Ainsi les propos s'entre-croisent, propos de
galanterie, de marchandage, de politique, d'agiotage, quolibets et calembours. Toutes les opinions, toutes les castes se trouvaient réunies dans ces sociétés, d'abonnement, où l'on acclamait M. de Trénis, le Vestris des salons. Les femmes du meilleur monde, qui craignaient de montrer du luxe et d'attirer l'attention en recevant habituellement chez elles, ne redoutaient point de se mêler aux nymphes galantes qui fréquentaient même Thélusson et l'hôtel de Richelieu. On y allait en grande toilette; mais, par instinct, on préférait le négligé. Thélusson, Frascati, le pavillon de Hanovre étaient composés à peu près de la meilleure société de Paris, au dire de M™ d'Abrantés 1. On y allait en masse, au sortir de l'Opéra ou de tout autre spectacle quelquefois vingt-cinq de la même société on y retrouvait ses anciennes connaissances, puis on rentrait- sur le tard prendre une tasse de thé. un thé où il y avait de tout, depuis des daubes jusqu'à des petits pois et du vin de Champagne.
Les femmes du Directoire n'avaient, d'ailleurs,
rien des délicatesses et des grâces alanguies qui constituèrent par la suite ce qu'on nomma la distinction. Presque toutes furent des luronnes, masculinisées, fortes sur le propos, à la carnation empour1. Histoire des salons de l'aris. Tableaux et portraits du grand monde, par la duchesse d'Abrantès, 1838, t. III.