pour être plus puissante. Rien de grand ne se fait sans la force de se contenir, de se retenir, de s'abstenir. Il faut, selon l'étymologie et le vieil usage latin, donner un grand sens à ces mots eontinentia et abstinentia. Qui ne sait pas, en présence des choses, tenir la convoitise naturelle bridée, qui ne sait pas ne point porter la main sur ce qu'il désire, ne vivra jamais de la vie morale qui se laisse aller sur toutes les pentes, n'aura jamais de vertu.
Le renoncement est la loi de la vie qui n'est pas la vie pleine. Et ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'en prétendant user et jouir de tout elle-même sans frein, elle se bornerait au heu de s'étendre, elle s'épuiserait et se consumerait au lieu de se donner toute l'ampleur possible. Le moyen pour elle de se dilater véritablement, c'est de commencer par se resserrer. Elle avoue ainsi et déclare pratiquement son insuffisance foncière, et elle trouve, en se contenant, la vraie voie pour s'étendre. C'est que s'étendre pour elle qui est de nature bornée, c'est se dépasser1.
i. Voy. dans Bossuet l'admirable esquisse du Panégyrique de taint Benoit, sur ce texte « Egredere, Sors. »