Paris, 2 janvier
BULLETIN DE L'ÉTRANGER
ÎIESCRITS IMPÉRIAL ET ROYAL
Dans sa dernière déclaration ministérielle, le •comte Badeni, fidèle interprète du souverain, demandait à la Chambre autrichienne de ne pas perdre de vue l'urgence des mesures à prendre pour satisfaire aux besoins vitaux de la moinarchie. C'était un avertissement de ne pas laisser passer le dernier délai qui restait à courir j)our régler provisoirement les quotes-parts budgétaires de l'Autriche et de la Hongrie dans les affaires communes, et les relations économiques et douanières des deux Etats. Deux ans environ s'étaient passés en discussions stériles des co/înités constitués par lesdeuxorganes législatifs celui d'Autriche demandait à la Hongrie d'augmenter sa contribution au budget commun de l'armée, de la marine et des affaires étrangères. ̃La Hongrie, quoique se plaisant à faire montre de ses progrès et flère de s'affirmer en puissance majeure, mettait un amour-propre inattendu à refuser toute augmentation de sa quote-part. Si bien que les deux Parlements et les deux gouvernements étaient arrivés à être tout juste d'accord sur ce point de prolonger ] d'un an le statu quo réglé par l'arrangement de < 1867. Là-dessus éclatent les événements de Bohême les ordonnances ministérielles sur la parité des langues allemande et tchèques portent à l'aigu la crise latente; les Allemands organisent à la Chambre de Vienne cette obstruction sans précédent qui ne connaît aucun frein ni aucune raison d'Etat; la retraite même du comte Badeni n'arrête que les troubles de la rue et ne désarme ni-leurs rancunes ni leurs défiances; M. de Gautsch ne peut les convaincre de reprendre une activité parlementaire régulière et <le voter, en temps voulu, la prolongation du pacte budgétaire et financier avec la Hongrie.
» De son côté, l'opposition hongroise a profité de cette situation anormale, proprement révolutionnaire, pour proclamer une fois de plus sa volonté d'arriver à la séparation complète des deux Etats. Malgré les adjurations du baron Banffy et l'exemple patriotique donné par le chef du tiers parti, le comte Apponyi, l'opposition hongroise, mettant en avant un scrupule constitutionnel, a joué de l'obstruction et est parvenue ainsi à traîner, elle aussi, jusqu'au dernier jour de l'année, sans avoir donné son consentement au provisoire que le gouvernement lui présentait.
C'est pourquoi François-Joseph a dû intervez nir et, en vertu de ses prérogatives constitutionnelles d'empereur d'Autriche et de roi de Hongrie, il a décrété que l'état de fait entre les deux pays serait prorogé jusqu'à la fin de la présente année 1898. C'était inévitable. Autre< ment, de par l'entêtement déraisonnable de i l'opposition autrichienne et l'obstination très ̃ calculée de l'opposition hongroise, l'aigle à deux 'têtes était exposé à être privé de toute nourriture. Faute de ce dernier moyen de salut, l'in.'Servention du souverain, l'armée, la marine, les relations extérieures de la monarchie austro,-Jiongroise étaient privées du nerf de la guerre et de la diplomatie; à l'union douanière entre les deux Etats succédait du jour au lendemain la-guerre douanière, et une crise économique s'ajoutait à cette étrange crise politique, envisagée sans hésitation maintenant par les enragés des deux rives de la Leitha.
Les rescrits adressés par François-Joseph, empereur d'Autriche, au baron Gautsch et par François-Joseph, roi de Hongrie au baron Banffy arrêtent que la quote-part versée par l'Autriche au budget commun sera la même cette année que précédemment, soit 68,6 0/0 des dépenses communes, contre 31,4 due par la Hongrie. A ces rescrits se joint une ordonnance qui arrête pour l'Autriche le maintien provisoire du régime commercial et douanier austro-hongrois, c'est- à-dire la prolongation jusqu'à nouvel accord des mêmes tarifs et des mêmes franchises fixées par l'arrangement qui expirait le 31 décembre 1897 ainsi que l'emploi des recettes douanières venant à l'Autriche, et le régime de 3a Banque austro-hongroise. Pour la Hongrie, «ette formalité de l'ordonnance n'était pas nécessaire. Les arrangements économiques subsistent s'ils ne sont pas dénoncés, par tacite reconduction, comme on dit.
Les opposants, tant Allemands d'Autriche que .nationaux de Hongrie, affectaient de traiter par avance ces rescrits impérial et royal de coup d'Etat. Rien n'est moins juste. Le souverain n'a fait qu'user du droit prévu par l'article 14 de la .Constitution il en use à la dernière heure, sous la pression de l'extrême nécessité, et accomplit ainsi plutôt un devoir impérieux qu'il n'exerce un droit.
i Aussi est-il à croire que cet acte d'autorité ne ^soulèvera que des objections pour ainsi dire académiques, si l'on peut employer ce mot, qui
FEUÏLLETOM i>U £ciU}J3 DU 3 JANVIER 1898
CHRONIQUE THÉÂTRALE
£A l'Odéon .• Jours d'exil, de M. Rzewuski. Au Théâtre d'audition Terre basse, drame catalan en trois actes, de M. Guineca. A la Porte-Saint-Martin Cyrano ̃ée Bergerac, drame en cinq actes, de M. E. Rostaad Expédions d'abord les menus faits de la semaine.
Je n'avais pu voir l'à-propos que l'Odéon a donnépour l'anniversaire de Racine, Jours d'exil. B l'a rejoué une seconde fois et j'en suis bien aise, car il est fort joli, et l'on y reconnalt lamain de l'écrivain délicat qui l'a signé, M. Stanislas Rzewuski.
Le roi de Pologne, détrôné et chassé de ses Etats, vit seul, pauvre et triste, dans un liumble logement, avec sa fille Marie Leczinska. Leur dénuement est tel qu'ils manquent parfois de pain. Ils ont gardé la fierté de leur rang. Il ne vient plus les voir qu'un courtisan du malheur, le comte d'Estrées. Il est amoureux de Marie, mais il sait qu'il ne peut, lui, simple gentilhomme, aspirer à la main d'une princesse de sang royal. Elle est touchée du fond du cœur de cet amour si discret et si tendre. Tous deux parlent de cette tendresse mutuelle sous le couvert 'de Racine, dont on voit le buste sur la cheminée. Racine est leur poète favori à l'un et à l'autre. N'est-ce pas le poète de l'amour? Sous sun œil indulgent, ils échangent des espérances, des serments, des anneaux. Les voilà fiancés l'un à l'autre.
