumail
au vent (49, v. 1), se jeter résolument dans un parti.
POICTOU, 62.
Poirre, peter. 64, v. 1
Poise, pèse, tourmente,
loi, iéj, 17g.
Poislt, poêle, 48.
PONT A BILLON. Pont au
change. 179, 182.
Ponthoise, 101.
Ponthièvrk. Penthièvre.
IJ2.
Pontlieu (Jean de), 66.
C'est Jean de Poilli, docteur de Paris, implacable adversaire des moines mendiants au XIVe siècle. Il avait écrit plusieurs ouvrages qui furent condamnés par le pape Jean XXII. Villon nous apprend qu'il dut abjurer ses hérésies et faire amende honorable. (P. L.)
Popin (l'abreuvoir). Cet
abreuvoir était au bout du Pont-Neuf, vis-à-vis la rue Thibautaudcz. On a démoli de nos jours une voûte qui conduisait à cet abreuvoir, où les truands et les mauvais garçons se réunissaient, au moyen âge, avec les ribaudes et les bohémiennes. (P. L.)
Pomme 01 PiN. Cabaret
de Paris. 61, 192.
Pompée, 120.
Porte-paniers. Portefaix,
porteurs de hottes. 89.
Pou, peu, 82, 146
Poulailtt, volaille. 64,
Ifl.
Poulce, 173. « Jouer du poulce », donna de l'argent. Pour-demain après-demain. 161.
Pourbondir un cheval, le faire caracoler. 1 j 4
Pour ce que, parce que. Pourchasser, poursuivre, procurer.
Pourfiener, promener. « Pourmeni de l'ays au pesle » (p. 48)i'prdmei«é tle la porte au poêlé, du froid au chaud; lanterné.
Pourpensir {se), penser, décider à par soi.
Pourras (l'abbesse de). Cette abbesse de Pourras était, je pense, une coquine, qui, sous ce titie,vint avec Villon duper le pauvre baibierde Sourg-li^Beitie, qui y tenait aussi un* hôtellerie (Pr.) Le peuple appelait abbesse de Poilras, une maquerelle publique qui avait été rasée au pilori, fouettée et chassée de la ville. (P. i,
Poursuivans fp. $7, ;t./ 10). Poursuivants d'armés. C'était un des premiers grades de la chevalerie., (P. L.j Pourtraicte, forméfi 106. Pourtraycture, portrait, visage. 8* •• •
Poylette, petite polto; 57.
POYSSO'NNISfttit~ ~iP~f%%S.
Povssonneriï (Ia^, à Patis.
J87.
POïtou, i8j.voy.Poic-. toit.
PRAGMATIQUE sanction. 166. > Prebendé, chargé, comme d'une prébende.
Premier premièrement d'abord. j}, v. 9.
Preicheur, celui qui ptêche, prédicateur. }î.
Prescripre, transcrire (?).
93-
prèudhommye, prud'homic. 142.
Prume, Priam, roi de Troie. 120.
PRINCE DES SOTZ (p. 6)), C'était le chef électif de la confrérie joyeuse de la Bazoche du Palaiset le îkeUxre des jeux de cette association dramatique. On le nommait tous les ans: à la fête de mai, et ses suppôts étaient tenus de lui obéir pendant toute la durée de ses pouvoirs, (P. L.) Prmis, actes, pièces de procédure. "104.
Prochas, rechereM. ^65. PROSERPIKii, 122.
Prou, assez, 170.
Paovins, fo, 8».
Pràrfiion (p. ;6, v. 4), recours, remède.
Pmnjtr. «6 qu'en son prupier n'a pas creu » (p. 3 8, y. ïj), qui n'est pas de son, invention, de son eru.
