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Titre : Le Figaro. Supplément littéraire du dimanche

Éditeur : Le Figaro (Paris)

Date d'édition : 1924-08-16

Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb343599097

Notice du catalogue : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb343599097/date

Type : texte

Type : publication en série imprimée

Langue : français

Description : 16 août 1924

Description : 1924/08/16 (Numéro 280).

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k273548v

Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-246

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 15/10/2007

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cet hommte d'Etat somme le romancier de venir déjeuner avec lui sur l'heure,. Dumas vole à Paris des lèvres ministérielles sort une .proposition merveilléuse. Dumas accepterait-il de partir en mission pour Madrid l'on va fêter le mariage du duc de Montpensier avec l'Infante, ? De Madrid, il courrait à Cadix un bâtiment de l'Etat l'y viendrait prendre et le mènerait en Algérie où i\î. de Salvandy, encore sous le charme d"un (récent voyage, lui promet <qu'il trouverait matière à admirer, à conter, à décrire. Une seule condition il faudrait partir le lendemain. ̃'• Dumas ne barguigne pas il se précipite* vers Saint-Germain, rencontre son lils un grand garc-in.de vingt-deux ans, indécis encore entre l'amour et la, littérature enrôle cet Alexandre en cpïête d'un emipire, c't pêche son domes-

tique chez Auguste Maquet et chez île

peintre Louis Boulanger le lendemain soir, tous quatre prenaient le train pour Bordeaux et, de là, dans une voiture de voyage achetée royalement treize cents francs, s'élançaient vers l'Espagne.

Arrives à Madrid tout juste pour les fêtes, ils avaient la. bonne fortune de se heurter nez à nez, dès leur première sortie par les rues, à Desbarolles et à Giraud ceux-ci, qui arrivaient d'Andalousie, acceptaient d'y retourner avec eux tous les six constituaient désormais une paradoxale caravane. Desbarolles, qui parle espagnol, est « l'interprète juré » de la troupe Maquet l'économie « comme il a une montre à répétition, la seule qui marche, il sonnera l'heure » Boulanger est « capitaine d'habillement », Giraud « caissier > chargé de porter les fonds sociaux « dans une ceinture de cuir fixée autour de sa taille » e.t, en outre, « ordonnateur"gélierai des vivres » Dumas père reçoit le titre solennel d' « Amo », qui veut dire « maître, directeur, propriétaire ». Et Dumas fils ?. Le « petit Dumas », 'comme l'appellent gentiment ses amis, papillonne sur les flancs de la. colonne volante tantôt, de quelques mots ironiques, il rabat violemment les trop pétulants enthousiasmes tantôt, au conil signale de quelques exclamations admiratives les Carmen, les Concha, les Manilla, dont l'œil noir étincelle au passage des Français il ne craint point, pour admirer de plus près ces .ardentes filles, do s'écarte.r quelques heures, voire de risquer une fugue de plusieurs jours. >

Les péripéties de cette romantique randonnée « tra los montes », Dumas père les a décrites, dans les lettres qu'il adresse, de chaque étape, ou qu'il feint d'adresser, à une indulgente Parisienne. Mais, tandis qu'il décrivait, le .peintre Giraud crayonnait. Nul doute qu'en plus de certaines toiles ou pastels dont Dumas fait mention, il n'ait dessiné plusieurs albums de croquis car cet aimable peintre de genre que sa « Permission de dix heures » rendit jadis presque populaire, et qui reste un peu injustement oublié, avait le crayon agile et facile. Le crayon c'est une façon de parler, affirme Dumas car « quand le crayon .manque, quand le fusain fait <3eTâut, .quand "fe ̃"Tpïnce.aui est absent, "quand' la plume ne répond pas à l'appel, Giraud dessine avec un charbon, avec une allumette, avec une canne, avec un cure-dent ce qui frappe surtout son esprit subtil et railleur, c'est le. côté ridicule des objets son œil est comme un des miroirs désenchanteurs qui exagèrent et déforment toutes les physionomies. » De Paris à Cadix et d'Oran à Bizerte, en Espagne, en Algérie, en Tunisie, Giraud a donc dû dessiner au moins autant que Dumas a écrit. L'un des albums qu'il rapporta du voyage est couvert d'études, dont plusieurs sont assez poussées, do brèves et amusantes notations, de pochades spirituelles ce document inédit, dont nous devons la oominMinidation à l'obligeance de ison possesseur, M. Girard, l'architecte con-nu, est, au texte de Dumas, la plus vivante des illustrations et la plus imprévue. Qui l'eût cru ? Il atteste, jusqu'en maint détail, la véracité du fougueux voyageur.

Il confirme, entre autres, certain épisode héroï-comique pour le récit duquel' on pouvait craindre que l'imagination du romancier n'eût collaboré avec son souvenir. A Villa-Méjor, dans la nuit du 22 au 23 octobre, la berline qui contenait quatre des voyageurs tandis que Je grand et le petit Dumas la précédaient sur des mules versa, de façon suspecte, au bord d'un précipite où le hasard seul l'empêcha de s'écraser et sept hommes armés, 'non moins suspects, 'vinrent aussitôt l'entourer il fallut montrer les fusils pour les tenir en respect.

