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Titre : Grand dictionnaire universel du XIXe siècle : français, historique, géographique, mythologique, bibliographique.... T. 10 L-MEMN / par M. Pierre Larousse

Auteur : Larousse, Pierre (1817-1875). Auteur du texte

Éditeur : Administration du grand Dictionnaire universel (Paris)

Date d'édition : 1866-1877

Sujet : Encyclopédies et dictionnaires français -- 19e siècle

Notice d'ensemble : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb33995829b

Type : monographie imprimée

Langue : français

Format : 17 vol. ; in-fol.

Description : Collection numérique : Arts de la marionnette

Description : Collection numérique : France-Japon

Droits : Consultable en ligne

Droits : Public domain

Identifiant : ark:/12148/bpt6k205362h

Source : Bibliothèque nationale de France

Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France

Date de mise en ligne : 15/10/2007

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manque auxquels correspondent l'acide dibromosuccinique et l'acide isodibromosuccinique, de même il existe un acide isomérique avec l'acide bromomalêique, acide auquel M. Kékulé a donné le nom d acide isobromomaléique. Il obtenu ce second acide en chauffant l'acide isodibromosuccinique à 1800, ou en évaporant à l'ébullition la solution aqueuse, ou encore en faisant bouillir avec de l'eau l'anhydride dibromosuccinique. Un acide dibromomaléique CUl2Br204 se produit accidentellement dans l'action du brome sur l'acide succinique. Il faut admettre dans ce cas qu'il se forme d'abord un acide succinique tribroiné qui perd ensuite HBr.

Quant aux produits de substitution chlorés, on ne connaît que l'acide chloromaléique. Cet acide se forme lorsqu'on traite l'acide tartrique par le perchlorure de phosphore. Il se produit probablement dans ce cas du chlorure de tartryle C*H*OSC1*. Ce chlorure perd HCl pour laisser le composé C*1-IO2C1,CI*. Enfin, ce dernier corps, traité par l'eau, échange 2Cl contre HO et fournit l'acide chloromaléique.

V. Acidk isomaléique. L'acide isomaléique, traité par le perchlorure de phosphore, fournit un chlorure qui, au contact de l'eau, donne l'acide isomaléique, isomère de l'acide maléique. Cet acide est cristallisable. L'eau le dissout mieux que l'acide fumarique et moins que l'acide maléique. Son sel de potassium est déliquescent; son sel de plomb est un précipité blanc; son sel d'argent est trèssoluble dans l'eau et donne de l'argent réduit lorsqu'on fuit bouillir la solution.

-VI. THÉORIE dk l'isomkrie DES ACIDES MAL1ÏIQUE ET FUMARIQUE ET DE LEURS HOMOLOGUES. Nous savons qu'il existe un seul acide succinique, comme il existe un seul acide pyrotartrique, mais qu'il existe deux acides isomères, l'acide maléique et l'acide fumarique, comme il existe trois isomères homologues de l'acide fumarique, les acides itaconique, citraconique et mésaeonique. Nous savons, en outre, que lorsqu'à un de ces acides isomères on ajoute H2, on obtient de l'acide succinique ou de l'acide pyrotartrique toujours identiques à eux-mêmes; mais que si Ion ajoute à ces acides HBr ou Br2on obtient des acides succinique ou pyrotartrique bromés isomériques entre eux comme les corps dont. ils proviennent. Pourquoi l'isomérie existe-t-elle dans les acides non saturés et dans les dérivés bromés ou chlorés des acides saturés, tandis qu'elle ne se poursuit pas dans les acides saturés eux-mêmes? M. Kékulé a donné de ce fait l'explication hypothétique, mais très-ingénieuse qui suit.