Psalmistb {le) David. i«7' ̃ '̃̃̃̃̃̃'̃̃̃̃ Psaulme Dtus tauckm, pi }). C'est lé psaume 10S Déts Igudtm. meam, etc. Le veset sêptittne, qiji servait de prière à Villon quand ij faisaitdésvœiucpourl évêque d'Orléans, est ainsi conçu Fiant dies ejus pauci et episcopatum ejus accïpiU alter. «Que les jours de sa vie soient
réduits au plus petit nombre, et que son évêché passe à un autre. « C'est le sens que le poète donne au mot tp'ucopatum. (Pr.)
Puis, depuis.
Q
Quanqut, ce que, IJJ.
Quant de, quant est de, à l'égard de, quant à. ij, )J, IÇJ.
Quanti, combien de. 167. Quart et dix (m), «axes et dîmes. (P. L.) ).
Qw.à.dequoi. 30, v. 19; }7, v. iî.
Queloingne quenouille. « Autre que moy est en queloingne » (p. 9, v. 10. signifie que Villon a été supplanté aupris dç M maîtresse.
Quérir, qutffc, àmàyu. Qui, ce qui. « Qui n'«te4t à moy giaad saigewe.. » (P. 39,v.<8.)
Qui ne fiioy, rle«, quoi que ce soit. 30.
Quiers, veu, cherche à. P. 46.
QMnztnYlngU, 88. Ui
pensionraiiet de l'hépital
fondé par S«m-M>ui» POW
troja cents aveugles.
30. qboji, tnaquUle, es lepo».
}0.
B
R'abilltr, répaier, remettre en état, 1.
Racoustri, raçcoutré., réparé. î.
racuyir (Jacques}, 61, Racutir (Jean), 62.
RfiUart, railleur, bon vivant, 38.
Railler, faire le métier de
bouffon, 87.
Raillon (p. 94), dard. Le raillon était une espèce de flèche triangulaire. (P. L.) Raimatsti •(?), 167.
Reine, rainette. 77.
Rtins, p. 13- M- P. L. rapproche ce mot de rainceaux, et le traduit par ramtaux, fagots. « Les fagots, dit-il, étaient empilés de chaque cité des vastes cheminée» du XV» siècle. On s'appuyait donc contre les rains en se chauftint la plante des pied» »
Mtliet, rûtUts, rat/tt, festin, régal. 8a, 20s.
RameBteu, rappelé, remé- · moré.
Ramenteyoir, rappeler. 82. Rattguillen, ardi|lon. 100. JÎ4(M«<(ii,BouveUpp*1.86. Rmh, enragés. « A loupj ravis grosse patture », 176, v. S.
Riye (cwchtr en), p. i6j. Se mettre en évidence.
mm, 61, royal 4'or.
Cette monnaie valait 30 sols tournois en 1470. (P. L.) Réagai 76. Espèce d'arsenic rouge. (P. L.)
Rebours, 106, ce qui Kbute.
Rebourse, revêche, 203. Rebouter, rebuter, 43, v. •5-
Rebrassis colletz, 33, collets fort hauts et bien plissés (Pr.). Collets bordés de fourrures. (P. L.)
Recipe, 76, ordonnance de médecin.
Recceuvre,tiouve, obtienne. 43, v. 23
Recorder, rappeler. 79.
Recors {être), se rappeler. 88.
RECOUVRER, Tendre. « Et que vie me recouvra. » 24, v. 18.
Recrcu, fatigué, lassé. 38, 16$.
Recueil, accueil. 137.
Recullet (en), dans un coin, acculé. 1 1 3,
Recrtu v. 9), rater, ricler.
Ke/«gà-e,rafrafchksement. 52.
RE[MS, 41. j.
Relaiz, ressource. 9.
Relief, iéj. On appelait relief l'ordre du prince qui autorisait un officier à toucher ses appointements échus pendant son absence. (P. M Remaine, reste. « Que le refrain ne vous remaine. » (P- 3!,v. 3-) ste, a0
I&nain. reste, âo
Remenant (It), le reste. 30, jo.
Reminer, considérer, jy.
Remordre, causer du regret, des remords. (p. 2j, v. 21.)