Dumas conte la scène en plusieurs chapitres où la bonne humeur souligne le pathétique. Invention ? '> Enjolivement ? Non la: plume et le crayon de Giraud content la même catastroplve voici, d'abord, da berline- renversée t Maquet, au fond de l'étroite caisse, parmi l'enchevêtrement des fusils et des bagages, risque d'être écrasé par Bouilanger et Desbarolles, tandis- que Giraud se hisse péniblement vers le ciel par la portière crevée à coups de poing' à la page suivante, Giraud encore, nez en pointe, cheveux au vent, « plus rapide que Mercure », court sur la route pour appeler lès Dumas au secours plus loin, un sommaire croquis montre une foule 'menaçante près de la voiture renversée. Plus loin encore, un admirable dessin à la, plus représente le bon Dumas dans la chambre de la « posada » deux honnêtes voyageurs ont pénétré par erreur éveillé en sursaut, il s'est dressé sur son lit, l'escopette au poing il tend son mufle énergique, donH'ombre se reflète sur le rideau blanc sa forte cuisse. apparaît nue entre les pans de sa petite chemiise.

̃

Et, plusieurs fois, il est arrivé que Giraud ait cédé des pages de son album) aux écrivains ses amis. Chacun d'eux y a, écrit des vers. On y lit, avec cette men. tion « Au Généralife, 28 octobre 1846 », les strophes enflammées d'Auguste Maquet que Dumas a insérées dans sa let.tre datée, le même jour, de Grenade Voyageur qui suivez lentement les chemins Du vieux Généralife aux parvis de dentelles, Voyageur qu'assoupit le bruit des cascatelles. Qu'enivre l'espalier el' orangers, de jasmins.

..•••••̃• «*»

Défiez-vous du chant des Sirènes d'ici, ~v iFoifageur il pourrait vous empêcher i'entçfljf§

Celte voix de là-bas qui vous dit, triste et tendre i «Ceux que vous oubliez vota oublieront aussi. » A cette variation espagnole sur un grand vers de Victor Hugo v Cevcxque vous oubliez ne vous oublieront pas » le petit Dumas sourit il prend. la plume à son tour, et sur la page suivante il griffonne cette parodie gamine qui, strophe .par strophe, persifle le lyrisme de Maquet

Voyageur, qui suivez les chemins mal pavés Du vieux Alhambra Maure et du Généralife, Qui sentez, en passant, monter à votre ^piffe (sic) Les bizarres parfums qu'en. route vous trouvez, Les Mauresques dessins remplacent les Etrusques Vous avez la grenade, un vieux fruit cotonneux Les aloès pointus, les cactus épineux

Accrochent en passant le restant de vos frusques! Les aimables gamins de leur ton~ arrogant, Tout -en f aisant pour Vousles plus tendres prières, Semblent, en vous jetant leurs plus charmantes ̃_ [pierres,

Vous dire: Voyageur f. nous oite le camp! Toute chose en ces lieux cherche à charmer vos [âmes

Pourtant, défiez-vous, hommes jeunes ou mûrs, Des choses que le pied rencontre auprès des murs. Pourtant, si vous trouvez quelques-rares appas, Femme aux yeux noirs ou bleus qui vous aime [et soupire

Prenez-la Vous pouvez sans scrupule vous dire: «Si nous trompons ici, l'on nous trompe là-bas! » Avec la même irrévérence un peu rude, le petit Dumas fait impitoyablement écho au madrigal qu'avant de l'envoyer à Paris son père avait enregistré sur l'album!. Ayant cueilli une « fleur tropicale », le romancier la faisait discourir ainsi pour la Parisienne qui occupait son cœur

Salut, ma sœur je fus cueillie

Dans les jardins de l'Alhambra

Par quelqu'un que ta bouche oublie

Mais dont ton cœur se souviendra

Et qui me charge de l'apprendre

Qu'un jour si Grenade est à vendre

C'est pour toi qu'il l'achètera.

Oouais pense l'autre Alexandre, qui peut-être n'aimait guère la destinataire du « poulet », et qui, décidément, ne pa-' rait pas avoir aimé Grenade tout aussitôtt de parodier, avec un coq_-â-râne à la rime

Je suis un soleil 'de Grenade

Ici planté par les Longs Bras.

Je fus pris à la promenade

Par le fils de Monsieur Dumas.

C'est à toi qu'il m'envoie et me dit de t'apprendre Qu'un, jour si Grenade est à vendre

II ne te l'achètera pas! 1

Le.« petit Dumas » n'était guère poète il méditait pourtant alors tout un recueil de vers qu'il publia l'année suivante sous le titre Péchés de Jeunesse. L'un de ces péchés, il le commit à Séville, pendant son voyage à le commémorer, il consacra plusieurs poèmes qui unissent l'influence de Musset à celle de Victor Hugo l'un d'eux figure, sous sa première forme inédite, dans l'album de Giraud

Prenez les chants, prenez les ailes

Des oiseaux et des demoiselles

Ces f leurs mouvantes des gazons }

Prenez au ciel bleu les étoiles,

Ces perles qùi brodent les voiles

Dont Dieu couvre les horizons.