L'acide succinique, que nous prendrons pour exemple, renferme 2 atomes d'hydrogène typique et basique. On peut donc, puisque sa formule est C*H6Oft, le considérer comme renfermant 4 atomes de carbone juxtaposés dont les deux extrêmes conservent les trois quarts et les deux moyens la moitié seulement de leur capacité de saturation. De plus, on déduit de.la théorie actuelle des acides organiques que les trois atomicités de chacun des carbones extrêmes sont saturées par un oxhydryle OH et par un oxygène 0 diatojniquo. Quant aux deux atomes de carbone moyens, chacun d'eux serait uni à H2. Si maintenant un. de ces deux atomes moyens perd les deux H auxquels il est uni, on aura un acide non saturé, lequel pourra se combiner directement, soit à l'hydrogène, soit à tout autre élément monoatomique. La forme de la molécule sera naturellement différente, selon que l'un des deux atomes de carbone moyens aura perdu H2 ou que tous deux auront perdu H. Il y aura donc deux acides isomériques de la formule C4H*O4. Vient-on maintenant à ajouter de l'hydrogène au corps non saturé, la molécule se complète et donne de l'acide succinique dont la constitution est toujours la même. Mais si, au lieu d'hy'drogène, on fixe du brome sur 1 acide non suturé, celui-ci prend la place de l'hydrogène éliminé, et suivant que celui-ci a été éliminé aux dépens d'un ou de deux atomes de carbone, le brome se fixe sur un seul ou sur deux atomes de carbone d'un des acides succiniques bromés isomères. D'après cette théorie, il doit exister deux acides C4H404 et quatre acides CS!I6O*. L'existence de l'acide isomaléique, qui porte à trois le nombre des acides 011*0*, semble donc l'infirmer, à moins toutefois que cette isomérie ne soit plutôt physique que chimique. Nous reviendrons sur cette question à l'occasion de l'acide succiuique. MALEBÊTE s. f. (ma-le-bê-te). Personne méchante et dangereuse Défiez-vous de lui, c'est une maledête.

Ainsi Fortune, malehëte.

Par un vrai tour de son métier,

Fit voir qu'il ne faut s'y lier.

SCARRON.

Mar. Hache à marteau dont le calfat se Bert pour pousser l'étoupe dans les grandes coutures.

MALEBOSSE s. f. (ma-le-bo-se de mal adj. et de bosse). Grosse bosse

Et le fripier Martin

Avec sa malebosse y perdit son-latin.

RÉONIER.

Il Vieux mot.

Bubon de la peste. Il Vieux mot.

Interjectiv. Sorte de juron équivalant à malepeste Malebosse, quel appétit! MALEBOUCHE s. f. (ma-le-bou-che de mai adj., etde bouche). Médisance. Il Personne médisante. Il Vieux mot.

Littér. Personnage allégorique, que les poëtes dramatiques français introduisaient dans leurs pièces.