Il ne reste plus qu'à demander le consentement du père. Il arrive tout effaré, il vient de recevoir une lettre qui lui annonce qu'à la suite de négociations diplomatiques le roi de France Louis XV demande la main de Marie. La jeune fille, un peu troublée, déclare à son ère qu'elle s'est promise. Le père est une âme iiaute; il ne croit pas qu'une fille de roi puisse retirer sa parole. C'est le comte d'Estrées qui se sacrifie; Il représente à sa fiancée qu'elle ne saurait laisser échapper cette occasion de rétablir sa famille et d'assurer à la Pologne l'alliance oe la France.
Implique l'idée de mesure et de courtoisie, à propos d'une critique qui n'a pas précisément ces caractères. Toujours est-il que les rescrits, contresignés par les deux premiers ministres autrichien et hongrois, ne pourront y ître attaques sérieusement; les récents discours et l'attitude d'un politique tel que le comte Alpert Apponyi en est une preuve. Ils auront l'approbation de tous ceux qui, dans les deux pays, gardent au-dessus de la mêlée des partis et.des races le sens supérieur des intérêts d'Etat. Sans doute, cette intervention du monarque ne résout aucune des difficultés que soulève le régime actuel des rapports de l'Autriche et de la Hongrie; elle les ajourne toutefois; elle gagne du temps, et c'est beaucoup. Car, selon le dicton politique des Italiens: « Le temps est galant homme », ce qui est précieux à une époque où les hommes ne le sont guère.
DÉPÊCHES TÉLÉGRAPHIQUES
DES CORRESPONDANTS PARTICULIERS DU Temps Contantinople, vid Tirnova-Seymen,
31 décembre, 4 h. 15 soir.
Je suis en mesure de vous confirmer que les ambassadeurs sont tombés d'accord de s'opposer au débarquement en Crète de 4,500 recrues par lesquelles la Porte prétendait y remplacer celle de ses troupes qui sont rappelées dans leurs foyers.
Une nouvelle commission vient d'être constituée au département de la marine pour étudier la réfection de la flotte ottomane. L'amiral allemand Kalau de Hofe, qui faisait partie de la première commission, est remplacé dans la seconde par le général d'infanterie Kamphœvener pacha, ce qui, de l'avis de juges compétents, équivaudrait à un enterrement de la question.
Sofia, 2 janvier, 10 h. 50.
Le prince Ferdinand doit annoncer, à l'occasion du jour de l'an, c'est-à-dire le 12 janvier, que la question de la réintégration dans l'armée bulgare des officiers émigrés en Russie, à la suite du détrônement du prince Alexandre, vient d'être définitivement réglée d'une façon également satisfaisante pour la Bulgarie et pour la Russie, et que le jeune prince Boris, héritier présomptif du trône, va se rendre prochainement à Saint-Pétersbourg, avec ses parents, pour y être présenté au tsar Nicolas, son parrain.
CService Havas)
Saint-Pétersbourg, 2 janvier.
Le second secrétaire de l'ambassade de Constantin.ople, M. Mansourof est nommé second secrétaire à l'ambassade de Paris.
Bucarest, 2 janvier.
La Chambre des députés et le Sénat ont voté une disposition additionnelle à la convention commerciale avec la Turquie.
La Chambre a adopté la prorogation déjà votée par le Sénat de la convention commerciale avec la Bulgarie.
Le Parlement a pris vacances j' qu'au 24 _iv->re
DERNIÈRE HEURE
Le président de la République a chassé aujourd'hui dans les tirés de Rambouillet. Il est parti ce matin, à neuf heures, et sera de retour à Paris, à six heures. Les invités étaient MM. Rambaud, ministre de l'instruction publique, Marquès di Braga, sous-gouverneur du Crédit foncier, Jacquin, secrétaire général de la grande-chancellerie, Bouguereau, membre de l'Institut, J. Couvert, président de la chambre de commerce du Havre.
LES DÉCORATIONS DU 1" JANVIER Ministère de l'intérieur
Par décret sont nommés dans la Légion d'honneur
COMMANDEUR
Le docteur Goujon, maire du 12» arrondissement de Paris.
OFFICIERS
MM. Gentil, préfet de Seine-et-Oise.
De Joly, préfet de la Vendée.
Le docteur Raymond, professeur à la Faculté de médecine, médecin de la Salpêtrière.
Girard-Cornillon, président du tribunal de commerce de Malseille.
Sarazin, président du conseil général de la Marne. Faisans, maire de Pau.
Dubar, directeur de l'Echo du Nord, vice-président du syndicat de la presse départementala-
Rebatel, conseiller général au Rhône.
Muteau,-conseiller général de la Côte-d'Or. Dignat, commissaire spécial à la gare d'Orléans. CHEVALIERS
MM.Ladrat, préfet du Cantal.
Maitrot de Varenne, préfet d'Eure-et-Loir. Combarieu, préfet de la Meuse.
Sagebien, préfet des Deux-Sèvres.
Masurier, sous-préfet de Loudun.
Delsaux, ancien sous-préfet de Vouziers.
Liénard, vice-président du conseil de préfecture de Lot-et-Garonne.
Dausse, vice-président du conseil de préfecture de la Somme.
Despréaux de Saint-Sauveur, sous-chef de bureau au ministère de l'intérieur.
Hallo, directeur de la maison centrale de Rennes. Du Vivier des Vallons, commissaire central à Lille. Doyen, régisseur de l'octroi de Paris.
Carnat, officier de paix de la ville de Paris. Vert, maire du 20e arrondissement de Paris. Fontaine, maire d'Asnières.
Le docteur Barth, médecin à l'hôpital Necker. Le docteur Edgar Hirtz, médecin à l'hôpital Tenon.