Prenez aux monts, prenez aux plaines

Ombres, chansons, brises, haleines,

Parfums du sol, rayons des deux;

E-t-^e"ma -belle pmbre farouche ~rl~ Vous ferez peut-être la bouche

Mais vous ne ferez pas les yèùxf

« Conchita ». imprimie le recueil ens tête de ces strophes et une pièce voisine affirme

C'est bien le. plus charmant mélange

Et de l'Andalouse et de l'ange

Par Dieu sur la terre envoyé.

On trouve, dans l'album de Giraud, le portrait d'une Concha un peu lourde, et, non loin, les formes gracieuses de plusieurs danseuses andalouses. Laquelle de toutes ces sveltes créatures aida le jeune Dumas à oublier quelque temps celle qui, bientôt, allait s'imposer à son souvenir sous l'aspect de la « Dame

aux Camélias » ?

aux Camélias H ? Maurice Levaillant.

–<

Au soleil de Numidie Sous ce titre, M. F. Ceccaldi fait paraître un recueil de poèmes inspirés par l'Afrique, où l'auteur officier a séjourné. Nous sommes heureux d'en détacher les deux sonnets suivants, où nos lecteurs retrouveront la belle tradition classique.

L'EXEMPLE

Par le steppe sans borne où le Romain,~jadis, Vouant au dieu. des champs son lourd harnais de

Liait au joug des bœufs'farouches son araire [guerre, Et couchait sous la faux l'or mouvant des épis. Suivant l'exemple antique, à ton tour, tu poursuis, Par les fauves guérets la tâche séculaire,

Et juin voit le blé roux s'amonceler sur l'aire Dans le champ ancestral à ton effort soumis Qu'un souvenir sacré remonte ton courage, Si dans l'effort patient du robuste attelage La stèle d'un tombeau surgit de ton terrain. Et, jaloux de marcher sur la virile trace

De l'ancêtre inconnu, qui revit en ta race, Enf once au cœur du sol le pesant soc d'airain 1 AUX RUINES DE BYRSA

Heurtant sa proue de bronze au granit du Cothon, A ces rives, jadis, aborda la Galère,

Et la f oule innombrable acclamait la bannière Du vainqueur du Tessin ou du suffète Hannon. Puis, quand fut exaucé l'âpre vœu de Caton Il pressentait pour Rome une gloire éphémère > En redisant, pensif, la prophétie d'Homère, v Sur ces mêmes rochers, un jour, pleura Scipion 1 Or, qu'a-t-il survécu de Malqua, des Mappales, De Mégare et Byrsa, des portes triomphales, Des temples de Baâl et des muts orgueilleux Que reste-t-il ? Pourtant,^ oublieux de l'Histoire, L'homme croit acquérir T impérissable Gloire. O Carlhage dis-lui comment meurent les Dieux l

.• 'T. F. Ceccaldi.

'̃- *»̃ ̃

1 Sonate au clair de lune Dans les musiques retracées

Par vos doigts souples à me plaire

J'ai retrouvé l'itinéraire

Identique des mains passées. '̃}

Même lune sur la fenêtre,

Mêmes lumières somnolentes,

Même douceur des heures lentes

Et du spirituel bien-être.

Sur les touches noires et blanches

D'où surgissent les mêmes plaintes,

Quoi 1 sont-ce pas les mains défuntes

Qui se mirent et qui se penchent l

Quoi, sont-ce pas les mains penchées

'Au semblable miroir des heures,

Sur cette albe sonate où meurent

Nos deux extases rapprochées

0 douce lune 6 douce nuit t

Splendeur des lumineux arpèges 1

Neiges d'antan, ô molles neiges

jbepaspé reoienj et s'enfuit.

Jean Dars,

Le beau prisonnier de Gisprs Août 1923; Arrêt de l'auto sous un

orme. Nous descendons. Cent touristes ont formé des groupes sur l'esplanade 'du_ vieux château. Leur but't Monter'à la vieille tour et descendre par un escalier tortueux, aux, lueurs de la lampe que porte le concierge, dans le souterrain" yécut, durée d'Olympiade, un jeune chevalier qui eut beau roman d'amour, dit-on, et grandes prouesses guerrieres. ̃̃;̃•̃,

Son nom était Wolfhang de Polham. Sa protectrice, Marie de Bourgogne, ;qui' devait épouser le fastueux Maximilien, empereur d'Allemagne. Né au castel de Gratz, en Autriche, il ,clut courir ses pre-' mjers tournois dans les temps troublés que. traversait Charles -le Téméraire,- D'esprit, aventureux, mais cultivé, prenant Duguescliti en émule, il voulut* comme les fils du graf, rompre desl lances, avant d'avoir vingt ans. Au, ehajnp clos, belles dames et barons «devaient remarquer son adresse. Figure ronde, yeux bleus et haute taille sont marqués dans son portrait. Homme d'épée, il. veut se battre à' sang. Or, querelle de Bourgogne contre France devint sienne, après avoir -servi de secrétaire, et «mieux peut-être, à Marie, dont la politique s'opposait aux projets de Louis XI, allié secrètement aux gens de Gand.

