par ces fragments de tresses qui retombent en, forme de bourse sur la partie supérieure du dos, et qui devaient comme enchaîner la tête sur les épaules dans une sorte de carcan. On peut donc supposer que la statue complète était d'un caractère encore plus primitif, plus rude, plus hiératique que le tronçon qui nous en est resté. En général, les figures archaïques ont plus à gagner qu'à perdre à la destruction de leurs M'?M/ car- c'est presque toujours dans les mains, dans les pieds, dans les traits du visage, que se trahit particulièrement soit l'inexpérience, soit la servitude de l'artiste. Quand ces détails n'existent plus, le spectateur les rétablit par l'imagination, il achève la statue, et, malgré lui, il la complète avec un certain degré de vie et de naturel qui réagit sur ce qui reste et le met en valeur. Tout au contraire, quand il s'agit des œuvres d'un autre âge, d'un siècle de savoir, c'est avant tout dans les extrémités que brille l'originalité, la justesse et la vérité du travail, la supériorité du maître, en un mot. Décapiter une œuvre de ce genre, lui couper les jambes ou les bras, c'est plus que la déshonorer, c'est la détruire dans sa partie la plus vitale, dans sa distinction, dans sa noblesse, toutes choses que l'imagination du spectateur est impuissante à restituer. Ici point de regrets de ce genre; notre colosse de Mégare est trop franchement archaïque pour qu'il perde beaucoup à n'être pas complet. Sa mutitation n'est un sérieux malheur que pour l'archéologie; au point de. vue de l'art, on peut en prendre son parti.
Quel est, au juste, l'âge de cette sculpture? Nous n'oserions le dire; mais on ne risque rien à remonter très-haut. C'est de l'archaïsme de bon aloi, sans supercherie possible. Nous n'en dirions pas autant du petit Mercure en bas-relief qui porte le numéro 10. Ce vieux style, un peu mesquin et maniéré, a donné lieu, sous l'époque romaine, à bien des contrefaçons, tandis que jamais la mode n'a remis en honneur quelque chose qui ressemb)e à ce torse. Le prix de. la découverte est dans l'extrême rareté et l'évidente vétusté de l'œuvre. On peut se hasarder à dire que c'est un des plus anciens fragments de sculpture grecque jusqu'à présent connus.
M. François Lenormant y voit un Apollon Pythien, et les raisons qu'il en donne sont tout au moins plausibles. Il se fonde sur l'opinion de Letronne et de Panofka en matière d'Apollons archaïques, et sur l'analogie frappante qu'on remarque en effet entre ce colosse et deux antiques célèbres, la statuette du cabinet Pourtalës, dite de Polycrate,et la statue trouvée par M. de Prokesch à Ténée, près de Corinthe, et conservée maintenant au musée de Vienne. Notre dessein n'est pas de disserter à ce sujet. Déterminer à quel personnage appartient un torse absolument