1 Marie hésite; mais Bérénicen'a-t-ellepasobéi à des considérations du même ordre. Ici j'aurai voulu. Ah 1 que M. Rzewuski a manqué une jolie scène. Il eût fallu que les deux amants, se^ séparassent sur une citation de Racine, artificieusement arrangée pour la circonstance; et",si une demi-heure auparavant ils s'étaient fiancés. sur un vers du même Racine, cela n'en eût "que mieux valu. Marie, dans la pièce, se contente.; de regarder, en donnant congé au pauvre comte, le buste de Racine, qui ne dit.rien.
Ce gentil à-propos, écrit dans cette langue fluide qu'aime M. Stanislas Rzewuski, est agréablement joué par Albert Lambert, qui a de la dignité dans le roi de Pologne, par Valmont qui est tendre à souhait dans le comte d'Estrées, et par Mme Laparcerie qui est tout à fait charmante en Marie Leczinska. Mme Fromant, que nous avons vue dans des théâtres moins relevés, débutait à l'Odéon dans un rôle de femme de chambre ou de dame de compagnie. Elle est aimable à voir et dit juste.
Mme Webernousa, ce soir-là, joué la Phèdre de Racine. Nous y avons admiré son profil d'une correction idéale, la grâce de ses attitudes, sa voix nette et profonde, qui a recouvré toute sa pureté; cette artiste si merveilleusement douée a, par malheur dans l'ancien répertoire, des partis pris, où il nous est bien difficile d'entrer. Elle est toujours intéressante et curieuse mais que de fois elle nous agace Ah que je voudrais qu'elle fît comme sa devancière la grande Rachel, qui s'en allait en toute simplicité de cœur demander à Samson « Comment faut-il dire ce passage? » Mme Weber me répondra que Samson n'est plus de ce monde et qu'il n'a pas laissé d'héritier. Ça, c'est vrai, et je suis collé. Mais, au besoin, Albert Lambert père, rien qu'avec sa connaissance des traditions suffirait à la remettre dans le bon chemin. Il ne faut pas mépriser la tradition il ne faut pas mépriser Albert Lambert. Mme Jane Rabuteau est une très gentille Aricie, et Mme Grumbach une maternelle OEnone. Albert Lambert a fort bien dit le récit de Théramène; le répertoire classique ne réussit pas à Chelles, qui est un singulier Thésée Caillard ne justifie guère, dans Hippolyte, l'amour que deux femmes ont pour lui.
Au théâtre d'auditions, Mlle Maguéras, la directrice de l'institution, nous a donné un drame catalan en trois actes. Terre basse (Terra baixa), de M. Angel Guimera, traduit par M. Bertal. M. Bertal est venu lui-même nous donner dans une courte et substantielle conférence, les renseignements dont nous avions besoin pour entrer dans le sens de l'œuvre. Il ne faut pas
Le docteur Marchan* 'chirurgien à l'hôpital Boucltaut.
Le docteur Martin, uief de laboratoire à l'institut Pasteur.
Mlle Marguerite Bottard, surveillante de la clinique des maladies nerveuses à la Salpêtrière.
MM. Monnier de la Sizeranne, professeur honoraire à l'institution des jeunes aveugles.
Seize, président de société de secours mutuels à Paris. Le docteur Ramonat, médecin à Paris.
Le docteur Chevalet, médecin à Paris.
Sabatier (Guillaume), publiciste.
Pollonnais (Gaston), publiciste.
Soleau, maire d'Antibes.
Noiret, ancien maire de Rethel.
Brindel, maire d'Ussel (Corrèze).
Le docteur Bourée, médecin à Châtillon ( Côted'Or).
Le docteur Bourgeois, président du conseil d'arrondissement des Andelys (Eure).
Annez, adjoint au maire de Brest.
Le docteur Fauré, conseiller général de la Gironde.
Ranié, maire de Mérignac (Gironde).
Le docteur Berthollet, médecin à Grenoble. Jacquemard-Gérin, conseiller général de la Loire. Le docteur Fabre, chirurgien dés hôpitaux du Puy. Le docteur Darlan, médecin à l'hôpital de Nérac. Ce la Bellière, conseiller général de la Manche. Le docteur Warenghem, médecin en chef de l'hôpital de Calais.
Abadie, président du conseil général des HautesPyrénées.
Boiron, conseiller général du Rhône.
Bignon, membre de la commission des hospices d'Eu.
Passas, maire de Bolbec.
Le docteur Escorne, médecin à Saint-Yrieix. Sont en outre nommés chevaliers
MM. Rouveyre, capitaine des pompiers à Montélimar Poyer, capitaine des pompiers à Chartres; Ricoud, commandant des pompiers à Grenoble. Ministère des affaires étrangères
COMMANDEUR
M. Harmand, ministre de France au Japon. OFFICIERS
MM. le marquis de Ripert-Monclar, ministre de France au Venezuela.
Paul Revoil, ministrè plénipotentiaire adjoint au résident général de France à Tunis.
Jacquot, consul général de France à Amsterdam. Pognon, représentant de l'agence Havas.
CHEVALIERS
MM. le baron de Roujoux, rédacteur au service du protocole.
Bonnardet, secrétaire d'ambassade de 2« classe à Rome (Quirinal).
De Montrachy, secrétaire d'ambassade de 2« classe à la légation de France, au Luxembourg.
Daeschner, secrétaire d'ambassade de 2° classe, souschef adjoint du cabinet du ministre.
Méroux de Valois, consul de lre classe, à Prague. Bladé, consul de 1" classe, rédacteur à la direction des consulats.
Nettement, consul honoraire, chancelier du consulat général de France à Londres.
Ottair, vice-consul de France à Mascati.
Marzoni, sous-chef de bureau à la division des fonds. Borniche, président de la chambre de commerce et de la société de bienfaisance d'Anvers.
Paul Gottereau, architecte à Bucarest.
Sellié, directeur de la Compagnie des eaux à Constantinople.
Toussaint Suzzarini, président de la chambre de commerce française à Alexandrie.
André Weiss, professeur à la Faculté de droit do
Paris.