Polham obtint de commander un corps des cavaliers flamands. Engagé le 7 août 1479 devant Guinegatte, son impétuosité; lui ordonne d'aller rompre les lignesfran-j çaises. Il se jette à corps perdu dans une mêlée, frappe dur et reçoit les plus rudes coups. Désarçonné, pris au croc, jeté parmi des hallebardiers cernés, conduits.à Arras, on le comptait pour bonne prisé; a écrit Baraijte.. Louis XI, désigné .alors « Patte-pena», lequel savait coordonner des plans déjà machiavéliques, infqrmé que le favori/ de « Mme de Bourgogne » était tombé en son pouvoir, ^se déclarait moult content. On l'entendit rire bruyamment quaûd'liii- parvint une Supplique de Maximilien, r^élui-ci priant qu'on rendît libre, et sans Re'tard. même par rançon forte, son.'à^riié Wolfhang. i Hé, je vais le mettre en_bele .vue, fut la réponse verbale du terrible châtelain de Plessis-les-Tours. C'est que rancune il gardait à Maximilien, qui avait fait assassiner Raymond, capitaine de Malaunay. .•̃ Tristan, le bourreau, reçut l'ordre d'aller, en représailles, pendre cinquante; des principaux prisonniers de Guinegatte, tous enfermés à Arras. Tristan partit, f ai- sant porter vers Picardie l'échelle et les cordes. Mais le Roi, que venait de conseiller La Ballue, se prit à décider, quand Tristan était déjà loin des rives de la Loire, de garder Polham en otage. Céans, le prince fit appeler Robert Biotte, seigneur de La Roche-Guyon, et lui demanda r Peut-on garder sûrement, en notre bonne forteresse de Gisors, un homme qu'il me faut tenir à merci?

Mon Sire, la place est forte et la prison si basse qu'en son intérieur le diable même ne pourrait sortir sans ma pe,rmission. ,'• s t-Jk

-Dtt-çorps' -dej^ardej --eombi€if-de»'êe-i

grés à descendre? ̃'̃* -••̃̃

Soixante-quatorze. cachot est dans une demi-obscurité. Trois portes de fer-à. franchir pour arriver au sol. Et des Chaînes de détention sont solides.

Cela doit bien garder notre Poulain. Or donc, féal serviteur, courez après messire Tristan et qu'il vous livre le chevalier allemand. Vous le mènerez de nuit et,- ayant les yeux bandés, à Gisors. Que dans le' château son nom ne soit jamais prononcé. Faites-lui ferme défense d'en user. Traitez-le par nourriture su-ffisante et, s'il sait mériter quelque douceur, ^octroyez petites faveurs, femmes exceptées, de par notre royale munificence, au nom du bienheureux saint Jacques. Que faire si le chevalier risquait une: tentative d'évasion?

Jouvenceau à sermonner, après avoir raccourci ses chaînes. .11 Il écrivit un ordre.

Le 9 octobre, dans une nuit pluvieuse, une petite charrette franchissait le pontlevis du formidable château élevé en Vexin par Henry II d'Angleterre. Quatre hommes d'armes en firent descendre le che- valier: Biotte le précéda, une fois le ban- deau enlevé, à son logement, sans qiae.;le captif montrât d'étonnement. Il reçut, l'assurance d'un traitement humain etrrie' put reconnaître l'étendue du cachot que le lendemain, quand les premiers rayons du soleil vinrent à passer une haute meur- trière ouverte au levant. La prison était vaste, les murs maçonnés d'un ciment blanchâtre, avec saillies de pierres fria- bles, jusqu'à hauteur d'homme. Un matelas bourré de paille, une cruche en poterie jaune et, pour l'aise, un puits rond et très profond, creusé au centre. Polham était vêtu d'une longue casaque grise, cou- j vrant du bon linge, chaussé de brodequin^, coiffé dé chaperon rouge. Une chaîne fixée à ses poignets avait demi-aune de longueur. On devait placer ses repas (ordinaire de la garnison) sur une planche, ce qui l'obligeait à se coucher pour manger. Un geôlier, toujours déférent, le visitait deux fois le jour. Chaque dimanche, le gouverneur descendait, et parfois il informait de quelques nouvelles « ébruitées à l' alentour ». x ̃

Marie de Bourgogne connaît la captivité de son favori. Elle presse Maxitnilien d'intercéder en sa faveur. Les messagers se rendent à Plessis quand un traité vient. dé mettre en paix l'empereur et Louis XI: Celui-ci ruse et biaise, disant, suivant là formule Promettez beaucoup et ni? nez qu'à .loisir.» :{: Parbleu, dit-il à. un ambassadeur, ;fl;e cher homme, bon garçon, s'en ira quelque beau jour vers ses pénates. Nous y. peiïi sons, dans notre charité.