MALEBRANCIIE (Nicolas DE), philosophe français, prêtre de la co-ngrégation de l'Oratoire, né à Paris le 6 août i63s, mort dans la même ville le 13 octobre 17 1 Son père, nommé comme lui Nicolas Malebranche, était secrétaire du roi et trésorier des cinq grosses formes. Le jeune Malebranche était né difforme, et ses parents furent contraints de l'élever dans la maison paternelle. Il* alla cependant suivre un cours de philosophie au collège de La Marche, et ensuite les cours de théologie de la Sorbonne. Il aurait pu faire dans les rangs du clergé séculier un trèsbeau chemin, grâce à la situation de son père, et déjà on se disposait à lui conférer un canonicat à Notre-Dame, quand son amour pour la solitude et la méditation le décidèrent brusquement à entrer dans la congrégation de l'Oratoire (IG60). Il se voua d'abord à l'étude de l'histoire ecclésiastique des premiers siècles, et en lut en grec les principaux monuments mais il n'y prit aucun goût, non plus qu'à l'étude de l'hébreu que lui conseillait Richard Simon. On rapporte sa vocation philosophique à un hasard il aurait rencontré le Traité de l'homme de Descartes dans la boutique d'un libraire, et la lecture de cet ouvrage l'aurait révélé à lui-même. Dès l'année 1674, il publiait le premier volume de la Recherche de la vérité, qui accuse chez l'auteur une érudition spéciale et une habitude de penser déjà fort ancienne. Il avait auparavant étudié la philosophie de Descartes au point de pouvoir, dit-on, refaire en entier les livres du maître s'ils avaient été perdus. Au moment de l'apparition du premier volume de la Rechere de la vérité, le cartésianisme n'était pas en faveur; c'était précisément l'époque ou le savoir, pédantesque des écoles, menacé dans son existence par les nouvelles doctrines, agissait contre elles par des mesures de police, faute de meilleurs arguments. Mézeray, l'un des censeurs royaux, accorda le permis d'imprimer nécessaire; mais le docteur Pirot, son collègue, le refusa, pour ne pas s'exposer ait ressentiment des partisans attardés d'Aristote et de la scolastique. Le volume eut un succès inouï jusqu'alors pour un ouvrage de philosophie spéculative. Les trois autres volumes de la Hecherche de la vérité parurent successivement, et ils en étaient, dès 1678, à leur quatrième édition. L'édition définitive est de 1712(4 vol. in-12). Cette même année, l'abbé Lenfant la traduisit en latin. L'ouvrage, dit Fontenelle, parut original par le grand art de l'auteur à mettre des idées abstraites dans le plus beau jour, à les lier ensemble, à les fortifier par leur liai.son, à y noter adroitement quantité de choses moins abstraites, qui, étant facilement entendues, encourageaient le lecteur à s'appliquer aux autres et le flattaient de pouvoir les entendre. D'ailleurs, la diction en est pure et châtiée; elle a toute la dignité que ces matières demandent et toute la grace qu'elles peuvent souffrir. Sa doctrine, il est vrai, imposait des conditions.fort dures elle exigeait qu'on se dépouillât sans cesse de ses sens et e son imagination que, par l'effort d'une méditation suivie, on s'élevât à une certaine région d'idées dont l'accès est difficile. Cependant, son système, quoique si intellectuel et si délié, serépandit insensiblement, surtout parmi les personnes qui avaient beaucoup d'esprit et qui faisaient profession de piété. Mais si l'ouvrage enleva des suffrages illustres, il excita aussi do très-vives critiques. Tout cela produisit une foule d'écrits qui ne présentaient que les principes de la Recherche de la vérité, ou mal entendus ou déguisés d'une part, et de l'autre plus développés ou tournés différemment. Le but général de Malebranche était de montrer les relations intimes de la philosophie cartésienne avec la religion. Comme la démonstration n'était pas accessible à tous les esprits, il la reprit en sous-œuvre en 1677, dans ses Conversations chrétiennes (l vol. in-12), où il se met à la portée des intelligences les moins cultivées. La querelle célèbre de Malebranche avec Arnauld et Bossuet remplit toutes les années suivantes de la vie de l'illustre oratorien. Malebranche avait étudié à fond la question de la grâce, qui était une des grandes questions religieuses débattues au xvue siècle. Un opuscule manuscrit, qu'il avait rédigé sur cette matière, tomba, par l'indiscrétion d'un ami de Malebranche, entre les mains du docteur Arnauld. Celui-ci exprima hautement son mécontentement. Le Père Quesnel, ami commun de Malebranche et d'Arnauld, afin d'éviter un esclandre, leur fit accepter une conférence chez le marquis de Roncy (mai 1679). Naturellement, on ne s'entendit point. Mais Malebranche promit de rédiger ses idées et de les soumettre au jugement d'Arnauld avant de les livrer à l'impression. Sur ces entrefaites, Arnauld dut se réfugier en Hollande; le manuscrit lui parvint en un moment où il avait tout autre chose à faire que de le lire il se contenta de le parcourir, puis s'en expliqua, dans une lettre rendue publique, d'une façon assez défavorable pour l'auteur. Le procédé

ne plut point à Malebranche, qui se hâta do faire imprimer le livre en Hollande, les censeurs royaux lui ayant refusé leur approbation. Il en envoya un exemplaire à Bossuet, et l'évêque de Meaux écrivit sur la couverture Pulchra, nova, falsa. Puis il alla trouver Malebranche, afin de le ramener, s'il était possible au sentiment de saint Thomas d'Aquin sur la grâce, sentiment qui faisait encore autorité au même titre que les opinions d'Aristote. Malebranche refusa d'entrer dans aucune discussion verbale il n'étuit pas éloquent et craignait que sa présence d'esprit lui fit défaut. « Vous voulez donc, dit Bossuet, que j'écrive contre vous? Je tiendrai à honneur, répondit Malebranche, d'avoir un tel antagoniste. Bossuet lui refusa cet honneur. Cependant, il était inquiet de sa doctrine et engagea vivement Arnauld à le réfuter. On reprochait surtout à Malebranche d'avoir créé un système fondé sur la seule raison, au détriment de la tradition et de l'autorité, que ses adversaires voulaient associer à la raison dans la discussion des idées et des choses de la religion. Arnauld débuta mal il attaqua l'oratorien sur le terrain des idées. Ce dernier était, avec Descartes, un partisan décidé des idées innées, dont il avait, du reste, formulé une autre théorie que le chef de l'école cartésienne. L'affaire fut très-vive et se termina à l'avantage de Malebranche. Cependant, son livre fut censuré par la cour de France. La guerre avait duré quatre ans ( 1683-1687). Dès 1683 Malebranche avait publié ses Méditations chréliennes et métaphysiques (2 vol. in-12). C'était comme une nouvelle édition du Traité de la nature et de la grâce, cause de sa querelle avec Arnauld et Bossuet; c'est un dialogue entre le Verbe et Malebranche. Le dialogue'a, dit Fontenelle, une noblesse digne d'un interlocuteur tel que le Verbe divin. L'auteur y a su répandre un certain sombre, auguste et mystérieux, propre à retenir les sens et l'imagination dans le silence, et la raison dans l'attention et le respect convenables. Fontenelle n'en voit que la forme, que Malebranche avait beaucoup soignée. L'ouvrage avait été tiré à 4,000 exemplaires, et fut de suite épuisé. Du reste, Malebranche se prodiguait la même année, il publiait à Cologne son Traité de morale (in-12), puis, en 16S7, ses Entretiens sur la métaphysique et la religion ouvrage dans lequel il essaye de condenser les doctrines éparses dans tous ses écrits antérieurs.