Mi msîèra d« la justice
Sont m uïïius ̃̃<-̃•̃•-
ornciBRs
MM. Durand, conseiller à la Cour uo cassation. Monpéla, premier président de la cour d'appel de Pau. Le Sénécal, président de chambre à la cour d'appel de Rouen.
Goy, président du Tribunal de commerce de la Seine. Lombard, directeur du personnel au ministère de la justice.
CHEVALIERS
MM. Eymond, maître des requêtes au Conseil d'Etat. Bonnet, avocat général à la cour d'appel de Paris. Mercier, président de chambre à la cour d'appel de Limoges.
Clément, avocat général à Poitiers.
Taillefer, conseiller à la cour d'appel de Paris. Warmez, conseiller à Amiens.
Manchon, conseiller à Caen.
Galopin, conseiller à Dijon.
Héraud, conseiller à Montpellier.
Belon, conseiller à Orléans.
Brellmann, président du tribunal de 1™ instance à
Besançon.
Schaeffer, président du tribunal de 1™ instance à Epinal.
Hillion, président à Loudéac.
Desrousseaux, président de la chambre des avoués à Paris.
Tollu, président de la chambre des notaires à Paris. Pioger, greffier à la cour d'appel de Paris.
Guénin, sténographe reviseur au Sénat.
Cultes
CHEVALIERS
MM. Sourrieu, cardinal archevêque de Rouen. Mollien, évêque de Chartres.
Pauvert, pasteur, président de l'Eglise réformée de Sainte-Foy-Ia-Grande (Gironde).
Ministère du commerce
Sont nommés
COMMANDEUR
M. Raymond, administrateur des postes et des télégraphes.
OFFICIERS
M. Buquet, directeur de l'Ecole centrale des arts et manufactures.
M. Théry, publiciste, fondateur-directeur de l'JZconomiste européen.
CHEVALIERS
MM. Bardin, inspecteur général de la comptabilité des usines de Saint-Gobin, maire de Torcy (Seine-et-Marne). Dubourg, négociant, président de la chambre de commerce de Besançon.
Excoffon, chef de bureau à l'administration des postes et des télégraphes.
Finance, chef de bureau à l'Office du travail, secrétaire du conseil supérieur du travail.
confondre le catalan avec l'espagnol. La langue catalane n'est pas un patois; c'est une langue à part, que les indigènes gardent, dans toute sa pureté, avec un soin jaloux, et qui, loin d'être entamée et rongée par la langue castillane, tend "au contraire à empiéter sur elle. Elle doit cette expansion à quelques écrivains de premier ordre, et l'un des plus célèbres est précisément M. Angel Guimera, dont quelques pièces ont été traduites en espagnol et se jouent sur le théâtre de Madrid. C'est du moins ce que nous a appris M. Bertal car à Paris nous ne sommes pas trop au courant de la littérature d'outremonts.
Terre basse n'est point une œuvre à dédaigner, il s'en faut. Elle est beaucoup trop violente pour notre goût français; mais il s'y trouve une très belle scène, d'une conception remarquable et d'une exécution supérieure. Je ne dirai du drame que ce qui sert à expliquer cette scène; elle est pour moi toute l'œuvre. Don Sébastien, un riche seigneur, possède un vaste domaine, moitié en plaine, moitié sur la montagne; terre haute et terre basse. Or, il paraît qu'en ce pays le seigneur est maître absolu des gens comme des biens; ses vassaux ne sont que des serfs, et il peut disposer à son gré de leur fortune, de leur honneur, de leur vie. Cette particularité, qui choque un peu nos idées et nos mœurs, n'avait pas besoin d'être expliquée par un auteur catalan, écrivant pour des Catalans. Nous autres, nous avons quelque peine à admettre ce détail de civilisation fruste, sur lequel toute la pièce repose.
Don Sébastien a distingué une jeune fille très jolie, nommée Marthe, et l'a prise pour maîtresse. Mais il vient, dans une spéculation quelconque, de compromettre sa fortune; il lui faut, pour sortir d'embarras, épouser une héritière riche. Qu'à cela ne tienne il conclura le mariage sans quitter Marthe. Mais comme le beaupère exige une situation nette, il mariera Marthe avec un époux complaisant, qui ne sera mari que de nom.
Il a choisi pour cet office un berger des hautes terres,un brave garçon, robuste et de sang chaud, Manlie, qui, là-haut sur la montagne, lutte corps à corps avec les loups et les étrangle. Il se garde bien de dire à Manlie que Marthe a été sa maîtresse mais il affirme à Marthe qu'il lui a tout avoué, et que le berger a parfaitement accepté cette combinaison. Marthe en conçoit un invincible dégoût pour ce pleutre, qui l'accepte, ainsi souillée, pour faire plaisir au maître.
Elle l'a en horreur; mais elle se résigne; elle ne sera plus ni au maître qui lui a fait cet outrage, ni à l'époux qui a subi ce marché. Or elle est victime d'un mensonge. Manlie n'a pas été prévenu: il croit éDouser une jeune fille pure,
Guélon, receveur des postes françaises Il constanunople. (Actes de courage pendant les troubles de Constantinople en 1896.)
Lamazière, administrateur délégué de la Société des anciens établissements Cail.
Lemaître, filateur, président de la chambre de commerce de Bolbec.
Charles-Maurice Ordinaire, chef du cabinet du ministre du commerce, conseiller général du Doubs. Plichon, constructeur mécanicien à Paris, ancien président de la chambre syndicale des mécaniciens, chaudronniers, fondeurs.
De Querhoent, négociant au Havre, maire de SaintAdresse.
Pichon, ingénieur constructeur, directeur de l'usine Meunier, à Fives-Lille.
Souyris, directeur des postes et des télégraphes de la Côte-d'Or.
Wallaert, filateur et tisseur, ancien président du tribunal de commerce de Lille.
Exposition de Bruxelles
Sont nommés ou promus sur la proposition du ministre du commerce à l'occasion de l'Exposition internationale de Bruxelles
COMMANDEURS
Le comte de Montholon, ambassadeur à Berne, ancien ministre de France à Bruxelles.