Le rusé compère s'avisa de passer un marché. Connaissant que le sire de Bossut possédait, en Flandre, une meute de lé- vriers, les plus beaux, et qu'il désirait avoir, il demanda à échanger l'homme contre les bêtes. Bossut refusa net. Il dut pourtant céder, en 1480, aux très vives instances de Marie de Bourgogne, qui appuyait ses prières de trois mille ducats. Mis en possession des lévriers, Louis XI fit annoncer, par M. Du Bouchage, son ambassadeur à Vienne, qu'il avait maintenant ides raisons particulières pour me pas se dessaisir du chevalier, et il qualifiait son œuvre « Un trait de gentille industrie. »

Quelques jours plus tard, Biotte, venu à Plessis, eut à répondre aux questions que posait 3e Roi. ̃̃.̃

Ma foi, cher Sire, le jeune homme

[guerre,

gayde belle contenance. Poli, ferment en pîières.iLjtMî ;ne lui voit d'humeur que dans l^youFoées. sans ^sojejl. Qu'il voie clair et il s'emploie à graver des imageries sur la muraille, eh face de la meurtrière. V.ous pouvez le laisser vieillir chez anôi, et la fièvre quartaine ne passera pas son guichet que j'ai fait verrouiller en bonne sûreté. Si on m'assiégeait jamais, et Sire Maximilien doit y songer, je le ferais passer par le souterrain en tour de Naufl es. De cette tour, les bons chevaux nous mèneraient à Château-Gailland-d' Awdeli, Le gouverneur avait cédé aux prières de Polham en lui remettant un grand clou forgé et un pavé qui pouvait luiservir de marteau. Quand la lumière éclairait la partie, sud du cachot, Je prisonnier représentait, sur les saillies du mur, dés scènes .de la, Passion,, en chantant des psaumes, puis des joutes de chevalerie et des armoiries, montrant parfois un talent de sculpteur qui a du métier. Sa patience et son courage avaient pu établir une sorte d'escalier aboutissant au bas de la meurtrière. « Là, dit le chroniqueur Blangis, il pouvait contempler un coin de l'horizon bleu du ciel, ainsi: que les nuages roses qui y. -couraient librement. Il aimait surtout, au soleil levant, à jouir du réveil 4e la nature, et les impressions qu'il en éprouvait le jetaient dans des rêveries profondes, car il restait longtemps, dit-on, immobile ,à la même place, triste et songeant, sans doute, à des temps plus heureux. La nuit venue, et quand le sommeil aie pouvait clore sa paupière^ il venait encore pour respirer l'air pur de la vallée qu'embaumaient parfois les brises nocturnes de la forêt voisine dite Le i'BuissOi Bleu, ou bien consulter son étoile autrefois si brillante et dont l'éclat lui semblait vaciller. Puis son attention, ramenée plus près de lui, ilr semblait; écouter avec plaisir le bruit des eaux dé l'Epte qui, roulant de leur lit paisible dans les fossés du château, venaient murmurer à ses oreilles. Peut-être enviait-il le sort de cette'jolie rivière, si libre dans son cours, dont le soleil allait bientôt réchauffer les ondes de cristal, tandis que lui, jeune encore, languissait dans une prison sans soleil. Y `

;polham se rattachait, ;commë tout prisonnier de guerre, à l'espérance d'être prochainement libéré. Un coup terrible lui fut porté en mai 1482. Le gouverneur informait le chevalier « Que Marie de Bourgagne prenait, près de Bruges, les plaisirs de la chasse au faucon, quand son cheval, effrayé des sonneries d'un cor, fit un écart et la renversa. Blessée grièvement en heurtant la racine d'un arbre, elle ne voulut pas, par pudeur, que les médecins vissent et sondassent sa plaie. Le mal ayant fait ,.(iea;'p|Qgrès rapides, elle était morte, âgée "cle vingt-cinq ans, le 27; mars 1482, » Biotte vit le prisonnier verser des larmes. Pleurait-il l'amante ou la protectrice? Le secret, s'il y eut vraiment entre eux autre affaire qu'idylle, ne devait pas passer ses lèvres. Mais une manifestation, significative, allait suivre, après quinze jours de deuil. Le graveur, qui avait dessiné l'écusson de Bourgogne, au chef chargé de cinq. cœurs, perça celui du centre d'une pointe puis il dessina Un corps de femme inanimée, dame de beauté, couvrant un suaire, plaçant dessus un cœur ouverjt'et saignant. Et il ne travailla plus. Et .il ne .chanta,plus, -Et il .resta .iimnobiïe des jours entiers. r! i i :• u Louis XI; qui vivait entre Tristan et, et, Olivier, allait souffrir les grands maux physiques. Violent, il voulut éloigner une mort prête à passer sa porte. Ayant appelé à son chevet le vénérable François de Paule, (Le moine ordonnait

Seigneur Roi, mettez votre âme en paix. Libérez les prisonniers et Dieu absoudra peut-être vos fautes.

Le ,27 août 1483, ordre est envoyé au gouverneur de Gisors" d'acheminer Polham vers Bruges. Le. chevalier, âgé de vingt-six ans, avait passé près de quatre années dans le cachot. Il monta un palefroi rpuan et s'en fut jokidre Maximilien quilë noTnma..chevaiiei' de la Toison d'or ;.et.;liai, confia, lis:, plus importantes mis-siohsr:"

A Gisors, le souvenir de Polham demeure. Qui descend dans sa prison se prend à admirer les travaux du sculpteur. Une compassion émeut au récit de la triste histoire du bon chrétien ayant passé un long temps à représenter les images des vieux livres d'heures, faisant copie d'enluminures, admirées sans doute, à Liège, à côté d'une personne qui le choyait, ..quand tout souriait à leurs jeunesses. Edouard Gachoi.