Renchère, J92. Pr. suppose que c'est le bâton dont on se sert pour porter deux sceaux, un à chaque bout. RENÉ (d'Anjou), roi de Sicile. 74.
Renés, Rennes, 37.
Repaistre, manger, se régaler.
Repentailles, regrets, repentir. 39. 86.
Reprouche chose répréhensible. 103.
Repues franches, repas qui ne coâtent rien.
Requérir, quérir, chercher à nouveau. 192.
Requoy (en), â rtquoy, en repos, tranquille, ;o, 168. Resciens (?), 470.
kescandre. Renfermer, du latin recondere. (P. L.)
Rescrire, écrite, rapporter, af
Resiner, résigner. « Ponr leurs offices résiner» (p. îos), pour prendre congé et régler leurs comptes.
Respit, répit, repos. 30.
Ressourdant, 166. Ressortant, brillant. (P. L.)
ROraict, retiré. 41, 113.
Retraire, retirer. 47, $4, 80, 137.
Revencher (se), prendre sa revanche, seprévaloir. 28. Eux revencher, se venger »*7, Rnenut, retour. 193.
Rez, 9j. Le rez d'une pomme en est l'épluchure. Rez, rasé. 95. v. 8.
Ribler, 67, voler pendant la nuit, comme les ribauds, ribaldi. (P. L.)
Ribleur, voleur de nuit. 98. Richer (Pierre), 71.
Richiih (Denis), 6).
*k, moquerie, raillerie. 42, v. ]].
AïoHi, querelle, dispute. 98.
RlOU (/MB), é(.
«;«, rirais. 58.
Robert, y?. 1
Robin TuRGis,TOy.TuM*M. rollant, 157.
Roman DI LA Rosb, 2$T
Rommant du Ptt ai diable, (4. Ouvrage imaginaire gue Villon s'attribue.
Rome, Romme. 81, 121.
Ronseville (Pierre de), concierge de Louvientz. 17. Il y a une localité de ce nom dans le département de l'Oise. rosb, 56.
ROSNIL, 74.
Rot tes, vents qui s'échappent de l'estomac. 98.
Rouge, fin. Terme d'argot. i8j.
Roulet, 1 14. Du latin rotulus, parce que les livres étaient roulés. (P. L.)
Rou/3i«ux,désappointé,avec un pied de nez. 205.
Roujsilxon, 99.
Aoute, bande, troupe. 148. Royaulx, p. 169. Écus d'or.
JMtfM, retoe.
R»,ruisseau.iittu «comme
à ru telles » (p. 46), comme le linge qu'on lave.
Rubis. CI. Marot pense que les beaux rubis légués par Villon aux soldats du guet (13, v. jj) étaient des rubis de taverne.
RutL, 86.
Ruel (Jehan de), 74.
Ruer, jeter. 151. Ruer jus, abattre. 121.
Ru, ruine. 166.
Ras tes, paysans, gens grossiers. 169.
Ruyt, ardeur amoureuse, rut. 8). >
Rymer, 87, faire des vers. Rynccau, rameau rainceau. 145.
S
Sa jus, ici bas. loj, 108. Sade, gentil, gentille, aimable. 8;, 196.
Sadinet, la nature de la femme. 40.
Saillir, sortir- 27, 10).
Saindir, devenir saint. 185.
Saint-Amant, te.
SAINT André, 107.
SAINT Antoine (Jeu), 17, 44-
S. Cristofl!, 74.
S. DBNIS, p. 1 57. Le cri des Français était Montjoie S. Denis; celui des Bretons était Bretagne et S. Yvts. (P. L.)
S. Dominique. 90. « Les Thères Prêcheurs, ordre institué par saint Dominique,
étaient chargés de l'inquisition en France. » (Pr.)
S.-Estjenne, paroisse de t Paris. 96.
Sainct-Genou, 62.