M. Monthiers, commissaire général du gouvernement français à l'Exposition de Bruxelles.
OFFICIERS
MM. Ancelot, fabricant de dentelles et de broderies à Paris, président de l'Association générale de l'indusdrie et du commerce des matières textiles. Louis Aucoc, fabricant de joaillerie à Paris, président de la chambre syndicale de la joaillerie.
Bénard, agriculteur à Coupvray (Seine-et-Marne). Du Bousquet, ingénieur en chef du matériel et de la traction du chemin de fer du Nord.
Charles (Henri) dit Lavauzelle, imprimeur-libraireéditeur à Limoges. Claude-Lafontaine, banquier, membre-trésorier de la chambre de commerce de Paris. Grenier, directeur de la raffinerie Say, à Paris. Faurax, fabricant de voitures à Lyon.
Gauthiot, secrétaire général de la Société de géographie commerciale à Paris. Gautreau, constructeur mécanicien à Dourdan (Seine-et-Oise).
Henri Heugel, éditeur de musique à Paris. Jourdan, directeur de l'Ecole des hautes études commerciales à Paris.
Albert Leduc, fabricant de chapeaux à Paris. Charles h.Legrand, fabricant de tissus d'ameublement à Paris. Alfred Leroy, directeur des mines de Bruay (Pas-deCalais).
Paul Marne, imprimeur-éditeur à Paris.
Jules Norberg, de la maison Berger-Levrault, imprimeur-éditeur à Nancy.
Georges Rolland, administrateur de la société métallurgique de Gorcy.
CHEVALIERS
Paul Alloand-Bessand, administrateur des magasins de la Belle-Jardinière. Emile Armet de Lisle, directeuradministrateur de la Société de traitement des quinquinas à Paris. Louis Arnavon, fabricant de savons à Marseille.
Camille Baignol, fabricant de plumes métalliques et crayons à Boulogne-sur-Mer. Désiré Bellan, fabricant de tulles perlés à Paris et à Lunéville, syndic du Conseil municipal de laVille de Paris. Eugène Biard, ingénieur principal du matériel à la Compagnie des chemins de fer de l'Est. Charles Blin, manufacturier à Elbeuf. Guillaume Breton, de la maison Hachette et C«, à Paris.
Léonce Chabrol, secrétaire de la commission supérieure chargée d'organiser la participation de la France à l'exposition de Bruxelles. Pierre Cloquemin, chef du service central de la Compagnie générale transatlantique, à Paris. Edouard Cointreau, fabricant de liqueurs à Angers. Louis Coiseau, entrepreneur de travaux publics à Paris. Léon Colin, membre de la chambre de commerce de Bordeaux. Arnold Colson-Blanche, meur--«" à Gouvieux (Oise). Anatole Cordonnier, agricultfcur-viticjiHeur à Bailleul (Nord). Louis Courtier, imprimeur-lithcgraphe à Paris.
Jean Daume, artisi8 -çgrrier à Nancy. François Deck, céramiste et fabricant d'émUûS A Paris. Clément Denaiffe, marchand grainier à CàrigfiûO (Ardennes). Emile Deviolaine, directeur de verreries a ""euxrot (Aisne). Maxime Duchanoy, secrétaire général «lu'cSSJ» missariat français à l'exposition de Bruxelles. GeorgèS Dufayel, négociant à Paris. Adrien Dutey iiarispe, directeur de V Agriculture nouvelle à Paris.
Adolphe Espinasse, administrateur-directeur des hauts-fourneaux, forges et aciéries du Saut-du-Tarn à Saint-Juéry (Tarn). Joseph Estieu, fabricant de biscuit à Courbevoie.
Jules Folliot, propriétaire-viticulteur à Chablis (Yonne). Philibert François, directeur général des mines d'Anzin.
Albert Gauthier-Villars, imprimeur-éditeur à Paris. Jules Gilbert, fabricant de crayons à Givet. Emile Gillou, fabricants de papiers peints à Paris. Edmond Gouttière, facteur de pianos à Paris.
Daniel Iffla-Osiris, viticulteur au château de la TourBlanche (Gironde).
Paul Kahn, fabricant de vêtements pour enfants à Paris.
Réné Lalique, artiste industriel, joaillier bijoutier; Ernest Larcher, négociant en vins à Versailles, président du syndicat national du commerce en gros «t vins, spiritueux et liqueurs de France; Ferdinand LaurentMouchon, agriculteur à Orchies (Nord); Théodore Le Cœur, ingénieur-entrepreneur de travaux de menuiserie à Paris; Maurice Leclanché, fabricant de piles électriques et accessoires à Paris; Georges Lefebvre. fabricant de produits chimiques, président de la chambre syndicales des produits chimiques à Paris; Louis Lefebvre-Desvallières, administrateur de la Compagnie des messageries maritimes à Paris; Paul Ligier, fabricant de bijouterie imitation à Paris, vice-président de la chambre syndicale de bijouterie imitation; Auguste Lumière, directeur de la société des plaques et papiers photographiques à Lyon.
François Molteni, fabricant d'appareils d'optique et de photographie à Paris. Maurice Metz, céramiste à Paris. André Michelin, fabricant de caoutchouc à Clermont-Ferrand. Charles Moutier, directeur de la compagnie d'assurance la Foncière-Transports à Paris. Gaston Outhenin-Chalandre, fabricant de papier et de cellulose à Savoyeux (Haute-Saône). PP
Léon Perdoux, confectionneur pour dames, président de la chambre syndicale de la confection à Paris. Jules Perrigot, fabricant de papiers à la cuve à Arches. Michel Perrin, tanneur et mégissier à Villeurbanne (Rhône). Maurice Pinget, secrétaire du comité des forges de France à Paris. Jean Poullot, fabricant de tissus, président de la chambre de commerce de Reims. Léopold Pralon, délégué du conseil d'administration de la Société Denain-Anzin. Jules Prévet, fabricant de conserves alimentaires et de fécules à Meàux. Ernest Ricois, codirecteur des magasins du BonMarché à Paris. Louis Rivière, secrétaire général de la
qu'il adore en secret depuis longtemps, pour l'avoir vue sur la montagne, comme elle allait visiter les troupeaux.