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Au tombeau de René I;e 19 juillet dernier, je suis allé revoir la tombe, humble, et solennelle tout ensemble, où repose, depuis le 19 juillet 1848', Prançois-René- de Chateaubriand. Le tombeau « au péril de la mer » du grand écrivain fut un sujet tellement exploité, ces temps-ci, par les gens de plume, qu'il n^èst peut-être pas mauvais que l'un d'eux apporte aux admirateurs de l'écrivain de rassurantes nouvelles. Dans le Temps, tout récemment, mon sympathique confrère Emile Henriot m'a devancé mais, après avoir écrit que tout va bien, sans plus, il bifurque dans l'historique, d'ailleurs si curieux, dès longues négociations qui aboutirent à. l'accomplissement du vœu suprême ide Chateaubriand. Je me contenterai, pour ma part, d'exposer les bonnes raisons que l'on a de penser que le grand Malouin ne sera pas troublé de sitôt dans son sommeil. Un joli temps clair d'été égayait l'aprèsmidi où, accompagné d'un ami, je m'engageai sur l'étroite chaussée, découverte à" mer basse, qui relie l'îlot, du Grand-Bé à la plage familiale de « Bon-Secours ». Cette chaussée,, soixante-seize années plus tôt, jour pour'jour, passa l'immense cortège qui suivait la bière de René, était alors bien primitive. Aujourd'hui, sur ses pierres lisses et durement scellées entre elles, se risquent les talons hauts des bel.les visiteuses.

L'escalier rugueux conduisant au sommet de l'îlot et qui fut creusé à l'occasion dès obsèques, aboutit depuis peu à une sorte de chemin de ronde en sorte qu'il est facile désormais de faire le tour du rocher. Les ruines du fortin qui le couronne, de plus en plus délabrées par la double action du vent et de l'humidité, sont à, demi couchées parmi une sorte de foin marin' rèché et jaune qui accorde l'ensemble du lieu1 à la couleur mielleuse des grèves malouines.

Selon la volonté du mort, le tombeau est aspecté au couchant. Quelques marches taillées eii plein roc permettent de descendre à la plate-forme où il s'élève.' ~l La dalle de granit, sans un nom, surmou-

tée de sa croix de pierre, entourée de sa grille, est actuellement à, l'extrême pointe de cetteplate-forme. Je dis « actuellement » et ce mot a son importance ce peut être; en effet, une question de savoir si, en 1848, cette extrême pointe était aussi rapprochée qu'elle l'est aujourd'hui du pied, du tombeau. Si j'en, crois certaines gravures de l'époque que j'ai sous les yeux, si je m'en rapporte à la toile de Doutreleau qui est au Musée de Saint-Malo, il semble que l'espace compris entre la dalle et l'abîme était alors plus considérable. J'ai pu tout juste sans pourtant m'accrocher à la grille passer entre ceflui-là et celle-ci. Dans mon enfance, qui remonte déjà à pas mal de lustres, on ne pouvait guère iaire mieux.

Et pourtant, dans le tableau de Doutreleau, un des porteurs du cercueil s'agenouille facilement dans cet espace^ et, près de .lui, deux officiers, tiennent des drapeaux .tricolores qui flottent, au vent'i.. Faut-il en conclure que l'action du temps et celle de la mer se seraient exercées sur cette extrême pointe? J'ai mesuré de l'œil la hauteur qui sépare le monument des rochers fleur d'eau une quinzaine de mètres environ. En temps de grande marée, il est vrai les embruns arrosent la dalle funéraire mais l'effort vif des lames ne s'exerce que très exceptionnellement sur la pointe et il est difficile, d'admettre qu'en soixante-seize années elle ait pu être usée au point où semble l'indiquer la peinture de Doutreleau. Il n'y a. pas de raison de douter que cet artiste ait traité son sujet sans documents précis, si même il n'a été le témoin de la cérémonie mais il ne faut pas oublier que, bien que minutieux, les peintres, à cette époque, pour des raisons de décorum, n'hésitaient pas à donné, au besoin, de légères entorses à la réalité dans les tableaux officiels. Or, il a pu paraître préférable à Doutreleau que des drapeaux tricolores flottassent à l'extrême pointe du Grand-Bé au moment solennel de l'inhumation. Cela laisse à réfléchir.

Quoi qu'il en soit, lorsque j'ai longé, non sans précautions, le bord de l'abîme, au pied du tombeau, j'ai pu m'assurer que bon granit sonnait « plein » sous mes semelles et que, là, toute crainte semblait injustifiée.

Mais, selon M. l'abbé Descottes, vicaire au Mont-Dol et géologue, qui, le premier, â jeté le cri d'alarme, ce qui constitue le danger c'est la faille qui existe dans de roc, sous la plate-forme. Un jour venant, sous l'action du flot, cette faille pourra s'agrandir des glissements s'ensuivront et les cendres de Chateaubriand s'en iront à la mer. M. l'abbé Descottes, il est vrai, a ajouté que cela était possible, probable même dans un temps indéterminé. Ceci, déjà, nous rassure.

D'après un nouvel examen, ce temps serait encore très lointain.