S. Georges, 68, iji, Ij8. s S. GILLE, 207. 3 S.-INNOCENT, paroisse de c Paris. 181. [. c S. Jacques, 158. j S. -Jacques, paroisse de
Paris. P. 12. 1 S. Jean-Baptiste, p. 46,
107, feu taint Jean, 166. 1 SAINT Julian des VOVEN-
tes, 62. g
S. MARTIAL, 24.
S. Martin, i (S. ( S. Mathieu, 218. j Sainct Omer, 4$. c S. Pierre, 162. c S. PIERRE de Rome, 189. ( S.Pierre des Arsis, église < située dans la Cité. 2 1 u s S. Remy DE Rains, 190.
SAINT SATUR soubz San-
cem, 57-
S. Victor, 122. S. Yves, voy. S. Denis. Saincts-Avoye, 94. Vil- Ion veut être enterré dans cette église parce que c'est la seule de Paris qui ne soit pas au rez-de-chaussée. Elle était au second étage. Ste Barbe, 1(2. < Sainte Souffrette, patronne imaginaire des gueux. 212. Sallade, 67, 1 J2 1 S7>
tasque sans heaume et sans crête, espèce de pot de fer. (P. L.)
SALINS, 37, 70.
SALMON,Salomon,4i, 1 14.
SAMSON, 45
S'amye, son amie, sa mattresse.
SANCERRE, 57.
SANG. Le sang menstruel servait à faire des philtres et autres breuvages auxquels on attribuait une vertu magique. Voy. p. 77, v. 11 et 12.
Sans, cens c'est-à-dire rente, revenu. P. ,72, v. Saqueboute, sorte d'épieu. 148.
Sara2moys,d'Onem;«G'mgembre sarazinois. » 64. Sardana (p. 46, v. 7). On a fait beaucoup de conjectures au sujet de ce Sardana, qui conquit le royaume de Crète, et plus tard vécut de la vie des femmes. Il n'y en a pas une de satisfaisante.
SARDANAPALUS, 122.
SATURNE, 14.
Saulsoye, lieu planté de saules, arbres qui ne portent point de glands, comme chacun sait. C'est pourquoi Villon lègue « le gland d'une sanlsoye ». (P. 12, v. 10). Scarbot, escarbot. 84.
Scotiste écossais d'Ecosse. M. P. L. pense que le roi d'Ecosse qui avait la moitié de la face vermeille, c'est-à-dire une tache de vin (p. 5(> v. l}), était Jacques Il, mort en 1460
Scypion l'Affriqua^n 120.
Se, si. L'e s'élidait souvent « S'evesque il est, sei-
gnant les tues » (21 v. 7). Seigner, bénir en faisant le signe de la croix (p. 21, v. 7).
Sagnturiir, domina. 102. Si/aur « Prebstie sans séismi » (p. 186) peut s'entendre de deux façons sans cure et sans résidence sans loisir et sans repos. (P. L.) Senestrt, gauche.
Senez, anciens, vieillards, hommes de sens. 37.
Stnsif, 18, sensitif, s*& sarium, siége du sentiment. <P- L.)
Sensitif, le tact, le toucber. 10}.
Sentemens, sentiments, intelligence. 25.
Stqutntantnt, en suivant. 1,6o.
Stqucure, stcûurt, 45. Secoure. 1 $9.
Serain, soir. 48.
Sereine. Sirène. 34».
Sa/.C&motsertdepieiexte à une équivoque. «Je ne suis son serf ne sa biche » (21. v u).
Sbrgbnts, 65. Le prévit dt*aris avait deux compagnies de sergents à pied et à cheval, composées de lie hommes. chacune et ayant leurs corps de gardâjdix barrières de li ville. (P. L.) Serre (tenir), Il, v. 1. J'ignore ce que cela veut dire. Servans, serfs., aMitturs. « Aussi bien meurt filz que servans (p. j6, v. 18) signifie Les maîtres meurent aussi bien que les serviteurs,
les. fils de famille aussi bien que les serfs.
Ses, ces. 8.
Seur, sûr. 71, 142.
Si, ainsi, oui, en effet.