Il est étonné, atterré, furieux, quand sa femme lui montre du doigt la chambre, qu'il occupera seul; le maître a intimé l'ordre à Marthe de lui réserver cette nuit: le droit du seigneur! Elle ne se rendra pas à cette injonction; elle n'appartiendra ni à l'un ni à l'autre. Mais pourquoi ? se demande Manlie, âme naïve et pure, qui ne comprend rien à ce caprice.
Elle est à son tour stupéfaite de son étonnement. Il ne savait donc rien? Elle provoque une explication. Elle se convainc alors que ce tueur de loups l'adore ingénument, sincèrement, qu'il la croit chaste, qu'il la tuerait sans doute s'il apprenait l'affreuse machination où on lui a fait jouer un rôle. Et alors.
Et alors, c'est là qu'est la scène, une scène absolument neuve, à mon avis, et qui est superbe.
Marthe a été retournée par cette découverte. Elle regarde son mari; comme il est fort 1 comme il est beau le ciel luit dans ses yeux et elle n'est plus digne de lui 1 non,- elle n'en est plus digne « S'il pouvait me battre, me blesser, me tuer! je rachèterais ma faute 1 il m'aimerait, ne fût-ce que l'éclair d'un moment » » Et la voilà qui entreprend ce sauvage, qui le pousse, qui lui dit « Oui, j'ai été la maîtresse d'un autre; oui, je l'ai serré dans mes bras; oui, je l'ai aimé.» Et plus elle lui retourne dans le cœur le poignard qu'elle y a enfoncé, plus le malheureux, affolé d'amour, recule devant la vengeance dont l'idée l'affole; elle poursuit, tenace, violente, effrénée; elle le pique des plus sanglants outrages, et comme il hésite, elle lui lance en dernier trait •
Misérable 1 si tu m'as épousé, c'est pour l'argent que je t'apportais!
A ce mot, il bondit de fureur, il tire son couteau, se jette sur la femme qui tend le cou il frappe, le sang jaillit, l'arme lui tombe des mains, il s'affaisse, éperdu sur son siège. Elle contemple avec ravissement le sang qui coule de sa blessure. Cette blessure, c'est sa rédemption ce sang1, c'est l'eau qui lave la faute. Ah maintenant, s'écrie-t-elle, je puis tout te dire je t'aime, je n'ai jamais aimé que toi; tu es mon maître, mon vrai maître. La scène est d'une psychologie à la fois compliquée et naïve, raffinée et barbare, mais avouez qu'elle est originale. Lafontaine aurait dit que c'était là une âme plus grande encore que folle, une âme espagnole.
La scène a de plus une saveur de terroir qui pour nous est des plus piquantes. Il faudrait un rien d'arrangement pour rendre la nièce nossible sur un de nos théâtres réguliers.
des prisons à Paris. Ferdinand Roy, fllateur de coton au Petit-Quevilly.
Henri Saint, filateur et tisseur à Flixecourt. Auguste Salin, maître de forges à Dammarie et Ecurey (Meuse). Henri Serpette, compositeur de musique à Paris. Edmond Siot-Decauville, fondeur-éditeur de bronzes d'art à Paris.
Hippolyte Ternisien, tapissier-décorateur à Paris; Henri Terninck, filateur et tisseur, président du tribunal de commerce de Roubaix; Marie Turpin, négociant en vins, membre de la chambre de commerce de Rouen.
Louis Verdol, constructeur de machines à tisser à Lyon Jean-Baptiste Vever, bijoutier-joaillier à Paris; Léon Viellard, maître de forges à Morvillars (HautRhin).
Witanberger, fabricant de machines agricoles à Frévent.
Ministère des colonies
Sont nommés dans l'ordre de la Légion d'honneur, au titre civil
OFFICIERS
Blanchy, maire de Saigon, président du conseil colonial de Cochinchine.
Renaud, ingénieur en chef des ponts et chaussées, directeur des travaux publics du Tonkin.
CHEVALIERS
Phérivong, inspecteur des colonies.
Ernest Alexis, substitut du procureur général à la Réunion.
Lamadon, directeur de l'intérieur à la Guyane. Gentil, administrateur des affaires indigènes. Julien, interprète à Madagascar.
Crémezy, chef du service des douanes à la Réunion. Heiby, directeur des postes et télégraphes à la Côte d'Ivoire.
Bonin, vice-résident en Indo-Chine.
Le Breton, président de la chambre de commerce de Saint-Pierre et Miquelon.
Dervillé, chef de bureau politique du gouvernement général de Tlndo-Chine.
Au titre militaire
CHEVALIERS
Les docteurs Merveilleux, Rousselet-Bessaud, médecins coloniaux.
Congoulat, pharmacien colonial.
Roussel, de Pons, Angier de Maintenon, Willotte, commissaires coloniaux.
Bretonnet, lieutenant de vaisseau.
Aubertin, lieutenant d'artillerie de marine. Piétrini, surveillant pénitentiaire.
Reçoivent la médaille militaire
Robreau et Kilbert, surveillants pénitentiaires. Lecarpentier et Ricard, infirmiers.
A l'occasion de la soumission du dé Tham, en exécution de la loi du 24 décembre dernier, ont été nommés dans la Légion d'honneur.
Au titre civil
CHEVALIERS
Baille, résident de 1™ classe en Indo-Chine. Quennec, vice-résident.
Renaire, inspecteur de la garde indigène du Tonkin. Au titre militaire
OFFFCIERS
Le colonel Lefèvre et le capitaine Lassalle, de l'infanterie de marine.
CHEVALIERS
Les lieutenants Mast et Mouret, de l'infanterie de marine.
