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Titre : Tableau de Paris. T. 2 / par Edmond Texier ; ouvr. ill. de quinze cents gravures d'après les dessins de Blanchard, Cham, Champin... [et al.]

Auteur : Texier, Edmond Auguste (1815-1887). Auteur du texte

Éditeur : Paulin et Le Chevalier (Paris)

Date d'édition : 1852-1853

Contributeur : Blanchard (18..-18.. ; illustrateur). Illustrateur

Sujet : Monuments historiques -- Paris (France)

Sujet : Moeurs et coutumes -- Paris (France) -- 19e siècle

Sujet : Paris (France) -- Histoire

Sujet : Paris (France)

Notice d'ensemble : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb36584793f

Type : monographie imprimée

Langue : français

Format : 2 vol. : ill. ; in-fol.

Description : Récits de voyages -- +* 1800......- 1899......+:19e siècle:

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k2057032

Source : Bibliothèque nationale de France

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 15/10/2007

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que, dès le màtin~ un commissionnaire robuste vienne remplir votre cabinet de joujoux pour les enfants, de gentilles futilités pour les demoiselles, de petits meubles inutiles et fort chers pour les dames Voici venir le ban eti'arriere-ban! En sa qualité de dernier venu au monde, votre petit-fils ouvre le feu le voilà sur vos genoux

Maitre corbeau, sur on arbre perche, etc.

C'est l'hommage du premier effort qu'a fait sa mémoire. Les compliments, les félicitations~ les respects se succèdent à la file; tout cela doit être payé en bel et bon argent.

Et vous! étranger~ célibataire, qui comptiez sur votre absence, sur votre isolement pour esquiver cette contribution forcée; en descendant votre escalier, n'entende~-vous pas un léger bruit de respirations imparfaitement contenues'? Monsieur votre concierge et madame son épouse, monsieur votre garçon d'hôtel, monsieur votre facteur et messieurs vos fournis-

seurs vous attendent au passage; il faut s'exécuter.

Dans le grand monde, le prix des objets offerts en étrenncs s'élève à un chiffre assez considérable les enfants veulent des jouets qui s'achètent à prix d~or; on ne peut offrir aux dames qu'un nécessaire de Tahan, le Boule moderne; aux messieurs, que des objets rares et précieux à proportion. Tout mari doit à sa femme un cachemire somptueux ou un joyau d'une valeur égale; a. son fils, étudiant en droit, un billet de banque, ou, si le jeune homme est encore au collége, quelques pièces d'or. Chaque domestique prélève une rétribution fixe d'un napoléon sans compter ce qu'on extorque aux fournisseurs; et, dans la journée) chaque course exige un pourboire co-

lossal.

Le premier jour de Fan est particulièrement favorable, aux enfants et aux gens a gages les femmes brodent des coussins, des bourses ou des bretelles, et'tout est dit, moins toutefois que l'heureux possesseur de ce gage~ qui a coûté tant de soirées d~un <ravail my~Pieux_, ne découvre par hasard la facture du marchand qui a vendu rétrenne toute confectionnée. J'allais oublier de dire que les bonbons;, pralines, dra~ gées, etc.j de toute sorte sont l'accessoire obligée et comme la monnaie courante des ~trennes seulement; il faut les donner, si l'on est pauvre, dans une boite qui coûte S a 6, fr~ et si ron est riche, dans un coffrer en marqueterie ou dans un panier de jfiligrane, dont je renonce à vous dire le prix. La semaine sainte menace de devenir un

second jour de Fan~ ou, si l'on aime mieux, un quatorzième mois de dépenses grâce aux œufs de Pâques.

Puisqu'il faut donner des étrennes., je m'en consolerai, si cette obligation ne vous enchaînait que vis-àvis les enfants. J'aime bien cette mine surprise et joyeuse d'un poupard qu'on éveille avec un cornet de bonbons ou un polichinelle. Surtout quand l'enfant n'est pas prévenu à l'avance, et qu'il n'a pas déjà une indigestion de jouets. C'est un tableau délicieux que ~intérieur d'une pauvre petite chambre~ où l'on voit un tout jeune enfant dans son berceau, qui sourit à une poupée que lui acheta son père sur de pénibles économies, tandis que la mère contemple cette joie et admire ce bonheur si naïf.

Je n'ai pas achevé de parcourir les divers degrés~ et, après avoir esquissé la pauvreté, il faut parler encore de l'indigence absolue. Heureusement pour nous Paris n'est pas comme l'orgueilleuse capitale de l'Angleterre la misère s'y cache avec un soin honteux~ et parvient a éviter tous les regards, excepté toutefois celui de la charité. Dans les circonstances ordinaires,

la faim ne saisit que ceux qui s'y livrent volontairement, par excès-d'inertie; mais il est trop vrai que souvent les temps sont mauvais, et qu'alors la mère de famille engage, pour avoir du pain, jusqu'à sa dernière harde~ jusqu'à son anneau de mariage. L'indigence aime à se retirer dans les.quartiers les plus isolés, dans les recoins les plus obscurs des grandes villes. La carte de Paris offre ainsi quelques taches noires indiquant les points où se concentre le uéau le faubourg Saint-Marcel avec sa population de chiffonniers; les ruelles de la Cité, fameuses par leurs tapis francs; la Petite-Pologne, cette tache imprimée au front de l'opulent quartier du Roule et enfin les lointaines barrières de Vaugirard et de Belleville.