Aussi la municipalité de Saint-Malo s'est-elle beaucoup moins émue de cet état de choses que les journalistes. Ceux-ci ont trouvé dans l'opinion, pathétiquement exprimée, d'un géologue, l'occasion de reparler du grand romantique qui dort à l'extrême pointe d'un rocher, à deux pas ide son berceau, en face de la mer et du soleil couchant. Il faut les en féliciter il est excellent que de telles ombres soient évoquées, de temps à autre, pour qiie-4a-feale -ae-perde ni le sens ,4% la grandguÊ ui Je. souvenir, .de ses

gloires. '̃••̃

Joseph-Emile Poirier.

POUR UNE ~S~YIlI/üd °ôa

Brûlante de f eux sacrés,

Corps céleste et cœur de femme, En jouant avec la flamme

Un jour vous vous brûlerez.

Si sévère en votre blâme

Pour les sens exaspérés

(Qu'avant peu vous connaîtrez) Craignez les retours de flamme. Alors l'âme s' apaisant,

Et longs hivers s'annonçant

(Si lointain que soit le vôtre) Qui sait si, d'allègre pas,

Vous ne courrez chez un autre, Et qui ne me vaudra pas

Achille Segard.

Lectures françaises

QUELQUES REVUES

VarSté non point de la gloire, mais dé certaines réputations qui d'abord lui ressemblent Ceux qu'elles auréolent éblouissent leurs contemporains ils occupent prébendes, sinécures, et le cœur des simples, et l'esprit des habiles leurs succès accaparent les échos mais c'est à peine si leur nom, quelques dizaines d'années, leur survit. Où sera-t-il dans quelques dizaines de siècles? On peut là-,dessus philosopher car, vaut-il de survivre?.

̃̃̃̃:

SA MAJESTE SCRIBE

« M. Scribe » est bien mort mais comme il a vécu Pendant plus de trente ans, il fut roi de la scène mais quel roi débonnaire et plein d'aménité On lui a reproché son âpreté au gain, son avidité du triomphe les directeurs se disputaient ses pièces. Il fut tout-puissant et, miracle il ne fut point haï Ce miracle, M. Pierre Paraf l'explique dans un article de la Revue hebdomadaire avec beaucoup d'adresse et d'entrain, il y commente quelques lettres inédites extraites des vingt volumes où dort la correspondance de l'illustre dramaturge. On y trouve les lettres qu'il recevait de tout Paris, de toute la France et, l'on peut dire, de toute l'Europe ̃; eil outre, les brouillons de quelques-Unes de ses réponses. Ces papiers permettent à M. Pierre Paraf d'esquisser un portrait un peu différent de celui qu'avait consacré la légende. Scribe fut peut-être avide mais il ne fut point avare, et, surtout, il fut bon

Il eut la main toujours ouverte, le sourire heureux des enfants gâtés de la fortune. Combien de jeunes trouvent en lui l'appui matériel et moral qu'ils sollicitent! I Toutes les demandes de secours de sa correspondance portent la mention « secours accordé », et nous avons surpris, dans un de ses carnets, ces lignes « J'ai le plaisir d'inscrire aujourd'hui la somme de 500.000 francs que j'ai donnée ou prêtée à mes amis. » Un jour, c'est une jeune fille qui écrit des tragédie en cachette de sa famille, et à laquelle Scribe, cordialement, envoie son encouragement. Que de vocations il encourage, que d'aspirations imprécises il sait éclairer et mettre au point! ¡'.

Les plus glorieux auteurs lui écrivent avec une cordialité nuancée de déféreucç.

Guizot le supplie de venir dîner chez lui en compagnie d'une famille anglaise qui!- ne veut point quitter Paris sans l'avoir* contemplé car, ajoute-t-il, flatteur, « Vous êtes plus européen que vousj croyez » Buloz, directeur de la Co-f médie-Française, le conjure de lui donner des pièces et d'apprivoiser quelquesunes de ses plus farouches actrices, à commencer par la sauvage et exigeante Rachel Wagner lui envoie, en un français curieusement germanise, un premier scénario du' Vaisseau Fantôme, qu'il appelait alors le Hollandais volant et que Scribe eut grand tort de dédaigner Sainte-Beuve, enfin, à la veille de remplacer Casimir Delavigne à l'Académie, lui fait ces déclarations presque imprudentes, qui éclairent d'une vive lumière son rôle équivoque dans la seconde partie de la bataille romantique