AUX JARDIES
M. Waldeck-Rousseau a prononcé un très beau et très substantiel discours à la cérémonie qui ramène chaque année aux Jardies les amis de Gambetta. Ce touchant témoignage de la fidélité de ses anciens collaborateurs au souvenir du' maître et du conjpagnon disparu présente en outre une signification politique et l'on peut dire une importance nationale. L'immeSSe majorité des Français s'associe de cœur ce p|isr.'Pa&e pieux. Si une société, suivant le mot d'Auguste Comte, ne se compose pas moins des morts que dëâ vivants, il est permis, puis-
m,jetta n est encore présent
que nul plus que GS,mbetta n'est encore présent
parmi nous, de tirer *iine conclusion assez con-
solante de cet attacheti,1 °luasi universel,
solante de cet attachea,Q q mêmes qui
professé aujourd'hui par ctlix>'à mêmes qui furent ses adversaires, à la mémôn <ï'4êce 8l &n^- citoyen. Il est vrai que, parmi ceux qut*Éê*p£;^ noncent désormais son nom qu'avec respect, quelques-uns méconnaissent encore son enseignement. C'est pourquoi la commémoration anniversaire de sa mort est une occasion excel?leats-de-rôcenaer ses idées maîtresses, qui fu-, rent si nettes, si fortes, et qui n'ont point cessé d'être salutaires. La meilleure manière d'hono- rer son œuvre, c'est de s'inspirer de ses leçons. M. Waldeck-Rbusseau l'a bien compris, et son éloquent éloge de Gambetta fait un programme très noble et très élevé de vie politique. En premier lieu, il a loué comme il convenait l'ardent et tenace patriotisme de l'organisateur de la Défense nationale, qui n'eut point de passion plus vive que celle de l'honneur et de la grandeur de la France. L'énergie de Gambetta, égale aux plus tragiques épreuves, était raisonnée et persévérante. Il n'y avait point de place en lui pour le découragement, et il était capable des patients efforts et des desseins à longue portée. M. Waldeck-Rousseau a fait une allusion discrète à la part que prit Gambetta à la préparation d'une alliance précieuse et nécessaire, dont un nouveau témoignage nous a été apporté hier par les télégrammes de l'empereur de Russie et du président de la République. Et l'éminent orateur des Jardies a résumé les vues réfléchies de Gambetta dans cette formule décisive « Il n'y a pas de grand peuple sans une grande pensée. »
Le dernier acte est d'une outrance mélodramatique qui aurait peut-être besoin d'être adoucie ou tout au moins d'être sauvée par le jeu des acteurs. Marthe est enragée contre le maître, qui l'a si indignement trompée. Au dernier acte, les deux amoureux se trouvent face à face don Sébastien, arrogant et brutal, réclamant sur sa vassale les droits du premier occupant l'autre défendant ceux du mari. La dispute s'envenime entre les deux rivaux elle monte de degré en degré, jusqu'au paroxysme de la fureur; le tueur de loups se jette sur le seigneur, l'égorge comme un loup, et, empoignant sa femme à bras-le-corps, il l'enlève « Je l'emporte à la montagne, dit-il, là on respire un air pur, loin du contact du monde, plus près de Dieu. » Ce dénouement a une grandeur sauvage.
Il faut savoir gré à Mlle Maguéras de nous avoir révélé cette œuvre singulière. Elle l'a jouée comme elle a pu, avec les faibles ressources dont elle disposait. La Bodinière n'est pas un cadre approprié au mélodrame violent. Les cris y prennent volontiers l'apparence de hurlements. Les répétitions ne sont jamais assez nombreuses dans ces théâtres d'essai; l'interprétation n'est pas assez fondue. Les artistes ont fait de leur mieux.
Citons d'abord Mlle Maguéras elle-même qui donne à Marthe tantôt une résignation accablée et farouche, tantôt de beaux emportements de colère ou de désespoir. C'est Charles Lenormant qui lui donne la réplique dans le rôle du berger, il est vraiment beau au troisième acte, quand, sûr de l'amour de Marthe, il marche le couteau levé sur don Sébastien il y porte la même maestria que Mounet-Sully s'avançant l'épée haute sur don Salluste. Don Sébastien est joué par un nouveau venu, M. Hellé. Hellé est, m'a-t-on dit, un avocat qu'entraîne vers.les planches une vocation irrésistible. Il nous a paru trop uniformément sombre et violent. C'est un seigneur féodal il aurait pu mettre dans ses propos d'amour plus de bonne grâce, et plus de hauteur cavalière dans ses revendications. Après cela, peut-être ces mœurs rudes sont-elles celles du pays où se passe l'action. Mlle Angèle Myriam a eu beaucoup de succès en jouant, d'un petit air naïf, le rôle d'une innocente qui vit au milieu de ces amoureux effrénés sans se douter de ce que c'est que l'amour.
Le théâtre d'ombres, à la Boîte à musique, donne en ce moment un spectacie assez intéressant que je n'avais pas encore vu. La soirée commence par des chansons et des récitations de poésies diverses, où je n'ai guère remarqué que Mévisto aîné et Mlle Irma Perrot. Les Sai-
La seconde part des forces de Gambetta fut consacrée à l'établissement de la République, et ici encore on admire cette association de la clair. voyance du politique philosophe et de la vigueur enflammée de l'homme d'action, qui en ont fait un complet et véritable homme d'Etat. Personne n'eut au même degré la puissance tribunitienne* l'éloquence virulente et dominatrice; il fut, aux années de lutte, le plus redoutable adversaire de la réaction, le principal artisan du triomphe du parti républicain. Mais cet orateur de combat était en même temps un esprit organique et or« ganisateur. Ces facultés indispensables, mais trop rares, ne se sont-elles point révélées jusque dans cet ascendant qui lui permit de grouper autour de lui ces amis dévoués, dont parle M. Waldeck-Rousseau en pleine connaissance de cause, « qu'une haute supériorité de talent eût pu conduire à rechercher un rôle plus personnel et qui n'eurent point de plus vive ambition que de l'entourer, de répandre sa pensée et de répercuter sa parole ». Grâce à lui, dit encore M. Waldeck-Rousseau, « ta politique qu'il fondait eut son chef, sa représentation visible et homogène, et par là elle acquit cette unité et ce pouvoir d'expansion que les manifestations indi« viduelles, dépourvues d'un lien commun, ne peuvent assurer ». Oui, Gambetta eut toutes les qualités du chef; de fâcheuses préventions ne. nous laissèrent point en avoir tout le profit possible. «L'heure n'était pas encore venue, dit spirituellement M. Waldeck-Rousseau, et n'est peut-être pas venue encore où le même homme pouvait être àJa fois le chef de l'opinion et celui du pouvoir. » II est permis toutefois de constater depuis quelque temps un progrès à ce point de vue; notre démocratie semble sentir davantage le prix de la stabilité et de la continuité politiques et avoir enfin compris qu'elle ne saurait, pas plus que tout autre régime, se passer de gouvernement.