SùruLativt [Jacu Wi faculté d'imiter. 18.
Simdh Maoos, 1:2.
Simplesse, simplicité,ignorance. 106.
Siru, seigneurs. yj.
Sist, assit, 202.
SollUr,. plancher. 94.
Somt, aguste. tc8
Somme, sommeil. P. n8, v. 16.
Somme, en somme. $ 1
Somme1, compter. 118.
Sommet, tlte. 84.
Sorbonne. « Je ouis la cloche de Sorbonne » (p 17, v. 20). Ce vers ne prouve pas que Villon était dans les prisons de l'Université, puisqu'il est ces in qu'il était libre lorsqu'il composa le Petit Testament, mais seulement qu'il logeait dans le voisiiage de la Sorbonne. Sortir (soy), se fournir, s'approvisionner. 196.
Sot btuffon, comédien. 63, 98. Voy. Prince des sots.
Souef, doux- }j, 75. Doucement. 90.
SonjfrctU, disette. 82.
Souffreteux, pauvre diable, misérable. 206.
Soûlas, plaisir, joie. 122. Seuldre, (ég4er, résoudre. 102.
Souldure, liaison, union. 8.
Soullon, p. 99. M. P. L.
dit que c'était un ballon avec lequel on jouait à la soulle. Le mot doit être prononcé souillon, et n'a pas besoin d'être expliqué. On le retrouve p. 120.
Vouloir, avec coutume.
Soustenance, soutien. 144.
Soustenir, porter. 208.
Souventesfoys souvent. 32.
Soyer, scier. 119.
Submectre, soumettre. 67.
Substantement, nourriture,
soutien. ioé.
Sumer, semer. 74, v. 16.
Sur, chez. 13, v. 17.
Surcot, manteau
Surquerir, 1 2 Enrichir, de
succurrere, suivant M. P. L. Sus (Mettre), mettre en vi-
gueur, soutenir. 10.
Sus (mis), surgis, venus.
172.
SUYSSES, 171.:
Sydère, astre. }».
T
Tabarie [Guy), copiste du Roman du Pet au Diable'. 54.
Tabart, manteau.
Tachon, instrument servant à chasser les mouches. 11.
TACOT {Colas), 97.
Tailleur de faulx coings,
faux monnayeur. 87.
Taillevrnt, 76. Le livre
de Taillevent, « grand cuisinier du roy de France », eut
plusieurs éditions au quinzième siècleet au commencement du seizième.
Talemouze, sorte de pâtisserie. 63.
Tancer, tincer, disputer.
Tantalus, Tantale. 122. Tarawne (Charlot), 72.
Targe 70. La targe était une ancienne monnaie de Bretagne, ou brette,.du latin bretta. Son nom fi& venait de ce que le revers portait une
targe, ou bouclier échancré.
(P. L.) boucliereér hancté.
Tarny, terni, usé. 172.
Tauxer, taxer, imposer. 166.
Tayon, oncle. 36.
Telles, toiles. 46, v. 24.
Îemplk (la closiure du), à Pans. 61.
tencer, v. tancer.
tenir, posséder des biens
sous la suzeraineté de quelqu'un « Soubz luy ne tiens s'il n'est en friche » (2 ̃ v. 10).
Terme, 37, ennuyé, tourmenté. Cette expression s'emploie encore dans le langage familier.
Terrien, terrienne, téites-
tre.
Tettes, mamelles. 41.
THAis, 34. Courtisane célèbre, $ai vivait à Athènes vers le milieu du quatrième siècle. (Pr.)
ThahAr, 46.
Theophilus 5 i Voy. le Miracle de Théophile, par Gautier de Coinsi. Rennes. 1838, jn-8.
Thibault (Jacques), 49. Voy. Aussicny.
Tholouzaints, femmes de Toulouse. 80.
Ticquct, loquet (?), 169.
Ticulx, tels. 16.
Tocquer, toucher. 175.
ToUu, pris, été. 39.