C'est dans le faubourg Saint Marcel que la misère semble avoir choisi sa résidence préférée; elle y prend une physionomie pittoresque, un air de chez soi qui rappelle les anciennes cours de miracle. Dans ce quartier, i! n'y a pas de rues, mais des

ruelles et des impasses; il n'y a pas de maisons, mais des cloaques et des taudis. Il y respire une race hâve, déguenillée, à figure sinistre, vivant des épaves que laisse dans Paris l'insouciance et le mépris de tout le monde; cette race maudite mange les restes dédaignés des chiens errants, se pare des lambeaux rejetés par le pauvre; elle se recrute parmi les criminels qui ont payé leur dette à la justice, parmi les malheureux que l'imprévoyance et l'inconduite mettent entre la mort et la faim. Quand la nuit tombe, on les voit, à demi gris, sortir des trous où ils passent la journée, et suivre la direction des plus riches quartiers, agitant leur pâle falote et piquant toute immondice qui les séduit. En vain on a voulu poétiser les chiffonniers sauf exceptions, ils sont tous tombés à ce degré extrême d'abrutissement qui ne laisse ni sentiments autres que ceux de la brute, ni joies autres que les joies de l'ivresse. La femelle du chiffonnier s'enivre en son absence au moyen d'une affreuse infusion de poivre et de trois-six qu'elle prend a crédit. Le chiffonnier rentre ivre, bat sa femme, et se couche.

Ceux qui parlent du quartier Saint-Marcel ne connaissent guère que la rue Mouffetard~ qui est la rue de Richelieu de l'endroit, et les fabriques alimentées par l'eau de la Bièvre. Cette partie du i2" arrondissement est en effet présentable le travail des manufactures y répand quelque aisance; mais le vrai chiffonnier ne se rencontre que dans quelques cloaques adjacents, où !e voyageur le plus déterminé ne pénètre jamais sans hésitation..

La réputation de la Cité, comme repaire des gens les plus immondes et les plus dangereux~ est, depuis longtemps~ établie aujourd'hui les larges rues qu'on y a percées en tout sens assainissent la population, et il ne reste plus guère, dans la rue des Marmousets ou dans la rue Glatigny~ qu'un petit nombre de ces maisons mal famées et de ces tapis francs devenus si célèbres. Fuyant le voisinage de la police, les malfaiteurs qui les remplissaient commencent a s'éloigner, et cherchent un refuge dans la banlieue.

Il reste à dire un mot de la Petite-Pologne. On dé-

u

signe sous ce nom un certain nombre de ruelles mal bâties et à peine alignées qui serpentent entre des maisons de piètre appàrence autour de la place Delaborde, entre la rue du Rocher et la barrière de Courcelles. Ce quartier, qui n'est peut-être désigné nominalement par aucun plan de Paris, a pour plus nombreux habitants des ouvriers et des hommes de peine,, venus de tous les points de l'Europe, et employés, pour un faible salaire, dans les grandes usines qui se trouvent aux Thèmes pu, a Chaillot, à l'avenue de Neuilly, etc. Une certaine quantité de natifs de l'Auvergne, exerçant les professions de marchands de vieux fers ou de porteurs d'eau à. la brasse, tel est l'élément honnête de cette popula< tion.

Les mœurs de ce coin ignoré de Paris n'ont rien de fort étrange; seulement, à cause de la multiplicité de rues et de ruelles qui forment la Petite-Pologne, et surtout de la variété d'origine de ceux qui l'habitent il est aisé, plus que partout ailleurs, do s'y cacher. Sans doute Balzac songeait a cet avantage;, lorsqu'il plaça le théâtre des der-r mères turpitudes du baron Hulot dans le passage du Soleil, sur les limites de ce labyrinthe. Peut-être que ce grand observateur aurait trouve le sujet d'une étude morate intéressante dans les '70~~ de la Petite-Pologne. Chacun a le droit recoucher dans ces garnis pour la, somme de cinq centimes le seul mobilier consiste en une corde tendue, parallèlement au mur et à quatrevingts centimètres au-dessus du sol. Les dormeurs, assis et adossés à la muraille, croi-

sent leurs bras sur cette corde, qui leur sert à la fois d'appui-mainetd'oreiller. °

Nous aurons lien bientôt de compléter cette esquisse de la misère à Paris;, en parlant des barrières, où souvent se réfugient le vice et la misère, de compagnie, Quant aux autres études de mœurs,. ébauchées dans ce chapitre, on ne pourrait guère les rendre complètes en se renfermant dans les limites de cet ouvrage. Résumons-nous en disant que la statistique déclare a Paris environ trente mille ménages indigents; dans ce chiffre elle ne fait pas figurer la partie de la population qui est traitée et recueillie dans les hôpitaux, et ne compte que celle qui reçoit domicile des secours des bureaux de bienfaisance. Ces ménages représentent une moyenne de 70 a 75 mille individus répartis inégalement dans les douze arrondissements, c'est donc a peu près un indigent sur treize habitants. La somme moyenne annuelle des dépenses pour secours à domicile est de d,700,QOO fr.; il faut en distraire 300,000 pour frais d'administration et d'entretien des maisons de secours; il reste donc disponible 'i,400,000 fr., ou SO fr. par an et par ménage,