Il avait cessé d'occuper le public de sa personne lorsqu'en 1699 une malencontreuse lettre de lui, dans laquelle Arnauld vit une injure, ralluma entre eux la guerre éteinte depuis neuf ans. La mort d'Arnauld mit fin à leurs récriminations; mais cinq ans plus tard, un écrit posthume dans lequel il se défendait contre Malebranche étant* tombé entre les mains de ce dernier, il y répondit à son tour par un Ecrit contre la prévention, dans lequel Il raille son adversaire mort et entreprend la tâche difficile de prouver que les attaques d'Arnauld contre lui ne venaient en réalité point d'Arnauld, mais qu'on avait abusé de son nom. Tous les écrits de Malebranche relatifs à cette polémique parurent à Paris' (1709, 4 vol. in-12). Il était, du reste, en butte aux attaques de tout le monde le professeur Régis l'accusait d'être un disciple d'Epicure le Père Lamy, défenseur officieux de Fénelon dans la question du quiétisme, se prévalut au contraire de quelques passages de la Recherche de la vérité pour le ranger parmi les partisans de l'amour désintéressé. Malebranche, craignant cette fois d'être compromis à la cour de Rome, répondit aux imputations du Père Lamy par le Traité de l'amour de Dieu, qui lui valut des éloges universels et une réconciliation définitive avec Bossuet. Il parait que ses principes s'étaient répandus jusqu'en Chine, et qu'il composa, à l'usage des Chinois, ses Entretiens d'un philosoplte chrétien et d'un philosophe chinois sur l'existence de Dieu. Les jésuites n'avaient pas encore eu l'occasion d'intervenir dans ses démêlés quoiqu'ils fussent virtuellement ses ennemis; car il suffisait qu'on fut de l'Oratoire pour mériter leur animadversion. Malebranche supposait les Chinois athées; les jésuites lui renvoyèrent ce reproche, ou plus exactement l'accusèrent d'être un partisan de Spinoza, parce qu'il admettait en Dieu l'étendue intelligible. Tournemine ne craignit point de réitérer cette accusation dans la préface du Traité de l'existence de Dieu que Fénelon l'avait chargé d'éditer en 1713, et le Père Hardouin, avec son aplomb ordinaire, dépensa soixante pages d'une érudition burlesque à prouver le dire du Père Tournemine. Malebranche avait à répondre de tous les côtés, et c'est dans ce but qu'il publia son Traité dç la prémotion physique (Paris, 1715, in-12). Malebranche, malgré ses polémiques aussi vives que nombreuses, trouvait lo temps de cultiver la géométrie et la physique, si bien que l'Académie des sciences l'admit, un 1699, au nombre de ses membres honoraires. Il justilia bientôt ce choix par son Traité de la communication du mouvement, et par une dissertation remarquable sur la physique géuénérale de l'univers.

Cependant? sa santé, qui n'avait jamais été robuste, déclinait rapidement. 11 la maintint néanmoins assez bonne jusqu'à l'âge de soixante-dix-sept ans, grâce à un régime rigoureux et à des moeurs hygiéniques appro-

priées à son tempérament, dont il avait fait une longue étude. Il avait, dit-on, la manio de boire de l'eau, persuadé que Y hydraulique était nécessaire au fonctionnement normal do l'organisme. Il tomba malade en 1715. Une entrevue qu'il eut avec le philosophe anglais Berkeley hâta sa mort. Malgré son état de faiblesse, excité par certains arguments de son visiteur britannique, il s'anima au point d'en éprouver une aggravation de mai qui l'emporta.