Tor, taureau. 122.
Tostie, pain trempé dans du vin. 79.
Touaille, serviette, pièce de toile. 29.
Toult, ôte, enlève. 108.
Tear d'ucolle (70), tour de vaurien.
Tourbes, foule. 107.
Toute jour, toute la journée. 44.
Trac, trace, train. 199.
Tracer, suivre la piste. 3'- 1.
Trahistre, traitre,méchant. 98.
Traicte, tirée, extraite. 196.
ïraictis, joli. 40.
Traire, tirer. 157.
rrerug/out/ englouti, m. Transmué, changé. 121. Transy, uépassé. 103. Trasse, trace, niste. 176. Trasser, suivre la piste, poursuiyre. 17e.
Trayait, souffrance, ptiae, t adversité. 15, ii{. Travailler fat), s'occuper, 1 s'employer. 71.
Tresbucher, tomber. l$j. Trespercer, transpercer. 8, ISA- < Tressuer, tressaillir. 191. Trestous, tous. <
Trestout, tout, entièrement.
Tretissts, voy. traictiss. Treuver, trouver. 36.
TRISTAN, prévost des mareschaulx (p. 92), est le fameux Tristan l'Ermite, prévôt de l'hôtel du roi et favori de Louis XI. (P. L.)
Thoïle (74), fils de Priam et d'Hécube, fut tué par Achille au siège de Troie. (P. L.)
TrompUle, trompe, trompette. 114.
Trop plus, beaucoup plus, trop. 2>. 2.
Trou Pirrette, 97, probablement un cabaret. Marot dit que c'était un jeu de paume.
Trousse, carquois. 175.
Troussecaule (Robin), 65.
Troussa au col, emporter sur les épaules. II. 1.
TaOYINS, 123.
Troys, Troyes. 45.
TROïSLICTS(p. I3,V. 25), chambre du Chatelet un peu plus commode que les autres, peut-être. (Pr.)
Truandailles, hommes de la lie du peuple. 39.
Trumellières, porte-manteau, accroché au trumeau, partie de mur entre deux fenêtres. t t.
truys, trouve. 144.
Tumbel, tombeau. 94.
Turcis {Robert). 50, 60, 62.
TURLUPINS, TURLUPINES, 66, 179, hérétiques du trei-
zième et du quatorzième siècle, qui s'appelaient eux-mêmes la Confrérie des pauvres, et qui n'étaient pas plus orthodoxes en matière de morale qu'en matière de religion. On a désigné quelquefois sous ce nom les ordres mendiants des deux sexes. TuscA (de), chef de police ou capitaine d'aventures. 67. Tyran, tyran. 78.
u
Unes, une paire de. « Et unes houses de basane. » P. 73. v. 7. Unes brayes breneuses. a P. 77.
Uys, porte. 48.
V
Vacquerie, vicairie. 68.
VALENCIENNES, 81
Valere LE GRAND, Valere Maxime. 27.
Valeton, serviteur, amoureux. 49.
Vallktte (Jehan), 63.
Varlet, garçon de cabaret, de cuisine, 193, 197, 208. Vaulsist, valait, 26.
46. V AUSBLLES (Katherine de), Vauvert (le diable de). L'opinion commune était que les diables habitaient Vauvert. C'est pour cette raison que l'on appelait rue d'Enfer celle qui conduisait en ce lieu. (Pr.)
Vecy, voici.
Veez, voyez. 136.
Vêla, yoilâ.
VenerieuxjelîtxiiVamani. « A tous les Dieux venerieux .» (P. 8,v. 7.)
Vsnt (avoir le) 173, être favorisé de lafortune. On dit aujourd'hui Avoir vent en poupe.
Venteur, 96, homme qui se vante volontiers.
Venus, 122
Veoir, voir. 13. Vrai. 197.
Verdi, p. 168, v. 24 (?,». Peut-être faut-il lire: « Gorgias, sur le hault vettu. » Vers, envers. 24.