̃Quant à l'autre, regret tout 'littéraire que vous m'exprimez, cher monsieur, il faudrait causer pour s'expliquer. Je n'ai jamais aimé le drame moderne tel que l'ont fait Hugo et Dumas, et je n'y ai jamais reconnu le moins du monde l'idéal que je conçois à cet égard et puis je crois que chacun doit rester dans sa nature. Delavigne, en devenant vraiment classique dans le vrai sens, dans celui de Sophocle et des vrais maîtres, aurait conquis, à une certaine heure, la po- sition d'Ingres en peinture. Au lieu de cela, il a fait, non .pas transition (car rien n'est venu) mais transaction, ce qui n'est jamais, bon eu art et en critique c'est vous dire que je ne crois pas en faire. Je ne saurais exprimer ce que je ressens contre les énormités qui ont eu partie déconcerté mes espérances mais il est des points sur lesquels je tiens bon et me flatte de n'avoir en rien déserté mes convictions premières. Il m'est très égal que Mme de Girardin vienne ma dire que je fais de la réaction pure et simple et je ne me donne pas la peine d'y songer. Mais si vous me le dites, je me permets de vous dire non! et que vous fous méprenez complètement ce qui tient peut-être à ce que vous n'attachez pas la même importance que moi aux points purement littéraires sur lesquels je suis resté le même* De tels aveux supposent que Sainte* .Beuve: avait bien de la confiance dans la discrétion de son correspondant ils montrent aussi le cas qu'il en faisait alors Et, cependant, qui se rappelle aujourd'hui les cinq à six cents pièces écrites ou signées par M. Scribe? Qui songerait à en dresser la bibliographie ?

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SM.M.M. + A.R.= PARALLELEMEN T On établit, au contraire, et selon les lois d'une stricte et originale méthode, la bibliographie des minces recueils de Paul Verlaine qui, toute sa vie, connut peu la gloire et ne connut point l'argent notre collaborateur et ami, M. François Montel, qui, pour édifier cette œuvre de grand goût et de sûre érudition, n'a épargné ni les plus amusantes, ni les plus fastidieuses recherches, vient d'en publier la seconde partie dans le Bulletin dit Bibliophile. Il ne se contente point de décrire chaque livre du poète, de désigner les particularités de sa publication et de son tirage, d'indiquer, par exemple, que pour faire imprimer ce chef-d'œuvre, Sagesse, Verlaine dut verser à l'éditeur, une provision de six cents francs il restitue encore l'histoire du livre avant sa publication c'est-à-dire qu'il a cherché tous les; journaux, toutes les -revues, -où. les divers", poèmes ont d'abord. -paru et il rédige de brèves notes historiques qui, tantôt, résument la fortune du recueil, tantôt en éclairent le sens et ila composition. L'une de ces notes, qui utilise heureusement quelques, documents rares conservés par le bibliophile averti et lettré qu'est M. Georges-E. Lang, jette une lumière imprévue sur l'un des recueils de Verlaine les plus équivoques et discutés Parallèlement

Parallèlement à Sagesse et A mour, dit la préface, et aussi à Bonheur qui va suivre. On retrouve, en effet, dans Parallèlement conçu par Verlaine dès 1885 en même temps qu'Amour et Bonheur, un lien matériel avec ces autres oeuvres.

Cependant une lettre de Verlaine vient jeter quelque trouble dans cette explication officielle. Cette lettre, écrite à l'hôpital, est datée du 11 octobre 1887 et le poète y dit à son correspondant

« Quand vous verrez Vanier, dites-lui que la pièce de Parallèlement comprise dans Ja série Limbes et qui est dédiée à SM et. AR doit avoir cette dédicace modifiée en SMMM et AR, ce qui veut dire Sophie Marie Mathilde Mauté et Arthur Rimbaud (note pour ,les bonnes âmes qui me biographieront quand je reposerai dans la nuit tranquille). »

Cette dédicace n'a subsisté sous aucune forme dans Parallèlement

Sans doute Verlaine a-t-il craint que l'allusion parût trop claire mais M.' François Montel a raison de croire qu'en écrivant son titre un peu énigmatique, il pensait à sa femme et à Rimbaud, « les deux pôles entre lesquels la tragédie de sa vie s'est jouée, les deux routes qui fuyaient sans jamais se rencontrer. parallèlement « et,'comme le « pauvre Lélian » l'avouait un jour à sa mère, en ricanant, et en rapprochant les deux photographies fatales, .« les deux êtres qui l'ont fait le plus souffrir ».

LE « FAMILIOTISME »

II n'avait, à aucun degré, le malheureux grand homme, ce sens de la famille que M. Jean Rostand, avec une perspicacité amère et une sympathie amusée, définit dans les Œuvres libres ce sixième sens, il l'appelle, d'un néologisme aux alJ lures joliment scientifiques le « familiotisme »

C'est l'amour de la famille. Non pas seulement de la petite famille immédiate à/yed qui l'on partage le toit, mais de..la fâinillei plus vaste, qui embrasse les •païënts divers, les collatéraux et les alliés.

Ce sentiment qui participe de l'ins-i tinct grégaire, se manifeste dans les cir-i constances les plus inattendues il est bienfaisant et moralisateur

Il convient que, de temps à autre, on sei retrempe au milieu familial;, on y récupère1 de l'énergie comme un bacille atténué recouvre, dans un bouillon de culture, sa virulence originelle. On a pu frayer avec des personnes de moindre rang, prendre des. façons douteuses; peut-être sent-on faiblir en soi quelque préjugé nécessaire, le séjour intrafamilial remet tout en état. Telle jeune mariée qui commençait à se corrompre en est toute régénérée. Elle se carminait les lèvres et s'oignait les joues de blanc gras la voilà qui jette aux ordures son bâton de rouge et son pot de pommade.

M. Jean Rostand, perspicace observateur, et qui enferme en quelques lignes la substance de tout un roman, n'est pas seulement un subtil psychologue, c'est aussi un humoriste, et qui ne s'ignore

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