J'intercale ici quelques pages que j'ai écrites sur le Nil, à bord de notre cange. J'avais l'intention d'écrire ainsi mon voyage par paragraphes, en forme de petits chapitres au fur et à mesure, quand j'aurais le temps c'était inexécutable, il a fallu y renoncer dès que le khamsin1 s'est passé et que nous avons pu mettre le nez dehors.
J'avais intitulé cela La Cange.
A bord de la cange
I
6 février I850. « A bord de la cange. »
C'était, je crois, le 12 novembre de fannée 1840. J'avais dix-huit ans. Je revenais de la Corse (mon premier voyage). La narration écrite en était achevée, et je considérais, sans les voir, tout étalées sur ma table, quelques feuilles de papier dont je ne savais plus que faire. Autant
dans la ville. Cigare. Chemin de fer. Le Monsieur et son chien. Paris Henriot, Feydeau, Antonia. Rendez-vous pour le Ier mai 1851, Café de Paris de 5 à 6. Ludovica dans l'escalier. Dimanche Bezet, Louvre (Ninive), Saint-Germain des-Prés. Gautier. Dîner. Soir, broc.
Lundi matin. Buridan, Fovard, Guastalla, M. Lacaille, M. et Mme Jaquier Pratier, Masquilier. Diligence. Mme Orode, flammèches. Les deux conducteurs. Voyageurs pour le commerce. Saône « Ce sont des cheveux de la baronne », petite redingote. Lyon. Gleyre: Rhône. Valence. Avignon. Gros monsieur. Marseille. Cauvière. Clot. Il signor Valentino. « La beauté de mon corps. » Café chantant. Pantomimes. Un monsieur et une dame. Dimanche matin, le départ. Forte brise. Petit verre de rhum désastreux. Couché. Tout le jour, torpeur. Le lendemain, un peu mieux. Personnel du bord. M. Pélissier et sa famille, Codrika, de Lagrange, Lambrecht, perruquiers, doreurs, etc., exportés au service de Mahomet et sous la garde d'un vieux mamamouchi. Le commandant Roux, Borelli maître d'équipage, le docteur Barthélemy, le commissaire. Tout le monde réuni à table. Petit comique au milieu de grand sérieux, fini tournant dans l'infini. Quelle mine font les poissons quand ils ramassent les scories de charbon de terre échappées de la cheminée. Est-elle bien différente de celle des cantonniers de chemins de fer les trouvant sur le turf? Vie du bord tranquille, régulière, politesses. Le matin, la fixité des mêmes habitudes fait perdre toute notion du temps. Boule archi-sensuelle et qui doit extrêmement jouir du fournisseur. Passage des bouches de Bonifacio. M. Roux sur la passerelle récits du cap Horn. Homme enfoncé par un coup de bec de l'albatros. Mardi soir. Vue de Maritimo. Clair de lune sur les flots. Perception de conques roulant sur l'écume. Souvenir des guerres puniques.
Mercredi soir. Arrivée dans le port de Malte. Conversation politique et socialiste. Le soir, je bois après le dîner du cassis. Au réveil, petits bateaux peints en rouge et en vert, un planche de champ forme la retenue de la proue. Un tendelet dessus ajoute la ressemblance d'une gondole. Pour ramer, un debout qui pousse, un autre assis qui tire. Passage voûté rue du Marché où l'on vend des fromages. »
i. Le khamsin ou chamsin est le vent que nous appelons le simoun.