Enfin, Gambetta nous a laissé une leçon de tolérance et de concorde qui est peut-être aussi un peu mieux écoutée que naguère. Après avoir surpris ses adversaires, dit M. Waideck-Rous^ seau, par la vigueur de ses attaques et s'être fait craindre, il se fit aimer « pour cette largeur d'esprit, pour cette élévation d'âme qui ne lui permettaient ni de s'enfermer dans l'esprit de secte, ni de traiter en ennemi quiconque lui semblait apporter à son pays un élément de force ou de grandeur, une illustration ou même une parure, une raison d'espérer et de croire ». Gambetta ne séparait point la France de la République, pour qui il ambitionnait un rôle plus généreux quecelui d'un parti. Puissions-nous voir enfin le parfait accomplissement de son vœu le plus cher la réconciliation en l'union définitive de tous les Français.
MENUS PROPOS
FLEURS, JOUETS ET BONBONS
Ces trois petits mots résument toute la vie df Paris, dans les quelques jours qui précèdent et même dans les quelques jours qui suivent le 1* janvier.
C'est ainsi chaque année, ou, pour mieux dire, le mouvement se fait, chaque année, plus général. Il se peut que les bijoutiers à la mode vendent moins de colliers de perles ou de rivières de diamants que sous l'empire. Mais la consommation des menus objets d'étrennes a considérablement augmenté, Plus de gens en donnent, plus de gens en reçoivent. Les quartiers modestes du Paris commerçant, et les quartiers pauvres du Paris ouvrier offrenlv durant trois fois vingt-quatre heures, un aspect qui rappelle, toutes proportions gardées, celui du Paris élégant et oisif. La valeur des présents est infinim.Tit moindre, les allées et venues affairées, expan« %.j^s- '̃'i'1^Ac f*Ho sont les mêmes.
A prenure -.̃.̃̃s»» au bon côté, cette mise au
A prenure les chu, d mar-
pillage des confiseurs, des & v- d chands de jouets; ce ftnt de per; .o; ̃̃> paquets qui déambulent par les rues et les iwuievards, comme si l'unique préoccupation du moment devait être les visites à rendre et les étrennes à porter, témoignent d'une grande aménité de mœurs et d'une sociabilité qui depuis longtemps constituent l'une des marques propres du caractère français. On ne saurait méconnaître non plus que beaucoup d& travailleurs vivent de cet usage. Si une partie de l'argent dépensé tombe dans la caisse des commerçants, une autre partie va, sous forme de salaireSj faire bouillir la marmite des ouvriers et des ouvrières dont le tour de main léger et gracieux a créé les fragiles merveilles des étrennes parisiennes. Tout n'est donc pas à regretter, tant s'en faut, dans le d& veloppement extraordinaire de cette « institution ». Mais tout y est-il à louer?
Je n'ai jamais vu le jour de l'An à Londres ou ê. New-York. Toutefois, sans l'avoir vu, je me le représente fort différent de ce qu'il est chez nous. Ces villes où l'effort industriel et commercial est si intense ne doivent pas avoir un aussi grand nombre d'heures à consacrer aussi exclusivement aux réunions de famille, aux devoirs de politesse, à l'échange des cadeaux. Une courte pause dans l'action quotidienne, un imperceptible temps d'arrêt dans le prodigieux travail de la machine, et ce doit être tout.,
sons viennent ensuite. Les Saisons, ce n'est pas autre chose qu'un petit drame vu dans une lanterne magique, tandis que des récitants et des chanteurs accompagnent, ainsi que cela se pratiquait au Chat-Noir, les diverses scènes qui passent sous les yeux du public. Le poème des Saisons est fort adroitement coupé il est de M. Auguste Germain; la musique, toute pleine de délicatesse exquise, est de M. Francis Thomé. Les décors, signés Eugène Frey, sont des merveilles de rendu, et les ombres qu'a dessinées le jeune et déjà célèbre Georges Redon, plaisent par la variété et la vérité des attitudes. Le Feu de chaume qui termine le spectacle manque son effet, parce que c'est une pièce du même genre que celle des Saisons. De là un peu de monotonie.
La Gaîté-Rochechouart nous a donné une revue en deux actes et huit tableaux, Penses-tu, de MM. Cellarius' et Eugène Héros. C'est une revue très vive, très animée, semée de couplets amusants; pas beaucoup d'idées de revue par exemple. Les auteurs y suppléent parleur nombre considérable de jolis costumes, que portent gaillardement des femmes avenantes. Mlle Cernay, qui conduit la danse en qualité de commère, est fort gaie; sourire jeune et aimable, œil expressif, diction juste, et elle ywa de tout son cœur; elle a l'air de s'amuser pour son propre compte. Il faut voir l'action qu'elle a sur ce public particulier. Comme il riait franchement, à propos de tout et parfois même à propos de rien.
J'arrive enfin à la pièce qui a été l'événement de la semaine, je pourrais même dire l'événement de l'année à Cyrano de Bergeract en cinq actes et en vers, drame de cape et d'épée, que la Porte-Saint-Martin nous a donné mardi 28 décembre.
Ce 28 décembre restera, je crois, une date dans nos annales dramatiques. Un poète nous est né, et ce qui me charme encore davantage, c'est que ce poète est un homme de théâtre. Cyrano de Bergerac n'est pourtant pas le premier ouvrage de M. Edmond Rostand nous avions vu déjà de lui à la Comédie-Française les Romanesques dont le premier acte nous avait ravis. Car il faut bien le dire, à l'honneur de cette pauvre Comédie-Française, à qui l'on reproche toujours d'être enfoncée dans la routine, c'est elle qui la première a ouvert ses portes à M. Edmond Rostand, tout jeune alors et parfaitement inconnu. Depuis, M. Rostand avait donné à la Renaissance la Princesse lointaine, qui n'avait obtenu qu'un demi-succès, mais qui n'en avait pas moins plu aux délicats par un goût de fantaisie shakespearienne, et ensuite la Si^na*