VICESTRE, (2, 73. Le château de Bicêtre. Il était en mines du temps de Villon. Viellart, vieillard. 69.
Vielle. « Ma vielle ay mys soubz le banc», p. 48, veut dire j'ai renoncé au jeu, j'ai quitté la partie.
VIENNE en Dauphiné. 37. Villon ( Guillaume), 9, J3. Ce Guillaume Vill9n ou de Villon n'était pas le père du poète, puisque celui-ci, qui l'appelle son « plus que père », parle de lui, dans le Grand Testament (p. S3) comme d'une personne encore en vie, et lui lègue sa bibliothèque tandis qu'il vient de dire (p. 32) que son père est mort, M. Nagel s'est attaché à prouver qu'il n'était même pas son parent, d'où la conclusion que te poète aurait adopté le nom de Villon pour faire honneur à son maître et protecteur.
Il se fonde particulièrement sur le huitain IX du Petit Testament, où François dit que sa renommée bruit en faveur du nom de Guillaume, et sur le huitain jj du Grand Testament, où il se plaint qu'il est abandonné des siens, ce qui nt s'accorde pas avec les témoignages de reconnaissance qu'il prodigue à Guillaume Villon. J'avoue que tout cela est assez concluant. On pourrait objecter néanmoins qu'en se disant abandonné du moindre des siens. tout en parlant comme il le fait des bontés que Guillaume avait pour lui Villon se rappelait cet axiome, que l'exception confirme la règle. Quant à l'honneur que sa renommée devait faire au nom de Villon, il importait peu que Guillaume fût ou non de la famille du poète le résultat était le même pour lui.
ViUotiira, coureuses, filles
de mauvaise vie. Voy. Cotgrave.
Vin de buffet, vin commun
et frelaté. 6$.
Vin (aller au), p. 8), c'est
aller au cabaret chercher du vin qu'on emporte dans l'endroit où il doit être bu. C'est ainsi qu'on s'en procurait généralement au moyen âge. Voy. Ancien théâtre français, t. t, p. \ç>if Farce de Panel
qui ra au vin; t. I, p. 250, Farce dû gentilhomme et de Nandet.
Vin d'Aulnys. 60.
de Batgnettk. 193.
de Beaune. 193,207. Morillon (rouge) 1 00. Vis, visage. 40.
Vivre d'avantange, vivre sans rien débourser, aux dépeus d'autrui.
Vo, votre. 86.
Voir, vrai. 28.
Voire (95, v. 17), verre. Voire, vraiment. 23, 14s, r<S4.
Vote, aille. 22.
VOLLAHT, 196.
Vouilliis, veuille* tj.
Voulentt, volonté.
Voulsisse, voulusse. 147. Voulsist, voulût. 33, 191. Voult, voulut. 99
Voultyz {sourcilz}, sourcils arqués, bien plantés. [P. 40.} Vôyse, aille. 64.
Vueil, vœu. 7S, V. 9.
Vueil, velu. H.
Y
V, il. « Cy sçay bien comment y m'en va. n 108.
Ydoine, propre, idoneus.
Ypocros, vin sucré et épicé.
78. 198
Ysnel. prompt, alêne. 74. Ythikr, 59.
Yver, hiver. 85. S.
YvoN, prénom commun en Bretagne. 1(7.
TABLE DES MATIÈRES.
Pages.
PRÉFACE. v REMARQUES PHILOLOGIQUES. XXIII CLÉMENT MAROT AUX LECTEURS. 1 MAROT AU ROY FRANÇOIS 1er. 5 LE PETIT TESTAMENT. 7 LE GRAND TESTAMENT. 2t Ballade des Dames du temps jàdis. 34 Ballade des Seigneurs du temps jadis.. 35 Ballade en vieil français. 36 Les Regrets de la belle Houlmiere. 39 Ballade de la belle Heaulmière 4'2 Double Ballade sur le même propos 45 Ballade que Villon fait à la requeste de 8a mère, pour prier Nostre Dame 55 Ballade de Villon à s'amye. 57 LayouplustostRondeau. 59 Ballade et oraison 69 Ballade que Villon bailla à un gentilhomme. 74 Ballade. 76 Ballade intitulée Les CoK~'e~t~ de
Franc-Gontier. 78
Pages.
