2425. À SA NIÈCE CAROLINE. LOV
Saint-Gratien, lundi matin [octobre I873, probablement le 27].
Mon pauvre Loulou,
Je compte être rentré à Croisset mercredi soir. Arrange-toi donc pour que j'y trouve une lettre de ma chère fille.
Vendredi [jeudi] 1 soir, après t'avoir quittée, j'ai été dîner au Café Riche où j'ai rencontré d'Osmoy qui m'a paru gigantesque Jamais je n'ai vu un homme plus spirituel et plus crâne. Il était au milieu de députés de la gauche et, bien entendu, on ne parlait que politique. Nous sommes restés ensemble jusqu'à une heure du matin.
La Fusion m'a l'air bien endommagée. Raoul-Duval vient d'écrire une lettre à Rouher où il se déclare contre la monarchie. J'espère de plus en plus qu'elle sera enfoncée. Tâche de lire les brochures de Cathelineau et de Mgr de Ségur, et tu verras ce que c'est que ce parti-là.
M. Giraud, la princesse et M. Popelin m'ont demandé des nouvelles de ma « belle nièce » que j'embrasse très fort. D'Osmoy trouve que Carvalho a raison et qu'il faut commencer par Le Candidat.
Adieu, pauvre fille chérie.
Ton vieux Cruchard.
i. Surcharge de Flaubert.
2q2G. À MADAME RÉGNIER.
Croirret, jeudi soir (Jo octobre I873].
Madame et chère confrère,
En rentrant chez moi, ce matin, après une absence de dix jours, je trouve votre lettre et m'empresse de vous répondre.
Carvalho, que j'ai quitté hier à onze heures du soir, avait commencé la lecture de votre manuscrit et en paraissait très content. Il m'a promis de le lire avec attention et nous en causerons lorsqu'il viendra ici, dans un petit mois. Je ne doute pas du résultat, qui sera heureux. Mais il faudra, je crois, condenser le tout.
Quant à moi, quant au Sexe faible, ledit Carvalho est refroidi et aime mieux jouer d'abord une autre pièce de votre serviteur (seul !), laquelle pièce n'est pas encore finie, mais peut l'être vers le jour de l'An.
La monarchie, grâces aux dieux, me paraît enfoncée Cependant il ne faut pas chanter victoire avant de voir les morts par terre.
A propos des morts, j'apprends à l'instant même que cette nuit, pendant que l'Opéra brûlait, mon pauvre Feydeau a quitté ce monde 1. Tant mieux pour lui, du reste.
1. Feydeau mourut dans la nuit du 28 au 29 octobre 1873.