ne connaissait pas l'humeur hautaine du barbier, s'arrêta devant sa porte et offrit de lui vendre la charge de bois que portait son âne. Schelfa, qui n'achetait ses provisions qu'en grand, ainsi qu'il convenait à un homme de son importance, trouva la proposition fort impertinente, et résolut de jouer un tour au pauvre diable pour lui apprendre à mieux s'adresser une autre fois. Il convint du prix, et le marché conclu, il ajouta: Il est bien entendu qu'à ce prix, tout le bois que porto ton âne est à moi. Sans doute, répliqua le bûcheron; et ayant déchargé sa bourrique, il tend la main pour recevoir son paiement. Ote donc aussi le bât, lui dit le malin barbier il m'appartient, puisque tu m'as vendu tout le bois que portait la bête. Le bûcheron, tout stupéfait, allait protester; mais le barbier fait enlever le bât par ses garçons, paie le bûcheron et le pousse hors de la maison. Celui-ci court chez le cadi pour demander justice; mais il avait contre lui le texte précis de la loi, et il fut débouté. En vain le bûcheron porte sa plainte d'instance en instance, partout le même résultat. Enfin il se résout à faire une dernière tentative auprès du calife même. Un vendredi donc que celui-ci se rendait à la mosquée, il se jette à ses pieds et lui expose son affaire. Le calife déclare qu'il ne peut rien faire pour lui, attendu que la loi n'admet pas d'interprétation et qu'elle doit être exécutée à la lettre. Après avoir prononcé cette sentence, il fait approcher le bûcheron et lui parle quelque temps tout, bas. Sur quoi celui-ci sc retire tout joyeux, après s'être trois fois profondément incliné devant le souverain maître des croyants.
Peu de jours après cet événement, le bûcheron s'arrête de nouveau devant la porte du présomptueux bar-