Ballade des femmes de Paris. 80 Ballade de Villon et de la Grosse Margot 83 Belle leçon de Villon aux enfans perduz 86 Ballade de bonne doctrine à ceux de mau-
vaise vie 87 Lays. go Rondeau 95 Ballade par laquelle Villon crye mercy à
chascun 98 Ballade pour servir de conclusion 99 POÉSIES diverses
Le quatrain que feit Villon quand il fut
jugé à mourir 101 L'Epitaphe en forme de Ballade que feit
Villon pour luy et ses compagnons
s'attendant estre pendu avec eulx 101 La requeste de Villon à la Cour de Parlement. io3 Ballade de l'appel de Villon. 104 Le Dit de la naissance Marie 10 5 Double Ballade. 107 Ballade Villon 110 Epistre en forme de Ballade, à ses amis 1 1 1 Le Débat du cueur et du corps de Villon. 1 1 3 La Requeste que Villon bailla à Monsei-
gneur de Bourbon. Il 5 Ballade des proverbes 116 Ballade des menus propos. 117 7 Ballade des povres housseurs 119 Problème ou Ballade au nom de la For-
tune 120 Ballade contre les mesdisans de la France. 121 1 Le Jargon ou Jobelin de Maistre Franfois
Villon 124 POÉSIES attribuées a VILLON
1. Rondel i33
Pages.
Il. Rondel 133 III.Rondet. z34 IV. Rondel. j35 V.Rondel. 135 VI. Rondel. i36 VII. Rondel 136 VIII. Ronde! 137 IX. Rondel. 137 X. Rondel 138 XI. Rondel 13g XII. Rondel 139 XIII. Rondel. 140 XIV. Ballade pour ung prisonnier 140 XV. Rondel. 14! XVI. Ballade. 142 XVII. Ballade morale. 143 XVIII. Ballade. 14.4 XIX. Ballade. 145 XX. Ballade. r46 XXI. Ballade joyeuse des Taverniers 147 XXII. Monologue du Franc Archier de Baignollet 150
XXIII. Dialogue de messieurs de MallepayeetdeBaillevent. 164
XXIV. Les Repeues franches de François Villon et de ses compagnons.. 178
Balladedel'Acteur 182
Ballade des Escoutans t83
La Repeue de Villon et de ses
C3'?!g')tOM~ t86
La manière d'avoir du
poisson. t8y
La manière d'avoir des
trippes. 190
La manière d'avoir du
pain. 191
La manière d'avoirdu vin. 192
Lamanièred'avoirdurost. 191
Pages.
Seconde Repeue, de l'Epide-
mie 195
La troisiesme Repeue, des Tor-
checuls 199
La quatriesme Repeue, du
Souffreteux 206
La cinquiesme Repeue, du
Pelletier 210 o
Sixiesme Repeue, des Gallants
sans soucy 2 z
La septiesme Repeue, faicte au-
près de Montfaulcon 2 1 5
NOTES 220 Glossaire-Index 227
ADDITIONS ET CORRECTIONS. Le nom de M. Campaux est partout écrit par erreur CAMPEAUX.
Les deux premiers huitains de la Ballade p. 74 donnent en acrostiche Ambrajse DE Lorede, peutêtre le nom du gentilhomme pour qui cette pièce fut composée.
L'envoi de la Ballade de la Grosse Margot (p. 84) donne en acrostiche le nom de Villon. Fille en chief(p. 9 1), fille coiffée de ses cheveux. Les Coups orbes (p. 11 5) sont des coups produisant des contusions, des bleus.
Cousteleç comme chiches (p. 171) peut se traduire par « à côtes, comme des pois chiches ».