Albane avec un Dominiquin, un Lanfranc avec Annibal, un Carlo ,Maratti avec son maître André Sacchi, ni enfin mesme Romanelli avec Piètre de Cortone. De même qu'on ne peut confondre le Brawre avec Teniers, pour peu qu'on s'y connaisse; ni le Breugle avec Paul Bril, ni le Gobbe avec les Carrâches, ni Claude Lorrain, -excellent païsagiste, avec feu M~ Poussin. Cela étant, j'achette un tableau sur ma connoissance aussy hardiment que si le peintre luy mesme me le vendoit et me le garantissoit » et, naturellement, Brienne est quelquefois « fourbe »..Mais il l'avoue difficilement et, lorsqu'il en convient, c'est en ajoutant qu'il l'a bien voulu. Il s'en faut que notre homme reconnaisse chez les confrères toutes les qualités qu'il admire chez lui. Et, il faut l'avouer, les noms d'amateurs qu'il cite le plus souvent évoquent bien moins le souvenir d'hommes d'esprit et de goût que quelque anecdote grotesque contée par Tallemant des Réaux. Chez la plupart, le goût de l'art semble n'être qu'un des luxes de la richesse. Ce sont d'abord les riches partisans, fastueux et grossiers, logés dans de somptueux hôtels de Levau ou Lemercier d'Hemery, intendant des Finances sous Mazarin, aussi impudent en amour qu'en affaires il avait une ~<i!</oMe de Raphaël « assez bien, mais tout à fait au-dessous de celle que le roy a eue de moi », dit Brienne. A lui aussi, un Titien, « une femme nue couchée sur le dos, que des amours veilloient pendant son sommeil. Ce tableau méritoit, quoique excellent, d'estre brûlé, car on ne pouvoit le considérer attentivement sans émotion' ». Et il n'était sans doute pas seul à offenser la pudeur, s'il est vrai qu'après la mort du financier (1650) un tableau du Guide, qui reproduisait trop chaleureusement les amours de Thésée et d'Ariane, fut saccagé par sa vertueuse veuve, qui n'aimait pas les images. Son gendre, le ridicule La Vrillère, hérita de la belle collection. Brienne dit dans ses -/tfc??!OM'e~ qu'il eût donné tous les tableaux de Mazarin pour quatre de La Vrillère. Dans le nombre, était un Poussin, « le maître d'échole qu'on voit fouetté par ses écoHers~ ». Puis c'est Tambonneau, président des Comptes, le moins honorable des hommes et le plus infortuné des maris, qui possède une F~'<ye de la seconde manière de Raphaël, payée 5 000 livres et que Philippe de Champaigne copie à l'église de Port-Royal; Tallemant, intendant des Finances, gendre du fameux Montauron, dont la fortune et la sottise dégoûtent également son cousin l'historiographe, 1. Ms., col. 53.
2. Ms., col. 227 et 196, où le tableau est dit « faible de couleurs