Nous avons dit que Malebranche avait uno faible constitution. La délicatesse de ses organes, jointe sans doute au travail intellectuel auquel il s'était livré, avaient causé dans son esprit de singuliers ravages. Il était en proie à de véritables hallucinations. On raconte même, mais le fait a été contesté, qu'il s'imagina longtemps avoir un gigot pendu au bout du nez. On ajoute qu'un oratorien de ses amis parvint à le guérir pur uno supercherie. Il feignit une incision au bout du nez, puis montra triomphalement au monomaue un gigot qu'il avait habilement déguisé sous sa robe.

Quoique Malebranche eût plus d'un travers d'esprit et de conduite, c'était en somme un homme véritablement grand par le génie et le caractère. Il avait, comme Descartes, sou maître, des préjugés contre les sciences historiques, alors très-mal connues. Il déclarait volontiers qu'il y a plus de vérité dans un principe de métaphysique que dans tous les livres d'histoire. Il avait une confiance absolue dans la puissance du raisonnement, et considérait la raison comme le seul moyen que l'homme possède, non-seulement pour connaître la vérité, mais pour être heureux. Bayle, qui l'a connu de près, a dit de lui à propos de son Traité de morale: On n'a jamais vu un livre de philosophie qui montre si fortement l'union de tous les esprits avec la divinité. On y voit le premier philosophe de ce siècle raisonner perpétuellement sur des principes qui supposent do toute nécessité un Dieu tout sage, tout-puissant, la source unique de tout bien, la cause immédiate do tous nos plaisirs et de toutes nos idées. C'est un préjugé plus puissant en faveur de la bonne cause que cent mille volumes de dévotion par des auteurs de petit esprit. » Malheureusement sa foi religieuse et l'habit qu'il portait étaient des 'obstacles invincibles au libre développement de sa pensée; la préoccupation nécessaire pour lui de concilier la raison et la foi le jeta dans des conceptions bizarres. Sous sa forme sarcastique, le fameux vers de Faydit

Lui qui voit tout en Dieu n'y volt pas qu'il est fou, exprimait une opinion assez répandue et à laquelle les écarts du philosophe donnaient une apparence de*vérité. Néanmoins, la réhabilitation de Malebranche a été tentée récemment par les docteurs de l'école éclectique, qui ont vu en lui le principal disciple de Descartes et l'un des pères du rationalisme. Leur opinion n'est pas sans fondement. A l'exemple de Spinoza, Malebranche ne reconnaît pas qu il ait existé une philosophie en Europe avant Descartes. Son esprit général est celui de Descartes. Il rejette comme lui la tradition. Il nie aussi la valeur de l'autorité, et prend pour règle suprême à observer en logique le ne jamais donner un consentement entier qu'aux propositions qui paraissent si évidemment vraies, qu'on no puisse le leur refuser sans sentir une peine intérieure et les reproches secrets de la raison. > L'évidence est le critérum de la vérité. Malebranche admet à côté d'elle la vraisemblance. Il y a pourtant une distinction capitale entre l'évidence et la vraisemblance celle-ci n'entraîne en aucun cas le consentement forcé de la raison. En matière religieuse, il sépare, comme avait fait Descnrtes, la théologie de la philosophie. L'évidence régne en philosophie; en théologie, c'est la toi. Dans la distinction faite par Descartes, on peut voir une précaution prise au fond contre la théologie pour n'avoir pas à s'occuper d'elle; Malebranche n'est pas hostile à la théologie il voudrait l'unir a la philosophie, et insiste continuellement sur l'identité des principes qui concernent la vérité théologique d'une part et la vérité philosophique de l'autre. Il va loin dans cette voie par exemple, il recherche si la persistance du péché originel ne se retrouverait pas dans les dispositions héréditaires du cerveau. Ailleurs, il représente l'eucharistie comme une figure de cette grande vérité métaphysique, que la raison est la nourriture des aines. Quant au déluge, il penche à le considérer comme un eifet des lois de la nature. Il soutint, de concert avec les ministres réformés de Hollande, que l'Ecriture sainte a un langage figuré, adapté aux préjugés du vulgaire, et que ces figures n'engagent aucun degré la parole de Dieu. En ce qui touche la théologie proprement dite, il s'écrie dans son Traité de morale La religion, c'est la vraie philosophie. L'évidence, l'intelligence est préférable à la foi, car la foi passera, mais l'intelligence subsistera éternellement. La foi est véritablement un grand bien, mais c'ost qu'elle conduit à. l'intelligence. Et dans ses Méditations Ne vous êtes-vous pas voilé, ô Jésus, dans ce sacrement (l'eucharistie) pour nous donner un gage qu'un jour notre foi se changera en intelligence?» De sorte que, suivant Malebranche, entre l'objet de la